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l’hommeLes divisions de la ville | Christian Topalov

Les divisions dela ville àShanghai(XIXe-XXe siècles)Christian Henriot et ZhengZu’anp. 157-189

Texte intégralShanghai offre un cas d’espèce singulier pour l’étudedes « divisions de la ville ». Bien que toutes les villespuissent revendiquer une spécificité, Shanghai compteau nombre des cités qui se sont développées à l’époquecontemporaine sur la base d’une segmentation trèsmarquée de leur territoire. Nombre de cités d’Asie ontfait l’expérience du colonialisme et d’une structurationde leur espace fondée sur la ségrégation. Bien qu’unetelle ségrégation ne fût pas absolue dans la plupart descas, on distinguait bien souvent la « ville indigène » deson pendant colonial, désigné par des termes différents

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De la ville fortifiée à la métropoleinternationale : fragmentation,expansion, intégration

selon les villes et les pays. L’absence de désignationexplicite ne préjugeait d’ailleurs nullement de la réalitéde la ségrégation spatiale (Delissen 2000). On retrouveà Shanghai ce moule commun, porté à un haut degrépar l’existence pendant près d’un siècle de concessionsétrangères qui ont laissé une trace, encore perceptiblejusqu’à nos jours, dans l’espace et dans les esprits.Ce chapitre examine la manière dont les « divisions del’urbain » ont été rendues en chinois, en prenant laville de Shanghai comme champ d’enquête. Notreanalyse n’aura donc pas une portée générale,applicable à toutes les villes de Chine. Néanmoins, sicertains termes sont spécifiques à Shanghai, toutes lesexpressions communes du vocabulaire de l’urbain serencontrent dans cette ville. Nous présenteronsd’abord un bref historique du développement de lagrande métropole du bas-Yangzi. Nous étudieronsensuite les mots appliqués aux grandes divisions del’espace urbain au cours des deux derniers siècles.Enfin, nous nous attacherons à cerner le vocabulairené de l’intervention du pouvoir, notamment à la suitede mesures de réforme territoriale ou administrative,et celui qui est issu de la langue vernaculaire, enmettant en lumière les manières qu’ont ses habitantsde percevoir l’espace urbain.

À la veille de son ouverture forcée par les puissanceseuropéennes en 1845, Shanghai est un centrecommercial prospère qui abrite entre 300 000 et350 000 âmes. La ville tire sa richesse du commercedu coton, que la région environnante produit en

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abondance, et de son rôle de plate-forme d’échanges etde transbordement entre les provinces de l’intérieur etles autres régions côtières. Elle se situe cependantencore derrière Suzhou, le principal centre urbain de larégion du bas-Yangzi. Les effets conjugués des ravagescausés par la révolte des Taiping (1851-1864) – Suzhouest rasée – et de l’ouverture du port au commerce avecl’étranger renversent définitivement la hiérarchieurbaine de la région. À l’arrivée des Occidentaux,Shanghai est constituée de sa partie centrale, protégéepar une longue muraille circulaire, et de faubourgsplus ou moins développés, essentiellement au sud et àl’est, le long des rives du fleuve Huangpu (fig. 1). Laplus grande partie de la population vit à l’intérieur dela ville fortifiée, parcourue de multiples canaux, oùsont concentrés tous les bâtiments officiels et lesprincipaux temples. Les faubourgs sont composésd’habitat plus ou moins précaire, d’ateliers divers etd’entrepôts.Le destin urbain de Shanghai change avecl’implantation successive à sa périphérieseptentrionale, des concessions anglaise (1846),américaine (1848) et française (1849). Les deuxpremières ont fusionné en 1863 pour donner naissanceà la concession internationale, tandis que la concessionfrançaise optait pour la préservation de son autonomiepolitique et territoriale. Situées à l’origine sur desterrains agricoles et des marécages, les concessions sesont étendues à plusieurs reprises. Alors qu’elles nereprésentaient qu’une infime partie de la zoneurbanisée et de la population d’origine, les concessionsont connu un développement soutenu au point desurpasser les quartiers chinois en surface et enpopulation vers 1910, voire dès le tournant du siècle.L’expansion urbaine de Shanghai ne s’est toutefois pas

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limitée aux concessions étrangères. Des quartiersnouveaux sont apparus au nord et à l’ouest desconcessions, en territoire sous juridiction chinoise. Lenoyau de ces quartiers était les villages environnants,progressivement assimilés, mais dont on retrouveclairement la trace dans la trame urbaine (Ged 1997).Pendant plusieurs décennies après l’implantation desconcessions étrangères, l’espace urbain de Shanghai aressemblé à une mosaïque en trois morceaux, quis’ignoraient mutuellement. Le rapprochementinexorable de leurs frontières respectives, lié àl’urbanisation de leurs territoires, a entraîné unefusion progressive de cet espace urbain segmenté pourdonner naissance à la ville de Shanghai (Johnson1995 ; Meyer 1985). Toutefois, pendant près d’un siècle(1849-1943), les trois principales composantes de lacité – concession française, concession internationaleet municipalité chinoise – ont été administrées demanière indépendante, selon des règles différentes (ousans règles) et sans le moindre effort sérieux decoordination. L’espace sous juridiction chinoise s’esttrouvé écartelé entre le pôle d’origine – la ville fortifiée– et les nouveaux quartiers du nord (Zhabei, Hongkou)et de l’ouest. Les concessions étrangères sont devenuesle véritable cœur de la ville, tandis que la ville fortifiée– la muraille est rasée en 1912 – était marginalisée etravalée au rang de simple quartier.

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FIG. 1. Shanghai : la vieille ville fortifiée et sesfaubourgs vers 1870.

Shanghai a vécu sur ce mode d’administrationtripartite jusqu’à la fin de la guerre sino-japonaise enaoût 1945, même si les concessions ont étéformellement rétrocédées au régime chinois decollaboration en juillet 1943. Les années de guerrecivile qui ont suivi n’ont pas permis à la ville deprendre un caractère marqué qui se distingue dupassé, bien que des plans ambitieux aient été dresséspar le pouvoir nationaliste victorieux (MacPherson1995). L’année 1949 marque un second basculementfondamental, mais à l’exact opposé de ce qui s’étaitproduit après 1842. Le régime communiste quis’installe adopte une politique délibérémentanti-urbaine, les villes étant perçues comme des lieuxde consommation et de dissipation des richesses

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matérielles produites par les masses laborieuses. Lesnouveaux dirigeants reprochent aussi à Shanghai,outre cette tare fondamentale portée au plus hautpoint, son péché originel, sa naissance issue d’uneunion honnie avec les puissances impérialistes. La villeest soumise à un régime drastique de reconversion encitadelle industrielle révolutionnaire (Howe 1993).Le régime communiste a repris de son prédécesseurnationaliste la conception d’une municipalité à deuxniveaux, une zone urbaine restreinte et une large zonerurale. A la différence de son prédécesseur, toutefois, ilen a fait des zones quasi étanches. La mise en placed’un système rigoureux de contrôle de la population,dûment enregistrée comme « urbaine » ou « rurale »,se traduit par la disparition progressive de toutemobilité résidentielle entre les deux parties de la ville,et plus encore entre la ville et les zones ruralesextérieures à la municipalité. Avec la confiscation de laquasi-totalité du parc immobilier et l’institution detickets de rationnement pour tous les biens essentiels,la population perd toute liberté de mouvement.L’emploi, le lieu de résidence, le rattachement au « précarré » urbain – un statut privilégié – relèventdésormais du pouvoir politique et de sa bureaucratie.Les mesures de contrôle des autorités n’empêchentcependant pas un accroissement régulier de lapopulation, résultat d’une démographie vigoureusejusqu’au milieu des années 1970. Pendant les trentepremières années du régime, la configuration généralede la ville a peu changé, sinon à ses marges, avecl’érection en grappe de barres d’immeubles destinéesaux nouveaux prolétaires.La fin de l’hibernation urbaine s’est amorcée au débutdes années 1980 avec l’extension des réformes ausecteur moderne de l’économie et, par suite, aux villes.

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Dénominations et divisions de l’espaceà Shanghai

À Shanghai, le dégel a été particulièrement lent. Lamétropole a manqué le premier train de réformes fauted’une direction ambitieuse et visionnaire, faute aussid’une autonomie que lui a longtemps déniée le pouvoircentral (Henriot 1991a). Le véritable réveil s’estproduit après 1990 avec, sur le plan urbain, l’adoptiondu vaste projet de développement de Pudong. Enl’absence de moyens de franchissement du fleuve, larive orientale du Huangpu était restée à l’état dejachère urbaine, malgré l’existence d’installationsportuaires et de quelques cités ouvrières (Williams1995). Dès lors, c’est toute la ville qui a été prise d’unefrénésie de démolition et de construction. Leshabitations anciennes disparaissent par quartiersentiers. Des milliers de tours et de gratte-cielremodèlent non seulement la ligne d’horizon, maistoute l’organisation de l’espace urbain. Les repèrespassés s’effacent et font place à un univers physique etsymbolique inachevé, incertain et fluctuant. Ladernière décennie écoulée a davantage bouleversé ladonne urbaine que les quatre décennies de socialismetriomphant, voire que les trente glorieuses du premierdécollage urbain (1919-1949)1.

Nous examinerons dans cette partie les registres determes employés pour désigner les partiesconstitutives de la ville, qu’il s’agisse du langage« informel » ou des dénominations qui ressortissent aulangage officiel de l’administration. Ces deux registresse croisent sans s’interpénétrer totalement. Pour lapériode antérieure à 1949, nous étudierons commentles différents locuteurs – Chinois et Occidentaux –

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La ville fortifiée

désignaient les espaces où ils vivaient et où les« autres » vivaient. Force est de constater que, bienqu’il y eût des recoupements, liés au recours aulangage officiel, les termes utilisés respectivement parchaque groupe renvoyaient à une conception différentede la ville, de la même ville.

La ville fortifiée constitue le bloc urbain originel qui adominé Shanghai pendant des siècles. La muraille,érigée au XIIIe siècle, n’avait pas seulement unevocation politique et de défense, elle instituait de faitl’espace urbain. Dans la Chine impériale, la muraillesymbolise l’élévation d’un centre urbain au rang de« chef-lieu » d’un comté (xian). C’était un privilègeexclusif accordé par le pouvoir central. Lesmonographies locales (difangzhi) du XVe au XVIIIe

siècle ne font mention que de xiancheng (chef-lieufortifié), qui désigne le centre administratif du comtéprotégé par sa muraille (cheng). Les cartes ne font pasencore mention de faubourgs. Au XIXe siècle, levocabulaire qui désigne cet espace et ses autres partiesconstituantes est issu du temps long et reflète lamanière dont les traits physiques majeurs de la villeont imprégné le langage. L’élément distinctif parexcellence reste la muraille qui enserre la ville, ou plusexactement le « compartiment » (chengxiang) àl’intérieur de la muraille. Celle-ci délimite l’intérieur etle dehors, le « dans la ville » (chengxiang nei) et le« hors la ville » (chengxiang wai), la « vraie » ville etses faubourgs. Il est difficile de dater l’apparition deces quartiers extérieurs car les cartes officiellesomettent délibérément les faubourgs (fig. 2). Aux yeuxdes mandarins, la ville, c’est-à-dire le siège du pouvoir

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que sanctionne le privilège de la muraille, n’existe qu’àl’intérieur de celle-ci. Dans les représentationscartographiques produites par les élites locales, enparticulier les « gazettes locales », les faubourgs sonten revanche bien pris en compte (fig. 1), mais leurdatation reste problématique.Les témoignages sur la vie dans la ville fortifiéeopèrent toujours la distinction entre l’intérieur (nei) etl’extérieur (wai) pour désigner un lieu particulier. Lescartes chinoises produites à la fin du XIXe siècle ontprogressivement fusionné les deux notions pourdésigner la ville dans son ensemble (Shanghaichengxiang neiwai), à l’exclusion des concessionsétrangères2. Le terme est devenu une expression figéequ’utilisent par exemple les notables locaux quimettent sur pied en 1905 la première administrationmunicipale chinoise. Celle-ci s’appelle Chengxiangneiwai zong gongchengju (Bureau général deconstruction des rues de la cité). Le terme est resté enusage jusqu’à la destruction de la muraille en 1912.Ensuite, la distinction entre « dedans » et « dehors »n’ayant désormais plus lieu d’être, elle a disparu. Enoutre, l’emprise croissante des concessions a miné lestatut même de cet espace.La croissance de la métropole, en particulier celle desconcessions, entraîne une redistribution des rôles etdes appellations. Les termes nouveaux quiapparaissent pour désigner des espaces spécifiques àl’intérieur de la ville sont parfois liés à des évolutionspolitiques ou institutionnelles. Dans les quartiers nord,les notables tentent au tournant du siècle de prendreen main l’administration urbaine que néglige labureaucratie impériale et que menacent lesconcessions. Au sud de la rivière Suzhou, deuxhameaux, Laozhao (vieille écluse) et Xinzha (nouvelle

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écluse) ont donné naissance à un embryon de quartierau début du XIXe siècle. Ils ont été incorporés à laconcession internationale en 1899. Pour prévenir unenouvelle extension, les notables locaux forment en1900 un organe d’administration des quartiers « aunord de l’écluse », donnant naissance à une nouvelledivision pérenne de l’espace urbain, « Zhabei ». Au sudde la ville fortifiée, les faubourgs acquièrent uneidentité distincte et sont de plus en plus souventappelés « Nanshi » (marché du sud), par opposition à« Beishi » (marché du nord), qui désigne initialementles concessions, puis Zhabei (Shanghai zhinan 1914)3.L’espace intermédiaire — les faubourgs de l’est, le longde la rivière —, est désigné du nom de « Shiliupu » (lesseize boutiques). Progressivement, pourtant,l’ensemble urbain méridional tend à se fondre en uneseule entité indistincte qui ne s’oppose plus qu’auxconcessions4. Ainsi, au début des années 1920,« Nanshi » désigne toute la zone située au sud et à l’estde la concession française, y compris l’ancienne partiefortifiée5. « Shiliupu », bien que resté en usage, n’aplus désigné qu’une partie de « Nanshi ».

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Fig. 2. Shanghai : la vieille ville fortifiée et sesprincipaux édifices vers 1840.

Les différentes parties de l’espace urbain sousjuridiction chinoise étaient toutes désignées par untoponyme dont la source était le nom du villageprincipal du lieu, noyau du nouveau quartier. AinsiHongkou, Xujiahui, Xinzha sont autant de hameauxqui ont été grignotés, puis absorbés. Hongkou, qui estinclus dans la concession américaine, ou Xujiahui,base des missionnaires jésuites, sont restés desquartiers à part entière, alors que Xinzha a perdu touteexistence propre pour se fondre dans la trame urbaine.On pourrait citer bien d’autres noms de villages encoreprésents au milieu du XIXe siècle qui n’ont laissé, aumieux, qu’un nom repris plus tard par l’administrationmunicipale chinoise pour désigner un arrondissementurbain. Au tournant du siècle, la ville sous juridictionchinoise est constituée de deux entités urbainesmajeures, Nanshi, l’ancienne ville fortifiée et ses

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faubourgs, au sud et Zhabei au nord.Certaines expressions ont connu des fortunes plusdiverses, sans toutefois réussir à pendre racine. Ellessont nées spontanément, plutôt qu’à la suite d’uneintervention du pouvoir politique. On peut citer danscette catégorie les quatre expressions « Hudong »(Shanghai-est), « Hubei » (Shanghai-nord), « Huxi »(Shanghai-ouest) et « Hunan » (Shanghai-sud). Dansces termes, hu est un mot ancien qui désigne à l’origineune sorte de piège à poissons et qui désigne le lieu oùs’est érigé Shanghai6. Seules les trois dernièresexpressions ont reçu une onction officielle, mais à desépoques différentes : « Hunan » en 1927-1937, pourdésigner le grand arrondissement urbain du sud, et« Huxi » en 1937-19457. « Hubei », qui désignait àl’origine les concessions, puis les quartiers au nord desconcessions, réapparaît brièvement pendant la guerrepour désigner l’un des arrondissements du nord de laville. « Hudong » évoquait les quartiers nord-est de laconcession internationale. De fait, ces termesdésignaient des espaces trop vagues pour fairevraiment sens, d’où leur caractère changeant etéphémère.La manière dont les Occidentaux désignent la villechinoise ne recèle pas la même variété de termes. Aumilieu du XIXe siècle, lorsqu’ils s’établissent au nord dela ville fortifiée, le terme le plus usuel est celui dewalled city, dont le sens est tout à fait neutre. C’estcelui qui est utilisé sur la plupart des cartes del’époque. Un second terme est employéconcurremment, celui de native city, qui renvoie cettefois à un distinguo plus net entre « nous » et « eux »,entre Occidentaux et indigènes. L’expression est enpartie paradoxale car la population des concessionsétait constituée à près de cent pour cent par des

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Les concessions étrangères

Chinois. Toutefois, dans l’imaginaire colonial, les unsbénéficiaient des bienfaits d’une administrationmoderne, tandis que les autres vivaient dans un espacepour lequel le terme d’« indigène » se suffisait àlui-même. Sur nombre de cartes produites par lesOccidentaux, la ville chinoise, avec ou sans sesfortifications, n’est tout simplement pas représentée.Un trait circulaire définit un espace blanc dénomménative city ou « ville chinoise » (fig. 3). Il va de soi que,comme pour les Chinois, l’expression walled city aperdu sa raison d’être après l’arasement de la muraille.Les cartes, en revanche, continuent de représenterShanghai comme si les concessions en étaient la seulepartie pertinente.

On retrouve la même dichotomie dans les manièresdont les Occidentaux et les Chinois désignaient lesconcessions étrangères, un terme lui-même connoté etbiaisé comme on le verra plus loin. Au début, le termeconventionnel zujie (concession) n’est pas utilisé. LesChinois lui préfèrent l’expression yichang (espace desbarbares), tant dans la langue courante que dans lesdocuments officiels. Bien que le terme n’ait pas uneconnotation méprisante dans la langue chinoise, lesOccidentaux se sont émus de ce qualificatif et ontdemandé son abandon. Après 1858, les documentsofficiels n’en font plus mention, mais elle subsisteencore longtemps dans le langage, avant d’êtresupplantée par yangchang (espace des Occidentaux)8.Ce dernier terme a été décliné avec divers qualificatifs,en particulier shili yangchang (espace des étrangers dedix li)9 qui est resté, jusqu’à aujourd’hui, une référenceobligée à Shanghai pour désigner les concessions

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étrangères du passé. Un autre terme, yangjingbang, aaussi servi à désigner l’espace occupé par lesétrangers : c’était le nom du canal qui séparait les deuxconcessions. Dans la seconde moitié du XIXe siècle,jusqu’au comblement du canal en 1916,« Yangjingbang » constitue une métaphore courantedans la presse et les livres pour nommer lesconcessions étrangères (Wang 1870). Il convientd’ajouter « Beishi » (marché du nord), évoqué plushaut, ou « Beili » (espace du nord) et « Hubei »(Shanghai-nord), termes éphémères qui disparaissentpour ressurgir au XXe siècle, désignant alors lesquartiers situés au nord… des concessions (Zheng1999 : 78-80).Le terme officiel, zujie, s’est toutefois imposé dans lalangue commune. Il faut relever d’emblée qu’ilvéhicule un sens très différent de celui qu’ont adoptéles Occidentaux. Zujie signifie littéralement « territoirecédé en location ». Il n’implique aucune cession deterritoire. Les résidents occidentaux étaient desoccupants pro tempore, même si les termes des traitésne fixaient pas de limite au bail. Le terme zujie anaturellement été décliné, selon l’époque, en fonctiondu nom de l’occupant principal (Yingzujie ou Yingjiepour Concession anglaise, Meizujie ou Meijie pourConcession américaine, Fazujie ou Fajie pourConcession française), avant de se fixer définitivementvers 1899 sur la simple dicho tomie entre « Fazujie »(Concession française) et « Gonggong zujie »(Concession internationale)10. Le terme de concessionanglaise est toutefois resté en usage au début du XXe

siècle, de même que « Hongkou » (« Hongkew » enanglais) pour désigner la concession américaine.

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FIG. 3. Plan de la Concession française de Changhai[Shanghai] (1934).

Chez les Occidentaux, les termes employés expriment àl’inverse leur volonté d’inscrire fermement leurprésence sur le sol chinois. Les Anglo-Saxonsemploient le mot settlement, tandis que les Français,plus péremp-toires encore, parlent de concession. Or ilne s’agit ni de l’un, ni de l’autre. Settlement renvoietrès clairement à une « installation humaine » – pourprendre un terme du registre actuel – mais de typecolonial. Le settlement était le préalable à lacolonisation d’un territoire « libre de population ». Laconcession traduit de manière plus nette l’acquisitionde territoire « concédé » à l’occupant. Or les termesformels inscrits dans les traités, « leased territory » ou« territoire à bail », certes un peu lourds, sont reléguésdans le registre diplomatique et juridique. Au cours dela phase initiale d’installation des concessionsétrangères, le domaine français s’est acquis une

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réputation sulfureuse en raison d’une concentrationd’établissements comme les maisons de jeux, lesfumeries d’opium et les maisons de tolérance. Lamunicipalité en a tiré une bonne part de ses revenuspendant quelques années (Henriot 1997 : 311-313).Cette notoriété peu glorieuse lui a valu le sobriquet de« Frenchtown » dans la presse de langue anglaise etmême dans la correspondance diplomatiquebritannique. Le terme désignait indéniablement unespace mal policé. Il a rapidement disparu de la langueécrite avec la réorganisation de la concession françaisesur des bases moins contestables. Un dernier espaces’est introduit dans la langue, tant en chinois qu’enanglais ou en français, pour désigner les extensions defacto des concessions au-delà de leurs limitesformelles, à l’ouest et au nord de la ville, dans lesannées 1920. Toutefois, les routes extérieures ouextra-settlement roads (traduit littéralement yuejiezhulu quyu en chinois) ne désignaient en fait quel’extension occidentale, zone résidentielle parexcellence des riches marchands occidentaux.L’extension nord, habitée par la communautéjaponaise, n’était pas incluse dans cet espace mental,sauf pour les Chinois pour qui il y avait bien un doubleempiètement sur leur territoire.Les grands repères spatiaux qui viennent d’êtreénoncés sont ceux qui structuraient la perception del’espace urbain à Shanghai, avec des registres parfoiscommuns, parce que issus d’un vocabulaire techniqueou politique, mais parfois aussi très divergents. Sur lesens même des mots, la divergence de sens est toutaussi remarquable. Le fait le plus notable estcependant cette forme d’exclusion mutuelle qu’ontrouve de manière caricaturale dans l’expressioncartographique, mais aussi dans le binôme « indigènes

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Le nouveau Shanghai

/ Occidentaux » pour les étrangers ou « hua (chinois) /yang (étranger) » pour les Chinois. Bien que lapopulation chinoise fût dominante dans tous lesquartiers de la ville, ses habitants en avaient une cartementale articulée autour de l’opposition « entre nous /entre eux ». Enfin, comme nous le verrons plus loin, onnote aussi une différence fondamentale entreOccidentaux et Chinois dans la manière de se repérerdans l’espace. Pour les premiers, les rues, avec leursnoms propres et leurs numéros, constituent le pointd’ancrage essentiel. Pour les seconds, les édificespublics, les parcs, et toutes sortes d’éléments distinctifs– cela peut être un grand magasin – fournissent lesmarqueurs qui guident les pas des citadins. Mais, pourtrouver un médecin en urgence ou une maison close,mieux valait bien connaître sa géographie locale !

La richesse de vocabulaire qui caractérisait le Shanghaiprérévolutionnaire a fait place à un registre plus banalet largement standardisé. De nombreux référentsspatiaux ont disparu, soit qu’ils aient été détruits(temples, guildes), reconvertis (champ de courses,temples) ou rebaptisés pour être plus conformes àl’ordre nouveau. De fait, les divisions administrativesse sont progressivement imposées aux esprits et à lalangue. Les termes nouveaux qui sont apparus pourdésigner des espaces spécifiques à l’intérieur de la villesont liés le plus souvent à des évolutions politiques ouinstitutionnelles. Ainsi l’ancienne ville fortifiée,devenue « marché du Sud » (Nanshi) a perdu son auracommerciale pour être rangée au registre de « vieilleville » (jiuchengqu ou laochengqu), comme on dirait le« Vieux Lyon », mais sans la connotation sympathique

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que véhicule l’expression en français (Huang 1995 ;Jiang 1995 ; Chen 1995). La « vieille ville » évoque lacongestion des voies, un habitat insalubre, lasurpopulation. Elle est opposée à l’image des xincun(nouveaux villages), qui sont construits à partir desannées 1950 pour éliminer les taudis et les bidonvillesou pour absorber la croissance démographique(Shanghai shi penghuqu… 1965). Plus récemment, lapropagande officielle a promu haut et fort les huayuanjumin xiaoqu (quartiers-jardins de résidents), symbolede la nouvelle réno-vation urbaine, mais le terme n’apas fait florès dans le langage commun.Après 1949, une expression est apparue spontanémentau sein de la population, reprise ensuite dans les écritsuniversitaires, pour différencier deux grands espaces.Cette expression oppose le « coin d’en haut » (shang-zhijiao) au « coin d’en bas » (xiazhijiao), le nord-est etle sud-ouest de la ville, sa zone industrielle et sa zonerésidentielle. Les deux coins ne sont pas égaux : aupremier les pollutions sonores et chimiques dans unquartier densément peuplé, hérissé de barresd’immeubles, sans espaces verts ; au second unetranquillité relative, un habitat individuel (même s’ilest surpeuplé) et les espaces verts, les bonnes écoles etles meilleurs hôpitaux. Le « coin d’en haut »correspond au grand quartier industriel historique deShanghai, tandis que le « coin d’en bas » n’est autreque l’ancienne concession française, dont l’héritage etles avantages ont été en partie préservés au profit de lanomenklatura locale. Une autre dichotomie, opposantcette fois les quartiers situés de part et d’autre dufleuve Huangpu, a vu le jour avec le lancement du pland’aménagement de la nouvelle zone de Pudong(Pudong xinqu) en 1990. Une nouvelle opposition, néedu génie de la bureaucratie, se situe désormais entre

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« Puxi » (À l’ouest du fleuve), qui désigne toutl’ensemble urbain d’origine, et « Pudong » (À l’est dufleuve), le nouveau Manhattan local en devenir Lepremier terme de ce nouveau binôme n’a pas pris dansla langue vernaculaire, ni même dans la presse, et restel’apanage des documents officiels et d’articlesscientifiques. Sa faiblesse principale réside dans le faitqu’il évoque un espace flou et indifférenciéarbitrairement opposé à une zone qui n’évoquait pas, ily a peu encore, un espace urbanisé. Le second,« Pudong », était au contraire une notion bien ancrée11

– l’au-delà agricole du fleuve, la réserve verte de la ville(fruits et légumes) – même si elle fut affublée du titrede « nouvelle zone » (il serait plus correct de dire« nouvel arrondissement » au regard de la hiérarchieadministrative chinoise, mais sa taille démesurée –500 km2 – appelle plus volontiers le terme de zone).On a essayé ici de brosser un rapide état des lieux destermes employés pour nommer les principaux espacesqui structurent la ville et qui reflètent leur perceptionpar ses habitants. En un siècle et demi, l’éventail desmots s’est élargi et diversifié, avant de s’étioler avecl’endormissement de la ville après 1949. Les termes lesplus connotés, souvent en lien avec un caractèrephysique (canaux, muraille) ou symbolique (lieux deperdition), ont disparu avec ce qui leur avait donnéune raison d’être. De plus en plus, le vocabulaireofficiel s’est imposé à la langue de tous les jours, mêmesi toutes les greffes n’ont pas pris. Jusqu’en 1949, laperception de l’espace urbain par la populationchinoise est resté profondément ancrée dans unsystème de marqueurs physiques que le pouvoirrévolutionnaire a ensuite presque systématiquementdétruits. Seuls les parcs ont survécu à l’acharnementiconoclaste qui a effacé temples, lieux de culte, guildes,

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Divisions administratives etperceptions de l’espace

Territoire municipal et administration urbaine

maisons de thé, et autres lieux de la sociabilitéchinoise.

La Chine n’a pas de tradition historiqued’administration municipale, bien qu’elle ait été sansconteste la première société urbanisée, et à un hautdegré, de la planète. Sous l’empire, le territoire étaitdécoupé en sheng, fu, dao et xian, termestraditionnellement rendus en français par« provinces », « préfectures », « circuits » et« comtés »12. Chacune de ces entités territoriales avaità sa tête un représentant de l’Etat chargé d’administrerla population, d’assurer la sécurité, de collecter l’impôtet de dispenser la justice. Cette forme d’organisationde l’espace ne faisait pas de distinctions entre villes etcampagnes. Il n’y avait pas de « municipalités » en tantqu’entités administratives. Au contraire, le territoired’une même cité était bien souvent partagé entre deuxcomtés. Ainsi le territoire de Shanghai avant larévolution de 1911 était partagé entre le comté deShanghai et celui de Baoshan. La ville de Cantonrelevait des comtés de Panyu et de Nanhai. Il n’y avaitaucune forme d’autorité municipale. À la fin du XIXe

siècle, un changement s’amorce avec le rôle croissantde l’intendant de circuit (daotai) qui fait office,notamment aux yeux des résidents étrangers, de« maire ». D’autre part, cette période voit aussiémerger des instances spontanéesd’autogouvernement à l’initiative des élites lettrées etmarchandes locales (Elvin 1969 et 1974). Néanmoins,

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avant le XXe siècle, on ne peut pas parlerd’administration municipale en Chine.Sous l’empire, il n’y avait pas de divisionadministrative formelle de la ville, hormis ladistinction, évoquée plus haut, entre territoire sousjuridiction chinoise et concessions. Au XIXe siècle, il nesemble pas davantage y avoir eu d’« arrondissements »ou autres divisions spatiales. Toutefois, comme ilfallait bien lever l’impôt et enregistrer la population,des cartes ont été dressées qui montrent une divisionde l’espace en seize pu (boutique), dont quatorze àl’intérieur de la muraille et deux à l’extérieur13. Il s’agitd’une dénomination qui recouvre en fait le systèmetraditionnel du baojia dans les campagnes, qui avaitpour seul objet d’enregistrer et de compter leshabitants dans un territoire donné. Il existait aussi àcette époque des notables locaux, appelés dibao(garants des terres), qui faisaient fonction de« notaires » dans une zone délimitée. Les transactionsfoncières étaient enregistrées auprès des cesreprésentants informels de l’administration impériale,choisis sur la base de leur notoriété comme relais entrel’État et la population. Au sein de la seule cité murée deShanghai, il y avait plusieurs dibao, qui connaissaientparfaitement leur portion de territoire dont la surfaceétait nécessairement limitée. Bien que ces personnageseussent reçu l’onction des autorités, qui ensurveillaient l’activité, la zone qui se trouvait sous leurjuridiction informelle n’avait pas valeur de divisionadministrative. Ils ne détenaient eux-mêmes aucunpouvoir officiel au-delà de la validation des titres depropriété foncière. Les divisions – en pu ou dibao –n’avaient donc pas de fonction d’administrationurbaine et ne constituaient pas une organisationformelle de l’espace14.

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Il faut attendre le début du XXe siècle pourqu’apparaissent des formes officielles de divisionadministrative de la ville. Ces instances nouvelles, quidécoupent et définissent l’espace urbain, vontengendrer aussi une recomposition du vocabulaire. Lespremières sont associées à l’installation d’instancesmunicipales plus ou moins formalisées dans lesconcessions étrangères. À Shanghai, les concessionsinternationale et française ont connu des extensionssuccessives en quatre ou cinq vagues entre 1849 et1914. Pour administrer les questions d’ordre public,d’hygiène et de construction, les autorités desconcessions ont divisé leur territoire en districts(concession internationale) ou secteurs (concessionfrançaise) qui portaient des noms indiquant soit leurlocalisation dans l’espace (« Central », « Eastern »,« Northern », « Western »), soit le nom descommissariats de police qui leur étaient attachés(concession française). En chinois, ces divisions étaientrendues par un même caractère, qu, qui désigne une« zone » délimitée, mais de taille indéterminée. Ces« zones » constituent sans doute la première référenceexplicite à une division administrative du territoireurbain en Chine.L’instauration d’un tel système est plus tardive dans lereste de la ville. Après la formation du gouvernementnationaliste en 1927, Nankin (la capitale) et Shanghaiont été désignées « municipalités spéciales » (tebieshi)(Henriot 1991b). Il n’y avait alors pas d’autresmunicipalités. Un texte réglementait l’organisationadministrative et spatiale de ces deux cités15. Toutefois,bien qu’il fût fait mention dans le chapitre II de cesrèglements du « territoire municipal » (shi quyu), il nes’agissait que de la délimitation de ses frontièresextérieures. Le règlement ne faisait pas mention de

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délimitation d’entités au sein de la ville. Trois ans plustard, le gouvernement national a promulgué deuxnouveaux textes : la Loi d’organisation desmunicipalités spéciales (tebie shi zuzhifa) et la Loid’organisation municipale (shi zuzhifa)16. Du fait deleur portée générale, aucune de ces deux lois nedéfinissait de limites territoriales générales, mais ellesne prévoyaient pas davantage de modalités de partagedes villes en arrondissements ou autres subdivisionsde l’espace.Finalement, en 1932, le gouvernement central a reprisces deux textes pour les fusionner en une Loid’organisation des municipalités (shi zuzhifa)(Zhonghua minguo… 1937 : 270-276). Ce nouveautexte, au contraire des précédents, exposait de manièretrès détaillée les modalités de division de l’espacemunicipal et les organismes qui leur étaient attachés.Ainsi une ville devait être divisée en qu(arrondissement), qui étaient eux-mêmes subdivisésen fang (« quartier »). Ces derniers étaient à leur tourpartagés en yu (« section ») et en ling (îlot). Les qu etles fang étaient dotés d’organismes administratifs(qugongsuo et fanggongsuo) et d’organesreprésentatifs en principe élus (assembléed’arrondissement et assemblée de quartier). Le termeemployé pour désigner les arrondissements qu’était lemême que celui utilisé dans les concessions étrangèresde Shanghai et dans les villes chinoises à l’heureactuelle. Les fang devaient représenter un dixièmed’arrondissement.En réalité, ce système n’était pas qu’une simpledivision administrative de l’espace, il était aussi conçucomme un système de contrôle et d’enregistrement dela population (Henriot 1991 b : chap. II). Laréglementation municipale du régime nationaliste

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intégrait la division du territoire urbain au système degestion de la sécurité publique. Les ling et les yu neconstituaient pas tant des unités territoriales que desgroupements de population. Selon la loi, un lingcomportait cinq foyers, soit vingt à trente personnes,avec un chef de ling. Un yu comptait cinq ling, soitcent à cent cinquante personnes, avec un chef de yu.Un fang comportait vingt yu, soit deux mille à troismille personnes. En réalité, ce système idéal n’a jamaisété mis en œuvre. Le gouvernement municipal del’époque rien avait pas les moyens sur le plan politiqueet organisa-tionnel. En outre, il apparaît clairementque ces « quartiers » n’étaient pas des entitésnaturelles, mais bien des constructions administrativessans fondement social. Le seul élément tangible quel’on puisse retirer de cette analyse est le soucirécurrent des autorités chinoises d’instaurer dans lesvilles des systèmes d’encadrement de la population17.À défaut d’organiser le territoire municipal selon lescanons de la loi, le gouvernement municipal chinois deShanghai a découpé son espace en septarrondissements urbains (qu) et en dix comtés ruraux(xian). Les arrondissements de Zhabei (Zhabei qu) etNanshi (Hunan qu) formaient les deux hémisphères decet espace urbain auquel on a adjoint les margesurbaines qui grignotaient encore à peine les cinqautres arrondissements classés en zone urbaine(Pusong, Yangjing, Yinxiang, Fahua, Caojing).Shanghai offre le premier exemple, en Chine, deformation d’une municipalité (shi) dotée d’un cœururbain (la « vraie » ville) et d’une large périphérierurale, néanmoins administrée comme une partieintégrante de la ville. La distinctionarrondissement/comté (qu/ xian) soulignait unedifférence de statut du point de vue administratif, mais

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ne posait aucun obstacle à la mobilité de la population.Chaque arrondissement avait un nom propre fondé surun toponyme (Zhabei, Nanshi et le principal villagedans chaque comté). En 1929, toutefois, lamunicipalité met en œuvre un ambitieux pland’urbanisation avec la création ex nihilo d’un nouveau« centre civique » (shi zhongxin : un termehabituellement tendu pat « centre-ville » en chinoiscontemporain) à la périphérie nord-est de la ville. Ceshi zhongxin est élevé au rang d’arrondissement sousce même nom (ibid. : ch. VII).Cette structure a prévalu jusqu’en 1949 sansmodification majeure, sinon dans la taille desarrondissements, redécoupés à chaque changement derégime, et leur dénomination, cependant toujoursappuyée sur un toponyme18. Pendant l’occupationjaponaise (1937-1945), les puissances occidentales ontdû rétrocéder leurs concessions aux autorités chinoisesde collaboration. Celles-ci, soucieuses d’effacer de lalangue toute référence à ce passé, rebaptisèrent laconcession internationale « arrondissement n° 1 »(diyiqu) et la concession française « arrondissementn° 8 » (dibaqu). L’expression avait été créée par lamunicipalité précédente, mais n’avait jamais étéutilisée que dans ses documents internes. La villecompte alors six autres arrondissements désignés pardes numéros ou de grand repères géographiques :Centre (shi zhongxin), Nord (Hubei), Ouest (Huxi),Pudong nord (Pudong bei), Pudong sud (Pudong nan)et Nanshi.Avant la République, l’administration impériale avaitinstauré le système dit du baojia, qui était une formed’organisation de la population à des fins de contrôlesocial. Néanmoins, son application était très inégalemême dans les campagnes et, dans les villes du sud du

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pays, notamment Shanghai, il ne semble pas qu’il aitété sérieusement mis en œuvre19. Les études récentesd’histoire urbaine n’en font pas mention. Ce systèmen’a toutefois pas été oublié par les régimescontemporains. Pendant l’occupation japonaise, lesautorités de collaboration ont, sous l’injonction del’armée japonaise, instauré ce système dans les villesqu’elles contrôlaient. Il reprenait dans les grandeslignes la trame des dispositions de la loi de 1932. Seulsles noms ont changé (jia, bao, lianbao). À Shanghai,l’ensemble du territoire municipal, concessionsétrangères comprises, a été soumis à ce régime destinéà prévenir tout acte de résistance à l’occupant. Desentités territoriales et humaines nouvelles ont ainsi étécréées à partir de blocs d’habitations (un îlot au centrede quatre rues principales). Le système a été maintenu,sans grande efficacité, par l’administration nationalisteaprès 1945. Celle-ci a par ailleurs procédé à unnouveau découpage des arrondissements qui rayaitdéfinitivement de la carte les anciennes concessions.Ces espaces « fonctionnels » n’ont jamais pris dans lelangage usuel de la population qui, hormis sesréférents spatiaux traditionnels, se définissait parrapport aux arrondissements officiels.De l’exposé qui précède, il apparaît que dans latradition administrative chinoise un même mot a été leplus souvent employé pour désigner un espacedélimité au sein de la ville : qu (« zone »). Dans toutesles grandes villes, ce terme désigne ce que nousappelons en général « arrondissement » en France. Lesentités situées au niveau inférieur n’ont en général paseu de reconnaissance officielle. On a vu plus haut qu’ils’agissait plutôt de petites communautés humainesconstituées artificiellement, par une opérationcomptable, à des fins de contrôle social. Ces systèmes

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n’ont jamais vraiment bien fonctionné, hormis durantla période 1942-1945. Après 1949, le terme qu a étérepris avec le même sens d’arrondissement, mais il aconnu une large extension de son champ d’utilisation.Dans les années 1980, avec l’accélération de lacroissance urbaine, le retour à la planification urbaineet l’augmentation des problèmes sociaux de tousordres, des formes variées de « zone » sont apparues20.Elles relèvent toutes du registre de la langueadministrative et ne sont pas utilisées, sauf s’il s’agitd’une zone bien identifiée (zone de développementscientifique et technique, équivalent approximatif denos zones industrielles).L’organisation administrative de l’espace urbain dansles villes chinoises depuis 1949 n’a pas connu degrands changements. Les grandes villes comportentdes arrondissements urbains (shiqu) et desarrondissements ruraux (xianqu) : on retrouve lemême terme qu, auquel est accolé tantôt « ville » (shi),tantôt « comté » (xian), la division territoriale de baseen Chine, en dehors des villes, pratiquement depuis lesorigines. Les grandes municipalités sont donc restéesdivisées en arrondissements (qu) dont le nombre, ausein d’une même ville, a pu varier dans le temps. Pékincomptait vingt arrondissements dans les années 1950contre dix à l’heure actuelle (et huit arrondissementsruraux). Au début, les noms propres ont été abolis etremplacés par des numéros, comme dans les villesfrançaises. Très vite, toutefois, chaque arrondissementa retrouvé un nom propre (Beijing shiyong… 1992 :8-9). À Shanghai, les arrondissements ont étéfusionnés après 1954. La ville n’en compte plus quevingt-deux contre trente en 1949, avec toujours ladistinction entre arrondissements ruraux (jiaoqu) etarrondissement urbains (shiqu)21. Ce dernier terme

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désigne aussi la zone urbaine dans son ensemble. Leschangements principaux opérés par le pouvoir ontconsisté en reclassements successifs de rural en urbainet inversement. La tendance générale a cependant étél’inclusion de patries croissantes de l’espace rural dansle territoire « urbain », même si les zones concernéesn’avaient aucun caractère urbain (le dernier exempleen date est la « nouvelle zone de Pudong »,massivement rurale).Au niveau inférieur, chaque arrondissement est diviséen jiedao, terme qui signifie « voirie, rue » dans lalangue commune. Depuis 1949, il désigne un espacedéfini par ses rues, d’où le choix du terme de « circuitde rues » pour le rendre en français22. Selon la tailledes villes, la taille des qu varie, tandis que celle desjiedao varie non seulement en fonction de ce mêmecritère, mais aussi au sein d’un même qu. Il semble queplus la densité de population est élevée, plus la surfacedu circuit est petite. En général, il y a cinq à six jiedaopar qu. Les qu comme les jiedao sont dotés d’organesadministratifs, gouvernement d’arrondissement(quzhengfu) et bureau de circuit (jiedao banshichu).Pour l’administration municipale, le partageadministratif du territoite se limite à ces deux niveaux.En dessous de ceux-ci, il existe une dernièresubdivision qui, dans les villes du nord, s’appelle pian(lot). Un lot est un territoire avec des limites définies,correspondant à une unité du cadastre, mais il n’estpas doté d’organe administratif. Dans les documentsofficiels (manuels, guides, annuaires statistiques,encyclopédies urbaines, etc.), le « lot » n’est presquejamais mentionné23.Cela étant, la Chine a une particularité : en dehors desservices admnistratifs, le pouvoir est représenté pardes organes à caractère politique. Au niveau de

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L’espace dans la vox populi

l’arrondissement comme à celui du circuit de ruescorrespond un comité du parti qui double l’appareilmunicipal. Au-dessous du niveau des circuits, lesrésidents sont regroupés en jumin weiyuanhui (comitéde résidents) qui correspondent à une unité territorialebien définie. Cet espace n’est pas une instanceadministrative, mais son rôle est considérable, aussibien pour les questions de gestion des services deproximité que pour encadrer – surveiller – lapopulation (Guo 1992). Ce sont des entités de taillerelativement homogène en termes de population, maistrès variables en termes de surface24.

Quelle que soit la culture – chinoise ou occidentale –,les habitants d’une ville ne s’inscrivent pas dans unespace vide. Une ville représente pour tout individu unvaste domaine d’opération. L’identité d’un individu estliée à son lieu de résidence (famille, voisins, services deproximité, etc.), mais au sein de la ville, il est amené àfréquenter d’autres espaces (emploi, achats, loisirs,etc.). Il se peut qu’il se rende aussi dans certainsmagasins, restaurants, installations sportives, lieux deloisirs, maisons de thé, cinémas, temples, etc., qui luisont particulièrement familiers. De tous les lieux, celuiqui lui est sans doute le plus familier est son« quartier ». La question qui se pose est donc double :quels référents spatiaux les Chinois utilisaient-ils àShanghai ? Quelle conception ou appréhensionconcrète du « quartier » possédaient-ils ? Comment lelangage a-t-il exprimé ces notions au cours du temps ?Du point de vue officiel, la notion de « quartier »n’existe pas en Chine, à la différence des villesfrançaises où le terme de quartier fait partie intégrante

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du lexique officiel des municipalités. Selon l’époque, laville se divise en arrondissements (qu), en circuits(jiedao), etc., mais la notion générique de quartiern’apparaît pas. Du point de vue de l’analysesociologique, le contenu social concret respectif desarrondissements ou d’autres entités est difficile àmesurer. Les divisions administratives ou politiques nenous disent pas grand-chose sur la perception concrètede l’espace et de l’environnement urbains par leshabitants eux-mêmes. La principale difficulté d’unetelle recherche réside dans le manque de matériauxhistoriques. La voix du peuple laisse souvent peu detraces dans les archives. Nous avons approchél’identité territoriale des habitants au sein de la ville àtravers la presse, les guides, des textes littéraires ouencore les mémoires de résidents célèbres. Ces sourcesse recoupent incontestablement sur la manièred’exprimer les « repères » et le « quartier ».Au XIXe siècle, à l’intérieur même de la ville fortifiée, ilne semble pas que les habitants distinguaient desentités particulières ou quartiers. Les références à unespace donné étaient exprimées par la mention d’uneconstruction, le plus souvent un bâtiment, mais aussiun pont ou une porte. On a indiqué plus haut que leslieux du pouvoir étaient concentrés à l’intérieur de lamuraille, de même que les principaux temples etnombre de guildes professionnelles. Ces constructionsétaient autant de repères qui désignaient en général unespace plus large que la construction elle-même. Ainsi« Chenghuangmiao » désigne tout autant le temple dudieu protecteur de la ville, que le parc formé par sesjardins, ou tout le quartier alentour. On pourrait aussiciter « Jiumudi » ou « Kongzimiao » (temple deConfucius). En l’absence de marquage des rues et descanaux, les ponts constituent aussi un élément

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essentiel du repérage spatial. Enfin, les portes quipermettent le franchissement de la muraille aux quatrepoints cardinaux sont aussi utilisées comme unréférent spatial essentiel car elles valent pourl’intérieur et l’extérieur de la muraille25. Au début duXXe siècle, avec le comblement croissant des canaux,les ponts ont perdu toute signification. Les portes, enrevanche, bien qu’elles aient disparu, ont continué deservir de référent spatial jusqu’en 1949.Cette logique s’est appliquée à tout l’espace urbain àmesure qu’il s’est développé. Sous la République, il sedécline toujours en entités topony-miques qui ontd’ailleurs perduré bien après l’établissement demunicipalités modernes et n’ont véritablement disparuqu’après 1949. La ville chinoise a donc des« quartiers » que la vox populi définit et désigne àpartir d’un « haut lieu » qui en constitue le centre. Lanotion neutre ou commune de « quartier » n’existepas ; il n’existe que des « lieux ». L’objet de référencepeut être extrêmement varié dans sa nature et sonétendue : hôpital (renji yiyuan), imprimerie (mohaishuguan), parc, temple (jing’ansi), champ de courses(paomachang), centre d’amusement (da shijie), quais(nan matou, caojiadu), etc. Ces référents spatiaux nesont pas constants dans le temps. Ils peuventdisparaître, à la suite d’une restructuration urbaine,avec l’entité qui lui a donné naissance ou au contrairelui survivre bien après sa disparition (par exemple les« portes » de la muraille disparue, divers ponts commeBaxianqiao, Nichengqiao, Xieqiao, Tilanqiao).Il y a un renouvellement régulier des divisions del’espace dans la carte mentale qui guide les habitantsde Shanghai. Certains termes se sont enracinés. Leplus célèbre est « Waitan » ou « Bund » pour lesétrangers. Ces termes, encore en usage aujourd’hui,

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désignent la longue promenade, autrefois dotée d’unparc, le long du fleuve Huangpu. Jusqu’en 1949,Jing’ansi (temple de Jing’an), Beizhan (gare du Nord),Baxianqiao (pont des Huit Immortels), Laoximen(vieille porte de l’Ouest), Xujiahui, Shiliupu sontautant d’espaces clairement définis, quoique sansexistence formelle et, pour certains (Baxianqiao,Laoximen), sans la moindre trace d’existence physique.Le processus est partout le même : la formation d’unespace construit autour d’un lieu, parfois en relationavec l’émergence d’un marché (shi), à mesure que lanappe urbaine s’étend vers l’extérieur ou qu’uneexcroissance surgit spontanément et se fond ensuitedans le tissu urbain. Xujiahui était un village éloignédes marges urbaines lorsque les jésuites s’y installenten 1851 et contribuent à un développement urbainlocal. Le village est devenu ensuite un quartier deShanghai26.À l’époque contemporaine, dans la presse ordinairecomme dans les revues académiques, on ne trouveguère de trace de la langue populaire, ni même souventde reflet de la vie ordinaire des citoyens. De ce fait, iln’est pas très facile de rencontrer les termes employéspar les citadins eux-mêmes, sinon par une enquêteorale directe qui était hors de notre portée. Sur la based’une approche limitée aux sources écrites, il sembleque trois termes soient principalement utilisés pourdéfinir l’espace dans lequel les individus s’inscrivent :arrondissement (qu), rue (lu) et ruelle (lilong). Selon lapersonne à laquelle on s’adresse et son degré, supposéou réel, de familiarité avec la ville concernée, on aurarecours à l’un ou l’autre terme.L’arrondissement est toutefois une unité plutôt vasteavec laquelle un résident ne peut guère s’identifierpleinement. Son univers de référence se situe à un

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niveau plus réduit. Dans le cas de la Chine, le« circuit » pourrait apparaître sans doute comme unespace de référence, un « quartier ». En réalité, lapopulation ne considère pas le « circuit » comme un« quartier ». Le jiedao a des fonctions administratives(enregistrement de la population, formalitésadministratives diverses, contrôle de la natalité, etc.).Il a aussi une dimension économique puisqu’il existedes entreprises de circuit (jiedao qiye). Certainsauteurs soulignent l’importance de cette dimensionéconomique, notamment les multiples stands deproximité qui servent la population résidente (Li1994). De fait, un jiedao n’est pas très grand : à Pékin,il compte en moyenne six mille résidents (Beijingshiyong… 1992 : 15-18), à Shanghai, il en compte dixfois plus. On concédera que, à ce niveau élevé, on nepeut guère parler de « quartier », même s’il s’agitd’entités de petite taille (2,1 km2 en moyenne). Lescitadins ont aussi parfois recours au terme de pian(lot), qui correspond à un espace nettement plus réduitque le circuit. Son utilisation dans le langage courantest avérée dans le nord de la Chine seulement. Il n’estjamais utilisé de façon générique, mais en associationavec un toponyme : « J’habite le lot Untel ». Un« quartier » a toujours un nom propre, un« identifiant » qui souligne le lien d’appartenance de lapopulation à une zone donnée.Si l’on se penche maintenant sur un échelon plus petitencore, on trouve un espace qui représente à notresens le véritable point focal de l’identité urbaine. Pékinest célèbre pour ses hutong, Shanghai l’est pour seslilong (appelés aussi longtang avant 1949)27. Il estincontestable que ces ruelles, qui désignent non pasune simple allée mais un ensemble de venellesunissant plusieurs blocs d’habitations, représentent le

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lieu premier d’identification des citadins à la ville.Même si cette unité est de taille plus réduite, c’est cellequi s’approche le plus du « quartier » au sens françaisdu terme. En effet, un lilong n’est pas qu’un simpleespace dans la ville, c’est aussi une communauté. Il y aune culture du lilong, une architecture propre à cetteforme d’habitat, un mode de vie qui amène lesrésidents à des formes variées d’interaction. Enfin,chaque lilong porte un nom qui lui est propre, choisipar le promoteur ou par les habitants, qui est censé leplacer sous de bons auspices : ruelle du bonheur, de lafélicité, du bonheur du peuple, etc. Le choix est infini28.Lorsqu’on se plonge dans la littérature populaire, dumoins celle d’avant 1949, les adresses sont toujoursformulées par référence à un lilong. Qu’il s’agisse dedésigner le domicile, des lieux de plaisirs, lescoordonnées d’un médecin, de décrire la vie d’unefamille, c’est le lilong ou ses déclinaisons locales quiressort toujours. Un lilong constitue un espace réduitoù vivent quelques dizaines de familles. Bien que cetteunité spatiale soit testée essentielle après 1949, elle n’ajamais acquis un véritable statut aux yeux desautorités. On peut y voir le reflet de leur désintérêtpendant longtemps pour la « vie de quartier », sinon àdes fins de surveillance. Dans la Chine contemporaine,l’organisation sociale qui a prévalu jusqu’à présent estplutôt l’unité de travail (danwei), devenue l’instance deréférence pour la vie quotidienne grâce aux servicesdivers qu’elle apportait à ses membres (logement,soins médicaux, produits alimentaires, etc.). Cettestructure est en passe de disparaître et entraîneracertainement une modification des habitudes descitadins. Toutefois, les lilong sont en train dedisparaître eux aussi, sous les coups des pelleteuses.Dans les revues académiques et la presse officielle

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actuelle est apparue une nouvelle notion, celle de« petite zone résidentielle » (zhuzhai xiaoqu, juzhuxiaoqu), pour désigner de nouveaux espaces urbains.C’est un terme qui semble avoir été emprunté au russelorsque, dans les années 1950, par suite de l’influencesoviétique sur la planification urbaine et l’architecture,la Chine a adopté ce concept de « petite zone »(xiaoqu). À cette époque, il faisait référence à des citésouvrières ou à de petits ensembles résidentiels. Plustard, cette expression s’est diffusée dans les documentsofficiels. Dans les années 1960 et 1970, en revanche,avec le ralentissement de la croissance économique etle gel de la planification urbaine, la notion de « petitezone » est tombée en désuétude. Avec les années 1980,elle est réapparue avec force et s’est imposéerapidement dans la littérature spécialisée et officielle(Wang 1994). Ce nouvel engouement pour les « petiteszones » a pris sa source dans les politiques de réformeurbaine des années 1980, quand des « zonesrésidentielles » ont été sélectionnées par le ministèrede la Construction pour servir de points d’appui à unenouvelle politique de réhabilitation29. Celle-ci a suscitél’intérêt et la curiosité des chercheurs30 et toutes lesrevues d’urbanisme ou d’études urbaines y ontconsacré de nombreux articles31.Ces « zones » pourraient s’apparenter aux« quartiers » français, mais un examen de leurstructure et de leur contenu social révèle cependanttrès vite que ces entités ne sont pas des communautésspontanées. On a bien là un terme qui relève dulangage des chercheurs et des praticiens del’urbanisme. D’autre part, d’après la documentationexaminée, ces « zones résidentielles » ne sont pas des« quartiers » pris au hasard. Leurs limites sont définiespar les autorités : en général il s’agit d’un groupe

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d’immeubles sur un espace délimité par quatre ruesprincipales, un « block » au sens américain du terme.La plupart sont en fait des grappes de grandsensembles et d’immeubles de taille diverse quicorrespondent aux cités ouvrières construites à lapériphérie32. À Shanghai, le terme de « zonerésidentielle » a aussi été introduit par les techniciensde l’urbanisme, mais le terme le plus usuel pour lescités ouvrières reste l’appellation xincun (nouveauvillage) adoptée à partir des années 1950.Ces « zones résidentielles » n’ont pas de limitesprécises, ni de surface de référence33. Leur populationse situe autour de cinq cents à un millier de foyers(1 500-2 800 personnes) (Liu 1994, Wang 1994, « Baxiaoqu… » 1995)34. On peut imaginer que dans un telespace circonscrit, les résidents ont des relationssociales et des intérêts communs. Dans certaines cités,les habitants ont été impliqués dans le processus deconception de la rénovation de leur « zonerésidentielle ». À travers des enquêtes et des courriers,les résidents ont exprimé des avis et des suggestions.En même temps, les « zones résidentielles » sont desunités définies arbitrairement par le pouvoir politiqueet bureaucratique, dont l’objectif est d’améliorer lesconditions de vie de la population concernée et de fairede ces quartiers des zones modèles en y impliquant lesmeilleures entreprises de construction et en y utilisantles meilleurs matériaux (Zhu & Shi Guozhen 1995). Les« zones résidentielles » sont donc avant tout unecomposante de chaque municipalité dans son effort derénovation urbaine, mais elles ne constituent pas devéritables quartiers.La tendance la plus récente en matière de catégories del’urbain est le développement de quartiers de villas(bieshu), un terme apparu dans les années 1920-1930

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pour désigner un habitat individuel bourgeois. Dansles années 1990, c’est un phénomène nouveau quirévèle l’enrichissement croissant de la société urbainechinoise et un désir d’échapper à l’habitat collectif depiètre qualité. Ces espaces sont bâtis principalement àla périphérie où les terrains sont moins chers et où lacongestion est moindre. Ils prennent la forme delotissements dans lesquels les maisons sont construitesà l’identique, pratiquement sans espace extérieurprivatif. Ce qui les distingue des lotissements français,c’est cet entassement des habitations et leur isolementdu reste de la ville. Les villas sont situées dans unespace protégé par un mur et gardé jour et nuit.Résider dans un tel ensemble constitue une marque dedistinction sociale qui n’est accessible qu’à uneminorité. Le terme bieshu (villa), qui désignait unehabitation unique, évoque désormais une enclavehuppée, au regard des conditions normales d’habitaten Chine. Le phénomène est encore trop récent pouravoir marqué fortement le langage. De manièreintéressante, il est peu présent dans la presse officielle,alors que tout résident urbain identifie immédiatementle statut social de celui qui indique qu’il réside dansune bieshu. Ces lotissements de villas portent aussitoujours un nom qui renforce leur identité.L’étude des catégories urbaines à Shanghai révèlefinalement deux strates bien distinctes, le vocabulaireofficiel et le langage populaire. Le premier s’est imposéau second avec la mise en place d’institutionsmunicipales au XXe siècle et des interventionscroissantes dans la gestion de l’espace urbain. Lalangue vernaculaire a subi un processus paradoxald’enrichissement à travers l’assimilation d’une partiedu registre officiel et d’appauvrissement parl’effacement progressif des référents spatiaux

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traditionnels. Alors qu’il y a eu une cohabitation desdeux registres de langue longtemps après l’installationd’administrations municipales, l’instauration durégime communiste entraîne la disparition totale destermes et des modes de nomination des divisions del’espace urbain. Ce phénomène résulte de choixpolitiques, mais aussi d’un processus de modernisationqui appelle un recours à des repères mieuxstandardisés (rues, numéros).Le langage des chercheurs ou des bureaucratesvéhicule de nombreux termes qui se réfèrent à desunités spatiales, mais il s’agit d’entités administratives.Ils soulignent l’implication constante et croissante desautorités dans des tentatives récurrentes pour établirdes systèmes de surveillance et de contrôle de lapopulation. La terminologie officielle ne reflète querarement la dimension sociale des quartiers, enparticulier après 1949. Les termes auxquels ontrecours les citadins dans le langage de tous les jourspour exprimer comment ils appréhendent eux-mêmesleur environnement proche ne se laissent pasfacilement saisir. Au niveau le plus élémentaire, il y aune certaine continuité. Les citadins chinois ont unsens du « quartier », mais ce sens est lié à un espacerelativement restreint, le quartier de ruelles (lilong).Cette forme urbaine est condamnée à Shanghai. Pourceux qui habitent dans une zone de grands ensembles,l’expérience est singulièrement différente, bien qu’ellen’exclue pas une perception et une expression de cetenvironnement.Un trait marquant de la culture urbaine chinoise, dansla dénomination des parties de l’espace urbain, est lelarge usage qui est fait de la toponymie. Les« quartiers », les divisions de l’espace n’existentvéritablement qu’à travers des noms de lieux dont la

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Références bibliographiques

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Notes1. Pour une étude générale et une appréhension visuelle desmutations de Shanghai dans la longue durée, on consulteraHenriot & Zheng 1999.

2. Voir notamment la carte intitulée « Shanghai chengxiang

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neiwai zujie beishi lüetu », qui figure dans Ge 1876, éd. 1989.

3. Le nom « Zhabei » a été remplacé en 1906 par « Beishi »(marché du nord), qui désignait anciennement, on l’a vu, lesconcessions étrangères. « Beishi » n’a pas pris racine et dès 1911,« Zhabei » s’impose définitivement.

4. On notera que l’institution qui a précédé le Chengxiang neiwaizong gongchengju (Bureau général de construction des rues de lacité) établi en 1905 s’appelait Nanshi malu shan-hou gongchengju(Bureau de construction et d’entretien de la route de Nanshi). Cebureau n’était concerné que par le faubourg à l’extérieur de lamuraille, où a été construite une route dans le prolongement duBund (fronton de la rivière) aménagé par les concessions le longdu Huangpu. Nanshi ne désigne bien alors que cette partieextérieure de la ville.

5. Le terme est resté dans la langue, puisqu’il désigne unarrondissement urbain de la municipalité actuelle.

6. « Hu » désigne toujours Shanghai aussi bien dans desexpressions littéraires que dans les documents administratifs,tout comme chaque province chinoise peut être nommée par unseul caractère qui diffère le plus souvent des deux caractèrescomposant leur nom. La ligne de chemin de fer Pékin-Shanghaiest ainsi nommée « jing-hu » (jing pour capitale, hu pourShanghai).

7. « Huxi » (Shanghai-ouest) a été utilisé au milieu des années1930, mais il désignait la partie occidentale de la ville extérieureaux concessions étrangères, soit la zone dite « des routesextérieures ». Le terme a été employé par l’administrationmunicipale chinoise pour désigner certaines de ses installationsdans cette zone. Il a connu son heure de gloire après l’occupationjaponaise lorsque cette partie du territoire chinois est devenueune sorte de no man’s land juridictionnel où ont fleuri casinos,fumeries d’opium et maisons de prostitution. La presse s’en estlargement emparée. L’administration municipale de collaborationa ensuite intégré ce territoire comme l’un de ses arrondissementssous le même nom. Après la guerre, une nouvelle divisionadministrative, assortie de renominations, a évacué le terme.

8. Très exactement, le mot yang désigne la mer, soit enl’occurrence les « gens venus de la mer ».

9. « 10 li » renvoie à l’extension (10 li = 5 km) que représentent

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les concessions au nord de la ville fortifiée.

10. Les concessions anglaise et américaine ont fusionnéofficiellement en 1863, mais elles ont conservé leurs appellationsrespectives jusqu’en 1899.

11. Le terme « Pudong » est répertorié dans les Shanghai xianzhi(monographies locales de Shanghai, préparées sous l’égide desélites ou autorités locales) depuis le début du XVIe siècle, même sila zone se trouve de fait partagée entre deux comtés, celui deShanghai et celui de Baoshan.

12. Bien que les désignations de ces divisions aient évolué dans letemps, de même que leur surface, la structure établie sous ladynastie des Han (IIIe siècle avant J-C), en particulier l’unité debase qu’est le xian, s’est perpétuée jusqu’à nos jours.

13. Carte « chengxiang fenputu » dans Shanghgai xian xuzhi1919. Curieusement, sous la République, ces divisions ont disparu,mais l’expression shiliupu (16 pu) est restée pour désigner lefaubourg oriental, entre la concession française er les faubourgsdu sud.

14. Cette dimension reste difficile, sinon impossible à explorerdans la mesure où les archives impériales n’ont pas survécu ausoulèvement de la Société du petit couteau en 1854 et auxdestructions ultérieures qui ont affecté la ville fortifiée.

15. « Shanghai tebieshi zanxing tiaoli » [Règlement provisoire dela municipalité spéciale de Shanghai], Dongfang zazhi (La Revuede l’Orient), 24, 9 : 101-103.

16. « Tebieshi zuzhifa » [Loi d’organisation des municipalitésspéciales] et « Shi zuzhifa » [Loi d’organisation desmunicipalités], Dongfang zazhi (La Revue de l’Orient), 25, 19 :101-103.

17. Voir plus bas, le baojia.

18. Entre 1945 et 1949, la municipalité compte 16arrondissements urbains et 16 arrondissements ruraux (Shanghaishi nianjian 1946).

19. Voir sur ce sujet Rowe 1979.

20. Naturellement, le terme qu désigne toujours l’échelonadministratif de référence qu’est l’arrondissement. Toutefois,toutes sortes de « zones » coexistent au sein de la ville : zoneindustrielle (gongyequ), zone commerciale (sbangyequ), zone

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touristique (lüyouqu), etc. Lorsqu’il faut créer un néologisme àcaractère technique, c’est encore le mot qu qui est mis àcontribution. Ainsi en va-t-il des zones standard de nuisancessonores (zaosheng dabiaoqu). Le terme de qu s’appliqueégalement à des espaces sans limites territoriales bien définies.On l’utilise ainsi pour parler de « vieille ville » (jiuchengqu ouchengshi jiuqu) et de « ville nouvelle » (xinchengqu) au sein d’unemême cité, sans que cela renvoie nécessairement à des espacesnettement délimités.

21. Le terme jiao signifie « à l’extérieur de la ville ». Dans le cadredes municipalités, il s’est substitué à xian qui désigne uniquementles comtés ruraux. Dans le langage courant, jiaoqu signifie aussi« banlieue », « périphérie », sans connotation autre quegéographique.

22. Nous nous sommes inspirés du terme qui désignait, sousl’empire, l’entité qui regroupait plusieurs préfectures (dao) et quiest rendue par convention en français par « circuit ».

23. Le Guide pratique de la ville de Pékin (Beijing shiqing shouce1994 : 36) ne mentionne les lots qu’en relation avec la rénovationdes quartiers délabrés, qui représentent 202 lots.

24. Voir les cas de Jing’an et de Yangpu dans Henriot & Zheng1999 : 115-117.

25. Il y avait à l’origine six portes (au sud et à l’est, elles étaientdoublées). Entre 1849 et 1911, quatre autres portes ont étépercées. Alors qu’elles portaient chacune à l’origine un nompropre, celui-ci a été remplacé par l’indication de la direction(nord, sud, est, ouest), déclinée en « grandes » (da), « petites »(xiao) et « nouvelles » (xin) pour les distinguer (Zheng 1988 : 7).

26. Ces processus sont très bien décrits dans Zheng 1988, ch. VII.

27. Bien que le terme générique le plus courant soit li, les lilongde Shanghai sont baptisés d’une foule de termes très variés : fang(quartier), long (ruelle), cun (village), lu (hutte), yuan (jardin),zhuang (hameau), zhai (résidence), xiang (ruelle), xincun(nouveau village), huayuan (cour-jardin), bieshu (villa). Cettevariété renvoie aussi aux évolutions de l’habitat, notammentl’émergence de types plus bourgeois.

28. À titre d’illustration, on notera qu’il y avait à Shanghgai 365lilong dont le nom commençait par le caractère yong (éternel).Celui-ci était combiné à 64 caractères différents pour donner

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autant d’appellations de lilong. Néanmoins, les homonymiesétaient inévitables : il y avait ainsi 56 « yong’an » (paix éternelle),29 « yongqing » (bénédiction éternelle), 23 « yongxing »(prospérité éternelle) et 21 « yongji » (félicité éternelle). Oncomprend mieux l’importance de situer le « quartier » deréférence de chaque lilong pour éviter de se perdre (Zheng 1988 :74).

29. Ces quartiers ont été érigés en zones expérimentales où lesautorités tant centrales que locales ont mis en œuvre des mesuresde planification et d’amélioration de l’habitat. Depuis le début decette réforme, le ministère de la Construction a publié deux listesde sites expérimentaux. Il y en a environ 4 000 à travers le pays(Tan Qinglian 1995).

30. Voir Chang 1993 ; Shu 1993 ; Cai 1994 ; Huang 1994 ; Mei1995a et 1995b ; Yang 1995 ; Hong 1995 et les expériences endivers points de Chine rapportées par Chengshi kaifa[Développement urbain], 5, 1995 : 25-28.

31. En 1995, l’Académie des sciences sociales de Pékin a établi ungroupe de recherche chargé d’étudier « la gestion moderne deszones résidentielles des villes chinoises » (Zhongguo chenghsijuzhu xiaoqu xiandai guanli yanjiu). Les activités de ce groupeont été rapportées régulièrement dans la revue Chengshi wenti[Problèmes urbains] et la revue Chengshi kaifa [Développementurbain] a créé une rubrique « Brèves des petites zonesexpérimentales » (xiaoqu shidian jianbao) : voir par exemple 5,1995, p. 44 et 1, 1995, pp. 32-33.

32. Dans quelques villes, les autorités ont inclus des quartiersanciens de lilong dans leurs projets expérimentaux de rénovationurbaine. Mais ce sont bien des exceptions (Zhang, Yang & Tao1995).

33. À Chengdu, un « quartier résidentiel » couvre une surface de52 mu (3,4 ha). Dans une autre ville, la surface atteignait 1,5 km2.Dans la plupart des articles, les auteurs ne donnent que très peud’indications statistiques. D’autre part, il semble que les quartiersdont ils traitent n’ont pas de contenu social, ni d’environnementgéographique (« Ba xiaoqu… » 1995 ; Rong 1995 ; Qin 1995 ; « Zaizhuzhai… » 1995).

34. Naturellement, il y a aussi de grandes « zones résidentielles ».La zone expérimentale de Zhongshan beili à Tianjin ne comptepas moins de 25 bâtiments et 30 000 résidents. Le quartier de

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Wuyancun à Canton regroupe 200 bâtiments et une population de6 445 foyers (environ 22 000 personnes). Dans ces conditions, ildevient difficile de parler de quartier, bien que les grandsensembles puissent aussi former des entités sociales spécifiques(Chang 1993 ; He 1994).

Auteurs

Christian Henriot

CHRISTIAN HENRIOT, historien, Institut d'Asie orientale, Lyon

Zheng Zu’an

ZHENG ZU'AN, historien, Académie des sciences sociales deShanghai

© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2002

Conditions d’utilisation : http://www.openedition.org/6540

Référence électronique du chapitre

HENRIOT, Christian ; ZHENG ZU’AN. Les divisions de la ville àShanghai (XIXe-XXe siècles) In : Les divisions de la ville [enligne]. Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme,2002 (généré le 01 décembre 2015). Disponible sur Internet :<http://books.openedition.org/editionsmsh/1245>. ISBN :9782735116652.

Référence électronique du livre

TOPALOV, Christian (dir.). Les divisions de la ville. Nouvelleédition [en ligne]. Paris : Éditions de la Maison des sciences del’homme, 2002 (généré le 01 décembre 2015). Disponible surInternet : <http://books.openedition.org/editionsmsh/1233>.ISBN : 9782735116652.Compatible avec Zotero

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