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LINGUISTIQUE THEORIQUE - LINGUISTIQUE APPLIQUEE - ENSEIGNEMENT DU BASQUE. Karmele ROTAETXE O. Mon exposé va avoir une allure essentiellement négative et je vous demande de m'en excuser; je me donnerai, en effet, le rôle facile et irritant de celui qui dit ce qu'il faudrait faire, en signalant des lacunes, des absences même concernant nos recherches sur l'extension de la langue basque, car c'est bien de cette nécessité-la qu'il s'agit. Les raisons qui ont dicté mon choix sont de deux types. D'un caté, on constate facilement que notre langue n'est pas en train de s'étendre ni parmi la population du pays, ni parmi la population immigrée de notre communauté au rythme qu'on aurait espéré et souhaité; en outre, ce phénomène est accompagné de pas mal de frustrations chez des personnes fortement motivées au départ. Le deuxième type de raisons concerne les chiffres sur le bilinguisme au pays basque qui ne permettent pas de se faire d'illusions: 7,9% de bilingues en Alaba; 15,1% en Bizcaye; 45% en Guipuzcoa; 11% en Navarre; 34,5% en pays basque Nord (Labourd, Basse-Navarre et Soule) montrent une situation sociolinguistique nettement défavorable au basque. Ceci devrait faire penser que nos efforts doivent tendre non seulement à introduire notre langue dans les domaines sociaux d'où elle a été écartée (problème relié à la diglossie), mais aussi à augmenter le nombre de bilingues en améliorant la rapport entre unilingues (espagnol ou français) et bilingues (espagnol ou français) -basque qui devrait être de 1 pour parvenir à un bilinguisme collectif. Et on est en droit de penser que cet objectif que toute notre communauté doit spécialement assumer est en étroit rapport avec le type d'enseignement que nous saurons proposer. Repenser cet enseignement sur la base d'une programmation scientifique revient aussi à repenser la formation de nos enseignants actuels. C'est là, en effet, un aspect evoqué chaque fois que l'on parle des problèmes reliés à l'enseignement apprentissage d'une seconde langue. Il y a longtemps François CLOSSET avait dénoncé affirmation suivant laquelle le proferreur de langues [1] 465

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LINGUISTIQUE THEORIQUE - LINGUISTIQUEAPPLIQUEE - ENSEIGNEMENT DU BASQUE.

Karmele ROTAETXE

O. Mon exposé va avoir une allure essentiellement négative et je vousdemande de m'en excuser; je me donnerai, en effet, le rôle facile et irritant decelui qui dit ce qu'il faudrait faire, en signalant des lacunes, des absencesmême concernant nos recherches sur l'extension de la langue basque, car c'estbien de cette nécessité-la qu'il s'agit.

Les raisons qui ont dicté mon choix sont de deux types. D'un caté, onconstate facilement que notre langue n'est pas en train de s'étendre ni parmila population du pays, ni parmi la population immigrée de notre communautéau rythme qu'on aurait espéré et souhaité; en outre, ce phénomène estaccompagné de pas mal de frustrations chez des personnes fortementmotivées au départ. Le deuxième type de raisons concerne les chiffres sur lebilinguisme au pays basque qui ne permettent pas de se faire d'illusions: 7,9%de bilingues en Alaba; 15,1% en Bizcaye; 45% en Guipuzcoa; 11% enNavarre; 34,5% en pays basque Nord (Labourd, Basse-Navarre et Soule)montrent une situation sociolinguistique nettement défavorable au basque.Ceci devrait faire penser que nos efforts doivent tendre non seulement àintroduire notre langue dans les domaines sociaux d'où elle a été écartée(problème relié à la diglossie), mais aussi à augmenter le nombre de bilinguesen améliorant la rapport entre unilingues (espagnol ou français) et bilingues(espagnol ou français) -basque qui devrait être de 1 pour parvenir à unbilinguisme collectif. Et on est en droit de penser que cet objectif que toutenotre communauté doit spécialement assumer est en étroit rapport avec letype d'enseignement que nous saurons proposer. Repenser cet enseignementsur la base d'une programmation scientifique revient aussi à repenser laformation de nos enseignants actuels. C'est là, en effet, un aspect evoquéchaque fois que l'on parle des problèmes reliés à

l'enseignement apprentissage d'une seconde langue. Il y a longtemps François CLOSSETavait dénoncé affirmation suivant laquelle le proferreur de langues

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KARMELE ROTAETXE

n'aurait que faire de formation spéciale (1). L'expérience démontreque ceci est faux, ne serait-ce que parce qu'avec une même méthodeet face à un public de caractéristiques similaires les résultats obtenuspar différents professeurs sont souvent opposés. Une autre affirma-tion souvent répétée est celle qui soutient que l'enseignement d'une langueest un art, l'idée sous -jacente étant que «science» et «art» s'excluentréciproquement et que, par conséquent, la science n'a que faire dansl'enseignement des langues. Certes, on ne saurait nier que l'enseignement deslangues comprend certaines variables dont l'importance relative, ou valeur, estdifficilement déterminable, or quantifiable, raison por laquelle cette activiténe peut être simulée par un ordinateur ni réduite á un algorithme. Mais quetoutes les variables ne soient pas contrôlables ne signifie nullement qu'aucuned'entre elles ne le soit. Il y a, par ex., les facteurs qui doivent être pris en lignede compte dans tout enseignement: l'aptitude et la personnalité des étudiants,leur capacité intellectuelle, leur motivation en faveur de l'apprentissage. Cesfacteurs ont fait l'objet de recherches de la part des psychologues del'éducation et à l'heure actuelle certains peuvent être contrôlés. Et puis, ilexiste tout un tas de connaissances sur la nature du langage humain, sur lafaçon dont il est appris et sur le rôle qu'il joue dans la vie individuelle etsociale. Faisant l'objet de recherches de la part des personnes qui s'occupentdu langage, les linguistes, ces matières doivent concerner les questions quisurgissent au moment de la planification et de l'exécution d'un programmed'enseignement de langues. La linguistique fournit un ensemble développé deconnaissances scientifiques sur le langage qui peut guider l'activité duprofesseur de langues. L'objet de cette communication, que je vais centrersur la linguistique appliquée, essaie justement de montrer comment tirer lemeilleur parti de ces connaissances-là. M'étant occupée pendant de nombreu-ses années de l'enseignement non seulement du busque mais aussi d'autreslangues et ayant utilisé des méthodes provenant d'une réflexion en linguisti-que appliquée et des méthodes dans lesquelles cette réflexion n'avait,visiblement, pas eu lieu, je crois, comme beaucoup d'autres, à la nécessité detravailler dans cette activité intermédiaire et scientifique qu'est la linguistiqueappliquée. Mais peut-être, comete le signale S. PIT CORDER (2), pourarriver à une telle certitude il est nécessaire de s'intéresser autant à lalinguistique, science du langage, qu'à cette activité trop souvent sous-estimée(sinon méprisée) qu'est l'enseignement des langues.

1. Le statut de la linguistique appliquée.Quand on accepte que les découvertes et les méthodes de ceux qui

étudient le langage scientifiquement, c'est-à-dire, le linguiste, le sociolin-

1.CLOSSET, Fr.: Didáctica de las lenguas vivas, trad. de la 3 ed. belga por J. Lago, Madrid,1958.

2. Prr CORDER S.: Introducing Applud Linguistics, Harmondsvorth, 1973.

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LINGUISTIQUE THEORIQUE-LINGUISTIQUE APPLIQUEE-ENSEIGNEMENT DU BASQUE

guiste et le psycholinguiste (reliés ces deus derniers au premier, à mon avis,)peuvent aider à résoudre certains problèmes issus au cours d'une planifica-don, organisation et mise en pratique d'un programme d'enseignement deslangues, on est en disposition de faire de la linguistique appliquée. J'emploiece terme dans un sens restreint, car d'autres activités et non seulementl'enseignement se servent de la linguistique appliquée, ainsi la critiquelittérairé ou la thérapie de la parole. Mais, d'autre pan, il faut signaler déjàque la linguistique appliquée, même dans ce sens restreint que j'attribue auterme, et l'enseignement des langues ne sont ni une seule ni la même activité.Par ailleurs, la linguistique appliquée, soit l'application de la connaissancelinguistique à quelque objet (et dans mon cas à l'enseignement) est uneactivité. Il ne s'agit pas d'une étude théorique. La linguistique appliquéeutilise les résultats des études théoriques: c'est donc un «consommateur» ou«utilisateur» mais non pas un producteur de théories. Parler de linguistiqueappliquée c'est se référer à des aspects de l'opération globale d'enseignementd'une langue dans lesquels les décisions sont prises à la lumière de laconnaissance de la nature du langage humain, de la manière dont il est acquis, etde son rôle dans la société. a linguistique appliquée est une disciplineuniversitaire dans la majorité des pays qui nous entourent en rapport avec lalinguistique théorique (3), datant d'environ 20 ou 30 ans. Par ailleurs,l'enseignement des langues –soit relié à la récupération d'une langue domi-née, soit émanant d'un simple désir culturel– étant un fait géneralisé, on peutaccepter le schéma proposé par S. PIT CORDER qui montre les diversesinstances et disciplines concourant à l'opération globale et la place qu'y prendla linguistique appliquée:

Hiérarchie de la planification des fonctions dans l'opération globaled'enseignement d'une langue.

Niveau 1 . . Politique Gouvernement . . . . Si, quelle langue, áqui enseigner.

Niveau 2 . . Linguistique.Sociolinguistique . .. Linguist. Appliq. .. Quoi enseigner,

quand enseigner,combien.

Niveau 3 . . Psycholinguistique.

Pédagogie Professeur de clas-se . Comment ensei-

gner. (4)

3. Pour comprendre l'importance qui lui est accordée dans d'autres «latitudes», je signalece fait symptômatique: S. Pit Corder, tout en étant «Head of the Department of linguistics» Edimbourg est «Professor of Applied Linguistics» dans la méme Université. Cette situation estinimaginable dans le systéme éducatif espagnol, par ex., dans lequel la linguistique appliquée n'apas droit l'existence et la linguistique théorique commence juste il pouvoir constituer unDépartement.

4.PIT CORDER S.: Op. cit., p. 13 (c'est moi qui ai traduit).

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KARMELE ROTAETXE

A remarquer que le premier niveau étant du ressort politique et larécupération du basque constituant aujourd'hui encore un problème politi-que (5), le niveau 2 où se place la linguistique appliquée devrait, ici etmaintenant, être présenté comme un domaine de recherches privilégié. Carnul n'en doute, l'opération de l'enseignement d'une seconde langue seprésentant comme un tout, chacun des niveaux signalés contribue à sonsuccès ou à son échec: la société, representée par les autorités de l'Educationet de l'Enseignement, le linguiste appliqué et le professeur de classe,

2. La contribution de la linguistique.

Parmi les disciplines qui traietent du langage humain, il semble que lapsycholinguistique et la sociolinguistique manquent encore d'appareil théori-que et de méthodes fermes. C'est certainement la linguistique, ou mieuxencore la linguistique théorique en tant qu'étude scientifique du langage (6)qui a développé le plus amplement ses recherches. Science autonome –plusen théorie que dans la mise en pratique de certaines plans d'études supérieu-res–, son caractère scientifique se doit aux caractéristiques d'objectivité, decohérence logique ou rationalisme et à la possibilité de vérification desrésultats qu'elle propose. Sans entrer dans le détail des différents critèresépistemologiques des recherches linguistiques (généralisation inductive, hy-pothèse déductive, induction-déduction), les travaux linguistiques se sontsurtout occupés des descriptions des langues, établissant des grammaires deprédiction dans le cas de l'êcole générative. C'est donc dans son but –fournirdes descriptions des données et en faire connaître les règles– que lalinguistique peut contribuier à l'enseignement, car il est certain qu'il ne peut yavoir de progrès systématique d'apprentissage d'une langue sans référence àla connaisance que la linguistique peut nous en procurer. C'est en définitivel'étude linguistique qui est responsable de déterminer comment décrire ceque nous allons enseigner. Dans ce sens, une contribution égalementimportante de la linguistique à l'enseignement se trouve dans cette zonevague du «quoi enseigner». Il faut, cependant, préciser que cette contribu-tion n'est pas directe et on ne peut oublier que certains linguistes ont déclaréqu'ils ne voyaient pasen quoi leurs recherches pouvaient aider à l'enseigne-ment des langues (7). Et, en effet, le rapport entre la théorie linguistique etl'enseignement ne peur être qu'indirect. La théorie linguistique n'a pas, non

5. Entre atares travaux, cf. le thème de G. BES (et la contribution qui y apparaît deKarmele ROTAETXE) «Planification linguistique et choix de langue» in Artes du Ve Colloque

International de Linguistique Fonctionnelle, Ionnina, 1979, pag. 55-81, concernant la responsabilitéqui revient aux Gouvernements.

6. La précision est de LYONS J.: The Scientific Study of Language, Edinburg, Univ. Press.7. Par exemple, CHOMSKY Noam: Cf. Linguistic Theory, North East Conference on the

Teaching Foreign Languages, cf. aussi la traduction commentée «Théorie linguistique», in LeFrançais dans le Monde -Rev. de l'enseignement du français, 88- pp. 6-10, Paris, 1972.

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L1NGUISTIQUETHEORIE

LINGU1STIQUE APPLIQUEEAPPLICAT 1ON

METHODOLOG1EBESOIN

LINGUISTIQUE THEORIQUE - LINGUISTIQUE APPLIQUEE - ENSEIGNEMENT DU BASQUE

plus, à fournir de critère de sélection ni de critère de présentation du contenud'un programme d'enseignement.

3. La linguistique appliquée comme activité.Ce domaine est justement celui de la linguistique appliquée, activité qui

se reclame de la linguistique car, en toute justesse, il est difficile de concevoirque l'on applique ce que l'on ne possède pas. Son caractère d'intermédiaireentre la théorie et la pratique lui est reconnue par différents auteurs. Ainsi,comme dans le schéma de S. PIT CORDER, dans celui de R. GALISSONpresenté ci-dessous, la linguistique appliquée occupe la place d'une activitéqui introduit les acquis de la théorie (linguistique) dans la méthodologie:

(8)Les idées antérieures ne doivent évidemment pas faire penser que tous

les problèmes de l'enseignement vont être résolus à partir de la linguistiqueappliquée. On peut soutenir, néanmoins, qu'il existe une phase de l'opérationglobale de l'enseignement dans laquelle l'application de la linguistique estrelevante: c'est le moment où les questions ont des réponses linguistiques.On peut distinguer un ordre d'application comportant différentes techniques.Les étapes prévues présentent une hiérarchie de telle sorte que les résultatsde chacune d'elles sont des données input à la phase suivante. Ce sont lessuivantes:

3.1. Description.a description du linguiste qui ne penserait pas à l'enseignement ne

pourrait convenir à la tâche dont nous nous occupons. Il est en effet difficilede juger sur des critères purement linguistiques si une description estadéquate à un public determiné dont la langue maternelle ne soit pas prise enligne de compte. HALLIDAY, distingue, sur ce point, la description quiprovient de l'utilisation de la théorie linguistique de la description qui vise àune application:

«Si la langue, ou le texte, est décrit dans le but exclusif de trouverdavantage sur le langage, ou sur une langue particulière, alors c'est une

8 GALISSON R. : «Que devient la linguistique appliquée? Qu'est-ce que la méthodologiede l'enseignement des langues ?», in Etudes de Linguistique Appliquée n. 7, Paris, 1972.

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KARMELE ROTAETXE

utilisation de la théorie linguistique, mais ce n'en est pas une application.La linguistique appliquée commence lorsque la description a été faite...»(9).

Pour S. Pit Corder, cependant, les différences entre les deus types dedescriptions sont puremente formelles (10).

Il semble que dans l'étape de linguistique appliquée, la description doivetenir compte de critères sociolinguistiques qui permettront de l'appliquerconvenablement aux données relevant de différents registres linguistiques,afin d'obtenir un produit qui soit une description non seulement grammati-cale mais qui tienne compte des traits relevants des dits registres. Les out-putsde cette étape ne représentent qu'un inventaire brut pour la deuxième étape.On peut dire que les résultats de cette première opération répondent à laquestion: quelle est la nature de la langue (registre linguistique dans uneterminologie déjà suffisamment acceptée) qui doit être enseignée?.

3.2. Sélection.A l'intérieur de l'inventaire précédent, doit être faite une sélection dans

le but de dresser un «syllabus» pour l'enseignement.C'est ici que se pose la question «enseigner, quoi?». De fait, les buts

poursuivis lorsqu'on apprend une langue peuvent être très divers (par ex.pour certaines personnes il est nécessaire d'en déchiffrer la lecture en prenantune attitude passive lors de son utilisation; pour d'autres, par contre, c'estl'utilisation de la langue orale le plus important; d'autres cherchent le plaisirdes créations littéraires, etc....) et le critère de sélection est pensé pourrépondre à ces différents besoins. Il est clair que le problème de la sélectiondevrait se poser de façon moins rigoureuse lorsque, comme c'est notre cas, ils'agit d'apprendre une laugue sentie comme propre de la communauté àlaquelle on appartient. Mais, même dans ce cas-là, indépendamment du désirdes étudiants, tout ne doit pas être enseigné en même temps et ne peut pasêtre enseigné en même temps. Indépendamment du choix du registre quipeut intéresser en priorité dans le cas d'une langue dominée, la sélection doits'effectuer en fonction de certains critères comparatifs et qui ne s'excluent pasles uns les autres. Ainsi en tient compte de:

a) l'utilité pour l'enseigné. On choisit ce dont il a besoiu, soit registre,soit variété de la langue qu'il ne possède pas encore. Ce critère est, dans notrecas, intéressant pour les étudiants de langue maternelle basque mais dont lerépertoire linguistique est limité.

b) la différence. Ce critère s'établit par rapport à la langue maternellede l'étudiant. Les différences entre systèmes linguistiques représentent des

9.HALLIDAY, M. A. K.: - STREVENS P. D. and McINTOSH A.: The linguistic Science andLanguage Teaching, London, 1964 (c'est moi qui traduis).

10. Prr CORDER S.: Op. cit. p. 145.

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points délicats dans la salle de classe et on doit, par conséquent, en tenircompte lors de la confection d'un syllabus. Comme le montre l'expérience del'enseignement, le critère de différence peut s'exploiter positivement lorsquele professeur (ou la méthode tirée d'une réflexion) sait tirer parti desinterférences positives (transferts pour U. WEINRICH). En revanche, ondoit beaucoup travailler en classe les points dissemblables dans les deuxsystèmes, cause d'interférences négatives. La prise en compte de ce critère enlinguistique appliquée implique nécessairement la connaissance par égal desdeux systèmes linguistiques –langue source et langue cible– de la part deslinguistes qui élaborent le syllabus. Cela implique aussi que l'on accepte l'idéeque l'apprentissage de toute langue seconde –indépendamment qu'il s'agissede la langue naturelle de la communauté politique à laquelle on appartient–suppose un effort antinaturel pour l'étudiant qui, en réalité, n'a pas àapprendre à parler puisqu'il sait déjà le faire. Dans ce sens et bien qu'on endise, l'apprentissage d'une seconde langue n'est pas comparable à celui quel'enfant réalise de sa langue maternelle. Voilà pourquoi la motivation doitêtre spécialement soutenue en introduisant de manière progressive les difficul-tés qui résultent de la différence et en insistant bien sur ces difficultés-là. Unesommaire comparaison des systèmes linguistiques français ou espagnol etbasque fournit de nombre= exemples de différences qui peuvent être causesd'interférences négatives (formes nominales agglutinées et non existence deprépositions, ordre des mots, flexion verbale, notions aspectuelles et tempo-relles, etc....). Par contre le système phonologique –au moins pour ce qui estde l'inventaire des phonèmes–, présente moins de points différents et est plusfacile à acquérir. (D'ailleurs, parce qu'une langue est foncièrement unemanifestation orale, le système phonologique, contrairement à ce qu'enpensent quelques uns doit être inseigné). Les différences en phonologie sesituent, à mon avis, principalement dans le faits accentuels, mais on peut tirerparti des pauses et des tranches intonatives à peu près communes aux languessource et cible.

c) le troisième critère se réfere à la difficulté. I l ne coïncide pasforcément avec la différence. Par exemple, il peut sembler nécessaired'inclure dans le «syllabus» certains points linguistiques différents entre lesdeux langues, mais on ne peut le faire sans tenir compte de la difficulté quipeut conseiller de remettre ces points-là por des raisons d'économie dansl'apprentissage. Bien qu'en général on ne puisse détecter les faits difficilesqu'arpès observation empirique, certaines caractéristiques de structure peu-vent, à priori, être tenues pour difficiles. Par exemple, pour ce qui est dubasque et de l'espagnol ou français, une simple analyse des formes verbalesbasqués comme «diezadakezu» ou «diezazuket », etc. (formes de potentielNOR-NORI-NORK, soit sujet, compl. proche, compl. indir) fait apparaîtreun nombre si élevé de morphèmes nominaux posposés à la base verbale quel'on peut en déduire des difficultés d'acquisition et, à fortiori, d'utilisation.Dans des cas pareils, le critère de «difficulté» conseillerait de ne pas

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présenter ces formes-là (au début, du moins) et de les remplacer par lesflexions du semi-auxiliare «ahal-izan». Il va sans dire que la prise en comptedu critère «difficulté» ne peut conduire à déformer la structure de la languequ'on enseigne, mais on peut également penser que le verbe basque, parexemple, de morphologie compliquée par rapport à celle du verbe espagnolou français doit être introduit de la manière la moins difficilé possible. Enlinguistique appliquée, on ne peut perdre de vue le but pour lequel ontravaille. L'organisation d'un «syllabus» doit se faire sur la base d'unmouvement allant du général au particulier, introduisant les régles les plusgenérales avant les règles particulières ou les excepcions, ce qui vent direaussi que, dans la mesure du possible, on . doit y présenter les formesnon-marquées avant les formes marquées. Dans ce sens, le syllabus ne devraitorganiser les formes de la conjugaison familiére (hiketa) sans que la présenta-tion totale des formes d'une conjugaison non marquée (formes du «zuka»)n'ait été faite (11). Les limites de cette communication ne me permettent pasde donner d'autres exemples de l'interprétation de ce critère, mais je pensequ'il est d'une grande importance.

On voit que les trois critères presentes relèvent de la comparaison. Elles'avère intralinguale dans le cas a), soit l'utilité; elle est nettement interlingualeà b), soit à la «différence», puisque pour établir celle-ci il faut recourir à lalinguistique contrastive. Pour ce qui est de c), soit «difficulté» , la comparaisonest dite «analyse des erreurs». L'analyse des erreurs étudie la nature des erreurset confirme ou rejette les prédictions de la linguistique contrastive. II va sansdire que dans cette étape que je viens de présenter (Sélection), les différentscritères sont imbriqués et ne s'excluent nullement.

3.3. La troisième étape part des résultats de l'étape précédente pour en(aire des inputs. L'application devient maintenant plus proche de l'activitépratique à laquelle la linguistique doit être appliquée. Puisque tour le matérielne peut pas être présenté en même temps, il s'agit d'établir une bonneprogression. Il faut donc organiser le syllabus et en faire une grammaire del'enseignement, ou grammaire pédagogique, qui peut différer fort de la gram-maire établie par le chercheur linguiste. Dans l'organisation de ces grammai-res, on maintient l'idée maîtresse d'aller du général –qui est presque toujoursle plus rentable dans l'apprentissage– au particulier. Les grammaires pédago-giques sont des instruments à remettre entre les mains des professeurs delangue qui n'ont pu à les remettre aux étudiants. Le processus de convertirces syllabus organisés et ces grammaires en matériel pédagogique ne con-cerne plus forcément la tâche du linguiste appliqué: De toutes façons, lematériel pédagogique dépendra toujours de ce qui aura été choisi ou rejetélors de l'élaboration du «syllabus» par le linguiste appliqué.

11. ROTAETXE, Karmele: «Pronoms personnels et persones du discours dan la languebasque», in Actes du Ve Colloque International de linguistique Fonctionnelle, Oviedo, 1978, pp.244-255.

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4. Enseignement.Le niveau pratique de l'enseignement répond à la question «comment

enseigner?». Le professeur de langue doit connaître la raison d'être de laméthode qu'il emploie afin de s'en servir convenablement. Comme j'ai déjàindiqué, des facteurs pédagogiques et psychopédagogiques caractérisent ceniveau de l'opération globale de l'enseignement et tout professeur de langue abesoin, comme professeur qu'il est, d'une formation adéquate qui Iuipermette d'établir ses fiches quotidiennes de la leçon, de savoir commeritcontrôler et mesurer les acquisitions dans la langue cible, etc... La recherche dufeed-back de la pan du professeur s'avère constamment nécessaire, car l'enseig-nement d'une langue présente le caractére particulier de ne pouvoir languir àaucun moment du temps scolaire qui lui est accordé. Le matériel pédagogiquepeut prendre des formes diverses (sketch, films, diapositives, tableau defeutre, simple méthode directe et orale, etc....), et ce n'est pas parce qu'ondispose d'un matériel sophistiqué que l'enseignement résulte automatique-ment meilleur: d'un matériel quelconque ce que le professeur doit savoir c'estcomment tirer un rendement optimum. De fait, la plupart des stages deformation de professeurs de langue centrent leurs efforts sur les póintsmentionnés. Mais, comme j'ai déjà montré ailleurs (12), on peut admettreégalement (et je ne suis pas la seule à y croire) que le professeur de languen'étant pas un simple praticien, a besoin de posséder quelque connaissance delinguistique. Il est indéniable qu'il lui faut au moins connaître la structure dechacun des systèmes linguistiques auxquels il se trouve constamment con-fronté. C'est lui qui dans sa classe pourra, entre autres choses, éviter les fautesprovenant d'interférences négatives ou tirer profit des positives.

5. Conclusion.Si nous admettons que l'application de la science a quelque chose à voir

avec l'utilisation qui se fait de la connaissance scientifique dans notre activitépratique, alors l'application du savoir scientifique sur le langage et sur leslangues doit avoir quelque chose à apporter à leur enseignement. Cettepréoccupation est majeure dans des pays comme la Grande-Bretagne pourl'anglais qui, pourtant, ne court aucun risque de disparition (13). Chez-nous,où il s'agit de la survie de la langue basque –aujourd'hui officielle– on a,cependant, l'impression que son enseignement ne préoccupe pas ce qu'ilfaudrait. Non seulement les études universitaires n'incluerít point de disci-pline «Linguistique Appliquée»,' mais l'enseignement de la linguistique

12. BILBAO-GOYOAGA, Rosa: (Sous la direction de Karmele ROTAETXE). Mémoire deLicence: Aperçu des problèmes de l'enseignement et de l'apprentissage du français, Université deDeusto, mai 1974 (non publié).

13. Ou en France oú les recherches maintiennent la revue Etudes de Linguistique Appliquée,Paris, et ont abouti á cet excellent ouvrage collectif: MARTINETJeanne: De le Théorie linguistique ál'enseignement de la langla, Paris, 1972.

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KARMELE ROTAETXE

théorique même y est extrêmement sous-estimé ( je me réfere aus plansd'études dans l'Université du Pays Basque qui maintient les plans espagnols).Or, jamais une linguistique particulière –ou, si l'on préfere, une premièreapplication de la linguistique à une langue quelconque particulière– ne saurait,au niveau épistémologique, se substituer aux principes théoriques mêmes. Cesont des recherches différentes qui ne méritent pas d'être tristement confon-dues. C'est un point de réflexion que je voudrais soumettre non pas tant auxAutorités d'EUSKALTZAINDIA qui m'ont donné l'occasion de parleraujourd'hui, mais surtout aux Autorités de notre Université et de notre jeuneGouvernement basque. Je pense que la question mérite d'être sérieusementposée, si nous voulons éviter que les recherches -que nous sommes en trainde mener et dont on nous a parlé au debut de ce Congrès– ne risquent deporter un jour sur une langue marquée par le trait (-vitality). Et c'est parceque je veux espérer que cela n'arrivera pas que je me suis permis dedemander que cette communication, que je termine, soit présentée le jourdestiné aux «Perspectives de recherches futures».

LABURPENABi zioren gatik hautatu dut gai hau: 1) Ez da gure mintzaira hedatzen ari uste eta

nahi genukeen urratsean: Hori dela-ta, hasieran aski motibaturik zirudien bat bainogehiago, bere frustrazioarekin gelditzen zaigu. 2) Elebidunen kopurua ikusi-ta ez duguzeren ametsik egin: 7,9 % Araban, 15,1 % Bizkaian, 45 % Gipuzkoan, 11 %Nafarroan eta 34,5 % Iparraldean. Ez dugu beraz askiko, baztertu duten eremuetaneuskara berriz sartzea (diglosiaten problema hori bada ere), bainan beharko duguoraino elebidunen kopurua emendatu, espainol edo frantses - euskaldun elebiduneneta espainol edo frantses elebakoitzen arteko proportzioa hoberatzeko. Gure gizarteguziari tokatzen zaion helburu hori, ordea, aurketsiko dugun irakaskuntza moldeareninguruan dabil. Zientzien araberako programaketa batetarik behar genuke gureirakaskuntza birpentsatu eta birpentsatu orobat irakasleen formazioa. Mintzaira batenirakaskuntzarako baldintza asko ezin egiaztatuzkoak direla badakit, bainan ez guztiak.Eta linguistikak eskain diezaioke irakasleari, bere bidearen argitzeko baliagarri duen,mintzaira jakintzen inguruko datu jakin zenbaiten moltzo ederra.

Linguistikaren aplikazioaz ariko naiz beraz eta bakarrik irakaskuntzari tokatzenzaion linguistikako aplikazioaz. Teoriazko ikerlanen emaitzak baliatzen ditu linguistikaaplikatuak eta beraz ez du berak teoria berririk sortzen, bakarrik teoria jakin zenbaitditu hustiratzen. Linguistika teorikoaren eta mintzairen pedagogiaren edo didaktika-ren arartekotzat darabilagu (ikus komunikazioaren eskema). Eskema horretan lehenmaila politikari tokatzen zaiola ohartzeko da, euskararen berresurapena politika arazoabaita behin. Bainan irakaskuntzaren plangintzak hiru mailak sartzea eskatzen digu.Linguistikak ere partehartzea beharrezko zaigu, XX. mende honetan guzian, jakintzahorrek baitizkigu ekartzen mintzairen deskribapenerako datuak eta datu haueninterpretapenerako arauak. Linguistikak eman diezaguken jaleaste hori gabe ez duguzeren uste izan edozein mintzairaren irakaskuntzan edo aprendizgoan aurrerapensistematikorik egin daitekeenik.

Linguistika lanari doakio beraz irakasgaiaren deskribapen zehatza egitea, bainateoriaren eta irakaskuntzaren arteko harremanak zeharkakoak baizik ez daitezke izan,beste zientzia sail ararteko batek, hau da linguistika aplikatuak, bereizten dituelakotzteoria bera eta praxia.

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LINGUISTIQUE THEORIQUE - LINGUISTIQUE APPLIQUEE - ENSEIGNEMENT DU BASQUE

Linguistika aplikatuak hiru urrats eskatzen dizkigu:1.° Deskribapena. Gramatika teoriaren arabera bere deskribapena egiterakoan,

sartu beharko ditu gure linguistak, sozio - linguistikako krirerio asko, gizarte jakinhonen edo horren artean delako mintzaira nola darabilten zuzen jakiteko (zer dialektuedo/eta zer erregistro bereizitan). Gramatika deskribapen lan horiek erantzun beharkodiote behin galde honi: «Zer nolako mintzaira dugu behar irakatsi?». Bigartenurratserako, badukegu horrela landugabeko gai nasaia.

2.° Hautapena. Delako ekai nasaiaren artetik hautapen bat egin beharko dugueta «syllabus» iduri bat bereizi. Galdera hau dugu alabaina: «Zer irakatsi?». Parametroaskori begi eman behar zaio: a) zer duen ikasleak baliagarri, lehen bai lehen mintzaahal izateko. b) zer ezberdintasun duen mintzaira berriak ikasleak dakienarekin. c) zertraba bereizi dukeen, ikasleak ezagutzen duen sistema hartarik hain urrun dagonsistema berriak: ezen «Syllabus» delakoa . prestatzerakoan errazenaren ondotikbeharko da jatri zailena eta bakunaren ondotik korapilatsuena. Hiru kriterio hauenoinarriak aurkituren ditugu: a)-rentzat mintzairaren beraren analisian - b)-rentzatlinguistika kontrastatuan - eta c)-rentzat huts era okerren analisian.

3.° Mailkapena. Hirugarrenik irakaskuntzaren gramatika bat prestatzekotan«Syllabus»-aren edukina mailka-mailka jarri behar dugu. «Hautatu den ekaia nolabalia?», hauxe da orai galdea. Pedagogiako tresna bihurtu behar da «Syllabus»-a, edobederen ikusi nola bala daitekeen haten edukina ikasgelan (ikasleriarekilako

harremanak eta irakaskuntza orok dituzkeen problemak hor sartzen dira, psikolinguistika-ren ikuspegitik bereziki). Deus onik egitekotz, linguistika aplikatuaren bidetik sattubehat da. Baina gaur arte, ikuspegi hortatik, euskararen alotrean ez da lanik batereegin. Horrelako ikerketak baitezpadako ditugu, non ez dugun nahi datorren aldiangure Ihardunaldien kezka nagusia gerta dadin: Euskararen marka datekela (-vitality).Gure Unibertsitateak eta Eusko-Jaurlaritza berriak dute hitza.

SUMMARYTwo reasons have dictated my election: l) our language is flor being spread

according to the expected and desired pace, this phenomenon being accompanied bynumerous frustrations in motivated people, when they begin its learning; 2) conside-ring the bilingual people (7,9 % in Alava; .15,1 % in Vizcaya; 45 % in Guipuzcoa;11 % in Navarre and 34,5 % in the north of the country), we cannot have too manyhopes. We must try not only to introduce the euskara into social spheres which haveforgotten it (a problem connected with the diglossia), but also to increase the numberof bilingual people in order to improve the relation between monolingual people(Spanish or French) and bilingual ones (Spanish or French-Basque). This purpose,wich comprises our whole community, is related with the kind of teaching we canknow to propose. This teaching must be restated on the base of a scientificprogtammation, what implies that the formation of the teachers must also be restated.I accept that, although the teaching of a language contains certain variants whichcannot be controlled, there are many others that can be controlled. And the scientificknowledge of a language offers a sum of scientific data about a language which canguide the teacher's activity. My communication centres on the Applied Linguistics,which is about the application of the linguistic knowledge to the teaching. AppliedLinguistics, which makes use of the results of the theoretical studies, appears as a«consumer», but not as a producer of theories. It is an intermediary betweenTheoretical Linguistics and Pedagogy (or Didactics) of languages (cf. scheme in thecommunication). I point out that, in that scheme, the first level pertains to the politicalsphere and the recovery of the euskara constitutes, at the present time, a politicalproblem. But, in the planning of its teaching, the three levels are involved. Thecontribution of Linguistics is justified because this discipline, from the twentieth

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KARMELE ROTAETXE

century, supplies mainly descriptions of data and rules for the interpretation of thematerial. And without a consultation of the knowledge that Linguistics can provide usabout a language, there cannot be a systematic progress in teaching-learning. So thelinguistic study must determine how we have to describe what is going to be taught.But the relation between theory and teaching cannot be but an indirect one, as thediscipline and practical activity are separated precisely by that other scientific andintermediate activity which is constituted by Applied Linguistics. As an activity, thelatter comprises several stages: 1) Description: the applied linguist must integrate in thegrammatical description made by the theoretical linguist socio-linguistic criteria whichwill allow to take into account the functioning of the language in the society (dialectaldifferences and/or registers). The results of this first work about the grammaticaldescription answer this question: «which is the nature of the language that is going tobe taught ?» and constitute a raw inventory for the second stage; 2) Selection: in theinventory a selection must be done in order to establish a «syllabus» or inventory. Thequestion is the following one: «what must be taught?» And several parameters mustbe taken into account:

a) the usefulness for the student, that is, its immediate urgency for the communi-cation; b) the difference: in relation to the language which the student already masters;c) the difficulty coming from the learning of a new system, more or less distant fromthe one he possesses. It results from this that, when elaborating the syllabus, thecomplex phenomena must be presented after the simple ones and starting from them.These three criteria are based on an intralingual analysis in a); on the need of recurringto the Contrastive Linguistics in b) and to the analysis of errors in c). 3) In the thirdstage, the syllabus must be presented progressively, in order to transform it into apedagogical grammar. The question would be: «how to use the selected material?».The practica! leve! of teaching answers this question: «how to teach ?» and in this levelwe must either change the syllabus into pedagogical material, or make use of thematerial in class (contact with the students, problems related most properly to everytype of teaching and in particular to the socio-linguistic aspect). It cannot be gotwithout the previous activity of Applied Linguistics. And, in it, nothing has been donein the Basque studies. The investigation about Applied Linguistics is absolutelynecessary if we want to avoid that next Bascologists' Meetings may study theoreticalpoints of a language marked with the feature (–vitality). I submit this reflexion to theAuthorities in our University and to our Basque Government.

RESUMENDos razones han dictado mi elección: 1) nuestra lengua no se está extendiendo al

ritmo que se hubiera esperado y deseado y el fenómeno se acompaña de numerosasfrustraciones en personas motivadas cuando empiezan a aprender; 2) el número debilingües (7,9 en Alava; 15,1 en Vizcaya; 45% en Guipúzcoa; 11% en Navarra y 34,5en el norte del país) no permite ilusiones. Nuestros esfuerzos deben pues dirigirse nosólo a introducir el euskara en los ámbitos sociales de los que ha sido apartado(problema religado a la diglosia), sino también a aumentar el número de bilingûes paramejorar la relación monolingûes (español o francés) y bilingües (español o francés-vasco). Y este objetivo que concierne a toda nuestra comunidad está en relación con eltipo de enseñanza que sepamos proponer. Hay que replantearse la enseñanza sobre labase de una programación científica, lo que implica replantear la formación de losenseñantes. Admito que, si bien la enseñanza de una lengua encierra ciertas variablesno controlables, muchas otras lo son: Y la lingûística ofrece un conjunto desarrolladode conocimientos científicos sobre el lenguaje que puede guiar la actividad del profe-sor. Mi comunicación se centra en la lingüística aplicada, limitada a la aplicación delconocimiento lingüístico a la enseñanza. La lingûística aplicada, que utiliza los resultados

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LINGUISTIQUE THEORIQUE - LINGUISTIQUE APPLIQUEE - ENSEIGNEMENT DU BASQUE

de los estudios teóricos, se presenta como un «consumidor» pero no como un produc-tor de teorías. Es un intermediario entre la lingüística teórica y la pedagogía (o didác-tica) de lenguas (cf. esquema en la comunicación). Señalo que, en ese esquema, elprimer nivel incumbe a lo político y la recuperación del euskara constituye, hoy porhoy, un problema político. Pero en la planificación de la enseñanza, los tres nivelesestán implicados. La contribución de la lingüística se justifica porque esta disciplina,desde todo el S. XX, suministra pTincipalmente descripciones de datos y reglas deinterpretación del material. Y, sin referencia al conocimiento que la lingüística puededarnos sobre una lengua, no puede haber progreso sistemático en la enseñanza -aprendizaje. Así pues el estudio lingüístico es responsable de determinar como des-cribir lo que se va a enseñar. Pero la relación entre la teoría y la enseñanza no puedeser más que indirecta, ya que la disciplina y la actividad práctica quedan separadasprecisamente por esa otra actividad científica e intermedia que es la lingûística apli-cada. Como actividad, ésta comprende varias etapas: 1) Descripción: el lingûista apli-cado debe integrar en la descripción gramatical del lingûista teórico criterios sociolin-güísticos que permitirán tener en cuenta el funcionamiento de la lengua en la sociedad(diferencias dialectales y/o registros). Los resultados de este primer trabajo sobre ladescripción gramatical responden a la pregunta: «cuál es la naturaleza de la lengua quehay que enseñar?» y constituyen un inventario bruto para la segunda etapa; 2) Selección:dentto de tal inventario debe hacerse una, seleccion, para establecer un «syllabus» oinventario. La pregunta es «qué enseñar?» Y deben tenerse en cuenta vatios paráme-tros: a) la utilidad para el estudiante, o sea, necesidades inmediatas para la comunicaciónoral; b) la' diferencia: con relación a la lengua que el estudiante domina ya; c) ladificultad que procede del aprendizaje de un sistema nuevo y más o menos distante delque posee. Esto exige, en el momento de la elaboración del syllabus, no presentar locomplejo más que a partir y después de lo sencillo. Estos tres criterios se fundan en unanálisis intralingual en a); en b) en la necesidad de recurrir a la lingüística contrastiva yen c) al análisis de los errores. 3) En la tercera etapa, se trata de presentar el syllabussegún una progresión, con el fin de convertirlo en una gramática pedagógica. La pre-gunta sería: «cómo utilizar el material seleccionado?». El nivel práctico de la ense-ñanza responde a la pregunta «cómo enseñat?» yen él se debe, bien sea transformar elsyllabus en material pedagógico, bien ocuparse de la utilizacion del material en clase(contacto con los alumnos, problemas relacionados más propiamente con todo tipo deenseñanza y en particular con la sicolingüística). No se puede alcanzar sin el trabajo

previo de lingûística aplicada. Y, a ese nivel, el trabajo sobre el euskara es 'sencilla-mente inexistente. Las investigaciones en lingüística aplicada son absolutamente nece-sarias si queremos evitar que próximos Encuentros de Vascólogos aborden puntosteóricos de una lengua marcada por el tasgo (– vitality). Someto esta reflexión a lasAutoridades de nuestra Universidad y a nuestro joven Gobierno vasco.

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