Lettres de Saussure à Meillet

39
Lettres de Ferdinand de Saussure àAntoine Meillet Author(s): Emile Benveniste Reviewed work(s): Source: Cahiers Ferdinand de Saussure, No. 21 (1964), pp. 93-130 Published by: Librairie Droz Stable URL: http://www.jstor.org/stable/27758046 . Accessed: 29/11/2012 11:44 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Librairie Droz is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers Ferdinand de Saussure. http://www.jstor.org This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

description

Very interesting correspondence between these major linguists

Transcript of Lettres de Saussure à Meillet

Page 1: Lettres de Saussure à Meillet

Lettres de Ferdinand de Saussure àAntoine MeilletAuthor(s): Emile BenvenisteReviewed work(s):Source: Cahiers Ferdinand de Saussure, No. 21 (1964), pp. 93-130Published by: Librairie DrozStable URL: http://www.jstor.org/stable/27758046 .

Accessed: 29/11/2012 11:44

Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at .http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp

.JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range ofcontent in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new formsof scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected].

.

Librairie Droz is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers Ferdinand deSaussure.

http://www.jstor.org

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 2: Lettres de Saussure à Meillet

LETTRES DE FERDINAND DE SAUSSURE A ANTOINE MEILLET

[4 janvier 1894]3 Cher Monsieur Meillet,

Vous me faites du bien en parlant presque au d?but de votre

lettre de novembre de votre ?pistoiophobie, en ce que je vois que je

parle ? quelqu'un qui ne sera pas incapable d'excuser la mienne.

Pour le reste, il para?t, et je m'en f?licite, que le mal n'est pas encore

chez vous ? son extr?me p?riode. S?rieusement, j'ai ?t? bien touch?

de votre lettre, comme j'avais ?t? tout ? fait d?sol? de ma maie

chance ? Paris. Je ne puis me pardonner encore ? pr?sent de ne vous

avoir pas donn? rendez-vous d'avance. D'un autre c?t?, le jour de

mon passage ? Paris d?pendait de plusieurs circonstances, et j'aurais pu ?tre forc? au dernier moment de le remettre de trois jours, c'est ce qui me d?conseillait de vous en avertir par lettre, j'?tais trop incertain de la date.

J'aurais ?t? bien curieux et bien int?ress? d'entendre vos diff?

rentes th?ories nouvelles sur l'accent. Les d?tails que vous m'?crivez

ne me donnent encore qu'une id?e tr?s vague par exemple sur ce que

peut ?tre votre accent d'intensit? du grec et la mani?re dont il serait

distribu? selon les syllabes. Si l'existence de cet accent se confirme,

je comprends parfaitement qu'il entra?ne des effets phon?tiques, tandis que je ne puis que rester tr?s sceptique ? l'endroit des pr?ten dus effets phon?tiques de l'accent jusqu'ici connu, par exemple

quand Wackernagel soutient que -eoa - donne -eqo - ou -

eig - sui

vant les conditions d'accent, ou quand Frankfurter veut que les deux

3 La date de 1894 a ?t? correctement inf?r?e de l'allusion au Xe Congr?s des Orientalistes, qui se tint ? Gen?ve en septembre 1894, par M. Godei, qui a publi? la fin de cette lettre (Sources manuscrites p. 31).

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 3: Lettres de Saussure à Meillet

94 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

traitements de voyelle+oj ou vj {%ol?qc? avec ?penth?se, mais ydeioco =

(pOeoco sans ?penth?se) d?pendent ?galement de conditions toniques. Je pose un point d'interrogation, c'est-?-dire de curiosit?, encore

plus grand quand j'apprends que la chute de Y e indo-europ?en ne

d?pend plus du ton. Entendons-nous : il y a beaucoup de chutes d'e

qui ne co?ncident pas du tout avec le ton, mais vous me laissez enten

dre que c'est l? m?me o? la co?ncidence para?t claire que vous niez le

rapport de cause ? effet. Ainsi, je suppose, dans im?s compar? ? ?imi ? ? A propos d'accent, avez-vous vu que Wackernagel dans son der

nier travail, tr?s int?ressant, sur l'Accent grec vous applaudit pour

l'explication de ?vOd?e, tout en regrettant la forme sommaire o? elle est con?ue.4 J'ai bien peur, entre nous, qu'il n'y ait au fond

malentendu, et que votre id?e ne soit pas du tout la sienne. J'ai commenc? ? lire votre second article sur les gutturales, mais

j'ai ?t? interrompu par les f?tes de fin d'ann?e qui m'ont emp?ch? de m'occuper depuis une quinzaine. Je suis actuellement ? Gen?ve

m?me, et ne retournerai ? Malagny que le 20 janvier. Vous aurez re?u ces jours-ci la circulaire d'invitation au Xe

Congr?s des Orientalistes, et je n'ai pas besoin de vous dire que je me berce fermement de l'espoir de vous y voir. Ce serait trop dom

mage v?ritablement qu'aucun de nos amis de Paris manqu?t ? cette f?te, et certainement sans faire intervenir mon souhait per sonnel, je crois que chacun aura l? une occasion tr?s facile, tr?s

naturelle, beaucoup plus difficilement retrouvable par la suite, de faire connaissance avec tous les hommes importants d'une sp?cialit?. Celle des langues indo-europ?ennes sera tr?s fortement repr?sent?e comparativement aux Congr?s pr?c?dents ; mais vous avez du reste un double titre ? prendre part au Congr?s, ? la fois comme arm?ni

sant, donc comme Orientaliste proprement dit, et comme simple ? linguiste comparatif?, ce qui est mon pauvre titre ? figurer je ne sais

trop pourquoi dans le Comit? d'organisation, sans que j'aie jamais fait de l'orientalisme.Comme du reste nous avons surtout des linguistes dans le Comit? g?n?ral Suisse que nous avons pu constituer, il est ? pr?voir, comme je le disais, que nous aurons des assises d'in

dogermanisme. Je doute peu que Brugmann etc.. soient pr?sents.

4 J. Wackernagel, Beitr?ge zur Lehre vom griechischen Akzent, 1893, p. 25 = Kleine Schriften, II, p. 1094, n. 1.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 4: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 95

Le commencement de mon article sur l'intonation va para?tre.5 Le 2d article terminera ce que je veux dire sur l'intonation et con tiendra 2? mes remarques sur l'accentuation, ainsi que sur Vinto nation lette, qui est (vous l'ai-je dit?) un effet de Y accentuation - sans

rapport avec Vintonation lituanienne ! ! Mais je suis bien d?go?t? de tout cela, et de la difficult? qu'il y a en g?n?ral ? ?crire seulement dix lignes ayant le sens commun en mati?re de faits de langage. Pr?occup? surtout depuis longtemps de la classification logique de ces faits, de la classification des points de vue sous lesquels nous les traitons, je vois de plus en plus ? la fois l'immensit? du travail

qu'il faudrait pour montrer au linguiste ce qu'il fait', en r?duisant

chaque op?ration ? sa cat?gorie pr?vue; et en m?me temps Tassez

grande vanit? de tout ce qu'on peut faire finalement en linguistique. C'est, en derni?re analyse, seulement le c?t? pittoresque d'une

langue, celui qui fait qu'elle diff?re de toutes autres comme apparte nant ? certain peuple ayant certaines origines, c'est ce c?t? presque ethnographique, qui conserve pour moi un int?r?t : et pr?cis?ment je n'ai plus le plaisir de pouvoir me livrer ? cette ?tude sans arri?re

pens?e, et de jouir du fait particulier tenant ? un milieu particulier. Sans cesse l'ineptie absolue de la terminologie courante, la n?ces

sit? de la r?forme, et de montrer pour cela quelle esp?ce d'objet est la langue en g?n?ral, vient g?ter mon plaisir historique, quoique je n'aie pas de plus cher v u que de n'avoir pas ? m'occuper de la

langue en g?n?ral. Cela finira malgr? moi par un livre o?, sans enthousiasme ni

passion, j'expliquerai pourquoi il n'y a pas un seul terme employ? en linguistique auquel j'accorde un sens quelconque. Et ce n'est

qu'apr?s cela, je l'avoue, que je pourrai reprendre mon travail au

point o? je l'avais laiss?. Voil? une disposition, peut-?tre stupide, qui expliquerait ?

Duvau 6 pourquoi par exemple j'ai fait tra?ner plus d'un an la publi

cation d'un article qui n'offrait, mat?riellement, aucune difficult?, -

5 M. Godei a cit? les lignes qui suivent d'apr?s une copie qui est inexacte en plusieurs endroits : notamment celui o? Saussure avoue ? Tassez grande vanit? (et non: vari?t?) de tout ce qu'on peut faire finalement en linguis tique ?. Il y a aussi des mots omis: ? sans cesse... ?;

- ? sans enthousiasme ni

passion ?. J'en ai donn? le texte rectifi? CFS. 20 (1963) p. 13. 6 Louis Duvau, alors administrateur de la Soci?t? de Linguistique, assu

rait la publication des M?moires.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 5: Lettres de Saussure à Meillet

96 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

sans arriver d'ailleurs ? ?viter les expressions logiquement odieuses,

parce qu'il faudrait pour cela une r?forme d?cid?ment radicale.

Je vous adresse, cher Monsieur Meillet, mes meilleurs v ux pour la nouvelle ann?e, et vous prie de me croire

Votre affectueusement d?vou?

Fd de Saussure

4 Janvier.

Permettez-moi un petit post-scriptum. Vous voulez bien m'appeler votre ma?tre, et je serais bien flatt? d'avoir m?rit? ce titre en quoi que ce soit. Mais je tiens encore davantage ? un autre, et si vous le

voulez bien, nous correspondrons d?sormais entre amis.

Gen?ve 8 f?vrier [1900]7 Mon cher ami

J'avais lu avec beaucoup d'int?r?t un article de M. Gauthiot dans le dernier fascicule des M?moires,8 sans savoir que vous l'aviez

pour ?l?ve, et j'avais ?t? tr?s sensible, il y a peu de jours, ? l'envoi

qu'il m'a fait d'un tir? ? part dont je n'ai pu encore le remercier

n'ayant pas trouv? d'adresse sur la bande d'envoi. Je suis doublement aise d'apprendre qu'un linguiste dont les

d?buts sont aussi distingu?s est une de vos recrues, je vous en f?licite bien sinc?rement comme d'une r?compense due ? votre enseigne

ment.

Si M. Gauthiot arrive ? nous expliquer compl?tement dans le volume qu'il nous promet l'esp?ce d'antinomie qui semble r?gner entre la nature de l'accent primitif et ses effets sur le syst?me consonantique de 2 ou 3 langues, il nous aura rendu un bien grand service.

Je suis provisoirement frapp? du fait que M. Gauthiot parle des effets post-indoeurop?ens de l'accent, mais ne parle pas de ses effets

indo-europ?ens (r?duction de *kleutos ? Mut?s, de *deuo ? duo etc.).

7 La date r?sulte de l'allusion ? l'article de R. Gauthiot. 8 R. Gauthiot. A propos de la loi de Verner et des effets du ton indo

europ?en (MSL. XI, 1899-1900, pp. 193 sq.).

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 6: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 97

D'autre part dans l'appr?ciation de l'accent hindou ne s'en tient il pas trop exclusivement aux Pr?ti??khyas ? c?t? des syst?mes vari?s du ?atapathabr?hmana, de la Maitr?yan?, etc. qui font d'un moment ? l'autre passer toute l'accentuation hindoue sous un v?ri table kal?idoscope, le blanc devenant noir, et le noir devenant

jaune, etc., sans autre constance que la place du ton, et avec les

plus complets renversements de la nature des diff?rents tons. Il me semble que c'est surtout aujourd'hui cette multiplicit?

d'interpr?tations du ton hindou d'apr?s les tr?s diff?rents syst?mes de notation hindous qui constitue le probl?me pour ceux qui s'atta chent ? la nature de l'accent.

Ce que vous me dites de votre activit? au Coll?ge de France 9

me cause le plus grand plaisir, car je suppose bien que M. Br?al a voulu ainsi montrer compl?tement le cas qu'il fait de vous, sans ?tre autrement emp?ch? par sa sant?. Comme vous ne m'en parlez pas,

je suppose que notre excellent ma?tre se porte bien, et je vous prie de lui apporter mon salut quand vous le verrez. Ma v?n?ration pour lui est enti?rement ind?pendante des lacunes de ma correspondance, de m?me que mon amiti? pour d'autres

Affectueusement ? vous

F. de Saussure

Meillet suppl?a Br?al au Coll?ge de France pendant Tann?e 1899-1900.

Mon cher ami

9 F?vrier [1900]10

Permettez-moi un post-scriptum pour vous demander de pr? senter avec moi ? la Soci?t? de Linguistique M. Charles BALLY,

privat-docent ? l'Universit? de Gen?ve, 24 rue du Mont-Blanc, Gen?ve. Mr Bally s'occupe depuis plus de dix ans de sanscrit et de

grammaire compar?e quoique son enseignement ne porte pas sur

ces sujets. Vous vous souvenez peut-?tre de l'avoir rencontr? au

Congr?s des Orientalistes de 1894. Il d?sire depuis longtemps faire

partie de notre Soci?t?, et je me reproche de n'avoir pas transmis

10 La date est indiqu?e par le texte m?me.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 7: Lettres de Saussure à Meillet

98 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

plus t?t sa demande, aussi je m'empresse de r?parer mon nouvel

oubli d'hier.11

J'ai peut-?tre oubli? aussi de vous dire que naturellement je serai tr?s honor? si M. Gauthiot me communique son manuscrit et que je me promets d'avance grand plaisir de cette lecture. Si je ne l'ai pas dit, c'est comme vous l'aurez compris que cela allait sans dire.

Hirt et son Ablaut me semblent comme vous le dites p?cher sur

tout du c?t? de la facult? critique. En g?n?ral un livre sur l'Ablaut

devrait ?tre compris d'une mani?re moins ?triqu?e que ce n'est le cas de la part des Allemands. Un sujet comme l'Ablaut place celui

qui veut en parler ? fond dans une position o? il lui est interdit de n'avoir pas des vues sur l'ensemble des progr?s obtenus en lin

guistique depuis vingt ans, - m?me en ce qui concerne la m?thode

g?n?rale, car l'ablaut est une alternance, et la th?orie des alternances est la base de la m?thode.

Votre d?vou?

F. de Saussure 9f?v.

11 Ch. Bally fut en effet pr?sent? ? la Soci?t? de Linguistique par F. de Saussure et A. Meillet le 24 f?vrier 1900 (BSL. XI, p. LXXII).

Creux-de-Genthod pr?s Gen?ve. 27 novembre

[1900] 12 Mon cher ami,

vous m'obligeriez beaucoup en me faisant savoir de suite par carte postale si le banquet en l'honneur de M. Br?al est fix? au 1er d?cembre, comme le dit le Temps, ou au 3 d?cembre comme il me semble l'avoir lu dans la circulaire de la Soci?t?,

- circulaire que je ne retrouve pas.13 A mon grand regret il me sera pas possible de me

12 Cachet de la poste: Gen?ve 28.XI.00. 13 Le banquet en question, pour f?ter le 25e anniversaire de l'entr?e de

Michel Br?al ? l'Institut, eut lieu le 1<* d?cembre 1900 (BSL. XI, p. CLXXV). et F. de Saussure s'associa ? cette c?l?bration par un t?l?gramme (ibid. p. CLXXVIII et CLXXIX).

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 8: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 99

rendre ? Paris pour prendre part ? cette f?te, comme je l'avais

esp?r? d'abord, mais je tiendrais d'autant plus ? ne pas manquer de m'y associer par un modeste t?moignage t?l?graphique, et vous

seriez bien aimable ? ce propos de me dire Vadresse exacte o? je puis envoyer le t?l?gramme.

Merci d'avance, et mille affectueux souvenirs

F. de Saussure

Je voulais vs remercier depuis longtemps de vos deux envois si int?ressants. J'ai l? une lettre commenc?e pour vous et qui n est

jamais partie. Ce sera pour bient?t.

Genthod (Gen?ve) 28 Octobre 1902.

Mon cher ami,

Si invraisemblable que soit le fait, j'?tais occup? hier ? corres

pondre, ? correspondre avec un de mes excellents et patients ? cor

respondants ? (ne trouvez-vous pas que ce terme prend une signifi cation ?trangement unilat?rale sous ma plume?), lorsque me parvint votre aimable et charmante lettre. J'ajouterai que le correspondant ? qui je m'adressais ?tait vous-m?me, et qu'il n'y avait que deux

mois que je devais la r?ponse, ou plut?t le remerciement, que j'?tais en train d'?crire.

Certes, je n'essaie plus des d?fenses inutiles sur de pareils retards.

Celui-ci me pesait par trop, quand je songe avec combien de vraie

gratitude et de jouissance, j'avais re?u au mois de septembre, et lu ? l'instant m?me, vos deux beaux volumes sortant de presse, dont je pense vous parler plus loin. Je veux d'autant moins allonger ici que je dois avant tout r?pondre ? votre nouvelle lettre et ? tout

ce qu'elle contient. Du moins si j'en ai le temps imm?diatement, car

le nombre de choses accumul?es dont je voulais vous entretenir, commence ? devenir d?mesur?, et je serai probablement oblig? de

faire une coupure au moment du courrier.

Vous me faites une surprise, dont je suis vraiment touch? et

?mu, en me disant que vous voulez mettre mon nom sur la Io page

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 9: Lettres de Saussure à Meillet

100 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

d'un de vos livres.14 C'est un honneur que j'appr?cie dignement, et

auquel je ne savais pas tout-?-l'heure que je serais si sensible, car

je vous avoue que je n'avais jamais pens? ? rien de tel, de la part de qui que ce soit. Venant de vous, il est certain que ce ne sera, com

me je le d?sire, qu'un t?moignage affectueux, et confraternel en

l'Ecole des Hautes Etudes. C'est pour cela que je l'accepte, en y

ajoutant le plus grand prix. J'accepte en vous priant seulement de

trouver un moyen de tourner le mot d'Anniversaire, qui serait un

bien grand mot m?me pour un ouvrage ? pr?tentions moins modestes

que mon M?moire, - ou du moins d'att?nuer en ajoutant quelque

chose. (C'est une simple question de formule, que vous r?soudrez sans peine, mais que je tenais essentiellement ? vous signaler).

Merci encore.

J'ai ? peine besoin de vous dire que j'attends non sans impatience ce nouveau volume (pour moi, et aussi pour les malheureux ?l?ves

qui ne se d?brouillent que difficilement dans Brugmann et dans

Henry.) Je suis certain que les clart?s indo-europ?ennes jailliront toutes seules quand ce sera vous qui les mettrez en uvre.

Vs me parlez de M. Gauthiot. C'est un autre remords vivant. Comment est-il possible qu'apr?s sa lettre si aimable et si confiante o? il m'entretenait de son prochain voyage en Lituanie, je ne lui aie r?pondu que par une promesse de lui envoyer mes documents? Ma seule excuse est que j'habitais ? ce moment ? en ville ? (? Gen?ve), loin de ces papiers qui ?taient ? la campagne. Je ne lui aurais du reste probablement adress?, en fait de ? documents ?, que ma carte

(mi-hypoth?tique) des dialectes lituaniens dress?e sur lecture de textes. Mais il aurait ?t? d'un int?r?t scientifique que M. Gauthiot f?t au moins ? m?me de v?rifier sur place l'exactitude de cette carte en ce qui concerne certaines fronti?res phon?tiques ou morpholo giques, cela tt ? fait ind?pendamment de ce que je devais ? ce dis

tingu? confr?re comme correspondant. Il va sans dire que je saisi rais avec empressement toute occasion de r?parer ce dont je m'accu se. Pardon d'interrompre ici.

Affectueusement ? vous

F. de Saussure

14 II s'agit de la d?dicace de VIntroduction ? V?tude comparative des langues indo-europ?ennes. Cf. ci-apr?s n. 16.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 10: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 101

Gen?ve, 26 f?v. [1903]16 Mon cher ami

Bien sensible ? votre aimable lettre du 18, je vous confirme pro visoirement que j'ai bien re?u le manuscrit et la lettre de M. Gau

thiot, dont le travail m'int?resse fort.

Les envois de M. Gauthiot, ainsi que les v?tres, se trouvent avoir ?t? retard?s de trois jours pleins (je tiens ? le dire pour que vous ne

me teniez pas trop rigueur) du fait qu'ils ?taient adress?s ? mon

ancien bureau de poste de Versoix. Habitant maintenant en ?t? ?

Genthod, en hiver ? Gen?ve, il y a eu deux renvois successifs de bureau en bureau, dont je vous fais toutes mes excuses car c'?tait ? moi ?

informer l'administrateur de la Soc. de Linguistique de ces change ments. - Le plus simple et le plus s?r est d'adresser sans autre ?

Gen?ve, avec le pr?nom. Dans votre lettres vous me donnez une nouvelle qui me fait le

plus grand plaisir en me parlant du Dictionnaire slave que vous pr? parez. Je nous f?licite en songeant que ns pourrons ?chapper pro chainement ? Miklosic, dont beaucoup de donn?es ?taient inv?ri

fiables, et qui ?tait surtout aussi vieilli par sa mani?re de proc?der avec les textes slaves que par sa mani?re de faire les comparaisons. En m?me temps je vous f?licite, car je suis persuad? qu'un tel tra

vail vous donne chaque jour une ample moisson de d?couvertes et

de satisfactions. Votre bien d?vou?

F1 de Saussure

15 Ann?e r?tablie d'apr?s l'allusion au travail de Gauthiot, dont il est

question dans la lettre suivante, celle-ci dat?e.

Gen?ve, 20 mars 03

Mon cher ami

Vos lignes de l'autre jour m'avaient donn? une bonne nouvelle

en m'apprenant que vous ?tiez arriv? au bout du volume que je savais en pr?paration depuis l'ann?e derni?re, et vous me pr?veniez

gracieusement que j'en recevrais la primeur. Le volume est arriv?

aujourd'hui, il n'y a pas plus d'une heure, et je ne sais trop com

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 11: Lettres de Saussure à Meillet

102 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

ment vous dire ma fiert?, - mon ?motion -, en entrouvrant le pre

mier feuillet, o? vous avez voulu inscrire mon nom.16 Vous pouvez ?tre bien certain que l'honneur que vous me faites me va directement au c ur. Je ne sais trop si la vanit? reste une corde tt ? fait insen sible dans le plaisir que font de tels t?moignages, s?rement l'amiti? en est la premi?re touch?e. En mettant une bonne partie de la men

tion beaucoup trop flatteuse que vous me consacrez sur le compte d'une affectueuse pens?e personnelle, je ne puis qu'en sentir davan

tage le prix. Soyez en donc remerci? de tout c ur, - mais o? dois-je terminer au juste les remerciements, car je m'aper?ois, rien qu'en parcourant ? tire d'aile quelques parties du livre que j'ai entre les mains depuis une heure, que je ne suis pas quitte avec la premi?re page ! Et je trouve encore au haut du volume vos deux lignes manus

crites tout aimables, mais attestant une fois de plus votre tendance

pers?v?rante ? substituer le m?rite des autres au v?tre. Au moins

pour ces derni?res, je n'aurai pas de peine ? les r?futer quand je vous ?crirai dans le d?tail ce que je pense de votre livre. Laissez-moi

quelques heures pour en achever la lecture ? t?te repos?e, car quoi que j'en connaisse d?j? le principal, je tiens ? faire cette lecture ? fond.

Je lis tr?s attentivement le travail de Gauthiot, et je vous prie d?s ? pr?sent de remercier l'auteur de ma part, ce mot est un simple billet comme vs voyez.

Votre affectueus* d?vou?

Fd de Saussure

16 Rappelons les termes de cette d?dicace : ? A mon ma?tre M. Ferdinand

de Saussure, ? l'occasion des vingt-cinq ans ?coul?s depuis la publication du M?moire sur le syst?me primitif des voyelles dans les langues indo-europ?ennes

(1878-1903) ?.

[14-IX-05] *7

Mon cher ami

Je ne saurais trop vous remercier pour les renseignements si

complets que vous m'avez donn?s,18 et je m'excuse encore de vous

17 Cachet de la poste. 18 La lettre o? Saussure sollicitait ces renseignements n'a pas ?t? conserv?e.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 12: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 103

avoir ainsi d?rang?, ? mon plus grand profit. Je suis maintenant fix? sur les points par lesquels je pouvais avoir ? faire intervenir l'arm?nien. Je regrette m?me que le cadre plus ou moins impos? par le caract?re de la publication Nicole 19

m'oblige ? laisser de c?t? une partie des d?veloppements que j'aurais utilis?s dans un

article de revue linguistique*

Merci encore, et affectueux souvenirs de votre d?vou?.

F. de Saussure

Merci aussi des nouvelles de M. Br?al. Je suis heureux de ce que vous m'?crivez.

Cossonay, 14 Sept.

* Je suppose que alewr, m?me s'il n'est pas emprunt?, repose sur

une finale en -euro-, et n'est pas quelque chose comme *ale~tro-.

Pri?re instante de ne pas reprendre la plume ? ce propos, ? moins

que je ne vienne de dire une b?tise.

19 II s'agit de l'article donn? aux M?langes Nicole en 1905 (= Recueil des

publications scientifiques, p. 576 sq.)

Mon cher ami

Gen?ve, 31 Oct. 05,

Tertasse, 2

N'ayant presque pas ouvert un journal pendant les vacances,

j'ai ?t? assez ?mu d'apprendre avant-hier par un ami, qui avait

par hasard lu la chose dans le Temps, qu'il aurait surgi des difficult?s

? propos de la succession de M. Br?al au Coll?ge de France. Quelles difficult?s? - C'est ce que je ne sais pas encore, m?me vaguement, l'ami dont je vous parle n'ayant pu retrouver le num?ro du journal, et ne se rappelant lui-m?me aucun d?tail. J'esp?re vivement, ou

qu'il aura mal compris le sens de l'article, ou en tous cas qu'il ne

s'agit de rien de grave ou de p?nible pour vous ou pour M. Br?al.

Mais dans l'incertitude, je ne puis m'emp?cher de vous ?crire pour avoir quelque nouvelle pr?cise, je m'int?resse trop ? votre succ?s,

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 13: Lettres de Saussure à Meillet

104 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

que je voudrais ?clatant, comme il m?rite de l'?tre, pour ne pas vous

demander ce qui se passe. Recevez en attendant une fois de plus, mon cher ami, tous les

v ux affectueux de votre d?vou?

Fd de Saussure

Presque en m?me temps j'ai re?u la Liste de publications que vous avez fait imprimer, mais o? il m'est permis, j'esp?re, de ne

pas voir le signe d'une ?lection contest?e, puisqu'il est naturel en

tout ?tat de cause que vous ?num?riez vos titres en posant votre

candidature.

3 Nov. [1905] 20

Mon cher ami

Votre lettre m'a fait un bien sensible plaisir. A vrai dire je n'avais pas d'inqui?tude s?rieuse, il me paraissait plus qu'extraor dinaire qu'une difficult?, dont je ne pouvais m?me m'imaginer la

nature, se pr?sent?t ? propos de la succession de M. Br?al. Mais

plus la chose me paraissait ?nigmatique, plus j'ai ?prouv? le besoin de vous demander quelle esp?ce de myst?re ou de mystification se

cachait derri?re l'entrefilets 21 de journal dont me parlait, comme

je vous l'?crivais, une personne qui n'avait rien retenu de son con

tenu sauf une impression g?n?rale. Merci encore et de votre r?ponse, et de tous les d?tails que vous me donnez, qui ach?vent de me tran

quilliser avec tous vos amis. A bient?t nos f?licitations, et en attendant mille bons v ux et

souvenirs

Fd de Saussure 3 nov.

- Dr?le d'id?e, si on tient ? cr?er une chaire de Phonologie exp?ri mentale, que de vouloir l'installer sur la tombe de la Grammaire

Compar?e. -

20 Cette lettre fait ?videmment suite ? la pr?c?dente. 21 C'est l'orthographe ancienne du mot.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 14: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 105

10 janvier [1906]22

Mon cher ami

Depuis vos derni?res lignes, de la fin d'Octobre, j'avais eu quel ques nouvelles (fort bonnes) de l'?tat de vos affaires par mon parent M. Naville, qui avait ?t? appel? au mois de novembre ? faire des

conf?rences au Coll?ge de France. Ces bonnes nouvelles me sont

confirm?es par votre lettre re?ue hier, et dont je suis tr?s heureux, m'?tonnant seulement que la nomination ne soit pas chose faite

depuis longtemps; mais ?tant acquise d'avance, vous pouvez l'at

tendre avec patience, voire m?me sans impatience aucune d'avoir

trop vite ? ajouter ? vos occupations la charge de ce nouvel ensei

gnement. Cela surtout si, comme je suis f?ch? de l'apprendre, vous

ne vous sentez pas en tr?s bonne disposition en ce moment. Ce mot

? la fin de votre lettre m'a l?gitimement inqui?t?. S'il s'agit de fati

gue et de surmenage - ce qui certes n'aurait rien d'?tonnant apr?s

la somme de travail que vous vous ?tes impos? depuis bien des an

n?es -, je ne saurais trop vous engager ? couper le mal dans sa racine

et ? vous procurer le repos n?cessaire non plus tard, mais si possible de suite. Si vous me r?pondez que mon conseil porte ? faux et que vous vous sentez en parfaite sant?, je m'en r?jouirai,

- sinon il vaut

la peine d'y songer, j'en fais en ce moment l'exp?rience, regrettant de n'avoir pas pris plus t?t le parti que j'ai pris cet hiver de mettre

une interruption compl?te dans mes occupations et pr?occupations habituelles. Je me suis fait octroyer un cong? ? l'Universit? de

Gen?ve et vous ?cris de Rome o? je suis avec ma femme pour un

s?jour prolong?. Je m'en trouve fort bien, mais me serais mieux trou

v? encore, comme je le disais, de l'avoir fait plus t?t.

Je pense aller un de ces jours ? l'Ecole Fran?aise et aurai sans

doute le plaisir d'y voir, outre Mgr Duchesne, quelques jeunes

gens ayant un lien avec l'Ecole des Hautes-Etudes, et peut-?tre

ayant suivi vos cours. Je n'ai pu le faire jusqu'? pr?sent, ayant commenc? mon s?jour en Italie par Naples o? j'ai pass? le mois de

d?cembre.

22 L'ann?e est celle de l'?lection de Meillet au Coll?ge de France, et con

firm?e par la lettre suivante.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 15: Lettres de Saussure à Meillet

106 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1963)

Donnez-moi ? l'occasion de vos nouvelles, mon cher ami, par une

carte postale. Je vous adresse mes v ux bien affectueux pour l'ann?e

qui vient

Votre d?vou?

Fd de Saussure

10 janv.

H?tel Pincio. Via Gregoriana. Rome.

Mon cher ami,

Merci d'avoir pens? si aimablement ? me donner la nouvelle de

votre nomination d?finitive. Par hasard presque au m?me moment

je l'apprenais par un journal fran?ais qui m'?tait tomb? sous les

yeux. Vous savez quelle part je prends ? l'?v?nement, combien je m'en r?jouis pour vous et pr la linguistique fran?aise, et aussi pour M. Br?al qui trouve un successeur qui fera honneur ? sa chaire et ?

son choix. Encore une fois toutes mes cordiales f?licitations. Votre

lettre re?ue l'autre semaine m'avait fait grand plaisir, je suis surtout

heureux d'y lire que vous vous portez bien. - Inutile de vous dire

que je ne fais pas grand chose ici. L'inscription archa?que du

Forum est un amusement tout indiqu? lorsque j'?prouve le besoin

de me casser la t?te. Rien ? en tirer, bien entendu, mais il est int? ressant de contempler le bloc ?nigmatique et de s'assurer de visu

des lectures. Celles-ci ne me semblent pas encore ?tablies partout avec le degr? de certitude qu'on aurait pu leur donner, et r?ciproque ment il y a telle donn?e comme certaine qui ne l'est pas, notamment un I qui peut se lire + (x). (Cet x n'est au meilleur cas qu'un x

de plus, et il y en a trop d?j? dans l'affaire...). Je vous adresse, mon

cher ami, tous mes affectueux souvenirs et bons souhaits pour la

nouvelle carri?re d'activit? qui s'ouvre devant vous

Fd de Saussure

Rome, 23 janvier 06.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 16: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 107

Vuffiens s/Morges, 23 Sept. 07

Mon cher ami,

Votre lettre m'a caus? avant tout une d?ception, mais elle con

tient une promesse, et cette promesse, quand m?me vous en mettez l'?ch?ance ? un nombre assez vague de mois, je la retiens avec pr? cision, et j'en fais d?s ? pr?sent ma fiche de consolation.23 Rien ne

pouvait me faire plaisir comme la perspective s?rieuse que vous me

donnez de vous voir, en ?change de l'occasion assez al?atoire que

j'avais entrevue dans le congr?s de Baie.24 Je comprends singuli?rement, du reste, vos raisons de ne pas

vous d?placer pour ce Congr?s, car en-dehors de celle que je regrette d'apprendre et qui est relative ? la sant? de Mr votre p?re, il est

heureux pour tout le monde que vous sachiez donner leur prix aux

mois de vacances, les seuls o? on n'ait pas ? d?fendre son temps les armes ? la main, surtout pour qui a son s?jour ? Paris hors de ce

temps de tr?ve.

Cela va tout de suite nous procurer, comme je vois, des choses

int?ressantes, et le cours sur le d?veloppement historique du grec sera, en-dehors de tout ce qu'il promet pour nous, linguistes, une v?ri

table b?n?diction pour les ?tudiants qui ont, comme ceux de Gen?ve, ? r?pondre, pour la licence, sur l'histoire grammaticale de la langue grecque, sans qu'on puisse leur indiquer un seul livre ? peu pr?s

correspondant ? ce titre par le plan et le contenu.

Ce qui me r?jouit presque encore plus, c'est que nous allons avoir au moins Y Introduction du Dictionnaire Slave, et qu'en outre, ? ce

que vous me dites, Teubner s'est inscrit d'avance pour une traduc

tion. J'avais d'abord compris, en vous lisant, que vous vous f?li

citiez de ce que les Allemands seraient enfin forc?s de savoir ce que contenaient vos publications slavologiques, ce qui me paraissait une exigence des plus naturelles ; mais je m'aper?ois en vous relisant

que vous ne parlez m?me pas des v?tres, et qu'il s'agit des miennes

? propos de cette pr?face ? votre uvre : donc apparemment de mes

quelques contributions baltologiques ? Voil? vraiment de quoi me

23 Ces allusions supposent une lettre ant?rieure, que nous n'avons pas. 24 Ce congr?s ?tait la 49e ? Versammlung deutscher Philologen ? qui eut lieu ? Baie en 1907 et qui comprenait une section indo-europ?enne (cf. Indogermanisches Anzeiger, 1908, p. 64).

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 17: Lettres de Saussure à Meillet

108 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

toucher, si vous ne m'aviez habitu?, d?s longtemps, ? savoir que vous ne manquez pas une occasion de relever ce que j'ai pu mettre dans ces quelques articles. Voil? aussi de quoi me donner du regret de n'avoir jamais fini celui des M?moires de la Soc. Ling. Le second article a ?t? non-seulement ?crit, mais en grande partie compos?, et j'en ai re?u les placards de l'Imprimerie Nationale, il contenait

pr?cis?ment le point central d'o? j'?tais parti, ? savoir que c'?tait la disparition du a qui devait ?tre la cause de diff?rence entre v?mti

pe?ktas etc. C'est en voyant que Bezzenberger ?tait tomb? sur la loi de v?mti (sans sortir qt ? lui de ce cas limit?), que j'avais ?t? incit? ? commencer une publication des mes observations, et j'ai eu le talent de l'interrompre avant m?me d'arriver ? ce cas capital auquel je tenais doublement parce qu'il confirmait l'importance g?n?rale de

gani-tum contre man-tum en sanscrit. Le placard de l'Imprimerie nationale contenait aussi tout le commencement de la th?orie

morphologique, ou d'une th?orie morphologique, par laquelle j'ex pliquais que l'intonation s'?tait unifi?e dans les racines baltiques, ainsi v?miau, ?rae, ? cause de v?mti, ou imtas, etc.. ce qui a notam ment une grande importance dans les racines avec ?, u.

Mais, puisque vous parlez de l'insuffisante attention donn?e en

g?n?ral par des confr?res allemands ? tout ce qui n'est pas dans leur

langue, expliquez-moi quand vous me ferez le plaisir de m'?crire, comment M. Sommer que j'ai eu l'occasion de feuilleter ces jours-ci, a pu ?crire son livre (Latein. Laut & Formenlehre) sans m?me citer le nom de Louis Havet, alors que tous les principes les plus m?connus de la science allemande, et les plus originaux comme

phon?tique latine, que L. Havet n'a cess? d'enseigner, s'y trouvent

incorpor?s comme par miracle. (Seule exception: la quantit? de

amantar, amant, mon?ntur, ess?nt, point sur lequel Sommer en reste ? ses ma?tres d'outre-Rhin, en posant faussement amantur,

etc.). Je pose ici la question parce que vous vous disiez invit? ? par M. Sommer ? au Congr?s de B?le, et que j'en ai conclu que vous l'aviez peut-?tre connu ? Paris. Tr?s certainement l'auteur para?t avoir pass? par Paris. -

En recevant vos lignes, o? vous renouvelez si aimablement l'offre de lire mes feuilles sur l'anagramme hom?rique, j'ai r?uni les cahiers

que j'avais emport?s, et je vous les enverrai peut-?tre, mais voici la circonstance qui me fait h?siter ? vous d?rober du temps pour cela,

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 18: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 109

et me d?cide ? vous envoyer plut?t un aper?u des r?sultats auxquels

j'arrive pour le Saturnien latin. D'une part je ne d?sire pas moins

votre opinion sur ce chapitre, pour moi plus capital que celui d'Ho

m?re, d'autre part vous y gagnerez de recevoir ? examiner un manus

crit relativement de petite taille, au lieu des quinze ou vingt cahiers

que j'aurais ? vous exp?dier pour Hom?re.

C'est ? peu pr?s ici que j'ai interrompu la lettre du 23 Sptembre, dont vous avez le premier feuillet ci-dessus, pour ?crire pr?cis?ment les notes sur le Saturnien qui devaient accompagner cette lettre.

De fil en aiguille mon manuscrit s'est un peu grossi, sans que je

pusse non plus l'?crire d'une seule haleine, et ainsi voici lettre et

notes retard?es de quelque quinze jours, -

je vous en fais mes excuses

en ce qui concerne la lettre, car je n'aurais pas voulu mettre d'in

tervalle ? vous remercier de vos excellentes lignes. C'est du Saturnien que j'?tais parti pour rechercher, ou pour son

ger ? rechercher si l'?pop?e grecque connaissait quelque chose d'aussi

bizarre ? premi?re vue que l'imitation phonique, au moyen du vers, des noms qui ont une importance pour chaque passage. Je laisse la

question ouverte provisoirement pour lesdits po?mes hom?riques, et je reviens ? ce que je disais ?tre mon point de d?part

- que j'aurais

peut-?tre mieux fait d'explorer ? fond d?s l'ann?e derni?re au heu

de partir par la tangente sur Hom?re : celui-ci offre ?videmment un

champ plus ample, mais le Saturnien latin m'e?t offert, je crois, un

champ plus s?r, si je l'avais tout de suite fouill? ? fond sans sortir

de ce cercle. Voici les conclusions auxquelles j'avais ?t? conduit par l'examen

des restes de la po?sie saturnienne, en-dehors de la question m?tri

que, sur laquelle, d'ailleurs, je me s?pare compl?tement aussi des

opinions pr?c?dentes.

1. L'allit?ration, c'est-?-dire la corr?lation d? phon?mes plac?s ? la t?te des mots, est une partie tout ? fait insignifiante d'un ph?no m?ne autrement vaste et important.

2. Le ph?nom?ne r?el a peut-?tre trois formes diverses, dont mal

heureusement la premi?re est extr?mement difficile ? contr?ler,

parce qu'il faudrait ?tre minutieusement certain de la lecture de

chaque forme et de la phon?tique de chaque auteur :

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 19: Lettres de Saussure à Meillet

110 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

a) ce premier fait soup?onnable, c'est que tous les ?l?ments

phoniques doivent, sans exception, se correspondre entre eux par

couples : de mani?re que le vers id?al serait celui offrant par exemple, au total:

2 L, 2 P, 4 R(=2 + 2), 6 A, 2 0, 4 U, ainsi de suite, et sans que la position initiale ait une importance particuli?re quelconque.

Toutefois, vu la difficult? pour le versificateur, il est d'embl?e accord? que l'on peut se rattraper pour un couple sur le vers suivant, et m?me sur l'espace de plusieurs vers : de sorte que la loi aboutirait ? ce que dans un ?pigramme comme ceux des Scipions, tous les ?l? ments doivent,

- c'est-?-dire doivent simplement - se trouver en

nombre pair au bout des 6 ou 8 vers qui forment l'?pigramme. Les pointages sont supr?mement difficiles comme vous l'entre

voyez d'avance et pour mille raisons comme les lacunes de l'inscrip tion, ou simplement des incertitudes comme de savoir s'il faut

compter 3 s ou 4 dans une forme orthographi?e SVPERASES ?

superasses, etc., etc., etc. Mais dans les cas relativement clairs on

arrive ? des chiffres extr?mement favorables ? la supposition.

b) ce qui pr?c?de serait la loi des diff?rents ?l?ments pris comme

monophones. Aussit?t que l'on ne pousse pas l'analyse jusqu'? la

limite syst?matique du monophone, qui a pour correspectif une

arithm?tique serr?e, et que l'on s'en tient aux groupes phoniques

(diphones, triphones), on est alors en pr?sence d'un ph?nom?ne plus imm?diatement saisissable, quoique plus difficile d'autre part ? r?duire ? une formule fixe :

En effet, presque tout passage saturnien n'est qu'un grouillement de syllabes ou de groupes phoniques qui se font ?cho, comme par

exemple, et en choisissant un exemple relativement pauvre ? cet

?gard, les vers de Livius

Ibi manens sedeto donicum videbis Me carpento vehente domum venisse

D? : D? dans sed?to : videbis. B? : B? dans ibi : videbis. DO : D? dans donicum : d?mum V? : V? dans vehente : venisse

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 20: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 111

TO : T(3 dans sed?to : carpento N? : N? dans don?cum : venisse

?N : ?N dans man-?n-s : v-?n-isse l S?:S? ? ,

dans sed?to : v?nis-s?

(m&nensse- : v?n(i)ss? ou ?NSSE : ENSSE ?NT : ?NT dans carp-?nto : veh-?nt-e

?MV : ?MV dans donicwmvid : donrumv?n

Je r?p?te que le ph?nom?ne 6 (de la corr?lation syllabique, ou

polyphonique), est plus facile ? rendre sensible, mais que son c?t?

malheureux, c'est qu'il serait difficile de montrer que le texte se r?soud exactement en X polyphones

= X polyphones, sans r?sidu, ou sans reprise du m?me ?l?ment pour 2 polyphones distincts. Est-ce un ?-peu pr?s, ou est-ce un syst?me exigeant un compte r?gl?, c'est difficile ? d?m?ler surtout devant d'autres textes o? des vers entiers semblent un anagramme d'autres vers pr?c?dents, m?me ?

grande distance dans le texte.

c) Ce qu'on peut tr?s heureusement aborder sans r?soudre ni le

point a ni le point 6 concernant le d?compte des monophones ou des

polyphones, c'est ce fait ind?pendant - ou pouvant ?tre consid?r?

d'une mani?re ind?pendante, car je ne voudrais pas aller plus loin -,

que les polyphones reproduisent visiblement, d?s que l'occasion en est donn?e, les syllabes d'un mot ou d'un nom important pour le

texte, et deviennent alors des polyphones anagrammatiques. L'anagramme peut se d?rouler soit sur un nom qui figure dans le

texte, soit sur un nom qui n'est pas prononc? du tout, mais se pr? sente naturellement ? l'esprit par le contexte.

L'anagramme, d'autre part, a les bases g?n?rales suivantes au

point de vue de sa forme :

Un nom comme Vergilius, d?coup? par diphones, donne 9 di

phones possibles: ve - er - rg

- gi- il - li - C~u - us, et si l'ana

gramme est d'une correction absolue, il ex?cutera tous les neuf; - mais les syllabes se trouvent constitu?es m?me en sautant un dihone sur deux, si l'on veut:

ve ? il ? us

ou v(e) - er gi

? li ? ~u ? (u)s.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 21: Lettres de Saussure à Meillet

112 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

Et ainsi chaque anneau de l'analyse diphonique n'est pas indispen sable tel qu'il ressort de cette analyse : il suffit que rien ne manque d'un bout ? l'autre du mot.

J'ai indiqu?, autant que possible, dans le manuscrit les autres

r?gles ou moyens appliqu?s, ? propos des cas qui se rencontraient.

Comme vous le verrez au bout de peu de pages, ce n'est pas la

difficult? de retrouver les noms qu'on attend qui est un ?cueil et un

sujet de doute, mais c'est au contraire le fait que presque toute pi?ce en offre presque cinq ou six aussi facilement qu'un seul, et qu'on arrive ? se demander si l'on ne trouverait pas tous les anagrammes du monde dans trois lignes d'un auteur quelconque.

Sans doute, je crois avoir bien calcul? les degr?s et les limites de

certaines chances, avoir relev? bien des choses caract?ristiques en

dehors de l'alignement des diphones voulus, mais enfin j'avoue que l'opinion d'un confr?re non pr?venu, et jugeant froidement, me

serait tr?s pr?cieuse. J'attends de vous ce service d'ami; si je n'ai

supprim? dans l'expos? aucun d?tail ou aucune conjecture, c'est

pr?cis?ment pour que vous ne jugiez pas sur l'impression favorable

que donne un seul anagramme tir? du texte, mais sur l'impression moins encourageante que donne leur multiplicit? m?me.

Veuillez en m?me temps, je ne le dis qu'en passant connaissant votre discr?tion, consid?rer cette communication comme faite tout

? fait entre nous.

En partant du fait latin (consid?r? provisoirement comme assu

r?), la premi?re id?e qui pouvait venir est que l'allit?ration germa

nique ? son tour pouvait n'?tre que le reste d'une po?sie phonisante dans son ensemble, et que l'on pouvait tr?s naturellement s'expliquer qu'il ne rest?t que les correspondances initiales par la destruction des fins de mots, qui ?tait une circonstance linguistique intervenant

pour le versificateur, et lui assignant pour ainsi dire d'avance la

syllabe initiale comme dernier si?ge des ?quivalences phoniques. Mais je commence m?me ? soup?onner davantage.

- N'ayant

ici sous la main aucun texte, je ne voudrais rien affirmer : toutefois les d?bris qui me reviennent de l'Hildebrandslied, depuis que je me

suis pos? la question d'une correspondance totale ou anagramma

tique, comme en latin, me semblent parfaitement justifier cette

hypoth?se qui semble hardie : - non seulement je vois beaucoup de

correspondances hors de la syllabe initiale, mais aussi la forme

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 22: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 113

anagrammatique du phonisme. Les fragments du d?but dont je me

souviens donnent parfaitement HADUBRAND. Il y a d'abord, sauf

erreur, Ih gih?rta dai seggen o? Ton a le diphone -AD- (gih?rt -

ad-at), pr?c?d? d'un h comme indication. Un peu plus loin helidos

libar hring? qui apporte ub, et de nouveau en bon accompagnement, car -ar- fait allusion au -ra- qui vient apr?s ub. La suite -? - ?r - a

de Hadubrand est imit?e dans sunufatarungo et dans garutun qui se trouve sauf erreur dans les environs. Le nd est dans inti (== andi) de Hiltibrant inti Hadubrant,

- etc. Et il y a aussi plus bas l'ana

gramme deDeotr?ch (?)eodric). Avec ou sans confirmation que le phonisme du vers germanique

?tait total, et non initial, il est naturel aussi de se poser la question

pour les hymnes v?diques. Je n'ai pas pouss? tr?s loin les recherches de ce c?t?, que j'avais

vaguement entreprises l'an dernier.

Sur le point des chiffres pairs de consonnes les quelques r?sultats

que j'avais obtenus ?taient favorables. Malheureusement les deux

circonstances des vers qui peuvent ?tre interpol?s et de l'incertitude

sur l'?tat exact du sandhi ? prendre pour base, rendent les recher

ches extr?mement difficiles.

Mais il reste au moins la question de l'anagramme qui peut s'examiner ind?pendamment du reste, dans le V?da comme ailleurs.

Or, il n'y a pour moi aucun doute - ou pas davantage que pour le

Saturnien latin - que la po?sie v?dique est litt?ralement tapiss?e

d'anagrammes, et que le po?te n'avait presque rien fait quand il

s'?tait born? ? mettre ses syllabes dans une forme m?trique, le

principal pour lui ?tant probablement d'ins?rer le nom des dieux

ou le nom des donateurs dans des cryptogrammes du vers.

Pour s'en convaincre il n'y a qu'? prendre ce dernier chapitre des donateurs, en relevant dans l'Anukraman? (fin de l'?dition Auf

recht) les diff?rentes d?na-stuti qui figurent aux Mandala VI,

VII, VIII; et on voit que r?guli?rement le nom du donateur est

sing? dans toutes ses syllabes, soit dans les vers directement rela

tifs au don, soit quelquefois d?j? dans ceux qui pr?c?dent. Mais de

m?me les neuf dixi?mes des hymnes que j'ai parcourus au point de

vue du nom de la divinit? qui est invoqu?e fournissent ce nom d'une

mani?re non ?quivoque et quelquefois par des imitations qui sau

tent aux yeux.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 23: Lettres de Saussure à Meillet

114 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

Conclusions g?n?rales: Io Avant que le texte sacr? des hymnes ait ?t? ce qui a donn? naissance aux ?tudes phon?tiques des Hindous, les po?tes qui les avaient compos?s ?taient eux-m?mes des phon? tistes, du moins des techniciens exerc?s par leur m?tier ? conna?tre un son d'un autre, et ? en faire des combinaisons savantes.

2? C'est depuis les temps indo-europ?ens que celui qui composait un carmen avait ? se pr?occuper ainsi, d'une mani?re r?fl?chie, des

syllabes qui entraient dans ce carmen, et des rimes qu'elles formaient entre elles ou avec un nom donn?. Tout vates ?tait avant tout un

sp?cialiste en fait de phon?mes. - Et c'est ainsi que s'expliquent

une foule de choses relatives ? l'alphabet runique germain, et ? la

signification du stab qui est ? la fois ?l?ment de l'alphabet et ?l?ment

de versification. [Si les phon?mes devaient se trouver en chiffre pair, on comprend par exemple que le po?te devait, pour s'y retrouver avec quelque s?ret?, choisir, pour les repr?senter, quelque chose comme des cailloux ou des baguettes (stab) qui lui indiquassent au

fur et ? mesure de la composition o? il en ?tait pour chaque esp?ce de phon?mes, de stabs.]

3? Il est probable que les diff?rents jeux phoniques de la versifi cation sont partis de l'anagramme, qui n'est plus qu'un de ces jeux ? la fin. En effet on comprend l'id?e supersitieuse qui a pu sugg?rer que pour qu'une pri?re ait son effet, il fallait que les syllabes m?mes du nom divin y fussent indissolublement m?l?es : on rivait pour ainsi

dire le Dieu au texte, ou bien si on introduisait ? la fois le nom du

d?vot et le nom du dieu, on cr?ait un hen entre eux que la divinit? n'?tait pour ainsi dire plus libre de repousser.

4? Partie d'invocations et de pri?res, cette po?tique phonisante, et sp?cialement l'anagramme, passait tout naturellement ? d'autres

pi?ces lyriques, comme les po?mes en l'honneur d'un mort. Mais de l?, et quand une po?sie ?pique se d?veloppa, l'habitude

et la tradition devaient presque fatalement transporter dans ce nouveau genre la pratique des anagrammes, et il n'y aurait rien d'?tonnant ? ce que m?me les Grecs aient eu besoin d'un certain

temps avant de d?barrasser leur po?sie de ce vieil attirail indo

europ?en.

Voil? une lettre bien longue, surtout venant s'ajouter aux feuilles

que vous recevrez par l'autre pli. N'y donnez, je vous prie, que des

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 24: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 115

moments perdus, vous devez ?tre occup? en ce moment o? les vacan ces tirent ? leur fin.

Croyez-moi votre affectueusement d?vou?

Fd de Saussure

J'ai ?t? bien aise d'apprendre la nomination de M. Vendryes que vous m'annoncez.

J'avais appris avec chagrin la mort de M. Victor Henry. Quoique je ne fusse pas particuli?rement li? avec lui, nous avions plus d'une fois correspondu.

15 d?c. 07 Mon cher ami

Merci de votre int?ressant article sur Mitra.25 J'ai ?t? tout ? fait convaincu. Et votre r?sultat est d'autant plus important qu'il r?tablit l'unit? dans l'ensemble de la famille des Adityas, faussement tiraill?s en divers sens dont entre autres le sens naturaliste.

Mitram ? contrat ? me para?t expliquer lumineusement pourquoi, m?me au sens d'ami, le sanscrit emploie le mot au neutre. A peu

pr?s, ?videmment, comme nous disons une ? relation, une connais sance ?, ou comme le latin necessitudo.

J'imagine que vous n'aurez pas propos? votre ?tymologie -

s?duisante - de Varunas, sans un doute par-devers vous sur la

fa?on dont vratam arrive ? se rattacher ? la famille de Forj-roa. Il est vrai qu Va long n'est pas inconnu de l'iranien, et c'est ce qui aura d?termin? votre jugement dans cet imbroglio de formes semi

concordantes. Mais comment se rendre compte de vr?tam?? M?me

l'analyse vr-ata- n'est pas une ressource, puisque nous trouvons ?a

et l? -atha, jamais -ata- comme suffixe appropri? ? un mot comme

vratam. (Je ne parle pas des adjectifs en -ata-, dar?ata-, eux-m?mes

peu r?pandus.) Peu dispos? comme vous ? croire au rapport de Varunas avec

ovqolvo?, et frapp? aussi de la nature morale de cette divinit?, mais surtout du caract?re particulier qui fait qu'? tout moment Varuna

26 Meillet, Le dieu indo-iranien Mitra (Journal Asiatique, 1907, I, pp.

143-159).

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 25: Lettres de Saussure à Meillet

116 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

est le dieu qui ch?tie, qui envoie de terribles punitions pour un

p?ch?, je me suis plus d'une fois demand? si un r?flexe europ?en de ce vieil ?ditya ne se trouvait pas dans le v?lnias des Lituaniens, ou plut?t dans leur veVina.s (dont v?lnias me para?t un d?riv?). Comme c'est justement le groupe des Adityas qui para?t, par le bog? slave, avoir joui des faveurs de ce rameau de populations indo-europ?en nes, il ne serait pas tr?s surprenant qu'un v?linas baltique ait exist? comme dieu des ch?timents pour une faute morale, et ait laiss?, ensuite, le diable pour h?ritier de son nom, tout en se trouvant, par les origines, identique au Varunas hindou.

Il m'a toujours sembl? qu'un autre Aditya, Aryaman-, devait se cacher dans le Irmin-got des Germains, justement invoqu? comme vous l'avez marqu? pour d'autres, ? propos des serments (w?ttu

Irmingot). La double forme Irmin- et Erman- (Ermana-r?cus) montre qu'il n'y a pas ? esp?rer, certainement, de co?ncidence rigou reuse avec Aryaman- (qui, d'ailleurs, offre un type de mot tellement ? part qu'un remaniement de ce mot serait tout ? fait naturel par tout).

- Au point de vue du sens, le fait que irmin- ne se rapporte proprement ? aucune figure divine, mais signifie simplement ? uni versel ? avec une nuance de crainte religieuse devant l'universel

<irmin-s?l colonne mondiale etc> est absolument d'accord avec le caract?re plus ou moins impersonnel des"?dityas, et ?quivalent ? la puissance morale sociale aper?ue comme puissance relative au monde. Ce qui est dit d'Aditi dans le sens de l'universel, et de

s?par? ainsi des dieux en chair et en os, est d'accord. Je termine ma lettre en vous annon?ant que j'ai un nouveau

cahier consid?rable d'anagrammes tir?s cette fois de Lucr?ce. Il n'y a pas de diff?rence visible avec Virgile pour la cons?quence avec

laquelle l'anagramme est cultiv?. Mais que ce me soit l'occasion de vous r?p?ter que vous ne devez pas vous presser pour me r?pondre malgr? l'importance de premier ordre que j'attache ? votre appr? ciation sur ce que je vous ai soumis.

Votre bien d?vou?

F. de Saussure

* C'est probab* le fait que velinas ou v?lnias sont r?partis dialectalement

qui a fait croire ? un rapport d'identit? l? o? il n'y a qu'un rapport de d?ri vation.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 26: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 117

[18 d?cembre 1907] 26

Mon cher ami

Re?u ce matin avec vos lignes la nouvelle ?dition de l'Introduc tion aux Langues indo-europ?ennes,

- bien aimable envoi de votre

part, et qui me fait le plus grand plaisir. Je ne suis pas surpris que vous ayez d? dans un espace de temps assez court r?pondre de nouveau ? la demande du public. Je n'ai pu voir encore, en parcou rant le volume, qu'une partie des innovations et modifications qu'il porte, et qui m'int?ressent d'avance beaucoup. Merci de ce nouvel et bien amical envoi, et f?licitations cordiales au nouveau venu dans votre belle s?rie.

Le ? retard ? dont vous parlez ? propos des cahiers d'anagram mes n'existe pas. J'esp?re bien que vous n'avez pas vu dans mon

billet sur Mitra la sub-intention de vous presser pour cette lecture, c'?tait, je puis vous le dire, aussi ?loign? que possible de ma pens?e.

Votre bien d?vou?

F. de Saussure 17 d?c.

Je pense vous envoyer un petit article pour les M?langes Havet

qui arrivera pt-?tre seulement vers le 5 janvier, [k moins de n?cessit?

absolue pour le 31 d?c. mais je ne ferai pas attendre en tous cas au

del? du terme indiqu?j.

26 Cachet de la poste.

Mon cher ami,

8 janvier 1908

Je me vois en retard sur la date ? laquelle je pensais pouvoir envoyer le petit manuscrit pour les M?langes Havet, je serais bien

d?sol?, et plus que cela, si je n'?tais pas au nombre de ceux qui ap

porteront leur hommage ? notre ami, et j'esp?re beaucoup que mon

p?ch? n'est pas encore irr?missible.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 27: Lettres de Saussure à Meillet

118 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

Apr?s vous avoir impos? un monticule de notes sur Virgile et

Lucr?ce, j'en suis ? regretter mon inclairvoyance dans le choix des

auteurs que j'aurais pu songer ? ?tudier d'abord, - et qui a pour

r?sultat de vous avoir offert ? examiner et ? juger la partie la plus

ingrate de l'anagramme latin.

Les petits po?mes des ?l?giaques et des ?pigrammatistes auraient

d? me sembler d'embl?e d?sign?s comme un terrain plus commode

pour les recherches. En quelques heures pass?es sur Catulle et Tibul

le, ou sur quelques recueils comme les Priapea, et les Carmina

Epigraphica, je me suis form? une certitude qui d?passe fort, et qui n'a point d'analogie, avec celle que j'avais retir? de tout le reste

pendant des mois. Ce n'est que l? que j'ai cess? tout ? fait de douter, non-seulement quant ? l'anagramme en g?n?ral, mais sur les princi paux points qui en forment l'organisme, et qui pouvaient sembler

n?buleux. Le principe du mannequin se v?rifie compl?tement. Ennius d'autre part, surtout dans les fragments sc?niques, ap

porte une lumi?re et une pl?nitude de v?rifications qui ne laisse

vraiment presque plus rien ? d?sirer.

J'admettais que cette fureur du jeu phonique, sortie de la po?sie saturnienne, ?tait all?e decrescendo, et qu'Ovide pouvait en ?tre

probablement le dernier repr?sentant. Profonde erreur. Autant que

je vois d?j? par un regard fugitif sur l'?poque imp?riale, l'anagram me n'a fait que reprendre de nouvelles forces, il est par exemple d'une clart? absolue chez Stace. Chose plus incroyable, il est en

pleine vigueur chez Claudien aux derni?res limites de la latinit?. Et

toujours sur les deux principes centraux du diphone et du manne

quin, sans d?g?n?rescence visible vers d'autres moyens plus libres.

Dans cette cha?ne, les comiques ont probablement une situation un peu ? part, soit pour une moins grande fr?quence des anagram mes soit pour quelques d?tails de ? style ?, mais il ne songent pas

plus que les autres ? se d?livrer en principe de l'anagramme. J'ai pu faire un recueil d?j? consid?rable d'anagrammes plautiniens, qui sans doute, en eux-m?mes, ne seraient pas des meilleurs ? donner

pour entra?ner la conviction; mais qui, du moment que le principe est constant par ailleurs, apparaissent comme ?vidents. Par exem

ple, et au hasard parmi les exemples, le commencement de la der ni?re sc?ne du Trinummus donne Lesbonicus par

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 28: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 119

80NITU + BENEV0LEN8 + AM IC US ? ONI ? B? LES? ? ICUS

Dans la douzaine de vers qui pr?c?de, et qui tombe dans la sc?ne pr?c?dente, le m?me LESBONICUS avait d?j? re?u deux

anagrammes successifs, autour des mots leviorem et laboris. Les fins de pi?ces portent, dans les 3 ou 4 derniers vers, le nom de la

pi?ce en anagrammes, comme Trinummus, Menaechmi, etc.

Tout cela, comme je vous en dois l'aveu, est venu modifier mon

point de vue dans le sens d'une certitude beaucoup plus grande que celle que je pouvais avoir encore il y a dix jours en vous ?crivant. Je ne vois d?cid?ment plus la possibilit?, pour ce qui me concerne, de garder un doute, et je sens que les repr?sentations qui me seraient

faites sur telles ou telles obscurit?s chez Virgile ou Lucr?ce n'au raient plus d'effet pour me d?tourner d'une conclusion que je crois absolument certaine pour tout le monde, d?s qu'on verra le carac

t?re tout ? fait illimit? du fait et de ses exemples. Au cas o? vous aurez d?j? pris la peine de lire mes cahiers, ne

manquez pas de me dire quelle impression vous en aviez retir?e, ce qui a un grand int?r?t pour voir si Virgile et Lucr?ce, pris s?pa r?ment du tout, sont convaincants ou non. Ne les lisez pas sans cela, car je r?p?te que je suis aux regrets de vous avoir envoy? la partie la moins int?ressante de ces anagrammes latins. Dans les deux cas,

je me souviens avec une bien v?ritable gratitude du concours amical

que vous m'avez donn? au d?but de cette recherche, lorsque nous

parlions du vers saturnien, et que vous m'avez donn? un appui

pr?cieux par votre critique; car je crois bien qui si vous ne m'aviez

pas confirm? que l'id?e de l'anagramme ne vous semblait pas fausse,

d'apr?s les exemples saturniens, je n'aurais pas eu l'id?e de pour suivre une recherche qui se trouve solutionn?e compl?tement en

dehors du Saturnien et de mon objet primitif.

Votre afft d?vou?

F. de Saussure

Merci de votre aimable carte du 1er janv. ? propos de l'envoi de Lucr?ce.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 29: Lettres de Saussure à Meillet

120 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

Gen?ve, 20 Mars 11.

Mon cher ami,

C'est une attristante nouvelle qui m'arrive par votre faire-part, et un bien profond deuil, comme je le vois, qui s'est ?tendu sur vous

depuis quinze jours, sans que je vous aie su dans ce chagrin. Je

suis ?mu d'apprendre un ?v?nement qui doit changer bien des cir

constances en votre vie. C'est plus qu'une parente, m?me particu li?rement ch?re, que vous perdez, n'est-ce pas. J'imagine que quel que chose de ce qui ?tait votre foyer, votre centre peut-?tre intime

par les affections, a d? dispara?tre avec celle qui vous est enlev?e.

Il m'est permis de vous exprimer ma plus douloureuse sympathie. Je ne le fais point sans avoir encore tout pr?sent ? mon souvenir

l'accueil empreint de gr?ce et de cordialit? que je recevais, voici voici deux ans, de la personne respect?e dont vous m'annoncez

que la mort vous a s?par?. C'est d'une mani?re subite que l'?v?nement vous a surpris, je ne

sais rien hors du faire-part que je viens de lire, et si, sans ?tre indis

cret, je pouvais esp?rer de vous quelques mots, ils r?pondraient au v u bien naturel de mon amiti?.

Dans le deuil que nous ?prouvions nous-m?mes il y a quelques mois vous me faisiez parvenir votre sympathique souvenir, dont

je ne vous ai pas encore remerci? : mais innombrables au reste sont,

depuis 18 mois, les occasions o? j'ai n?glig? de vous donner tout

signe de ma propre existence. - Et je ne vous en parlerai pas au

jourd'hui. -

Il y a une occasion seulement, celle de ma nomination comme

correspondant de l'Institut,27 o? je puis attester que j'avais bien

pris la plume pour vous ?crire. J'avais toute esp?ce de choses ? vous

dire, en particulier des choses que je pense tellement qu'elles ne

perdent rien ? ne pas ?tre ?crites encore. Il faudra bien que je vous

dise, ou que je dise publiquement une bonne fois, mon t?moignage sur A. Meillet, et son uvre; afin que l'on ne se m?prenne pas (comme ce serait possible d'apr?s le m?me A. Meillet) sur celle de F. de Saussure. - C'est presque par une m?prise de ce genre, abondam

27 Voir l'Appendice I.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 30: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 121

ment pr?par?e par Meillet qtie je me trouve correspondant de l'Institut.

Un peu agac? par des f?licitations ne correspondant ? aucun

honneur ambitionn?, je pris le train un jour pour ne plus entendre

parler de l'Institut et de ses pompes, c'est ainsi que je m'explique que ma lettre soit rest?e en route. Si reconnaissant que je fusse de la distinction re?ue, j'avais, et j'ai encore trop de r?serves ? faire. -

Le jour qui ne saurait tarder, o? vous serez membre titulaire de

l'Acad?mie, nous aurons une satisfaction, et nous pourrons dire que la Linguistique dans sa pl?nitude est entr?e ? l'Acad?mie, en m?me

temps que le promoteur des ?tudes linguistiques en France. Je suis charg? par ma femme, ainsi que par ma belle-s ur

Madlle Faesch, de vous pr?senter, avec leur bon souvenir, leur

message de condol?ance dans le deuil que vous venez d'?prouver. Vous savez tous les sentiments sinc?res avec lesquels je suis, dans cette circonstance et toujours, mon cher ami,

Votre d?vou?

F. de Saussure

Gen?ve, 17 avril 1911

Mon cher ami

Merci de vos lignes cordiales, re?ues l'autre jour ? propos d'un

triste ?v?nement dont vous avez ?t? frapp?. Je ne sais pas combien de remerciements je vous dois au juste

pour tous les ?crits, plus int?ressants les uns que les autres, dont

j'ai re?u ma part gr?ce ? votre toujours fid?le souvenir. Voici des

mois nombreux, je vous le disais, que j'aurais d? moi-m?me vous

donner quelque signe de vie.

Votre article sur le uh de pituh 28 est un de ceux qui m'ont fourni

mati?re ? r?flexion en dernier Heu, et je crois ?tre presque d'accord

pour accepter vos conclusions sur ce point terriblement difficile. -

Je ferais malgr? tout quelques r?serves sur la possibilit? que -ur

soit sandhi de -r devant voyelle. Nous voyons assez semblablement n se d?velopper en -an par sandhi devant voyelle ou semi-voyelle

28 Meillet, M?langes (Tindianisme offerts ? Sylvain L?vi, 1911, p. 17 sq.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 31: Lettres de Saussure à Meillet

122 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

(vrsan -a?va-, vrsan -vasu-). -

C'est peut-?tre particuli?rement dans

votre th?se qu'on pourrait ramener dhanuh (arc) ? *dhanvr, plac? dans le m?me rapport avec dhanvan- que yak-rt avec yak-an- etc. De m?me paruh en regard de parvan-. Type tie?qolq, ne?gocrog, sans affirmer que parvan- soit ?tymologiquement nelgouq, comme ce serait au reste possible par le sens et par la forme, ?miooDv, exacte

ment comme su-dhanvan- en regard de dhanuh. - Trouveriez-vous

une excuse ? la chute du iv

|*dhanvuh) li?e ? votre conception de l'uh ?

*dhanvr - [Analogiquement dhanus? etc.].

Wackernagel -

qui a fait, para?t-il, une apparition ? Paris -, m'envoie le 2? fascicule de ses ?tudes avestiques en collaboration avec Andreas.29 Je vous avoue, entre nous, que je ne puis presque pas concevoir la forme que ces deux auteurs adoptent pour faire

part de leurs id?es, peut-?tre parfaitement justes en elles-m?mes. J'ai entendu dire que vous envoyiez Gauthiot ? Goettingue pour en entendre davantage, et vraiment ce ne sera pas de trop pour appren dre en langage clair ce que veut la nouvelle ?cole.

- Toute la sp?culation d'Andreas et Wackernagel, autant que je l'aper?ois, revient ? dire qu'il y a eu, dans la premi?re scripture de l'A vesta, cinq ou six signes ?minemment incertains dans leur valeur.

Apr?s quoi on est ?tonn? de voir la conclusion qu'ils en tirent, et qui est celle-ci: avec cette incertitude nous allons faire de la certitude.

A la grande rigueur, si c'?tait vrai, il faudrait au moins une

explication de principe sur toutes les choses ind?pendantes de l'?cri ture aram?enne dont on part pour imposer ? celle-ci (elle-m?me reconstruite) des valeurs aussi d?termin?es. - On voit ? peu pr?s la part faite au v?dique. Quelle est celle qu'on fait au persan? Quelle est celle qu'on fait ? un dialecte que les auteurs eux-m?mes

d?signent comme tr?s ?loign? du persan, comme ost-iranisch? Quelle est celle qu'on accorde ? une transmission par m?moire et par rite des m?mes textes? -

Enfin, chose indispensable, il faudrait qu'on nous montr?t par le d?tail comment l'alphabet avestique est n?, sa

position vis-?-vis de l'?criture pehlevi, et vis-?-vis des signes ara

29 Andreas-Wackernagel, Nachrichten der G?ttingischen Gesellschaft der

Wissenschaften, 1911, p. 1 sqq.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 32: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 123

m?ens, la raison de sa diff?rence avec l'ordinaire pehlevi, etc. Je suis un peu ?tonn? que ces questions ne semblent pas exister du tout pour MM. W. et A, au moins qu'ils n'en fassent pas mention au lecteur.

Comme je l'?cris ? Wackernagel, James Darmesteter nous ensei

gnait, dans les conf?rences de 1881 ? l'Ecole des Hautes-Etudes, ? propos d'un cours de pehlevi, que pour lui tout le texte de l'Avesta n'?tait qu'une transcription, sujette ? caution dans toutes ses formes. Rien de nouveau n'est r?sult? pour moi de ce qu'?crivent W. et A. sauf les d?tails a??rmatifs.

Votre affn? F. de Saussure

Mon cher ami

Cette carte vous trouvera-t-elle ? Paris ? Y serez-vous du moins la semaine prochaine? Je le souhaite beaucoup, pensant pouvoir

m'arr?ter ? Paris au cours de la dite semaine, et ne disposant gu?re d'autre part de plus de deux jours, probablement de mercredi ? vendredi.

Ecrivez-moi un mot s.v.p. ? l'adresse ci-dessous. Merci d'avance,

et j'esp?re ? bient?t -

Votre d?vou?

F. de Saussure

11 oct. 11.

c/o Major H. Ross-Johnson

Mettingham Castle

Bungay (Suffolk).

Cette carte d'Octobre 1911 est le dernier message conserv?, et si la ren contre eut lieu, ce fut la derni?re: dix-huit mois plus tard F. de Saussure

mourait, le 22 F?vrier 1913. A. Meillet a gard? aussi la lettre que lui ?crivit Mme F. de Saussure en

r?ponse ? celle qu'elle avait re?ue de lui le 6 Mars de cette ann?e. Nous

croyons devoir la reproduire ici ; elle fait mention des premi?res d?marches

qui devaient aboutir ? la r?daction du Cours de Linguistique g?n?rale.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 33: Lettres de Saussure à Meillet

124 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

Lettre de Mme Marie de Saussure ? A. Meillet

Cher Monsieur

Vous m'excuserez cette fois encore de venir si tard vous remercier

de votre aimable lettre du 6 mars, ainsi que du t?moignage si

affectueux que vous avez rendu ? la m?moire de mon mari ? l'ou

verture de vos cours au Coll?ge de France et ? l'Ecole des Hautes

Etudes. - Je ne puis vous dire combien j'y suis sensible et c'est de

tout mon c ur aussi que je m'associe ? tous les regrets qui m'ont ?t?

exprim?s au nom de la science ? l'occasion de la mort de mon mari.

Je sais avec quel int?r?t il suivait les ?tudes et les travaux de ceux

qui lui succ?dent dans la carri?re et vous savez que rien dans ce

domaine ne lui ?tait indiff?rent. - Il a donn? le meilleur de son temps ? son enseignement, et la pr?paration de ses cours l'absorbait au

point de l'emp?cher de publier d'autres travaux personnels. -

Et maintenant plusieurs de ses ?l?ves m'ont demand? s'il n'y aurait pas, dans ses notes, quelque chose ? publier. Ce serait naturel

lement chose ? voir et ? laquelle je ne voudrais pas m'opposer d'embl?e; mais, cher monsieur, vous avez assez connu mon mari,

pour savoir avec quelle scrupuleuse conscience il abordait chaque

question et j'ai l'impression qu'il faudrait en tous cas ne rien publier trop vite car je ne voudrais rien faire qu'il n'e?t pas approuv?. Peut-?tre qu'en compulsant les notes prises par diff?rents ?l?ves en

diff?rentes ann?es pourrait-on avoir une id?e assez compl?te d'un de ses cours, mais pour cela aussi il ne faut rien presser.

- N'est-ce

pas aussi votre avis. - On peut quelquefois par une publication trop h?tive, d?florer un travail qu'on pourrait avec le temps faire plus complet. Je suis, naturellement, incomp?tente dans cette question, cependant je sais que mon mari n'agissait jamais avec pr?cipitation et que ce qu'il a donn? ? la science ?tait le fruit de travaux m?rement

r?fl?chis. - J'avais l'intention de r?unir dans une petite brochure les articles et t?moignages re?us ? l'occasion de la mort de mon mari,

mais je veux attendre pour cela que les articles ? venir aient paru.

J'esp?re pouvoir me procurer plus tard ceux que vous ferez

para?tre dans les M?moires de la soci?t? de linguistique et l'Annuaire de l'Ecole des Htes Etudes. J'ai pens? que ce serait un souvenir

pour la famille et les amis. -

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 34: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 125

J'esp?re, Cher Monsieur, que si vous veniez une fois de nos c?t?s, vous me ferez le plaisir de venir me voir. - Je serais toujours heureuse de serrer la main ? ceux qui se sont associ?s de c ur ? notre grand deuil.

Recevez, Cher Monsieur, mes meilleurs compliments

Tertasse 2, Gen?ve

le 25 Mai [1913]

Marie de Saussure

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 35: Lettres de Saussure à Meillet

Appendice i

On a vu ci-dessus p. ... dans la lettre du 20 Mars 1911, une

allusion de F. de Saussure ? son ?lection comme correspondant de

l'Institut de France. Cette distinction lui fut conf?r?e par l'Acad?mie

des Inscriptions le 9 d?cembre 1910.30 Le d?c?s de Saussure fut annonc? ? l'Acad?mie ? la s?ance du

28 f?vrier 1913, et le pr?sident en exercice, No?l Valois, pronon?a son ?loge. Cette n?crologie est rest?e ignor?e, semble-t-il.31 Bien que,

press? par le temps et d'ailleurs peu familier avec le sujet, Valois se soit largement inspir? des articles de Muret et de Br?al publi?s dans la presse,32 sa notice m?rite d'?tre connue.33 En voici le texte.

Messieurs,

? J'ai le triste devoir de vous annoncer une nouvelle perte :

M. Ferdinand de Saussure, que nous comptions depuis 1910 au

nombre de nos correspondants ?trangers, vient de mourir pr?s de

Gen?ve, le 22 f?vrier, ? la suite d'une maladie qui le tenait, depuis plus d'une ann?e, ?loign? de sa chaire de linguistique.

? C'est une bien surprenante carri?re que celle de ce descendant de zoologistes, de botanistes ou de g?ologues illustres, qui, d?s l'ado

lescence, se consacre ? l'?tude compar?e des formes du langage,

80 Comptes rendus ole VAcad?mie des Inscriptions, 1910, p. 780. Saussure

r?pondit par une lettre de remerciement (Ibid. p. 790) que je n'ai pas retrou v?e dans les archives de l'Acad?mie.

31 Elle n'est pas mentionn?e dans la bibliographie de R. Godei, Sources manuscrites p. 18-19.

32 On les trouvera reproduits dans la plaquette intitul?e Ferdinand de Saussure, 1915 (r??dit?e en 1962). 33 Elle a paru dans les Comptes rendus de VAcad?mie des Inscriptions, 1913, pp. 68-70.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 36: Lettres de Saussure à Meillet

Documents 127

prend part, ? Leipzig, aux travaux de la Grammatische Gesellschaft dirig?e par le professeur Curtius et, ? moins de vingt ans, y pr?pare un ouvrage qui, quand il para?t, en 1878, op?re une r?volution. Bien

aride, en apparence, bien simple et modeste en la forme est ce fameux M?moire sur le syst?me primitif des voyelles dans les langues indo

europ?ennes, o? l'auteur ?tudie surtout les formes multiples sous

lesquelles se manifeste ce qu'on appelle l'a indo-europ?en; mais ce

mince in-octavo est, de l'avis des hommes comp?tents, une des uvres les plus p?n?trantes que la science des langues ait produites,

une de celles qui ont le plus hardiment fray? de nouvelles voies et

qui ont donn? aux id?es des linguistes leur orientation actuelle. Ferdinand de Saussure n'?tait pas encore docteur;

- il ne conquit ce grade, ? la Facult? de philosophie de Leipzig, qu'en 1880, avec une th?se sur VEmploi du g?nitif absolu en sanscrit ; - mais d?j?, en

ce tout jeune homme, on entrevoyait un chef d'?cole. ? Il le fut dans toute la force du terme quand, apr?s un court

s?jour ? l'Universit? de Berlin et un voyage en Lithuanie, au cours

duquel il avait recherch?, dans l'?tude directe des dialectes vivants, les secrets de l'histoire de la parole humaine, il fut venu se fixer ?

Paris. Son jeune fr?re, peu de temps apr?s, entrait dans la marine

fran?aise : l'un et l'autre se souvenaient de ces anc?tres lorrains que la tourmente du XVIe si?cle avait d?racin?s du vieux sol. El?ve de

plusieurs de nos confr?res, M. Br?al, Bergaigne, M. Louis Havet, ainsi que de James Darmesteter, Ferdinand de Saussure fut nomm?, d?s la fin de l'ann?e 1881, ma?tre de conf?rences pour les langues

germaniques ? notre Ecole pratique des Hautes Etudes. Il y fit

admirer, jusqu'en 1891, une parole d'une clart? et d'une ?l?gance souveraines, une m?thode impeccable, une hauteur de vues qui s'alliait ? la pr?cision du d?tail et ? l'?tendue de l'information.

Cet enseignement exer?a un influence d?cisive sur le d?veloppement des ?tudes de linguistique en France. D?sormais tout un groupe de

travailleurs actifs, convaincus, dont plusieurs allaient devenir des

ma?tres ? leur tour, se r?clama de Ferdinand de Saussure : disciples fid?les, qui se reconnaissent du premier coup, atteste M. Br?al, ? par ? l'importance qu'ils attachent ? la phon?tique et par le soin qu'ils ? apportent ? l'analyse des formes du langage. ?

? Lorsque, plus tard, c?dant aux instances de sa famille, Saussure

retourna en sa ville natale afin d'occuper une chaire d'histoire et

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 37: Lettres de Saussure à Meillet

128 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)

de comparaison des langues indo-europ?ennes cr??e pour lui en

rUniversit? de Gen?ve, il est tout juste que notre Gouvernement ait

voulu qu'il y emport?t, sous la forme d'un ruban rouge, un souvenir

de la France. Il est encore moins surprenant que ses anciens ?l?ves et ceux qui, sans l'avoir entendu, avaient subi son influence aient eu

l'id?e de lui offrir un t?moignage de leur gratitude: en 1908, parut ?

Paris, dans la Collection linguistique publi?e par la Soci?t? dont il

avait ?t?, durant neuf ans, le secr?taire adjoint, un volume intitul?

M?langes de linguistique offerts ? M. Ferdinand de Saussure, et parmi les signataires des quinze m?moires dont ce volume se compose, on

aper?oit, ? c?t? des noms de MM. Grammont, R. Gauthiot, G. Dot

tin, etc., celui de M. Antoine Meillet, qui, lui-m?me, alla en faire

hommage, le 14 juillet, au grand savant genevois, entour?, ce jour l?, de sa famille et des professeurs de l'Universit?.

? S?v?re pour lui-m?me, d?daigneux des succ?s faciles, content

de promener sa r?verie inqui?te sur les probl?mes les plus ?pineux, mais ?prouvant quelque r?pugnance ? fixer sa pens?e dans une r?dac

tion, Ferdinand de Saussure a peu ?crit: ses admirateurs ne s'en

consolent point. Si aux livres que j'ai mentionn?s, d'une si vaste

port?e, on joint de trop rares articles parus dans les Indogermanische

Forschungen de Streitberg, dans la Revue critique ou dans les M?moi res de la Soci?t? de linguistique de Paris, si l'on ajoute que, toujours pr?t ? rendre hommage au m?rite des autres, il collabora aux

M?langes Oraux (1884), aux M?langes Renier (1886), aux M?langes L. Havet (1909), on aura embrass? ? peu pr?s toute l' uvre imprim?e d'un savant que j'ai ? plusieurs reprises entendu qualifier de g?nial. Il dispara?t ? l'?ge de cinquante-cinq ans, alors que la science ?tait en droit de fonder sur lui encore tant d'esp?rances. Ce deuil atteint douloureusement notre confr?re M. Edouard Naville, ? qui vous me

permettrez d'adresser, en votre nom, l'expression de nos regrets et

de notre sympathie ?.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 38: Lettres de Saussure à Meillet

Appendice ii

C'est dans une note manuscrite laiss?e par Saussure 34 que les

noms de Baudoin et Courtenay et de Kruszewski sont mentionn?s, avec cette appr?ciation ?logieuse:

? Baudoin de Courtenay et Kruszewski ont ?t? plus pr?s que personne d'une vue th?orique de la langue ; cela sans sortir de

consid?rations linguistiques pures ; ils sont d'ailleurs ignor?s de la

g?n?ralit? des savants occidentaux ?.

Saussure n'avait gu?re heu de penser qu'aucun des linguistes de

son temps partage?t ses pr?occupations th?oriques ou f?t arriv? aux

m?mes vues touchant la nature de la langue. Comment donc a-t-il

connu, ? peu pr?s seul en Occident, les travaux de Baudoin de

Courtenay et de Kruszewski?

L'occasion en a ?t? une rencontre avec Baudoin de Courtenay ?

Paris. Ce fait ressort d'une lettre encore in?dite conserv?e dans les

archives de l'Acad?mie des Sciences de l'URSS ? L?ningrad, dont

Mme Slusareva dans son r?cent article 35 a cit? les premi?res lignes. Saussure ?crit ? Baudoin le 16 octobre 1889 : ? Je ne vois [? s?rement

? corriger : je ne sais] si je puis esp?rer que vous ayez gard? le sou

venir de l'occasion pour moi tr?s agr?able que j'eus de vous ren

contrer ? Paris il y a sept ans... ?.

Mme Slusareva ajoute: ?Le 21 Novembre 1881, jour o? Bau

doin de Courtenay a ?t? ?lu membre de la Soci?t? de Linguistique

34 D'apr?s R. Godei, Sources manuscrites y p. 51.

36 CFS. 20 (1963), p. 28, n. 9.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 39: Lettres de Saussure à Meillet

130 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1961)

de Paris, il ?crivait lui-m?me de Paris ? I. Karlovitch: ?...de

Saussure y ?tait ?galement ?.36

Il y a ici une date ? corriger et quelques pr?cisions ? ajouter. Si minimes que semblent ces d?tails, il importe de les reproduire exactement. Selon les Statuts de la Soci?t? de Linguistique qui n'ont jamais vari? depuis sa fondation en 1865-1866, ((l'?lection a lieu dans la s?ance qui suit celle de la pr?sentation ?. Baudoin de Courte

nay se trouvait en tant qu'? assistant ?tranger ? ? la s?ance du 19

(et non du 21) novembre 1881, o? il fut pr?sent? par A. Chodzko et H. Gaidoz. Mais, selon le proc?s-verbal, Saussure n'y ?tait pas. La Soci?t? re?ut en hommage ? cette s?ance plusieurs publications de Baudoin et de Kruszewski dont la liste est reproduite au proc?s verbal.37 C'est ? la s?ance suivante, celle du 3 d?cembre 1881, Saussure cette fois pr?sent, que Baudoin fut ?lu membre de la Soci?t?. De nouvelles publications de Baudoin lui-m?me et de Kruszewski furent offertes. A cette m?me s?ance Saussure pr?senta le d?but de sa communication sur la phon?tique du patois fribour

geois.38 La pr?sence de Baudoin de Courtenay est encore attest?e, en

m?me temps que celle de Saussure, aux s?ances du 17 d?cembre 1881 et du 7 janvier 1882. A cette derni?re s?ance Saussure put en

tendre Baudoin faire une communication ?sur divers points de

phon?tique slave ?.39 Les proc?s-verbaux de ces deux s?ances men

tionnent encore des publications offertes par Baudoin ? la Soci?t?, et de nouveau par la suite le 4 mars, puis le 4 novembre 1882.

On voit que Saussure a pu en d?cembre 1881 et janvier 1882

(il avait alors entre vingt-quatre et vingt-cinq ans) s'entretenir avec Baudoin de Courtenay, et en tout cas prendre connaissance de tout ce que ce dernier et son disciple Kruszewski avaient ?crit jus que l?.

Quand la lettre ? Baudoin aura ?t? publi?e, on saura ce qui ame nait Saussure ? renouer avec lui sept ans apr?s cette rencontre ? Paris.

38 L.c. avec les r?f?rences aux fonds d'archives o? ces lettres sont con serv?es.

37 BSL. V, p. LI. 38 Ibid. V, p. LU. 39 Ibid. p. LVIII.

This content downloaded by the authorized user from 192.168.52.70 on Thu, 29 Nov 2012 11:44:51 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions