Lettres de Saussure à Meillet
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Lettres de Ferdinand de Saussure àAntoine MeilletAuthor(s): Emile BenvenisteReviewed work(s):Source: Cahiers Ferdinand de Saussure, No. 21 (1964), pp. 93-130Published by: Librairie DrozStable URL: http://www.jstor.org/stable/27758046 .
Accessed: 29/11/2012 11:44
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LETTRES DE FERDINAND DE SAUSSURE A ANTOINE MEILLET
[4 janvier 1894]3 Cher Monsieur Meillet,
Vous me faites du bien en parlant presque au d?but de votre
lettre de novembre de votre ?pistoiophobie, en ce que je vois que je
parle ? quelqu'un qui ne sera pas incapable d'excuser la mienne.
Pour le reste, il para?t, et je m'en f?licite, que le mal n'est pas encore
chez vous ? son extr?me p?riode. S?rieusement, j'ai ?t? bien touch?
de votre lettre, comme j'avais ?t? tout ? fait d?sol? de ma maie
chance ? Paris. Je ne puis me pardonner encore ? pr?sent de ne vous
avoir pas donn? rendez-vous d'avance. D'un autre c?t?, le jour de
mon passage ? Paris d?pendait de plusieurs circonstances, et j'aurais pu ?tre forc? au dernier moment de le remettre de trois jours, c'est ce qui me d?conseillait de vous en avertir par lettre, j'?tais trop incertain de la date.
J'aurais ?t? bien curieux et bien int?ress? d'entendre vos diff?
rentes th?ories nouvelles sur l'accent. Les d?tails que vous m'?crivez
ne me donnent encore qu'une id?e tr?s vague par exemple sur ce que
peut ?tre votre accent d'intensit? du grec et la mani?re dont il serait
distribu? selon les syllabes. Si l'existence de cet accent se confirme,
je comprends parfaitement qu'il entra?ne des effets phon?tiques, tandis que je ne puis que rester tr?s sceptique ? l'endroit des pr?ten dus effets phon?tiques de l'accent jusqu'ici connu, par exemple
quand Wackernagel soutient que -eoa - donne -eqo - ou -
eig - sui
vant les conditions d'accent, ou quand Frankfurter veut que les deux
3 La date de 1894 a ?t? correctement inf?r?e de l'allusion au Xe Congr?s des Orientalistes, qui se tint ? Gen?ve en septembre 1894, par M. Godei, qui a publi? la fin de cette lettre (Sources manuscrites p. 31).
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94 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
traitements de voyelle+oj ou vj {%ol?qc? avec ?penth?se, mais ydeioco =
(pOeoco sans ?penth?se) d?pendent ?galement de conditions toniques. Je pose un point d'interrogation, c'est-?-dire de curiosit?, encore
plus grand quand j'apprends que la chute de Y e indo-europ?en ne
d?pend plus du ton. Entendons-nous : il y a beaucoup de chutes d'e
qui ne co?ncident pas du tout avec le ton, mais vous me laissez enten
dre que c'est l? m?me o? la co?ncidence para?t claire que vous niez le
rapport de cause ? effet. Ainsi, je suppose, dans im?s compar? ? ?imi ? ? A propos d'accent, avez-vous vu que Wackernagel dans son der
nier travail, tr?s int?ressant, sur l'Accent grec vous applaudit pour
l'explication de ?vOd?e, tout en regrettant la forme sommaire o? elle est con?ue.4 J'ai bien peur, entre nous, qu'il n'y ait au fond
malentendu, et que votre id?e ne soit pas du tout la sienne. J'ai commenc? ? lire votre second article sur les gutturales, mais
j'ai ?t? interrompu par les f?tes de fin d'ann?e qui m'ont emp?ch? de m'occuper depuis une quinzaine. Je suis actuellement ? Gen?ve
m?me, et ne retournerai ? Malagny que le 20 janvier. Vous aurez re?u ces jours-ci la circulaire d'invitation au Xe
Congr?s des Orientalistes, et je n'ai pas besoin de vous dire que je me berce fermement de l'espoir de vous y voir. Ce serait trop dom
mage v?ritablement qu'aucun de nos amis de Paris manqu?t ? cette f?te, et certainement sans faire intervenir mon souhait per sonnel, je crois que chacun aura l? une occasion tr?s facile, tr?s
naturelle, beaucoup plus difficilement retrouvable par la suite, de faire connaissance avec tous les hommes importants d'une sp?cialit?. Celle des langues indo-europ?ennes sera tr?s fortement repr?sent?e comparativement aux Congr?s pr?c?dents ; mais vous avez du reste un double titre ? prendre part au Congr?s, ? la fois comme arm?ni
sant, donc comme Orientaliste proprement dit, et comme simple ? linguiste comparatif?, ce qui est mon pauvre titre ? figurer je ne sais
trop pourquoi dans le Comit? d'organisation, sans que j'aie jamais fait de l'orientalisme.Comme du reste nous avons surtout des linguistes dans le Comit? g?n?ral Suisse que nous avons pu constituer, il est ? pr?voir, comme je le disais, que nous aurons des assises d'in
dogermanisme. Je doute peu que Brugmann etc.. soient pr?sents.
4 J. Wackernagel, Beitr?ge zur Lehre vom griechischen Akzent, 1893, p. 25 = Kleine Schriften, II, p. 1094, n. 1.
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Documents 95
Le commencement de mon article sur l'intonation va para?tre.5 Le 2d article terminera ce que je veux dire sur l'intonation et con tiendra 2? mes remarques sur l'accentuation, ainsi que sur Vinto nation lette, qui est (vous l'ai-je dit?) un effet de Y accentuation - sans
rapport avec Vintonation lituanienne ! ! Mais je suis bien d?go?t? de tout cela, et de la difficult? qu'il y a en g?n?ral ? ?crire seulement dix lignes ayant le sens commun en mati?re de faits de langage. Pr?occup? surtout depuis longtemps de la classification logique de ces faits, de la classification des points de vue sous lesquels nous les traitons, je vois de plus en plus ? la fois l'immensit? du travail
qu'il faudrait pour montrer au linguiste ce qu'il fait', en r?duisant
chaque op?ration ? sa cat?gorie pr?vue; et en m?me temps Tassez
grande vanit? de tout ce qu'on peut faire finalement en linguistique. C'est, en derni?re analyse, seulement le c?t? pittoresque d'une
langue, celui qui fait qu'elle diff?re de toutes autres comme apparte nant ? certain peuple ayant certaines origines, c'est ce c?t? presque ethnographique, qui conserve pour moi un int?r?t : et pr?cis?ment je n'ai plus le plaisir de pouvoir me livrer ? cette ?tude sans arri?re
pens?e, et de jouir du fait particulier tenant ? un milieu particulier. Sans cesse l'ineptie absolue de la terminologie courante, la n?ces
sit? de la r?forme, et de montrer pour cela quelle esp?ce d'objet est la langue en g?n?ral, vient g?ter mon plaisir historique, quoique je n'aie pas de plus cher v u que de n'avoir pas ? m'occuper de la
langue en g?n?ral. Cela finira malgr? moi par un livre o?, sans enthousiasme ni
passion, j'expliquerai pourquoi il n'y a pas un seul terme employ? en linguistique auquel j'accorde un sens quelconque. Et ce n'est
qu'apr?s cela, je l'avoue, que je pourrai reprendre mon travail au
point o? je l'avais laiss?. Voil? une disposition, peut-?tre stupide, qui expliquerait ?
Duvau 6 pourquoi par exemple j'ai fait tra?ner plus d'un an la publi
cation d'un article qui n'offrait, mat?riellement, aucune difficult?, -
5 M. Godei a cit? les lignes qui suivent d'apr?s une copie qui est inexacte en plusieurs endroits : notamment celui o? Saussure avoue ? Tassez grande vanit? (et non: vari?t?) de tout ce qu'on peut faire finalement en linguis tique ?. Il y a aussi des mots omis: ? sans cesse... ?;
- ? sans enthousiasme ni
passion ?. J'en ai donn? le texte rectifi? CFS. 20 (1963) p. 13. 6 Louis Duvau, alors administrateur de la Soci?t? de Linguistique, assu
rait la publication des M?moires.
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96 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
sans arriver d'ailleurs ? ?viter les expressions logiquement odieuses,
parce qu'il faudrait pour cela une r?forme d?cid?ment radicale.
Je vous adresse, cher Monsieur Meillet, mes meilleurs v ux pour la nouvelle ann?e, et vous prie de me croire
Votre affectueusement d?vou?
Fd de Saussure
4 Janvier.
Permettez-moi un petit post-scriptum. Vous voulez bien m'appeler votre ma?tre, et je serais bien flatt? d'avoir m?rit? ce titre en quoi que ce soit. Mais je tiens encore davantage ? un autre, et si vous le
voulez bien, nous correspondrons d?sormais entre amis.
Gen?ve 8 f?vrier [1900]7 Mon cher ami
J'avais lu avec beaucoup d'int?r?t un article de M. Gauthiot dans le dernier fascicule des M?moires,8 sans savoir que vous l'aviez
pour ?l?ve, et j'avais ?t? tr?s sensible, il y a peu de jours, ? l'envoi
qu'il m'a fait d'un tir? ? part dont je n'ai pu encore le remercier
n'ayant pas trouv? d'adresse sur la bande d'envoi. Je suis doublement aise d'apprendre qu'un linguiste dont les
d?buts sont aussi distingu?s est une de vos recrues, je vous en f?licite bien sinc?rement comme d'une r?compense due ? votre enseigne
ment.
Si M. Gauthiot arrive ? nous expliquer compl?tement dans le volume qu'il nous promet l'esp?ce d'antinomie qui semble r?gner entre la nature de l'accent primitif et ses effets sur le syst?me consonantique de 2 ou 3 langues, il nous aura rendu un bien grand service.
Je suis provisoirement frapp? du fait que M. Gauthiot parle des effets post-indoeurop?ens de l'accent, mais ne parle pas de ses effets
indo-europ?ens (r?duction de *kleutos ? Mut?s, de *deuo ? duo etc.).
7 La date r?sulte de l'allusion ? l'article de R. Gauthiot. 8 R. Gauthiot. A propos de la loi de Verner et des effets du ton indo
europ?en (MSL. XI, 1899-1900, pp. 193 sq.).
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Documents 97
D'autre part dans l'appr?ciation de l'accent hindou ne s'en tient il pas trop exclusivement aux Pr?ti??khyas ? c?t? des syst?mes vari?s du ?atapathabr?hmana, de la Maitr?yan?, etc. qui font d'un moment ? l'autre passer toute l'accentuation hindoue sous un v?ri table kal?idoscope, le blanc devenant noir, et le noir devenant
jaune, etc., sans autre constance que la place du ton, et avec les
plus complets renversements de la nature des diff?rents tons. Il me semble que c'est surtout aujourd'hui cette multiplicit?
d'interpr?tations du ton hindou d'apr?s les tr?s diff?rents syst?mes de notation hindous qui constitue le probl?me pour ceux qui s'atta chent ? la nature de l'accent.
Ce que vous me dites de votre activit? au Coll?ge de France 9
me cause le plus grand plaisir, car je suppose bien que M. Br?al a voulu ainsi montrer compl?tement le cas qu'il fait de vous, sans ?tre autrement emp?ch? par sa sant?. Comme vous ne m'en parlez pas,
je suppose que notre excellent ma?tre se porte bien, et je vous prie de lui apporter mon salut quand vous le verrez. Ma v?n?ration pour lui est enti?rement ind?pendante des lacunes de ma correspondance, de m?me que mon amiti? pour d'autres
Affectueusement ? vous
F. de Saussure
Meillet suppl?a Br?al au Coll?ge de France pendant Tann?e 1899-1900.
Mon cher ami
9 F?vrier [1900]10
Permettez-moi un post-scriptum pour vous demander de pr? senter avec moi ? la Soci?t? de Linguistique M. Charles BALLY,
privat-docent ? l'Universit? de Gen?ve, 24 rue du Mont-Blanc, Gen?ve. Mr Bally s'occupe depuis plus de dix ans de sanscrit et de
grammaire compar?e quoique son enseignement ne porte pas sur
ces sujets. Vous vous souvenez peut-?tre de l'avoir rencontr? au
Congr?s des Orientalistes de 1894. Il d?sire depuis longtemps faire
partie de notre Soci?t?, et je me reproche de n'avoir pas transmis
10 La date est indiqu?e par le texte m?me.
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98 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
plus t?t sa demande, aussi je m'empresse de r?parer mon nouvel
oubli d'hier.11
J'ai peut-?tre oubli? aussi de vous dire que naturellement je serai tr?s honor? si M. Gauthiot me communique son manuscrit et que je me promets d'avance grand plaisir de cette lecture. Si je ne l'ai pas dit, c'est comme vous l'aurez compris que cela allait sans dire.
Hirt et son Ablaut me semblent comme vous le dites p?cher sur
tout du c?t? de la facult? critique. En g?n?ral un livre sur l'Ablaut
devrait ?tre compris d'une mani?re moins ?triqu?e que ce n'est le cas de la part des Allemands. Un sujet comme l'Ablaut place celui
qui veut en parler ? fond dans une position o? il lui est interdit de n'avoir pas des vues sur l'ensemble des progr?s obtenus en lin
guistique depuis vingt ans, - m?me en ce qui concerne la m?thode
g?n?rale, car l'ablaut est une alternance, et la th?orie des alternances est la base de la m?thode.
Votre d?vou?
F. de Saussure 9f?v.
11 Ch. Bally fut en effet pr?sent? ? la Soci?t? de Linguistique par F. de Saussure et A. Meillet le 24 f?vrier 1900 (BSL. XI, p. LXXII).
Creux-de-Genthod pr?s Gen?ve. 27 novembre
[1900] 12 Mon cher ami,
vous m'obligeriez beaucoup en me faisant savoir de suite par carte postale si le banquet en l'honneur de M. Br?al est fix? au 1er d?cembre, comme le dit le Temps, ou au 3 d?cembre comme il me semble l'avoir lu dans la circulaire de la Soci?t?,
- circulaire que je ne retrouve pas.13 A mon grand regret il me sera pas possible de me
12 Cachet de la poste: Gen?ve 28.XI.00. 13 Le banquet en question, pour f?ter le 25e anniversaire de l'entr?e de
Michel Br?al ? l'Institut, eut lieu le 1<* d?cembre 1900 (BSL. XI, p. CLXXV). et F. de Saussure s'associa ? cette c?l?bration par un t?l?gramme (ibid. p. CLXXVIII et CLXXIX).
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Documents 99
rendre ? Paris pour prendre part ? cette f?te, comme je l'avais
esp?r? d'abord, mais je tiendrais d'autant plus ? ne pas manquer de m'y associer par un modeste t?moignage t?l?graphique, et vous
seriez bien aimable ? ce propos de me dire Vadresse exacte o? je puis envoyer le t?l?gramme.
Merci d'avance, et mille affectueux souvenirs
F. de Saussure
Je voulais vs remercier depuis longtemps de vos deux envois si int?ressants. J'ai l? une lettre commenc?e pour vous et qui n est
jamais partie. Ce sera pour bient?t.
Genthod (Gen?ve) 28 Octobre 1902.
Mon cher ami,
Si invraisemblable que soit le fait, j'?tais occup? hier ? corres
pondre, ? correspondre avec un de mes excellents et patients ? cor
respondants ? (ne trouvez-vous pas que ce terme prend une signifi cation ?trangement unilat?rale sous ma plume?), lorsque me parvint votre aimable et charmante lettre. J'ajouterai que le correspondant ? qui je m'adressais ?tait vous-m?me, et qu'il n'y avait que deux
mois que je devais la r?ponse, ou plut?t le remerciement, que j'?tais en train d'?crire.
Certes, je n'essaie plus des d?fenses inutiles sur de pareils retards.
Celui-ci me pesait par trop, quand je songe avec combien de vraie
gratitude et de jouissance, j'avais re?u au mois de septembre, et lu ? l'instant m?me, vos deux beaux volumes sortant de presse, dont je pense vous parler plus loin. Je veux d'autant moins allonger ici que je dois avant tout r?pondre ? votre nouvelle lettre et ? tout
ce qu'elle contient. Du moins si j'en ai le temps imm?diatement, car
le nombre de choses accumul?es dont je voulais vous entretenir, commence ? devenir d?mesur?, et je serai probablement oblig? de
faire une coupure au moment du courrier.
Vous me faites une surprise, dont je suis vraiment touch? et
?mu, en me disant que vous voulez mettre mon nom sur la Io page
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100 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
d'un de vos livres.14 C'est un honneur que j'appr?cie dignement, et
auquel je ne savais pas tout-?-l'heure que je serais si sensible, car
je vous avoue que je n'avais jamais pens? ? rien de tel, de la part de qui que ce soit. Venant de vous, il est certain que ce ne sera, com
me je le d?sire, qu'un t?moignage affectueux, et confraternel en
l'Ecole des Hautes Etudes. C'est pour cela que je l'accepte, en y
ajoutant le plus grand prix. J'accepte en vous priant seulement de
trouver un moyen de tourner le mot d'Anniversaire, qui serait un
bien grand mot m?me pour un ouvrage ? pr?tentions moins modestes
que mon M?moire, - ou du moins d'att?nuer en ajoutant quelque
chose. (C'est une simple question de formule, que vous r?soudrez sans peine, mais que je tenais essentiellement ? vous signaler).
Merci encore.
J'ai ? peine besoin de vous dire que j'attends non sans impatience ce nouveau volume (pour moi, et aussi pour les malheureux ?l?ves
qui ne se d?brouillent que difficilement dans Brugmann et dans
Henry.) Je suis certain que les clart?s indo-europ?ennes jailliront toutes seules quand ce sera vous qui les mettrez en uvre.
Vs me parlez de M. Gauthiot. C'est un autre remords vivant. Comment est-il possible qu'apr?s sa lettre si aimable et si confiante o? il m'entretenait de son prochain voyage en Lituanie, je ne lui aie r?pondu que par une promesse de lui envoyer mes documents? Ma seule excuse est que j'habitais ? ce moment ? en ville ? (? Gen?ve), loin de ces papiers qui ?taient ? la campagne. Je ne lui aurais du reste probablement adress?, en fait de ? documents ?, que ma carte
(mi-hypoth?tique) des dialectes lituaniens dress?e sur lecture de textes. Mais il aurait ?t? d'un int?r?t scientifique que M. Gauthiot f?t au moins ? m?me de v?rifier sur place l'exactitude de cette carte en ce qui concerne certaines fronti?res phon?tiques ou morpholo giques, cela tt ? fait ind?pendamment de ce que je devais ? ce dis
tingu? confr?re comme correspondant. Il va sans dire que je saisi rais avec empressement toute occasion de r?parer ce dont je m'accu se. Pardon d'interrompre ici.
Affectueusement ? vous
F. de Saussure
14 II s'agit de la d?dicace de VIntroduction ? V?tude comparative des langues indo-europ?ennes. Cf. ci-apr?s n. 16.
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Documents 101
Gen?ve, 26 f?v. [1903]16 Mon cher ami
Bien sensible ? votre aimable lettre du 18, je vous confirme pro visoirement que j'ai bien re?u le manuscrit et la lettre de M. Gau
thiot, dont le travail m'int?resse fort.
Les envois de M. Gauthiot, ainsi que les v?tres, se trouvent avoir ?t? retard?s de trois jours pleins (je tiens ? le dire pour que vous ne
me teniez pas trop rigueur) du fait qu'ils ?taient adress?s ? mon
ancien bureau de poste de Versoix. Habitant maintenant en ?t? ?
Genthod, en hiver ? Gen?ve, il y a eu deux renvois successifs de bureau en bureau, dont je vous fais toutes mes excuses car c'?tait ? moi ?
informer l'administrateur de la Soc. de Linguistique de ces change ments. - Le plus simple et le plus s?r est d'adresser sans autre ?
Gen?ve, avec le pr?nom. Dans votre lettres vous me donnez une nouvelle qui me fait le
plus grand plaisir en me parlant du Dictionnaire slave que vous pr? parez. Je nous f?licite en songeant que ns pourrons ?chapper pro chainement ? Miklosic, dont beaucoup de donn?es ?taient inv?ri
fiables, et qui ?tait surtout aussi vieilli par sa mani?re de proc?der avec les textes slaves que par sa mani?re de faire les comparaisons. En m?me temps je vous f?licite, car je suis persuad? qu'un tel tra
vail vous donne chaque jour une ample moisson de d?couvertes et
de satisfactions. Votre bien d?vou?
F1 de Saussure
15 Ann?e r?tablie d'apr?s l'allusion au travail de Gauthiot, dont il est
question dans la lettre suivante, celle-ci dat?e.
Gen?ve, 20 mars 03
Mon cher ami
Vos lignes de l'autre jour m'avaient donn? une bonne nouvelle
en m'apprenant que vous ?tiez arriv? au bout du volume que je savais en pr?paration depuis l'ann?e derni?re, et vous me pr?veniez
gracieusement que j'en recevrais la primeur. Le volume est arriv?
aujourd'hui, il n'y a pas plus d'une heure, et je ne sais trop com
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102 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
ment vous dire ma fiert?, - mon ?motion -, en entrouvrant le pre
mier feuillet, o? vous avez voulu inscrire mon nom.16 Vous pouvez ?tre bien certain que l'honneur que vous me faites me va directement au c ur. Je ne sais trop si la vanit? reste une corde tt ? fait insen sible dans le plaisir que font de tels t?moignages, s?rement l'amiti? en est la premi?re touch?e. En mettant une bonne partie de la men
tion beaucoup trop flatteuse que vous me consacrez sur le compte d'une affectueuse pens?e personnelle, je ne puis qu'en sentir davan
tage le prix. Soyez en donc remerci? de tout c ur, - mais o? dois-je terminer au juste les remerciements, car je m'aper?ois, rien qu'en parcourant ? tire d'aile quelques parties du livre que j'ai entre les mains depuis une heure, que je ne suis pas quitte avec la premi?re page ! Et je trouve encore au haut du volume vos deux lignes manus
crites tout aimables, mais attestant une fois de plus votre tendance
pers?v?rante ? substituer le m?rite des autres au v?tre. Au moins
pour ces derni?res, je n'aurai pas de peine ? les r?futer quand je vous ?crirai dans le d?tail ce que je pense de votre livre. Laissez-moi
quelques heures pour en achever la lecture ? t?te repos?e, car quoi que j'en connaisse d?j? le principal, je tiens ? faire cette lecture ? fond.
Je lis tr?s attentivement le travail de Gauthiot, et je vous prie d?s ? pr?sent de remercier l'auteur de ma part, ce mot est un simple billet comme vs voyez.
Votre affectueus* d?vou?
Fd de Saussure
16 Rappelons les termes de cette d?dicace : ? A mon ma?tre M. Ferdinand
de Saussure, ? l'occasion des vingt-cinq ans ?coul?s depuis la publication du M?moire sur le syst?me primitif des voyelles dans les langues indo-europ?ennes
(1878-1903) ?.
[14-IX-05] *7
Mon cher ami
Je ne saurais trop vous remercier pour les renseignements si
complets que vous m'avez donn?s,18 et je m'excuse encore de vous
17 Cachet de la poste. 18 La lettre o? Saussure sollicitait ces renseignements n'a pas ?t? conserv?e.
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Documents 103
avoir ainsi d?rang?, ? mon plus grand profit. Je suis maintenant fix? sur les points par lesquels je pouvais avoir ? faire intervenir l'arm?nien. Je regrette m?me que le cadre plus ou moins impos? par le caract?re de la publication Nicole 19
m'oblige ? laisser de c?t? une partie des d?veloppements que j'aurais utilis?s dans un
article de revue linguistique*
Merci encore, et affectueux souvenirs de votre d?vou?.
F. de Saussure
Merci aussi des nouvelles de M. Br?al. Je suis heureux de ce que vous m'?crivez.
Cossonay, 14 Sept.
* Je suppose que alewr, m?me s'il n'est pas emprunt?, repose sur
une finale en -euro-, et n'est pas quelque chose comme *ale~tro-.
Pri?re instante de ne pas reprendre la plume ? ce propos, ? moins
que je ne vienne de dire une b?tise.
19 II s'agit de l'article donn? aux M?langes Nicole en 1905 (= Recueil des
publications scientifiques, p. 576 sq.)
Mon cher ami
Gen?ve, 31 Oct. 05,
Tertasse, 2
N'ayant presque pas ouvert un journal pendant les vacances,
j'ai ?t? assez ?mu d'apprendre avant-hier par un ami, qui avait
par hasard lu la chose dans le Temps, qu'il aurait surgi des difficult?s
? propos de la succession de M. Br?al au Coll?ge de France. Quelles difficult?s? - C'est ce que je ne sais pas encore, m?me vaguement, l'ami dont je vous parle n'ayant pu retrouver le num?ro du journal, et ne se rappelant lui-m?me aucun d?tail. J'esp?re vivement, ou
qu'il aura mal compris le sens de l'article, ou en tous cas qu'il ne
s'agit de rien de grave ou de p?nible pour vous ou pour M. Br?al.
Mais dans l'incertitude, je ne puis m'emp?cher de vous ?crire pour avoir quelque nouvelle pr?cise, je m'int?resse trop ? votre succ?s,
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104 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
que je voudrais ?clatant, comme il m?rite de l'?tre, pour ne pas vous
demander ce qui se passe. Recevez en attendant une fois de plus, mon cher ami, tous les
v ux affectueux de votre d?vou?
Fd de Saussure
Presque en m?me temps j'ai re?u la Liste de publications que vous avez fait imprimer, mais o? il m'est permis, j'esp?re, de ne
pas voir le signe d'une ?lection contest?e, puisqu'il est naturel en
tout ?tat de cause que vous ?num?riez vos titres en posant votre
candidature.
3 Nov. [1905] 20
Mon cher ami
Votre lettre m'a fait un bien sensible plaisir. A vrai dire je n'avais pas d'inqui?tude s?rieuse, il me paraissait plus qu'extraor dinaire qu'une difficult?, dont je ne pouvais m?me m'imaginer la
nature, se pr?sent?t ? propos de la succession de M. Br?al. Mais
plus la chose me paraissait ?nigmatique, plus j'ai ?prouv? le besoin de vous demander quelle esp?ce de myst?re ou de mystification se
cachait derri?re l'entrefilets 21 de journal dont me parlait, comme
je vous l'?crivais, une personne qui n'avait rien retenu de son con
tenu sauf une impression g?n?rale. Merci encore et de votre r?ponse, et de tous les d?tails que vous me donnez, qui ach?vent de me tran
quilliser avec tous vos amis. A bient?t nos f?licitations, et en attendant mille bons v ux et
souvenirs
Fd de Saussure 3 nov.
- Dr?le d'id?e, si on tient ? cr?er une chaire de Phonologie exp?ri mentale, que de vouloir l'installer sur la tombe de la Grammaire
Compar?e. -
20 Cette lettre fait ?videmment suite ? la pr?c?dente. 21 C'est l'orthographe ancienne du mot.
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Documents 105
10 janvier [1906]22
Mon cher ami
Depuis vos derni?res lignes, de la fin d'Octobre, j'avais eu quel ques nouvelles (fort bonnes) de l'?tat de vos affaires par mon parent M. Naville, qui avait ?t? appel? au mois de novembre ? faire des
conf?rences au Coll?ge de France. Ces bonnes nouvelles me sont
confirm?es par votre lettre re?ue hier, et dont je suis tr?s heureux, m'?tonnant seulement que la nomination ne soit pas chose faite
depuis longtemps; mais ?tant acquise d'avance, vous pouvez l'at
tendre avec patience, voire m?me sans impatience aucune d'avoir
trop vite ? ajouter ? vos occupations la charge de ce nouvel ensei
gnement. Cela surtout si, comme je suis f?ch? de l'apprendre, vous
ne vous sentez pas en tr?s bonne disposition en ce moment. Ce mot
? la fin de votre lettre m'a l?gitimement inqui?t?. S'il s'agit de fati
gue et de surmenage - ce qui certes n'aurait rien d'?tonnant apr?s
la somme de travail que vous vous ?tes impos? depuis bien des an
n?es -, je ne saurais trop vous engager ? couper le mal dans sa racine
et ? vous procurer le repos n?cessaire non plus tard, mais si possible de suite. Si vous me r?pondez que mon conseil porte ? faux et que vous vous sentez en parfaite sant?, je m'en r?jouirai,
- sinon il vaut
la peine d'y songer, j'en fais en ce moment l'exp?rience, regrettant de n'avoir pas pris plus t?t le parti que j'ai pris cet hiver de mettre
une interruption compl?te dans mes occupations et pr?occupations habituelles. Je me suis fait octroyer un cong? ? l'Universit? de
Gen?ve et vous ?cris de Rome o? je suis avec ma femme pour un
s?jour prolong?. Je m'en trouve fort bien, mais me serais mieux trou
v? encore, comme je le disais, de l'avoir fait plus t?t.
Je pense aller un de ces jours ? l'Ecole Fran?aise et aurai sans
doute le plaisir d'y voir, outre Mgr Duchesne, quelques jeunes
gens ayant un lien avec l'Ecole des Hautes-Etudes, et peut-?tre
ayant suivi vos cours. Je n'ai pu le faire jusqu'? pr?sent, ayant commenc? mon s?jour en Italie par Naples o? j'ai pass? le mois de
d?cembre.
22 L'ann?e est celle de l'?lection de Meillet au Coll?ge de France, et con
firm?e par la lettre suivante.
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106 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1963)
Donnez-moi ? l'occasion de vos nouvelles, mon cher ami, par une
carte postale. Je vous adresse mes v ux bien affectueux pour l'ann?e
qui vient
Votre d?vou?
Fd de Saussure
10 janv.
H?tel Pincio. Via Gregoriana. Rome.
Mon cher ami,
Merci d'avoir pens? si aimablement ? me donner la nouvelle de
votre nomination d?finitive. Par hasard presque au m?me moment
je l'apprenais par un journal fran?ais qui m'?tait tomb? sous les
yeux. Vous savez quelle part je prends ? l'?v?nement, combien je m'en r?jouis pour vous et pr la linguistique fran?aise, et aussi pour M. Br?al qui trouve un successeur qui fera honneur ? sa chaire et ?
son choix. Encore une fois toutes mes cordiales f?licitations. Votre
lettre re?ue l'autre semaine m'avait fait grand plaisir, je suis surtout
heureux d'y lire que vous vous portez bien. - Inutile de vous dire
que je ne fais pas grand chose ici. L'inscription archa?que du
Forum est un amusement tout indiqu? lorsque j'?prouve le besoin
de me casser la t?te. Rien ? en tirer, bien entendu, mais il est int? ressant de contempler le bloc ?nigmatique et de s'assurer de visu
des lectures. Celles-ci ne me semblent pas encore ?tablies partout avec le degr? de certitude qu'on aurait pu leur donner, et r?ciproque ment il y a telle donn?e comme certaine qui ne l'est pas, notamment un I qui peut se lire + (x). (Cet x n'est au meilleur cas qu'un x
de plus, et il y en a trop d?j? dans l'affaire...). Je vous adresse, mon
cher ami, tous mes affectueux souvenirs et bons souhaits pour la
nouvelle carri?re d'activit? qui s'ouvre devant vous
Fd de Saussure
Rome, 23 janvier 06.
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Documents 107
Vuffiens s/Morges, 23 Sept. 07
Mon cher ami,
Votre lettre m'a caus? avant tout une d?ception, mais elle con
tient une promesse, et cette promesse, quand m?me vous en mettez l'?ch?ance ? un nombre assez vague de mois, je la retiens avec pr? cision, et j'en fais d?s ? pr?sent ma fiche de consolation.23 Rien ne
pouvait me faire plaisir comme la perspective s?rieuse que vous me
donnez de vous voir, en ?change de l'occasion assez al?atoire que
j'avais entrevue dans le congr?s de Baie.24 Je comprends singuli?rement, du reste, vos raisons de ne pas
vous d?placer pour ce Congr?s, car en-dehors de celle que je regrette d'apprendre et qui est relative ? la sant? de Mr votre p?re, il est
heureux pour tout le monde que vous sachiez donner leur prix aux
mois de vacances, les seuls o? on n'ait pas ? d?fendre son temps les armes ? la main, surtout pour qui a son s?jour ? Paris hors de ce
temps de tr?ve.
Cela va tout de suite nous procurer, comme je vois, des choses
int?ressantes, et le cours sur le d?veloppement historique du grec sera, en-dehors de tout ce qu'il promet pour nous, linguistes, une v?ri
table b?n?diction pour les ?tudiants qui ont, comme ceux de Gen?ve, ? r?pondre, pour la licence, sur l'histoire grammaticale de la langue grecque, sans qu'on puisse leur indiquer un seul livre ? peu pr?s
correspondant ? ce titre par le plan et le contenu.
Ce qui me r?jouit presque encore plus, c'est que nous allons avoir au moins Y Introduction du Dictionnaire Slave, et qu'en outre, ? ce
que vous me dites, Teubner s'est inscrit d'avance pour une traduc
tion. J'avais d'abord compris, en vous lisant, que vous vous f?li
citiez de ce que les Allemands seraient enfin forc?s de savoir ce que contenaient vos publications slavologiques, ce qui me paraissait une exigence des plus naturelles ; mais je m'aper?ois en vous relisant
que vous ne parlez m?me pas des v?tres, et qu'il s'agit des miennes
? propos de cette pr?face ? votre uvre : donc apparemment de mes
quelques contributions baltologiques ? Voil? vraiment de quoi me
23 Ces allusions supposent une lettre ant?rieure, que nous n'avons pas. 24 Ce congr?s ?tait la 49e ? Versammlung deutscher Philologen ? qui eut lieu ? Baie en 1907 et qui comprenait une section indo-europ?enne (cf. Indogermanisches Anzeiger, 1908, p. 64).
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108 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
toucher, si vous ne m'aviez habitu?, d?s longtemps, ? savoir que vous ne manquez pas une occasion de relever ce que j'ai pu mettre dans ces quelques articles. Voil? aussi de quoi me donner du regret de n'avoir jamais fini celui des M?moires de la Soc. Ling. Le second article a ?t? non-seulement ?crit, mais en grande partie compos?, et j'en ai re?u les placards de l'Imprimerie Nationale, il contenait
pr?cis?ment le point central d'o? j'?tais parti, ? savoir que c'?tait la disparition du a qui devait ?tre la cause de diff?rence entre v?mti
pe?ktas etc. C'est en voyant que Bezzenberger ?tait tomb? sur la loi de v?mti (sans sortir qt ? lui de ce cas limit?), que j'avais ?t? incit? ? commencer une publication des mes observations, et j'ai eu le talent de l'interrompre avant m?me d'arriver ? ce cas capital auquel je tenais doublement parce qu'il confirmait l'importance g?n?rale de
gani-tum contre man-tum en sanscrit. Le placard de l'Imprimerie nationale contenait aussi tout le commencement de la th?orie
morphologique, ou d'une th?orie morphologique, par laquelle j'ex pliquais que l'intonation s'?tait unifi?e dans les racines baltiques, ainsi v?miau, ?rae, ? cause de v?mti, ou imtas, etc.. ce qui a notam ment une grande importance dans les racines avec ?, u.
Mais, puisque vous parlez de l'insuffisante attention donn?e en
g?n?ral par des confr?res allemands ? tout ce qui n'est pas dans leur
langue, expliquez-moi quand vous me ferez le plaisir de m'?crire, comment M. Sommer que j'ai eu l'occasion de feuilleter ces jours-ci, a pu ?crire son livre (Latein. Laut & Formenlehre) sans m?me citer le nom de Louis Havet, alors que tous les principes les plus m?connus de la science allemande, et les plus originaux comme
phon?tique latine, que L. Havet n'a cess? d'enseigner, s'y trouvent
incorpor?s comme par miracle. (Seule exception: la quantit? de
amantar, amant, mon?ntur, ess?nt, point sur lequel Sommer en reste ? ses ma?tres d'outre-Rhin, en posant faussement amantur,
etc.). Je pose ici la question parce que vous vous disiez invit? ? par M. Sommer ? au Congr?s de B?le, et que j'en ai conclu que vous l'aviez peut-?tre connu ? Paris. Tr?s certainement l'auteur para?t avoir pass? par Paris. -
En recevant vos lignes, o? vous renouvelez si aimablement l'offre de lire mes feuilles sur l'anagramme hom?rique, j'ai r?uni les cahiers
que j'avais emport?s, et je vous les enverrai peut-?tre, mais voici la circonstance qui me fait h?siter ? vous d?rober du temps pour cela,
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Documents 109
et me d?cide ? vous envoyer plut?t un aper?u des r?sultats auxquels
j'arrive pour le Saturnien latin. D'une part je ne d?sire pas moins
votre opinion sur ce chapitre, pour moi plus capital que celui d'Ho
m?re, d'autre part vous y gagnerez de recevoir ? examiner un manus
crit relativement de petite taille, au lieu des quinze ou vingt cahiers
que j'aurais ? vous exp?dier pour Hom?re.
C'est ? peu pr?s ici que j'ai interrompu la lettre du 23 Sptembre, dont vous avez le premier feuillet ci-dessus, pour ?crire pr?cis?ment les notes sur le Saturnien qui devaient accompagner cette lettre.
De fil en aiguille mon manuscrit s'est un peu grossi, sans que je
pusse non plus l'?crire d'une seule haleine, et ainsi voici lettre et
notes retard?es de quelque quinze jours, -
je vous en fais mes excuses
en ce qui concerne la lettre, car je n'aurais pas voulu mettre d'in
tervalle ? vous remercier de vos excellentes lignes. C'est du Saturnien que j'?tais parti pour rechercher, ou pour son
ger ? rechercher si l'?pop?e grecque connaissait quelque chose d'aussi
bizarre ? premi?re vue que l'imitation phonique, au moyen du vers, des noms qui ont une importance pour chaque passage. Je laisse la
question ouverte provisoirement pour lesdits po?mes hom?riques, et je reviens ? ce que je disais ?tre mon point de d?part
- que j'aurais
peut-?tre mieux fait d'explorer ? fond d?s l'ann?e derni?re au heu
de partir par la tangente sur Hom?re : celui-ci offre ?videmment un
champ plus ample, mais le Saturnien latin m'e?t offert, je crois, un
champ plus s?r, si je l'avais tout de suite fouill? ? fond sans sortir
de ce cercle. Voici les conclusions auxquelles j'avais ?t? conduit par l'examen
des restes de la po?sie saturnienne, en-dehors de la question m?tri
que, sur laquelle, d'ailleurs, je me s?pare compl?tement aussi des
opinions pr?c?dentes.
1. L'allit?ration, c'est-?-dire la corr?lation d? phon?mes plac?s ? la t?te des mots, est une partie tout ? fait insignifiante d'un ph?no m?ne autrement vaste et important.
2. Le ph?nom?ne r?el a peut-?tre trois formes diverses, dont mal
heureusement la premi?re est extr?mement difficile ? contr?ler,
parce qu'il faudrait ?tre minutieusement certain de la lecture de
chaque forme et de la phon?tique de chaque auteur :
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110 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
a) ce premier fait soup?onnable, c'est que tous les ?l?ments
phoniques doivent, sans exception, se correspondre entre eux par
couples : de mani?re que le vers id?al serait celui offrant par exemple, au total:
2 L, 2 P, 4 R(=2 + 2), 6 A, 2 0, 4 U, ainsi de suite, et sans que la position initiale ait une importance particuli?re quelconque.
Toutefois, vu la difficult? pour le versificateur, il est d'embl?e accord? que l'on peut se rattraper pour un couple sur le vers suivant, et m?me sur l'espace de plusieurs vers : de sorte que la loi aboutirait ? ce que dans un ?pigramme comme ceux des Scipions, tous les ?l? ments doivent,
- c'est-?-dire doivent simplement - se trouver en
nombre pair au bout des 6 ou 8 vers qui forment l'?pigramme. Les pointages sont supr?mement difficiles comme vous l'entre
voyez d'avance et pour mille raisons comme les lacunes de l'inscrip tion, ou simplement des incertitudes comme de savoir s'il faut
compter 3 s ou 4 dans une forme orthographi?e SVPERASES ?
superasses, etc., etc., etc. Mais dans les cas relativement clairs on
arrive ? des chiffres extr?mement favorables ? la supposition.
b) ce qui pr?c?de serait la loi des diff?rents ?l?ments pris comme
monophones. Aussit?t que l'on ne pousse pas l'analyse jusqu'? la
limite syst?matique du monophone, qui a pour correspectif une
arithm?tique serr?e, et que l'on s'en tient aux groupes phoniques
(diphones, triphones), on est alors en pr?sence d'un ph?nom?ne plus imm?diatement saisissable, quoique plus difficile d'autre part ? r?duire ? une formule fixe :
En effet, presque tout passage saturnien n'est qu'un grouillement de syllabes ou de groupes phoniques qui se font ?cho, comme par
exemple, et en choisissant un exemple relativement pauvre ? cet
?gard, les vers de Livius
Ibi manens sedeto donicum videbis Me carpento vehente domum venisse
D? : D? dans sed?to : videbis. B? : B? dans ibi : videbis. DO : D? dans donicum : d?mum V? : V? dans vehente : venisse
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Documents 111
TO : T(3 dans sed?to : carpento N? : N? dans don?cum : venisse
?N : ?N dans man-?n-s : v-?n-isse l S?:S? ? ,
dans sed?to : v?nis-s?
(m&nensse- : v?n(i)ss? ou ?NSSE : ENSSE ?NT : ?NT dans carp-?nto : veh-?nt-e
?MV : ?MV dans donicwmvid : donrumv?n
Je r?p?te que le ph?nom?ne 6 (de la corr?lation syllabique, ou
polyphonique), est plus facile ? rendre sensible, mais que son c?t?
malheureux, c'est qu'il serait difficile de montrer que le texte se r?soud exactement en X polyphones
= X polyphones, sans r?sidu, ou sans reprise du m?me ?l?ment pour 2 polyphones distincts. Est-ce un ?-peu pr?s, ou est-ce un syst?me exigeant un compte r?gl?, c'est difficile ? d?m?ler surtout devant d'autres textes o? des vers entiers semblent un anagramme d'autres vers pr?c?dents, m?me ?
grande distance dans le texte.
c) Ce qu'on peut tr?s heureusement aborder sans r?soudre ni le
point a ni le point 6 concernant le d?compte des monophones ou des
polyphones, c'est ce fait ind?pendant - ou pouvant ?tre consid?r?
d'une mani?re ind?pendante, car je ne voudrais pas aller plus loin -,
que les polyphones reproduisent visiblement, d?s que l'occasion en est donn?e, les syllabes d'un mot ou d'un nom important pour le
texte, et deviennent alors des polyphones anagrammatiques. L'anagramme peut se d?rouler soit sur un nom qui figure dans le
texte, soit sur un nom qui n'est pas prononc? du tout, mais se pr? sente naturellement ? l'esprit par le contexte.
L'anagramme, d'autre part, a les bases g?n?rales suivantes au
point de vue de sa forme :
Un nom comme Vergilius, d?coup? par diphones, donne 9 di
phones possibles: ve - er - rg
- gi- il - li - C~u - us, et si l'ana
gramme est d'une correction absolue, il ex?cutera tous les neuf; - mais les syllabes se trouvent constitu?es m?me en sautant un dihone sur deux, si l'on veut:
ve ? il ? us
ou v(e) - er gi
? li ? ~u ? (u)s.
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112 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
Et ainsi chaque anneau de l'analyse diphonique n'est pas indispen sable tel qu'il ressort de cette analyse : il suffit que rien ne manque d'un bout ? l'autre du mot.
J'ai indiqu?, autant que possible, dans le manuscrit les autres
r?gles ou moyens appliqu?s, ? propos des cas qui se rencontraient.
Comme vous le verrez au bout de peu de pages, ce n'est pas la
difficult? de retrouver les noms qu'on attend qui est un ?cueil et un
sujet de doute, mais c'est au contraire le fait que presque toute pi?ce en offre presque cinq ou six aussi facilement qu'un seul, et qu'on arrive ? se demander si l'on ne trouverait pas tous les anagrammes du monde dans trois lignes d'un auteur quelconque.
Sans doute, je crois avoir bien calcul? les degr?s et les limites de
certaines chances, avoir relev? bien des choses caract?ristiques en
dehors de l'alignement des diphones voulus, mais enfin j'avoue que l'opinion d'un confr?re non pr?venu, et jugeant froidement, me
serait tr?s pr?cieuse. J'attends de vous ce service d'ami; si je n'ai
supprim? dans l'expos? aucun d?tail ou aucune conjecture, c'est
pr?cis?ment pour que vous ne jugiez pas sur l'impression favorable
que donne un seul anagramme tir? du texte, mais sur l'impression moins encourageante que donne leur multiplicit? m?me.
Veuillez en m?me temps, je ne le dis qu'en passant connaissant votre discr?tion, consid?rer cette communication comme faite tout
? fait entre nous.
En partant du fait latin (consid?r? provisoirement comme assu
r?), la premi?re id?e qui pouvait venir est que l'allit?ration germa
nique ? son tour pouvait n'?tre que le reste d'une po?sie phonisante dans son ensemble, et que l'on pouvait tr?s naturellement s'expliquer qu'il ne rest?t que les correspondances initiales par la destruction des fins de mots, qui ?tait une circonstance linguistique intervenant
pour le versificateur, et lui assignant pour ainsi dire d'avance la
syllabe initiale comme dernier si?ge des ?quivalences phoniques. Mais je commence m?me ? soup?onner davantage.
- N'ayant
ici sous la main aucun texte, je ne voudrais rien affirmer : toutefois les d?bris qui me reviennent de l'Hildebrandslied, depuis que je me
suis pos? la question d'une correspondance totale ou anagramma
tique, comme en latin, me semblent parfaitement justifier cette
hypoth?se qui semble hardie : - non seulement je vois beaucoup de
correspondances hors de la syllabe initiale, mais aussi la forme
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Documents 113
anagrammatique du phonisme. Les fragments du d?but dont je me
souviens donnent parfaitement HADUBRAND. Il y a d'abord, sauf
erreur, Ih gih?rta dai seggen o? Ton a le diphone -AD- (gih?rt -
ad-at), pr?c?d? d'un h comme indication. Un peu plus loin helidos
libar hring? qui apporte ub, et de nouveau en bon accompagnement, car -ar- fait allusion au -ra- qui vient apr?s ub. La suite -? - ?r - a
de Hadubrand est imit?e dans sunufatarungo et dans garutun qui se trouve sauf erreur dans les environs. Le nd est dans inti (== andi) de Hiltibrant inti Hadubrant,
- etc. Et il y a aussi plus bas l'ana
gramme deDeotr?ch (?)eodric). Avec ou sans confirmation que le phonisme du vers germanique
?tait total, et non initial, il est naturel aussi de se poser la question
pour les hymnes v?diques. Je n'ai pas pouss? tr?s loin les recherches de ce c?t?, que j'avais
vaguement entreprises l'an dernier.
Sur le point des chiffres pairs de consonnes les quelques r?sultats
que j'avais obtenus ?taient favorables. Malheureusement les deux
circonstances des vers qui peuvent ?tre interpol?s et de l'incertitude
sur l'?tat exact du sandhi ? prendre pour base, rendent les recher
ches extr?mement difficiles.
Mais il reste au moins la question de l'anagramme qui peut s'examiner ind?pendamment du reste, dans le V?da comme ailleurs.
Or, il n'y a pour moi aucun doute - ou pas davantage que pour le
Saturnien latin - que la po?sie v?dique est litt?ralement tapiss?e
d'anagrammes, et que le po?te n'avait presque rien fait quand il
s'?tait born? ? mettre ses syllabes dans une forme m?trique, le
principal pour lui ?tant probablement d'ins?rer le nom des dieux
ou le nom des donateurs dans des cryptogrammes du vers.
Pour s'en convaincre il n'y a qu'? prendre ce dernier chapitre des donateurs, en relevant dans l'Anukraman? (fin de l'?dition Auf
recht) les diff?rentes d?na-stuti qui figurent aux Mandala VI,
VII, VIII; et on voit que r?guli?rement le nom du donateur est
sing? dans toutes ses syllabes, soit dans les vers directement rela
tifs au don, soit quelquefois d?j? dans ceux qui pr?c?dent. Mais de
m?me les neuf dixi?mes des hymnes que j'ai parcourus au point de
vue du nom de la divinit? qui est invoqu?e fournissent ce nom d'une
mani?re non ?quivoque et quelquefois par des imitations qui sau
tent aux yeux.
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114 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
Conclusions g?n?rales: Io Avant que le texte sacr? des hymnes ait ?t? ce qui a donn? naissance aux ?tudes phon?tiques des Hindous, les po?tes qui les avaient compos?s ?taient eux-m?mes des phon? tistes, du moins des techniciens exerc?s par leur m?tier ? conna?tre un son d'un autre, et ? en faire des combinaisons savantes.
2? C'est depuis les temps indo-europ?ens que celui qui composait un carmen avait ? se pr?occuper ainsi, d'une mani?re r?fl?chie, des
syllabes qui entraient dans ce carmen, et des rimes qu'elles formaient entre elles ou avec un nom donn?. Tout vates ?tait avant tout un
sp?cialiste en fait de phon?mes. - Et c'est ainsi que s'expliquent
une foule de choses relatives ? l'alphabet runique germain, et ? la
signification du stab qui est ? la fois ?l?ment de l'alphabet et ?l?ment
de versification. [Si les phon?mes devaient se trouver en chiffre pair, on comprend par exemple que le po?te devait, pour s'y retrouver avec quelque s?ret?, choisir, pour les repr?senter, quelque chose comme des cailloux ou des baguettes (stab) qui lui indiquassent au
fur et ? mesure de la composition o? il en ?tait pour chaque esp?ce de phon?mes, de stabs.]
3? Il est probable que les diff?rents jeux phoniques de la versifi cation sont partis de l'anagramme, qui n'est plus qu'un de ces jeux ? la fin. En effet on comprend l'id?e supersitieuse qui a pu sugg?rer que pour qu'une pri?re ait son effet, il fallait que les syllabes m?mes du nom divin y fussent indissolublement m?l?es : on rivait pour ainsi
dire le Dieu au texte, ou bien si on introduisait ? la fois le nom du
d?vot et le nom du dieu, on cr?ait un hen entre eux que la divinit? n'?tait pour ainsi dire plus libre de repousser.
4? Partie d'invocations et de pri?res, cette po?tique phonisante, et sp?cialement l'anagramme, passait tout naturellement ? d'autres
pi?ces lyriques, comme les po?mes en l'honneur d'un mort. Mais de l?, et quand une po?sie ?pique se d?veloppa, l'habitude
et la tradition devaient presque fatalement transporter dans ce nouveau genre la pratique des anagrammes, et il n'y aurait rien d'?tonnant ? ce que m?me les Grecs aient eu besoin d'un certain
temps avant de d?barrasser leur po?sie de ce vieil attirail indo
europ?en.
Voil? une lettre bien longue, surtout venant s'ajouter aux feuilles
que vous recevrez par l'autre pli. N'y donnez, je vous prie, que des
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Documents 115
moments perdus, vous devez ?tre occup? en ce moment o? les vacan ces tirent ? leur fin.
Croyez-moi votre affectueusement d?vou?
Fd de Saussure
J'ai ?t? bien aise d'apprendre la nomination de M. Vendryes que vous m'annoncez.
J'avais appris avec chagrin la mort de M. Victor Henry. Quoique je ne fusse pas particuli?rement li? avec lui, nous avions plus d'une fois correspondu.
15 d?c. 07 Mon cher ami
Merci de votre int?ressant article sur Mitra.25 J'ai ?t? tout ? fait convaincu. Et votre r?sultat est d'autant plus important qu'il r?tablit l'unit? dans l'ensemble de la famille des Adityas, faussement tiraill?s en divers sens dont entre autres le sens naturaliste.
Mitram ? contrat ? me para?t expliquer lumineusement pourquoi, m?me au sens d'ami, le sanscrit emploie le mot au neutre. A peu
pr?s, ?videmment, comme nous disons une ? relation, une connais sance ?, ou comme le latin necessitudo.
J'imagine que vous n'aurez pas propos? votre ?tymologie -
s?duisante - de Varunas, sans un doute par-devers vous sur la
fa?on dont vratam arrive ? se rattacher ? la famille de Forj-roa. Il est vrai qu Va long n'est pas inconnu de l'iranien, et c'est ce qui aura d?termin? votre jugement dans cet imbroglio de formes semi
concordantes. Mais comment se rendre compte de vr?tam?? M?me
l'analyse vr-ata- n'est pas une ressource, puisque nous trouvons ?a
et l? -atha, jamais -ata- comme suffixe appropri? ? un mot comme
vratam. (Je ne parle pas des adjectifs en -ata-, dar?ata-, eux-m?mes
peu r?pandus.) Peu dispos? comme vous ? croire au rapport de Varunas avec
ovqolvo?, et frapp? aussi de la nature morale de cette divinit?, mais surtout du caract?re particulier qui fait qu'? tout moment Varuna
26 Meillet, Le dieu indo-iranien Mitra (Journal Asiatique, 1907, I, pp.
143-159).
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116 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
est le dieu qui ch?tie, qui envoie de terribles punitions pour un
p?ch?, je me suis plus d'une fois demand? si un r?flexe europ?en de ce vieil ?ditya ne se trouvait pas dans le v?lnias des Lituaniens, ou plut?t dans leur veVina.s (dont v?lnias me para?t un d?riv?). Comme c'est justement le groupe des Adityas qui para?t, par le bog? slave, avoir joui des faveurs de ce rameau de populations indo-europ?en nes, il ne serait pas tr?s surprenant qu'un v?linas baltique ait exist? comme dieu des ch?timents pour une faute morale, et ait laiss?, ensuite, le diable pour h?ritier de son nom, tout en se trouvant, par les origines, identique au Varunas hindou.
Il m'a toujours sembl? qu'un autre Aditya, Aryaman-, devait se cacher dans le Irmin-got des Germains, justement invoqu? comme vous l'avez marqu? pour d'autres, ? propos des serments (w?ttu
Irmingot). La double forme Irmin- et Erman- (Ermana-r?cus) montre qu'il n'y a pas ? esp?rer, certainement, de co?ncidence rigou reuse avec Aryaman- (qui, d'ailleurs, offre un type de mot tellement ? part qu'un remaniement de ce mot serait tout ? fait naturel par tout).
- Au point de vue du sens, le fait que irmin- ne se rapporte proprement ? aucune figure divine, mais signifie simplement ? uni versel ? avec une nuance de crainte religieuse devant l'universel
<irmin-s?l colonne mondiale etc> est absolument d'accord avec le caract?re plus ou moins impersonnel des"?dityas, et ?quivalent ? la puissance morale sociale aper?ue comme puissance relative au monde. Ce qui est dit d'Aditi dans le sens de l'universel, et de
s?par? ainsi des dieux en chair et en os, est d'accord. Je termine ma lettre en vous annon?ant que j'ai un nouveau
cahier consid?rable d'anagrammes tir?s cette fois de Lucr?ce. Il n'y a pas de diff?rence visible avec Virgile pour la cons?quence avec
laquelle l'anagramme est cultiv?. Mais que ce me soit l'occasion de vous r?p?ter que vous ne devez pas vous presser pour me r?pondre malgr? l'importance de premier ordre que j'attache ? votre appr? ciation sur ce que je vous ai soumis.
Votre bien d?vou?
F. de Saussure
* C'est probab* le fait que velinas ou v?lnias sont r?partis dialectalement
qui a fait croire ? un rapport d'identit? l? o? il n'y a qu'un rapport de d?ri vation.
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Documents 117
[18 d?cembre 1907] 26
Mon cher ami
Re?u ce matin avec vos lignes la nouvelle ?dition de l'Introduc tion aux Langues indo-europ?ennes,
- bien aimable envoi de votre
part, et qui me fait le plus grand plaisir. Je ne suis pas surpris que vous ayez d? dans un espace de temps assez court r?pondre de nouveau ? la demande du public. Je n'ai pu voir encore, en parcou rant le volume, qu'une partie des innovations et modifications qu'il porte, et qui m'int?ressent d'avance beaucoup. Merci de ce nouvel et bien amical envoi, et f?licitations cordiales au nouveau venu dans votre belle s?rie.
Le ? retard ? dont vous parlez ? propos des cahiers d'anagram mes n'existe pas. J'esp?re bien que vous n'avez pas vu dans mon
billet sur Mitra la sub-intention de vous presser pour cette lecture, c'?tait, je puis vous le dire, aussi ?loign? que possible de ma pens?e.
Votre bien d?vou?
F. de Saussure 17 d?c.
Je pense vous envoyer un petit article pour les M?langes Havet
qui arrivera pt-?tre seulement vers le 5 janvier, [k moins de n?cessit?
absolue pour le 31 d?c. mais je ne ferai pas attendre en tous cas au
del? du terme indiqu?j.
26 Cachet de la poste.
Mon cher ami,
8 janvier 1908
Je me vois en retard sur la date ? laquelle je pensais pouvoir envoyer le petit manuscrit pour les M?langes Havet, je serais bien
d?sol?, et plus que cela, si je n'?tais pas au nombre de ceux qui ap
porteront leur hommage ? notre ami, et j'esp?re beaucoup que mon
p?ch? n'est pas encore irr?missible.
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118 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
Apr?s vous avoir impos? un monticule de notes sur Virgile et
Lucr?ce, j'en suis ? regretter mon inclairvoyance dans le choix des
auteurs que j'aurais pu songer ? ?tudier d'abord, - et qui a pour
r?sultat de vous avoir offert ? examiner et ? juger la partie la plus
ingrate de l'anagramme latin.
Les petits po?mes des ?l?giaques et des ?pigrammatistes auraient
d? me sembler d'embl?e d?sign?s comme un terrain plus commode
pour les recherches. En quelques heures pass?es sur Catulle et Tibul
le, ou sur quelques recueils comme les Priapea, et les Carmina
Epigraphica, je me suis form? une certitude qui d?passe fort, et qui n'a point d'analogie, avec celle que j'avais retir? de tout le reste
pendant des mois. Ce n'est que l? que j'ai cess? tout ? fait de douter, non-seulement quant ? l'anagramme en g?n?ral, mais sur les princi paux points qui en forment l'organisme, et qui pouvaient sembler
n?buleux. Le principe du mannequin se v?rifie compl?tement. Ennius d'autre part, surtout dans les fragments sc?niques, ap
porte une lumi?re et une pl?nitude de v?rifications qui ne laisse
vraiment presque plus rien ? d?sirer.
J'admettais que cette fureur du jeu phonique, sortie de la po?sie saturnienne, ?tait all?e decrescendo, et qu'Ovide pouvait en ?tre
probablement le dernier repr?sentant. Profonde erreur. Autant que
je vois d?j? par un regard fugitif sur l'?poque imp?riale, l'anagram me n'a fait que reprendre de nouvelles forces, il est par exemple d'une clart? absolue chez Stace. Chose plus incroyable, il est en
pleine vigueur chez Claudien aux derni?res limites de la latinit?. Et
toujours sur les deux principes centraux du diphone et du manne
quin, sans d?g?n?rescence visible vers d'autres moyens plus libres.
Dans cette cha?ne, les comiques ont probablement une situation un peu ? part, soit pour une moins grande fr?quence des anagram mes soit pour quelques d?tails de ? style ?, mais il ne songent pas
plus que les autres ? se d?livrer en principe de l'anagramme. J'ai pu faire un recueil d?j? consid?rable d'anagrammes plautiniens, qui sans doute, en eux-m?mes, ne seraient pas des meilleurs ? donner
pour entra?ner la conviction; mais qui, du moment que le principe est constant par ailleurs, apparaissent comme ?vidents. Par exem
ple, et au hasard parmi les exemples, le commencement de la der ni?re sc?ne du Trinummus donne Lesbonicus par
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Documents 119
80NITU + BENEV0LEN8 + AM IC US ? ONI ? B? LES? ? ICUS
Dans la douzaine de vers qui pr?c?de, et qui tombe dans la sc?ne pr?c?dente, le m?me LESBONICUS avait d?j? re?u deux
anagrammes successifs, autour des mots leviorem et laboris. Les fins de pi?ces portent, dans les 3 ou 4 derniers vers, le nom de la
pi?ce en anagrammes, comme Trinummus, Menaechmi, etc.
Tout cela, comme je vous en dois l'aveu, est venu modifier mon
point de vue dans le sens d'une certitude beaucoup plus grande que celle que je pouvais avoir encore il y a dix jours en vous ?crivant. Je ne vois d?cid?ment plus la possibilit?, pour ce qui me concerne, de garder un doute, et je sens que les repr?sentations qui me seraient
faites sur telles ou telles obscurit?s chez Virgile ou Lucr?ce n'au raient plus d'effet pour me d?tourner d'une conclusion que je crois absolument certaine pour tout le monde, d?s qu'on verra le carac
t?re tout ? fait illimit? du fait et de ses exemples. Au cas o? vous aurez d?j? pris la peine de lire mes cahiers, ne
manquez pas de me dire quelle impression vous en aviez retir?e, ce qui a un grand int?r?t pour voir si Virgile et Lucr?ce, pris s?pa r?ment du tout, sont convaincants ou non. Ne les lisez pas sans cela, car je r?p?te que je suis aux regrets de vous avoir envoy? la partie la moins int?ressante de ces anagrammes latins. Dans les deux cas,
je me souviens avec une bien v?ritable gratitude du concours amical
que vous m'avez donn? au d?but de cette recherche, lorsque nous
parlions du vers saturnien, et que vous m'avez donn? un appui
pr?cieux par votre critique; car je crois bien qui si vous ne m'aviez
pas confirm? que l'id?e de l'anagramme ne vous semblait pas fausse,
d'apr?s les exemples saturniens, je n'aurais pas eu l'id?e de pour suivre une recherche qui se trouve solutionn?e compl?tement en
dehors du Saturnien et de mon objet primitif.
Votre afft d?vou?
F. de Saussure
Merci de votre aimable carte du 1er janv. ? propos de l'envoi de Lucr?ce.
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120 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
Gen?ve, 20 Mars 11.
Mon cher ami,
C'est une attristante nouvelle qui m'arrive par votre faire-part, et un bien profond deuil, comme je le vois, qui s'est ?tendu sur vous
depuis quinze jours, sans que je vous aie su dans ce chagrin. Je
suis ?mu d'apprendre un ?v?nement qui doit changer bien des cir
constances en votre vie. C'est plus qu'une parente, m?me particu li?rement ch?re, que vous perdez, n'est-ce pas. J'imagine que quel que chose de ce qui ?tait votre foyer, votre centre peut-?tre intime
par les affections, a d? dispara?tre avec celle qui vous est enlev?e.
Il m'est permis de vous exprimer ma plus douloureuse sympathie. Je ne le fais point sans avoir encore tout pr?sent ? mon souvenir
l'accueil empreint de gr?ce et de cordialit? que je recevais, voici voici deux ans, de la personne respect?e dont vous m'annoncez
que la mort vous a s?par?. C'est d'une mani?re subite que l'?v?nement vous a surpris, je ne
sais rien hors du faire-part que je viens de lire, et si, sans ?tre indis
cret, je pouvais esp?rer de vous quelques mots, ils r?pondraient au v u bien naturel de mon amiti?.
Dans le deuil que nous ?prouvions nous-m?mes il y a quelques mois vous me faisiez parvenir votre sympathique souvenir, dont
je ne vous ai pas encore remerci? : mais innombrables au reste sont,
depuis 18 mois, les occasions o? j'ai n?glig? de vous donner tout
signe de ma propre existence. - Et je ne vous en parlerai pas au
jourd'hui. -
Il y a une occasion seulement, celle de ma nomination comme
correspondant de l'Institut,27 o? je puis attester que j'avais bien
pris la plume pour vous ?crire. J'avais toute esp?ce de choses ? vous
dire, en particulier des choses que je pense tellement qu'elles ne
perdent rien ? ne pas ?tre ?crites encore. Il faudra bien que je vous
dise, ou que je dise publiquement une bonne fois, mon t?moignage sur A. Meillet, et son uvre; afin que l'on ne se m?prenne pas (comme ce serait possible d'apr?s le m?me A. Meillet) sur celle de F. de Saussure. - C'est presque par une m?prise de ce genre, abondam
27 Voir l'Appendice I.
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Documents 121
ment pr?par?e par Meillet qtie je me trouve correspondant de l'Institut.
Un peu agac? par des f?licitations ne correspondant ? aucun
honneur ambitionn?, je pris le train un jour pour ne plus entendre
parler de l'Institut et de ses pompes, c'est ainsi que je m'explique que ma lettre soit rest?e en route. Si reconnaissant que je fusse de la distinction re?ue, j'avais, et j'ai encore trop de r?serves ? faire. -
Le jour qui ne saurait tarder, o? vous serez membre titulaire de
l'Acad?mie, nous aurons une satisfaction, et nous pourrons dire que la Linguistique dans sa pl?nitude est entr?e ? l'Acad?mie, en m?me
temps que le promoteur des ?tudes linguistiques en France. Je suis charg? par ma femme, ainsi que par ma belle-s ur
Madlle Faesch, de vous pr?senter, avec leur bon souvenir, leur
message de condol?ance dans le deuil que vous venez d'?prouver. Vous savez tous les sentiments sinc?res avec lesquels je suis, dans cette circonstance et toujours, mon cher ami,
Votre d?vou?
F. de Saussure
Gen?ve, 17 avril 1911
Mon cher ami
Merci de vos lignes cordiales, re?ues l'autre jour ? propos d'un
triste ?v?nement dont vous avez ?t? frapp?. Je ne sais pas combien de remerciements je vous dois au juste
pour tous les ?crits, plus int?ressants les uns que les autres, dont
j'ai re?u ma part gr?ce ? votre toujours fid?le souvenir. Voici des
mois nombreux, je vous le disais, que j'aurais d? moi-m?me vous
donner quelque signe de vie.
Votre article sur le uh de pituh 28 est un de ceux qui m'ont fourni
mati?re ? r?flexion en dernier Heu, et je crois ?tre presque d'accord
pour accepter vos conclusions sur ce point terriblement difficile. -
Je ferais malgr? tout quelques r?serves sur la possibilit? que -ur
soit sandhi de -r devant voyelle. Nous voyons assez semblablement n se d?velopper en -an par sandhi devant voyelle ou semi-voyelle
28 Meillet, M?langes (Tindianisme offerts ? Sylvain L?vi, 1911, p. 17 sq.
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122 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
(vrsan -a?va-, vrsan -vasu-). -
C'est peut-?tre particuli?rement dans
votre th?se qu'on pourrait ramener dhanuh (arc) ? *dhanvr, plac? dans le m?me rapport avec dhanvan- que yak-rt avec yak-an- etc. De m?me paruh en regard de parvan-. Type tie?qolq, ne?gocrog, sans affirmer que parvan- soit ?tymologiquement nelgouq, comme ce serait au reste possible par le sens et par la forme, ?miooDv, exacte
ment comme su-dhanvan- en regard de dhanuh. - Trouveriez-vous
une excuse ? la chute du iv
|*dhanvuh) li?e ? votre conception de l'uh ?
*dhanvr - [Analogiquement dhanus? etc.].
Wackernagel -
qui a fait, para?t-il, une apparition ? Paris -, m'envoie le 2? fascicule de ses ?tudes avestiques en collaboration avec Andreas.29 Je vous avoue, entre nous, que je ne puis presque pas concevoir la forme que ces deux auteurs adoptent pour faire
part de leurs id?es, peut-?tre parfaitement justes en elles-m?mes. J'ai entendu dire que vous envoyiez Gauthiot ? Goettingue pour en entendre davantage, et vraiment ce ne sera pas de trop pour appren dre en langage clair ce que veut la nouvelle ?cole.
- Toute la sp?culation d'Andreas et Wackernagel, autant que je l'aper?ois, revient ? dire qu'il y a eu, dans la premi?re scripture de l'A vesta, cinq ou six signes ?minemment incertains dans leur valeur.
Apr?s quoi on est ?tonn? de voir la conclusion qu'ils en tirent, et qui est celle-ci: avec cette incertitude nous allons faire de la certitude.
A la grande rigueur, si c'?tait vrai, il faudrait au moins une
explication de principe sur toutes les choses ind?pendantes de l'?cri ture aram?enne dont on part pour imposer ? celle-ci (elle-m?me reconstruite) des valeurs aussi d?termin?es. - On voit ? peu pr?s la part faite au v?dique. Quelle est celle qu'on fait au persan? Quelle est celle qu'on fait ? un dialecte que les auteurs eux-m?mes
d?signent comme tr?s ?loign? du persan, comme ost-iranisch? Quelle est celle qu'on accorde ? une transmission par m?moire et par rite des m?mes textes? -
Enfin, chose indispensable, il faudrait qu'on nous montr?t par le d?tail comment l'alphabet avestique est n?, sa
position vis-?-vis de l'?criture pehlevi, et vis-?-vis des signes ara
29 Andreas-Wackernagel, Nachrichten der G?ttingischen Gesellschaft der
Wissenschaften, 1911, p. 1 sqq.
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Documents 123
m?ens, la raison de sa diff?rence avec l'ordinaire pehlevi, etc. Je suis un peu ?tonn? que ces questions ne semblent pas exister du tout pour MM. W. et A, au moins qu'ils n'en fassent pas mention au lecteur.
Comme je l'?cris ? Wackernagel, James Darmesteter nous ensei
gnait, dans les conf?rences de 1881 ? l'Ecole des Hautes-Etudes, ? propos d'un cours de pehlevi, que pour lui tout le texte de l'Avesta n'?tait qu'une transcription, sujette ? caution dans toutes ses formes. Rien de nouveau n'est r?sult? pour moi de ce qu'?crivent W. et A. sauf les d?tails a??rmatifs.
Votre affn? F. de Saussure
Mon cher ami
Cette carte vous trouvera-t-elle ? Paris ? Y serez-vous du moins la semaine prochaine? Je le souhaite beaucoup, pensant pouvoir
m'arr?ter ? Paris au cours de la dite semaine, et ne disposant gu?re d'autre part de plus de deux jours, probablement de mercredi ? vendredi.
Ecrivez-moi un mot s.v.p. ? l'adresse ci-dessous. Merci d'avance,
et j'esp?re ? bient?t -
Votre d?vou?
F. de Saussure
11 oct. 11.
c/o Major H. Ross-Johnson
Mettingham Castle
Bungay (Suffolk).
Cette carte d'Octobre 1911 est le dernier message conserv?, et si la ren contre eut lieu, ce fut la derni?re: dix-huit mois plus tard F. de Saussure
mourait, le 22 F?vrier 1913. A. Meillet a gard? aussi la lettre que lui ?crivit Mme F. de Saussure en
r?ponse ? celle qu'elle avait re?ue de lui le 6 Mars de cette ann?e. Nous
croyons devoir la reproduire ici ; elle fait mention des premi?res d?marches
qui devaient aboutir ? la r?daction du Cours de Linguistique g?n?rale.
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124 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
Lettre de Mme Marie de Saussure ? A. Meillet
Cher Monsieur
Vous m'excuserez cette fois encore de venir si tard vous remercier
de votre aimable lettre du 6 mars, ainsi que du t?moignage si
affectueux que vous avez rendu ? la m?moire de mon mari ? l'ou
verture de vos cours au Coll?ge de France et ? l'Ecole des Hautes
Etudes. - Je ne puis vous dire combien j'y suis sensible et c'est de
tout mon c ur aussi que je m'associe ? tous les regrets qui m'ont ?t?
exprim?s au nom de la science ? l'occasion de la mort de mon mari.
Je sais avec quel int?r?t il suivait les ?tudes et les travaux de ceux
qui lui succ?dent dans la carri?re et vous savez que rien dans ce
domaine ne lui ?tait indiff?rent. - Il a donn? le meilleur de son temps ? son enseignement, et la pr?paration de ses cours l'absorbait au
point de l'emp?cher de publier d'autres travaux personnels. -
Et maintenant plusieurs de ses ?l?ves m'ont demand? s'il n'y aurait pas, dans ses notes, quelque chose ? publier. Ce serait naturel
lement chose ? voir et ? laquelle je ne voudrais pas m'opposer d'embl?e; mais, cher monsieur, vous avez assez connu mon mari,
pour savoir avec quelle scrupuleuse conscience il abordait chaque
question et j'ai l'impression qu'il faudrait en tous cas ne rien publier trop vite car je ne voudrais rien faire qu'il n'e?t pas approuv?. Peut-?tre qu'en compulsant les notes prises par diff?rents ?l?ves en
diff?rentes ann?es pourrait-on avoir une id?e assez compl?te d'un de ses cours, mais pour cela aussi il ne faut rien presser.
- N'est-ce
pas aussi votre avis. - On peut quelquefois par une publication trop h?tive, d?florer un travail qu'on pourrait avec le temps faire plus complet. Je suis, naturellement, incomp?tente dans cette question, cependant je sais que mon mari n'agissait jamais avec pr?cipitation et que ce qu'il a donn? ? la science ?tait le fruit de travaux m?rement
r?fl?chis. - J'avais l'intention de r?unir dans une petite brochure les articles et t?moignages re?us ? l'occasion de la mort de mon mari,
mais je veux attendre pour cela que les articles ? venir aient paru.
J'esp?re pouvoir me procurer plus tard ceux que vous ferez
para?tre dans les M?moires de la soci?t? de linguistique et l'Annuaire de l'Ecole des Htes Etudes. J'ai pens? que ce serait un souvenir
pour la famille et les amis. -
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Documents 125
J'esp?re, Cher Monsieur, que si vous veniez une fois de nos c?t?s, vous me ferez le plaisir de venir me voir. - Je serais toujours heureuse de serrer la main ? ceux qui se sont associ?s de c ur ? notre grand deuil.
Recevez, Cher Monsieur, mes meilleurs compliments
Tertasse 2, Gen?ve
le 25 Mai [1913]
Marie de Saussure
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Appendice i
On a vu ci-dessus p. ... dans la lettre du 20 Mars 1911, une
allusion de F. de Saussure ? son ?lection comme correspondant de
l'Institut de France. Cette distinction lui fut conf?r?e par l'Acad?mie
des Inscriptions le 9 d?cembre 1910.30 Le d?c?s de Saussure fut annonc? ? l'Acad?mie ? la s?ance du
28 f?vrier 1913, et le pr?sident en exercice, No?l Valois, pronon?a son ?loge. Cette n?crologie est rest?e ignor?e, semble-t-il.31 Bien que,
press? par le temps et d'ailleurs peu familier avec le sujet, Valois se soit largement inspir? des articles de Muret et de Br?al publi?s dans la presse,32 sa notice m?rite d'?tre connue.33 En voici le texte.
Messieurs,
? J'ai le triste devoir de vous annoncer une nouvelle perte :
M. Ferdinand de Saussure, que nous comptions depuis 1910 au
nombre de nos correspondants ?trangers, vient de mourir pr?s de
Gen?ve, le 22 f?vrier, ? la suite d'une maladie qui le tenait, depuis plus d'une ann?e, ?loign? de sa chaire de linguistique.
? C'est une bien surprenante carri?re que celle de ce descendant de zoologistes, de botanistes ou de g?ologues illustres, qui, d?s l'ado
lescence, se consacre ? l'?tude compar?e des formes du langage,
80 Comptes rendus ole VAcad?mie des Inscriptions, 1910, p. 780. Saussure
r?pondit par une lettre de remerciement (Ibid. p. 790) que je n'ai pas retrou v?e dans les archives de l'Acad?mie.
31 Elle n'est pas mentionn?e dans la bibliographie de R. Godei, Sources manuscrites p. 18-19.
32 On les trouvera reproduits dans la plaquette intitul?e Ferdinand de Saussure, 1915 (r??dit?e en 1962). 33 Elle a paru dans les Comptes rendus de VAcad?mie des Inscriptions, 1913, pp. 68-70.
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Documents 127
prend part, ? Leipzig, aux travaux de la Grammatische Gesellschaft dirig?e par le professeur Curtius et, ? moins de vingt ans, y pr?pare un ouvrage qui, quand il para?t, en 1878, op?re une r?volution. Bien
aride, en apparence, bien simple et modeste en la forme est ce fameux M?moire sur le syst?me primitif des voyelles dans les langues indo
europ?ennes, o? l'auteur ?tudie surtout les formes multiples sous
lesquelles se manifeste ce qu'on appelle l'a indo-europ?en; mais ce
mince in-octavo est, de l'avis des hommes comp?tents, une des uvres les plus p?n?trantes que la science des langues ait produites,
une de celles qui ont le plus hardiment fray? de nouvelles voies et
qui ont donn? aux id?es des linguistes leur orientation actuelle. Ferdinand de Saussure n'?tait pas encore docteur;
- il ne conquit ce grade, ? la Facult? de philosophie de Leipzig, qu'en 1880, avec une th?se sur VEmploi du g?nitif absolu en sanscrit ; - mais d?j?, en
ce tout jeune homme, on entrevoyait un chef d'?cole. ? Il le fut dans toute la force du terme quand, apr?s un court
s?jour ? l'Universit? de Berlin et un voyage en Lithuanie, au cours
duquel il avait recherch?, dans l'?tude directe des dialectes vivants, les secrets de l'histoire de la parole humaine, il fut venu se fixer ?
Paris. Son jeune fr?re, peu de temps apr?s, entrait dans la marine
fran?aise : l'un et l'autre se souvenaient de ces anc?tres lorrains que la tourmente du XVIe si?cle avait d?racin?s du vieux sol. El?ve de
plusieurs de nos confr?res, M. Br?al, Bergaigne, M. Louis Havet, ainsi que de James Darmesteter, Ferdinand de Saussure fut nomm?, d?s la fin de l'ann?e 1881, ma?tre de conf?rences pour les langues
germaniques ? notre Ecole pratique des Hautes Etudes. Il y fit
admirer, jusqu'en 1891, une parole d'une clart? et d'une ?l?gance souveraines, une m?thode impeccable, une hauteur de vues qui s'alliait ? la pr?cision du d?tail et ? l'?tendue de l'information.
Cet enseignement exer?a un influence d?cisive sur le d?veloppement des ?tudes de linguistique en France. D?sormais tout un groupe de
travailleurs actifs, convaincus, dont plusieurs allaient devenir des
ma?tres ? leur tour, se r?clama de Ferdinand de Saussure : disciples fid?les, qui se reconnaissent du premier coup, atteste M. Br?al, ? par ? l'importance qu'ils attachent ? la phon?tique et par le soin qu'ils ? apportent ? l'analyse des formes du langage. ?
? Lorsque, plus tard, c?dant aux instances de sa famille, Saussure
retourna en sa ville natale afin d'occuper une chaire d'histoire et
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128 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1964)
de comparaison des langues indo-europ?ennes cr??e pour lui en
rUniversit? de Gen?ve, il est tout juste que notre Gouvernement ait
voulu qu'il y emport?t, sous la forme d'un ruban rouge, un souvenir
de la France. Il est encore moins surprenant que ses anciens ?l?ves et ceux qui, sans l'avoir entendu, avaient subi son influence aient eu
l'id?e de lui offrir un t?moignage de leur gratitude: en 1908, parut ?
Paris, dans la Collection linguistique publi?e par la Soci?t? dont il
avait ?t?, durant neuf ans, le secr?taire adjoint, un volume intitul?
M?langes de linguistique offerts ? M. Ferdinand de Saussure, et parmi les signataires des quinze m?moires dont ce volume se compose, on
aper?oit, ? c?t? des noms de MM. Grammont, R. Gauthiot, G. Dot
tin, etc., celui de M. Antoine Meillet, qui, lui-m?me, alla en faire
hommage, le 14 juillet, au grand savant genevois, entour?, ce jour l?, de sa famille et des professeurs de l'Universit?.
? S?v?re pour lui-m?me, d?daigneux des succ?s faciles, content
de promener sa r?verie inqui?te sur les probl?mes les plus ?pineux, mais ?prouvant quelque r?pugnance ? fixer sa pens?e dans une r?dac
tion, Ferdinand de Saussure a peu ?crit: ses admirateurs ne s'en
consolent point. Si aux livres que j'ai mentionn?s, d'une si vaste
port?e, on joint de trop rares articles parus dans les Indogermanische
Forschungen de Streitberg, dans la Revue critique ou dans les M?moi res de la Soci?t? de linguistique de Paris, si l'on ajoute que, toujours pr?t ? rendre hommage au m?rite des autres, il collabora aux
M?langes Oraux (1884), aux M?langes Renier (1886), aux M?langes L. Havet (1909), on aura embrass? ? peu pr?s toute l' uvre imprim?e d'un savant que j'ai ? plusieurs reprises entendu qualifier de g?nial. Il dispara?t ? l'?ge de cinquante-cinq ans, alors que la science ?tait en droit de fonder sur lui encore tant d'esp?rances. Ce deuil atteint douloureusement notre confr?re M. Edouard Naville, ? qui vous me
permettrez d'adresser, en votre nom, l'expression de nos regrets et
de notre sympathie ?.
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Appendice ii
C'est dans une note manuscrite laiss?e par Saussure 34 que les
noms de Baudoin et Courtenay et de Kruszewski sont mentionn?s, avec cette appr?ciation ?logieuse:
? Baudoin de Courtenay et Kruszewski ont ?t? plus pr?s que personne d'une vue th?orique de la langue ; cela sans sortir de
consid?rations linguistiques pures ; ils sont d'ailleurs ignor?s de la
g?n?ralit? des savants occidentaux ?.
Saussure n'avait gu?re heu de penser qu'aucun des linguistes de
son temps partage?t ses pr?occupations th?oriques ou f?t arriv? aux
m?mes vues touchant la nature de la langue. Comment donc a-t-il
connu, ? peu pr?s seul en Occident, les travaux de Baudoin de
Courtenay et de Kruszewski?
L'occasion en a ?t? une rencontre avec Baudoin de Courtenay ?
Paris. Ce fait ressort d'une lettre encore in?dite conserv?e dans les
archives de l'Acad?mie des Sciences de l'URSS ? L?ningrad, dont
Mme Slusareva dans son r?cent article 35 a cit? les premi?res lignes. Saussure ?crit ? Baudoin le 16 octobre 1889 : ? Je ne vois [? s?rement
? corriger : je ne sais] si je puis esp?rer que vous ayez gard? le sou
venir de l'occasion pour moi tr?s agr?able que j'eus de vous ren
contrer ? Paris il y a sept ans... ?.
Mme Slusareva ajoute: ?Le 21 Novembre 1881, jour o? Bau
doin de Courtenay a ?t? ?lu membre de la Soci?t? de Linguistique
34 D'apr?s R. Godei, Sources manuscrites y p. 51.
36 CFS. 20 (1963), p. 28, n. 9.
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130 Cahiers Ferdinand de Saussure 21 (1961)
de Paris, il ?crivait lui-m?me de Paris ? I. Karlovitch: ?...de
Saussure y ?tait ?galement ?.36
Il y a ici une date ? corriger et quelques pr?cisions ? ajouter. Si minimes que semblent ces d?tails, il importe de les reproduire exactement. Selon les Statuts de la Soci?t? de Linguistique qui n'ont jamais vari? depuis sa fondation en 1865-1866, ((l'?lection a lieu dans la s?ance qui suit celle de la pr?sentation ?. Baudoin de Courte
nay se trouvait en tant qu'? assistant ?tranger ? ? la s?ance du 19
(et non du 21) novembre 1881, o? il fut pr?sent? par A. Chodzko et H. Gaidoz. Mais, selon le proc?s-verbal, Saussure n'y ?tait pas. La Soci?t? re?ut en hommage ? cette s?ance plusieurs publications de Baudoin et de Kruszewski dont la liste est reproduite au proc?s verbal.37 C'est ? la s?ance suivante, celle du 3 d?cembre 1881, Saussure cette fois pr?sent, que Baudoin fut ?lu membre de la Soci?t?. De nouvelles publications de Baudoin lui-m?me et de Kruszewski furent offertes. A cette m?me s?ance Saussure pr?senta le d?but de sa communication sur la phon?tique du patois fribour
geois.38 La pr?sence de Baudoin de Courtenay est encore attest?e, en
m?me temps que celle de Saussure, aux s?ances du 17 d?cembre 1881 et du 7 janvier 1882. A cette derni?re s?ance Saussure put en
tendre Baudoin faire une communication ?sur divers points de
phon?tique slave ?.39 Les proc?s-verbaux de ces deux s?ances men
tionnent encore des publications offertes par Baudoin ? la Soci?t?, et de nouveau par la suite le 4 mars, puis le 4 novembre 1882.
On voit que Saussure a pu en d?cembre 1881 et janvier 1882
(il avait alors entre vingt-quatre et vingt-cinq ans) s'entretenir avec Baudoin de Courtenay, et en tout cas prendre connaissance de tout ce que ce dernier et son disciple Kruszewski avaient ?crit jus que l?.
Quand la lettre ? Baudoin aura ?t? publi?e, on saura ce qui ame nait Saussure ? renouer avec lui sept ans apr?s cette rencontre ? Paris.
38 L.c. avec les r?f?rences aux fonds d'archives o? ces lettres sont con serv?es.
37 BSL. V, p. LI. 38 Ibid. V, p. LU. 39 Ibid. p. LVIII.
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