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La Possession en droit civil

Résumé du cours du Pr. Steinauer

Université de Fribourg, IUR II, 2010-2011

FREDERIC A. NEY

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§ 1 Le droit réel en général

I. Notion

1. Définition

o « Le droit réel est un droit subjectif privé qui confère à son titulaire, à

l’exclusion de tout autre personne, la maîtrise totale ou partielle d’une chose

ou d’un animal. »

2. Caractéristiques

o En tant que droit subjectif T D

o En tant que droit de jouissance (exiger la jouissance libre d’un bien)

o En tant que droit de maîtrise (erga omnes)

NB : Le droit réel est un droit patrimonial (= dont la valeur peut être évaluée en argent).

II. Contenu du droit réel

1. En général

o Le contenu spécifique du droit réel est d’imposer à toute personne de

s’abstenir de troubler la ma maîtrise de son titulaire sur l’objet du droit.

o Le droit réel est un droit latent (c’est en cas de trouble qu’il s’active)

o L’atteinte au droit réel suscite deux choses :

a) Une réaction de défense.

b) Une réaction de rééquilibrage (dommages-intérêts, tort moral,

règles qui découlent de la RC).

2. Les attributs du droit réel

o Le droit de suite (contre toute personne qui a la chose en main).

o Le droit de préférence (prérogative qui permet à son titulaire de l’emporter

sur ceux qui ne peuvent se prévaloir d’un droit de créance en relation avec

l’objet de son droit).

III. Espèces de droits réels

1. La propriété

o « La propriété est le droit conférant la maîtrise totale et exclusive d’une chose

ou d’un animal, dans les limites de l’ordre juridique. »

Droits subjectifs privés

Droits de jouissance

Droits de maîtrise

Droits réels

Droits de la propriété immatérielle

Droits de la personnalitéDroits corporatifs

Droits de créanceDroits de compétence

(droits formateurs, droits de gestion)

Tableau

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o 3 facultés de la propriété :

a) Droit d’user (usus)

b) Droit de jouir (fructus)

c) Droit de disposer (abusus)

o Espèces de propriétés

a) La propriété individuelle

b) La propriété collective

La copropriété (chacun dispose d’une part idéale)

La propriété collective (les titulaires forment une

communauté)

2. Les droits réels limités (=maîtrise partielle)

o Les servitudes (procure l’usage et/ou la jouissance)

a) Les servitudes mobilières (que sous la forme d’usufruit en faveur

d’une personne déterminée).

b) Les servitudes immobilières (ont généralement pour objet un bien-

fonds).

Les servitudes foncières (le titulaire est le propriétaire actuel

d’un autre fonds, la servitude suit le fonds, art. 730 CC).

Les servitudes personnelles (le titulaire est une personne

déterminée, la servitude suit la personne). → usufruit

Les servitudes personnelles proprement dites

(indissolublement liées à la personne, par ex.

l’usufruit ou le droit d’habitation).

Les servitudes personnelles improprement dites (ne

sont pas indissolublement liées à la personne, mais

peuvent passer aux héritiers ou être cédées).

o Les servitudes improprement dites cessibles

(droits de superficie et de source)

o Les servitudes improprement dites non-

cessibles (par ex. un droit personnel de

passage).

o Les droits de gage

a) Le droit de gage assujettit une chose ou un animal à la garantie d’une

créance. Si la prestation due n’est pas exécutée, le créancier gagiste

peut faire réaliser l’objet grevé et se faire verser en propriété la

somme ainsi obtenue.

b) Il peut porter sur un meuble ou un immeuble

Le droit de gage mobilier

Le nantissement (art. 884 CC) suppose que le

constituant du gage se dessaisisse de l’objet nanti en

le remettant au créancier ou à un tiers.

Le droit de rétention (art. 895 ss CC) le créancier

retient le bien de son débiteur et peut le réaliser en

cas d’inexécution de la créance.

L’hypothèque mobilière (cf. art. 885 CC) naît sans

transfert de possession, mais moyennant inscription

dans un registre

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Le droit de gage immobilier

L’hypothèque (art. 824 à 841 CC) sert

essentiellement de garantie à une créance, dont elle

est un droit accessoire.

o Hypothèque légale directe (le droit de gage

naît par le seul effet de la loi (803 al. 3 CC)

o Hypothèque légale indirecte (la loi donne à

une personne le droit d’obtenir l’hypothèque)

La cédule hypothécaire (art. 842 à 874 CC) créance +

droit de gage comme tout indivisible dans un papier-

valeur

La lettre de rente (cf. art. 847 CC) est une créance

constituée en charge foncière sur un immeuble. Elle

n’oblige que le propriétaire actuel de l’immeuble

grevé et ce propriétaire ne répond que sur l’objet du

gage.

o Les charges foncières procurent à leur titulaire la faculté d’exiger du

propriétaire actuel d’un immeuble certaines prestations (par ex. livrer une

certaine quantité de bois), dont ce propriétaire ne répondra que sur son

immeuble (cf. art. 782 et 791).

IV. Droits présentant une certaine analogie avec les droits réels

1. Les obligations dites « réelles »

o Obligations dont le débiteur et/ou le créancier sont désignés par le droit réel

qu’ils ont sur une chose ou un animal ou par la possession qu’ils ont de ce

bien.

o Ex : celui qui bénéficie d’un droit de passage, entretient aussi le passage sur le

fonds grevé.

2. Les droits personnels renforcés

o Il s’agit de droits personnels (créances) en relation avec un immeuble, qui

sont opposables à tout droit postérieurement acquis sur cet immeuble.

o Ce renforcement est souvent la conséquence d’une « annotation » au registre

foncier (art. 959 CC). Ex : le droit d’emption qui est un droit personnel de se

porter acquéreur d’un bien à titre onéreux.

3. Les droits d’appropriation

o Droits qui permettent à une personne placée dans des conditions déterminées

de s’approprier certaines choses ou certains animaux.

o Ex : Le chasseur peut s’approprier le gibier qu’il abat dans le respect des

règles légales.

4. Les expectatives de droit réels

o On dit qu’une personne est titulaire d’une expectative lorsqu’elle est dans une

situation juridique telle qu’elle va (normalement) acquérir un droit.

o Un tel « droit expectatif » n’est pas un droit réel, mais la qualification de la

situation juridiquement protégée dans laquelle se trouve le titulaire de

l’expectative.

- Hypothèque : créance et gage

ne sont pas liés.

- Cédule hypothécaire : créance

et gage sont liés (dans un

papier-valeur).

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§ 2 L’objet des droits réels

I. Les choses

1. Notion

o Définition : « Une chose est une portion délimitée et impersonnelle de

l’univers matériel, qui est susceptible de maîtrise humaine et n’est pas un

animal. »

o Il en découle 5 caractéristiques :

a) Objet matériel (≠ droits, énergie, un patrimoine)

b) Objet délimité

c) Susceptible d’appropriation

d) Doit être impersonnel

e) Pas un animal

o Les choses soustraites au droit privé

a) Les choses publiques

Les choses du patrimoine administratif

Les choses dans l’usage commun

b) Les choses « hors commerce » dont l’aliénabilité est supprimée ou

restreinte en raison de leur nature ou pour des motifs d’intérêt

général.

2. Pluralité des choses

o Une universalité de fait est une pluralité de choses distinctes qui, en raison de

leur commune affectation économique, forment une unité dans les affaires

(une bibliothèque, une collection de timbres, un paquet d’actions de la même

société).

o Une universalité de droit est un ensemble de choses et de droits assujettis à

un but et formant de ce fait une certaine unité. Elle comprend non seulement

des choses mais aussi des droits (créances, droits corporatifs, droits de la

propriété immatérielle). Cette unité est reconnue par le droit mais ne forme

pas, en soi, un droit réel. 3 principaux cas :

a) Le patrimoine : ensemble des droits pécuniaires appartenant à une

personne (droits réels, créances, droits corporatifs, etc.)

b) Le patrimoine séparé : ensemble de droits pécuniaires, détachés du

patrimoine général d’une personne et soumis à un régime juridique

particulier (régimes matrimoniaux, successions sujette à la

liquidation, etc.)

c) L’entreprise : ensemble organisé de chose, de droits et de relations

de fait, appliqué à une activité économique. C’est un patrimoine

auquel s’ajoutent des éléments immatériels (clientèle, secrets

d’affaire, « goodwill », etc.).

3. Classification des choses

o Meubles et immeubles

o Choses fongibles et choses non fongibles

o Choses de genre et corps certains

o Choses consomptibles et choses non consomptibles

o Choses divisibles et choses indivisibles

o Choses simples et choses complexes

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II. Les animaux

1. Art. 641a al.1 CC depuis le 1er avril 2003

o « Les animaux ne sont pas des choses » ; sauf disposition contraire, ils sont

néanmoins régis par les mêmes règles que les choses (art. 641a al.2 CC).

III. Les autres objets des droits réels

1. Les forces naturelles

o L’art. 713 CC assimile les forces naturelles aux choses mobilières.

o L’application des règles relatives aux meubles ne peut se faire que par

analogie, car les forces naturelles ne sont pas des choses au sens des

termes du Code Civil.

2. Certains droits (dans certains cas le Code admet qu’un droit réel puisse porter

sur un droit en tant que tel) :

o Art. 656 al. 3 CC

o Art. 655 al. 2 CC

o Art. 745 al. 1 CC

o Art. 899 al. 1 CC

§ 3 Les principes fondamentaux de la réglementation des droits

réels (6 principes)

I. Le numerus clausus

1. Propriété

2. Servitudes

3. Droit de gage

4. Charges foncières

II. Le principe de publicité

1. Meubles

o S’exprime par la possession (714 al. 1 / 930 al. 1 CC). Selon l’article 930 al. 1

CC, le possesseur est présumé propriétaire. Ceci implique le fardeau de la

preuve.

2. Immeubles

o Inscription au registre foncier (656 al. 1 / 973 al. 1 CC)

III. Le processus d’acquisition des droits réels

1. Acquisition des droits réels moyennant modification de la possession ou inscription

au registre foncier

o Acquisition dérivée

a) Un titre d’acquisition (acte juridique générateur de l’obligation de

transférer la propriété ou de constituer un droit réel).

b) Une opération d’acquisition (le droit de l’acquéreur dépend de la

validité du droit de l’aliénateur).

Un acte de disposition (acte par lequel le débiteur de

l’obligation de transférer ou de constituer un droit réel

manifeste sa volonté d’exécuter)

Un acte matériel (exécution, transfert de possession,…)

Le numerus clausus s’explique par le fait que le droit

réel est opposable à tous. Il contribue en outre à la

sécurité des transactions juridiques.

Exemple : vente immobilière.

1) Titre d’acquisition : réquisition

d’inscription au registre foncier.

2) Opération d’acquisition : inscription

au registre foncier.

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o Acquisition originaire (le droit de l’acquéreur ne dépend pas du droit de

l’aliénateur). Ex : le journal 20min abandonné dans le train.

2. Acquisition des droits réels sans modification ni inscription au registre foncier

o En dérogation au principe de publicité, le Code prévoit parfois qu’un droit

réel est acquis indépendamment de toute manifestation extérieur. Dans de tels

cas, le titre d’acquisition est suffisant pour opérer la constitution ou le

transfert du droit réel.

o Ex : acquisition par les héritiers (art. 260 CC). Selon le principe de la saisine,

les héritiers sont saisis des biens directement à la mort du de cujus.

IV. Le principe de causalité

V. Le principe de spécialité

Un droit réel ne peut porter que sur un bien individuellement déterminé. Par exemple,

on n’est pas propriétaire de sa bibliothèque (meuble), mais de chacun des ouvrages

ainsi que du meuble. On ne peut mettre à gage un troupeau, mais chaque mouton

séparément.

VI. Le principe de la priorité dans le temps

1. Les droits réels limités priment la propriété

2. Entre droits réels limités qui sont incompatibles, le plus ancien prime. « Prior

tempore, potior iure. »

L’opération d’acquisition n’est valable que si le titre

d’acquisition est valable.

- Titre d’acquisition (valable)

- Opération d’acquisition

o Acte de disposition

o Acte matériel

NB :

- Le titre d’acquisition ne donne qu’une créance.

- L’acte de disposition est une manifestation de

volonté de transférer la propriété, ceci suppose

que l’aliénateur dispose du bien en question.

- L’acte matériel est un transfert de possession pour

les meubles, et une inscription au registre foncier

pour les immeubles

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Deuxième partie

Possession et registre foncier

§ 5 La notion de possession

I. La possession des biens matériels

1. Nature juridique de la possession

o La possession est un pouvoir de fait sur un bien matériel qui n’implique pas

nécessairement un droit sur ce même bien.

o La loi attache toutefois quelques conséquences juridiques à la possession.

2. Origine de la notion de possession retenue en droit suisse

o Droit romain

a) Corpus (élément matériel)

b) Animus (élément intentionnel)

o Conception germanique

a) Notion de Gewere (acte de transmission)

b) Le possesseur est moins celui qui détient matériellement les choses,

mais plutôt celui qui en tire profit. Aspect économique !

o Conception du Code Civil suisse

c) Notion de possession essentiellement germanique.

d) La maîtrise matérielle (corpus) est certes requise, mais la maîtrise

économique suffit.

e) L’animus n’est pas repris tel quel en droit suisse

3. Eléments constitutifs de la possession (2 éléments)

o Elément de fait

a) Une maîtrise de fait

Maîtrise physique (rapport spatial entre le possesseur et le

bien)

Maîtrise intellectualisée (sans rapport physique, le bien est

dans la sphère d’influence du possesseur). Ex : le propriétaire

qui loue son immeuble en reste possesseur.

b) Maîtrise de nature non passagère

Il en découle de l’art. 921 CC que la maîtrise de fait acquise

par suite de circonstances de nature passagère qui suspendent

la maîtrise d’autrui n’est pas suffisante pour fonder la

possession).

Ex : Le client qui prend dans la main les articles que le

vendeur lui présente, n’en est pas possesseur.

o Elément subjectif

a) Il faut en plus de l’élément de fait la volonté de posséder.

b) La manifestation de la volonté de posséder n’est pas un acte juridique,

mais une action de fait. Elle requiert une capacité de discernement

appropriée, mais non la capacité civile active. (MICD : OK)

Corpus + Animus = Possession

Maîtrise directe :

objet dans la sphère

d’influence du

possesseur.

Maîtrise indirecte :

on peut posséder à

distance par les

instruments de

possession.

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II. La possession des droits

1. La possession des servitudes foncières et des charges foncières

o Cette possession consiste dans l’exercice effectif du droit. Elle n’est en

définitive utile que si l’exercice du droit n’implique pas par lui-même une

maîtrise du bien sur lequel il porte.

o Le titulaire d’une servitude affirmative sur un fonds (par ex. un droit de

passage) qui exerce celle-ci a par là-même une maîtrise effective partielle du

fonds servant ; la possession du droit ne semble dès lors rien ajouter à sa

position.

o Pour les servitudes négatives, on admettra que le titulaire a exercé son droit si

le propriétaire du fonds servant s’est abstenu de certains actes d’utilisation

dans le but de respecter la servitude ou si, chaque fois que ce propriétaire a

voulu agir contrairement à la servitude, le titulaire de celle-ci s’y est opposé.

o Les servitudes négatives (par ex. une servitude de non-bâtir) et les charges

foncières ne vont pas de pair avec un pouvoir de fait sur le fonds ; cela donne

à l’art. 919 al. 2 CC toute son utilité.

o Pour les charges foncières, il y a exercice du droit si les prestations sont

fournies ou si l’ayant droit les a réclamées.

2. La possession d’autres droits

Certains auteurs proposent d’appliquer le principe de l’art. 919 al. 2 CC à

d’autres droits, notamment aux créances et aux droits de la propriété

immobilière.

III. La possession fictive

Dans trois cas, le Code admet une possession « fictive » de biens matériels, en faisant

abstraction de l’un ou des deux éléments e l’art. 919 al. 1 CC :

o Art. 720 al. 3 CC

o Art. 921 CC

o Art. 560 al. 2 CC

IV. Notions voisines de la possession

1. La possession pour autrui

o Le possesseur pour autrui (auxiliaire de la possession) exerce directement la

maîtrise de fait sur un bien, mais seulement à titre subalterne, pour le compte

d’une autre personne qui, elle, est possesseur.

o Cette situation de possesseur pour autrui est caractérisée par le lien de

subordination qui le lie au possesseur dont il suit les instructions.

o La possession pour autrui n’est pas mentionnée dans le Code. C’est une

notion de jurisprudence et de doctrine.

o L’auxiliaire de la possession ne bénéficie pas de la protection de la

possession. Tout au plus peut-il exercer le droit de défense au nom du

possesseur.

2. « Puissance » et « détention »

La possession doit encore être distinguée de :

a) La « puissance » qui est une maîtrise de fait, indépendante de

tout élément subjectif (rapport spatial assez étroit).

b) La « détention » qui est une notion utilisée en droit de la RC,

qui est proche de la notion de « puissance » (voir art. 56 CO,

58 LCR, etc.)

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§ 6 Espèces de possessions

I. Possession simple et possession multiple

1. Possession immédiate et possession médiate

o La possession immédiate est celle de la personne qui exerce directement,

sans intermédiaire, la maîtrise de fait sur un bien.

o La possession médiate est celle de la personne qui exerce sa possession par le

truchement d’un tiers à qui elle a accordé un droit (réel ou personnel) sur ou

en relation avec un bien.

NB : La possession simple est par nature immédiate. Au contraire, en cas de

possession multiple, il y a simultanément maîtrise immédiate et maîtrise médiate.

2. Possession originaire et possession dérivée

o Notions

a) Est possesseur originaire celui qui, possédant un bien comme

propriétaire ou à un autre titre, le remet à un tiers pour lui conférer sur

ce bien, ou relativement à celui-ci, un droit réel limité ou un droit

personnel. (Ex : le propriétaire qui constitue un usufruit sur une chose

ou donne celle-ci en nantissement).

b) Est possesseur dérivé celui à qui le possesseur originaire a remis un

bien en vue de lui conférer un droit réel limité ou un droit personnel.

(Ex : locataires, usufruitiers, emprunteurs, dépositaires, etc.)

NB : La possession originaire et la possession dérivée sont des notions

relatives : une personne peut être simultanément possesseur dérivé par

rapport à celui dont elle tient sa possession et possesseur originaire par

rapport à celui à qui elle a transmis le bien.

o Caractéristiques

a) Contrairement à la possession pour autrui, la possession dérivée doit

aller de pair avec un droit sur ou en relation avec le bien. (Toutefois,

la validité de ce droit est sans importance : il suffit que le possesseur

dérivé reconnaisse que, par l’effet du droit, il tient sa possession d’un

tiers qui peut, ou pourra, exiger la restitution de l’objet).

b) En reconnaissant n’avoir qu’une possession dérivée, le possesseur

dérivé maintient la possession originaire de celui dont il tient le bien.

(Si, en revanche, il ne manifeste pas, ou plus, sa volonté de posséder à

titre dérivé, la possession originaire prend fin).

II. Possession individuelle et possession collective

1. Notions

o La possession individuelle est celle qui est exercée par une seule personne ;

peu importe qu’il s’agisse d’une possession simple, médiate ou immédiate,

originaire ou dérivée.

o La possession collective est celle qui est exercée par plusieurs possesseurs

dans les deux hypothèses suivantes :

a) En règle générale, il s’agira de plusieurs possesseurs de même qualité

(possesseurs simples, immédiats ou médiats, originaires ou dérivés).

1) Possession originaire seule :

→ possession simple

2) Possession dérivée + possession

originaire sur le même objet :

→ possession multiple

Schéma pour analyser (ordre) :

I] possession simple/multiple

II] possession originaire/dérivée

III] possession médiate/immédiate

IV] possession individuelle/collective

V] possession légitime/illégitime

NB : la possession collective peut être

une copossession ou une possession

commune.

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b) Il peut cependant également s’agir de plusieurs possesseurs de degrés

différents (par ex. un possesseur originaire et un possesseur dérivé)

qui ont tous la maîtrise de l’objet.

2. Espèces de possessions collectives

o Copossession : lorsque chacun des possesseurs peut exercer la maîtrise de fait

sur le bien sans le concours de l’autre. (Ex : 2 personnes ayant chacune une

clé permettant d’ouvrir un coffre. En général, mari et femme sont

copossesseurs des objets de ménage).

o Possession commune : lorsque les possesseurs ne peuvent exercer

qu’ensemble la maîtrise de fait sur le bien. (Ex : 2 personnes ayant chacune

une des deux clés permettant d’ouvrir le coffre. L’un ne peut ouvrir sans

l’autre).

III. Possession légitime et possession illégitime

Parce qu’elle repose sur une maîtrise de fait, la possession est indépendante de droit

(valable) sur ou en relation avec le bien. On peut ainsi distinguer la possession

légitime qui est fondée sur un droit (réel ou personnel) valable et la possession

illégitime, qui existe sans que le possesseur soit au bénéfice d’un tel droit.

§ 7 L’acquisition de la possession

I. L’acquisition originaire de la possession

1. Conditions

o L’acquisition originaire a lieu lorsqu’elle ne procède pas d’une possession

antérieure.

o L’acquisition originaire de la possession n’est pas régie par le Code Civil.

o Ses conditions découlent de la notion de possession :

a) Maîtrise de fait (corpus)

b) Volonté de posséder (animus)

2. Cas

o Légal : certains cas d’acquisition originaire de la possession sont prévus par

la loi (ex : occupation de la chose sans maître, occupation d’un trésor, etc.).

o Illégal : une acquisition originaire est aussi possible sans le cas où l’acquéreur

n’est pas en droit de l’opérer (ex : le voleur).

NB : Il y a enfin acquisition originaire lorsque des personnes veulent procéder à

une acquisition dérivée, mais que les conditions de validité de celle-ci relatives à

la volonté des parties ne sont pas réalisées (incapacité de discernement ou crainte

fondée de l’aliénateur, par exemple).

II. L’acquisition dérivée de la possession

1. Acquisition dérivée de la possession avec remise de la chose

o Remise de la chose « entre présents » (art. 922 al. 1 CC)

a) Modes d’acquisition

En principe, l’acquisition s’opère par la remise de la chose

elle-même à l’acquéreur (meuble : de main à main /

immeuble : l’acquéreur s’y installe).

Possession collective → question de fait

Propriété collective → question de droit

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L’acquisition peut toutefois aussi s’opérer par la remise à

l’acquéreur des moyens permettant d’exercer la maîtrise

(instruments de possessions). Ex : clés de voiture.

b) 3 Conditions :

L’aliénateur doit avoir la possession qu’il entend transmettre

à l’acquéreur. (Un possesseur dérivé ne peut transmettre la

possession originaire).

Il faut une remise de la chose ou des moyens de la possession.

Il faut qu’aliénateur et acquéreur aient la volonté

correspondant à l’acquisition dérivée.

o Remise de la chose « entre absents » (art. 923 CC)

a) La représentation de l’acquéreur

L’intermédiaire devient possesseur dérivé

Il acquiert pour lui la possession immédiate et

dérivée, et procure par là même la possession médiate

et originaire au représentant.

L’intermédiaire ne devient pas possesseur dérivé

L’intermédiaire est dans ce cas un auxiliaire de la

possession, qui n’est que l’instrument de la

possession du représenté. Ce dernier devient

possesseur simple dès la remise de la chose à son

auxiliaire.

b) La représentation de l’aliénateur

Les remarques faites ci-dessus en relation avec la

représentation de l’acquéreur valent également, par analogie,

pour la représentation de l’aliénateur. L’intermédiaire peut

donc être aussi bien possesseur dérivé qu’auxiliaire de la

possession.

2. Acquisition dérivée de la possession sans remise de la chose (4 cas)

o Le transfert de la possession ouverte (art. 922 al. 2 CC)

a) Champ d’application

Le transfert de la possession ouverte permet l’acquisition

dérivée de la possession lorsque l’acquéreur est en mesure

d’exercer la maîtrise de fait sur la chose, mais ne veut pas le

faire immédiatement (cas d’un bien-fonds non bâti, d’un tas

de bois entassé dans une forêt, etc.).

Ce mode d’acquisition ne présente ainsi d’intérêt qu’aussi

longtemps que l’acquéreur n’exerce pas la maîtrise de fait sur

la chose : dès ce moment, il y a acquisition de la chose au

sens de l’art. 922 al. 1 CC.

b) 3 conditions :

L’aliénateur doit avoir la possession immédiate de la chose.

La possession transmise doit être ouverte à plusieurs

personnes (à l’acquéreur ou un groupe de personnes auquel

appartient l’acquéreur).

Aliénateur et acquéreur doivent manifester, le façon

réciproque et concordante, leur volonté de procéder à une

transmission de possession. → contrat possessoire

Exemples d’auxiliaire de la possession :

1) Un employé de maison achète des

produits pour son patron.

2) Un enfant capable de discernement

prend livraison d’un objet commandé

par ses parents.

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o La délégation de possession (art. 924 al. 1 CC, première hypothèse)

a) Champ d’application

La délégation de possession rend possible l’acquisition

dérivée de la possession médiate, sans que la possession

immédiate d’un tiers en soit affectée.

L’aliénateur est un possesseur médiat qui convient avec

l’acquéreur que le possesseur immédiat (le « tiers » de l’art

924 al. 1) possédera désormais pour l’acquéreur.

Ex : Une personne vend des titres déposés en banque et

procède au transfert de possession en « délégant » à

l’acheteur sa possession médiate des titres.

b) 3 conditions :

L’aliénateur doit avoir la possession médiate de la chose.

La chose doit être en possession dérivée d’un tiers.

Aliénateur et acquéreur doivent conclure un contrat

possessoire, selon lequel le tiers possédera désormais pour

l’acquéreur.

c) Effets

Avant la notification

Dès la conclusion du contrat possessoire, l’acquéreur

est possesseur médiat de la chose. Ce transfert est

opposable à quiconque, sauf le tiers qui possède.

La notification

Elle n’est soumise à aucune forme et est

généralement effectuée par l’aliénateur. L’acquéreur

peut également agir en tant que représentant de

l’aliénateur.

Après la notification

En principe, le tiers qui possédait pour l’aliénateur est

tenu de posséder désormais pour l’acquéreur ; il ne

peut empêcher l’aliénateur de disposer juridiquement

de la chose.

Cependant si le tiers est titulaire d’un droit réel limité

sur la chose (usufruit, gage mobilier), il peut

naturellement l’opposer à l’acquéreur.

Si le tiers n’avait qu’un droit personnel contre

l’aliénateur, il ne peut pas l’opposer à l’acquéreur,

car il s’agit d’un droit relatif.

o Le constitut possessoire (art. 924 al. 1 CC, seconde hypothèse)

a) Champ d’application

Le constitut possessoire permet l’acquisition de la possession

originaire alors que l’aliénateur demeure en possession de la

chose à un titre spécial.

L’aliénateur est un possesseur (en général simple) qui

convient avec l’acquéreur que celui-ci aura désormais la

possession originaire et médiate, alors que l’aliénateur

conserve la possession dérivée (et en général immédiate) à un

titre spécial.

Exemple de constitut possessoire :

Une personne vend son

appartement, mais passe en même

temps avec l’acheteur un contrat

de bail en sa faveur : par le fait du

constitut possessoire, l’acheteur

acquiert la possession originaire et

la propriété de l’appartement,

alors que le vendeur conserve la

possession dérivée comme

locataire.

14

b) 3 conditions :

L’aliénateur doit avoir la possession de la chose.

Le constitut possessoire n’est valable que si l’aliénateur

conserve la possession dérivée en vertu d’un titre juridique

particulier. → caractère concret et non abstrait du constitut

possessoire.

Aliénateur et acquéreur doivent conclure un contrat

possessoire, selon lequel l’aliénateur reconnaît l’acquéreur

comme possesseur originaire et déclare posséder désormais

pour lui.

o La brevi manu traditio (non régie par le Code)

a) Champ d’application

La brevi manu traditio permet l’acquisition dérivée de la

possession lorsque l’acquéreur est déjà en possession

(dérivée) de la chose.

L’aliénateur est possesseur originaire d’une chose dont il a

remis la possession dérivée à l’acquéreur ; il convient avec

l’acquéreur de renoncer à sa possession originaire, de sorte

que l’acquéreur aura désormais une possession simple.

b) 2 conditions :

L’acquéreur a la possession dérivée de la chose à un titre

spécial.

Aliénateur et acquéreur doivent conclure un contrat

possessoire, selon lequel l’aliénateur renonce en faveur de

l’acquéreur à sa possession originaire. L’acquisition de la

possession a lieu au moment de la conclusion du contrat.

3. Cas particuliers d’acquisition dérivée de la possession

o La remise de titres représentatifs de marchandises

a) Champ d’application

Selon l’art. 925 al. 1 CC, l’acquisition dérivée de la

possession de marchandises confiées à un voiturier ou à un

entrepositaire peut être opérée par la remise du titre dans

lequel est constaté le droit de la restitution de ces

marchandises (titre « représentatif de marchandises »).

Le transfert de possession par remise de titres représentatifs

de marchandises permet non seulement de transférer la

propriété de celles-ci, mais aussi de les grever d’usufruit ou

de gage (nantissement).

b) 3 conditions :

Les marchandises doivent avoir été confiées à un voiturier ou

à un entrepositaire, en vertu d’un contrat de transport.

Le voiturier ou l’entrepositaire doit avoir émis un titre

représentatif de marchandises et ce titre doit être un papier-

valeur.

Le papier-valeur doit être transféré à l’acquéreur dans les

formes prévues pour le genre de papier-valeur considéré.

Exemple de brévi manu traditio :

Un locataire achète la chose louée.

Constitut possessoire

Brevi manu traditio

15

c) Effets

Le transfert du papier-valeur procure immédiatement la

possession des marchandises, sans qu’une notification au

voiturier ou à l’entrepositaire soit nécessaire. En effet, en

émettant le papier-valeur, le voiturier ou l’entrepositaire s’est

précisément engagé à ne restituer les marchandises qu’à la

personne légitimée par le titre.

Quid du cas de l’aliénation des marchandises à un tiers de

bonne fois ?

Si, en violation des ses obligation, le voiturier ou

l’entrepositaire remet les marchandises à un tiers de

bonne foi pour lui transférer la propriété ou constituer

sur elles un droit réel limité, ce tiers est protégé dans

son acquisition (art. 933 CC).

Le droit de l’acquéreur de bonne foi des

marchandises a la priorité sur celui de l’acquéreur de

bonne foi du titre (art. 925 al. 2). Par conséquent, si le

tiers établit qu’il a valablement acquis la propriété des

marchandises, le possesseur du titre perd tout droit sur

celles-ci. → dommages-intérêts !

o L’acquisition dérivée de la possession des droits

Lors de la création du droit (principalement d’une servitude ou d’une

charge foncière), l’acquisition de la possession a lieu lors du premier

acte d’exercice du droit ; l’inscription éventuelle du droit au registre

foncier n’est ni nécessaire, ni suffisante pour acquérir la possession.

Le transfert ultérieur de la possession du droit dépend du type de

droit considéré. Si l’exercice du droit implique la maîtrise d’une

chose, la possession du droit est transférée avec la possession de cette

chose. Si l’exercice du droit ne confère pas la maîtrise d’une chose

(par exemple en cas de servitudes négatives ou de charges foncières),

la possession du droit est transmise avec la possession du fonds

dominant ou, à défaut, avec la titularité du droit.

§ 8 La perte de la possession

I. Cas où la possession n’est pas perdue

- Ce sont les cas où la maîtrise effective est certes interrompue, mais par des faits de

nature passagère.

- Ce qui est décisif n’est pas que l’interruption soit passagère, mais que les faits qui sont

à l’origine de cette interruption soient de nature passagère.

- La nature passagère des faits empêchant ou interrompant la maîtrise doit être

appréciée selon l’expérience de la vie.

II. Cas où la possession est perdue

1. Perte volontaire

→ Lorsque la chose fait l’objet d’une acquisition dérivée de la possession ou est

purement et simplement abandonnée (déréliction).

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2. Perte involontaire

o Vol

o Perte

o Soustraction

o Pour le possesseur originaire, lorsque le possesseur dérivé manifeste sa

volonté de ne plus posséder pour le possesseur originaire.

III. Tableau pour résumer

§ 9 La protection de la possession

Voici un tableau qui résume les diverses protections de la possession ainsi que les protections du droit.

Au possesseur immédiat

contre sa volonté.

17

I. Droit de défense (926 CC)

1. Les conditions du droit de défense

o Les conditions personnelles

a. Le bénéficiaire du droit de défense

Tout possesseur d’une chose (mobilière ou immobilière),

d’un animal ou d’un droit.

En revanche l’auxiliaire de la possession ne bénéficie pas du

droit de défense. Il peut toutefois exercer ce droit au nom du

possesseur.

b. La personne contre qui le droit de défense est dirigé

C’est l’auteur de l’acte d’usurpation ou de trouble.

En revanche, le droit de défense ne peut être exercé contre un

successeur, même de mauvaise foi, de l’auteur (par ex. un

receleur).

Il ne peut être non plus exercé contre un sous-locataire.

o Les conditions matérielles

a. Un acte d’usurpation ou de trouble

Constitue un acte d’usurpation de la possession l’acte par

lequel une personne enlève au possesseur la maîtrise effective

de la chose ou de l’animal. L’usurpation entraîne la

dépossession.

Constitue un trouble de la possession, toute entrave à

l’exercice de la possession qui n’entraîne pas une

dépossession.

b. Un acte d’usurpation ou de trouble « illicite »

En général, l’acte d’usurpation ou de trouble est illicite au

sens de l’art. 926 CC chaque fois qu’il n’est pas autorisé par

la loi ou par le possesseur.

Le consentement du/des possesseur(s) n’est pas un acte

juridique ; il présuppose la capacité de discernement, mais

non la capacité civile active. Il peut être tacite ou exprès ou

donné au préalable. Dans le dernier cas, il est révocable en

tout temps.

En cas d’atteinte provenant d’un autre possesseur sur le

même bien, les règles générales s’appliquent. L’art. 926 CC

ne vise qu’à protéger un état de fait.

2. Les modalités de l’exercice du droit de défense

o La légitime défense du possesseur (926 I)

o Le droit de reprise (926 II)

a) L’objet doit avoir été enlevé au possesseur par violence ou

clandestinement.

b) Le droit de reprise doit être exercé immédiatement.

o Proportionnalité (926 III)

II. Action réintégrande (927/929 CC)

1. Les conditions de l’action

o Conditions personnelles

a) La qualité pour agir appartient à celui qui a perdu la possession du fait

de l’acte d’usurpation.

18

b) La qualité pour défendre : l’action ne peut être intentée que contre

l’auteur de la dépossession (« l’usurpateur ») qui a encore la maîtrise

de la chose, fût-ce indirectement.

o Conditions matérielles

a) Une usurpation illicite (mêmes notions que pour 926 CC)

Il n’est pas nécessaire que l’usurpateur ait commis une faute

(comme dans le droit de défense).

L’action est en particulier exclue lorsque la possession a été

transférée volontairement au possesseur actuel.

b) Une absence d’un droit préférable et liquide du défendeur

En principe, comme la réintégrande est une action

possessoire, le défendeur est tenu de rendre l’objet même s’il

y prétend un droit préférable (927 I) : le pétitoire (action

fondée sur le droit ou sur la chose) doit être distingué du

possessoire.

L’art. 927 II apporte une exception au principe lorsque le

défendeur établit aussitôt un droit préférable (liquide) qui

l’autoriserait à reprendre la chose au demandeur.

→ droit liquide : droit que l’on peut établir immédiatement.

o Conditions de temps (929 CC)

a) 929 I institue une cause de déchéance

b) 929 II introduit en outre un délai de péremption d’un an (délai

absolu).

2. Objet de l’action, preuve et procédure

o Objet de l’action

a) La réintégrande proprement dite (tend à la restitution de la chose ou

de l’animal).

b) L’action en dommages-intérêts (41ss CO)

Suppose un chef de responsabilité de l’auteur

Le dommage est la conséquence des moyens employés par le

défendeur ainsi que l’indue détention de l’objet.

o Fardeau de la preuve (8 CC)

o Procédure (cantons)

a) Procédure sommaire prévue par la plupart des cantons

b) L’autorité de la chose jugée d’une décision rendue sur la base de l’art.

927 ne porte que sur la question de la possession. Le jugement ne

règle pas « définitivement et de manière durable les rapports de droit

civil litigieux des parties ».

III. Action à raison du trouble (928/929 CC)

1. Les conditions de l’action

o Conditions personnelles

a) La qualité pour agir appartient à celui dont la possession est troublée.

(En général, il s’agit du possesseur immédiat, mais la possession

médiate peut également être troublée).

b) La qualité pour défendre : L’action ne peut être dirigée que contre

l’auteur du trouble et ses successeurs universels. (Si l’action prend

forme d’une action en interdiction d’un trouble qui n’a pas encore eu

lieu, elle sera dirigée contre l’auteur potentiel de ce trouble).

19

o Conditions matérielles

a) Un trouble de la possession

Par trouble de la possession, il faut entendre toute entrave à

l’exercice de la possession qui n’entraîne pas une

dépossession.

L’atteinte n’est pas forcément matérielle, mais peut être

psychique (exploitation de poudre explosive près de chez

soi), ou alors une atteinte indirecte (émission de fumées du

fonds voisin, etc.).

b) Un trouble illicite

Mêmes notions que pour le droit de défense

Il n’est pas nécessaire que l’auteur du trouble ait commis une

faute.

En principe, le défendeur n’est pas admis à invoquer un droit

qu’il aurait sur ou en relation avec l’objet, en pratique, le juge

pourra difficilement éviter cette question lorsque la limite des

possessions est incertaine.

o Conditions de temps (929 CC)

→ voir les conditions sur la réintégrande (qui sont les mêmes), sous

les deux réserves suivantes :

a. En cas de pluralité de troubles qui ne constituent pas un tout,

chaque atteinte fait courir le délai d’un an de l’art. 929 II CC.

b. Lorsque l’action prend la forme d’une action en interdiction

d’un trouble qui n’a pas encore eu lieu, elle ne se périme pas.

2. Objet de l’action, preuve et procédure

o Objet de l’action

a) L’action en raison du trouble proprement dite

L’action en cessation du trouble

Cette action suppose que le trouble dure encore ! Si

tel n’est pas le cas → action en interdiction du

trouble ou action en dommages-intérêts.

L’action en interdiction du trouble, cette action vise :

à éviter que des troubles qui se sont déjà produits ne

se reproduisent ;

soit à empêcher qu’un trouble menaçant ne se réalise.

b) L’action en dommages-intérêts

Elle vise à obtenir la réparation du dommage subi par l’effet

du trouble de la possession.

Ce sont les effets du trouble, non plus sa cause qui sont

concernés !

L’action est ouverte aux conditions des art. 41 ss CO ; elle se

prescrit selon l’art. 60 CO.

o Fardeau de la preuve (8 CC)

o Procédure (cf. réintégrande)

929 I CC → cessation de l’atteinte

929 II CC → interdiction de l’atteinte

NB : Contrairement à la

réintégrande, l’action en

raison du trouble est

purement possessoire ; le

défendeur n’est donc pas

admis à faire valoir un droit

préférable sur la chose.

L’action doit donc être

admise chaque fois qu’il y a

trouble illicite de la

possession.

20

§ 10 La protection du droit par la possession

I. Généralités

1. Champ d’application des règles sur la protection du droit

o Il ressort de l’art. 937 I que la protection du droit fondée sur la possession ne

s’applique qu’aux choses mobilières et aux animaux. En matière immobilière,

cette protection est rattachée à l’inscription au registre foncier.

o L’art. 937 II rappelle, en revanche, que le possesseur d’un immeuble peut

invoquer les moyens de défense de la possession en tant que telle.

2. Le système légal

o 2 présomptions (930 et 931 CC) + 2 fictions (933 et 935 CC)

o Effet défensif (932 CC) + 2 actions mobilières (934 et 936 CC)

II. Les présomptions de droit attachés à la possession

1. Conditions communes

o Un objet mobilier

a) La possession ne constitue la base des présomptions de droits que si

elle a pour objet une chose mobilière ou un animal (930 I et 641a II

CC).

b) Cas particuliers : 1) bateaux et aéronefs, 2) papiers-valeurs, 3) titres à

ordre et titres nominatifs.

o Une possession « qualifiée »

a) Il faut que la possession soit telle que l’on puisse réellement conclure

à l’existence d’un droit (pour faire présumer le droit du possesseur).

b) La présomption cesse si la possession est violente, clandestine ou

équivoque. (La possession est « violente » si elle a été acquise par des

voies de fait, des menaces ou par d’autres comportements violents).

c) Fardeau de la preuve (8 CC) au possesseur qui invoque la

présomption. C’est au non-possesseur de supporter le fardeau de la

preuve du vice de la possession.

o Un droit dont l’existence est susceptible d’être présumée

a) La possession d’un objet mobilier ne peut faire présumer d’un droit

que si elle implique la possession dudit objet.

b) Tel est le cas pour la propriété (art. 930 I) et les droits réels limités

(sauf l’hypothèque immobilière).

c) Pour les droits personnels, il faut voir de cas en cas

La présomption joue pour : 1) le locataire, 2) le dépositaire et

3) l’emprunteur.

La présomption est exclue pour : 1) le titulaire d’un droit

d’emption, 2) ou de préemption, dans l’hypothèse ou cet objet

est vendu à un tiers.

2. Contenu des présomptions

o Les présomptions de propriété déduites d’une possession simple ou originaire

a) La présomption de propriété fondée sur la possession actuelle 930 CC

Le possesseur d’une chose mobilière ou d’un animal en est

présumé propriétaire (930 I). Il peut se prévaloir de cette

présomption si sa possession est simple ou originaire

(médiate). → peut être une possession effective ou fictive !

21

S’il s’agit d’une possession individuelle, il y a présomption

de propriété individuelle.

S’il s’agit d’une possession collective, il y a présomption de

propriété collective. → entre les deux formes, c’est la

copropriété qui est présumée (car la propriété commune

suppose une communauté dont l’existence doit être établie) !

L’effet de présomption consiste en ce que celui qui conteste

le droit du possesseur doit établir que celui-ci n’est pas

propriétaire. La présomption produit cet effet dès que le

possesseur allègue son droit de propriété. (cf. 8 CC)

b) La présomption de propriété fondée sur la possession antérieure

Selon 930 II, le possesseur antérieur est présumé avoir été

propriétaire pendant la durée de sa possession.

Les conditions et les conséquences de cette présomption sont,

pour la durée de la possession, les mêmes que celles de la

présomption du possesseur actuel.

o Les présomptions déduites d’une possession dérivée (931 CC)

a) La présomption du droit du propriétaire (et/ou d’un autre possesseur

originaire)

Selon 931 I, le possesseur dérivé d’un objet mobilier peut

invoquer « la présomption de la propriété de la personne dont

il tient cette chose de bonne foi ».

Il faut comprendre le texte comme suit :

o Si le possesseur dérivé tient l’objet du propriétaire, il

peut invoquer la présomption de propriété du

possesseur originaire (par ex. si le possesseur dérivé

est un usufruitier).

o Si celui qui a remis l’objet au possesseur dérivé n’est

pas le possesseur originaire (par ex. le possesseur

dérivé est un locataire de l’usufruitier), le possesseur

dérivé peut invoquer 2 présomptions :

1. Celle de l’existence du droit de celui dont il

tient l’objet (931 II CC).

2. Celle du droit de propriété.

b) La présomption du droit du possesseur dérivé

Le possesseur dérivé est présumé titulaire du droit, réel limité

ou personnel, sur lequel il prétend fonder sa possession (921

II). Peu importe que la possession dérivée soit médiate ou

immédiate.

La présomption de 931 II n’est pas opposable au possesseur

originaire. A l’art. 931 I in fine, il faut lire « celui dont il tient

son droit sur l’objet ». Car le successeur, à titre universel ou

particulier, de celui qui a remis l’objet au possesseur dérivé

est aussi visé par la règle.

Dans ses rapports avec le possesseur originaire, le possesseur

dérivé doit ainsi prouver l’existence de son titre à posséder

(cf. 8 CC).

NB : La présomption n’existe que

si le possesseur dérivé est de

bonne foi, c’est-à-dire qu’il croit

que celui dont il invoque le droit

est bien titulaire de ce droit.

22

III. Les fictions protégeant certains acquéreurs de bonne foi

1. Généralités

o Le problème : il se peut que l’aliénateur, qui désire transférer la propriété ou

un droit réel limité, n’ait pas le pouvoir de disposer. 2 cas :

a) Soit l’aliénateur n’est pas le propriétaire de l’objet (et il n’a pas reçu

du propriétaire le pouvoir de disposer).

b) Soit l’aliénateur est bien propriétaire de l’objet, mais il n’a pas le

pouvoir d’en disposer (en raison d’une disposition légale ou à la suite

d’une décision judiciaire).

→ Principe selon l’adage : « nul ne peut transférer plus de droit

qu’il n’en a ».

o La solution légale et sa justification

a) 2 cas où l’acquéreur de bonne foi est protégé même si l’aliénateur

n’avait pas le pouvoir de disposer :

Lorsque l’objet avait été confié à l’aliénateur (933 CC) ; et

Lorsque l’acquisition porte sur la monnaie ou un titre au

porteur, même volés ou perdus (935 CC). → sécurité des

transactions !

b) Dans ces deux cas, l’acquéreur-possesseur est non seulement présumé

propriétaire (ou titulaire d’un droit réel), mais il est fictivement

considéré comme tel, alors même que l’aliénateur n’avais pas le

pouvoir de disposer. (La preuve du contraire n’est donc pas possible ;

la présomption de l’art. 930 I est élevée au rang de fiction).

2. Les conditions de l’acquisition de bonne foi en matière d’objets confiés

o Un objet mobilier confié

a) Un objet mobilier (ou animal)

b) Un objet confié (= remis volontairement à l’aliénateur)

L’objet a été remis à l’aliénateur à titre de possesseur dérivé,

en vertu d’un droit réel limité ou d’un droit personnel.

L’objet a été remis à l’aliénateur en vue de lui en transférer la

propriété. 2 cas :

Si le contrat à l’origine du transfert à l’aliénateur

(vente, donation, etc.) est nul, de sorte que

l’aliénateur n’est en réalité pas devenu propriétaire en

raison du principe de causalité ; ou

Si l’aliénateur est bien devenu propriétaire, mais n’a

pas (ou n’a plus) le pouvoir de disposer.

c) Un objet en possession de l’aliénateur (933 CC ne s’applique que si

l’aliénateur est devenu possesseur).

o La bonne foi de l’acquéreur

a) La notion de bonne foi

L’acquéreur ne doit pas avoir le sentiment que l’acquisition

qu’il fait est irrégulière. Il doit donc croire que l’aliénateur

est propriétaire de l’objet, plus précisément qu’il a le pouvoir

de disposer de celui-ci.

La bonne foi de l’acquéreur doit exister au moment de

l’acquisition (mala fides superviens non nocet).

Cf. art. 3 al. 1 CC (bonne foi de l’acquéreur présumée). Art. 3 al. 2 CC

Remis =

1) remis à un possesseur

dérivé.

2) remis suite à une

aliénation nulle.

3) cas spécial : l’aliénateur

(vrai propriétaire) n’a pas

de pouvoir de disposer (par

ex. en cas de saisine).

23

b) Portée de la bonne foi

Lorsque l’aliénateur n’a pas le pouvoir de disposer parce qu’il

n’est pas propriétaire de l’objet, la bonne foi de l’acquéreur

est toujours protégée (pour autant que les conditions de 933

soient réalisées).

En revanche, si l’aliénateur est propriétaire, mais n’a pas le

pouvoir de disposer, la bonne foi de l’acquéreur ne l’emporte

pas toujours sur les restrictions mises, par la loi ou par une

décision d’une autorité, au pouvoir de disposer de

l’aliénateur.

o Acquisition d’un droit réel

→ Seule est protégée par l’art. 933 l’acquisition d’un droit réel

(propriété, usufruit, droit de gage), à l’exclusion de celle d’un droit

personnel.

o Le transfert de l’objet de l’acquéreur

a) Le titre d’acquisition

Acte entraînant l’obligation de transférer la propriété (vente,

donation, etc.) ou de constituer un usufruit ou un gage.

Ce titre d’acquisition doit être valable.

b) L’opération d’acquisition

Implique un acte de disposition (= contrat réel)

Requiert un transfert de la possession (922 ss)

3. Les conditions de l’acquisition de bonne foi en matière de monnaie et de titres au

porteur (935 CC)

o Monnaie ou titre au porteur

a) Monnaie = pièces d’argent et billets de banques ayant cours légal en

Suisse ou à l’étranger.

b) Titre au porteur = papier-valeur dont le texte ou la forme constate

que chaque porteur en sera reconnu comme ayant droit (978 CO).

o La bonne foi de l’acquéreur (même notion qu’en cas d’acquisition d’objet

confié).

o Acquisition : comme en matière d’objets confiés, l’acquisition doit être faite à

titre de droit réel et elle doit reposer sur un titre valable.

4. Les effets de l’acquisition par le tiers de bonne foi

o Lorsque les conditions de l’art. 933 ou de l’art. 935 sont réalisées, l’acquéreur

devient effectivement titulaire du droit en cause.

o Il s’agit d’une acquisition faite à titre originaire.

o Les droits réels qui existaient sur l’objet et dont l’acquéreur ignorait de bonne

foi l’existence s’éteignent dans la mesure où ils sont incompatibles avec le

droit acquis de bonne foi.

IV. La protection judiciaire du droit du possesseur

1. L’effet défensif : la protection judiciaire du possesseur actuel (932 CC)

o Selon l’art. 932, le « possesseur d’une chose mobilière peut opposer à toute

action dirigée contre lui la présomption qu’il est au bénéfice d’un droit

préférable ».

En réalité, cette disposition n’ajoute rien aux présomptions des art. 930 et

931 : comme le possesseur est présumé titulaire du droit qu’il prétend avoir, il

peut se borner, dans un premier temps, à invoquer sa possession s’il est

NB : L’acquisition par le tiers de bonne

foi est ainsi exclue dans les principaux

cas suivants :

1) lorsque l’acquisition intervient après

le prononcé de la faillite de

l’aliénateur.

2) lorsque la chose acquise est, comme

telle, soustraite au droit privé (chose

publique ou chose hors commerce).

24

actionné en restitution de l’objet. C’est au demandeur d’établir que ce droit

n’existe pas.

o Le possesseur peut naturellement invoquer valablement les présomptions des

art. 930 et 931 que si les conditions de ces présomptions sont réalisées.

Demeurent réservées, les dispositions concernant les actes d’usurpation ou de

trouble (927 et 928 CC). En effet, celui qui a usurpé la possession n’est pas un

possesseur « qualifié » au sens de 930 et 931 CC.

o Une fois les conditions de la présomption établies, l’adversaire du possesseur

doit établir qu’il a, lui, un droit qui lui permet de reprendre l’objet. Il ne

suffit pas qu’il prouve que le possesseur n’a pas de droit sur cet objet.

2. L’effet offensif : les 2 actions mobilières du possesseur antérieur (934 et 936 CC)

o Généralités

a) En principe, la présomption dont bénéficie le possesseur actuel (930 I

et 931) l’emporte sur celle du possesseur antérieur (930 II).

b) Ainsi, le possesseur actuel peut opposer à l’action en restitution que

dirige contre lui un possesseur antérieur la présomption qu’il est au

bénéfice d’un droit préférable (932).

c) Dans deux cas, la présomption qui s’attache à la possession antérieure

est plus forte que celle que confère la possession actuelle :

Lorsque le possesseur antérieur a été dessaisi sans sa volonté

(934 CC), et

Lorsque le possesseur actuel était de mauvaise foi lorsqu’il a

acquis la possession (936 CC).

o L’action mobilière du possesseur dépossédé sans sa volonté (934 CC)

a) Conditions de l’action

Conditions personnelles

o Qualité pour agir : tout possesseur qui s’est trouvé

dessaisi d’un objet mobilier sans sa volonté.

o Qualité pour défendre : possesseur actuel, c’est-à-dire

qui possède l’objet au moment de l’ouverture de

l’action.

Conditions matérielles

o Un objet mobilier dont le demandeur a été dessaisi

sans sa volonté

Il doit s’agir d’une chose mobilière ou d’un

animal.

935 CC : la monnaie et les titres au porteur

ne peuvent être récupérés par l’action

mobilière lorsque l’acquéreur était de bonne

foi (cf. 936 CC).

L’ancien possesseur a été dessaisi sans sa

volonté (≠ 933 CC).

o Absence d’exception du défendeur (2 questions)

Le défendeur peut-il établir qu’il a, lui, un

droit sur l’objet qui est préférable à celui que

prétend avoir le demandeur ?

Dans ces deux cas, le Code accorde à

l’ancien possesseur une action, fondée

sur sa possession antérieure : l’action

dite « mobilière ».

Exemples de droit préférables admis en doctrine :

1) le défendeur a lui-même été précédemment

dessaisi de l’objet sans sa volonté.

2) le défendeur est devenu propriétaire de l’objet en

vertu d’un mode originaire d’acquisition de la

propriété. Est réservée l’action en enrichissement

illégitime (62 ss CO).

3) le défendeur a un droit réel préférable au droit

personnel du demandeur (cas de l’emprunteur à qui

l’objet a été enlevé et qui voudrait le récupérer auprès

du nouveau propriétaire à qui le prêteur l’a vendu).

25

Le défendeur peut-il, sans prétendre avoir

lui-même un droit sur l’objet, établir que le

demandeur n’en a pas non plus et que, par

conséquent, l’action doit être rejetée ?

(→ question controversée en doctrine sur le

demandeur qui est acquéreur de bonne foi).

Conditions de temps

o Principe : délai de péremption → 5 jours qui suivent

la perte de possession (le moment auquel il a connu

cette perte est sans importance). (cf. 714 II CC)

o Cas réservés : biens culturels → 30 ans après le

dessaisissement (cf. LTBC, conv. UNESCO 1970).

Mais l’action doit être ouverte dans l’année qui suit le

moment où l’ancien possesseur a eu connaissance du

lieu où se trouve l’objet ou l’identité du dernier

possesseur de celui-ci (934 Ibis

CC).

For (art. 20 LFors)

b) Effets de l’action

En général

o L’action tend normalement à la restitution de l’objet.

o Le demandeur peut aussi se borner à faire constater

son droit.

o La restitution a lieu conformément aux règles

relatives au possesseur illégitime (art. 938 à 940).

o Le jugement ne jouit de l’autorité de la chose jugée

qu’entre les parties, et seulement quant aux points qui

ont effectivement été tranchés dans l’action

mobilière.

Obligation de rembourser le prix payé par le défendeur

o Lorsque les conditions de 934 Ibis

sont remplies, le

demandeur peut obtenir la restitution de l’objet. Dans

certains cas, il a l’obligation de rembourser au

défendeur qui a acquis cet objet bonne foi le prix

payé par celui-ci (934 II). Il en est ainsi lorsque

l’objet a été acquis :

Dans les enchères publiques

Dans un marché

Auprès d’un marchand d’objet de même

espèce.

o Le défendeur doit faire valoir son droit au

remboursement par voie d’exception.

o Dès qu’il a fait valoir son droit au remboursement, il

bénéficie d’un droit de rétention sur l’objet.

o L’action mobilière contre l’acquéreur de mauvaise foi (936 CC)

Si le demandeur est un acquéreur de mauvaise foi, il

est admis que le défendeur peut refuser la

restitution en se fondant sur le principe de l’art. 936

al.2 CC. Si le demandeur est acquéreur de bonne foi,

la question est laissée ouverte par le TF.

930 Ibis

CC :

Délai subjectif : 1 an

Délai objectif : 30 ans

But : protéger la sécurité des affaires.

26

a) Conditions de l’action

Conditions personnelles

o Qualité pour agir : tout possesseur antérieur

o Qualité pour défendre : le possesseur actuel qui a

acquis l’objet de mauvaise foi. S’il n’est plus en

possession de l’objet, il est néanmoins tenu de réparer

le dommage subi par le demandeur.

Conditions matérielles

o Un objet mobilier que le défendeur a acquis de

mauvaise foi

N’importe quel objet mobilier ou animal.

Lors de l’acquisition, le défendeur était de

mauvaise foi.

Acquéreur de mauvaise foi = qui sait

que l’aliénateur n’a pas le pouvoir de

disposer ou qui n’a pas prêté l’attention

requise par les circonstances (cf. 933 CC).

o Absence d’exceptions du défendeur

Comme dans 934, l’acquéreur de mauvaise

foi peut d’abord faire valoir, par voie

d’exception, qu’il a sur l’objet un un droit

préférable à celui du demandeur.

Il peut donc établir qu’il est devenu

propriétaire par un mode originaire de

l’acquisition de la propriété.

Ensuite le défendeur peut, sans prétendre

avoir lui-même de droit sur l’objet, refuser la

restitution en établissant que le demandeur

l’a lui-même acquise de mauvaise foi (936

II). Cas réservé : le demandeur, même de

mauvaise foi, fait état d’un droit préférable

au sens de l’alinéa précédent.

b) Effets de l’action

Comme 934, l’action tend à la restitution de l’objet.

Le demandeur n’a jamais l’obligation de rembourser au

défendeur le prix d’acquisition de l’objet.

La restitution a lieu conformément à l’art. 940 CC, ce qui

implique notamment que le défendeur qui n’est pas en mesure

de restituer l’objet doit indemniser le demandeur.

o Rôle des actions mobilières

a) Relation entre les deux formes de l’action mobilière

Cas du demandeur a été dessaisi sans sa volonté d’un objet

que le défendeur avait acquis de mauvaise foi (ex : le

receleur).

Dans ce cas, 936 est plus avantageux car son action n’est pas

limitée dans le temps et que le problème de l’obligation ne se

pose même pas.

936 CC est plus favorable que 934 CC.

27

Pratiquement, 934 est utile si le défendeur est de bonne foi.

b) Action mobilière et action fondée sur le droit réel

Controverse en doctrine quant à la nature juridique de

l’action mobilière et sa relation fondée sur le droit réel de

l’ancien possesseur.

→ Pour le Pr. Steinauer, l’action mobilière est avant tout au

service du droit que l’ancien possesseur a sur l’objet.

Quoiqu’il en soit, l’essentiel est que l’action mobilière et

l’action fondée sur le droit réel existent parallèlement et à des

conditions différentes.

Le demandeur (titulaire d’un droit réel et ancien possesseur)

qui est en mesure d’établir les conditions des deux actions

peut choisir celle qu’il veut ouvrir.

En pratique, la voie de l’action mobilière sera la plus aisée.

o Quelques cas où seule l’une des deux voies de droit

est ouverte :

Lorsque le demandeur est un ancien

possesseur dérivé qui n’avait qu’un droit

personnel en relation avec l’objet (ex : le

locataire qui veut récupérer l’objet loué qui

lui a été volé).

Lorsque le demandeur est un ancien

possesseur de bonne foi qui n’avait pas de

droit sur l’objet (parce que par ex. il a acquis

un objet volé) et que le défendeur est de

mauvaise foi.

o La voie de l’action en revendication est seule ouverte

dans les principaux cas suivants :

Lorsque l’objet n’a jamais été en possession

du demandeur (par ex. la personne qui a

acquis par adjudication en enchères publiques

mais n’a jamais possédé l’objet).

Lorsque le possesseur actuel a acquis l’objet

de bonne foi de par la volonté de l’ancien

possesseur, mais sur la base d’un acte nul ; le

demandeur doit non seulement contester la

validité du titre d’acquisition du défendeur,

mais encore prouver son droit réel sur l’objet

(930 II CC).

Lorsque l’action en restitution d’un objet

loué, prêté ou déposé par le propriétaire est

prescrite selon les règles du contrat en cause ;

même s’il n’est plus possesseur, le demandeur

reste propriétaire et il peut récupérer l’objet

par l’action en revendication, à condition de

prouver son droit de propriété (930 II CC).

28

c) Action mobilière et fictions des art. 933 et 935

Lorsque l’acquéreur de l’objet est protégé par les dictions es

art. 933 et 935, l’action mobilière n’est évidemment pas

ouverte puisque le possesseur actuel est devenu propriétaire

de l’objet (714 II CC)

Inversement, lorsque les conditions des fictions ne sont pas

remplies, l’ancien possesseur doit en principe pouvoir agir en

restitution (sous réserve d’un droit préférable acquis par le

nouveau possesseur).

L’action mobilière n’est toutefois pas accordée dans toutes

les hypothèses où les conditions des fictions ne sont pas

remplies ; elle ne vise que les deux cas principaux :

1) l’absence de bonne fois de l’acquéreur lors de

l’acquisition (qui exclut 933 et 935 et ouvre l’action

mobilière de 936).

2) L’hypothèse où l’objet n’a pas été confié (qui

exclut 933 et ouvre 934).

En revanche, si les fictions ne sont pas réalisées parce que

l’acquéreur n’a pas acquis un droit réel ou parce que le titre

d’acquisition n’est pas valable, l’action mobilière n’est pas

ouverte, car l’ancien possesseur n’a pas été dessaisi sans sa

volonté. Il peut néanmoins ouvrir l’action en revendication.

d) Enchaînements d’hypothèses (de 933, 935, 934 et 936 CC)

Celui qui a été dessaisi involontairement d’un objet peut agir

en restitution dans le délai légal même contre celui qui aurait

acquis cet objet de bonne foi dans les conditions.

Un objet ne peut en effet être « confié » au sens de l’art. 933

que s’il n’a pas fait l’objet d’un dessaisissement involontaire

dans le délai ouvrant l’action de l’art. 934.

Un objet confié reste confié si celui à qui il a été remis le

remet à son tour volontairement à un tiers sans autorisation.

Si le possesseur dérivé à qui un objet a été confié en est

dessaisi sans sa volonté, le possesseur originaire en est

également dessaisi sans sa volonté. Un tel objet n’est donc

plus confié au sens de l’art. 933 CC.

§ 11 La responsabilité du possesseur illégitime

I. Généralités

1. Champ d’application

o Les art. 938 à 940 régissent la responsabilité du possesseur qui n’a pas (ou

plus) de titre de posséder et qui doit restituer l’objet au véritable ayant droit.

o Les art. 928 à 940 sont une lex specialis par rapport aux règles des art. 41 ss,

62 ss, et 419 ss CO.

o Les art. 938 à 940 concernent aussi bien les immeubles que les objets

mobiliers, et ont une portée générale.

Ces art. s’appliquent en particulier

pour :

1) Restitution par action

mobilière, action réintégrande,

action en revendication.

2) Personnes devenues

possesseurs sur la base d’un acte

non valable.

3) Cas prévus par la loi.

29

o NB : les art. 938 à 940 ne s’appliquent pas lorsqu’une personne possédait en

vertu d’un droit réel ou personnel et doit restituer l’objet parce que ce droit

s’est éteint (ex : bail).

2. Le système légal

o La responsabilité instituée par les art. 938 à 940 est une sorte de

responsabilité objective (ou causale), qui a sa source dans le régime de la

possession. Elle est de nature extracontractuelle. Elle n’existe que si le

demandeur a droit à la restitution de l’objet.

o Une faute du possesseur illégitime n’est donc pas requise.

o Le Code distingue le possesseur illégitime de bonne foi ou de mauvaise foi :

II. La situation du possesseur de bonne foi (938 et 939 CC)

1. Droit d’usage et de jouissance

o Le possesseur de bonne foi peut utiliser l’objet et en jouir dans toute la

mesure autorisée par le droit qu’il croit avoir ; il ne doit de ce chef aucune

indemnité à l’ayant droit (938 I), sous réserve de l’art. 939 III.

o Si le possesseur se croit propriétaire, il peut utiliser l’objet et en jouir

librement (dans les limites de la loi, art. 641 I). En particulier, tous les fruits

civils et naturels lui restent acquis, pour autant qu’ils aient été échus ou

séparés alors que le possesseur était de bonne foi.

o Si le possesseur se croit au bénéfice d’un droit réel limité ou d’un droit

personnel, il n’est autorisé à user et à jouir de l’objet que dans la mesure où ce

droit le permet.

2. Droit de disposition

o Le possesseur de bonne foi a le droit de disposer (matériellement ou

juridiquement) de l’objet conformément à son droit présumé (938 II).

o Il ne doit de ce chef aucune indemnité (938 II se lit en relation avec 938 I).

3. Remboursement des impenses

o Les impenses nécessaires et utiles

a) Le possesseur de bonne foi peut exiger leur remboursement (939 I). Il

doit toutefois se laisser imputer sur l’indemnité qui lui est due en

raison des impenses la contre-valeur des profits qu’il a retirés en

utilisant et en ayant la jouissance de l’objet (939 III).

b) Le possesseur de bonne foi n’acquiert sa créance que si l’ayant droit

lui réclame la restitution de l’objet. Il peut alors retenir celui-ci

jusqu’au moment du paiement (939 I in fine). Il s’agit d’une

exception au sens technique. → ≠ droit de rétention au sens de 895 ss.

o Les impenses somptuaires (+ droit d’enlèvement)

a) Le possesseur de bonne foi n’a pas droit au remboursement des

impenses somptuaires (les « autres » impenses de l’art. 939 II). Il peut

cependant enlever ce qu’il a uni à l’objet aux 3 conditions suivantes :

1. Le droit d’enlèvement doit être exercé avant la restitution de

l’objet.

1) Possesseur illégitime de bonne foi → art. 938 et 939 CC

2) Possesseur illégitime de mauvaise foi → art. 940

NB : Dans le cas d’un bien-

fonds, le possesseur de

bonne foi ne répondra ni

pour avoir épuisé le sol, ni

pour avoir modifié les

cultures ou compromis

l’exploitation.

Impenses :

Il s’agit des prestations

qu’une personne fait

volontairement en faveur

d’un tiers ou pour un

objet appartenant à un

tiers.

30

2. La séparation doit être possible sans dommage pour l’objet.

3. Le demandeur n’offre par la contre-valeur de

l’embellissement (939 II).

III. La situation du possesseur de mauvaise foi (940 CC)

1. Droit d’usage et de jouissance

o Le possesseur de mauvaise foi doit d’abord indemniser l’ayant droit de tous

les avantages qu’il a effectivement retirés de l’usage et de la jouissance de

l’objet. (Les fruits se restituent en nature).

o Le possesseur de mauvaise foi doit ensuite indemniser l’ayant droit des fruits

qu’il a négligé de percevoir (940 I in fine). Il s’agit seulement des fruits que le

possesseur aurait dû percevoir s’il avait normalement cultivé la terre ou géré

l’objet convenablement au vu des usages.

o Le possesseur de mauvaise foi répond même sans faute. Est réservé le cas de

940 III.

2. Dispositions (matérielles ou juridiques) et réparation du dommage

o Le possesseur de mauvaise foi n’est pas en droit de disposer de l’objet, ni

matériellement, ni juridiquement.

o Il doit indemniser l’ayant droit de « tout dommage résultant de l’indue

détention » (940 I).

3. Remboursement des impenses

o Le possesseur de mauvaise foi ne peut exiger que le remboursement des

impenses nécessaires, et encore dans la seule hypothèse où l’ayant droit

aurait aussi dû les faire lui-même (940 II).

o Le possesseur a le droit de refuser la délivrance de l’objet jusqu’au

remboursement des impenses (analogie avec 939 I). Ce point est controversé.