Clap! n°8

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Magazine de cinéma Gratuit | Mars / Avril 2011 | Numéro 8 www.clapmag.com SUCKER PUNCH LE FILM DEJANTE DE SNYDER DOSSIER LE CINEMA D’HORREUR DES ANNEES 2000 MORNING GLORY RENCONTRE AVEC HARRISON FORD + SOURCE CODE MR NICE EXPO KUBRICK A LA CINEMATHEQUE GROS PLAN SCREAM SELECTION TV JUSTIFIED

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  • Magazine de cinmaGratuit | Mars / Avril 2011 | Numro 8www.clapmag.com

    Sucker PuNch

    Le fiLM DeJANTe De SNYDer

    DOSSier Le ciNeMA DhOrreur

    DeS ANNeeS 2000

    MOrNiNG GLOrYreNcONTre AVec

    hArriSON fOrD +

    SOurce cODe Mr Nice

    eXPO kuBrick A LA ciNeMATheQue GrOS PLAN ScreAM SeLecTiON TV JuSTifieD

  • www.clapmag.comle MAG TeNDANCe DU CIN*

    *DISPONIBle SUR IPADSommaire | 03 |

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    EDITOSOMMAIRE

    ABONNez-vOUS A lA RevUe, DCOUvRez leS BANDeS-ANNONCeS, leS CRITIqUeS, leS TeSTS DvD, leS NewS...ChAqUe jOUR SUR www.ClAPMAG.COM

    04 Actus

    06 Critiques

    08 Interview

    13 Dossiers

    18 expo

    21 DvD

    23 jeux vido

    Dj le numro 8 pour Clap! qui continue son bonhomme de chemin pour vous proposer le meilleur. Merci pour les nombreux en-couragements que nous avons reus, nhsitez pas nous envoyer vos mots, vos critiques, vos divergences dopinions [email protected]. Nous serons ravis dy rpondre et ds le prochain nu-mro, le courrier des lecteurs saluera la meilleure missive.Pour cette nouvelle mouture, la rdac-tion a dcid de rendre hommage Sny-der et au film de genre. Assumer notre got immodr pour le jeune cinaste, cest aussi affirmer un parti pris dito-rial fort et dfendre un cinma contest, parfois hu mais quici nous prfrons honorer avant mme davoir vu sa der-nire production. Rares sont les films qui suscitent autant dimpatience, autant sur leurs ides originales de dpart (dernier en date Inception) que sur leurs for-mes modernes, au carrefour de plusieurs arts : la bande dessine, le jeu vido et le cinma (derniers en date Avatar, Tron). Dans son constant travail de recherche, le ralisateur de 300 parvient la fois faire avancer lentertainment, tant pris outre-Atlantique, mais aussi participer la construction dun genre nouveau en train de conqurir peu peu le grand pu-blic. Dans le monde quil a cr, les fron-tires entre fiction et ralit sont floues. lorsque lon ira voir Sucker Punch, on sera conscient de la virtualit du spec-tacle, mais aussi en admiration devant la qualit de limmersion, pourtant base de dcors synthtiques, de femmes fa-tales improbables et de magie ternelle. Cest cette mme magie, loin de nos frontires, qui nous conduit parler de cinma total.

    Romain Dubois-Dana

  • jeAN DUjARDIN eST MUeTThe Artist, ralis par Michel hazanavicius (0SS 117) sera en effet un film muet, en noir et blanc de surcrot ! A lheure de la 3D et de la recherche de la prouesse technique le pari semble os. le ralisateur a choisi de reformer le duo succs du premier pisode dOSS 117, jean Dujardin et Brnice Bejo. le film retracera le destin crois de deux acteurs. Dujardin campera une star du muet qui ne russit pas sadapter larrive du cinma parlant, quant sa partenaire elle incarnera une toile montante de cette nouvelle discipline. le tournage a eu lieu lautomne dernier los Angeles, il sera laffiche le 19 octobre prochain.

    SOPhIe MARCeAU & GAD elMAleh

    les deux acteurs prfrs des Franais runis lcran : Gad elmaleh et Sophie Marceau joueront ensemble dans le prochain film de james huth. Aprs Brice de Nice et lucky luke, le ralisateur sattaque un nouveau projet dont lintrigue na pas t divulgue. le tournage dUn bonheur nar-rive jamais seul ne devrait dbuter quen mai pro-chain en rgion parisienne. A suivre !

    ACTUS

    Actus | 05 |

    BlADe RUNNeRle film de science-fiction Blade Runner (1982) pourrait connatre une suite ou un prequel. Alcon entertainment, une filiale de la warner Bros., vient dacqurir les droits de luvre culte de la science-fiction. lun des producteurs du futur Blade Run-ner a dclar que laval de Ridley Scott au projet serait trs important pour eux. wait and see

    le MARqUIS CASSel ! vincent Cassel (Black Swan) devrait se glisser pro-chainement dans la peau du marquis de la Fayette dans un film en deux parties. lacteur retrouverait pour loccasion le ralisateur jean-Franois Richet (Mesrine).en outre, on devrait retrouver vincent Cas-sel laffiche du prochain film de David Cronenberg, A Dangerous Method.

    TOM hANKS, OTAGe heROIqUe

    lacteur Tom hank tiendra le premier rle dun film inspir de la prise dotage du cargo amricain Maersk-Alabama par des pirates somaliens en avril 2009. Il incarnera le capitaine du navire, Richard Phillips revenu aux etats-Unis comme un hros pour stre offert en otage en change de la libert de son quipage compos dune vingtaine de marins. le scnario devrait sinspirer du livre de R. Philips, A Captains Duty dont les droits ont t acquis par Sony.

    SIeNNA MIlleR Chez BOUChAReB

    Rachid Bouchareb va raliser un portrait de femme intitul just like a woman o Sienna Miller jouera le rle-titre, Roschdy zem fidle du ralisateur fera parti du casting. le film retrace le parcours dune femme au foyer amricaine qui se lance, linsu de ses proches, dans une comptition de danse du ventre las vegas. Dbut du tournage le 13 juin prochain.

    RIeN DClAReR 7 761 322

    le DISCOURS DUN ROI 2 413 000

    BlACK SwAN 2 292 698

    AU-Del 1 905 094

    leS FeMMeS DU 6eMe eTAGe 1 541 688

    box-office ToP 5 fRANce 2011

    CARRIe INFIDeleSarah jessica Parker va jouer les infidles dans Mar-ried and Cheating ralis par Raymond de Felitta (City Island). elle y incarne lpouse modle qui pense trouver le bonheur grce des relations extraconjugales. Trois couples la drive en tout dans cette comdie romantique, genre dont Sarah jessica Parker est une spcialiste. Pour lheure le rle du mari tromp na pas t trouvavis aux amateurs !

    Actus | 04 |

    lIMAGe DU MOIS :

    MIDNIGhTIN PARIS

    Comme son habitude, woody Allen soigne laffiche de son prochain long-mtrage tourn Paris cette fois-ci. le Ciel toil de van Gogh sparpille sur Paris et augure dj la douce mlan-colie dune balade dans le cinma du matre new-yorkais...

    BeAUvOIS ACTeURle ralisateur de Des hommes et des dieux, Xavier Beauvois renoue avec le mtier dacteur pour Benot Co-hen (Nos enfants chris).Il donnera la rplique Mathilde Seigner dont il tombera perdument amoureux dans A ct de la plaque adaptation dun roman. Sixime long mtrage pour le ralisateur et premier rle principal pour lacteur Beauvois.

    PReMIeR ClAP POUR ClOClO

    le tournage de Cloclo, biopic consacr Claude Franois dbute ces jours-ci Pa-ris et jrmie Rnier prte ses traits au plus populaire des chanteurs. Casting parfait vu la ressemblance entre les deux hommes ! la ralisation a t confie Florent emilio Siri (Nid de gupes), qui retrouvera Benot Magimel dans le rle du fameux producteur Paul lederman. la sortie en salles du film est prvue pour 2012.

    MC MlANIe lAUReNT

    Mlanie laurent sera la matresse de crmonie du 64me Festival Interna-tional du Film de Cannes. la jeune ac-trice de 27 ans succdera ainsi Kris-tin Scott Thomas pour lanimation de lvnement. Pour rappel, le festival se droulera du 11 au 22 mai prochain sur la Croisette, avec pour prsident du jury un certain Robert de Niro.

    BRIDGeT jONeS 3Renee zellweger, Colin Firth (fra-chement oscaris pour le discours dun roi) et hugh Grant auraient sign pour un troisime volet des aventures de Bridget jones. lac-tion devrait se situer lapproche de la quarantaine, lex-clibattan-te londonienne songerait mme faire un enfant. Ses deux prten-dants se disputeraient la paternit of course !

  • CRITIqUe

    Critiques | 06 |

    Deux familles vivent dans une ville paisible du Danemark. Dans lune, Christian, jeune adoles-cent, est durablement prouv par la dispari-tion de sa mre et reproche son pre de navoir pas su faire face son agonie. Dans lautre, Anton, mdecin, se partage entre son travail dans un camp de rfugis en Afrique et son foyer o il sloigne progressivement de sa femme et songe divorcer. leur fils, elias, se fait agresser par des camarades lcole, jusquau jour o Christian prend sa dfense

    A ct de luvre impressionnante et conteste de lars von Trier, existe au sein du cinma danois celle de Su-sanne Bier, sensible et traverse par des interrogations graves et profondes sur la nature humaine. Produite par lvT sous lgide de zentropa, Susanne Bier stait dj fait remarquer par le Dogme n28, Open hearts, un drame existentiel quasi-bergmanien et a su, depuis, monter en puissance, avec Brothers (dont hollywood sest inspir pour le remake de Sheridan), After the wedding, nomm aux Oscars en 2007 et Nos souve-nirs brls, trs joli film sur le travail de deuil avec halle Berry et Benicio del Toro.

    Dans tous ses films, Susanne Bier fait preuve dun talent hors pair de directrice dacteurs, dun got raffin pour les plans abstraits et dun sens aigu du mlodrame, partag avec son coscnariste Anders Thomas jensen. elle ne droge pas la rgle avec Revenge (In a better world pour les etats-Unis) o les deux adolescents au centre du drame sont admira-bles de justesse, ainsi que les interprtes des parents. elle semble reprendre les affaires l o elle les avait laisses avec After the wedding, o Mads Mikkelsen soccupait dun orphelinat en Inde.

    Cette ouverture sur lextrieur permet Susanne Bier de comparer les rapports la violence selon les types de socits et dinterroger le fondement de la ntre. Cette violence, mme sophistique et domestique, entranera les deux adolescents commettre lirr-parable, sous linfluence de foyers dysfonctionnels et dun Internet en libre accs. loin de donner des le-ons de morale, Susanne Bier nous plonge au cur du marasme humain qui peut gnrer des monstres, cratures qui ne sont jamais aussi effrayantes que sous lapparence dadolescents inoffensifs. haneke ou le Gus van Sant delephant rdent autour du film mais Susanne Bier impose sa touche trs personnelle dhumanit et de posie, par le biais de plans abs-traits qui nous relient la beaut de lunivers. Golden Globe du Meilleur film tranger, en lice pour lOscar, Revenge tmoigne pour nous aider rsister contre la tentation du chaos.

    David Speranski

    ReveNGeSortie en salles le 16 mars 2011 - Ralis par Susanne Bier Avec Mikael Persbrandt, Trine Dyrholm, Ulrich Thomsen...Dure : 1h53 Distributeur : equation

    Alors quil mne sa vie sans histoire danimal de compagnie, Rango, camlon peu aven-turier, est en pleine crise didentit : quoi bon avoir des ambitions quand tout ce quon vous demande, cest de vous fondre dans la masse ? Un jour, Rango choue par hasard dans la petite ville de Poussire, dans lOuest sauvage, o de sour-noises cratures venues du dsert font rgner la terreur. Contre toute attente, notre camlon, qui ne brille pas par son courage, comprend quil peut enfin se rendre utile

    Rango, un nime bestiaire anim ? Ces dernires annes ont t riches en dessins anims anthro-pomorphes. lge de glace, la ferme se rebelle et autre Madagascar pour ne citer queux. Difficile de renouveler le genre tellement tout semble dj avoir t trait en long, en large et en travers. Du coup, on est forcment un peu mfiant lorsque lon aperoit une nouvelle bbte qui parle. Par chance, Rango chappe aux grosses ficelles

    scnaristiques. Son seul don est celui de la panto-mime. Fin imitateur, interprte de gnie et conteur trs adroit, de quoi passer le temps dans son terra-rium. Mais Rango va se retrouver confronter la vie sauvage, la vraie. le wild west tel quon limagine avec ses tendues de sable perte de vue, son so-leil de plomb, sa ville fantme et ses clops. Un bel hommage aux films de genre, truff de rfrences intelligentes et drles. loin des paillettes et cou-leurs gaies de lanimation classique, le film se pare dune impolitesse rjouissante pour flirter avec le western-spaghetti et joue dans la catgorie des irrvrencieux. Anti-hros en pleine qute identi-taire, ce lzard peureux va devoir se la jouer Sh-rif tmraire afin de sauver la ville dune coupure deau inexplique. Moins linaire que prsume, la narration sen sort assez bien en termes dimprvus et si le film sengouffre certaines reprises dans un trop-plein de bavardages, on se laisse finalement attendrir par ces petites btes disgracieuses la r-partie bien franche.Premier long-mtrage danimation pour Gore Pi-rates des Carabes verbinski, Rango supporte bien le style nerveux du ralisateur : toujours en effer-vescence, le film confirme du mme coup le ct camlon de lacteur johnny Depp qui prte sa voix aux hros et semble dfinitivement capable denfiler nimporte quel costume.

    Clmence Besset

    RANGOSortie en salles le 23 mars 2011 - Ralis par Gore verbinski Avec johnny Depp, Isla Fisher, Abigail Breslin...Dure : 1h40 Distributeur : Paramount Pictures France

    Critiques | 07 |

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    lAGeNCe Sortie en salles le 23 mars 2011 - Ralis par George Nolfi Avec Matt Damon, emily Blunt, Michael Kelly...Dure : 1h47 Distributeur : Universal Pictures International France

    vous tes frachement amoureux ou bien peut-tre souhaitez vous enfin dvoiler vos sentiments ltre cher ? Grce vous lAgence obtient la moyenne. Pas trs bien ralis, crit la truelle, le premier film de George Nolfi avait tout pour nous faire rendre notre repas, mais par le charme de ses interprtes principaux (le couple Blunt/Damon qui fonctionne bien) et le potentiel romantico-science-fictionnel de son sujet il laisse finalement, au milieu des gravats, une impression de sympa-thie nave qui occupe lesprit (et le cur) quelque temps aprs la sortie de salle. Sorte de variation light et bate proche du joli Never let Me go sorti il y a peu, lAgence ressemble un peu du Philip K.Dick (le film est dailleurs tir de sa nouvelle Rajustement) rcrit par Marc levy. A quoi bon ? Cest vrai quil y a de bien meilleures faons de profiter de la vie que de senfermer devant lAgence mais si le destin nanmoins vous y contraint, nous vous souhaitons alors vivement pour viter le naufrage de laisser filer votre indulgente barque sur les courants deros. Nico Paal

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    hell DRIveR Sortie en salles le 23 mars 2011 - Ralis par Patrick lussier Avec Nicolas Cage, Billy Burke, Amber heard...Dure : 1h44 Distributeur : Metropolitan Filmexport

    Matre dans lart de la posie Mortelle Saint valentin ntait quun dbut Patrick lussier met en scne bagnoles, gros flingues et jolie fille avec autant de classe que de sobrit. hell driver, cest un peu le Boulevard de la mort du pauvre : images de synthse en toc, dcors de srie z, rpliques pouilleuses, le tout sans direction assiste et sans humour. Si dans un premier temps on se plairait sarracher les deux yeux, on se dit finalement que le jeu nen vaut pas la chandelle. le ridicule ne tue pas. Il nuit seulement la sant mentale des spectateurs. Car, vous laurez compris, hell driver repousse les limites du mauvais got. Sous couvert dune intrigue fumeuse (lavnement de lenfer sur Terre), le ralisateur sort lartillerie lourde. les guitares se mettent rugir ds que Nicolas Cage, tout en cuir, pose le talon de sa santiag par terre Dans les bottes de Milton, il livre une prestation en tout point gale celle de Ghost Rider et on peine croire que la marionnette blonde lcran tait un grand acteur dans une vie antrieure Ava Cahen

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    DevIl Sortie en salles le 20 avril 2011 - Ralis par john erick Dowdle Avec Chris Messina, logan Marshall-Green, jenny Ohara...Dure : 1h20 Distributeur : Universal Pictures International France

    Bloques dans un ascenseur, six personnes se retrouvent confrontes un dmon..Produit par Shya-malan, Devil est le premier volet dune trilogie diabolique. Au vu de ltat de sant de la carrire du cinaste, il a bien fait de laisser aux commandes le jeune john Dowdle puisque le huis clos aux ac-cents fantastiques se rvle assez efficace. Devil pourrait tre un pisode de Destination Finale mix avec les Dix petits Ngres d Agatha Christie...latmosphre anxiogne due au confinement du cadre se double dune noirceur permanente. Retourner dans lascenseur est toujours prouvant et on se surprend a tre effray et claustro a la fois ! le jeu de cache-cache avec le dmon est plutt bien film et la squence dintroduction malicieuse rappelle le second volet de lexorciste par Boorman. hormis des personnages un poil lisses, ( le flic, le mexicain croyant, le militaire...) la pure srie B rvle une bonne surprise sans respirer toutefois au-del de ses ambitions... Romain Dubois

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    lA FIlle DU PUISATIeR Sortie en salles le 20 avril 2011 - Ralis par Daniel Auteuil Avec Kad Merad, Daniel Auteuil, Astrid Berges-Frisbey Dure : 1h31 Distributeur : Path Distribution

    Daniel Auteuil devait revenir aux sources de son parcours pour raliser son premier film. Cest donc en toute logique Pagnol qui il doit son closion cinmatographique au plus haut niveau (Ugolin dans jean de Florette et Manon des sources), qui linspire pour son passage la ralisation. Il a choisi dadapter la Fille du puisatier qui nest sans doute pas luvre la plus connue de Marcel Pagnol et reprend avec Kad Merad les rles des anthologiques Raimu et Fernandel. Pagnol tait dj lpoque le prtexte daccusations sans quelles soient forcment justifies de thtre film. Il ne fait pas de doute quon rentendra ces accusations devant le film dAuteuil. elles apparaissent malheureusement bien plus lgitimes, la distribution, lexception dAuteuil, trs juste, ntant pas aussi inspire et le lyrisme tombant plat. Pourtant tout Pagnol sy retrouve mais cela ne suffit pas rendre indispensable ce film qui ne dpasse pas le stade de la jolie mise en images purement il-lustrative. David Speranski

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    je NAI RIeN OUBlIe Sortie en salles le 30 mars 2011 - Ralis par Bruno Chiche Avec Grard Depardieu, Alexandra Maria lara, Niels Arestrup...Dure : 1h33 Distributeur : Studio 37/Rezo Films

    Frileuse adaptation du roman de Martin Suter, je nai rien oubli ne parvient pas donner chair son sujet. Alzheimer nest quun prtexte scnaristique dont Chiche se sert grossirement pour nou-er une intrigue catarrheuse et la forme du thriller familial contraint la rflexion sur la mmoire habiter la toile de fond. Fig dans sa dramaturgie, ce huis clos classique souffre dune ralisation la banalit consternante. Cest de linge sale dont il sagit et, pourtant, le metteur en scne ne se salit pas les mains. Narrivant pas imposer son rythme ni mme son style, il ne peut parvenir insuffler la vie son rcit et le mystre nest pas de mise. Mme les personnages, trop caricaturaux, dvoilent trop tt leur jeu. et sil laisse passivement agir le talent de ses interprtes facile quand lcran dfilent Depardieu, Arestrup (toujours remarquable) ou Baye qui portent le film bout de bras, le ralisateur, malgr le casting flamboyant, sefface tristement derrire leur toffe. Ava Cahen

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  • MORNING GlORY Sortie en salles le 6 avril 2011 - Ralis par Roger Michell Avec harrison Ford, Rachel McAdams, Diane Keaton..Dure : 1h42 Distributeur : Paramount Pictures France

    Becky Fuller est une jeune femme ambitieuse. engage par une chaine de tl vision pour rehausser laudimat de Daybreak , la matinale la moins regarde du pays, elle dcouvre lenvers du dcor. voil enfin une comdie qui sassume comme telle ! Morning Glory a tout du rayon de soleil : un casting brillant, une mise en scne ptillante et un scnario gracieux. Roger Michell, entour de pointures comme j.j Abrams et Aline Brosh McKenna (la scnariste du Diable shabille en Prada), ralise ici un come back dtonnant. Avec Morning Glory, le ralisateur de Coup de fou-dre Notting hill tient le ton juste du dbut la fin. entre les quiproquos, les lans lyriques et le tumulte amoureux, le joyeux bordel prend forme et les sentiments honteux ctoient les situations les plus cocasses. la recette de Morning Glory est infaillible. Dune part, lintrigue nest pas en carton et, dautre part, la psychologie des personnages est aboutie. les stars dfilent sous lobjectif du ralisateur et offrent de vritables perfor-mances. Rachel Macadams, premier rle du film, aborde le personnage de Becky Fuller avec beaucoup dhumilit et de naturel. Au cur de la mca-nique comique, elle est suivie de prs par une camra agile qui capture jus-

    tement sa vulnrabilit. Mais la palme revient surtout au duo Keaton-Ford,

    blouissants dans leur costume de star de tlvision dclinante. elle in-carne Colleen Peek, la diva du matin. Il est Mike Pomeroy, le 3me pire grincheux du monde aux chaussettes barioles. et pourtant, Becky Fuller veut les runir lcran...Sil met de ct son lasso et son chapeau, harrison Ford ne raccroche pas les gants. Pour notre plus grand plaisir, il joue la carte de lhumour et de lauto-drision, interprtant srement le plus charmant des grumpy . On ne se lasse pas de ses changes vifs et sardoniques avec Diane Keaton, ni de voir cette dernire, hrone de cur des films de woody Allen, dans une com-die la mesure de son talent. Ava Cahen

    Interview | 08 | Critiques | 09 |

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    Clap! : Mike Pomeroy est un personnage sec et dominateur. Il est le 3me pire grincheux du monde . Pourtant, il porte des chaussettes multicolores qui rompent avec son image. Peut-on y voir le signe dune fantaisie latente ? est-ce votre choix ou celui de laccessoiriste ?

    harrison Ford : Oui, cest quelque chose que jai moi-mme suggr. je pense que les costumes sont, en rgle gnrale, un aspect trs important des personnages. Ils ne dfinissent pas seulement lallure ou lappartenance sociale, ils donnent au public des informations trs visuelles qui lui permettent de cerner rapidement le type. On pourrait dire que cest une faon conomique de le caractriser. Ce que jai essay de montrer travers les chaussettes, cest quil y a quelque chose que vous ne savez pas sur Mikeil y a un secret ! Peut-tre quil est, aprs tout, lui aussi un clown parmi les clowns

    Mais alors qui est vraiment Mike Pomeroy ? je pense quon le dcouvre vraiment

    lorsquon rentre dans son appartement. On se rend compte de ce qui est vrai pour lui et de ce qui nest que foutaises. Cette scne dfint bien la complexit de Mike. la colre du personnage se manifeste sous plusieurs angles. Ce nest pas tellement la tlvision qui est dans sa ligne de mire. Ce sont ses flures qui lui font violence. Il est seul, frustr, cest un homme fragile.

    etes-vous satisfait des rles quon vous propose aujourdhui ?

    je sais bien que je suis devenu plus vieux, je ne vais pas prtendre le contraireIl y a des rles pour les jeunes acteurs et des rles pour des gens comme moi, cest assez quilibr. je suis trs heureux de pouvoir interprter des personnages que je naurais pas eu loccasion de camper avant. jaime continuer faire des films. Cest agrable de se sentir encore utile.

    Nempche que vous finissez toujours par tomber la fille vous ntes pas las du mtier ? Pas du tout. jadore jouer ! Cest chaque

    fois une exprience trs excitante. japprcie le travail dquipe. vous savez, cest un mtier fascinant. vous devez vous servir de votre propre comprhension de la nature humaine et lincarner, la reproduire pour que lmotion naisse. Dans le film, Mike est un homme en colre. jai dj t en colre, mais pas pour les mmes raisons que le personnage. Comme lui, jai t du, jai t mu, toutes ces choses l servent de matriau.

    les dialogues sonnent trs juste et nous voudrions que vos changes avec Diane Keaton durent ternellement. Faisiez-vous durer le plaisir hors camra ?

    Non, Diane est trop dlicieusequand le ralisateur dit coupez , nous reprenons le dessus sur nos personnages. Un peu comme une lumire quon allume et quon teint sur commande. On sest amuss pendant la prise, la rcration est finie. Nous sommes des machines bien huilesTout est une question dentrainement.

    Propos recueillis par Ava Cahen

    HARRISON FORD : lHOmme Aux mIlle vISAgeSl a vie est violente, dans la joie comme dans la solitude. Communiquer cest arriver un point de croisement entre deux perceptions de cette violence, cest lharmoniser pour mieux la partager et, finalement, par le mouvement de lesprit, cest djouer le calme spcieux de la mort. Cest lhistoire, entre autres, dun extrater-restre sympathique et dun robot barbare qui se retrouvent dans les transports en commun. Au-del des mots, dans la marge, wenders se fait le peintre dun monde dimpressions et dessine un visage de Pina Bausch. A mi-chemin entre le pri-mitif et labstrait, cest un combat contre le temps, rien dtonnant, il sagit de faire dun portrait de la morte, lloge du spectacle vivant. Aller contre le temps. Retrouver le paradis perdu, le Tout. effacer lempreinte de lange.

    Pythagore prtendait se rappeler de ses existen-ces antrieures ; Pina apprhendait certainement les existences extrieures par le caractre essen-tiel des lments. Il faut remonter plus loin encore et se souvenir avoir t caillou. l, cest un peu de souvenir de lune, de poussire desclave, un peu aussi du rire de leau Orphe tait le pote ma-

    gique, celui qui maitrisait les lments et wen-ders sinscrit cinmatographiquement dans cette tradition, dans cet hritage dune surnature. Il lui faut aller chercher Pina de lautre ct du miroir, dans la turgescence de ses danseurs o semble encore couler son sang. Comme Orphe, il est lenchanteur dun film solaire. Il ne pouvait alors raliser cette initiation quen trois dimensions ; djouer encore laplanissement mortuaire.

    Mais le vivant par dfinition est phmre et le spectacle vivant, du mme coup, ne peut ltre que par la prcarit de son existence. Cest la premire des limites. la seconde cest lternelle injonction de ne pas se retourner, limpossibilit du retour sur le pass. en dessinant un visage de Pina Bausch elle nappartient plus, le temps dun film, au monde des morts. Mais la tentation est trop grande de se retourner et fatalement il faut que les rideaux se referment et que le specta-cle se termine. en tant vu sans pouvoir voir en retour, aussi profondment incarne soit-elle, sur le fini dune toile et malgr les propositions Pina ne peut plus exister qu moiti. Il faut bien quelques blouissantes corchures de linvisible, sinon du supravisible, pour se replacer la fron-tire, l o tout est encore possible.

    Nico Paal

    Pour tenir un rle inspir dun fait divers tnbreux, un cinaste indpendant en-gage une actrice qui le fascine au point den tomber amoureux. Mais il ne se doute pas que ce choix va le conduire vers une affaire cri-minelle, reflet de linspiration de son film.

    Film sur le cinma et la manire dont il peut influencer nos vies, Road to nowhere, lion dor spcial la Mostra de venise 2010, sapparente un genre en soi du cinma, les films de mise en abyme, quon pourrait qualifier de mta-ci-nma. les exemples sont nombreux, des en-sorcels de Minnelli huit et demi de Fellini. Il rappelle assez dans ce style luvre dAbel Fer-rara Snake eyes avec harvey Keitel et Madonna, voire les films rcents de David lynch (bien da-vantage Inland empire que Mulholland Drive), o on en arrivait ne plus savoir o finissait la ralit et o commenait la fiction.

    Monte hellman, le ralisateur mythique de Ma-cadam deux voies et The Shooting, a coura-geusement choisi ce sujet pour son retour au cinma plus de vingt ans aprs son dernier film.

    Il ne sen sort pas plus mal que Ferrara ou lynch qui navaient pas sign leurs meilleurs films avec le mme type dapproche. Car ce mta-cinma est souvent prtexte un exercice de style qui empche de traiter une vritable in-trigue et des considrations du ralisateur sur lexercice de son mtier. On peut par exemple ici entendre que tout est affaire de casting et que lessentiel pour un acteur consiste ne pas jouer .

    Pourtant il y avait matire pour dvelopper une intrigue de machination criminelle puis-que le personnage de laurel Graham, lactrice engage, et celui de velma Duran, la femme assassine du fait divers, se confondent tran-gement dans le pass. Monte hellman a choisi de la raconter la manire dun puzzle o les spectateurs seraient obligs de voir le film au moins deux fois pour raccorder entre eux les morceaux de lintrigue. On peut apprcier cette intention de contamination de la fiction par la ralit mais galement la trouver un peu vaine, russie uniquement par bribes, dans quelques belles squences surralistes : une brune fa-tale avec un sche-cheveux dans un moment de temps suspendu, un avion qui tombe pic dans un lac, des rptitions de scne assez dr-les... Mais demeure surtout la fascination pour un visage de femme, celui de Shannyn Sossa-mon (les lois de lattraction), sur lequel se clt le film, nigme reste jamais ouverte.

    David Speranski

    PINASortie en salles le 6 avril 2011 - Ralis par wim wenders Avec Pina Bausch...Dure : 1h40 Distributeur : les films du losange

    ROAD TO NOwheReSortie en salles: 13 avril 2011Ralis par Monte hellmanAvec Shannyn Sossamon, Tygh Runyan, Dominique Swain, Cliff de Young. Dure: 2h01. Distributeur: Capricci Films.

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    BOUCle DOReIlle eT ChAUSSeTTe jAUNe, hARRISON FORD, DCONTRACT, SeST PRT AU jeU DeS qUeSTIONS/R-PONSeS. A lOCCASION De lA SORTIe De MORNING GlORY, lACTeUR NOUS CONFIe TOUTe SON eSTIMe DU MTIeR De CO-MDIeN. DINDIANA jONeS wORKING GIRl, eN PASSANT PAR BlADe RUNNeR, FORD A eNDOSS TOUS leS COSTUMeS. FOCUS SUR lA CARRIRe DUN AveNTURIeR, BIeN lOIN De PReNDRe SA ReTRAITe.

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  • Critiques | 10 | Critiques | 11 |

    Chez GINO Sortie en salles le 30 mars 2011 - Ralis par Samuel Benchetrit Avec jos Garcia, Anna Mouglalis, Samuel Benchetrit...Dure : 1h42 Distributeur : Mars Distribution

    a commence comme une mauvaise publicit pour une pizzeria. Gino et Simone ont fait appel Stern pour raliser un film institutionnel. Une mise en abyme du cinma donc, qui ne sarrtera pas l puisque pour prouver son oncle italien quil rgne en parfait parrain Bruxelles, Gino commande Stern un faux documentaire. et cest l que Benchetrit sest fait plaisir! Avec une quipe de bras cas-ss pour le tournage et un personnage de ralisateur rat, il trouve ici loccasion de revendiquer un cinma bricol. limage de Be Kind Rewind, Chez Gino a ce charme dsuet du kitsch la fois dans sa mise en abyme et jusque dans sa forme. Aid dun Garcia au top de sa forme en mafieux empot, le film sauto pastiche nanmoins trs rapidement. la fidlit de Benchetrit pour ses acteurs lui joue ici des tours. commencer par Anna Mouglalis dont le couple avec Garcia a bien du mal trouver une assise plausible. Petite dception donc, mme si lon rit de bon cur plusieurs reprises, pour un ralisateur dont on attendait finalement un peu plus. Clmence Besset

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    BIG MAMMA : De PRe eN FIlS Sortie en salles le 30 mars 2011 - Ralis par john whitesell Avec Martin lawrence, Brandon T. jackson, jessica lucas...Dure : 1h47 Distributeur : Twentieth Century Fox FranceBig Mamma troisime du nom, c est un peu un Sister Act 2 sans whoopi Goldberg. Nous avons les adolescents talentueux mais perturbateurs, larrive dune personne trangre lcole qui va les remettre dans les rails et puis, et puis, cest tout. john whitesell, auteur de chefs-duvre comme voi-sin contre voisin (2007) ou encore le rappeur de Malibu (2002), dlaisse laspect social pour des rac-courcis plus gros que son hrone principale. Du coup, le rappeur rve de devenir jay z, la chanteuse se prend pour Alicia Keys et lactrice ne jure que dans le talent de Sandra BullockAprs vrifications, non, les scnaristes Don Rhymer et Matthew Fogel ne sont pas des adolescents prpubres avec une frange la justin Bieber, juste des adultes en panne dinspiration. Du coup, Martin lawrence passe pour un has-been tandis que Brandon T. jackson, pourtant trs bon dans Tonnerre sous les tropiques dans le rle dAlpa Chino, ne parvient pas relever les tentatives de ressorts comiques du film. Au fi-nal, aller voir un film comme Big Mamma : de pre en fils au cinma, cest un peu comme commander un deuxime hamburger dans un fast-food amricain : On sait que lon commande du lourd et du gras, mais lon est quand mme cur aprs la dernire bouche victor vogt

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    BONOBOS Sortie en salles le 30 mars 2011 - Ralis par Alain Tixier Avec Sandrine Bonnaire, emmanuel Curtil, Claudine Andre...Dure : 1h30 Distributeur : SND

    Aprs les expditions en terrain gel, jean Pierre Bailly, producteur de loup, nous fait voyager au cur la jungle congolaise, misant sur une nouvelle bte poil, Beni le bonobo. Captur par des braconniers, Beni semble condamn. Mais Claudine Andr, membre active de la dfense des grands singes, va sortir lorphelin des griffes de lenfer Afin de sensibiliser le jeune public la cause de cette espce menace, Alain Tixier, le ralisateur, multiplie les plans mouvants et tout est gentiment orchestr pour tirer la larme lil. Il faut avouer, cela dit, que mme un cur de pierre ne pourrait rsister au charme des bonobos Plus humains que les humains, ils nous ravissent tant quon en oublierait pr-esque de parler du reste, notamment dune narration en voix off dramatiquement mivre. Dommage, le sujet tait en substance suffisamment riche pour ne pas avoir rajouter de miel par dessus. Mais lambition grand public de Tixier et son producteur finit par grignoter les informations et cloitrer le rcit entre les murs de la fiction. Ava Cahen

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    The COMPANY MeN Sortie en salles le 30 mars 2011 - Ralis par john wells Avec Tommy lee jones, Ben Affleck, Chris Cooper...Dure : 1h52 Distributeur : Gaumont Distribution

    Sur le papier, The Company men avait tout pour plaire : un casting impressionnant, un cinaste qui a fait ses armes en tant quauteur et producteur de la srie mdicale Urgences, un chef-oprateur habitu des plateaux des frres Coen, un sujet fort et terriblement actuel (le chmage face la course au profit) hlas, difficile admettre, mais la sauce ne prend pas. john wells, nourri par les anecdotes de ses proches, pose beaucoup de questions, donne peu de rponses. le registre du film choral lui permet dentremler les parcours de quatre hommes issus de gnrations et de milieux diffrents, mais anims par le mme dsir de russite et lide quune profession dfinit un individu. Si les acteurs sont tous excellents, on regrette dj que les personnages fminins soient relgus au second plan. Certes, le titre annonait la couleur Ajoutez cela une musique pesante qui va dans le sens de ce mlo cynique au rythme distendu et vous vous retrouvez avec trente minutes de trop et un film convenu qui manque dme et de rvolte. Ariane Picoche

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    NUMeRO qUATRe Sortie en salles le 6 avril 2011 - Ralis par D.j. Caruso Avec Alex Pettyfer, Dianna Agron, Timothy Oly-phant...Dure : 1h44 Distributeur : The walt Disney Company France

    Shyamalan, dans le dernier matre de lair, divisait les personnages par lhabit, nouant le tissu lhumeur. Ici, Caruso va plus loin. Cest le physique qui dtermine la caste et la porte du destin. Il est vrai quAlex Pettyfer, dans son genre, se dfend; mais si le but est de se rassasier de jolis minois, on repassera. Autour dun distinguo lamentable (les gentils sont beaux, les mchants sont laids), la mise en scne vomit son manichisme poussif et sa candeur des grands jours dans un mlange de mau-vais effets spciaux et de vilaines cascades. le fantastique, ici, est un grossier prtexte, un moyen de jouer des slow-motion et de sortir les gros flingues. De tous les genres et de tous les codes surtout les plus ringards le dernier long-mtrage racoleur de D.j. Caruso remporte haut la main loscar de la fiction la plus vaine. Une histoire qui ne vaut rien, des acteurs ptrifiants force de mdiocrit, une photographie pas netteNumro quatre ne fait dcidment rien comme il faut. Ava Cahen

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    Un soldat fait un voyage dans le temps hors du commun. Il se retrouve passager dun train in-connu devoir revivre sans cesse, comme une journe sans fin, un attentat visant ce convoi.

    Dcouvert il y a presque deux ans avec Moon (une perle de science-fiction spatiale), Duncan jones devait invita-blement se confronter au dangereux obstacle que constitue le second long-mtrage dans la carrire dun jeune ralisateur. Pour dmontrer que son premier coup dessai ntait pas un coup de bol, le fils de David Bowie repart au front avec un mlange de Code quantum, Un jour sans fin, la jete et Dj vu : par lentremise dun projet exprimental de larme, un soldat se retrouve plong dans le corps de la victime dun attentat ferroviaire quil revit encore et encore par tran-che de huit minutes. Sa mission : identifier au plus vite le responsable qui menace de ritrer son exploit sur la ville de Chicago. Dapparence plus grand public et artistiquement modeste,

    ce thriller techno-temporel nen demeure pas moins un exercice de style rondement men qui derrire les apparences dun divertissement carr et sans personnalit, cache une ingnieuse prolongation des thmatiques abordes dans Moon. Un auteur est n.

    Manipulation de la vrit et exploitation de lhomme sont donc au centre dun suspense mtronomique bas sur la rptition dtour-ne dune mme situation dramatique faisant avancer la progression de lenqute et ses vritables enjeux humains. Car sous les dictats de son rcit policier progressant en ligne droite, Source Code rvle un cur qui a ses raisons que la raison ignore. Malgr une romance im-possible - artificiellement amene - entre le h-ros et une morte ntant plus que lincarnation dune mmoire rsiduelle, Duncan jones russit donner de la matire ses personnages. Grce des comdiens impeccables (jake Gyllenhaal plus convaincant que dans Prince of Persia), le metteur en scne meut dans un final qui se refuse la fatalit soumise de la ralit. en d-montrant que largument fantastique du rcit nest pas quun simple gimmick vide de matire le film dbouche finalement sur une rflexion inattendue de type et si ctait possible , dun optimisme bienvenu.

    julien Munoz

    Un indien mtis, policier dans sa rser-ve, revient parmi les blancs. Il prend une diligence qui se fait attaquer par des bandits. Trs vite, il va devoir soccuper des passagers et de leur survie.

    le monde est plein de contrarits. Chez Sartre, lenfer, cest les autres . et les autres, comme pour ne pas le contredire, lont souvent mal interprt. Plus vrita-blement, lenfer, cest soi-mme. et depuis notre enfer il faut dealer avec lenfer des autres. Do la ncessit de bien sentourer. Ritt est un peintre de la nature humaine mais la nature humaine ce nest pas la Na-ture. Dans la nature il ny a pas de bien ni de mal et les indiens ont toujours t plus pro-ches de la nature que le blanc. hombre est entre les deux, blanc de nature mais indien dadoption, il est plus proche donc de la na-ture que de lenfer. Du mme coup, un peu plus loin des autres aussi. la distance, chez lhomme, a cela de bon quelle apaise autant quelle autorise le rapprochement sans pour autant ly contraindre. Une espce envahis-

    sante comme la taxifolia est rpute pour sa nocivit sur la faune avoisinante ; le blanc, certainement plus siphonn que certains de ses comfratriotes, est assez suscepti-ble de dvelopper, comme il la prouv dans lhistoire, la mme capacit toxique que ces ulvophyces de structure identique. Ds lors, lindien dviter le blanc. Mais parfois le destin sacharne. Rester droit. Rester sou-ple. en toutes circonstances cest la tech-nique du bambou. hombre est un homme-bambou, un homme de paix qui, forcment, matrise lart de la guerre ; et quoi de mieux pour le faire plier quune femme-cyclone.

    Si les personnages sont archtypaux cest que le cinma de Ritt est aussi progressiste que primitif. Dans le western, Boetticher est le matre de lpure. Ritt efface moins la ri-chesse psychologique de ses personnages, au contraire, la cultivant prcieusement il si-gne ce qui restera, aux cts des trs beaux lhomme sans frontire et Seuls sont les in-dompts, un des westerns les plus humains du genre. Superbe photo, interprtation magistrale, atmosphre hypnotique le style de Ritt se conjugue merveille avec la thmatique fertile du rcit. Ctait un homme dur, on lappelait hombre et lon ne saurait que vous conseiller, dans une salle obscure sinon jusque dans la lumire du jour, de croiser son chemin. Nico Paal

    SOURCe CODeSortie en salles le 20 avril 2011 - Ralis par Duncan jonesAvec jake Gyllenhaal, vera Farmiga, Michelle Monaghan...Dure : 1h35 Distributeur : SND

    hOMBReSortie en salles : 20 avril 2011Ralis par : Martin RittAvec : Paul Newman, Fredric March, Richard BooneDistributeur : Flash Pictures - Dure : 1h51

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  • Dossier | 13 | Critiques | 12 |

    DeTeCTIve Dee : le MYSTeRe De lA FlAMMe FANTOMe Sortie en salles le 20 avril 2011 - Ralis par Tsui hark Avec Andy lau, Bingbing li, Chao Deng...Dure : 2h02 Distributeur : le Pacte

    On savait le matre un peu fatigu, on aurait espr un rveil plus franc. Si laventure est assez pal-pitante, le mystre de la flamme fantme nanmoins doit ; la faute une ambition peut-tre trop importante sinon une magie placebo. Avec ses personnages attachants bien quun peu carica-turaux (Andy lau en tte dans une composition aussi ptillante quun bon wong Fei-hung) et une intrigue riche, malgr quelques dfauts, le film retient efficacement lattention jusqu une dernire demi-heure plombe par un dluge deffets visuels qui font mal aux yeux. Cest le gros dfaut du film, l o dautres wu Xia Pian plus mesurs opraient merveille, Detective Dee, par son embon-point numrique mal fignol et jusque dans son scnario, annihile toute potentialit magique et le charme, infailliblement, nopre pas. Une dception, jusque dans les chorgraphies trs artificielles dun Sammo hung qui nous avait habitus mieux. Nico Paal

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    MeDee MIRACle Sortie en salles le 30 mars 2011 - Ralis par Tonino de Bernardi Avec Isabelle hupert, Tom-maso Ragno, Maria de Medeiros...Dure : 1h23 Distributeur : Baba Yaga Films

    On connat la fascination dIsabelle huppert pour le mythe grec de Mde quelle a dj interprte au thtre, sous la direction de jacques lasalle. la version quen donne Tonino de Bernardi parat dabord assez surprenante, dfaut dtre trs fconde. le film consiste en fait en des sayntes quelque peu disjointes sur Isabelle huppert en chanteuse de cabaret, le tout soigneusement dcoup en chapitres et encadr par des intertitres blanc sur noir, trs godardiens, mais nest pas (mal)heureusement Go-dard qui veut. en effet, la narration volontairement distancie et dsincarne ne nous permet pas dadhrer au drame de cette femme, trangre la France et au monde, et nous laisse peu rceptifs son souhait soudain de rdemption. le rythme atone et labsence de charme gnral du rcit, loppos du hiratisme singulier de la Mde de Pasolini, ne laissent pas la possibilit de croire cette parabole. Autant lon peut tre favorable un cinma dart et dessai, autant parfois lessai lemporte de manire prjudiciable sur lart. David Speranski

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    MR NICe Sortie en salles le 13 avril 2011 - Ralis par Bernard Rose Avec Rhys Ifans, Chlo Sevigny, David Thewlis...Dure : 2h01 Distributeur : UFO Distribution

    Bernard Rose stait surtout signal par la ralisation de clips et dun grand succs du film fantastique, Candyman, avant de se spcialiser dans les biopics et les adaptations littraires. Dans son nouveau film, il rconcilie un peu les deux tendances de son travail, lorientation moderne et djante et le biopic de personnalits marquantes de la culture, ou plutt de la contre-culture dans le cas d howard Mr Nice Marks qui nous occupe ici. Rhys Ifans campe avec charme et dcontraction cet escroc dsin-volte qui se laissera dpasser avec plaisir par les vnements en se retrouvant rapidement la tte du plus grand trafic de marijuana de lpoque en europe. en dpit des qualits incontestables du film, on peut sinterroger sur labsence (volontaire?) de point de vue sur ce contrebandier non violent, usant de lhumour comme instrument de persuasion et amen donner des spectacles la fin de sa vie, se trouvant en perptuelle reprsentation, comme Bronson de Nicholas winding Refn. David Speranski

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    lA PROIe Sortie en salles le 13 avril 2011 - Ralis par eric valette Avec Albert Dupontel, Alice Taglioni, Sergi lopez...Dure : 1h42 Distributeur : Studio Canal

    quand les franais essaient de faire aussi bien que les amricains dans le registre du thriller, a donne souvent un rsultat proche de la parodie. On rigole beaucoup, on angoisse trs peu. Cest un peu ce quil se passe avec la Proie. Pourtant, on avait envie de croire en valette qui nous avait bluf-fs avec Malfique, tout comme on avait une entire confiance en Dupontel. Mais lalchimie entre le ralisateur, lacteur et les seconds rles ne prend aucun moment. la faute au scnario, grotesque et dj vu (un braqueur schappe de prison pour sauver sa fille des griffes dun pdophile qui a partag sa cellule), bien que bourr de rfrences au cinma amricain ; le Fugitif en tte, puisque lhistoire de la Proie nous force suivre un Dupontel mont sur ressort, mais aussi le silence des agneaux pour ce qui reste peut-tre la scne la plus (involontairement) hilarante du film, ou encore Terminator (oui, oui) voire Scarface. verdict ? eric valette sest fait plaisir, Dupontel a pay son loyer et nous on sest ennuy. Marie-Aurlie Graff

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    le FlINGUeUR Sortie en salles le 6 avril 2011 - Ralis par Simon west Avec jason Statham, Ben Foster, Donald Sutherland...Dure : 1h32 - Distributeur : Metropolitan Filmexport

    Remake du film homonyme de Michael winner avec Charles Bronson, le Flingueur est sans doute moins une efficace remise niveau dun petit actionner made in 70, quun pur produit de consom-mation rapide au service de sa vedette jason Statham. Au niveau du script presque rien ne change : il y est toujours question dun tueur professionnel qui, las dune vie solitaire, accepte dengager un apprenti qui nest autre que le fils de sa dernire victime. Mais lambigut des rapports entre les deux hommes et le pessimisme sous-jacent de loriginal et de son poque ont tt fait dtre polics pour mieux rentrer dans le moule aseptis de la production moderne. Rigide, dj-vu et dnu de la moindre prise de risques, le rsultat final vient se caler gentiment entre deux autres opus de la filmographie du hros des Transporteur, sans se distinguer outre mesure. Au risque de tomber dans la prose passiste de vieux grincheux, on affirmera sans sourciller que le Flingueur, ctait mieux avant. julien Munoz

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    SUCKER PUNCHSnyder se dchaine

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    Au japon ce sera un peu plus tard la saga de la Femme scorpion notamment et peu peu se dessine un nouveau visage de lhrone moderne, de la femme de demain. Suivent lexcellent les Menottes Rouges pour ne citer que lui avec la dlicieuse Miki Sugimoto au pays du soleil levant avant que Nikita ou Kill Bill ne marquent plus rcemment les esprits cinphiliques. et si Kill Bill semblait en quelque sorte venir boucler la boucle en se rappropriant la fameuse liste des personnes tuer dj utilise par Moreau dans le standard de Truffaut, ctait sans compter sur la contamination de ce nouveau modle sur une figure fminine bien plus vaste ; sorte darchtype vengeur driv de la femme fatale, cette hrone aussi attractive que couillue cest un peu Bonnie sans Clyde allait fatalement laisser des traces dans la psychologie de ses contemporaines. voila que lara Croft essaie de damer le pion Indiana jones, la toute mimi Kelly Reilly est oblige de donner de sa personne dans eden lake face un petit ami un peu diminu et hit Girl de dbarquer en vitesse quand Kick-Ass se fait bien prosaquement botter le

    derrire Babydoll, hrone de Sucker Punch, leur ressemble un peu, hit Girl peut-tre plus encore en cela quelle incarne cette transition entre lenfance et lge adulte. Aide dans sa qute de libert par la timore Sweet Pea, Rocket la grande gueule, Blondie la fute, et la loyale Amber, elles ont toutes ce trait de caractre si particulier qui, sil permet de les dfinir plus particulirement les

    unes par rapport aux autres, les rattache aussi en filigrane et de faon plus parcellaire julie

    Kohler, la marie vtue de noir. la femme est lavenir de lhomme avait dit Aragon et on ne saurait lui donner entirement tort. le risque en revanche cest quelle en devienne le substitut. et si au cinma comme ailleurs les femmes (se) conduisent dsormais comme les hommes, on est en droit de stonner, la manire de Marcel Achard, quelles en soient fires. Combien Abbie Cornish tait craquante sous les traits de Fanny Brawne, fiance de Keats chez Campion ! le sera-t-elle autant sous ceux de Sweet Pea ? Cest que le mystre, mieux que le diamant ou la dentelle, sied si bien aux femmes.

    Snyder parviendra-t-il incarner cet arcane vaporeux ou fera t-il de ses hrones des poupes de chair froides pareilles aux mles bodybuilds, cyber-lisses, de 300 ? Il est drle de voir que la Marie tait en noir tait une adaptation dun roman de william Irish, comme la Femme scorpion tait inspir du manga de Toru Shinohara, jusquau Kill Bill de Tarantino qui ne cache pas son caractre ultra-rfrentiel. Paradoxalement, Snyder, sil sinscrit dans cette ligne, signe avec Sucker Punch, son premier scnario original. Plus quun revenge movie il avoue plus volontiers avoir voulu proposer sa version personnelle du film dvasion. Mais si lhistoire est de lui, paul par son ami Steve Shibuya au scnario, plusieurs lments demeurent htroclites et vont piocher du ct jeu-vido, du manga et son film par ce brassage rappelle presque la richesse du rcent Avatar de Cameron. Au classicisme grandiose de ce dernier nul doute que Snyder cherchera imposer ses talents de faiseur dimages dans un style plus pop, plus sombre et dop la testostrone, sinon plutt aux strognes. Peut-tre un moyen de rconcilier enfin un public fminin avec un cinma prtendument plus masculin. verdict le 30 mars et tant pis si lon ne vous laisse pas le choix dans la date

    FIlMOGRAPhIe zACh SNYDeR

    2004 : larme des Morts2007 : 3002009 : watchmen - les gardiens2010 : le Royaume de Gahoole - la lgende des gardiens 2011 : Sucker Punch

    en projet : Superman : Man of Steel

    SUcKeR PUNcH :Le ciNeMA

    APPARTieNT AUx feMMeSle ReveNGe MOvIe eST TOUjOURS PlUS SeXY lORSqUIl SCRIT AU FMININ. eN FRANCe, ON Se SOUvIeNDRA De lA MARIe TAIT eN NOIR SORTI eN 1968, De FRANOIS TRUFFAUT AveC UNe SDUISANTe eT FATAle jeANNe MOReAU, PRCURSeUR DUNe vAGUe De FIlMS qUI AllAIT PROSPReR. par Nico Paal

    Plus que quinze jours ( lheure o jcris ces lignes) avant la sortie de Sucker Punch de zack Snyder. Dici l jai encore le temps de me repas-ser la fascinante bande annonce du film en bou-cle. Car si je piaffe dimpatience lide de voir Sucker Punch, en dehors du fait quil sagit l du nouveau film de Snyder, cest aussi parce que cest l le pre-mier scnario original du ralisateur (fait rare aujourdhui dans les gros-ses productions hollywoodiennes). Aprs le malheureux chec au Box-Office du magnifique watch-men et le succs en demi-teinte du trs sympathique Royaume de Ga-hoole, le moins que lon puisse dire, cest que Snyder mise gros avec Sucker Punch. le ralisateur sait se mettre en danger et cest ce qui me sduit chez ce type. Il ne cde jamais la facilit, il choisit ses sujets avec passion, chacun des ses films sont de vrais challenges techniques et il est lun des ra-res imposer ses choix artistiques aux Majors (il a obtenu une quasi carte blanche coup sur coup pour watchmen et Sucker Punch). Dans un systme hollywoodien o le ralisateur est un technicien au service du film, Snyder, la mani-re dun Steven Spielberg ou dun Peter jackson sait dfinitivement tirer son pingle du jeu pour faire le film de ses fantasmes.

    lA CUlTURe POPUlAIRe

    Il est mon sens un des rares ralisateurs mo-dernes avoir compris et digr le meilleur de la culture populaire. Certains dplorent que ses

    films ressemblent des cinmatiques propres aux jeux vido. Cest exactement le cas. le jeu vi-do est aujourdhui un art et Snyder sen inspire, tout comme il pourrait sinspirer dune peinture du Caravage. On ne peut pas reprocher un ci-naste de vivre dans son poque ! Ce sont certai-nement ce genre de parti pris forts, mais nan-moins assums qui font que Snyder dchaine les passions. Ses films sont souvent politiquement incorrects, et vhiculent des ides bien arrtes sur notre socit (mme sil rpte tout le temps quil fait de lentertainment avant tout) et mal-gr tout son cinma reste fascinant. Alors oui, le monsieur ne se cache pas dtre un bon Rpublicain, oui, il est va-t-en-guerre, non, il ne cache pas non plus son amour pour les armes (il est membre de la N.R.A., comme son ami et pre spirituel john Milius...).

    UN ReAlISATeUR DANGeReUX ?

    est-il pour autant un ralisateur dangereux ? Per-sonnellement, le cinphile en moi prfre voir le film dun cinaste qui a des choses dfendre et qui a des convictions, mme si je ne suis pas du tout daccord avec lui, plutt que le film dun simple excutant qui na aucun point de vue sur notre socit mme si celui-ci moffre un beau et gros spectacle. Ce nest pas pour autant que je vais adhrer ses idaux extrmes les yeux fer-ms. Mme sil est indniable que cela participe la force de son cinma, il nest pas question que de politique dans le cinma de Snyder.

    en plus de graver ses intentions sur la ploche, il sait donner une me ses oeuvres. je retrouve

    chez Snyder quelque chose qui ma toujours fas-cin chez Sergio leone : lincarnation de laura de ses personnages. Une iconisation juste qui va transcender mon empathie (Snyder est fascin par le mythe du surhomme et cela se voit). les univers dans lesquels ils voluent ne sont jamais ralistes, jamais facilement accessibles pour le grand public et pourtant a marche eton y croit tous les coups! 300 et watchmen en sont de parfaits exemples. le ralisateur ne se contente pas uniquement danimer des cases de BD. Il sait choisir ses comdiens, il sait surtout les diriger. Cest aussi a la force dun bon ralisateur.

    UN TRAvAIl eXPeRIMeNTAl

    jai toujours peru son rapport limage comme un travail exprimental. Une recherche visuelle

    en constante gestation qui a pour but de servir lintensit dramatique dune squence. Contrairement ce que lon entend souvent, je suis persuad que sa tech-nique est compltement au service de ses histoires. Ses fameux ralentis ne sont jamais gratuits. Ils sintgrent parfaitement lhistoire et sinscri-vent dans cette logique cathartique de mieux percevoir cette violence qui le fascine tant. Cela afin de mieux le

    rendre ses spectateurs. encore faut-il que le spectateur soit demandeur en ce sens Snyder est galement pour moi un ralisateur gnreux, peut tre mme trop. Cest probablement cet excs de gnrosit, qui est pris pour de la surenchre, qui rebute ses dtrac-teurs. en seulement cinq films, Snyder a dmontr quil savait crer un univers, et un style propre : un auteur est n. je suis bien sr impatient de d-couvrir les premires images de son Superman (qui sera sans aucun doute lantithse du film de Brian Singer), mais je suis surtout curieux de voir comment son cinma va se muer avec le temps.

    Plus que quinze jours avant la sortie de Sucker Punch Allez ! je me repasse la bande-annon-ce.

    Pourquoi Snyder me fascine ? TAlAl SelhAMI eST UN jeUNe CINASTe FRANAIS, qUI lON DOIT le PROMeTTeUR MIRAGeS, SleCTIONN A Ge-RARDMeR CeTTe ANNe. eN PlUS DTRe AUTeUR, Il eST GAleMeNT CINPhIle eT eXPeRT eN FIlMS De GeNRe DONT Il Se FAIT le ChAN-

    TRe DU ReNOUveAU eN FRANCe eT AU MAROC. POUR ClAP!, Il A ACCePT De NOUS FAIRe PART De SeS CONvICTIONS AU SUjeT De SNYDeR, FIGURe hAUTeMeNT POlMIqUe AlORS qUIl NA MIS eN SCNe qUe qUATRe FIlMS !

    par Talal Selhami

    Un nouveau visage de lhrone moderne

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    Nous sommes en 1996 et toute une g-nration dadolescents (et de grands enfants dsireux de se faire un peu peur, bien quils ne soient pas la premire cible) sap-prte dcouvrir le premier pisode de la saga Scream . la formule ? Un pitch simple - un tueur en srie masqu dcime une bande de jeunes aprs avoir jou avec leurs nerfs au t-lphone - un casting qui deviendra emblma-tique des 90s (Courtney Cox, Neve Campbell, David Arquette) et surtout trs peu de sang, mais beaucoup de cris tout est dans le titre. Pour notre gnration, leve aux slashers tels que Freddy, Chucky, Candy Man et autres jason, lhorreur est alors encore synonyme de frissons, dangoisse et dpouvante. Mais dans lombre de certaines salles obscures, sommeille un sous-genre alors encore appr-ci dun public averti trs averti ! le gore. A lpoque, il lui arrive mme de se travestir en lment comique, la preuve avec Brain Dead (1992) de Peter jackson, considr encore aujourdhui par beaucoup comme le film le plus gore de lhistoire, mais qui a finalement surtout dclench les rires plutt que le dgout. le gore semble alors, en comparaison, moins brutal, moins gratuit et si certains films sortent dj du lot, les bloody movies sont pour lheure tout sauf mainstream.en 2011, wes Craven, ses trois Scream et les slashers ont laiss place de nouvelles sagas-telles que Saw ou hostel pour ne citer quelles, une vague de remakes toujours plus sangui-nolente et avec eux, toute une gnration de

    nouveaux jeunes ralisateurs (eli Roth, Alexan-dre Aja, Dean Marshall, etc.). qua-t-il bien pu donc se passer en quinze ans, pour que le gore encore considr comme un sous-genre du ci-nma dhorreur prenne le pas sur lpouvante ? Pourquoi la surenchre dhmoglobine est-elle devenue imprative pour attirer les foules dans les salles obscures ? la faute la gnration 2.0, leve la tl ralit et aux sries toujours plus trash (on peut voir les succs rcents de Dexter ou encore de Nip/Tuck et leur lot dimages prouvantes), qui semble avoir besoin sans cesse de relever le niveau de linsoutenable pour attiser son excita-tion, pour se prouver quelle na peur de rien. la course linsoutenable est lance.

    la faute la gnrat ion 2 .0

    Choquer plus pour parvenir toucher des jeu-nes esprits de plus en plus habitus ce type de visions dhorreur Chez les ralisateurs, cette explosion du gore dans les grandes sal-les - dclenche par le remake de Massacre la trononneuse en 2003 - est donc une poule aux ufs dor et leur permet galement de raliser leurs fantasmes de cinphiles dviants en tablissant un retour lhorreur des annes 70 : faire un constat de la politique (comme les zombies de Romero), dguiser les parias de la socit en vritables monstres, interroger lhu-

    main sur ses facettes les plus obscures tout ce que seul le cinma dhorreur permet de rali-ser sans prendre de risques.

    On assiste donc depuis quelques annes une nouvelle re du cinma dhorreur, o tortures vicieuses et psychologiques jouent de concert pour mieux nous curer. le cinma dhor-reur serait devenu synonyme de dgout sous toutes ses formes. Cette redfinition du genre a laiss certains premiers fans de lhorreur classique sur le carreau, mais a russi em-barquer avec elle quelques rsistants voyeurs. Grce eux, la nouvelle vague de ralisateurs peut se dfendre de ne pas faire que marcher les tiroirs caisse dhollywood en rpondant la demande dun nouveau public toujours plus jeune, toujours plus fou et clame qui voudra bien la croire quelle ne fait pas du gore pour du gore mais bien une critique de la socit. eli Roth ira mme jusqu dire, propos des 90s, lors dune interview pour le rcent docu-mentaire le grand frisson diffus sur Arte : les films dhorreur avant, ctait de la merde ! Aujourdhui on sait vraiment foutre les jetons . Ou plutt la nause Sans aller compltement dans le sens deli Roth, on lui concdera que les slasher des 90s navaient rien de trs recherch dun point du vue scnaristique. Ainsi, les diff-rents Souviens-toi lt dernier et autres Urban legend ont calqu leurs histoires lgres sur le modle de Scream, profitant de la vague, avant de sessouffler au dbut des annes 2000 pour un retour au gore pur et dur.

    la raison dune telle fluctuation dans le genre ? en-core et toujours, il semblerait quil faille aller cher-cher du ct du climat politique et des diffrents vnements traumatisants que connaissent les populations. Si Blood Feast (considr comme le premier film gore de lhistoire) est sorti juste avant le dcs de j.F.K en 1963, on sait aujourdhui peu prs quelles allaient tre les rpercutions de cet assassinat dans le cinma moderne et lon peut se demander si le retour au gore dans les annes 2000 ne serait pas une traduction du traumatisme engendr par les attentats du 11 septembre. Mais au vu du climat politique actuel et avec les images toujours plus horribles dont nous inonde la tl-vision, a-t-on encore besoin de pousser le cinma dhorreur son paroxysme pour tre effrays ou dgouts ? le malsain a-t-il pris le pas sur lpou-vante ?

    Face ce constat, on se demande ce que peut bien attendre wes Craven avec ce quatrime pisode de Scream. le rcent remake de Freddy : les grif-fes de la nuit a engrang prs de 116 millions de dollars pour un budget de 35 millions. Un chiffre enthousiasmant qui a peut-tre de quoi rassurer Craven et lui assurer un retour lpoque glorieuse des 90s. le suspense reste entier : Scream 4, un se-cond renouveau du slasher ou le chant du cygne dun genre qui semble dsormais appartenir au pass ?

    SCReAM AURA T RvOlUTIONNAIRe SA FAON. eN RePOSITIONNANT le SlASheR MOvIe veRS le TeeN MOvIe, lA FRANChISe SeST ADReSSe DIReCTeMeNT UNe CATGO-RIe DGe qUI vOUe UN CUlTe AU COCKTAIl SeXe, GORe eT ROCKNROll. ReTOUR SUR UNe TRIlOGIe qUI A MARqU TOUTe UNe GNRA-TION.

    Dis-moi, quel est ton film dhorreur prfr ?. Si une personne la voix de Dark vador vous pose cette question par tlphone, fermez vos fentres et barricadez vos portes, un tueur psychopathe en costume est srement votre seuil. laction de Scream tournera toujours autour de ce schma simpliste, fidle aux slasher movies, littralement les films qui tailladent. vieux routard du film dhorreur (la colline a des yeux, Freddy), wes Craven est devenu une rfrence en la matire. A linstar dhalloween ou encore de vendredi 13, ses films reposent sur des schmas narratifs restrictifs (un tueur, gnralement masqu, une arme blanche, des victimes jeunes) et surtout sur des codes bien ancrs dans lesprit des spec-tateurs. Rgle numro 1 : surtout pas de sexe puisque seuls les vierges seront pargns. Rgle numro 2 : viter les drogues ou toutes substan-ces dsinhibantes. Rgle numro 3, srement la plus importante : ne jamais, grand jamais, dire je reviens tout de suite, parce que ce nest g-nralement pas le cas Toute infraction la rgle est synonyme de bain de sang assur.

    Scream part sur ces bases mais prend quelques li-berts en simposant comme le film hommage tout un pan du cinma et scartant ainsi du ba-nal slasher. Cest le film qui fait laveu de fiction pour mieux sappuyer sur ses nombreuses rf-rences. Ainsi certains personnages deviennent cinphiles, histoire de bien marquer le coup et de susciter lautocitation. le ralisateur en pro-fite aussi pour rajeunir son audience, sinspirant des teen movies. le ton gnral est ainsi plus lger, exploitant parfaitement le second degr, et saxe plus sur la violence psychologique que sur laspect vritablement gore (except lpilo-gue o les deux se rejoignent). Craven sintresse

    galement aux proccupations des adolescents, entre pubert, hantise du lyce, soucis de popu-larit (trs prsent dans les films amricains), et apprentissage de la sexualit. les adultes, incar-ns principalement par la journaliste Gale wea-thers (Courteney Cox) et le policier Dewey (David Arquette), reprsentent un monde dsabus et risible. Scream parle autant du danger de la surconsommation dimages, que de la btise de ceux qui ny comprennent pas grand-chose Au spectateur de trancher.le premier Scream est ainsi une dclaration damour au cinma de genre qui se dguste avec des popcorns au fond de la couette. Craven pousse lhommage jusqu la mise en abme avec Scream 2 (comme il lavait dj fait avec Freddy sort de la Nuit). Il cre maintenant un film dans le film puisquun long-mtrage est tourn suite aux tragiques vnements du premier pisode. le clin dil est sympathique et permet de re-mettre le couvert (ou plutt le couteau) avec les mmes acteurs (sauf les morts bien sr) et de filer la rflexion sur le propre du film dhorreur : comment surpasser loriginal dans le numro 2 ? wes Craven est donc un cinaste majeur du ci-nma dhorreur mais aussi celui qui en recherche constamment les limites, les drives, et tente de nouvelles exprimentations vers dautres genres plus hybrides (le sous-sol de la Peur, Red eye). Scream 3 apparatra quant lui comme le film de trop. le scnario est bien plus mince et lorgne sur la tl ralit dont nous assistions aux dbuts (le film date de 2000) et tire sur la corde de ses pr-dcesseurs jusqu sen brler les mains. Tout est plus cul, plus pataud, et le twist final tant atten-du frise le ridicule. Pire, ce dernier opus dmontre sil le fallait que la frontire est parfois bien mince entre le second degr et la parodie. Une manire peut-tre de faciliter le travail des auteurs de Sca-ry movie Prs de quinze ans aprs la sortie du premier volet, Scream 4 a une donc belle oppor-tunit de relancer la saga en esprant quil par-viendra tirer la leon de ses erreurs plutt que de les renouveler. Rponse le 13 avril prochain. victor vogt

    SCReAM, le Chant du Cygne

    LHORREUR DU 21me SIECLE ?

    DOSSIeR

    Avec la sortie le 13 avril de Scream 4, Clap a dcid de se pencher sur ce genre tendance quest le cinma dhorreur. Si le nouvel pisode de la saga de wes Craven est (plus ou moins) attendu par la gnration qui la dcouvert dans sa jeunesse, en sera-t-il de mme pour celle biberonne au hostel et autres Saw ? Re-tour sur quinze ans de frissons, dangoisse et surtout de litres dhmoglobine par Marie-Aurlie Graff

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    1 : Martyrs (laugier (2008); 2 : Rec (Balaguero, Plaza 2007)3 : la Colline a des yeux 2 (Martin weisz, 2007) ; 4 eden lake (ja-mes watkins, 2008)

  • evnement | 18 | Slection Tv | 19 |

    KUBRICK : le gnie de lobsession

    Stanley Kubrick demeure encore douze ans aprs sa mort lun des cinastes les plus in-fluents du monde. A lheure o va souvrir le 23 mars la Cinmathque franaise lexposition la plus importante jamais consacre un ci-naste (dj prsente Francfort, Rome, Ber-lin) voici loccasion de revenir sur son influence et limportance de son legs pour les cinastes daujourdhui.

    le souci de la perfection technique

    Comme tout le monde le sait, Kubrick tait un vrai control freak . Soucieux du moindre dtail, il a pouss jusqu un rare degr la comptence tech-nique pour la ralisation dun film, allant jusqu vouloir matriser toutes les conditions dexploitation. Cest sans doute pour cette raison quil a t le premier donner ses lettres de noblesse un genre dlaiss dans les annes soixante, la science-fiction. Ayant pour modeste ambition de raconter lhistoire de lhumanit et tenant parfaitement son pari, 2001 lodysse de lespace sera la pierre de tou-che qui servira de ligne de dmarcation dans son uvre. Sans ce film, Spielberg, lucas ou Cameron nauraient pas os tourner leurs superproductions de science-fiction. en 2011, le nouveau venu joseph Kosinski a plus que rendu hommage 2001 travers Tron: legacy. Ces grands tech-niciens de limage ont tous une dette lgard de Kubrick, en particulier Steven Spielberg qui sest auto-dsign hritier de Stanley Kubrick en reprenant lun des derniers projets du Matre, lintriguant A.I., film danticipation d-chirant sur un enfant-robot.

    lintrt de Kubrick pour la science et la technique ne sar-rtait pas la science-fiction: il na cess dinnover techni-quement pour donner plus de crdibilit son image ou de fluidit son rcit, en utilisant les objectifs zeiss dans Barry lyndon pour filmer les scnes clairs aux bougies ou encore la Steadicam dans Shining pour suivre le mini-vlo de Danny. la technique lui permettait de progresser dans son art et non linverse.

    le dsir de renouvellement des genres

    Kubrick a toujours souhait renouveler le genre dans lequel il sexprimait: film noir (lUltime razzia), pplum (Spartacus), film de guerre (les Sentiers de la gloire, Full Metal jacket), comdie (Docteur Folamour), science-fic-tion (2001), film dpoque (Barry lyndon), film dhorreur (Shining), etc. Il ne faisait quimiter la diversit du talent de certains metteurs en scne hollywoodiens (hawks, Curtiz,

    walsh) qui sexerait sur des genres totalement diffrents. Certains cinastes ont dmontr une diversit de palette relativement comparable comme les frres Coen, (du film noir la comdie et au western), Steven Soderbergh (de Traffic Solaris) ou encore Ridley Scott dont toute la car-rire semble un dcalque moins russi de celle de Kubrick, de Duellistes, Blade Runner Gladiator ou la Chute du Faucon noir. Kubrick demeure donc le seul avoir expri-ment et matris autant de registres diffrents.

    lindpendance vis--vis des studios

    Si Kubrick a fascin et continue fasciner la plupart des cinastes du monde entier, cest quil reprsentait lun des seuls cinastes ayant su prserver intacte sa capacit dexpression, tout en bnficiant des moyens financiers extrmement puissants dun studio, soit ceux de la war-ner. Orson welles a bnfici du mme type de contrat pour son premier film, Citizen Kane, mais na pas su main-tenir cette situation privilgie. les autres ralisateurs se trouvaient quant eux toujours la merci dun dsaveu des studios. Dans les annes soixante-dix, Francis Ford Coppola a essay de btir un empire ct dhollywood, zoetrope, mais a chou, faute de triomphes financiers. David lynch, le plus artiste des cinastes amricains, dont Kubrick admirait eraserhead, a labor un mini-systme de production ct dhollywood mais semble avoir renonc un succs commercial de grande ampleur. Aujourdhui, la nouvelle gnration de ralisateurs amri-cains qui ont pris le pouvoir hollywood se rclament tous de Kubrick et de son got de lindpendance par rapport aux studios, en prservant farouchement leur droit au final cut : David Fincher partage lobsession kubrickienne pour la perfection, en tant capable de refaire 99 fois la squence douverture de The Social Network; Christopher Nolan, son ambition narrative, son got des masques et des structures scnaristiques labyrinthiques; enfin Darren Aronofksy, sa sensibilit europenne et pessimiste, ainsi que son esthtique flamboyante.

    Cest tout cela en un seul metteur en scne que la Cinma-thque franaise va nous proposer de retrouver sur deux niveaux et 1 000 mtres carrs. A travers des centaines darchives, de documents de travail, de photos, de cos-tumes et daccessoires, Stanley Kubrick imprimera nou-veau sa marque, son exigence et sa folle ambition, celle dun rare dmiurge que seule la mort a pu arrter. David Speranski

    KUbRicK A LA ciNeMATHeQUe fRANcAiSe DU 23 MARS AU 31 JUiLLeT 2011

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    FORTUNeSTOURNe eN 2009, FORTUNeS A TRAIN qUel-qUe TeMPS DANS leS CARTONS DARTe. lA S-RIe A T DvelOPPe PARTIR DU TlFIlM PONYMe RAlIS eN 2008 eT PROlONGe leS AveNTUReS DUNe BANDe DAMIS BIeN DCIDS FAIRe FORTUNe, qUITTe jOUeR AUX PeTITS MAGOUIlleURS eN COSTARD.

    Brahim, Fathi, Driss, dorigine maghrbine, et leur pote Mike, gitan, vont dfier la crise et tenter de faire pousser largent dans les champs grce des transactions immobilires plutt foireuses. Aprs le succs des Invincibles, la chane franco-alleman-de propose ainsi une nouvelle comdie. Cre par Stphane Meunier (les yeux dans les bleus, Fou-dre), Fortunes est impertinente et aborde de ma-nire dcomplexe les interactions entre les com-munauts arabe, chinoise, gitane et portugaise.

    Au cinma, on a eu la jolie comdie Mauvaise foi de Roschdy zem ou plus rcemment Il reste du jambon ? dAnne Deptrini qui ve-naient sattarder sur la question de la mixit. qu cela ne tienne ! la srie tl sy met aussi. enfin ! Fortunes parle de racines culturelles, de la famille, du couple, de religions, de discriminations et mon-tre la diversit franaise travers ces communauts qui vivent ensemble. les huit pisodes offrent leur lot de vannes politiquement incorrectes. Pourtant, passer la fracheur des deux premiers pisodes, la srie perd un peu de son aplomb et devient moins passionnante. les combines et les ratages rpti-tion emmnent parfois les personnages dans des situations tlphones et redondantes. Mais la ca-mra mouvante, ample et gnreuse de Stphane Meunier livre de belles squences et quelques mo-ments touchants de vrit. Certes, on peut dtes-ter le rsultat de la srie adolescente Foudre, mais comme son habitude, le ralisateur - qui aime tourner avec des dbutants - laisse ses comdiens sexprimer. et le quatuor form par Salim Kechiou-che, Farid larbi, el Bachir Bouchalga et Arnaud Ducret, trouve ici une complicit attachante ; une libert pour les comdiens, galement palpable au regard de la prestation de Barbara Cabrita, bien meilleure que dans R.I.S.

    en dfinitive, Fortunes nest autre quune comdie sociale qui nous parle un peu de la France avec hu-mour et non sans, parfois, une certaine gravit (les difficults du couple Brahim et helena par exem-ple). Rien peut-tre dinoubliable cest vrai mais dj une raison suffisante, notre sens, pour pren-dre le temps de la dcouvrir.

    R.C.

    A partir du 22 mars sur Arte

    SOUS le SOleIl De MIAMI, ChAPeAU De COwBOY vISS SUR le CRNe eT BOOTS RU-TIlANTeS AUX PIeDS, RAYlAN GIveNS (TIMO-ThY OlYPhANT,) eST UN US MARShAll AU SeNS le PlUS RUSTIqUe DU TeRMe. eN PAR-FAIT MUle DU MARlBORO MAN, NOSTAl-GIqUe DeS BONNeS vIeIlleS MThODeS DU XIXMe SICle, NOTRe MARShAll DONNe vINGT-qUATRe heUReS POUR qUITTeR lA vIlle TOMMY BUCKS, UN TRUAND NOTOI-Re. lUlTIMATUM AYANT PReSqUe TOUCh SA FIN, GIveNS vIeNT lA ReNCONTRe DU GANGSTeR. Ce DeRNIeR PANIqUe eT SORT SON CAlIBRe MAIS GIveNS DGAINe le PRe-MIeR eT lABAT eN PleIN MIlIeU De lA FOUle. CTAIT jUSTIFI .

    Bien quil ait tir en tat de lgitime d-fense, le procureur ne lentend pas de cette oreille et le fait transfrer harlan, ville minire de son enfance au fin fond du Ken-tucky. Adieu bimbos gonfles de Floride, bon-jour hillbillies racistes, incultes, (plus ou moins ) consanguins et laborantins du dimanche ver-ss dans la cuisine de mthamphtamines au fond des bois. Notre hros est confront une galerie de portraits du cru, commencer par son pre, Aldo, escroc la petite semaine englu dans diverses magouilles foireuses, tandis que son cur balancera entre une blonde beaut redneck un peu rustre, Ava, et son ex femme, wynona. Cependant, harlan, cest le clan Crowder, petite entreprise familiale du crime, qui tient le haut du pav et le march de la drogue. Raylan Givens aura tt fait de se le faire rappeler par Boyd Crowder (walton Goggins), suprmaciste blanc tatou, aussi givr quil a la gchette (de lance roquette) facile.

    Au vu du pitch de dpart, on aurait pu satten-dre une srie badass dans le style de Sons Of Anarchy ou The Shield. Si le contexte de la pe-tite ville de ploucs est original et change des sries policires classiques, avec sa bande-son trs rfrence, les accents locaux et autres dia-logues cinglants, aucun doute possible, nous sommes bien dans un western moderne. Ce-pendant, sur la forme, on assiste des enqutes assez classiques presque type un mchant par pisode qui lasseraient vite si elles ntaient pas relies dune manire ou dune autre la trame principale, en loccurrence les Crowder et les consquences du meurtre de Tommy Bucks (les Cartels hlas noublient jamais). On remer-ciera aussi les scnaristes de nous pargner le cliffhanger rptition chaque fin dpisode

    comme cela est devenu la quasi obligation pour la plupart des sries. Moins de suspense forc donc, mais un suspense qui pour le coup fonctionne dautant mieux.

    On notera lintressante manire de traiter les liens entre le fils et le pre Givens. le premier choisi le ct de la loi et son pre lautre bord, cela amenant dimprobables situations, o le pre se fait rprimander comme un gamin de huit ans par son propre fils. Pour la relation Raylan/Ava/wynona, Ava, la blonde, ne tient pas une seconde la route face lex femme, wynona, rayonnante malgr les tensions avec Raylan. la premire a pour seuls intrts dtre le joli petit lot du coin, davoir une propension maladive se faire enlever et denchaner bour-des sur bourdes la moindre occasion. Aussi, sur le papier, ce triangle ntait pas une mau-vaise ide, mais il se retrouve plomb par Ava, impratrice des boulets purs, et ne fonctionne pas comme il devrait.

    Cest l un moindre mal rattrap haut la main par la performance de notre fameux transfuge du Shield, walton Goggins/Boyd Crowder trans-cendant chacune de ses scnes la manire

    dun Omar little du wire. Tour tour mchant ou touchant, son rle de bad guy illumin est dune rare intensit et nous incite croire qu aucun moment il ne joue. Il semble incarner corps et

    me ce personnage aussi effi-cacement dans laction que dans le pathos ou encore quand il se rapproprie la Gense pour justifier ses mfaits. Son volution est intres-sante puisquil arrive en vritable pourriture avant dinsidieusement instaurer une relation je taime moi non plus avec notre hros. Il est clairement lun des personnages les plus profonds et ambivalents de lunivers des sries.

    Srieuse et originale, justified souffle ainsi un vent dair frais parmi la multitude de sries poli-cires trop lisses et politiquement correctes du moment. A dfaut daction ptaradante jusqu plus soif, elle simpose par son ambiance, un cast convaincant (walton Goggins en tte) et une bonne trame principale. Sans fioritures et avec un rythme assez lent sans tre plan-plan, cette srie se sirote comme un bon vieux bour-bon... du Kentucky. ludovic Marthe-Rose

    jUSTIFIeD : weSTeRN MODeRNe

    eveNeMeNT SleCTION Tv

    Un vent dair frais sur la srie

    policire

    1 : Full Metal jacket (1987) ; 2 : Shining (1980) ; 3 : eyes wide Shut (1999)

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  • wAR AND DeSTINY Ralis par Richard AttenboroughAvec Shirley Maclaine, Christopher Plummer, Mischa Bartonditeur : Aventi Distribution15 mars 2011

    Fresque historique mlant deux temporalits, war and Destiny nh-

    site pas faire des allers-retours entre les annes 40 aux etats-Unis et les annes 90 en Irlande du Nord, alternant la seconde guerre mondiale et la situation bancale de Belfast. Surprenant rapprochement pour faire concider une mme histoire, celle dethel Ann. Ambitieux mais confus le film nous donne loccasion de retrouver le grand Pete Postlethwaite rcemment disparu.

    DvD / BlU-RAY

    DvD | 20 |

    DvD / BlU-RAY

    DvD | 21 |

    vOUS Allez ReNCONTReR UN Bel eT SOMBRe INCONNU De woody AllenAvec : Naomi watts, Antonio Banderas, josh Brolin editeur : warner BrosSortie Blu-ray : 30 mars 2011Film : 3,5 / 5 Blu-ray : 3 / 5

    Alfie, terrifi lide de vieillir, quitte, aprs quarante ans de mariage, sa femme helena. Aprs une tentative de suicide, helena trouve un rconfort inattendu auprs dune voyante. Celle-ci lui promet un destin plus heureux : vous allez rencontrer un grand inconnu tout de noir vtu Si woody Allen se rpte (il faut malheureusement lavouer), il le fait avec lgance. Car au del des thmes familiers que le film aborde (le sexe, la peur, la mort), la narration, tourbillon potique, nous embrasse comme cet inconnu sur laffiche. Conte choral, vous allez rencontrer...fait le portrait crois de quelques destines sentimentales. londres, qui met woody Allen dhumeur noire, est ici le thtre dune crise multignrationnelle. en effet, lauteur a largi son champ depuis whatever works et le troisime ge (moderne) nest plus un cas de second plan. Dans vous allez rencontrer..., cest le couple dAlfie et dhelena qui, le premier, se brise

    en mille morceaux. woody Allen filme alors londe de choc. Il montre quel point les hsitations mettent plat les certitudes et comment les illusions se dressent contre la ralit. en donnant chaque personnage (une douzaine) sa dramaturgie propre, le ralisateur fait le tableau juste et ptrifiant de cratures qui se dbattent contre la fatalit. Naomi watts, pour la premire fois sous lobjectif du matre, na jamais paru si naturelle. hopkins fait parfois revivre, par ses mimiques, le personnage de woody Allen lcran, nous rappelant comme il tait bon de le voir sagiter comme un fou. Mais aujourdhui, le cinaste voit trop clair lhumanit souffrante. A New York, le cynisme est le remde. A londres, ce sont les illusions. quen sera-t-il pour Paris ? Ct bonus : la bande annonce du film et celle de vicky Cristina Barcelona, cest tout. Pour les fans, cest extrmement dcevant. On aurait aim un making-of ou quelques mots de woody. Cela dit, le blu-ray rend grce limage. le travail sublime de vilmos zsigmond, qui collabore pour la troisime fois avec Allen (Melinda et Melinda et le Rve de Cassandre), est sublim : les verts et les noirs sont vifs, les roses et les rouges aussi. Cela donne la ville de londres un aspect presque irrel. Deux versions : une franaise (mais quel sacrilge de ne pas couter du woody Allen dans la langue originale) et une anglaise sous-titre. Comme dit Shakespeare, cit en exergue, beaucoup de bruit et de fureur mais le tempo est mineur. Ava Cahen

    A bas le despotisme masculin ! Suzanne en a marre dtre la potiche de service. Alors que son mari prend un cong maladie, elle reprend les rnes de lempire du parapluie. Naissance dune femme dactionComdie dcale ? Rat. vaudeville ti-de la rigueur. Car Franois Ozon loupe le coche. A cheval sur plusieurs directions (satire bourgeoise, farce politique, portrait de famille), le ralisateur sparpille et offre un spectacle aussi dcousu que maladroit. Rsultat : un patchwork dides fausse-ment rvolutionnaires (dconstruction du systme patriarcal au profit de lapproche maternelle).Au centre du dispositif, Suzanne, incarne par Ca-therine Deneuve, met en marche la mutinerie. Mais son combat ressemble davantage celui de la Re-vanche dune blonde qu ceux que poursuivent Bernadette ou Sgolne. Ce quon aime chez Ozon, cest sa thtralit, son agilit face au comique de situation mais, dans Potiche, la magie nopre pas. la faute la caricature, au kitsch peu savoureux et lidologie pseudo-fministe. France Tlvision joue sur linteractivit et a marche. Car en dpit de ce que lon pense du film, il est toujours attrayant de visiter les coulisses dun tournage, de voir ce quil se passe hors-champ. Plus dune heure de ma-king-of, un btisier savoureux, un court-mtrage de Franois Ozon (Un lev de rideau) ; le travail de complment est, ici, payant. la bonne humeur des comdiens et lenthousiasme du cinaste nous fe-raient presque passer lponge sur les faiblesses et la prolixit du long-mtrage. Ava Cahen

    encadrs par Pascaline, leur maitresse, les enfants dune cole de maternelle de Seine et Marne vont faire lexprience de la philosophie. Peut-on philosopher quatre ans ? question ardue que soulve Ce nest quun dbut. Mais, clairement convaincus par la dmarche de linstitutrice, les ralisateurs ne prennent en compte que lenthou-siasme que le projet suscite, ngligeant les limites quil peut rencontrer (on se demande parfois en quoi lenseignement de Pascaline diffre de lensei-gnement classique). la vision unique que supporte le documentaire affecte, de ce fait, la pertinence de lexercice. Cest un peu le mme genre de problme que dans Bonobos de Tixier : le spectacle finit par rogner les contours du sujet. Si lexprience que le documentaire relate nous laisse un peu dubitatif, les bons mots des enfants sur les thmes de socit ou sur les questions mo-rales valent leur pesant dor. Malheureusement, cela ne suffit pas nous convaincre car le rythme lent et le dcoupage artificiel, cela malgr la beaut de la photo, aseptisent le rsultat. quon se rassure, les modules du DvD ( Autour du film ) viennent poursuivre la rflexion : parents et instituteurs sexpriment sur lexprience, ses rsultats et ses avantages. Tout est mis en scne pour dmon-trer la valeur du projet mais les ides sont davantage creuses. Ct version, pas de surprise majeure : le 2.0 et le Dolby 5.1 se valent sensiblement. Interactif et pdagogique certainement. Philosophique, on se demande encore. Ava Cahen.

    Attention : Monsters est TOUT sauf un film de mons-tres. le cadre scnaristique importe peu, on aurait pu tre dans nimporte quelle guerre, le vritable enjeu naurait pas vari dun iota : le rapprochement amoureux de deux paums en terre inconnue. Port par lrotisme saillant de ses hros, le film de Gareth edwards a cela dadmirable quil devient peu peu le rceptacle de toutes nos peurs d hommes , peur de lautre, peur du destin trac, peur de lternelle amertume lune des grandes forces de Monsters, cest sa capacit immerger le spectateur dans un monde a priori fantastique. Tout dans la forme du film participe un rendu raliste, brutal, de mati-res dimages de reportages comme drobes. les cratures se posent comme une forme mouvante cristallisant toutes nos angoisses. le dpaysement devient alors la sphre idale pour la naissance des sentiments. Monsters est en cela assez unique car il rsulte dune exprience de laboratoire qui consiste mler plusieurs genres cinmatographiques, pour en crer un nouveau, passionnant. Comment ne pas succomber au romantisme troublant de ces deux amants fuyant dans la nuit ? Comment ne pas tre hypnotis par cette nergie lyrique du dsespoir chercher une issue ? la qualit visuelle du Blu-Ray est stupfiante (tour-nage en hD oblige), et niveau son , on en redeman-de ! On aurait forcment espr plus de bonus mais on se contentera des interviews de Gareth edwards et des acteurs whitney Able et Scoot Mc Nairy ; plus de 37 minutes au final, cest mieux que rien ! Romain Dubois

    POTIChe Ce NeST qUUN DeBUT Ralis par : jean-Pierre Pozzi et Pierre

    BarougierAvec : Isabelle Duflocq, Pascaline Dogliani editeur : France Tlvisions Distribu-tion

    Sortie DvD : 23 mars 2011

    Film : 3,5 / 5 DvD : 3 / 5

    MONSTeRS

    Ralis par : Gareth edwards (II)Avec : whitne