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No 32 mai - août 2004/II ISSN 0378-5092

Europe 123, GR-570 01 Thessalonique (Pylea)Adresse postale: PO Box 22427, GR-551 02 ThessaloniqueTél. (30) 2310 490 111 Fax (30) 2310 490 099E-mail: [email protected] Page d’accueil: www.cedefop.eu.intSite interactif: www.trainingvillage.gr

Revue européenne Formation professionnelle

No 32 mai - août 2004/II

De la divergence à la convergence Une histoire de la formation et de l'enseignement professionnels enEurope

Recherche

Les «systèmes» européens de formation professionnelle - réflexions sur le contexte théorique de leur évolution historiqueWolf-Dietrich Greinert

Entre école et enterprise. Aspects de l'évolution historique de la formation et de l'enseignement professionnels aux Pays-Bas et en Allemagne dans une perspective comparativeDietmar Frommberger et Holger Reinisch

Modèles, paradigmes ou cultures de la formation et de l'enseignement professionnelsAnja Heikkinen

La politique commune de formation professionnelle dans la CEE de 1961 à 1972Francesco Petrini

Les syndicats et la relance de la politique sociale européenne Maria Eleonora Guasconi

Le rôle de la formation et de l'enseignement professionnels dans la politique sociale européenne et le CedefopAntonio Varsori

La place de la formation professionnelle dans l'idée d'espace social européen de François Mitterrand (1981-1984)Georges Saunier

Rubrique bibliographique réalisée par le service de documentationdu Cedefop, avec l’appui des membres du réseau européen deréférence et d’expertise (ReferNet)Anne Waniart

Une histoire de la formation professionnelle en EuropeDe la divergence à la convergence

Une histoire de la formation professionnelle en EuropeDe la divergence à la convergence

Prix au Luxembourg, TVA exclue:Par numéro EUR 10Abonnement annuel EUR 20

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CedefopCentre européen

pour le développementde la formationprofessionnelle

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Le Cedefop apporte son concours à la Com-mission en vue de favoriser, au niveau com-munautaire, la promotion et le dévelop-pement de la formation et de l’enseigne-ment professionnels, grâce à l’échange d’in-formations et à la comparaison des expé-riences sur des questions présentant un in-térêt commun pour les États membres. Le Cedefop constitue un lien entre la re-cherche, la politique et la pratique en ai-dant les décideurs politiques, les partenairessociaux et les praticiens de la formation, àtous les niveaux de l’Union européenne, àacquérir une compréhension plus claire desdéveloppements intervenus en matière deformation et d’enseignement profession-nels, leur permettant ainsi de tirer des conclu-sions en vue de l’action future. Par ailleurs,il encourage les scientifiques et les cher-cheurs à identifier les tendances et les ques-tions futures.La Revue européenne «Formation profes-sionnelle» est prévue à l’article 3 du règle-ment fondateur du Cedefop du 10 février1975.Il n’en demeure pas moins que la Revue estindépendante. Elle s’est doté d’un comitéde rédaction évaluant les articles selon laprocédure du double anonymat - les membresdu comité de rédaction, et notamment lesrapporteurs, ignorent qui ils évaluent, etles auteurs ignorent par qui ils sont évalués.Ce comité, présidé par un chercheur aca-démique reconnu, est composé de cher-cheurs scientifiques auxquels s’adjoignentdeux experts du Cedefop, un expert de laFondation européenne pour la formation(ETF) et un représentant du Conseil d’ad-ministration du Cedefop.La Revue européenne «Formation profes-sionnelle» dispose d’un secrétariat de ré-daction composé de chercheurs scienti-fiques confirmés.La Revue figure sur la liste des revues scien-tifiques reconnue par l’ICO (Interuniver-sitair Centrum voor Onderwijsonderzoek)aux Pays Bas et est indéxée à l’ISBB (Inter-national Bibliography of the Social Sciences).

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Si vous souhaitez contribuer par un article, cf. page 110

Publié sous la responsabilité de:Johan van Rens, DirecteurStavros Stavrou, Directeur adjoint

Responsables de la traduction:Sylvie Bousquet;Amaryllis Weiler-Vassilikioti

Maquette: Zühlke Scholz & Partner GmbH, Berlin

Couverture: Panos Haramoglou, M. Diamantidi S.A., Thessalonique

Production technique avec micro-édition:M. Diamantidi S.A., Thessalonique

Clôture de la rédaction: juillet 2004

Reproduction autorisée, sauf à des fins com-merciales, moyennant mention de la source.

N° de catalogue: TI-AA-04-032-FR-C

Printed in Belgium, 2004

La publication paraît trois fois par an en allemand,anglais, espagnol, français et portugais.

En portugais, la Revue européenne «Formationprofessionnelle» est disponible auprès de: DEEP/CIDCentre de Informaçaõ e DocumentaçãoMinistério do Trabalho e da SolidariedadePraça de Londres 2-2°P - 1049-056 LisboaTél. (351-21) 843 10 36Fax (351-21) 840 61 71E-mail: [email protected]

Pour les autres langues voir en 3e de couverture

Les opinions des auteurs ne reflètent pas obligatoirement la position du Cedefop.Les auteurs expriment dans la Revue européenne «Formation professionnelle» leuranalyse et leur point de vue individuels qui peuvent être partiellement contra-dictoires. La Revue contribue ainsi à élargir au niveau européen une discussionfructueuse pour l’avenir de la formation professionnelle.

Comité de rédaction:Président:

Martin Mulder Université de Wageningen, Pays-Bas

Membres:

Steve Bainbridge Cedefop, Grèce

Juan José Castillo Université Complutense de Madrid, Espagne

Jean-Raymond Masson Fondation européenne pour la formation, Turin, Italie

Teresa Oliveira Université de Lisbonne, Portugal

Hilary Steedman London School of Economics and Political Science,

Centre for Economic Performance, Royaume-Uni

Ivan Svetlik Université de Ljubljana, Slovénie

Manfred Tessaring Cedefop, Grèce

Éric Verdier Centre National de la Recherche Scientifique,

LEST/CNRS, Aix en Provence, France

Secrétariat de rédaction:Erika Ekström Ministère de l’industrie, de l’emploi et de la

communication, Stockholm, Suède

Ana Luísa Oliveira de Pires Groupe de recherche Éducation et Développement -

FCT, Université Nova de Lisbonne, Portugal

Rédacteur en chef:Éric Fries Guggenheim Cedefop, Grèce

Secrétaire de la revue:Titane Delaey Cedefop, Grèce

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En janvier 2000 a lancé le Centre euro-péen pour le développement de la forma-tion professionnelle (Cedefop) l’idée de mon-ter un projet de recherche sur «l’histoire eu-ropéenne de la formation professionnelle».L’objectif principal de ce projet est de par-venir à une meilleure compréhension dela structure actuelle des différents systèmesde formation professionnelle en Europe, enmettant en évidence les évolutions histo-riques tant au niveau national qu’au niveauinternational et en faisant ressortir l’influencemutuelle croisée de la formation profes-sionnelle et de l’intégration européenne l’unesur l’autre. Le projet part du principe qu’unesolide connaissance de l’évolution historiqueest un prérequis indispensable à la bonnecompréhension et interprétation des pro-cessus et événements contemporains (1).

Sous l’égide de ce projet et du Cedefop s’esttenue, les 11 et 12 octobre 2002 à Florence,la première conférence internationale sur«L’histoire de la formation professionnelleen Europe dans une perspective compara-tive», organisée par l’université de Floren-ce et l’Institut universitaire européen.

Au cours de ces deux journées ont été pré-sentées pas moins de 18 contributions. Lapremière journée portait sur le développe-ment des systèmes de formation profes-sionnelle dans un ou plusieurs pays euro-péens. La seconde portait sur le rôle de laformation professionnelle dans la poli-tique sociale de la Communauté européen-ne, puis de l’Union européenne. Les actesde cette conférence font l’objet d’une pu-blication en deux tomes intitulée «Une his-toire de la formation professionnelle en Eu-rope» dont le premier est édité par GeorgHanf du Bundesinstitut für Berufsbildung(BIBB) et Wolf-Dietrich Greinert de la Tech-

nische Universität de Berlin et le second estédité par le professeur Antonio Varsori del’université de Padoue.

La richesse des matériaux présentés et l’im-portance des objectifs visés tant par le pro-jet «Histoire» que par la conférence de Flo-rence ont conduit le Cedefop à prendre deuxinitiatives supplémentaires permettant d’ac-croître la portée et d’élargir la diffusiondes résultats de la conférence : une exposi-tion itinérante tout d’abord, un numéro spé-cial de la «Revue européenne Formation pro-fessionnelle» ensuite.

L’idée d’une exposition itinérante sur l’his-toire de la formation professionnelle en Eu-rope a été lancée par Norbert Wollschläger,expert du Cedefop, qui en a géré la réali-sation et la première présentation dans lagalerie du Cedefop à Thessalonique. L’ex-position en elle-même a été conçue par Hel-ga Reuter-Kumpmann, consultante en ma-tière d’expositions, et montée en associationavec l’exposition allemande sur la sécuritéet la santé au travail (Deutsche Arbeits-schutzausstellung (2) - DASA). La premièreprésentation de l’exposition a attiré plus de2000 visiteurs à Thessalonique. Le livret del’exposition est repris ci-dessous dans ce nu-méro de la Revue européenne.

Pour ce qui est de la Revue européennel’idée d’un numéro spécial a été retenue parle comité de rédaction en raison de la convic-tion unanime de ses membres que la construc-tion de l’avenir de la formation profession-nelle en Europe ne pouvait être une réussi-te qu’à la condition d’une connaissance so-lide de ses antécédents historiques. L’avenirse nourrit du passé. Par ailleurs, l’un des ob-jectifs de la Revue européenne est de fa-voriser la recherche en matière de forma-

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NorbertWollschlägerExpert de laformationprofessionnelleAnimateur de la"Galerie d'exposition"du Cedefop

Éric FriesGuggenheimRédacteur en chef dela Revue européenneFormationprofessionnelle

(1) Cf. le site web du projet à l’adres-se: http://history.cedefop.eu.int/

(2) Cf. le site du DASA à l’adresse:http://www.baua.de/dasa/index.htm

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tion professionnelle en Europe. Or, la Re-vue ne reçoit que très peu de propositionsd’articles sur l’histoire de la formation pro-fessionnelle. Nous espérons par ce numérospécial susciter de nouvelles contributionssur l’histoire de la formation profession-nelle en Europe et, autant que possiblepuisque c’est un des critères de sélection dela Revue, dans une perspective comparati-ve.

La problématique de ce numéro spécial suitd’assez prêt celle qui s’est spontanément dé-gagée de la conférence de Florence et quia été reprise dans le sous titre de l’exposi-tion itinérante sur une histoire de la for-mation professionnelle en Europe : de la di-vergence à la convergence.

Car, s’il est vrai que dans un passé assez éloi-gné la formation professionnelle suivait par-tout en Europe le même moule de l’ap-prentissage dans le cadre des corporationsde métier, il n’en reste pas moins qu’avec larévolution industrielle et l’abandon des cor-porations, les systèmes nationaux de for-mation professionnelle se sont grande-ment différenciés en fonction des caracté-ristiques sociétales de chaque nation. Onpourrait ainsi dire, sans grand risque d’êtrecontredit, que chaque nation a son propresystème de formation professionnelle, maisil faut bien admettre qu’une telle conclusionest fort peu éclairante et encore moins opé-rationnelle. On peut cependant parvenir àorganiser de façon plus lisible le spectre desdifférents systèmes de formation, justementau moyen de l’analyse historique. C’est ceque fait le professeur Wolf-Dietrich Greinertdans son article intitulé «Systèmes de for-mation professionnelle européens, quelquesréflexions sur le contexte théorique de leurdéveloppement», qui aboutit de la sorte àun modèle permettant de classer tant bienque mal les différents systèmes européensen trois groupes seulement. Cela reste unmodèle sans aucun doute, avec ses hypo-thèses simplificatrices toujours critiquables,mais un modèle très suggestif et stimulant.

Il semble donc possible et utile d’arriver àune classification scientifique des différentsmodèles de formation professionnelle. Il est,en revanche, bien plus difficile d’expliquerpourquoi deux nations tout à fait compa-rables quant à leur profil historique de dé-veloppement économique et social peuventen définitive finir par adopter deux systèmesde formation professionnelle appartenant

indiscutablement à deux catégories totale-ment différentes. C’est très clairement l’in-terrogation que l’on retrouve dans l’articlede Holger Reinisch et de Dietmar Fromm-berger intitulé «Entre école et entreprise - lestraits du développement de la formation pro-fessionnelle aux Pays-Bas et en Allemagnedans une perspective comparative». Leur ar-ticle est d’ailleurs plus un programme de re-cherche qu’une réponse à la question po-sée qu’ils ne prétendent d’ailleurs pas avoirrésolue. Nous espérons bien que cette contri-bution fera des émules et que des tentativesd’explication, y compris dans le cadre d’autrescontextes sociétaux, feront l’objet de pro-positions d’articles à la Revue.

Des éléments de réponse nous sont cepen-dant déjà proposés par Anja Heikkinen danssa contribution «Modèles, paradigmes ou cul-tures de formation professionnelle». Ellemontre bien, en partant de l’exemple du dé-veloppement de la formation profession-nelle continue en Europe du Nord et en Al-lemagne, que l’émergence et la transforma-tion de systèmes nationaux peuvent être lerésultat de la concurrence entre différentes« conceptions culturelles» de la formationprofessionnelle, portées par des acteursindividuels ou collectifs et dans une viséetant infranationale que nationale et supra-nationale. L’approche culturelle développéepar Anja Heikinnen conçoit l’éducation com-me coconstitutive tant de la culture que desprojets et des programmes aux niveaux in-dividuel, collectif ou sociétal. En réalité, l’ob-jet de son article va bien au-delà de la simpleanalyse comparative des modes de déve-loppement de la formation continue en Eu-rope du Nord. Ce qu’elle souhaite faireapparaître c’est en fait le rôle des historienset les conséquences pratiques de leur tra-vail. Pour elle en effet, c’est en reconnais-sant et en rendant visibles certaines entités,certains phénomènes, certains changementset/ou continuités déterminants dans le do-maine de la formation professionnelle queles historiens et les chercheurs en généralsont, en dernière instance, appelés à codé-finir le travail et l’éducation au niveau in-franational, national et supranational.

Face à cette diversité des systèmes de for-mation professionnelle en Europe, des ten-dances à rechercher des convergences vontse faire jour avec l’intégration européenne.Les différentes institutions européennes ontvu leurs compétences s’accroître, en parti-culier avec l’Acte unique européen, le trai-

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té de Maastricht, la naissance de l’Union eu-ropéenne et l’introduction de l’euro. Pour-tant, nous dit Franceso Petrini dans son ar-ticle «La politique commune de formationprofessionnelle dans la CEE de 1961 à 1972»,alors que l’article 128 du traité de Rome eston ne peut plus clair quant à la volonté dedévelopper une politique commune en ma-tière de formation professionnelle, cette po-litique commune n’a pas vu le jour. Celas’explique notamment par les résistances del’Allemagne et de la France, qui disposaientdéjà de systèmes de formation profession-nelle bien développés et étaient peu dispo-sées à prendre en charge le coût de la re-qualification de la main-d’œuvre de l’Italiedu Sud. Cet échec s’explique par ailleurségalement par la lutte entre les forces cen-tralisatrices du développement européen etles forces en réaction de gouvernementscherchant à restreindre les ambitions de laCommission et à défendre leur souverai-neté. Il faudra, nous dit Petrini, le change-ment du climat sociopolitique et le début dela crise du milieu des années 1970 pour queles États soient forcés d’envisager de nou-velles formes de coopération et c’est sur cesbases que l’idée de la création d’un Centreeuropéen sur la formation professionnelles’est d’ailleurs dessinée.

Comme le montre Eleonora Guasconi dansson article sur «Les syndicats et la relance dela politique sociale européenne», pour lessyndicats européens la création de cet or-ganisme était de nature à intervenir de sor-te que la formation professionnelle puisseréellement bénéficier aux travailleurs, leurpermettant de faire face aux bouleverse-ments des années 1960 et à la crise desannées 1970. C’est dans le but explicite d’êtredavantage représentés dans la Commu-nauté européenne et de développer une po-litique sociale européenne commune dansle domaine de l’emploi et de la formationprofessionnelle que les syndicats européensont poussé à la création du Cedefop et l’ontobtenue en 1975.

La création du Cedefop aura été, commele montre le professeur Antonio Varsori danssa contribution intitulée «Le rôle de la for-mation et de l’éducation professionnelledans la politique sociale européenne et leCedefop», à la fois une avancée dans le sensd’une plus grande convergence en matièrede formation professionnelle en Europe, lemoyen de faire face aux besoins de pro-mouvoir la recherche en matière de for-

mation professionnelle et de développer leséchanges dans ce domaine parmi les Étatsmembres de la Communauté européenne,et un ballon d’essai dans une expérimen-tation qui allait conduire à la création detoute une série d’agences spécialisées.

Pourtant, la convergence entre systèmes deformation professionnelle en Europe restelente et problématique, tant les États natio-naux s’attachent à leurs prérogatives natio-nales en matière éducative et au principede subsidiarité dans ce domaine. Comme lemontre Georges Saunier dans «La place dela formation professionnelle dans l’idée d’es-pace social européen de François Mitter-rand (1981-1984)», dans le domaine de laformation professionnelle comme dansd’autres, la capacité intégrative de l’Europeréside avant tout dans la réaction aux condi-tions économiques et sociales du moment.«Alors qu’on pourrait la croire irrémédia-blement problématique, la diversité euro-péenne s’efface - sans pour autant dispa-raître - devant la nécessité. Dans ce domainecomme dans d’autres, la capacité intégra-tive de l’Europe réside avant tout dans ladéfinition d’intérêts communs. La conver-gence et, notamment, la convergence dessystèmes éducatifs, n’en étant que la consé-quence».

Effectivement, depuis le milieu des années1980, la tendance à la convergence de la for-mation professionnelle en Europe sembles’être accélérée selon ce principe. On repè-re les intérêts communs à l’Union, on défi-nit des objectifs à moyen et long termes per-mettant de sauvegarder ses intérêts et c’estsur cette base que se fait l’intégration, de fa-çon indirecte et «volontaire». C’est au Con-seil de Lisbonne que, pour la première fois,les chefs d’État et de gouvernement ont trai-té de questions touchant à la politique édu-cative. Puis à Bruges, en 2001, les Directeursgénéraux de la formation professionnelledes États européens ont adopté une initia-tive confirmée par la déclaration de 31 mi-nistres de l’éducation à Copenhague en 2002,par laquelle les États européens se sont en-gagés dans un processus de coopération ac-cru en matière de formation professionnel-le, façon à peine voilée de pousser à laconvergence au travers d’objectifs commela transparence, la qualité de la formation,la reconnaissance mutuelle des compétenceset des qualifications, le développement dela mobilité et de l’accès à la formation toutau long de la vie. Tout autant de thèmes très

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régulièrement traités dans les pages de notreRevue au fil de ses différents numéros.

L’ensemble des articles réunis dans ce nu-méro soulignent la nécessité de la réflexionhistorique, au delà de son importance dansla construction de l’avenir, pour mieux sepositionner dans le présent.

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SommaireDe la divergence à la convergence ................................................................................Une histoire de la formation et de l'enseignement professionnels en Europe

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Les «systèmes» européens de formation professionnelle - réflexionssur le contexte théorique de leur évolution historique ...........................................Wolf-Dietrich GreinertL'auteur identifie trois types généraux de systèmes de FEP sur la base d'une analyse dia-chronique commençant avec la révolution industrielle: le modèle de l'économie de mar-ché libérale en Grande-Bretagne, le modèle bureaucratique d'État en France et le mo-dèle dual en Allemagne.

Entre école et enterprise. Aspects de l'évolution historique de la formation et de l'enseignement professionnels aux Pays-Bas et en Allemagne dans une perspective comparative ................................................Dietmar Frommberger et Holger ReinischÀ l'heure actuelle, nous ignorons les raisons exactes pour lesquelles l'enseignement pro-fessionnel a suivi une évolution différente dans des pays dont les contextes économiqueset sociaux sont similaires. En effet, rares sont les études qui traitent de ce sujet. Cet articledevrait permettre de pallier les lacunes dans ce domaine de recherche.

Modèles, paradigmes ou cultures de la formation et del'enseignement professionnels .....................................................................................Anja HeikkinenCet article s'interroge sur le rôle des chercheurs en éducation et de l'histoire de l'éduca-tion en tant que base constitutive du discours politique et pratique sur l'enseignement pro-fessionnel, en prenant pour exemple le débat sur l'éducation continue en Finlande, dansles pays nordiques et en Allemagne.

La politique commune de formation professionnelle dans la CEE de 1961 à 1972 ............................................................................................Francesco PetriniL'article 128 du traité de Rome est on ne peut plus clair quant à la volonté de développerune politique commune en matière de formation professionnelle. Or, cette politiquecommune n'a pas été mise en œuvre. Cet article vise à expliquer pourquoi.

Les syndicats et la relance de la politique sociale européenne ...............................Maria Eleonora GuasconiL'objectif de cet article est d'éclairer une série d'initiatives prises par les syndicats européensau début des années 1970 afin de promouvoir le développement d'une politique socialeeuropéenne en traitant des questions d'emploi et de formation professionnelle.

Le rôle de la formation et de l'enseignement professionnels dans la politique sociale européenne et le Cedefop ..................................................Antonio VarsoriCet article, largement basé sur des archives, examine la création du Cedefop et l'évolutionde ses activités jusqu'à son transfert à Thessalonique au milieu des années 1990.

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La place de la formation professionnelle dans l'idée d'espace social européen de François Mitterrand (1981-1984) ............................................................Georges SaunierLe concept d'«espace social européen», tel que proposé par François Mitterrand à ses par-tenaires de la Communauté en 1981, se transformera sous la pression des événements.Cette transformation va faire de la formation professionnelle l'une des priorités de ce pro-jet d'Europe sociale de la gauche française.

À lire

Choix de lectures .............................................................................................................Anne WaniartRubrique réalisée par la service documentation du Cedefop, avec l’appui des membres du réseau européen de référence et d’expertise (ReferNet)

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«Si notre jeunesse est et continue d'être

éduquée correctement,note cité prospèrera,

sinon...le pire est à craindre»

Platon

De la divergence à la convergenceUne histoire de la formation et de l’enseignement professionnels en Europe

Organisateur de l'exposition et coordinateur du projet: Norbert WollschlägerConception et textes: Helga Reuter-Kumpmann

Les textes sont extraits des contributions àla conférence sur «L’histoire de la formationet de l’enseignement professionnels enEurope dans une perspective comparative»,organisée par le Cedefop à Florence en oc-tobre 2002.

Pourquoi une exposition sur l’histoirede la formation et de l’enseignementprofessionnels en Europe?

Pour choisir où l’on va, on doit savoir d’oùl’on vient.

«Le Conseil européen de Lisbonne de mars2000 a reconnu l’importance du rôle quejoue l’éducation dans les politiques écono-miques et sociales dont elle fait partie in-tégrante, d’une part comme instrument durenforcement de la compétitivité de l’Euro-pe dans le monde et, d’autre part, commegarante de la cohésion de nos sociétés et duplein développement des citoyens. Le Con-seil européen a fixé comme objectif straté-gique à l’Union européenne de devenir l’éco-nomie de la connaissance la plus dynamiquedu monde. Le développement d’une for-mation et d’un enseignement professionnelsde grande qualité est un élément crucial etfait partie intégrante de cette stratégie, no-tamment pour ce qui est de promouvoir l’in-clusion sociale, la cohésion, la mobilité, lacapacité d’insertion professionnelle et la com-pétitivité.L’élargissement de l’Union européenne confè-re une nouvelle dimension et crée un cer-tain nombre de défis, de possibilités et d’exi-gences dans le cadre des travaux consacrésà la formation et à l’enseignement». Déclaration de Copenhague, novembre 2002.

«Chacun de nos pas en avant et chaque pro-blème résolu nous permettent, non seule-ment de découvrir de nouveaux problèmes

non résolus, mais aussi de prendre conscien-ce que l’environnement dans lequel nousévoluons, stable à nos yeux, est en fait in-certain». Karl R. Popper (1902-1994), apprenti char-pentier et philosophe des sciences ayantabandonné prématurément ses études.

Que nous apprend cela?Plusieurs choses surprenantes:❑ au Moyen-Âge, la formation et l’ensei-gnement professionnels étaient identiquesdans la plupart des pays européens;❑ pourquoi différents types de formationet d’enseignement professionnels totalementnouveaux sont apparus dans les différentspays européens au cours des XVIIIe et XIXe

siècles;❑ quelles caractéristiques communes ontété élaborées en Europe au cours des 50dernières années.Cette exposition nous enseigne égalementque l’histoire de la formation et de l’ensei-gnement professionnels est toujours notrepropre histoire et que notre point de vue nedoit pas nécessairement rejoindre celui deshistoriens qui se sont exprimés sur ce sujet.

Des origines communesDans presque tous les pays européens etdes siècles durant après la création des guildes,le travail des artisans et leur formation et en-seignement professionnels sont très simi-laires.Les guildes sont des associations qui, à par-tir du XIIe siècle, regroupent les artisans d’unemême ville appartenant à un même corpsde métier. Elles édictent leurs propres règleset règlements contraignants pour tous leursmembres. Ces codes définissent les méthodesd’exécution des ouvrages et fixent des prix«attractifs». Les marchandises font l’objet d’uncontrôle de qualité strict.

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Les règles de la guilde veillent à ce que:

❑ les revenus des maîtres correspondent àleur statut;❑ les membres les plus démunis soient prisen charge, y compris les veuves et les or-phelins des membres de la guilde.

Les règles établissent également les obliga-tions des membres de la guilde et les exi-gences en matière de formation des apprentiset des compagnons. Dans la plupart desvilles, les guildes jouent un rôle politique etéconomique important. Toutefois, leur in-fluence sur les affaires civiques est sourcede conflits, notamment quand les guildes in-terdisent aux non membres de s’établir etd’exercer leur métier.

Au XVIIIe et au début du XIXe siècles, l’in-fluence des guildes en Europe perd beau-coup de son importance.

La doctrine économique libérale, favorableau «libre jeu des forces», considère les guildestraditionnelles comme un obstacle à la concur-rence et au libre échange.

La formation et l’enseignementprofessionnels dans les guildes

Dans toute l’Europe, les guildes sont régiespar une hiérarchie stricte: apprenti, compa-gnon, maître. Le titre de maître est la seulepreuve écrite de la compétence, tandis queles «certificats d’apprentissage» marquent la

fin de la première étape de la formation. (Lesfemmes - veuves ou servantes des maîtres- n’occupent qu’un rôle subordonné d’assis-tantes.) Les apprentis ne sont acceptés dansla guilde qu’à l’issue d’une période d’essaide plusieurs semaines. La famille verse gé-néralement une contribution au maître pourcouvrir les frais de subsistance et de loge-ment de l’apprenti. En général, l’apprentis-sage dure deux à quatre ans, voire plus dansles métiers très spécialisés. La période d’ap-prentissage s’achève par un examen spécia-lisé «donnant décharge» à l’apprenti. Chaquecorps de métier a ses propres coutumes enmatière de «décharge» et d’acceptation del’ex-apprenti au sein de la communauté descompagnons.

Les qualifications professionnelles des com-pagnons sont reconnues dans d’autres pays.Généralement dépourvus d’attaches fami-liales, les compagnons voyagent par montset par vaux pour développer et élargir leurscompétences en suivant l’enseignement demaîtres dans d’autres pays: c’est là l’une despremières formes de mobilité profession-nelle en Europe. Après avoir acquis l’ex-périence suffisante, les compagnons postu-lent pour entrer dans une guilde en vue d’ac-céder au rang de maître.

Une exception

La Russie se distingue de la plupart des autrespays européens du fait qu’aucune associa-tion d’artisans comparable aux guildes n’yvoit le jour au Moyen-Âge. Lorsqu’il accèdeau trône à l’âge de 17 ans en 1689, le TsarPierre Ier rêve de régner sur un puissantroyaume doté d’une économie forte et d’uneflotte puissante.

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Cette gravure sur bois extraite d’incunables néer-landais (1470) représente des artistes et des arti-sans avec leurs outils: broyeur de pigments, peintre,orfèvre, sculpteur, facteur d’orgues, horloger etscribe.

Cette superbe illustration de teinture sur soie ti-rée de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert pré-sente clairement les différentes étapes d’exécutiondans ce métier. Cependant, elle ne montre pas lesrisques du travail au contact de substances toxiques,l’une des nombreuses raisons pour lesquelles ce«métier en or» présente également une face obs-cure pour ses praticiens.

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En 1697, il envoie en Europe des émissaireschargés de trouver non seulement des alliéscontre la Turquie, mais aussi des individusdotés des compétences scientifiques, tech-niques et professionnelles qui font défaut àson pays agricole. À partir de 1698, le Tsarencourage l’industrie minière, la métallurgieet la construction navale de manière à sé-curiser et à étendre les frontières de sonpays. Un système de formation et d’ensei-gnement complet est créé: écoles de navi-gation, balistique, ingénierie et médecine,écoles de formation des travailleurs spé-cialisés et établissements primaires. Face aufaible intérêt manifesté par la populationpour envoyer ses enfants dans ces établis-sements, Pierre Ier fait adopter des lois strictesvisant l’application de la formation et de l’en-seignement professionnels.

Le contrôle «descendant» et l’influence desobjectifs politiques restent l’une des carac-téristiques de la formation et de l’enseigne-ment professionnels pendant de nombreuxsiècles. En 1868, Viktor Karlovich Della-Vos,directeur de l’École technique impérialede Moscou, élabore la méthode dite «sé-quentielle». Les apprentis apprennent d’abordà exécuter et à maîtriser des tâches simplesqui, selon une séquence prédéterminée avecprécision, se compliquent progressivement.Après avoir été présentée à l’Exposition uni-verselle de Vienne de 1873, cette méthodeest étendue à plusieurs autres centres euro-péens de formation et d’enseignement.

Divergence

Les différents types de formation et d’en-seignement professionnels en Europe trou-vent notamment leur origine dans:

❑ l’abolition du système des guildes à lasuite de bouleversements politiques,❑ les différents rythmes d’industrialisationdans les différents pays,❑ l’influence des mouvements politiques,philosophiques, culturels et religieux.

Au cours de la première moitié du XXe siècle,trois modèles de formation et d’enseigne-ment professionnels de base destinés auxjeunes se développent en Europe.

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Les apprentis vivent et travaillent avec la famillede leur maître. Présents du matin au soir à l’ate-lier, ils effectuent souvent les tâches les plus pé-nibles.Au fil des ans, et toujours sous la stricte supervi-sion du compagnon et du maître, ils acquièrentles compétences de base du métier par l’observa-tion, l’enseignement direct et la pratique. Outre lesavoir-faire, les vertus inculquées aux apprentis -souvent au moyen de châtiments corporels - com-prennent l’assiduité, l’obéissance inconditionnel-le et la subordination aux règles de la guilde. Teinture sur soie, Encyclopédie de Diderot et d’A-lembert

Dans l’imprimerie, au Moyen-Âge, l’usage veutque les apprentis soient soumis au cruel «rite desaspirants» à la fin de leur apprentissage. Ils ac-ceptent en effet de subir des mauvais traitementspour prouver qu’ils sont prêts à sacrifier leur san-té pour leur métier. Franchir cette épreuve avecsuccès signifie également pour le nouveau com-pagnon le droit d’être pris en charge par le maître,de vivre dans sa famille et d’être soigné en casde maladie.

Pierre I er accompagne incognito ses émissairesdans leurs voyages à travers l’Europe. Nombred’entre eux apprennent plusieurs métiers au coursde leurs déplacements. Pierre I er acquiert les basesthéoriques et mathématiques de l’art de la construc-tion navale et travaille en tant que charpentier surun chantier naval aux Pays-Bas.

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Le tableau suivant ne reflète pas la situationactuelle. Les systèmes de formation et d’en-seignement professionnels sont en effet tropdiversifiés et évoluent trop rapidement. Tou-tefois, de nombreuses pratiques mises enœuvre à l’époque dans les différents payssont toujours d’actualité.

La Grande-Bretagne connaît l’essor de l’«in-dustrialisation» au XVIIIe siècle. La locomo-

tive à vapeur et les premiers métiers à tisseret machines à filer mécaniques y font leurapparition. Les usines textiles se multiplientdans l’ensemble du pays. D’innombrablestravailleurs quittent les zones rurales et s’ins-tallent en ville pour trouver un emploi.

Cette situation provoque de profondes mu-tations dans la société: la «révolution indus-trielle». Les guildes sont abolies, ainsi quel’apprentissage traditionnel de sept ans. Destravailleurs non qualifiés et faiblement ré-munérés travaillent en usine, sur les ma-chines. Pendant longtemps, les industries enpleine croissance n’ayant pas besoin de tra-vailleurs qualifiés, les jeunes ne reçoiventaucune formation.

Deux doctrines, le «libéralisme» et le «puri-tanisme», influencent la vie et le travail à cet-te époque. Aujourd’hui, elles continuent d’in-fluencer la formation professionnelle dansle «modèle libéral». Les représentants syndi-caux et patronaux et les prestataires de for-mation et d’enseignement professionnels né-gocient «sur le marché» le type de formationet d’enseignement à proposer. Le «libéralis-me», doctrine opposée à l’intervention - età la protection - de l’État, rend chaque per-sonne responsable de son destin. Le «libre

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Même de nos jours, des centaines de programmesd’études en Europe s’appuient sur la «méthode sé-quentielle». Modèles d’articulations en bois (Clair,XIXe siècle)

Voici les trois modèles «classiques» de formation et d'enseignement professionnels: Tableau 1

Le modèle libéral en Le modèle réglementé par Le modèle dual enGrande-Bretagne l'État en France Allemagne

Qui détermine l'organisation de la for-mation et de l'enseignement profession-nels?

Où se déroulent la formation et l'ensei-gnement professionnels?

Qui détermine le contenu de la forma-tion et de l'enseignement profession-nels?

Qui finance la formation et l'enseigne-ment professionnels?

Quelles sont les qualifications acquisesà l'issue de la formation et de l'ensei-gnement professionnels, et quelles pos-sibilités offrent-elles?

Elle est négociée «sur le marché» entreles représentants syndicaux et patro-naux et les prestataires de la formationet de l'enseignement professionnels.

Il existe plusieurs options: dans les éta-blissements scolaires et/ou les entre-prises, par apprentissage électronique,etc.Soit le marché, soit les entreprises, enfonction des besoins du moment. Lecontenu n'est pas prédéfini.

Généralement, les individus qui enbénéficient. Certaines entreprises finan-cent certaines formations qu'elles dis-pensent elles-mêmes.

Il n'existe ni contrôle de la formation niexamens finals reconnus universelle-ment.

L'État.

Dans des établissements spécialisésappelés «écoles de production».

L'État (en association avec les parte-naires sociaux). Il ne vise pas essentiel-lement à refléter la pratique dans lesentreprises, mais s'appuie sur une for-mation plus générale et théorique.

L'État impose une taxe aux entrepriseset finance la formation et l'enseigne-ment professionnels, mais uniquementpour un nombre limité de demandeurspar an.

Il existe des diplômes d'État qui permet-tent également aux meilleurs diplômésde suivre des études supérieures.

Des chambres publiques d'artisanat,organisées par profession.

Dans le cadre d'une formation en alter-nance prédéfinie entre les entreprises etles écoles professionnelles («modèledual»).Les chefs d'entreprise, les syndicats etl'État décident d'un commun accord.

Les entreprises financent la formation enentreprise et peuvent déduire leursdépenses des impôts. Les apprentis per-çoivent un montant prédéfini parcontrat. Les écoles professionnelles sontfinancés par l'État.

Généralement reconnues, les qualifica-tions permettent à ceux qui les détien-nent d'exercer le métier correspondantet de suivre des études supérieures.

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jeu des forces» est supposé favoriser le bien-être de la nation et de ses entreprises. Le«puritanisme», code moral protestant strict,exige abnégation et assiduité. La prospéritéest considérée comme le résultat de l’assi-duité. La France joue un rôle prédominantdans les sciences naturelles au XVIIIe siècle.Ses «grandes écoles», comme l’École Poly-technique, deviennent un modèle pour l’en-seignement technique en Europe.

La France n’atteint toutefois le point cul-minant de son industrialisation que vers lafin du XIXe siècle. Avec la Révolution, lesguildes sont abolies en 1791 et la questionde la formation des travailleurs qualifiés res-te longtemps sans réponse. Sous l’influencedu «Siècle des Lumières», axé sur les lettreset sciences, l’importance d’une éducationdes enfants bien planifiée pour la société etl’individu est reconnue pour la première fois.Les écoles initialement créées pour les or-phelins de guerre sont érigées en «Écolesdes arts et métiers», d’où sont issus des ou-vriers de fonderie, des tourneurs et des char-pentiers pour les manufactures d’État et nonplus des forgerons et des selliers pour l’ar-mée.

Par ailleurs, la formation et l’enseignementprofessionnels ressemblent à ceux d’autrespays (cours du soir, écoles civiques et in-dustrielles), mais ne sont aucunement des-tinés à tous les jeunes.

L’établissement de la République en 1871entraîne plusieurs changements:

❑ la scolarité obligatoire universelle vise àéduquer les enfants dans l’esprit républicainplutôt que dans l’esprit catholique, ce quiauparavant était l’objectif;

❑ la scolarité obligatoire permet aux jeunesde 13 ans de «sortir de la rue» et de s’habi-tuer à travailler;❑ les travailleurs qualifiés sont surtout in-dispensables dans le génie mécanique etélectrique moderne pour renforcer la puis-sance économique et militaire de la na-tion.

Deux types d’établissements publics sontcréés pour éduquer les travailleurs très qua-lifiés et spécialisés, et former les ouvriers etles employés. Actuellement, l’État françaiscontinue de réglementer la formation et l’en-seignement professionnels.

En Allemagne, la mécanisation de la fabri-cation textile ne commence qu’au milieu duXIXe siècle. Toutefois, par la suite, les in-dustries textiles et les industries minières etsidérurgiques se développent rapidement.À la fin du XIXe siècle, le rôle des industries

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Encore au début du XX e siècle, le travail des en-fants fait partie intégrante de la vie quotidiennemonotone dans les usines, et non seulement enGrande-Bretagne. Les enfants constituent la main-d’œuvre meilleur marché et sont employés essen-tiellement à des tâches exécutées sous et entre desmachines difficilement accessibles.

La scolarité à temps partiel devient obligatoire pourles jeunes de moins de 16 ans en 1901. Les coursinsistent surtout sur la valeur «morale» du travail. Depuis lors, de nombreux types de formation etd’enseignement professionnels coexistent: dans lesétablissements scolaires et/ou les entreprises, parapprentissage électronique et dans le cadre de cer-taines tentatives de l’État d’introduire «l’appren-tissage moderne».

Dans les «Écoles des arts et métiers», au nombre desix en 1900, la formation pratique est dispenséedans des ateliers d’apprentissage, alors que la for-mation théorique se déroule en classe.

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électrique, chimique et automobile se ren-force. La liberté d’emploi commence à sedévelopper vers 1811 en Allemagne et lesguildes sont dissoutes. Cette situation ne du-re toutefois pas très longtemps. La forma-tion et l’enseignement professionnels tra-ditionnels sont légalement rétablis en 1897.

Deux raisons au moins expliquent cette dé-cision:

❑ la concurrence internationale rude ren-force le besoin de travailleurs qualifiés à despostes industriels et administratifs;❑ le renforcement du mouvement des tra-vailleurs amène le gouvernement à déciderd’inculquer ses convictions politiques conser-vatrices aux jeunes. Le monde traditionnelde la vie et du travail dans l’artisanat estconsidéré comme une base solide de l’inté-gration sociale et politique des apprentis.

Au XIXe siècle, les apprentis suivent souventdes cours dans des «établissements de for-mation continue», le soir ou le dimanche.Ces établissements reprennent le program-me enseigné dans les établissements pri-maires, tout en transmettant les connais-sances théoriques requises pour certains mé-tiers particuliers.

À la fin du XIXe siècle, ces établissementsdeviennent des «établissements de forma-tion professionnelle». Outre la formation etl’enseignement professionnels, les étudiantssuivent également des cours d’instruction ci-vique. Une situation comparable est obser-vée en Autriche, où le système de formationet d’enseignement professionnels est trèsproche du système allemand.

Aujourd’hui, ces deux éléments font toujourspartie intégrante de l’apprentissage:

❑ apprendre sur les lieux de travail et dansun établissement de formation profession-nelle;❑ c’est la raison pour laquelle on qualifiece système de formation «duale».

Les Pays-Bas commencent progressivementà créer des industries vers 1860, notammentdes fonderies de fer, des usines de fabrica-tion de machines, des chantiers navals et denombreux types de production de denréesalimentaires.

Dans un premier temps, les travailleurs qua-lifiés nécessaires viennent de l’étranger, ousont formés dans les rares établissementsexistants. À partir de 1860, l’industrie en pleinessor engendre une forte demande de tra-vailleurs qualifiés, aboutissant à la créationd’établissements professionnels et techniquesà plein temps à travers tout le pays.

L’État prend progressivement à sa charge lefinancement de ces établissements de for-mation professionnelle (ambachtscholen)dont la plupart sont à l’origine privés. Ces

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Nombre d’entreprises introduisent des programmesde sport et d’athlétisme pour améliorer la santé deleurs apprentis et renforcer les liens entre eux etavec l’entreprise. («Fitness» à AEG, 1927)

Les branches «modernes» de l’industrie remplacentla relation traditionnelle entre le maître et l’ap-prenti. Des contrats de formation sont signés avecdes jeunes, formés par la suite pour devenir des«travailleurs qualifiés». De grandes entreprises met-tent en place leurs propres ateliers d’apprentissa-ge, comme celui de la section fraisage de l’entre-prise Borsig. Photo: Deutsches TechnikmuseumBerlin [Musée allemand des Techniques et des Tran-sports de Berlin]

Aujourd’hui, un million de jeunes suivent une for-mation secondaire professionnelle et technique.Ils sont aussi nombreux à suivre une formationsecondaire classique. Près de 300 000 jeunes sontapprentis dans des entreprises.

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établissements connaissent également un vifsuccès au XXe siècle.

Un autre type d’établissement, le burger-avondschool est fréquenté le soir après letravail. Initialement, ces établissements vi-sent à compléter l’enseignement général dis-pensé dans les établissements élémentaires.Très vite, ils sont toutefois réorganisés pourrépondre aux besoins professionnels.

Le système d’apprentissage joue un certainrôle dans l’artisanat et le petit commerce.L’enseignement «dual» sur les lieux de tra-vail et à l’école se répand davantage aprèsla Seconde Guerre mondiale, sans acquérirencore le prestige dont continuent à jouirles «écoles à plein temps».

La Finlande, dirigée pendant des siècles parla Suède, puis par la Russie, oriente l’in-dustrialisation vers la fabrication et l’élabo-ration des produits agricoles et sylvicoles,et vers les machines et outils nécessaires àl’exécution de ces tâches.

En 1809, la Finlande devient une principautéautonome sous l’Empire tsariste russe. La so-ciété finlandaise commence à se réorgani-ser tandis que la politique, l’économie et

l’enseignement connaissent de profondesmutations.

Au départ, les efforts sont consacrés à l’édu-cation de la population rurale: des conseillersitinérants et des établissements spécialisésapprennent à la population rurale à travaillerplus efficacement dans l’agriculture. Pendantlongtemps, la responsabilité de créer des in-dustries et de mettre en place une forma-tion et un enseignement professionnels estconfiée à une seule et même entité. Vers1840, l’une des premières autorités natio-nales de soutien à la production crée les pre-mières écoles professionnelles et commer-ciales.

À partir de 1890, le désir unanime d’échap-per à l’influence russe suscite de nouveauxefforts importants visant à encourager l’in-dustrie et les établissements scolaires. Cettesituation aboutit à la création d’établisse-ments de formation professionnelle publicsà plein temps destinés aux filles et aux gar-çons. Parallèlement aux connaissances pro-fessionnelles, les étudiants y reçoivent éga-lement une instruction civique.

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Les cours dispensés dans les «ambachtschoolen»constituent une véritable alternative à l’appren-tissage. L’objectif exclusif, d’un point de vue pra-tique et théorique, est de former les étudiants à unmétier.

Il est intéressant de constater que les matières com-merciales dans les écoles de commerce sont consi-dérées comme faisant partie intégrante de l’en-seignement général, et non pas de la formation etde l’enseignement professionnels. Cela n’est peut-être pas surprenant dans une nation à traditioncommerciale.

Pendant longtemps, le mot finnois elatuskeino acurieusement désigné à la fois l’«activité profes-sionnelle» et le «moyen de subsistance». Cela montrequ’une existence indépendante couvrait plusieurstypes d’activités.

Malgré les efforts politiques déployés pour intro-duire la formation sous forme d’apprentissage enentreprise, le nombre d’apprentis est assez faible.Aujourd’hui, la plupart des jeunes apprennentleur métier à l’école.

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L’unité dans la diversité

La Suisse: un modèle pour l’Europe?

Quatre langues officielles sont parlées ausein de la Confédération helvétique. Les ha-bitants sont issus de quatre contextes cul-turels différents: allemand, français, italienet rhéto-roman.

Cette diversité se retrouve dans le systèmede formation et d’enseignement profes-sionnels.

L’économie suisse est florissante depuis plu-sieurs siècles:

❑ les guildes au Moyen-Âge, ❑ les industries horlogère et textile depuisle XVIIIe siècle, ❑ l’ingénierie au début du XIXe siècle, ❑ et, depuis lors, de nombreux autres sec-teurs de l’industrie.

Il faut attendre longtemps avant que l’Étatn’intervienne dans la formation et l’ensei-gnement professionnels. Jusqu’en 1884,

les structures de formation et d’enseigne-ment professionnels ne bénéficient d’aucunsoutien fédéral. En quoi la formation et l’en-seignement professionnels suisses actuels sedistinguent-ils de ceux des autres pays eu-ropéens? La législation relative à la forma-tion et à l’enseignement professionnels s’ap-plique à l’ensemble du pays, tout en auto-risant certaines variantes d’un canton à l’autre.

Comme dans tous les autres pays, les tradi-tions de la formation et de l’enseignementprofessionnels sont fortement ancrées dansles cantons et résistent aux changements ra-dicaux. Néanmoins, de bonnes idées, l’ex-périmentation et des améliorations dans uncanton donnent souvent lieu à des réformesprudentes à l’échelon national. La traditionet le renouveau dans la formation et l’en-seignement professionnels ne sont plus mu-tuellement exclusifs, un exemple à suivrepour l’Europe.

«Aptitude»

Les examens d’entrée sont presque inévi-tables de nos jours. De nombreuses activi-tés prévoient une procédure destinée à tes-ter et à évaluer l’aptitude des candidats - àêtre admis à l’école, à suivre une formationprofessionnelle et à exercer un emploi.

Qui mesure quoi et pourquoi? Voilà unequestion intéressante!

Les premières procédures visant à mesurerl’aptitude professionnelle sont mises au pointpar des psychologues allemands pendant la

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Les ateliers publics d’apprentissage et les écoles àplein temps (comme celles qui existent en France)sont mis en place en 1884. La formation en al-ternance entre le lieu de travail et l’école est éga-lement mise en place, donnant naissance à unsystème «dual» comparable aux systèmes allemandet autrichien.

Un troisième élément vient s’ajouter aux deux pre-miers dans le système dual. Ce «troisième lieu d’ap-prentissage» forge des liens entre la formation surle lieu de travail et à l’école. Ainsi, des cours d’ini-tiation permettent aux étudiants d’expérimen-ter de nouvelles approches, d’apprendre parl’erreur et de maîtriser les tâches difficiles sanspression.

Optomètre permettant de tester la vue et la capa-cité à évaluer les distances L’industrie développe très tôt des techniques de sé-lection des apprentis potentiels en fonction de qua-lités apparemment importantes pour les employeurs:capacité intellectuelle, réactivité, dextérité, force,sens de l’observation, capacité à évaluer les dis-tances, etc.

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Première Guerre mondiale. Les tests doiventpermettre de trouver les candidats les plusaptes à conduire un véhicule motorisé entemps de guerre. Le processus de sélec-tion doit évidemment aider l’armée alle-mande, mais aide-t-il les candidats sélec-tionnés ou rejetés? Après la guerre, le gou-vernement social-démocrate et les syndicatsutilisent des tests «psychotechniques» dansd’autres domaines: les jeunes sont sélec-tionnés pour une formation professionnel-le en fonction de leurs capacités plutôt quede leur milieu socioculturel. Les tests d’ap-titude visent également à minimiser les risquespour le grand public, notamment sur le ré-seau ferroviaire. D’autres pays, notammentla France, empruntent nombre de ces testspsychotechniques et en élaborent de nou-veaux. L’Association internationale des testspsychotechniques est créée.

De nos jours, les tests d’aptitude servent deplus en plus à mettre à jour les points fortsd’un individu et à encourager le dévelop-pement au profit de la personne testée etde l’employeur.

Convergence

La formation et l’enseignement profes-sionnels en Europe: une problématiquequi remonte à plus de 50 ans

Tout en ne mentionnant pas la formation etl’enseignement professionnels, cet accordscelle toutefois les fondements des futuresactivités communes dans ce domaine.

En 1953, l’organe directeur de la CECA, la«Haute autorité», évoque dans son premierrapport des raisons non seulement écono-miques mais aussi sociales motivant l’actioncommune. Ainsi, la formation et l’ensei-gnement professionnels doivent permettred’améliorer la sécurité au travail dans lesmines où, chaque année, plusieurs accidentstuent ou blessent des centaines de mineurs.

Le programme suivant est progressivementmis en œuvre après 1953: collecte de do-cuments; organisation de réunions régulièreset échange d’informations entre les respon-sables de la formation et de l’enseignementprofessionnels des États membres et créa-tion d’une «commission permanente pour laformation professionnelle».

Le financement de la formation profes-sionnelle pour les mineurs au chômage estl’une des autres initiatives importantes. Lebesoin de formation et d’enseignement pro-fessionnels est exprimé plus clairement dansle traité de Rome que dans le traité instituantla CECA. Par exemple, la formation et l’en-seignement professionnels sont décrits com-me un moyen d’atteindre «une situationsociale harmonieuse avec une politique deplein emploi». Une action commune dans ledomaine de la formation et de l’enseigne-ment professionnels est présentée commeun prérequis à la libre circulation de la main-

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Les demandes concernant les aptitudes profes-sionnelles ont évolué. La créativité, le sens de laresponsabilité et une bonne capacité d’adaptationrapide aux autres jouent un rôle croissant. Photo: Uwe Völkner

En 1951, les représentants de six pays européenssignent à Paris le traité instituant la Communautéeuropéenne du charbon et de l’acier (CECA). De gauche à droite: les ministres des affaires étran-gères de la Belgique (Paul van Zeeland), du Luxem-bourg (Joseph Blech), de l’Italie (Carlo Sforza) etde la France (Robert Schuman), le Chancelier al-lemand (Konrad Adenauer) et le ministre des af-faires étrangères des Pays-Bas (Dirk Uipko Stik-ker). Photo: médiathèque de la Commission eu-ropéenne

En 1957, les représentants de six nations euro-péennes signent à Rome les traités instituant laCommunauté économique européenne (CEE) etEuratom. Photo: médiathèque de la Commission euro-péenne

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d’œuvre et à l’échange de jeunes travailleursau sein de la CEE.

L’Europe et la formation etl’enseignement professionnels: desintérêts communs?

Le 12 mai 1960, le Conseil des ministres dé-cide d’accélérer la mise en œuvre du pro-gramme de formation et d’enseignement pro-fessionnels de 1957. L’objectif est de sur-monter la pénurie de travailleurs qualifiéspour réduire les niveaux élevés de chôma-ge dans certaines régions comme le sudde l’Italie, et améliorer les conditions de viedes travailleurs.

À l’issue de consultations avec des expertsdans les États membres, les syndicats etles employeurs, la Commission présente unprogramme d’action commune en dix points.La France et l’Allemagne s’opposent vi-goureusement au projet de transfert des res-ponsabilités à la Communauté dans le do-

maine de la formation et de l’enseignementprofessionnels.

Dans les années 1960, l’opposition politiqueest très virulente, mais la situation changeaprès la conférence au sommet de La Hayeen 1969: les partenaires sociaux partici-pent désormais à la résolution des problèmessociaux, tandis que la formation et l’ensei-gnement professionnels sont encouragés. Lacrise économique consécutive à la guerredu Yom Kippour de 1973 renforce cette ten-dance.

En 1975, le Conseil des ministres publieun règlement portant création d’un centreeuropéen de recherche et de documenta-tion pour la formation et l’enseignement pro-fessionnels, le Cedefop.

Le Centre européen pour ledéveloppement de la formationprofessionnelle

L’idée d’une politique commune en matiè-re de formation et d’enseignement profes-sionnels met du temps à se développer etse heurte à la forte opposition répétée desÉtats membres.

La crainte est de voir disparaître des mé-thodes de formation éprouvées.

Un changement s’opère en 1970.

Les gouvernements et les syndicats en par-ticulier abordent la question de la formationinitiale et continue. La formation et l’ensei-gnement professionnels vont être amélioréspar l’intermédiaire de la recherche. Dans cet-te optique, des institutions sont mises enplace dans de nombreux pays.

En réponse à une proposition du Comitééconomique et social de la CE, le Conseil

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Le traité signé par les États membres en 1965 entreen vigueur en 1967, instituant la Communautéeuropéenne (CE). Il constitue le pouvoir exécutifde la Communauté européenne du charbon et del’acier (CECA), de la Communauté économiqueeuropéenne (CEE) et de l’Euratom.Photo: médiathèque de la Commission européen-ne

Les arrestations d'étudiants à la fin des années1960 témoignent de l'ampleur de la crise à laquelleest confronté le système éducatif dans presque tousles pays.

En 1972, le Danemark, le Royaume-Uni et l’Ir-lande signent le traité d’adhésion à la CE. (La pho-to représente le ministre irlandais des Affairesétrangères, Patrick Hillary, et le Premier ministre,John Lynch.) La Grèce adhère à la CE en 1981,suivie du Portugal et de l’Espagne en 1986, puisde l’Autriche, de la Finlande et de la Suède en1995. Photo: médiathèque de la Commission eu-ropéenne

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des ministres décide, le 10 février 1975, decréer le Centre européen pour le dévelop-pement de la formation professionnelle (Ce-defop), installé à Berlin Ouest.

Le Cedefop est notamment chargé des tâchessuivantes:

documenter les développements, la rechercheet les institutions de formation et d’ensei-gnement professionnels; diffuser l’informa-tion; promouvoir les initiatives favorisantune approche concertée de la formation etde l’enseignement professionnels et servirde point de rencontre pour les parties in-téressées.

La politique de formation et d’enseignementprofessionnels affecte invariablement lesrègles de la société. Elle concerne non seu-lement l’enseignement, les compétences, lesconnaissances et les performances écono-miques, mais aussi les institutions sociales.

La représentation équilibrée des quatre par-ties intéressées est donc cruciale pour lestravaux du Centre. Le Conseil d’adminis-tration du Cedefop est composé de repré-sentants des gouvernements, des organisa-tions patronales et des syndicats des Étatsmembres, ainsi que des représentants de laCommission européenne.

L’Union des confédérations de l’industrie etdes employeurs d’Europe (UNICE), la Con-fédération européenne des syndicats (CES)et les autres États de l’Espace économiqueeuropéen y ont des observateurs.

Dans le cadre de ses travaux techniques etscientifiques, le Centre apporte une contri-bution essentielle à l’amélioration de la for-mation et de l’enseignement professionnelsen Europe: de la divergence à la conver-gence.

Formation et enseignementprofessionnels en Europe

Itinéraires communs

La collaboration en matière de formation etd’enseignement professionnels s’est renfor-cée depuis le milieu des années 1980. Pa-rallèlement aux «programmes d’action» spé-cifiques, les fondements d’une action poli-tique commune ont progressivement été misen place. À l’occasion du Conseil européende Lisbonne en 2000, les chefs d’État et degouvernement ont pour la première foisabordé des sujets liés à la politique de l’en-seignement.

«Programmes d’action»

Les programmes d’action européens ont étéintroduits en 1986. À titre d’exemple, citonsle programme d’action commun «Leonardoda Vinci», qui est devenu le laboratoire d’in-novation en matière d’apprentissage tout aulong de la vie. Depuis 1995, ce program-me soutient des projets auxquels collabo-rent des établissements d’enseignement, desentreprises, des chambres de commerce, etc.de différents pays, afin d’encourager la mo-bilité et l’innovation et d’aider les indivi-dus à améliorer leurs compétences profes-sionnelles tout au long de la vie.

La Fondation européenne pour la for-mation a commencé ses activités en 1995en tant qu’agence européenne travaillantpour plus de 40 États non membres de l’UE,y compris les pays candidats, pour les aiderà réformer et à moderniser leurs systèmesde formation professionnelle. La Fondationtravaille en étroite collaboration avec le Ce-defop.

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Le choix de Berlin comme siège des bureaux duCedefop est destiné à montrer que l’Ouest de la vil-le fait partie intégrante de la CE. Après la chutedu mur et la réunification de l’Allemagne, il estdécidé, en 1993, de transférer le Cedefop à Thes-salonique.

En 2000, le Conseil européen de Lisbonne décideque: «Le développement d’un enseignement et d’uneformation professionnelle de grande qualité estun élément crucial et fait partie intégrante de cet-te stratégie, notamment pour ce qui est de pro-mouvoir l’inclusion sociale, la cohésion, la mobi-lité, la capacité d’insertion professionnelle et lacompétitivité.» Photo: médiathèque de la Com-mission européenne

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Conseil européen de Lisbonne (mars 2000).L’Union européenne s’est fixé pour objectifstratégique de devenir la société de la connais-sance la plus compétitive et dynamique dumonde d’ici à 2010.

Stockholm 2001Le Conseil européen fixe trois objectifs: «Amé-liorer la qualité et l’efficacité des systèmesd’éducation et de formation dans l’Unioneuropéenne, faciliter l’accès de tous aux sys-tèmes d’éducation et de formation, et ouvrirau monde extérieur les systèmes d’éduca-tion et de formation».

La voie à suivreLe «processus de Bruges-Copenhague» montreque des objectifs communs visant à une viepersonnelle et professionnelle pleine et har-monieuse peuvent être poursuivis et réali-sés avec succès en Europe. Ce processus ti-re son nom de l’initiative de «Bruges» desresponsables de la formation et de l’ensei-gnement professionnels (octobre 2001)qui a abouti, en novembre 2002, à l’adop-tion, par les ministres de l’éducation des 31pays européens [États membres de l’UE, payscandidats et membres de l’Espace écono-mique européen (EEE)], de la «Déclarationde Copenhague» sur la coopération euro-péenne renforcée en matière d’enseigne-ment et de formation professionnels. «Lesdéveloppements économiques et sociauxintervenus en Europe au cours de la der-nière décennie ont mis de plus en plus enévidence la nécessité d’une dimension eu-ropéenne de la formation et de l’enseigne-ment. De plus, la transition vers une éco-nomie de la connaissance capable d’unecroissance économique durable accompa-

gnée d’une amélioration quantitative et qua-litative de l’emploi et d’une plus grande co-hésion sociale crée de nouveaux défis enmatière de développement des ressourceshumaines». Extrait de la «Déclaration de Copenhague»

Le processus de Bruges-Copenhague vise à«renforcer la coopération volontaire enmatière de formation et d’enseignement pro-fessionnels afin de promouvoir la confian-ce mutuelle, la transparence et la recon-naissance des compétences et des qualifi-cations, et créer ainsi les fondements pouraccroître la mobilité et faciliter l’accès à l’ap-prentissage tout au long de la vie». Extrait de la «Déclaration de Copenhague»

Les États membres, les pays de l’EEE, lespartenaires sociaux et la Commission ontentamé une coopération à un niveau pra-tique, axée sur un certain nombre de résul-tats concrets:❑ cadre unique pour la transparence descompétences et des qualifications;❑ système de transfert d’unités capitali-sables pour l’enseignement et la formationprofessionnels;❑ principes et critères de qualité communsen matière d’enseignement et de forma-tion professionnels;❑ principes communs concernant la vali-dation des apprentissages non formel et in-formel;❑ orientation tout au long de la vie.

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«Depuis le 1er janvier 2000, les compétences ac-quises à l’étranger peuvent être consignées dansun document personnel, l’«Europass-Formation».En mars 2002, à la demande du Conseil européende Lisbonne, la Commission a recommandé unmodèle européen de curriculum vitæ. Le nouveau«CV européen» (curriculum vitæ) diffère de la plu-part des autres CV par l’importance qu’il accordeà l’apprentissage formel et informel.» Photo: médiathèque de la Commission européenne

L’avenir de la formation et de l’enseignement pro-fessionnels en Europe est étroitement lié à l’objec-tif d’améliorer la «qualité de l’emploi» par l’amé-lioration de la capacité d’insertion professionnel-le, des qualifications, des performances et de lasanté des individus.

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«La transition de l’école à la vie active esttrès différente en Allemagne et au Royau-me-Uni. C’est sans doute entre ces deux paysque le contraste est le plus marqué en Eu-rope, même si les Britanniques semblentpenser que tous les pays du continent situésau sud de la Scandinavie utilisent un systè-me allemand un peu dilué, ou une variationde ce système. Nous considérons que l’Al-lemagne dispose de la version la plus mar-quée de ce que nous pourrions appeler lemodèle continental typique».

Ces commentaires du sociologue Ken Ro-berts de Liverpool (Roberts, 2000, p. 65 etsuiv.) ne sont peut-être pas parfaitement ob-jectifs, mais ils traduisent bien la difficultéque rencontrent même les spécialistes pourdécrire le paysage européen de la formationprofessionnelle en termes aisément com-préhensibles. Si tel est le cas pour la diver-sité des systèmes de formation existants, ildoit être encore beaucoup plus difficile deramener le développement historique com-plexe de ces modalités de qualification à undénominateur commun dans lequel les ex-perts de différentes disciplines peuvent seretrouver... Le Centre européen pour ledéveloppement de la formation profession-nelle (Cedefop) a voulu relever ce défi dansson projet consacré à l’histoire européennede la formation et de l’enseignement pro-fessionnels dans une perspective compara-tive (http://history.cedefop.eu.int). Commentpeut-on tenter de trouver des solutions à ceproblème?

I.

L’historien Hermann Heimpel affirme quece qui rend l’Europe si européenne, c’estque son histoire est celle de nations. Ce-pendant, le fait de percevoir les nations com-me des éléments de construction de l’his-toire européenne revient à reconnaître nonseulement qu’elles se sont établies au coursde processus de développement graduels,mais aussi qu’elles dépendent de leurs re-lations mutuelles en tant que partenairesproductifs et concurrents (Zernack, 1994,p. 17). De nombreux facteurs façonnent lesrelations entre les nations, dont les fron-tières communes et les échanges de biens.Certaines tendances historiques internatio-nales et universelles sont particulièrementdéterminantes. Le facteur le plus influentpour le développement des modalités dequalification des masses laborieuses a étéincontestablement la révolution industriel-le, ou l’industrialisation générale des nationseuropéennes: elle a non seulement entraî-né une transformation économique et tech-nologique profonde, mais aussi bouleverséla structure de la société, les interactions so-ciales, les styles de vie, les systèmes poli-tiques, les structures résidentielles et le pay-sage. Dans le sillage de la révolution, le sys-tème de «refonte des ressources humaines»a connu un changement radical dans tousles pays européens.

Paradoxalement, le processus d’industriali-sation en Europe n’a pas débouché sur un

Les «systèmes» euro-péens de formationprofessionnelle - ré-flexions sur le contextethéorique de leur évo-lution historique

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Wolf-DietrichGreinertProfesseur depédagogieprofessionnelle àl’université techniquede Berlin

Peu d’études longitudinalesont placé l’évolution de la for-mation et de l’enseignementprofessionnels (FEP) dans uncadre sociétal plus vaste. Parconséquent, on comprendmal pourquoi la FEP a évoluéde manière différente, mêmedans des pays qui ont connuun développement écono-mique et social similaire. Dansses réflexions sur un possiblecadre théorique pour l’ana-lyse de l’évolution historiquedes systèmes européens deFEP, Wolf-Dietrich Greinertadopte une approche à troisniveaux pour déceler des prin-cipes communs aux diverssystèmes. La FEP s’inscritd’abord dans les cultures na-tionales du travail qui se tra-duisent par le droit du travail.Ensuite, les cultures du tra-vail forment la base des ré-gimes spécifiques de FEP. Lescultures du travail et les ré-gimes de FEP produisent desidées-forces qui légitiment,en dernier lieu, une approchepédagogique donnée. L’au-teur identifie trois types gé-néraux de systèmes de FEPsur la base d’une analyse dia-chronique commençant avecla révolution industrielle: lemodèle de l’économie de mar-ché libérale en Grande-Bre-tagne, le modèle bureaucra-tique d’État en France et lemodèle dual-corporatif en Al-lemagne.

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modèle uniforme de formation profession-nelle. Bien au contraire, il a plus ou moinsdétruit les méthodes de formation profes-sionnelle en gros homogènes, basées sur l’ar-tisanat, qui s’étaient mises en place au fil dessiècles, pour les remplacer par une myriadede systèmes éducatifs «modernes», qui sem-blent à première vue présenter peu de traitscommuns. Compte tenu de leur diversité, ilsemblerait sage d’utiliser avec prudence l’ex-pression «systèmes de formation et d’ensei-gnement professionnels». Walter Georg sou-ligne à juste titre que la théorie du systèmeacadémique ne peut faire référence à un «sys-tème de formation professionnelle» que si lapratique considérée «est devenue indépen-dante ou s’est établie de manière permanenteen tant que réseau de communication sélectifdans le processus de différenciation socialeentre sous-systèmes fonctionnels spécifiques.Il faut pour cela un degré poussé d’unité au-toréférentielle et de désassociation par rap-port aux structures sociales internes» (Georg,1997, p. 159).

Georg estime que ces systèmes de forma-tion professionnelle indépendants, qui secaractérisent par des structures internes etdes mécanismes de fonctionnement ‘auto-référentiels’, n’existent sous leur forme pu-re que dans les régions germanophones sousle nom de «système dual». Dans d’autres pays,les méthodes éducatives basées sur l’écoleet la formation initiale et continue en en-treprise reposent sur les processus logiquesde différents sous-systèmes sociaux. Dansle cas de la formation professionnelle sco-laire, c’est la logique méritocratique du sys-tème éducatif général, alors que dans le casde la formation en entreprise, c’est la logiquede la production en entreprise et de l’or-ganisation du travail. Georg conclut que «l’ap-proche allemande unique, qui consiste àmaintenir un système de formation profes-sionnelle autoréférentiel indépendammentdes établissements scolaires et des entre-prises, conduit toute tentative de comparerce système à d’autres «systèmes» à une mé-prise ethnocentrique, car généralement iln’est pas possible de trouver des termesde comparaison communs» (Georg, 1997, p.159).

Georg considère que le modèle explicatifdes différences nationales spécifiques dansla formation professionnelle des massesdoit être élargi pour inclure les constella-tions des relations culturelles et fonction-nelles-structurelles prédominantes au sein

d’une société, c’est-à-dire sa culture et sastructure. Les valeurs, normes, attitudes,convictions et idéaux d’une société déter-minent ces systèmes éducatifs, l’organisa-tion du travail et les relations profession-nelles, ainsi que l’interaction plus ou moinsstable entre la formation professionnellespécifiquement nationale et d’autres sous-systèmes sociaux, tels que l’enseignementgénéral et les différents paradigmes du sys-tème d’emploi.

Si nous tenons compte de ces objections,nous pouvons étendre ou affiner nos cri-tères pour comparer sur un plan internatio-nal la formation professionnelle, de ma-nière à pouvoir distinguer clairement entre«systèmes de formation professionnelle» et«modèles de formation professionnelle». Leterme de «système» ne devrait s’appliquerqu’à des modèles de formation véritable-ment indépendants et autoréférentiels. Parailleurs, une catégorie englobant les mé-thodes de formation professionnelle est né-cessaire pour définir des modèles structu-rels opérationnels, ainsi que l’interactionentre les sous-systèmes sociaux importantspour la formation professionnelle. Nous pro-posons la notion de «culture du travail».

II.

Le concept de «culture du travail» suscite ce-pendant une série de problèmes méthodo-logiques. Comment classifier de manièreadéquate les corrélations internes entre cessous-cultures nationales? Quels principesd’orientation et quels paradigmes sont dé-terminants? Comment éviter des interpréta-tions idiosyncrasiques simplistes ou des pa-radigmes biaisés?

En cherchant une manière viable de sim-plifier cette question très complexe, nousnous sommes penchés sur une étude de Ber-cusson, Mückenberger et Supiot (1992). Cesauteurs tentent de définir une approche mé-thodique pour comparer les cultures juri-diques et du travail (Mückenberger, 1998).Ils utilisent une procédure de tests doublespour examiner des domaines choisis en Gran-de-Bretagne, France et Allemagne. L’un deleurs objectifs était de découvrir commentles juristes de ces trois pays perçoivent letravail dépendant, et comment cette per-ception influence leurs actions et déci-sions (la «culture du travail» dans la routine

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juridique quotidienne). Un autre objectif étaitde découvrir comment les compétiteurs so-ciaux dans ces pays ressentent et vivent «laloi» en général et la «législation du travail»en particulier (la «culture juridique» dans lavie du travail au quotidien).

Cette étude (Bercusson et al., 1992) pré-sente trois contextes paradigmatiques in-cluant la législation du travail dans ces troispays. Chaque paradigme configure et for-me la législation prédominante qu’il décrit(Mückenberger, 1998, p. 37 et suiv.).

(A) «En Grande-Bretagne, la relation de pro-duction est simplement considérée commeun processus de marché dans lequel les par-ticipants au marché sont membres de la so-ciété, c’est-à-dire salariés, employeurs et par-tenaires de conventions collectives. L’imagedu droit est par conséquent négative, ca-ractérisée par l’abstentionnisme ou la nonintervention dans les processus de mar-ché. “Règle du droit, et non des hommes”est le paradigme adéquat».

(B) «En France, même la relation de pro-duction est considérée comme politique. Lesacteurs impliqués sont l’État et ses exécu-tants, à savoir les inspecteurs du travail. Cetaccent mis sur l’aspect politique se retrou-ve dans la reconnaissance de l’ordre publicsocial. Il s’agit d’une régulation qui accordele contrôle central de la vie du travail àl’État (et non pas au marché, comme enGrande-Bretagne, ou à l’interaction entrel’autonomie privée et le système juridique,comme en Allemagne). La toile de fond pa-radigmatique de cette version républicaineest la majesté de la loi, la plus grande réa-lisation de la Grande Révolution».

(C) «En Allemagne, la relation de productionest considérée comme une sorte de com-munauté ayant une tradition de responsa-bilité mutuelle et de prise en compte de l’en-semble. Les règles de cette communauté so-ciale sont, comme en Grande-Bretagne,rarement imposées de manière directe parles hommes politiques. Ce sont les compé-titeurs sociaux eux-mêmes qui les fixent, lesélaborent et les corrigent dans une certainemesure. Cependant, ils jouent un rôle plusactif que les acteurs sociaux en Grande-Bre-tagne, en suivant une approche prudente etau cas par cas pour réaliser les adaptationsnécessaires, sur la base d’interactions entrejuges et juristes. Les paradigmes d’“État consti-tutionnel civil”, d’autonomie privée et de su-

pervision par la loi caractérisent cette ap-proche».

Ces trois pays ont également des prioritésdifférentes pour les relations industrielles etla législation du travail. En Angleterre, c’estl’économie qui prime, en France, c’est la po-litique et en Allemagne, c’est la société. Lesauteurs de cette étude estiment qu’on re-trouve là les priorités différentes de ces paysen matière de «sécurité» et de «liberté». La sé-curité sociale a été développée de manièreplus précoce et complète en Allemagne qu’enFrance ou en Grande-Bretagne. Cependant,elle s’est accompagnée d’une perte de li-berté. En France, le droit à l’expression, ac-tion et organisation politique, et même aumilitantisme, prime sur la sécurité sociale.En Grande-Bretagne, la liberté prend éga-lement le pas sur la sécurité, non pas com-me en France, mais sous la forme d’une ac-tivité de marché et d’une négociation col-lective. Selon cette étude, la liberté est enFrance le domaine de la politique. La li-berté est réalisée dans (et par) l’État. En Gran-de-Bretagne, c’est la liberté par rapport à l’É-tat qui passe au premier plan (Mückenber-ger, 1998, p. 38).

Ce modèle montre que la «culture du tra-vail», comme la culture en général, incarneen réalité une «idée vague dans un contex-te cohérent» (Georg, 1997, p. 161). Les mé-thodes permettant de cerner les différencesnationales spécifiques ne sont certainementpas épuisées par cette discussion. Cepen-dant, nous pouvons d’ores et déjà prendreen compte un point que les recherchesbasées sur une approche culturelle ont confir-mé en tant que tendance générale: l’incroyablepersistance des valeurs et traditions cultu-relles inhérentes et des mentalités nationales(voir, par exemple, Hofstede, 1993). Ces fac-teurs rendent la transformation des systèmessociaux extrêmement difficile.

Cela signifierait dans notre contexte, qui estcelui de l’identification de modèles euro-péens de formation professionnelle, que sices modèles représentent une réponse spé-cifique à des problèmes techniques, socio-économiques et politiques changeants, leursprocessus de changement structurel sontgouvernés par une tendance très forte deraccord à la tradition. La tradition et la mo-dernité ne s’opposent pas, mais sont en réa-lité identiques. Nous pouvons parler d’unemodernité liée à une tradition spécifique.

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III.

Nous pourrions bien sûr examiner isolé-ment les divers pays pour décrire le déve-loppement historique de la formation pro-fessionnelle en Europe et nous limiter àcompiler une synthèse aussi complète quepossible des sources pertinentes et de leursinterprétations inhérentes, présentant ainsiun récit d’événements historiques. Cepen-dant, l’utilité académique et pratique d’unetelle aventure à petite échelle serait limitée.Comme nous l’avons déjà mentionné, cet-te étude vise à mettre en évidence les as-pects spécifiquement européens. Il faut pourcela analyser le dialogue et la coopération- dont nous ne savons que peu de choses,voire rien du tout à ce jour - qui ont pus’instaurer entre nations européennes envue de transformer leur formation profes-sionnelle sous l’influence des pressionsou des changements induits par l’indus-trialisation. Quels principes, formes d’orga-nisation et concepts apprenants spécifiquesnés de ce dialogue ont imposé des tendancesnouvelles et laissé leur marque sous la for-me d’institutions nationales?

À ce jour, la recherche sur l’histoire de laformation professionnelle a su identifier troismodèles européens de formation «classiques»,c’est-à-dire exemplaires, qui se sont consti-tués lors de la première phase de la révo-lution industrielle en réponse à l’érosion dumodèle de formation professionnelle basésur l’apprentissage artisanal (Greinert, 1999).Il s’agit du modèle libéral d’économie demarché en Grande-Bretagne, du modèle bu-reaucratique avec réglementation par l’Étaten France et du modèle dual entreprise-éco-le en Allemagne.

Le modèle libéral réalisé en premier en Gran-de-Bretagne constitue une relation de mar-ché entre des sous-systèmes fonctionnels dutravail, du capital et de l’éducation nés duprocessus d’évolution sociale influencépar le capitalisme industriel. Les principauxprotagonistes du travail et du capital, qui de-vraient être libérés autant que possible descontraintes traditionnelles, entretiennent desrelations libres avec le nouveau sous-sys-tème de l’éducation. Des inconvénients struc-turels empêchent les travailleurs d’utiliser lesous-système de l’éducation pour se vendreeux-mêmes comme facteurs de production«qualifiés». Ils doivent par conséquent sevendre simplement comme des ressourceshumaines et en accepter les conséquences

sociales qui peuvent être désastreuses (parexemple, le travail des enfants).

Le modèle de marché des qualifications pro-fessionnelles correspondant présente lestraits suivants:

(1) la relation quantitative entre fournitureet demande de formation est réglementéepar le marché. Ceux qui fournissent diversesqualifications et ceux qui les demandentpeuvent se rencontrer sur une base volon-taire dans un marché «libre» - en principe -(à savoir, un marché de la formation qui n’estpas contrôlé d’abord par l’État);

(2) le type de qualifications professionnelles(aspect qualitatif) dépend en définitive deleur application prévue sur le marché del’emploi et dans les entreprises et les ad-ministrations. La transférabilité des qualifi-cations professionnelles entre entreprisesvarie en fonction du marché, mais elle esten général très limitée;

(3) les pratiques de formation ne sont pasparticulièrement normalisées. L’école, la for-mation en entreprise, l’école en alternanceet la formation en entreprise et des méthodesde formation avancées sur le plan organi-sationnel et technique peuvent toutes êtresmises sur le marché (par exemple, sous for-me de cours de formation à distance oude e-learning). Cependant, il existe peu d’exa-mens et de certificats largement acceptés;

(4) le coût de la formation est assumé indi-viduellement, d’ordinaire par le demandeurde la formation. Cependant, les entreprisesversent souvent des subventions si elles four-nissent la formation elle-même. Dans ce cas,la formation - qui débouche le plus souventsur des qualifications professionnelles quine sont que partielles - est soumise au prin-cipe de la minimisation des coûts;

(5) les pays disposant de modèles de mar-ché de la formation professionnelle font unedistinction tranchée entre enseignement pro-fessionnel général et formation profession-nelle spécifique, sur le plan tant des défini-tions que des institutions. L’enseignementprofessionnel est toujours dispensé dans lesécoles publiques, la formation profession-nelle repose sur des accords volontairesconclus entre les acteurs sur le marché.

Le modèle bureaucratique, réglementé parl’État, d’abord mis en place de manière ri-

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goureuse en France, utilise le nouveau sous-système de l’éducation pour créer une rela-tion politique basée sur un rapport de for-ce entre capital et travail. Pour des raisonssocio-politiques générales, les travailleursstructurellement défavorisés sont «quali-fiés» avec l’aide d’un secteur éducatif ré-glementé et financé par l’État (qui inclut éga-lement la formation professionnelle!). Lestravailleurs peuvent ainsi affronter le sous-système du capital, encore dans un cadreréglementé par l’État. Ce modèle présentele risque que les institutions de formationprofessionnelle soient trop fortement in-fluencées par les structures logiques du sys-tème éducatif général et qu’elles ne dégé-nèrent en branche subordonnée de ce sys-tème.

Le modèle de formation professionnelle cor-respondant basé sur l’école présente les traitssuivants:

(1) les relations quantitatives entre deman-de de formation et formation professionnelleconcrète sont déterminées par des instancespubliques ou des bureaucrates. Ce type deplanification de la demande ne pouvant pasêtre très affiné, il fonctionne de la manièrela plus efficace lorsqu’il repose sur un contin-gent limité de professions de base;

(2) les types de qualifications profession-nelles (aspect qualitatif) dépendent moinsde leur application immédiate dans les en-treprises. L’abstraction, la verbalisation et lathéorisation constituent généralement lesprincipes centraux des programmes desécoles professionnelles. Les métiers simplesreposant sur des activités pratiques ne per-mettent pas de mettre en œuvre ces prin-cipes d’une manière souhaitable;

(3) les modèles de formation scolaire se ca-ractérisent généralement par une distinctionnette entre les différents types de cours deformation. L’admission aux divers établisse-ments scolaires, qui sont très hiérarchisés enfonction de la demande de qualification etdes diplômes décernés, dépend normale-ment de la possession de différents diplômesde fin d’études générales, ou d’examens d’en-trée particuliers;

(4) la formation professionnelle scolaire estfinancée par le budget de l’État. Du fait deleurs limites inhérentes, les écoles profes-sionnelles ne peuvent pas généralement re-cevoir tous les élèves d’une même cohorte

scolaire. Dans cette perspective, les mo-dèles de formation scolaire semblent pourl’essentiel correspondre à un système élitis-te qui se concentre tout d’abord sur la trans-mission de qualifications professionnellesde niveau plus élevé;

(5) les modèles de formation professionnellescolaire sont presque nécessairement sou-mis à «l’effet d’escalator»: cela signifie queleurs formations ont tendance à s’élever surl’échelle des qualifications, au moins à moyenterme. Par conséquent, il faut sans cessemettre en place de nouvelles formations ouinstitutions pour remplacer les niveaux dequalification les plus faibles. Ainsi, la for-mation professionnelle pour tous est en étatde crise quasi permanent.

Le modèle dual entreprise-école, qui n’exis-te que dans le monde germanophone, uti-lise un nouveau sous-système indépen-dant de «formation professionnelle» en tantque moyen de communication entre le tra-vail, le capital et l’État. L’intervention d’ins-titutions remises au goût du jour par la loiet traditionnellement «intermédiaires» (le sys-tème des chambres professionnelles régle-mentées par l’État), qui administrent et gè-rent la qualification des travailleurs pour lecompte de l’État, permet au moins de com-penser certaines lacunes de l’État et du mar-ché dans un domaine important de conflitpublic. Cependant, la prise de distance or-ganisationnelle et juridique évidente du sys-tème de formation professionnelle, en par-ticulier par rapport au système «d’enseigne-ment supérieur» (lycées et universités), créedes problèmes considérables.

Le système dual de formation profession-nelle correspondant présente les traits sui-vants:

(1) les systèmes de formation profession-nelle duale sont largement isolés du secteurde l’enseignement général. Ils disposent deleurs propres structures organisationnelleset de règlements de formation puisqu’ils sont,pour l’essentiel, gérés par le secteur privé.Relevant à la fois d’un schéma de marché etd’un schéma de réglementation bureaucra-tique, ils exigent une coordination compli-quée;

(2) les entreprises sont le principal lieu deformation dans ce système «coopératif».Les jeunes signent un contrat de formationprivé avec l’entreprise dont ils deviennent

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salariés avec un statut spécial de formés. Dufait qu’ils suivent parallèlement l’école pro-fessionnelle, ils sont aussi soumis aux règlesdu système éducatif général;

(3) les employeurs, les syndicats et les ins-tances publiques décident ensemble des pro-fils de carrière et des règlements de forma-tion dans le cadre d’un processus réglementé.Ils sont légitimés grâce à une loi adoptéepar le Parlement;

(4) les entreprises individuelles payent gé-néralement pour la formation. Leurs coûtspeuvent être déduits de leurs impôts. L’en-treprise accorde à ses formés une «rémuné-ration», dont le montant est fixé par la né-gociation collective. Les écoles profession-nelles sont financées par le secteur public;

(5) les systèmes de formation profession-nelle duale reposent sur la tradition de l’ar-tisanat. Trois de leurs principes traditionnelssurvivent à ce jour: le principe du métier(Berufsprinzip), le principe de l’autogestion,qui s’applique au moins à la partie princi-pale de la formation qui se déroule en en-treprise, et le principe de la formation pen-dant le travail.

Nous estimons que ces trois modèles de for-mation professionnelle constituent des pro-totypes générés dans le cadre de la recherchepar les nations européennes de nouvellesmanières d’aborder la formation profes-sionnelle pour tous dans le sillage de l’in-dustrialisation (Greinert, 1999). Nous consi-dérons que ce processus ne contient pasd’autres modèles que l’Europe pourraitutiliser comme références et nous affirmonsque tous les autres modèles de formationprofessionnelle nés dans les différents paysd’Europe au cours des XIXe et XXe sièclessont des variations et/ou des combinai-sons de ces trois prototypes ou modèles debase.

IV.

La dimension européenne de la réflexionconceptuelle sur la formation des types debase spécifiques de formation profession-nelle à l’ère industrielle apparaît clairementsi l’on examine les constats faits dans lessections II et III à la lumière du contexte desidées. On est tenté d’adopter la dialectiquecaractéristique de l’Occident qui consiste à

réfléchir par éléments de trois, puisque notrerecherche parvient sans effort à identifiertrois idées qui interagissent de manière spé-cifique. Il s’agit de la tradition (le principedu métier), du rationalisme (le principe aca-démique) et du libéralisme (le principe dumarché).

Ainsi, trois principes centraux de légitima-tion de la pensée européenne constituent lecontexte conceptuel dans lequel s’inscriventles trois modèles de formation profession-nelle. Les principes ne s’appliquent pas seu-lement au niveau régulateur des modèles,mais ils structurent aussi leur niveau opéra-tionnel, c’est-à-dire les activités de forma-tion professionnelle effectives des différentstypes apprenants spécifiques. Cette approchea beaucoup à voir avec les trois «styles dequalification» conçus par Thomas Deißinger(Deißinger, 1998). Cependant, il existe plu-sieurs différences significatives.

Nous définissons notre typologie des mo-dèles de légitimation de la formation pro-fessionnelle européenne de la manièresuivante:

(1) l’approche du métier: selon la vision mo-derne, née après les Lumières, ce modèlede légitimation s’appuie sur la tradition, c’est-à-dire d’une part sur les pratiques profes-sionnelles réelles mises en œuvre en Euro-pe depuis le Moyen Âge et, d’autre part, surdes métiers en tant que formes éprouvéesde catégorisation des formes organisation-nelles des ressources humaines. Dans cet-te perspective, les métiers sont conçus com-me des combinaisons spécifiques des élé-ments travail, qualifications et revenus. Lesactivités qu’ils impliquent sont déterminéesen fonction des traditions et des dispositifssociaux.

Les éléments de base des métiers individuelssont regroupés en modèles d’échange ca-ractéristiques. D’une part, un métier, en tantque modèle normalisé d’échange social, for-me le lien central entre les relations sociales,qui sont déterminées en fonction de leur «rô-le». D’autre part, les métiers sont la premiè-re source d’auto-identité, c’est-à-dire de l’ima-ge que les individus ont et donnent d’eux-mêmes à leur milieu. Sur ce point, rien n’afondamentalement changé en Europe.

La catégorie «profession» permet à un mo-dèle de formation de développer la capaci-té de transférer les questions et problèmes

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économiques, sociaux et pédagogiques dansun cadre logique basé sur un système et deles traiter de manière productive. Cette ca-pacité, que la théorie des systèmes modernesappelle «autoréférence», peut faire naître unsystème de formation indépendant;

(2) l’approche académique: ce modèle delégitimation repose sur la conviction que larationalité académique doit s’appliquer pourfixer le principe pédagogique organisation-nel des qualifications professionnelles. L’ac-cès pratique au monde matériel ne devraitplus passer par l’application rétrospectivedes découvertes scientifiques aux expériencesliées à la tradition des entreprises et pro-fessions individuelles, mais se faire en sou-mettant toutes les pratiques à un suivi et uneexpérimentation scientifiques.

Le concept visant à acquérir des qualifica-tions professionnelles par le biais d’une ap-proche académique est un produit direct desLumières et incarne l’esprit de modernité,c’est-à-dire l’idée selon laquelle la science,et en particulier les mathématiques et lessciences naturelles exactes, domineront lemonde, notamment sur le plan technique.L’École polytechnique a été fondée en 1795à Paris en tant qu’institution de formationinitiale centrale pour les ingénieurs. C’étaitle point de départ de l’approche visant ànormaliser la formation professionnelle dansle cadre d’une formation académique spé-cialisée pour tous les niveaux de formation.

Les modèles de formation exclusivement ba-sés sur la connaissance sont particulièrementefficaces pour les professions «de haut ni-veau». Toutefois, ils parviennent difficilementà assurer la nécessaire intégration entre lesqualifications intellectuelles et l’acquisitiondes compétences pratiques pertinentes;

(3) l’approche du marché: ce modèle de lé-gitimation est basé sur les enseignements etprincipes du libéralisme économique et del’économie nationale classique. Son postu-lat central est que les gens sont capablesd’organiser de manière efficace leurs inter-actions sociales, particulièrement leur vie detravail, sur la base de leur propre raison etraisonnement.

À côté des principes de la décentralisationéconomique, de la propriété privée, de lacompétition sur un marché libre, du librechoix du métier et de l’emploi, du princi-pe du mérite, etc., le libéralisme économique

rejette toute intervention de l’État dans l’éco-nomie, qui est entre les mains d’individusautonomes, et demande que la politique del’État se contente de satisfaire les besoinsgénéraux de base. Il s’agit donc d’éviterles contraintes (par exemple, l’applicationde «devoirs» régis par la loi). La prise encompte stricte de la responsabilité de l’in-dividu pour lui-même ne devrait pas être in-terprétée seulement comme un élémentde la liberté. C’est également tout ce que leslibéraux attendent d’un mécanisme d’adap-tation sociale.

Les systèmes de qualification orientés sur lemarché ne dispensent que des qualificationsmonnayables, c’est-à-dire un savoir pratiquespécifique à une entreprise, des compétenceset attitudes nécessaires pour occuper despostes concrets. Les jeunes ne sont pas in-vités à acquérir une qualification particuliè-re après l’achèvement de la scolarité obli-gatoire. Leur intégration dans le système so-cial et d’emploi dépend en premier lieu despressions du marché.

Les trois modèles de légitimation des ap-proches modernes de la formation profes-sionnelle en Europe, décrits ci-dessus, sontbasés sur des idées centrales qui peuventêtre considérées comme les nouveaux prin-cipes d’ordre des interactions humaines etdes interprétations modernes du monde de-puis les Lumières. Cependant, des doutes si-gnificatifs peuvent apparaître en ce qui concer-ne l’orientation sur la tradition. Ils ne nousparaissent pas fondés. Le plus fameux Bil-dungsroman des temps modernes, l’Émilede Jean-Jacques Rousseau, traite du pro-blème de l’orientation religieuse. Pour lesLumières, la relativité philosophique de toutesles religions est évidente, et Rousseau nevoyait pas de raison rationnelle de faire unchoix particulier. Toutes les religions révé-lées proposent des options également plau-sibles. Cependant, et ce point est surpre-nant, Rousseau recommande à ses élèves des’en tenir à la religion de leurs ancêtres et iljustifie son choix par la tradition. Considé-rée de manière critique, cette position semblealler au-delà des Lumières. Herwig Blan-kertz, expert en formation professionnelle,affirmait: «La tradition, c’est l’arsenal de va-leurs que nous acquérons non parce quenos sens nous les enseignent, mais parceque nous y croyons grâce à l’héritage léguépar les générations passées (...). L’approchepédagogique de Rousseau ne représente pasun défi mental difficile, mais intègre la puis-

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sance de la tradition dans le système ra-tionnel de l’éducation naturelle, en tant qu’ul-time déclaration sur la légitimisation desorientations des hommes sur des normes»(Blankertz, 1982, p. 78 et suiv.).

Nous estimons que l’approche liée au mé-tier, l’approche académique et celle ayanttrait au marché devraient être considéréescomme des exemples d’orientation didac-tique présents dans tous les modèles euro-péens de formation professionnelle, y com-pris dans ceux qui semblent dominés parune structure ou une réglementation spé-cifiques. Dans le système allemand, l’ap-proche du marché (par exemple, dans laformation continue) et l’approche acadé-mique (dans pratiquement toutes les écolesprofessionnelles) complètent l’approche liéeau marché comme éléments importantsau niveau opérationnel. Le modèle de for-mation français comporte des éléments del’approche du métier et de l’approche dumarché, à côté de l’approche académique.Même le modèle de formation britannique,fortement axé sur le marché, présente deséléments basés sur les métiers, ainsi que surla spécialisation par discipline dans les ins-titutions d’enseignement postobligatoire dupays.

En vue de comparer le profil de la forma-tion en Europe avec un autre modèle de for-mation professionnelle, il suffit de regar-der le Japon, et en particulier ses grandesentreprises. La situation y est radicalementdifférente. L’un des contrastes les plus frap-pants est l’absence de toute forme d’orien-tation professionnelle. Contrairement à l’Eu-rope, le Japon n’a pas de «culture du travail».Ni le système d’emploi, ni le système édu-catif ne sont structurés sur la base de mo-dèles de professions spécialisées. «Au Japon,l’accent mis dans le processus de qualifi-cation ne porte pas sur les contenus spé-cialisés, comme c’est le cas ici, mais plutôtsur le contexte social de l’activité. La maî-trise des «disciplines» n’entraîne pas l’ac-ceptation sociale. Au contraire, les Japonaisapprécient la disponibilité et la capacitéde s’insérer de manière productive dans unesituation de travail concrète, c’est-à-dire dansl’entreprise (Deutschmann, 1989, p. 240).Au Japon, la culture d’entreprise a rempla-cé la «culture du travail». «Les structures d’or-ganisation et de qualification propres à l’en-treprise remplacent une normalisation ex-terne du travail et de la formation et l’iden-tité professionnelle est remplacée par la

loyauté inconditionnelle à l’égard de l’en-treprise» (Georg, 1993, p. 195).

V.

En résumé, nos observations permettent deconclure à l’existence de trois modèles struc-turels de formation professionnelle en Eu-rope. Considéré dans ces trois perspectives,chaque modèle présente des caractéristiquespouvant être combinées en une unité typo-logique supérieure.

(1) Dans la perspective de la culture du tra-vail, l’économie est prioritaire dans le typeA. Le modèle de qualification est principa-lement réglementé par l’approche du mar-ché. Au niveau opérationnel, celui de l’ap-prentissage réel, le principe pédagogiquedominant est déterminé par les besoins fonc-tionnels de l’entreprise ou de l’emploi ef-fectivement occupé.

(2) Dans la perspective de la culture du tra-vail, la politique est prioritaire dans le typeB. Le modèle de qualification est principa-lement réglementé par le contrôle bureau-cratique (sur une base légale). Au niveauopérationnel (de l’apprentissage), l’approcheacadémique est prédominante.

(3) Dans la perspective de la culture du tra-vail, la société est prioritaire dans le type C.Le modèle de qualification est principale-ment réglementé par le contrôle dual, c’est-à-dire une combinaison de marché et de bu-reaucratie. Au niveau opérationnel (de l’ap-prentissage), l’élément central de la péda-gogie est l’approche liée au métier.

Ces trois types d’approche pour la forma-tion des masses laborieuses constituent deséléments de construction des modèles deformation professionnelle dans différentspays d’Europe depuis la révolution indus-trielle. Comme nous l’avons mentionné, ilsfont preuve d’une forte ténacité. On ne per-çoit pas en Europe de prise de distance dé-terminante par rapport à cette tradition. Lamodernisation et la réforme des modèles deformation professionnelle en Grande-Bre-tagne et en France au cours des vingt der-nières années du XXe siècle en apportent lapreuve. Dans les deux cas, il est apparu clai-rement que les initiatives centrales en ma-tière de réforme (National Vocational Qua-lifications et Formation en alternance res-

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pectivement) s’en sont tenues strictementaux schémas traditionnels des modèles dequalification développés au XIXe siècle (Grei-nert, 1999). Les décideurs politiques, en Gran-de-Bretagne comme en France, ont essayéd’imposer des alternatives, mais en définiti-ve ils n’avaient «guère le choix». Les struc-tures et modèles de contrôle mis en placeen Europe lors de la première révolution in-dustrielle sont encore remarquablement pré-sents. Malgré des influences techniques etsocio-économiques en mutation, malgré mê-me d’ambitieuses tentatives politiques ex-plicites pour remplacer le modèle tradition-nel par des alternatives présentées commeplus attrayantes et efficaces, les procédureset structures organisationnelles typiques desmodèles européens classiques décrits ici gar-dent la main dans les pays où elles ont étéconçues.

La même expérience risque de se répéterpour le système dual dans les pays germa-nophones, même si à ce jour aucun modè-le final généralement accepté n’a été pro-

posé pour transformer le système de qua-lification. Cela n’est pas dû au fait que lesidées et propositions convaincantes pourfranchir ce pas déterminant n’auraient pasété exposées, mais parce qu’en Allemagnepersiste un dilemme lié au fait que depuisl’adoption de la loi sur la formation pro-fessionnelle de 1969, les décideurs politiquesrefusent d’assumer le rôle qui leur a été at-tribué dans la répartition «coopérative» dutravail sur le système de formation profes-sionnelle, à savoir l’adaptation des qualifi-cations professionnelles à l’évolution per-manente des circonstances techniques et so-cio-économiques. Les deux derniers gou-vernements allemands constituent d’excel-lents exemples du refus d’agir des hommespolitiques. Il y a des années, un homme po-litique célèbre faisait remarquer qu’en gé-néral, l’Allemagne n’avait pas de problèmepour élaborer des concepts, mais pour lesmettre en œuvre. Cela semble égalementvrai dans le domaine de la formation pro-fessionnelle.

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Mots clésHistorical research,comparative analysis, culturalidentity, educationaldevelopment, institutionalframework, socio-economic conditions

Bibliographie

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Axes de recherche

L’architecture des systèmes d’enseignementprofessionnel varie fortement entre les Étatsmembres de l’Union européenne, bien qu’ilexiste d’importantes similarités et points derencontre sur les plans social, économiqueet culturel. Les différences existantes conti-nuent d’être importantes pour l’objectif po-litique visant à faire de l’Europe un lieu plusuniforme où vivre, travailler et étudier. Ellesont tendance à réduire les chances d’inté-gration, mais peuvent également offrir despossibilités spécifiques pour ces politiques.Par conséquent, il est primordial d’identifierles facteurs à l’origine des différences entreles systèmes nationaux d’enseignement pro-fessionnel. Le résultat pourrait non seule-ment servir à des fins universitaires, maiségalement contribuer à l’élaboration de stra-tégies politiques adéquates.

Nous ignorons les raisons exactes pour les-quelles l’enseignement professionnel a sui-vi une évolution différente dans des paysdont les contextes économiques et sociauxsont similaires; en effet, rares sont les étudesqui portent sur l’évolution historique dessystèmes nationaux d’enseignement profes-sionnel et encore moins nombreuses sontcelles qui abordent l’évolution de deux oude plusieurs pays dans une perspective his-torique ou comparative (1). Les descriptionsqui vont suivre pourraient contribuer à pal-lier cette lacune. Dans cet article, nous dé-crivons et examinons les débuts et l’évolu-tion des systèmes d’enseignement profes-sionnel aux Pays-Bas et en Allemagne. Bienque ces deux pays présentent des similari-tés nationales, économiques, sociales et cul-

turelles, leurs systèmes de formation et d’en-seignement professionnels sont structurésdifféremment.

L’article commence par un résumé de lastructure actuelle de l’enseignement pro-fessionnel dans les deux pays. Du fait quel’on peut présumer que les différences ap-parentes ne s’expliquent pas par des cir-constances économiques différentes, maispar l’évolution des différents systèmes d’en-seignement professionnel, nous insisteronssur les états respectifs de l’enseignementprofessionnel dans ces deux pays. Le pointde départ commun pour analyser cette évo-lution dans le temps est l’ancienne formeeuropéenne d’enseignement professionnelde l’artisanat.

Enfin, nous examinerons la genèse des sys-tèmes d’enseignement professionnel dansles deux pays dans une perspective com-parative. Afin de mieux comprendre lesformes dominantes d’enseignement profes-sionnel existant à ce jour (basé sur l’éta-blissement scolaire ou en entreprise), nousnous référerons aux arguments traditionnelsutilisés pour examiner l’enseignement pro-fessionnel en Europe, notamment le rôle del’instance intermédiaire technique, ainsi queles formes et les périodes de caractéristiquestechniques et économiques. Toutefois, encomparant les Pays-Bas et l’Allemagne, il ap-paraît que la compréhension de ces diffé-rences passe par l’examen de schémas na-tionaux distincts en termes de réflexion etde perception des domaines posant des pro-blèmes pédagogiques, notamment les ques-tions sociales, les tendances à la sur-scola-risation et l’identité professionnelle.

Entre école et entrepriseAspects de l’évolution historiquede la formation et de l’ensei-gnement professionnels auxPays-Bas et en Allemagne dansune perspective comparative

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HolgerReinisch

Directeur de l’Institutpour l’enseignementde l’économie et du

commerce del’université Friedrich

Schiller d’Iéna.

À l’heure actuelle, nous igno-rons les raisons exactes pourlesquelles l’enseignement pro-fessionnel a suivi une évolu-tion aussi différente dans despays dont les contextes éco-nomiques et sociaux sont trèssimilaires. En effet, rares sontles études qui portent sur l’évo-lution historique des systèmesnationaux d’enseignementprofessionnel dans une pers-pective comparative. Cet ar-ticle vise à pallier les lacunesdans ce domaine de recherche.Il décrit et analyse les débutset l’évolution des systèmesd’enseignement profession-nel des Pays-Bas et de l’Alle-magne, dont les structuressont très différentes. Afin defaciliter une meilleure com-préhension de ce phénomè-ne, il expose ensuite les prin-cipaux stades de l’évolutionde l’enseignement profes-sionnel aux Pays-Bas et en Al-lemagne. La comparaisonentre ces deux pays montreque les formes autrefois do-minantes de formation pro-fessionnelle (école contre en-treprise/interentreprise) re-posent en matière de ques-tions pédagogiques et socialessur d’autres facteurs culturelset modes de pensée spéci-fiques à chaque pays.

DietmarFrommberger

Chargé de cours etprofesseur assistant

de l’Institut pourl’enseignement de

l’économie et ducommerce de

l’université FriedrichSchiller d’Iéna.

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Structure actuelle de la forma-tion et de l’enseignement pro-fessionnels aux Pays-Bas et enAllemagne

Actuellement aux Pays-Bas, deux parcoursdifférents permettent d’accéder à la forma-tion et à l’enseignement professionnels. D’unepart, l’enseignement scolaire à temps pleinqui inclut des stages et, d’autre part, l’en-seignement professionnel à temps partielqui associe enseignement et stage en en-treprise. Bien que les lieux et méthodes d’ap-prentissage varient, ces deux voies reposentsur le même programme (voir Frommber-ger, 1999; 2004).

La formation et l’enseignement profession-nels (FEP) est dispensée principalement dansles écoles plutôt que dans les entreprises et,à la fin de leur scolarité obligatoire, la plu-part des élèves optent pour un cursus sco-laire plutôt que pour un cursus profession-nel. Cela se vérifie également pour les étu-diants obtenant des diplômes de meilleurniveau qui ne cherchent pas à obtenir le bac-calauréat, mais s’orientent vers l’enseigne-ment professionnel. C’est le contraire en Al-lemagne.

Lorsque l’on traite de la FEP initiale en Al-lemagne, il est normal de faire référence ausystème dit «dual». Toutefois, il est importantde souligner que l’expression «système dual»n’est pas adaptée à la structure et aux pré-ceptes de la FEP en Allemagne. Le terme«dual» correspond à une formation et à unenseignement simultanés sur le lieu de tra-vail, en entreprise, dans les services publicset dans des écoles spécialisées, mais il nesignifie pas que les deux parties du systè-me sont équivalentes. La formation sur lelieu de travail prévaut sur le volet scolairede la FEP.

Aujourd’hui, le système dual reste toujourspour les jeunes Allemands la voie de passa-ge la plus fréquentée entre l’école et la vieprofessionnelle. En 1999, l’Allemagne comp-tait quelque 3,3 millions d’étudiants âgés de16 à 20 ans. Environ 29 % étaient scolarisésdans un Gymnasium ou une école profes-sionnelle supérieure à temps plein, afin d’ob-tenir l’autorisation d’étudier à l’université oudans un institut de sciences appliquées (Fa-chhochschule). Plus de 50 % ont choisi lesystème dual afin d’obtenir une qualificationprofessionnelle reconnue. Toutefois, il exis-

te une troisième voie qui permet d’entrerdans la vie professionnelle en Allemagne, etqui est pourtant pratiquement inconnue dansles autres pays: environ 21 % des étudiantsâgés de 16 à 20 ans ont étudié dans une éco-le professionnelle à temps plein (voir Geb-beken et Reinisch, 2001, p. 287; Reinisch,2001, p. 155). Les étudiants choisissent sou-vent ce programme car, dans certaines ré-gions d’Allemagne, le système dual n’offrepas suffisamment de places; ils optent alorspour une école professionnelle à temps pleinen attendant une place dans le système dual.Une minorité d’étudiants choisissent desécoles professionnelles spécialisées à tempsplein, qui les forment aux professions d’in-firmier, d’instituteur de maternelle, ou d’as-sistant technique en médicine ou en chimie.Ces professions n’ont jamais été intégrées ausystème dual. À notre avis, cela est dû au faitque ces professions sont typiquement fé-minines (voir Feller, 1997). Par ailleurs ilconvient de souligner un point important etsurprenant vu de l’extérieur: environ 20 %des étudiants admis à l’université optent pourle système dual plutôt que pour la filière uni-versitaire pour accéder à la vie profession-nelle. L’apprentissage, c’est-à-dire le voletprofessionnel du système dual, est la voie laplus attrayante pour la majorité des jeunesen Allemagne qui veulent entrer dans lavie professionnelle. Il est également appré-cié des entreprises.

Évolution de la formation et del’enseignement professionnelsaux Pays-Bas et en Allemagne

Pays-Bas

Il est nécessaire d’examiner l’histoire pourcomprendre la prédominance de la forma-tion et de l’enseignement professionnels ba-sés sur l’école aux Pays-Bas. De 1798 - aprèsl’abolition des guildes - à 1860, pratique-ment aucune FEP systématique n’est dis-pensée et il n’existe ni école professionnel-le pour les pauvres (Industriescholen, werk-scholen), ni cours du soir pour apprendrele dessin (Avondtekenscholen) (voir Goud-swaard, 1981, p. 91, p. 104). À cette époque,il n’existe que peu de possibilités de quali-fier les jeunes pour faire face aux besoinscroissants de l’industrie et du commerce.Seules quelques régions des Pays-Bas ontune tradition d’apprentissage, par exempleles régions de la Drenthe et de la Frise oc-

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(1) La lacune formulée définit lecontexte de l’initiative du Cedefopen faveur de l’échange d’informa-tions entre les chercheurs en histoiredes systèmes nationaux d’ensei-gnement professionnel. Dans le cadrede cette initiative, la première confé-rence internationale sur l’histoire dela formation et de l’enseignementprofessionnels en Europe dans uneperspective comparative, organiséepar l’université de Florence, l’Insti-tut universitaire européen et le Centreeuropéen pour le développementde la formation professionnelle (Ce-defop), s’est tenue à Florence les 11et 12 octobre 2002. Cet article estune version abrégée du documentprésenté lors de la conférence.

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cidentale (voir Bruinwold Riedel, 1907; San-tema and Maandag, 1991).

En raison d’un manque de travailleurs qua-lifiés, à partir de 1860 un nombre croissantd’écoles professionnelles à temps plein sontcréées. Ces ambachtscholen sont des écolestraditionnelles et techniques d’artisanat àtemps plein, proposant un programme detrois ans dispensé dans la journée, visant àformer les élèves à des professions artisa-nales spécifiques dans le travail du bois etdu métal. La création des écoles techniquesd’artisanat était due à des initiatives lo-cales privées, lancées, par exemple, par l’As-sociation pour la manufacture et l’artisanat(Vereniging ter Bevordering van Fabrieks-en Handwerksnijverheid), ou la Société pourle bien-être public (Maatschappij tot Nut van‘t Algemeen). Le nombre d’écoles a augmentélentement mais, en 1890, 18 écoles tech-niques d’artisanat étaient établies aux Pays-Bas et, depuis, ces écoles ont également bé-néficié de subventions gouvernementales.Ainsi, ce type d’école professionnelle est-ildevenu partie intégrante du système édu-catif national.

Toutefois, il y avait débat pour décider s’ilvalait mieux opter pour l’apprentissage oupour les écoles à temps plein pour obtenirune qualification professionnelle. Certainesorganisations, par exemple l’Association gé-nérale des travailleurs néerlandais (AlgemeenNederlands Werklieden Verbond), plaidaienten faveur de l’adoption du système d’ap-prentissage. D’autres lui préfèraient les écolesà temps plein. À ce propos, Wolthuis (2001,p. 119) écrit: «L’école d’artisanat présentaitl’avantage de pouvoir faire la preuve de laréussite d’un apprentissage [...]. Les direc-teurs et les enseignants de ces écoles pre-naient une part active aux [...] débats. Lesdéfenseurs du système d’apprentissage fai-saient partie soit des cercles des grandes in-dustries, soit des cercles des organisationsde travailleurs. Cela signifie que le systè-me d’apprentissage était considéré commeune préparation à des emplois dans desgrandes industries, tandis que les écoles d’ar-tisanat étaient principalement tournées versles petites industries et l’artisanat.» Toutefois,après 1895, le système d’apprentissage neconstitue plus une réelle alternative auxécoles d’artisanat aux Pays-Bas, mais seule-ment une option complémentaire dans cer-tains domaines, ou dans certaines grandesusines. Cette relation entre les écoles à tempsplein et l’apprentissage est une caractéris-

tique marquante de la FEP aux Pays-Bas auXIXe siècle et encore davantage au XXe siècle.La plupart des Néerlandais estiment que lameilleure façon de dispenser des qualifica-tions professionnelles aux jeunes étaient deles envoyer à l’école et non dans une en-treprise.

Après la Première Guerre mondiale, les au-torités publiques néerlandaises commencentà intervenir dans la FEP. En 1919, une nou-velle loi réglemente à la fois le système deFEP dans les écoles et le système d’ap-prentissage. La loi Nijverheidsonderwijswetconcerne la FEP dans l’artisanat et le secteurtechnique. Le nouveau terme utilisé est l’en-seignement professionnel (voir Gelder, 1919).La nouvelle loi sur l’enseignement profes-sionnel établit une distinction entre l’en-seignement professionnel de base et inter-médiaire. L’enseignement professionnel debase est censé préparer les élèves à un simpletravail manuel d’ouvrier, tandis que l’en-seignement professionnel intermédiaire lesprépare à un travail de supervision, du ty-pe contremaître ou superviseur. Cette nou-velle loi résulte du nombre croissant de jeunesoptant pour la FEP, ce qui a entraîné uneaugmentation rapide des étudiants et desécoles. Le montant des subventions de l’É-tat a également augmenté rapidement. Lesautorités publiques souhaitent renforcer lecontrôle sur l’enseignement professionnelde base et intermédiaire de jour et établirune meilleure cohérence entre eux. Par consé-quent, l’intervention publique dans la for-mation et l’enseignement professionnels estdevenue dès lors systématique.

La formation et l’enseignement commerciauxse déroulent presque intégralement dans lesétablissements scolaires - écoles de com-merce intermédiaires et supérieures - dansle cadre du système éducatif général natio-nal ou d’enseignement supérieur et ne sontpas régis par la nouvelle loi de 1919 (voirHoksbergen, 1975). Le ministère de l’agri-culture garde la maîtrise de l’enseignementagricole, qui échappe aussi au champ d’ap-plication de la nouvelle loi.

Après la Seconde Guerre mondiale, la rapi-de industrialisation a entraîné une deman-de de travailleurs qualifiés. Le nombre d’écoleset d’étudiants a de nouveau connu une aug-mentation rapide. Entre 1949 et 1974, la du-rée de l’enseignement obligatoire est passéede 7 à 10 ans. Un nombre croissant de jeuneschoisissent de suivre un second cycle de

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l’enseignement secondaire, ou une forma-tion et un enseignement professionnels in-termédiaire ou supérieur.

En 1963, la loi sur l’enseignement secon-daire (Mammoetwet) est adoptée et entre envigueur en 1968. Cette loi permet de re-grouper toutes les écoles de l’enseignementgénéral et de la FEP initiale (durant le pre-mier et le second cycles de l’enseignementsecondaire) dans un cadre juridique unique,fait inconcevable en Allemagne. Malgré laforte demande de travailleurs qualifiés, lamajeure partie de la formation et de l’en-seignement professionnels est dispenséedans des établissements scolaires. La loide 1963 fait une distinction entre la forma-tion et l’enseignement professionnels, l’en-seignement secondaire général et l’ensei-gnement pré-universitaire. Les étudiantsen FEP ont le choix entre les programmesde base, intermédiaire et supérieur(LBO/MBO/HBO). Dans la FEP de base, quiconcerne le premier cycle de l’enseignementsecondaire, il est possible de s’orienter versl’enseignement professionnel, ménager ettechnique, l’enseignement agricole et horti-cole (toujours sous l’égide du ministère del’agriculture), ainsi que vers l’enseignementcommercial, économique et administratif.Les anciennes écoles professionnelles d’ar-tisanat deviennent des écoles profession-nelles de base (LTS), l’enseignement tech-nique de base étendu devient la FEP inter-médiaire et l’ancien enseignement techniqueintermédiaire devient la FEP supérieure.D’aucuns pensent qu’à l’époque, la FEP cher-chait encore à se repositionner, d’une parten généralisant son enseignement, mais éga-lement, d’autre part, en différenciant et enétendant les cours (voir Frommberger, 1999,p.162).

Le système d’apprentissage ne relève pas decette nouvelle loi sur l’enseignement se-condaire. Il est cependant couvert par unelégislation spéciale en application de la loide 1966 sur la formation et l’enseignementprofessionnels à l’école. Cette loi fait desécoles d’artisanat une partie obligatoire dusystème. Désormais, les Pays-Bas sont do-tés d’un système de FEP - avec interventionpublique systématique - à la fois pour lesprogrammes scolaires et en entreprise. Ce-pendant, une nouvelle fois, la plupart desétudiants optent pour le parcours scolaire.

Au début des années 1970, et notammentdans les années 1980, deux sujets dominent

les débats publics sur la formation et l’en-seignement professionnels. Premièrement,les effets de la généralisation sont de plusen plus critiqués. La formation et l’ensei-gnement professionnels dans les écoles -d’après les critiques - dispensent aux étu-diants une préparation insuffisante pour fai-re face aux exigences professionnelles. Ledeuxième sujet est le chômage des jeunes.Au cours des années 1980, le chômage connaîtune augmentation rapide et un nombre crois-sant de jeunes décident de prolonger leuréducation scolaire. Certains comités officielspréconisent l’amélioration des relations entrela formation et l’enseignement et le marchédu travail. Ils recommandent la mise en pla-ce d’un système dual (le mot d’ordre était ladualisation, voir Commissie Dualisering 1993),soit en forgeant une meilleure réputation ausystème d’apprentissage, soit en donnantplus de place à la composante technique dela FEP intermédiaire et supérieure. Un vraidualisme est mis en place par la nouvelleloi de 1996 sur la formation et l’enseigne-ment professionnels grâce au travail deces comités. Il existe désormais deux filièresde formation et d’enseignement professionnelsayant la même valeur (formelle): le parcoursscolaire et le parcours professionnel.

Allemagne

Afin d’expliquer ou de mieux comprendrela prédominance de la formation et de l’en-seignement en entreprise en Allemagne, ilest indispensable d’étudier l’histoire du sys-tème dual. Ce système a été mis en placedans la période 1880-1920 (voir Greinert,1995), mais la tradition de l’apprentissageest une tradition bien plus ancienne. Lesguildes d’artisans et de commerçants éta-blirent ce type de FEP aux XIVe et XVe sièclesdans la plupart des pays européens, maisperdirent beaucoup de leur importancesociale et économique au début du XIXe

siècle (voir pour l’Angleterre et le Pays deGalles: Deissinger 1992; pour la France:Schriewer 1986; Oerter and Hörner, 1995 etpour les Pays-Bas: Frommberger, 1999).En Allemagne, les guildes ou corporationsexistent encore de nos jours. Ces corpora-tions décident des réglementations sur l’ap-prentissage, sans la participation d’autrescommunautés d’intérêt tout au long du XIXe

siècle et, même de nos jours, elles exercentune forte influence sur la FEP en Allemagne.

Les autorités publiques des Länder allemands- Prusse, Bavière et Saxe entre autres - ne

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s’engagent pas avant 1870 dans la formationprofessionnelle des artisans, des employésde bureau et des ouvriers. Elles concentrentalors leur engagement juridique et financiersur les institutions de l’enseignement obli-gatoire et de l’enseignement supérieur. Lesuniversités et les écoles d’architecture et d’in-génieurs et, plus tard, de commerce et degestion, sont créées principalement pour ré-pondre aux besoins engendrés par le dé-veloppement de la bureaucratie. Les écolestechniques et commerciales à temps pleinsont fondées sur une initiative privée pourla qualification de l’encadrement de base etintermédiaire dans le commerce, l’industrieet la banque. Certaines écoles à temps par-tiel pour les apprentis et les artisans ont éga-lement été établies sur une initiative privée,principalement en vue de dispenser unenseignement, soit le dimanche soit le soiraprès leur travail, à de jeunes gens ayant unemploi pendant la semaine. Les matières en-seignées sont la lecture et l’écriture, l’arith-métique et le dessin technique, notammentpour les jeunes ouvriers, et la comptabili-té, pour les jeunes employés de bureau. Cesécoles d’enseignement postobligatoire por-tent le nom de Fortbildungsschule ou Sonn-tagsschule et sont les prémisses des Berufs-schule, nom allemand des écoles profes-sionnelles à temps partiel pour apprentis.

Le système dual associe l’enseignement àtemps partiel dans une Berufsschule à unapprentissage en entreprise ou dans un ser-vice public. Toutefois, si les autorités pu-bliques ajoutent par le biais d’actes juridiquesla Fortbildungsschule, école privée d’ensei-gnement postobligatoire, à l’apprentissageà la fin du XIXe siècle, c’est principalementparce qu’elles ne souhaitent pas intensifierla qualification professionnelle des appren-tis. Le mouvement politique de la classe ou-vrière a pris une plus grande ampleur du-rant la période d’industrialisation de l’Alle-magne pendant la seconde moitié du XIXe

siècle et de nombreux jeunes travailleurs etapprentis ont adhéré aux syndicats et au par-ti socialiste. Les membres dirigeants desclasses moyennes et supérieures cherchentun moyen d’influencer les esprits et les opi-nions politiques des jeunes travailleurs etdécouvrent un vide éducatif entre la fin del’enseignement obligatoire et le début duservice militaire. La première tentative pourcombler ce vide a consisté à rendre la Fort-bildungsschule et, plus tard, la Berufsschu-le obligatoires dans l’enseignement de tousles jeunes travailleurs des deux sexes. La

deuxième tentative a consisté à modifier leprogramme éducatif. Les matières sont axéessur des branches professionnelles ou tech-niques de la connaissance et associées àl’instruction civique, qui fait aujourd’hui en-core partie du programme de la Berufsschule.

Au cours du premier quart du XXe siècle, unautre changement remarquable s’est produitdans la structure du système dual: l’ap-prentissage est mis en place dans l’industriemanufacturière. Les associations allemandesd’employeurs des industries métallurgiques,électriques et chimiques notamment, créentun nouveau type d’ouvrier qualifié, connuen Allemagne sous le nom de Facharbeiter.Ils copient la forme traditionnelle d’ap-prentissage des artisans, en modifiant ce-pendant la manière d’enseigner et d’ap-prendre. Ils mettent en place un aspect plussystématique et didactique de la formationprofessionnelle hors du lieu de travail, dansun local séparé appelé Lehrwerkstatt.

Ultérieurement, la structure du système dualallemand reste pratiquement inchangé jus-qu’en 1968, année de l’entrée en vigueurd’une loi sur l’apprentissage, la Berufsbil-dungsgesetz, qui réglemente encore au-jourd’hui les droits et devoirs des appren-tis et des employeurs. Elle autorise les as-sociations d’employeurs et les syndicats, enassociation avec les pouvoirs publics, à éla-borer des programmes de formation pro-fessionnelle au sein des entreprises; au-jourd’hui, ces programmes couvrent envi-ron 400 professions. Ils ont un caractère obli-gatoire pour les deux partenaires du contratd’apprentissage. Les associations d’employeurset les syndicats influent également de façonimportante sur le processus d’élaborationdes programmes des écoles professionnellesdans le cadre du système dual; toutefois, cesprogrammes sont mis en œuvre par la voielégale des autorités publiques des Länderallemands et non du gouvernement fédéral.

Le système allemand de FEP initiale présentede nombreuses «dualités» au sein du systè-me dual, qui ne se réduisent pas à la dua-lité entre formation sur le lieu de travail etenseignement dans des écoles profession-nelles. Néanmoins, la prévalence de la voieprofessionnelle dans la FEP initiale en Alle-magne est acceptée par les entreprises, lesjeunes, le gouvernement, les hommes po-litiques et les syndicats.

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Hypothèses expliquant lesdifférences d’évolution de laFEP en Allemagne et aux Pays-Bas

Après avoir décrit les principales caractéris-tiques de l’évolution historique de la FEP enAllemagne et aux Pays-Bas, il est possiblede déterminer les facteurs qui peuvent per-mettre une meilleure compréhension desdifférences.

En résumé:

❑ aux Pays-Bas, la FEP était principalementdispensée dans le système scolaire. Il s’agis-sait d’une préparation théorique et généra-le à l’entrée dans la vie active et égale-ment dans l’enseignement supérieur. Danscette conception traditionnelle néerlandai-se, le travail et l’apprentissage en entrepri-se - le cursus professionnel - ne sont pas«fonctionnels». En revanche, la FEP est fonc-tionnelle à l’école;

❑ en Allemagne, la FEP est principalementenseignée dans le système dual. La plupartdes étudiants qui souhaitent obtenir des qua-lifications professionnelles optent pour cetype de FEP, «l’odeur forte des entreprises»étant préférée à la FEP, très éloignée de lademande réelle.

À notre avis, les principales questions à seposer sont les suivantes:

(a) pourquoi tant d’entreprises allemandes,non seulement d’artisanat mais égalementde plus grandes entreprises industrielles, ac-ceptent-elles de soutenir et de financer laFEP dans de telles proportions ? Pourquoitant d’entreprises allemandes acceptent-ellesd’accorder des qualifications professionnellessur la base de programmes normalisés pré-sentant un niveau élevé de qualifications gé-nérales et une orientation professionnelle(et non seulement une orientation vers l’en-treprise) ? Et pourquoi cela ne s’est-il pasproduit aux Pays-Bas ?

(b) pour quelles raisons la filière scolairede la FEP a-t-elle été «fonctionnelle» pour lesentreprises néerlandaises ? Pourquoi n’est-ce pas le cas en Allemagne ?

Certaines hypothèses peuvent être émisespour la première question:

(a) en Allemagne, il n’y a pas eu d’aboli-tion des guildes dans les mêmes proportionsqu’aux Pays-Bas. Les Pays-Bas étaient oc-cupés par la France, qui a appliqué à la lettrecette abolition. Étant donné la force de l’«in-termédiation efficace entre citoyens et État»(Schriewer, 1986) dans le contexte allemand,il était possible de plaider pour une FEP or-ganisée dans de nombreuses entreprises;

(b) au XXe siècle, ce type de FEP a été adop-té en Allemagne par les principales indus-tries. Elle était «fonctionnelle» pour fournirdes qualifications professionnelles vastes etnormalisées. Les travailleurs qualifiés et lesentreprises ont pu travailler ensemble étantdonné que chacun savait ce qu’il pouvait at-tendre de l’autre. Aux Pays-Bas, un pro-cessus aussi formalisé pour l’élaboration desprogrammes de formation n’a jamais eu lieudans les entreprises;

(c) enfin, et surtout, le concept de «pro-fession» a été associé à un argument péda-gogique: dans la philosophie allemande, ilétait bon pour les adolescents d’entrer dansune entreprise et de découvrir la «vie réel-le». Dans la philosophie néerlandaise, il va-lait mieux fréquenter l’école le plus long-temps possible.

Certaines hypothèses peuvent être émisespour la seconde question:

(a) aux Pays-Bas, l’intervention gouverne-mentale visant à financer et réglementer laFEP a été tardive mais forte. L’économie avaitbesoin de travailleurs qualifiés; c’est pour-quoi de nombreuses écoles ont été crééesrapidement. Les entreprises se sont habi-tuées à l’intervention de l’État, car les em-ployeurs ne devaient plus payer pour la FEP;

(b) progressivement, les employeurs ont es-timé «fonctionnel» de recruter les jeunes aprèsleur FEP dans des écoles d’artisanat à tempsplein;

(c) la philosophie concernant la FEP étaitdifférente: pour eux, il était bénéfique pourles jeunes de rester aussi longtemps que pos-sible à l’école au lieu d’entrer trop tôt dansle monde du travail.

Enfin, nous souhaitons souligner trois as-pects. Premièrement, il faut étudier l’his-toire de la FEP pour découvrir les facteursqui permettent d’expliquer les différencesentre les systèmes nationaux d’enseignement

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professionnel. En deuxième lieu, l’analysede l’histoire d’un ou plusieurs systèmesnationaux de FEP concerne non seulementl’évolution économique, sociale et technique,mais également des facteurs culturels, no-tamment les mentalités nationales ou lesmodes de penser l’éducation, le travail et la

formation. Enfin, nous devons intensifier larecherche sur l’histoire de la FEP, car nousavons besoin d’études supplémentaires por-tant non seulement sur l’évolution historiqued’un système national de FEP, mais égale-ment sur l’évolution de deux pays ou plusdans une perspective comparative.

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Bibliographie

Mots clésNursing training, research into nursing, training, innovative change, time, qualifying school

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Permettre, légitimer,marginaliser: l’histoire en tantque politique de FEP

Cet article s’interroge sur le rôle des cher-cheurs en éducation et de l’histoire de l’édu-cation en tant que base constitutive dudiscours politique et pratique sur l’ensei-gnement professionnel. La mondialisationde l’économie et de l’utilisation des res-sources humaines remet en cause les mo-dèles et les pratiques du développement descompétences et de l’identité professionnellesqui ont pris forme dans le contexte de laconstruction d’ordres politiques, industrielset professionnels nationaux. Le «pays» est gé-néralement le point de départ des politiquesqui relèvent les défis - amélioration de lacompétitivité, de la mobilité, de la transfé-rabilité et de la flexibilité. On est à la re-cherche dans tous les pays de critères com-muns, de cadres et de principes uniques dedéveloppement de la FEP et de bonnes pra-tiques pour sa mise en œuvre (Livre blanc,1995; UE, 2002). Dans la comparaison entrepays, les modèles de FEP et les pratiquessont interprétés comme systèmes. La qua-lité et les bonnes pratiques identifiées sontimputées au système de FEP d’un pays. Ladiffusion des bonnes pratiques et l’adoptionde cadres uniques amènent toutefois à sedemander pourquoi les pays diffèrent et ceque l’on peut faire pour améliorer les sys-tèmes. C’est là qu’intervient le discours surles «modèles». Le lien de l’éducation et del’histoire avec les programmes politiques ouculturels au niveau transnational est moinsclair qu’au niveau national. En reconnais-sant certains phénomènes, changements etcontinuités dans la FEP, et en les rendant vi-sibles, les chercheurs contribuent à définirla FEP. Tant que les possibilités de recherche

historique sur la FEP conduite en coopéra-tion entre cultures ne jouent qu’un rôle mar-ginal, on peut être tenté d’adopter pour letravail et la FEP des interprétations univer-salisantes, même si elles ont été dévelop-pées à partir de cadres culturels spécifiquessélectionnés.

La plupart des études sur la transformationde la FEP en Europe sont focalisées sur lessystèmes, y compris lorsqu’elles partent deperspectives sectorielles spécifiques (prin-cipalement techniques) (1). La FEP elle-même est rarement envisagée comme undomaine intrinsèquement complexe, com-posé de différents secteurs et s’inscrivantdans des programmes éducatifs, politiqueset sociaux plus vastes. Une typologie cou-rante des systèmes de FEP employée dansles discussions et les politiques transnatio-nales est celle de Wolf-Dietrich Greinert(1990): dans sa description des caractéris-tiques du système allemand de FEP, il faitune distinction entre le modèle commercial,libéral (Japon, Royaume-Uni, États-Unis), lemodèle bureaucratique ou scolaire (France,Italie, Scandinavie) et le modèle dit «dual»(Autriche, Allemagne, Suisse). Par la suite(1999), il a rebaptisé ces trois types «modèlesclassiques d’enseignement professionnel».Car, selon lui, après la seconde révolutionindustrielle, les modèles ont commencé às’amalgamer, mais les modèles classiquesont conservé leurs caractéristiques fonda-mentales. La version améliorée sur des pointsessentiels par Thomas Deissinger (1995) estmoins populaire: elle introduit, par opposi-tion aux facteurs d’output de la FEP, des fac-teurs d’input mis en œuvre, appelés stylesde qualification, avec leurs dimensions struc-turelles et fonctionnelles:

Modèles, paradigmes oucultures de l’enseigne-ment professionnel

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Anja HeikkinenProfesseur,Département depédagogie, universitéde Jyväskylä,Finlande

En faisant apparaître certainsphénomènes, entités, chan-gements et continuités signi-ficatifs pour l’enseignementprofessionnel, les chercheurscontribuent à définir le tra-vail et l’enseignement aux ni-veaux local, régional, natio-nal et supranational. Quelleshistoires et quels schémasvont avoir cours dans les dis-cussions transnationales surla FEP? Les études sur la trans-formation de l’enseignementprofessionnel en Europe par-lent de systèmes, même lors-qu’elles partent de perspec-tives sectorielles spécifiques.La FEP est rarement consi-dérée comme un domaine in-trinsèquement complexe etcomme le produit de pro-grammes éducatifs, politiqueset sociaux plus larges. Cet ar-ticle tend à montrer la né-cessité de recherches trans-culturelles sur l’émergencede significations et de fonc-tions de l’enseignement pro-fessionnel. Des études sur lespériodes de l’histoire où laFEP était confrontée à d’autresformes d’enseignement et deformation peuvent sans dou-te apporter beaucoup à cetégard. La discussion sur l’«édu-cation continue» en Finlan-de, dans les pays nordiqueset en Allemagne, suggère deconsidérer les modèles d’unpoint de vue historique etcontextuel.(1) En Finlande, par exemple, l’en-seignement professionnel a une ac-ception beaucoup plus large - il re-couvre toutes les branches de l’in-dustrie, la plupart des niveaux hié-rarchiques professionnels, etc. - quedans beaucoup d’autres pays. Leconcept d’école de FEP ou de FEPen milieu scolaire se rapporte à tousles champs professionnels, bien quela terminologie ait tendance à se rap-procher de la terminologie anglaisequi prédomine. Cf. Heikkinen, 1995;Heikkinen et al., 1999; Heikkinen etal., 2000; Heikkinen et al., 2002.

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(a) cadres réglementaires politiques et or-ganisationnels des processus de formationprofessionnelle;

(b) orientation didactique et référentielledes processus de formation professionnel-le;

(c) la place du processus de formation pro-fessionnelle dans le contexte de la sociali-sation.

Comme exemple des styles de qualification,Deissinger caractérise l’Allemagne commeétant représentative:

(a) de la coopération entre l’État et l’in-dustrie pour l’établissement de règles concur-rentes;

(b) des objectifs et des contenus de la for-mation orientée vers des profils de qualifi-cation complexes (principe professionnel,Berufsprinzip);

(c) de la pertinence pédagogique de la so-cialisation dans la FEP, qui sert d’intermé-diaire entre l’enseignement général et l’em-ploi et crée un environnement de formationdistinct de l’école comme de l’emploi.

La force inégalée de la FEP et de la recherchesur la FEP en Allemagne a donné aux cher-cheurs et aux acteurs politiques, aux niveauxnational et transnational, de bonnes raisonsd’adopter ce genre de typologie (p. ex. Kou-lutus ja tutkimus vuosina..., 2000, Stenströmet al 2000, Copenhagen process, first reportof the Technical Working Group Quality inVET 2003). La construction de modèles estcapitale dans l’élaboration de théories pourcomprendre le monde et le façonner. Leurvaleur théorique est toutefois amoindrie sileur fonction première s’applique aux défi-nitions prédominantes du monde (2). Parexemple, Greinert (3) avance qu’outre lestrois modèles classiques, il n’y en a pasd’autres qui se soient développés en Euro-pe, et que les systèmes de tous les autrespays en sont les versions nationales. Outrela décontextualisation, une comparaison fon-dée sur une approche par des modèles conduità une utilisation a-historique de l’histoire,qui consiste à sélectionner certains momentscomme points de départ incontestables desmodèles. L’objectif de cet article est donc demontrer la nécessité d’une approche histo-ricisante et contextualisante - c’est-à-direla nécessité de se poser la question de l’émer-

gence et de la transformation des significa-tions et des fonctions pédagogiques de laFEP - dans le cadre de discussions trans-culturelles. Un moyen de s’y essayer est d’étu-dier des périodes de l’histoire où la FEP aété confrontée à d’autres formes d’éduca-tion.

Le thème spécifique de cet article est la trans-formation de l’éducation continue entreles années 1870 et 1930 dans les pays nor-diques et en Allemagne. Tout au long del’histoire de la politique éducative, les dé-bats sur la nature, la durée et l’universalitéde l’enseignement primaire et sur les défisque représentaient la réinsertion dans l’em-ploi et le dispositif d’enseignement et de for-mation, ont offert des plates-formes dediscussion à propos des caractères distinc-tifs des différentes formes d’enseignement.Une bonne raison de concentrer son at-tention sur l’éducation continue est son im-portance dans l’histoire et la recherche surl’histoire de la FEP en Allemagne. Une autreraison est l’expansion colossale des pro-grammes de soutien en direction des groupesà problèmes dans le système d’enseigne-ment conventionnel et l’économie euro-péenne. La mise au point de mesures cor-rectives distinctes pour les personnes defaible niveau éducatif, les personnes défa-vorisées, les plus âgés, les femmes et les mi-norités ethniques signifie que l’on ne tientpas compte de l’analyse critique de la po-litique d’éducation, d’emploi, de la jeunes-se ou de la politique sociale traditionnelles(Evans et al., 2004). La mise en œuvre auniveau national de mesures de soutien re-flète toutefois des controverses qui s’ins-crivent dans le développement historiquedu paysage éducatif au sens plus large. Quel-le sorte d’instrument l’histoire de l’éducationfournit-elle pour utiliser les interprétationsde l’école continue dans la politique?

Dans ce contexte, des concepts tels quecontinuation education (Coffey, 1992; McCul-loch, 1989), jatko-opetus (Heikkinen, 1995;Jauhiainen, 2002), fortbildung (Greinert, 1990),fortsättningsskola et fortsettelse/framhald-sutdanning (Michelsen, 1998) désignent dessolutions institutionnelles et des défini-tions pédagogiques de l’enseignement et dela formation en rapport avec la transition(notamment, de la formation initiale/de lascolarité obligatoire) vers l’emploi et la so-ciété. Même si les systèmes éducatifs sontperçus aujourd’hui en termes de flux ou d’iti-néraires liés à l’âge, il est anachronique de

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(2) Dans ses analyses de la culturedu virtualisme, Daniel Miller avan-ce l’argument que les abstractionset les modèles de la réalité ne sontplus nécessaire pour comprendre etfaçonner le monde. Au contraire,il y a un marché pour les abstrac-tions qui, plutôt que de les mode-ler, se substitue aux phénomènesqu’elles sont censées représenter. Larecherche et les chercheurs adop-tent dans une mesure croissante uneapproche consultative de la légiti-mation de la gouvernance du ma-nagement, qui a le pouvoir de mo-difier la réalité en fonction des abs-tractions, par lesquelles les politiquessouhaitent l’interpréter (Miller, 2002).

(3) Voir l’article publié dans ce nu-méro, qui est une version modi-fiée de sa communication à la confé-rence de Florence, en 2002, sur l’his-toire de la FEP dans une perspec-tive comparative (2004).

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limiter la finalité de l’éducation continue, àsavoir la participation à la vie sociale, poli-tique et professionnelle, à des définitionscontemporaines de l’âge ou des stades del’enseignement (professionnel).

L’éducation continue en Finlande

En Finlande, la recherche sur l’école conti-nue a été éclipsée par l’intérêt pour la trans-formation du système binaire - enseigne-ment populaire (folk school) et lycée - en unsystème unifié d’enseignement intégré. Uneanalyse de ce système et de la FEP donne-rait de nouvelles informations sur les fonc-tions complexes de l’enseignement en gé-néral. Laissant largement de côté les élé-ments populaires-démocratiques de l’ensei-gnement professionnel finlandais, nous cen-trerons notre attention ici sur les rapportsentre l’enseignement populaire et l’ensei-gnement professionnel, bien que l’un etl’autre se soient trouvés dans une mesurecroissante en concurrence et obligés de com-poser avec l’enseignement académique.

En Finlande, la FEP a commencé à se dé-velopper après les guerres entre la France,la Russie et la Suède-Finlande, lorsque laFinlande est devenue grand-duché auto-nome de l’empire russe, en 1809. Pendantdes décennies, la société s’est réorganiséeet a développé les structures de base del’économie, de l’éducation et de la gouver-nance. Les premiers efforts déployés dansce vaste pays, qui avait peu d’industries etpeu d’écoles, dont la population essentiel-lement rurale était pauvre et pratiquait uneagriculture de subsistance, étaient des pro-grammes globaux (Heikkinen, 1995, 1999,2000). Pendant longtemps, ce furent lesmêmes réseaux qui étaient responsables detoutes les initiatives de développement in-dustriel et de création d’écoles. La FEP émer-gente était alors axée sur l’amélioration del’efficacité de l’agriculture et sa rationalisa-tion, sur la promotion de conditions de viesaine et sur la création pour le pays d’uncorps de fonctionnaires et de dirigeants ayantune bonne compréhension de l’industrie. Lefait que les premiers centres de formationartisanale et industrielle aient été créés parle conseil des manufactures, l’un des pre-miers organismes nationaux explicitementchargés de promouvoir l’enseignement pro-fessionnel, est révélateur des liens entre l’É-tat et l’industrie (loi de 1842 sur la forma-tion d’artisans et d’ouvriers pour le pays etloi de 1847 sur les écoles techniques). Ces

lois reposaient sur des initiatives du secteurartisanal et les écoles avaient sans équivoqueune mission de formation professionnelle.

Jusque dans les années 1860, l’organisationde l’enseignement populaire incombait à l’É-glise luthérienne, aux foyers et aux munici-palités. Jusqu’à la libéralisation progressivedu commerce et de l’industrie, à partir desannées 1860, il y avait de grandes différencesentre les communautés rurales et les villes.Toutefois, les premiers inspecteurs laïcs desécoles populaires ont été nommés en 1861,et le conseil des affaires scolaires (éduca-tion), un organisme indépendant, a été crééen 1869. Le décret national de 1866 sur lesécoles populaires, est un résultat d’un pro-gramme d’éducation populaire plus étendudu Fennoman (4), qui avait à la fois des ob-jectifs économiques et pratiques, en parti-culier pour la population rurale.

Le débat sur les relations entre la FEP, l’en-seignement populaire et l’éducation conti-nue a décollé durant les années 1880. Mal-gré sa politisation - liée à la querelle lin-guistique entre le suédois et le finnois -l’ins-truction populaire-démocratique était pluspragmatique et plus orientée sur la forma-tion professionnelle que dans d’autres paysnordiques. L’activation du mouvement Fen-noman a incité quelques grandes villes àmettre en place dans les écoles continuesun enseignement plus systématique de dis-ciplines générales, de l’économie domes-tique et des travaux manuels. La loi de 1879sur la libéralisation du commerce obligeales employeurs à libérer les salariés de moinsde 15 ans pour leur permettre de suivre descours du soir. Selon les régions, ces coursdu soir étaient organisés soit dans le cadredes classes continues des écoles populaires,soit dans les centres de formation artisana-le et industrielle. On considérait que l’en-seignement poursuivait deux objectifs dif-férents (Teollisuushallituksen, 1888). D’unepart, il visait à assurer à tous les enfants uneéducation générale et civique, qui condi-tionnait l’accès à la formation profession-nelle, comme le prévoyait le décret sur l’en-seignement continu. D’autre part, la loi surle commerce faisait référence à la formationprofessionnelle à l’école, qui visait à dis-penser des connaissances professionnelleset à soutenir la formation sur le lieu detravail. Certains fonctionnaires et associa-tions d’artisans suggérèrent, avec peu desuccès, de rendre la formation artisanale etindustrielle obligatoire jusqu’à l’âge de 21

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(4) Au 19e siècle, un mouvement na-tionaliste qui a contribué au déve-loppement du finnois et de la litté-rature finlandaise et a obtenu quele finnois soit officiellement placésur un pied d’égalité avec le sué-dois, la langue de la minorité pré-dominante: Fennoman Movement.Encyclopædia Britannica. Informa-tions obtenues le 24 avril 2004 del’Encyclopædia Britannica PremiumService: http://www.britannica.com/eb/article?eu=794> (note de larédaction).

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ans. Ces quelques artisans avaient peu d’in-fluence sur le projet d’industrialisation de laFinlande, centré pendant un certain tempssur la formation et l’enseignement profes-sionnels à plein temps plein d’ingénieurs,puis d’agents de maîtrise et de travailleursqualifiés. Quant aux ouvriers de l’industrie,ils n’en avaient aucune.

Alors que les institutions de FEP émergentesde la fin du 19e siècle intégraient dans unemesure croissante la promotion de différentssecteurs de l’industrie dans les projets dedéveloppement de l’agriculture, de l’in-dustrie et de l’État-Providence, les paradigmesde la FEP ont commencé à diverger. Toutesles parties prenantes avaient leur quartiergénéral dans la gouvernance nationale enexpansion. L’un des principaux partisans del’éducation continue dans les années 1890à 1920 était Mikael Soininen (Johnsson), di-recteur du séminaire de pédagogie, inspec-teur et directeur du conseil de l’enseigne-ment (5). Sa préoccupation première étaitl’éducation pour la nation et il considéraittoutes les formes d’enseignement sous cet-te perspective. Dans un article écrit après laréforme du droit électoral général en 1905,il résume ainsi son programme éducatif.

«En arrivant à l’âge adulte, chaque garçon etchaque fille doivent voter et décider du des-tin du pays ... Où vont-ils apprendre à com-prendre la structure et les besoins de lasociété, pour être capables de légiférer etde la gouverner? ... La science sociale, quiest si importante pour notre nation par lestemps qui courent, doit être enseignée aprèsl’école populaire. C’est la raison pour la-quelle l’enseignement doit continuer aprèsla scolarité initiale. Mais ce n’est pas la seu-le raison... Le dessin industriel et la prépa-ration aux différents métiers dans les diffé-rents secteurs de l’industrie sont maintenantquelque chose de normal pour les jeunescitadins dans tous les pays; la population ru-rale a besoin d’apprendre les bases géné-rales d’une agriculture moderne et ration-nelle; les futures épouses des agriculteursdoivent apprendre les arts ménagers; tout lemonde devrait avoir des notions de basedans les soins de santé, et dans de nom-breux domaines spéciaux intimement liés àl’existence physique et la vie morale de lanation.

Ce genre d’éducation continue ne nous estplus étranger ... Mais à un âge plus mûr, ilfaut des ateliers éducatifs, où la mentalité et

l’aptitude à tenir son rôle de citoyen peu-vent se développer librement et entièrement.Ces ateliers éducatifs existent déjà: ce sontles écoles populaires supérieures. Ils de-vraient former ces hommes et ces femmesqui, étant les représentants les plus prochesdu peuple, le guident dans ses entrepriseséconomiques, dans la vie des municipalitéset de l’État et dans ses efforts matériels etspirituels. Ils doivent établir la condition depersonne éduquée, indépendante de la bu-reaucratie et qui, dans les épreuves, serale soutien et le protecteur le plus proche dupeuple.» (Johnsson, 1906).

Entre les années 1880 et 1910, des projetsde promotion de l’économie, des industriesfinlandaises et de l’offre éducative ont étéconduits parallèlement. La résistance consen-suelle à la pression exercée par la russifica-tion a été canalisée par des efforts communsde développement d’industries nationales etd’un système éducatif national. En mêmetemps que de nouveaux départements etconseils sectoriels, un grand nombre d’écoles,d’instituts et de services-conseil ont été créésdans toutes les branches de l’industrie. Lespartisans d’une FEP distincte, en particu-lier au ministère du commerce et de l’in-dustrie, et les concepteurs de l’enseignementpopulaire et continu au ministère de l’édu-cation ont réussi pendant quelque temps àcollaborer pour planifier les réformes na-tionales de l’enseignement postobligatoire.Jalmari Kekkonen, le pionnier et inspecteurde la FEP dans l’artisanat et l’industrie (1908-1932), a laissé entendre que l’enseignementcontinu devrait servir de préparation à la mi-se en place de centres d’apprentissage pourprendre la place des écoles du soir/à tempspartiel et des structures qui ont succédé auxcentres de formation artisanale et industriellequi, dans les villes, avaient été remplacésà partir de 1899 par des écoles profession-nelles mixtes à plein temps. Les centres d’ap-prentissage inadéquats pourraient être trans-formés en véritables écoles professionnellesau lieu de se substituer aux écoles conti-nues. La mission des écoles professionnellesétait de promouvoir le développement demétiers; elles devaient être de vrais lieux detravail pratique, mais où la pédagogie auraitla plus grande place (Teollisuushallituksen,1923; Heikkinen, 1995).

Cependant, les tensions entre divers projetsse sont exacerbées après la révolution rus-se, la proclamation de l’indépendance del’État et la guerre civile. Les projets de ré-

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(5) Mikael Johnsson/Soininen faisaitpartie du mouvement progressistedes jeunes Fennomans et il a été unacteur, par exemple, de la promo-tion du mouvement coopératif fin-landais et du développement del’école populaire en une «école devie».

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forme consensuels du tournant du siècle ontété réalisés dans les années 1920, dans uncontexte politique et économique entière-ment nouveau. Les contrastes entre les villeset les zones rurales, les modes de vie etles industries sont apparus au grand jour, lascission des mouvements populaires a don-né naissance aux partis communiste, social-démocrate et agrarien et la confrontationentre ouvriers et employeurs s’est déplacéeau niveau national. La loi sur l’enseignementpopulaire obligatoire pour tous a été pro-rogée jusqu’en 1921 (6). Cette loi rend obli-gatoire la fréquentation de l’école conti-nue (populaire) pendant deux ans après lascolarité obligatoire pour les jeunes qui nepoursuivent pas leurs études. La questionqui se posait alors était de savoir si les écolesprofessionnelles pouvaient être considéréescomme d’autres écoles. Après le décollagede l’école populaire et la création d’asso-ciations politiques et d’organisations de tra-vailleurs à côté des mouvements populaires-démocratiques, le cloisonnement de l’édu-cation citoyenne, de l’enseignement acadé-mique et de l’enseignement professionnel aété institutionnalisé. Les partisans de l’édu-cation continue intégrée, qui se considé-raient comme les dépositaires du program-me de citoyenneté universelle du mouve-ment Fennoman, ont pris sa défense en ar-guant qu’elle offrait un enseignement gé-néral, pratique, à la majorité des jeunes decette tranche d’âge (exception faite des élèvesdes écoles secondaires classiques) et uneéducation à la citoyenneté. Beaucoup de re-présentants des agriculteurs de Finlandevoyaient aussi dans l’éducation continue unealternative à la FEP initiale dans les com-munautés rurales, car il était difficile d’as-surer un enseignement professionnel à pleintemps pour les ruraux. Les adversaires, quipréconisaient une FEP pour l’artisanat et l’in-dustrie, défendaient la spécificité de l’en-seignement professionnel par opposition àl’éducation à la citoyenneté et à l’ensei-gnement académique et soulignaient sesliens vitaux avec l’industrie. Dans les muni-cipalités urbaines, les établissements de FEPcomme substituts des écoles continues étaientprivilégiés jusque dans les années 1940.

Entre les années 1920 et 1940, il y eut plu-sieurs initiatives du ministère et du conseilde l’éducation et de la formation des ensei-gnants visant à transformer les écoles conti-nues en écoles professionnelles générales àfinalité pratique, qui remplaceraient lesanciens établissements de FEP élémentaire

(Salo, 1944). Ces initiatives s’inscrivaient dansle contexte plus large d’un dépoussiéragepolitique et administratif, qui renforçait lepouvoir des associations et des partis rurauxet populaires qui détenaient à l’époque despostes dans les ministères de l’éducationet de l’agriculture et était étroitement liéau mouvement en faveur de l’instruction po-pulaire (Heikkinen et al., 1999). Les parti-sans d’une FEP pour les femmes dans l’ar-tisanat et l’industrie, en agriculture, en éle-vage et en économie domestique protestè-rent vivement contre la suggestion de n’in-tégrer que les formations féminines dansl’enseignement continu qui relevait du conseilde l’éducation. Le partisan le plus virulentde l’enseignement continu dans les années1926-64, Alfred Salmela, inspecteur des écolespopulaires, le considérait comme une par-tie de l’éducation populaire patriotique gé-nérale. L’école continue avait pour mission,tout d’abord, d’éduquer à la citoyenneté, endeuxième lieu d’assurer une orientation pro-fessionnelle et, en troisième lieu, de dis-penser un enseignement pratique à finalitéprofessionnelle. Salmela n’acceptait le lycéeque comme une alternative pour les enfantsintellectuellement doués (Kailanpää, 1962).Son programme eut apparemment du suc-cès. L’école continue devint obligatoire pourles candidats à d’autres écoles en 1943 et futrebaptisée école de la citoyenneté dans laréforme de 1958 (kansalaiskoulu, Kailanpää,1962). Elle eut son heure de gloire entre lesannées 1930 et 1945, en particulier dans leszones rurales, où elles attirait jusqu’à 140pour cent d’une tranche d’âge (7). Mais lesuccès fut de courte durée (Jauhiainen, 2002):le lycée et l’école moyenne avaient acquisune très grande popularité, et les écoles pro-fessionnelles s’étaient développées et leurimportance pour la modernisation de la FEPen Finlande avait été reconnue au niveaunational. Les réformes visant à mettre en pla-ce un enseignement intégré et un systèmede FEP en milieu scolaire dans le cadre duprojet «Le bien-être pour la Finlande», étaientsur le point d’être mises en œuvre.

L’éducation continue et lesmodèles de FEP

L’héritage de l’Allemagne

En Allemagne, l’attention de la recherchehistorique sur l’éducation continue était cen-trée sur les rapports entre les partenaires so-

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(6) Les écoles préparatoires dans lesvilles et les classes du lycée, dites«écoles moyennes», ont conservé leurstatut de substituts jusque dans lesannées 1950 pour les premières et1970 pour les secondes.

(7) Le taux d’inscriptions est un in-dicateur de la fonction de l’éduca-tion: comme les centres de FEP etles écoles populaires supérieures,les écoles continues accueillaientaussi des adultes avant que l’en-seignement obligatoire couvre lescohortes d’âge entières.

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ciaux et l’État et entre les lieux de la FEPet moins sur sa fonction dans le paysageéducatif général (Stratmann, 1990; Greinert,2002; Greinert, 2004). Dans les pays nor-diques, la discussion politique et la rechercheétaient en revanche focalisées presque ex-clusivement sur les rapports entre le ly-cée/l’école moyenne et l’école populaire,ainsi que sur l’unification de l’enseignementobligatoire par son académisation (p.ex. Rin-ne, 1984; Jauhiainen, 2002; Jarning, 2002).Pour illustrer les pistes de réflexion sur l’édu-cation continue pour la recherche trans-culturelle sur la FEP, nous allons commen-ter ici les développements en Allemagneet dans les pays nordiques. L’entreprise estbiaisée, car la littérature sur ce sujet est trèsabondante en Allemagne, alors qu’il ne sus-cite qu’un intérêt très relatif chez les cher-cheurs des pays nordiques.

Les querelles à propos de l’éducation conti-nue en Allemagne à la fin du 19e et audébut du 20e siècles ont pris fin avec latransformation de la Fortbildungsschule (lit-téralement, école de perfectionnement) enBerufsschule (école professionnelle), alorsque dans aucun pays nordique, les initia-tives et discussions n’ont abouti à cette so-lution. En Allemagne, la question crucialeétait la gestion des jeunes gens des villes.Dans la période d’industrialisation, d’urba-nisation et de migrations rapides de la findu 19e siècle, l’apprentissage contrôlé parl’artisanat et l’industrie était encore la filiè-re de formation professionnelle prédomi-nante. Dans beaucoup de régions, l’écolede perfectionnement général - souventconfessionnelle - avait toutefois déjà étérendue obligatoire pour les jeunes. Enraison de l’érosion du rôle éducatif de lafamille, l’intégration de la profession et dela citoyenneté parmi les petites entrepriseset les travailleurs était compromise (p.ex.,Greinert, 1990; Stratmann, 1990; Wahle,1994). De plus, l’industrialisation menaçaitl’ordre social, économique et politique pré-valant: la grande industrie à vocation ex-portatrice sapait le statut des artisans; lestravailleurs de l’industrie représentaient ledanger du socialisme et de la révolution. Ilest intéressant de noter cependant que c’està une alliance entre des instituteurs etdes hommes politiques (Deutscher Vereinfür das Fortbildungswesen, fondée en 1892-96), et non aux artisans et à l’industrie, queles écoles professionnelles doivent d’avoirvu le jour. Elles ont reçu par la suite le sou-tien de pédagogues et ont été acceptées

par l’industrie et, petit à petit, par le sec-teur artisanal.

En Allemagne, le contraste avec d’autres cul-tures est frappant: des pédagogues tels queGeorg Kerschensteiner et Eduard Sprangerse sont employés à développer une alter-native pédagogique réelle à la FEP, alterna-tive qui intégrerait des aspects sociétaux(Kerschensteiner, 1901; Spranger, 1922). Étantune école professionnelle, l’école de per-fectionnement est devenue une filière légi-time sur le plan politique, juridique et pé-dagogique de l’éducation continue. L’inté-gration des écoles professionnelles, avecl’apprentissage, comme élément à part en-tière, dans l’enseignement obligatoire consé-cutif à l’école primaire, a été déterminantepour leur stabilisation, au prix toutefois dela dominance dans la FEP des méthodesd’apprentissage de l’industrie - ou des cor-porations/des chambres des métiers - etd’une réduction du rôle de ces écoles à unefonction générale et de complément de l’ap-prentissage. En même temps, les concep-tions religieuses et bourgeoises du Beruf(métier) féminin, qui assimilaient la citoyennetéau rôle de femme au foyer, établirent la FEPpour les femmes en un système d’écoles pro-fessionnelles à plein temps, différent du sys-tème de formation pour les hommes, dontl’apprentissage était le principal élément(Mayer, 1998). Le fait d’être l’héritière del’école de perfectionnement a eu un impactdurable sur l’image de l’école profession-nelle dans le système d’enseignement pro-fessionnel allemand. De par son rôle d’éco-le de citoyenneté (Staatsbürgerschaft) aulieu de devenir un élément distinct de struc-tures d’acquisition d’une identité et de qua-lifications professionnelles, elle est restéeune école générale par nature, accessoire-ment professionnelle, faisant pendant auxformes d’enseignement académiques,

Cadres importés et développementsspécifiques dans les pays nordiques

En l’absence de réflexion sur les rapportsentre l’éducation continue et la FEP, les cher-cheurs des pays nordiques sont tentés d’adop-ter des cadres comparatifs existants, déve-loppés en Allemagne (cf. Greinert, 2002;Luhmann, 2002). Selon eux, la FEP est consi-dérée, ce qui est typique, d’abord sous l’anglede la réglementation, des systèmes et desinstitutions. La législation, le financement etl’institutionnalisation de groupes d’intérêtssont pris comme critères pour des questions

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telles que la reconnaissance des systèmesde FEP et leur différenciation. En deuxièmelieu, l’artisanat et l’industrie de productiondeviennent des références pour le travail,en raison de leur rôle politique et écono-mique capital dans le développement de l’É-tat et de l’économie allemands. En troisiè-me lieu, les formes professionnalisées dutravail se définissent exclusivement commele Beruf (métier) typiquement masculin dansle secteur de la production. En quatrièmelieu, les analyses des groupes d’intérêts dela FEP se concentrent sur le rôle du Mittel-stand, c’est-à-dire des PME, dans l’organi-sation des travailleurs/salariés et entre-prises/employeurs en tant que partenairessociaux défendant et négociant leurs inté-rêts dans le domaine de la FEP. En cinquiè-me lieu, le rôle de l’État se réduit à celuid’un acteur séparé, bureaucratique, dansla lutte d’intérêts tripartite à propos du pou-voir réglementaire et des obligations finan-cières (Madsen, 1988; Larsson, 1995; Saks-lind, 1998; Heikkinen, 1995). Le premier cri-tère explique pourquoi les chercheurs despays nordiques ont tendance à copier desmodèles universalisants, alors que l’accentplacé sur les systèmes et les institutions a fa-vorisé leur intérêt exclusif pour l’enseigne-ment populaire, le lycée et l’université, quiont tous été organisés et discutés commequestions nationales sous la conduite de l’É-glise ou de l’État (8). Il se peut toutefois quele développement dans les pays nordiquesde la FEP par rapport à l’enseignement conti-nu soulève des questions sur le caractèreuniversel des modèles adoptés.

Tout d’abord, on ne peut pas comprendrela genèse de la FEP dans les pays nordiques,ni les relations entre les groupes d’intérêtset l’État, si on ne les considère pas parrapport à la transformation du contexte cul-turel. L’école n’était pas plus coupée que l’É-tat des mouvements culturels, politiques etéconomiques, avec leurs objectifs diversconcernant l’État futur. Dans ces pays, lesréponses à la question de l’éducation conti-nue ont toutes été influencées au 19e sièclepar l’instruction distinctive, un mouvementpopulaire-démocratique, avec son princi-pe du folkelighed (Slumstrup et al., 1983;Gudmunsson, 1995; Jarning 2002). On a ar-gué qu’en particulier en Norvège, le mou-vement d’éducation populaire a entravé ledéveloppement d’instituts techniques qui in-tégreraient la technologie, la théorie et lapratique et serviraient l’industrie nationale,parce que les mouvements populaires-dé-

mocratiques politiquement les plus influentsont continué à mettre l’accent sur la for-mation agricole (Korsnes, 1997; Michelsen,1991, 1998). Le commerce, l’artisanat et lesindustries manufacturières norvégiens sesont cependant aussi développés indépen-damment des industries rurales (Sakslind,1998; Gudmunsson, 1995). Alors que dansle secteur technique, les écoles à temps par-tiel pour les apprentis (lærlingskoler, tek-niske aftenskoler) étaient gérées par les as-sociations locales d’artisans et d’indus-triels, l’État, l’Église et le mouvement popu-laire-démocratique avaient un intérêt com-mun: acquérir leur indépendance du Dane-mark (1814) et de la Suède (1905). L’ins-truction populaire et la participation de lasociété, qui ont été encouragées par les écolespopulaires et les écoles supérieures popu-laires, étaient des objectifs fondamentaux.Tandis que le lycée conservait son statut su-périeur, l’éducation continue est devenuepeu à peu un enseignement préparatoire à,ou complémentaire de, l’enseignement aca-démique (Jarning, 2002). Selon Michelsen(1998), les femmes enseignantes membresdu mouvement bourgeois-féministe de Nor-vège ont pris l’initiative de créer des écolescontinues professionnelles spécifiques. Elleavaient créé des organisations distinctesde celles de leurs collègues masculins, quivenaient principalement de milieux agraires.Entre les années 1910 et 1930, les ensei-gnantes essayèrent d’établir une école pra-tique obligatoire (ungdomsskole) faisant sui-te à l’école populaire, qui serait basée sur lapédagogie de l’Arbeitsschule selon Ker-schensteiner. Cette initiative, qui s’inscrivaitdans le cadre du mouvement d’émancipa-tion et d’accession des femmes au mondedu travail, retint peu l’attention de l’artisa-nat et de l’industrie et ne fut pas soutenuepar l’État. Elle n’est jamais devenue un vé-ritable précurseur de l’enseignement pro-fessionnel institutionnalisé (yrkeskoler), alorsque l’artisanat continuait à défendre son sys-tème d’apprentissage et que le mouve-ment syndical donnait la priorité au déve-loppement de l’enseignement général inté-gré. La FEP initiale restait fragmentée enécoles locales à temps partiel, vaguementcontrôlées par les organisations de l’indus-trie, et en écoles professionnelles contrôléespar l’État. La prédominance des programmesd’éducation promouvant la participation po-litique et sociale restait forte et conduisit àla création de l’enseignement secondaire dedeuxième cycle intégré dans les années 1970.

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(8) Et qui, parce qu’ils font partie deleur histoire personnelle, sont plusproches de leur mode de vie et deleur conception d’eux-mêmes.

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Au Danemark, la libéralisation du commer-ce et l’industrialisation, au milieu du 19e siècle,furent en grande partie un processus sou-tenu par la base, auquel participaient lespaysans et les artisans des petites villes. L’ex-pansion des agro-industries, le mouve-ment coopératif et l’autonomie administra-tive des régions allèrent de pair avec l’in-dustrialisation. Le mouvement populaire-dé-mocratique et l’instruction populaire (folke-lig) ont favorisé une continuité dans les ac-tivités sociales et productives collectives etcoopératives. Les associations d’artisans etde techniciens ont joué le rôle de leader del’enseignement professionnel et dans la créa-tion des premières écoles techniques (te-gneskoler -> tekniske skoler) (Laegring, 1985;Moeller, 1991). Avec l’émergence, depuis lesannées 1870, d’un nouveau type de popu-lation le long des voies ferrées, les artisanset les industries rurales furent amenés àadopter les traditions corporatistes des noyauxurbains et cela fut déterminant pour la créa-tion d’écoles de formation professionnellepour les apprentis jusqu’à la décennie de1940 (Hentilä et al., 2002; Kryger Larsen,2001). La FEP initiale a été englobée dansun concept plus large d’enseignement po-pulaire (à base communautaire), intégrantdes objectifs politiques, industriels et péda-gogiques. Ces mêmes réseaux sont à l’ori-gine de l’expansion des écoles profession-nelles, puis des camps chantiers/écoles pourles jeunes et des écoles de production, ain-si que des différentes formes d’éducationpopulaire (Laegring, 1985; Mayer, 1999; Slum-strup, 1983). Les associations techniques re-présentatives des professions étaient char-gées de l’inspection des écoles, et elles contrô-laient la formation des enseignants des écolesprofessionnelles, ainsi que la répartition desaides de l’État à l’enseignement technique.Le conseil national de l’enseignement pro-fessionnel (Tilsynet med den tekniske Un-dervisning for Håndværkere og industridri-vende), qui a été créé en 1916, recrutait lamoitié de ses membres dans le monde dutravail et l’autre moitié parmi les agents del’État. Les écoles spécialisées dans la for-mation à des métiers spécifiques sont tou-tefois restées jusqu’à aujourd’hui intégréesau système d’apprentissage contrôlé par lespartenaires sociaux. Les écoles pour les jeunes(ungdomsskoler), créées à partir des années1930, représentaient en revanche un tour-nant dans la conception de la FEP: l’initiati-ve ne venait pas des artisans ou des acteurslocaux, mais des responsables politiques na-tionaux. Ces écoles s’adressaient aux jeunes

de 14 à 18 ans et elles avaient pour objectifde combattre les problèmes sociaux et lechômage. La fonction de l’école comme élé-ment de la politique de l’emploi était illus-trée par le développement des écoles tech-niques et des camps-chantiers, qui sont de-venus peu à peu des alternatives accessiblesaux jeunes sur une base volontaire après lascolarité obligatoire. Les municipalités fu-rent chargées de créer des écoles ayant pourmission de préparer les garçons et les fillesà un emploi dans les champs professionnelsles plus courants.

En Finlande, à partir du 19e siècle, la FEPétait intégrée aux projets concurrents de dé-veloppement des industries, des professionset de la gouvernance, qui pourraient s’étendreà un niveau national et constituer un sys-tème (Heikkinen, 1995, 2000; Heikkinen etal., 1999). Le contexte scolaire de la FEPavait de l’importance, précisément en raisonde son potentiel de promotion des indus-tries et de la professionnalisation du travail.Même si leur pouvoir et leur influence va-riaient de l’un à l’autre, les projets étaienttous liés à l’administration: aux ministères,aux départements et conseils, qui devinrenten quelque sorte les quartiers généraux oùse décidaient leur élaboration et leur stabi-lisation. La promotion et la conduite de laFEP restèrent intégrées à la promotion del’industrie dans les ministères techniquesjusque dans les années 1970. L’État était en-gagé dans différents programmes de pro-motion des industries et de la politique. Parexemple, les projets politiques et écono-miques des principales parties prenantes dudébat sur l’enseignement continu - les héri-tiers du mouvement Fennoman représen-tant la Finlande agricole et les défenseursde la Finlande industrielle - passaient par leconseil de l’éducation et le ministère ou leconseil du commerce et de l’industrie.

En Suède comme en Finlande, la positionde l’artisanat est restée marginale par rap-port à celle des industries exportatrices -la métallurgie et l’industrie du bois - et ru-rales. Les petits agriculteurs, les travailleursruraux et les sans-terre s’unirent aux ouvriersde l’industrie dans le cadre des mouvementspopulaires-démocratiques et se politisè-rent fortement (Kettunen, 1998; Hellsponget al., 1995). L’idéologie sociale-démocratedes pays nordiques et l’idée d’une école in-tégrée eurent une très grande influence enSuède dès le début du 20e siècle. Il se peutmême que le concept de folklighet, dans ses

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acceptions social-démocrates plus tardives,ait subi l’influence de l’héritage d’une su-perpuissance militaire, d’une grande indus-trie exportatrice et d’une aristocratie terrienneimportante. Les solutions développées enSuède indiquent que l’État commençait à seconcevoir lui-même comme ayant une per-ception privilégiée et progressiste des be-soins éducatifs du peuple. En fait, la social-démocratie n’était pas intéressée par l’éco-le en soi, mais uniquement par la manièredont elle fonctionnait, en tant qu’instrumentde réforme de la société (Lindgren, 1997, p.2). Cependant, d’aucuns arguent aussi quel’enseignement général dont l’initiative ve-nait de la base, de la population agraire (enparticulier des exploitations prospères), avaitaussi son importance, pour des raisons uti-litaires et pragmatiques, et non parce quel’instruction de masse pour les citoyens d’unÉtat démocratique était mise en œuvre parle sommet (Lindmark, 1996; Boli, 1989). Dansun cas comme dans l’autre, la formation pro-fessionnelle a été intégrée à d’autres formesd’enseignement. Les écoles du soir pour lesapprentis/personnes à former (Söndagssko-lar -> Lärlingsskolar) sont devenues des ins-titutions non dirigées par l’artisanat et l’in-dustrie, mais gérées par les municipalités etsoutenues et contrôlées par l’État (Larsson,1995; Englund, 1986). Le conseil national del’éducation (skolöverstyrelse) a été instituépour les écoles secondaires classiques en1904, mais depuis 1918, il a une division dela FEP pour le commerce, l’artisanat, l’in-dustrie et l’économie domestique. La FEPinitiale s’est développée grâce aux écoles-ateliers dans le cadre des écoles commu-nales à plein temps soutenues par l’État (prak-tiska ungdomskolar -> verkstadskolsystem).Les initiatives avaient un caractère sociopo-litique dans la mesure où elles visaient àcombattre le chômage et la migration de lamain-d’œuvre, mais elles étaient égalementsoutenues par l’industrie en voie de mo-dernisation, qui préférait une formation tech-nologique et des compétences plus pous-sées à la formation par l’expérience dis-pensée par les écoles du soir. D’autres sec-teurs de la FEP relevaient de l’administra-tion de leur branche, mais quand la divisiona été transformée en conseil national de laFEP (yrkesskolöverstyrelse), en 1943, ils ontété progressivement incorporés aux cursusprofessionnels de l’enseignement intégré.

Une seconde question tient aux termes em-ployés pour désigner le métier, qui a, dansles pays nordiques, une acception plus lar-

ge qu’en Allemagne. En Finlande, jusqu’à lafin du 19e siècle, on employait d’abord leterme elatuskeino - moyens d’existence -puis elinkeinoammatti - métier permettantde gagner sa vie - et, pour terminer, toutsimplement ammatti. Jusqu’au 20e siècle, lemétier désignait toutes sortes de tâches, né-cessaires pour pouvoir mener une vie in-dépendante dans un ménage généralement(de type) agraire. Au niveau de l’individu,elatuskeino désignait indifféremment uneactivité artisanale, dans un bureau ou dansles services. Même dans les conceptions ul-térieures du travail salarié et de l’ouvrier in-dividuel, l’aspect collectif du métier restaitimportant. Par exemple, le travail salarié dansune usine pouvait se concevoir comme uneactivité familiale, en ce sens que les autresmembres de la famille, en particulier lesfemmes et les enfants, pouvaient remplacerou aider la personne recrutée par l’usine.Dans les exploitations agricoles familiales,les femmes, en particulier, pouvaient échan-ger leurs tâches et leurs rôles (Heikkinen,1995, 2001; Peltonen, 1992; Apo, 1995). Ensuédois et en norvégien, l’expression géné-rique näring - activité destinée à assurer legagne-pain/à nourrir le ménage rural - futpeu à peu remplacée par la notion d’yrke -métier - qui désignait une activité spécia-lisée et individuelle (Hellspong et al., 1995).Dans la FEP, l’ancien terme danois erhverv- profession - a toujours cours. Il sembleque tous les pays nordiques aient assimiléau début du 20e siècle la notion de travailindustriel collectif à la conception idéale ducultivateur indépendant, maître de son propretravail, par opposition à l’employeur capi-taliste (Kettunen, 1995). Malgré l’importan-ce croissante des métiers, les concepts em-ployés dans ces pays et la notion alleman-de de Beruf (9) ne sont pas vraiment inter-changeables.

Au Danemark et en Norvège, comme en Al-lemagne, la religion a eu une plus grandeinfluence sur la définition des professionsféminines et sur l’éducation des femmesqu’en Finlande et en Suède. La bourgeoisieayant une assise plus large en Suède, l’in-térêt pour un lycée distinct pour les filles,qui transmettrait les modèles de vie fami-liale, était plus marqué. De ce fait, tout aumoins en Norvège et en Suède, l’enseigne-ment ménager se développa plutôt dans lecontexte de l’enseignement général et del’éducation à la citoyenneté des femmes quedans d’autres domaines de la FEP, ce qui in-dique une similitude avec le concept alle-

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(9) Un facteur invisible influant surle concept de métier est la main-d’œuvre immigrée ou « invitée». S.Narotzky (1997) compare les consé-quences du recours à une main-d’œuvre immigrée bon marché enAllemagne et en France à celles del’esclavage et de la main-d’œuvrebon marché dans des pays commel’Espagne. le Portugal et la Grande-Bretagne. Les travailleurs « invités»étaient très nombreux en Allemagneet en Suède jusque dans les années1970, ce qui a permis de conser-ver les schémas de division des qua-lifications, qui favorisaient une aris-tocratie du monde du travail et igno-raient le travail non qualifié des im-migrés. Les concepts holistiques demétier et de FEP reposent peut-êtresur l’homogénéité de la populationcomme travailleurs et comme ci-toyens.

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mand de Beruf féminin (Michelsen, 1998;Mjelde, 2001; Mayer, 1998). Malgré les ini-tiatives de la bourgeoisie, en Finlande, lesactivités domestiques et le travail à domi-cile étaient considérés comme faisant partiedu travail rural, puis plus tard comme desactivités professionnelles distinctes. Le tra-vail à domicile n’était pas qualifié de travailféminin, mais il pouvait servir de trait d’unionentre le sous-projet de l’artisanat et les pro-jets Finlande industrielle et Finlande agri-cole. Le secteur des soins de santé et le tra-vail social ont également eu une influenceimportante sur la conception du travail etdes métiers en Finlande. Ces deux sec-teurs ont fait un amalgame entre le conceptpopulaire de soin dans la production-consom-mation des ménages ruraux et la notion an-drogène de travail qualifié, ainsi qu’avecl’idéalisation par les bourgeois des prédis-positions professionnelles typiquement fé-minines. En Finlande, les principes et lesformes pratiques des métiers et de la FEPoù prédominaient les femmes se sont dé-veloppés parallèlement à ceux des métierset de la FEP où prédominaient les hommes.C’est pourquoi le paradigme de l’instructiondans la FEP pour les femmes n’est pas né-cessairement un indice de son intégrationdans la citoyenneté, comme c’est le cas dansla FEP standard, mais de la professionnali-sation du travail et de la différenciation del’éducation (Henriksson, 1998; Heikkinen,2001).

En outre, les chercheurs des pays nordiquesont tendance à affirmer que la FEP (tech-nique) n’a pas pu se développer parce quela «classe moyenne» était forcée de compo-ser avec les mouvements populaires-démo-cratiques (Heikkinen, 1996; Korsnes, 1997;Kettunen et al., 1995; Kettunen, 1998; Mi-chelsen, 1998). La valeur explicative de Mit-telstand - médiateur entre les groupes situésen haut et en bas de la société - dépend ducontexte historique dans lequel on situe cet-te «classe moyenne». Dans l’Allemagne du19e siècle, le rôle politique central des pe-tits artisans et commerçants comme contre-poids aux ouvriers de l’industrie et aux syn-dicats a dû être ajusté sur l’importance crois-sante des grandes entreprises d’exportation,qui opéraient au niveau national. Cette si-tuation se reflétait dans la gouvernance tri-partite et les solutions pour l’organisationde la FEP. Au Danemark, avec ses petitesvilles, un mouvement coopératif fort et laprédominance de l’industrie agroalimenta-tire et des industries nationales, une «clas-

se moyenne» de PME intégrant les traditionset les intérêts de l’agriculture et de l’artisa-nat s’est développée (Moeller, 1991; Hentiläet al., 2002; Kryger Larsen, 2001). Dansd’autres pays nordiques, les petites entre-prises et les petits commerçants ne sont ja-mais devenus un groupe majeur de la so-ciété, sur le plan quantitatif ou qualitatif, pasplus qu’ils n’ont formé un Mittelstand ausens allemand du terme. En Finlande, l’Étata facilité la coopération entre les grandesentreprises de transformation du bois etde métallurgie et les petits agriculteurs - Mit-telstand - qui avaient une importance poli-tique. En Norvège, la politique et l’admi-nistration locales ont joué un rôle crucialdans les négociations sur le développementdes secteurs éparpillés sur le territoire na-tional de la navigation, du commerce, de lapêche et du bois. En Suède, le marché in-térieur et l’exportation avaient l’une et l’autreune grande importance pour l’économie na-tionale. Les grandes exploitations agricoles,la grande industrie et la petite noblesse tra-ditionnelle (militaire) ont facilité le déve-loppement d’un État fortement consen-suel, qui a encouragé l’idéologie d’une col-lectivité de citoyens (folks home) faisant touspartie des classes moyennes. Les agricul-teurs, les ouvriers de l’industrie et les em-ployés, avec les fonctionnaires, ont forméla classe moyenne typique des pays nor-diques, qui s’intéressait peu à l’artisanat ouaux petites entreprises. Les programmes demodernisation de l’industrie et de l’ensei-gnement durent l’admettre, la respecter ets’adapter à ses besoins et à ses objectifs: uneexpérience générale et la citoyenneté uni-verselle sont devenues les priorités des ré-formes des systèmes éducatifs.

Au changement de siècle, la démocratie so-ciale et les mouvements ouvriers des paysnordiques se sont réglés sur la tradition despaysans indépendants. Le concept de par-tenaires sociaux n’avait donc de l’importancequ’au Danemark; en Norvège, en Finlandeet en Suède, des modèles légalistes de né-gociation du travail et de la FEP ont été dé-veloppés au lieu du partenariat social au ni-veau national. Par exemple, en Finlande, lesrevendications des ouvriers, qui exigeaientdes pouvoirs et des relations équitables, ve-naient essentiellement des travailleurs del’agriculture, des petits paysans et des sans-terre. En raison de la politisation des rela-tions entre le patronat et les salariés aprèsl’accession à l’indépendance et la guerre ci-vile (1917-18), les négociations portaient sur

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une réglementation nationale, légaliste etcorporatiste des conditions de travail. L’Étatest devenu l’animateur des négociations re-présentatives et consensuelles au niveau lo-cal et national entre les employeurs et lessalariés.

L’éducation continue et le caractèredistinctif de la FEP

En Suède, l’enseignement primaire générala été dans les années 1960 un tremplin pourl’intégration de la FEP en un système unifiéd’enseignement secondaire englobant aus-si l’administration et la formation des en-seignants (SOU 28/1962). Les cursus pro-fessionnels du deuxième cycle de l’ensei-gnement secondaire ont ainsi acquis un sta-tut de filières préprofessionnelles. La Nor-vège et, dans une certaine mesure, le Da-nemark, ont suivi l’idée d’un enseignementintégré, même si l’organisation interne en fi-lières était maintenue. En Finlande, cetteidée ne concernait que le premier cycledu secondaire. Les initiatives d’écoles pourles jeunes, dans les années 1970, ont avor-té, et bien qu’elle s’inscrive dans le cadre del’école, la FEP a conservé son caractère dis-tinctif de forme d’éducation à part entière.Le tableau 1 tente de considérer quelquescaractéristiques par rapport au paysage édu-catif plus large, au concept émergent de FEPet aux solutions institutionnelles dans la pé-riode où l’on débattait de la spécificité de laFEP par rapport à l’éducation continue enAllemagne et dans les pays nordiques.

Au Danemark et en Allemagne, les politiquesindustrielle, technologique et éducative sontétroitement liées. Dans d’autres pays nor-

diques, jusqu’à récemment, les systèmes denégociation et les réseaux d’intervenantsdans différents domaines de la politiquese sont de plus en plus dissociés (cf. Korsnes,1997; Larsson, 1995; Heikkinen et al., 1999).Alors que les idées populaires-démocratiquesprédominaient dans les programmes édu-catifs de tous les pays nordiques, l’opposi-tion à l’intégration de l’enseignement pro-fessionnel dans l’enseignement général post-obligatoire était très forte en Finlande. Bienqu’en Allemagne, l’éducation continue sesoit scindée en deux systèmes distincts,celui de la formation en alternance et celuide l’enseignement académique, la citoyen-neté professionnelle a pris la même im-portance qu’en Finlande. Au Danemark eten Finlande, la formation professionnelle estdevenue une véritable alternative à l’ensei-gnement académique: au Danemark avecl’intégration de l’apprentissage et de l’éco-le, contrôlée en premier lieu par l’industrieelle-même, et en Finlande avec le contrôledes écoles par l’État et les réseaux de re-présentants de l’industrie, des professions,de la fonction publique, des établissementsscolaires et des enseignants.

Les débats de jadis sur l’éducation continuesont revenus à l’ordre du jour. Les effortsdéployés pour faire de l’Union européenneet des États membres l’espace de connais-sances et de compétences de haut niveau leplus compétitif du monde accélèrent l’aca-démisation de l’enseignement et la distinc-tion entre gagnants et perdants au jeu del’éducation. L’UE et les États membres ontdéployé des efforts massifs pour promou-voir la citoyenneté active, l’employabilité etla cohésion sociale. La lutte contre l’exclu-

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Le débat sur l’éducation continue et la FEP en Allemagne et dans les pays nordiques Tableau 1Allemagne Norvège Suède Danemark Finlande1870-1920 1910-1940 1920-1940 1880-1940 1880-1930

Évolution vers une doublefonction de la FEP:*Facharbeitertechnik und Staatsbürgerlichkeit(ouvrier qualifié et citoyen-neté)

Professionnalisation du tra-vail: le Beruf comme princi-pe pédagogique commun

De l’école de perfectionne-ment à l’école profession-nelle; La FEP en tant que compo-sante de l’enseignement

Séparation de la*FEP et de l’enseignementgénéral*de l’apprentissage et del’école professionnelle

Contrôle politique du tra-vail/ de la division du tra-vail: la perspective nationaledes conventions collectivesdomine la FEP Rejet de l’école profession-nelle continue; marginalisa-tion de la FEP commeforme d’éducation

Établissement d’un systèmeéducatif dirigé par l’État,ayant une fonction sociopo-litique, y compris établisse-ments de FEP

Base technologique et poli-tique du métier dans la FEP

Prédominance de la citoyen-neté dans l’éducation conti-nue; marginalisation de laFEP comme forme d’éduca-tion

Institution du partenariatsocial:compagnons/ouvriers+agents demaîtrise/employeurs dans laFEP + coopératives

Forme communautaire detravail professionnel dans laFEP

Vers les écoles pour lesjeunes; vers la FEP commeune catégorie du marché del’emploi

Établissement d’un systèmede FEP distinct encoura-geant les industries natio-nales et les réseaux entrel’administration, l’industrie,les écoles et la société civile

Combinaison de la citoyen-neté communautaire et pro-fessionnelle dans le travailet la FEP

Défense des écoles profes-sionnelles contre l’éducationcontinue à orientation pro-fessionnelle; la FEP commeforme d’éducation spécifique

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sion éducative et sociale et l’enjeu de l’in-sertion des jeunes dans la FEP exigent denouvelles solutions pour l’éducation à la ci-toyenneté et la FEP (Evans et al., 2004).

Implications politiques

Les modèles de FEP universalisants sont at-trayants parce qu’ils apportent des réponsessimples à des questions complexes. Ils re-présentent des mythes, nécessaires pour es-sayer de développer une identité collective,comme la construction de l’Europe. Cepen-dant, lorsqu’on les utilise pour formuler despolitiques, les modèles sont aussi des réali-tés qui conduisent à des conséquences réelles(Korsnes; Gudmunssen, 1995; Kryger Lar-sen, 2001). Le rôle essentiel des chercheursen éducation et des historiens de l’éduca-tion s’est développé à une époque de l’his-toire où la culture, la société et la nation etl’État devenaient dans une mesure croissantedes catégories synonymes et se recouvranten partie (Wagner, 2001). Toutefois, leurs in-terprétations et leurs récits sont utilisés dansdivers projets de FEP transnationaux. Quelleshistoires et quels schémas vont avoir coursdans les discussions transnationales sur laFEP, et avec quelles conséquences? Quellespourraient être les alternatives au dévelop-pement de modèles universalisants de FEPpour la recherche transnationale et la dis-cussion politique?

Les approches psychologiques et didactiquesont toujours attiré les éducateurs et les cher-cheurs, parce qu’elles permettent des cadresd’interprétation décontextualisés et univer-salistes. L’approche psychologique de dif-férentes formes d’enseignement, qui est ba-sée sur les différences psychologiques entreles apprenants et entre les apprentissages,a encore cours. Qu’il s’agisse des aptitudes,des états d’esprit et des dispositions oudes motivations, la forme et le mode d’en-seignement doivent être ajustés sur les ca-ractéristiques individuelles de l’apprenant.D’autres approches intéressantes sont l’ap-proche sociologique et l’approche fonc-tionnelle, qui considèrent différentes formesd’enseignement et leur institutionnalisationpar rapport aux hiérarchies et statuts so-ciétaux et économiques. Elles offrent unepossibilité de comparaison du fonctionne-ment des filières et des structures éducativesà travers les différents systèmes de sociétéet d’économie, conçus dans l’idéal commedes régimes, ou comme la matérialisationde lois sociétales, et dans la pratique com-

me des réductions à des sociétés-états (cf.Korsnes, 2001) (10).

Quelles possibilités autres que le dévelop-pement de métanarratifs sur des modèles deFEP la recherche pédagogique transcultu-relle pourrait-elle avoir pour l’universalisa-tion psychologique, économique ou socio-logique? Peut-être pourrait-elle partir de ladéconstruction, en collaboration, des mytheséducatifs aux nivaux nationaux et sub-na-tionaux. Les débats sur l’éducation continuepeuvent être considérés comme des négo-ciations et des querelles à propos des défi-nitions de l’éducation: est-elle unique oumultiple, et quelles formes peut-elle revêtir?Dans le contexte des pays nordiques, uneforme basique de l’éducation, qui a émergéau cours du 19e siècle, était l’éducation po-pulaire ou citoyenne. Elle s’est concrétiséesous la forme de l’enseignement initial dansles écoles populaires (-> intégrées) et del’instruction populaire dans l’éducationdes adultes. L’idée pédagogique à la basede l’éducation populaire était de promou-voir la participation à la vie de la famille(ménages), de la communauté et de l’État.Conformément à l’acception holistique dela notion de «moyens d’existence», la parti-cipation englobait aussi le travail et lesmétiers. Une autre forme d’éducation étaitl’enseignement académique dispensé par leslycées et les universités. Son principe pé-dagogique directeur était la promotion dela participation à (et de) la production decorpus de savoir organisés en structures etpratiques disciplinaires. Ce principe impliquede transcender et de dépasser les frontièresentre les formes de vie spécifiques, y com-pris de la vie professionnelle. L’enseigne-ment académique a également pris en comp-te les notions de citoyenneté et de métier(profession), considérant les ressources del’individu, dans une forme d’éducation dis-tincte des autres. Il s’est focalisé sur la par-ticipation au monde du travail, à une sociétéstructurée en professions par les compé-tences spécialisées, les compétences tech-niques et les métiers, qui constituent l’iden-tité professionnelle des individus. Une ten-dance historique globale perceptible dansles développements dans les pays nordiqueset en Allemagne (Heikkinen, 1995; Englund,1986; Greinert, 2003) est la pénétration del’enseignement académique dans toutes lesautres formes d’enseignement. Cependant,les impératifs de la pertinence économiqueet les caractéristiques conditionnant les mar-chés globalisants peuvent ajouter à la ver-

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(10) Par exemple, Greinert et Deis-singer défendent l’approche par mo-dèles en invoquant la nécessité dethéories partagées dans la recherchecomparative et en se référant auxidéaltypes de Max Weber. OlavKorsnes a souligné que l’idéaltypewebérien est une image idéation-nelle, qui n’est pas une réalité his-torique, encore moins la réalité réel-le, et qu’il est encore moins apte àservir de référence à une classifica-tion de la réalité qua Exemplar(Korsnes, 2001).

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sion instrumentale de l’enseignement aca-démique des versions déformées de l’en-seignement professionnel et populaire.

Les systèmes de FEP identifiés aujourd’huireprésentent probablement les programmesculturels hégémoniques victorieux qui, enparticulier depuis la Seconde Guerre mon-diale, ont construit ensemble des États, deséconomies et des industries nationales. C’estpourquoi l’engouement des chercheurs etdes acteurs politiques pour certains modèlesdérivés de contextes sélectionnés, spéci-fiques, peut encourager la promotion denouveaux programmes hégémoniques deFEP comme constituants conjoints de po-litiques, d’économies et d’industries trans-

nationales. Une alternative non confor-miste serait de déconstruire la transforma-tion des systèmes nationaux comme les pro-duits d’une concurrence entre projets cul-turels de FEP, exécutés par des acteurs in-dividuels, collectifs et métacollectifs pour-suivant des objectifs subnationaux, natio-naux et surpranationaux spécifiés. La dif-férenciation de l’enseignement est liéeaux complexités de ce genre de projets cul-turels. Les réflexions sur l’histoire de l’en-seignement dans les pays nordiques et enAllemagne montrent qu’il faut une approcheplus historicisante et contextualisée, qui ren-drait différentes formes d’éducation com-préhensibles dans un paysage éducatif etpolitique plus large.

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Introduction

L’article 128 du traité instituant la Commu-nauté économique européenne, signé à Ro-me le 25 mars 1957, stipule que «sur pro-position de la Commission et après consul-tation du Comité économique et social, leConseil établit les principes généraux pourla mise en œuvre d’une politique commu-ne de formation professionnelle qui puissecontribuer au développement harmonieuxtant des économies nationales que du mar-ché commun.» L’article 118 inclut la forma-tion et le perfectionnement professionnelsparmi les matières pour lesquelles la Com-mission a été investie de la mission de «pro-mouvoir une collaboration étroite entre lesÉtats membres.» L’article 41 mentionne ex-plicitement la formation professionnelle dansle domaine de l’agriculture, spécifiant qu’ildevrait y avoir une «coordination efficacedes efforts entrepris dans les domaines dela formation professionnelle (...) pouvantcomporter des projets ou institutions finan-cés en communs.» (1). Une série de mesuresa suivi (concernant en particulier la mobili-té des travailleurs, les échanges de jeunestravailleurs, etc.) qui, sans mentionner ex-plicitement l’adoption d’une politique com-mune, pourraient être considérées commedes sources juridiques indirectes de la com-pétence de la Communauté européenne enmatière de formation professionnelle (2).

On peut donc affirmer que le traité instituantla Communauté économique européenneoffrait une base juridique solide à une ini-tiative de la Commission visant à établir unepolitique commune de formation profes-sionnelle pour les travailleurs des Étatsmembres. Ces mesures étaient une réponsepratique avant tout aux exigences des paysen butte aux problèmes économiques et so-ciaux les plus pressants. L’Italie, en particu-lier, espérait trouver dans la Communautéun instrument qui l’aiderait à résoudre, toutau moins en partie, les problèmes structu-rels qui accablaient la société. Le plus gra-ve de ces problèmes était ce qui semblaitêtre un chômage endémique dans les ré-gions économiquement les moins avancéesdu pays (3). Sachant cela, une politique com-mune de formation professionnelle pouvaitêtre considérée comme très utile pour fa-ciliter l’insertion professionnelle et la conver-sion d’une très grande partie des chômeurs,d’autant que le système de formation italienn’était pas aussi développé que celui d’autresÉtats membres. Les intérêts économiques etsociaux de l’un des États membres - quicomptait parmi les trois «grands», peut-êtremoins sur le plan politique que par son éten-due, sa démographie et son économie - etle souci de la Commission, qui venait d’êtrecréée, de devenir le moteur de l’intégration,tout au moins dans les domaines où le trai-té lui attribuait des responsabilités spéci-

La politique communede formation professionnelle dans la CEE de 1961 à 1972

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FrancescoPetrini

Chercheur post-doctoral dans le

département d'étudesinternationales de

l'Université de Padoue

Alors que l’article 128 du trai-té de Rome est très clair quantà la volonté de développerune politique commune enmatière de formation pro-fessionnelle, cette politiquecommune n’a pas vu le jour.Cela s’explique notammentpar les résistances de l’Alle-magne et de la France, qui dis-posaient déjà de systèmes deformation professionnellebien développés. Mais cetéchec s’explique égalementpar la lutte entre les forcescentralisatrices du dévelop-pement européen, que révè-lent les tentatives de la Com-mission de se démarquer enmatière de financement despolitiques communes, et lesforces en réaction de gou-vernements cherchant à res-treindre les ambitions de laCommission et à défendreleur souveraineté. Dans le do-maine de la formation pro-fessionnelle, cela a conduit àl’abandon de la politique com-mune, la France et l’Allemagnese révélant entre autres trèspeu soucieuses de prendre encharge le coût de la requali-fication de la main-d’œuvreitalienne du sud.

(1) Pour les citations du traité, se re-porter aux Archives historiques del’Union européenne: ASCE, BAC173/1995, 2824, Commission de laCEE, Principi generali per l’attua-zione di una politica comune di for-mazione professionale [Principes gé-néraux pour la mise en œuvre d’unepolitique commune de formationprofessionnelle], 26/9/1961.

(2) La Commission cite notammentcomme sources indirectes les articles49, 50, 57 et 131 du traité de Rome,ainsi que l’article 3 de la Conven-tion d’application relative à l’asso-ciation des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté et les dis-positions du Protocole concernant

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fiques, poussaient à l’établissement d’unepolitique commune de formation profes-sionnelle. Comme l’indiqua le membre dela Commission qui avait suivi de très prèsles vicissitudes de la formation profession-nelle dans les années soixante, l’Italien Lio-nello Levi Sandri, ce sont des dispositionsimportantes dans le contexte général de lapolitique sociale de la Communauté euro-péenne, car c’est le seul cas où le traité pré-voit à ce propos, dans l’article 128, une po-litique commune de formation profession-nelle. Cela permet à la Communauté de toutfaire pour établir une véritable politique com-mune adéquate, qui se démarque de sa po-litique dans d’autres domaines qui peut d’unecertaine manière apparaître comme moinsvigoureuse (4).

Dès lors, les intérêts conjoints de l’Italie etde la Commission de la Communauté éco-nomique européenne parviendraient-ils àimposer une ligne «interventionniste», c’est-à-dire une ligne où les institutions et les mé-canismes communautaires joueraient un rô-le déterminant dans la formation profes-sionnelle? La réponse à cette question est«non», tout au moins en ce qui concerne lesannées qui nous intéressent ici. Essayons decomprendre pourquoi.

Les 10 principes de 1963

Le 12 mai 1960, sur proposition de la Com-mission, le Conseil a décidé d’accélérer lamise en œuvre du traité de Rome (5). La for-mation professionnelle a été choisie commel’un des secteurs où des mesures seraientprises avant le calendrier fixé pour la miseen œuvre des dispositions du traité. Aprèsavoir consulté les autorités nationales com-pétentes et les représentants des salariés etdes employeurs, avec le soutien des repré-sentants de l’Italie dans les organes com-munautaires (6), la Commission a réussi, entrefévrier et septembre 1961, à définir les prin-cipes généraux relatifs à la formation, com-me le demandait l’article 128 du traité, enfixant leur nombre à dix (7). Ces principesdevaient être les fondements de l’établis-sement d’une ligne commune pour les sixÉtats membres. Nous n’allons pas les exa-miner un par un dans le détail, mais leursaspects les plus importants, afin de faire lalumière sur les lignes directrices de l’ac-tion de la Commission, puis nous analyse-rons les réactions de la Communauté àcette action.

L’objectif général, à atteindre au moyen d’unepolitique sociale commune, était, selon laCommission, non seulement une augmen-tation de la productivité et un renforcementpur et simple de l’intégration économique,mais aussi, et avant tout, l’épanouissementmoral et le progrès matériel des travailleurs,de manière à les associer d’une manière po-sitive au processus d’intégration et à ses ins-titutions. On en est donc venu à considérerle développement de la formation profes-sionnelle dans les États membres via unepolitique d’intervention par les autorités com-me tout aussi cruciale pour réaliser une for-me d’intégration compatible avec les objec-tifs sociaux énoncés dans le traité (8). Dansune situation de pénurie chronique de main-d’œuvre qualifiée et de techniciens, allantde pair avec la persistance d’un taux de chô-mage élevé dans certaines régions de la Com-munauté, l’importance de la formation pro-fessionnelle pour améliorer les conditionsde vie des travailleurs tombait sous le sens:elle représentait un lien entre le dévelop-pement démographique et le développe-ment technologique (9). Bien entendu, onaurait pu essayer de résoudre le problèmede la pénurie de main-d’œuvre qualifiée àl’aide d’accords intergouvernementaux, oudes interventions du Fonds social européenqui venait d’être créé mais, selon M. LeviSandri, la politique économique de la Com-munauté et, surtout, sa politique sociale de-mandent plutôt une politique de formationprofessionnelle qui, comme le prévoit le trai-té, doit être une politique commune (10).

Dans ce contexte, les principes générauxn’étaient pas conçus dans l’abstrait, ni enthéorie, mais comme des préceptes quidoivent effectivement dicter l’action desÉtats (11).

La Commission était claire à ce sujet: pré-voir une politique commune de formationprofessionnelle dont les principes ne sontpas contraignants pour les États membresreviendrait en fin de compte à ne pas éla-borer de politique de formation profession-nelle commune du tout. Il est clair que leterme «principes généraux» implique desrègles de conduite et l’idée d’un résultat tan-gible à atteindre. L’acte à adopter doit doncêtre par nature contraignant pour les Étatsmembres, en vertu de leur obligation géné-rale définie dans l’article 5 du traité; il veilleà ce que pour les matières relatives à la for-mation professionnelle, les États membresalignent leur comportement et leurs actions

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l’Italie. Voir ASCE, BAC 173/1995,2822, Commission de la Commu-nauté économique européenne, Prin-cipes généraux pour la mise enœuvre d’une politique commune deformation professionnelle - Projet,8/2/1961.

(3) À propos de la position de l’Ita-lie sur l’intégration européenne, voirVarsori, 1999.

(4) ASCE, BAC 7/1986, 1618. Expo-sé de M. Levi Sandri devant le Co-mité économique et social, 1/3/1962.

(5) Voir Gerbet, 1994, p. 214. Voiraussi ASCE, CM2/1960-M-46. Expo-sé fait par M. Petrilli au cours de la37e session du Conseil, 27/9/1960.

(6) Voir ASCE, BAC 173/1995, 2822,Coreper - Extrait du procès-ver-bal, problèmes relatifs à l’accéléra-tion, 14/7/1961, où il est indiquéque le représentant italien a confir-mé l’intérêt de son gouvernementpour la présentation prochaine parla Commission d’une proposition re-lative à l’établissement de principesgénéraux pour la mise en œuvred’une politique commune de for-mation professionnelle.

(7) Voir la version finale des prin-cipes dans Principi generali per l’at-tuazione di una politica comune diformazione professionale [Principesgénéraux pour la mise en œuvred’une politique commune de for-mation professionnelle], 26/9/1961,op. cit.

(8) Principes généraux pour la miseen œuvre d’une politique commu-ne de formation professionnelle -Projet, 8/2/1961, op. cit., en parti-culier p. 7-8, sur les fondements éco-nomiques et sociaux de l’action dela Commission. Il est intéressant denoter que ce document souligne quel’on ne peut pas s’en remettre pourl’amélioration des conditions de tra-vail aux mécanismes du marché qui,selon la théorie et l’expérience éco-nomiques, auraient accentué lesdéséquilibres économiques et so-ciaux existant dans la Communau-té. Néanmoins, une politique del’emploi « autoritaire» n’aurait pasnon plus été acceptable. Tout bienconsidéré, une politique commu-ne de formation professionnelle étaitle moyen le plus approprié pourcréer une situation sociale qui pré-céderait une politique de l’emploirépondant aux objectifs générauxdu traité.

(9) Idem.

(10) Exposé de M. Levi Sandri devantle Comité économique et social,1/3/1962, op. cit.

(11) Idem.

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sur les principes généraux qui seront défi-nis (12).

La Commission s’est efforcée à plusieurs oc-casions de souligner la nature obligatoiredes principes définis conformément à l’ar-ticle 128, dans le souci manifeste d’excluretoute probabilité que les gouvernements lesappliquent suivant leurs propres règles na-tionales, chacun ayant ses propres priorités,ce qui aurait vidé de son sens l’idée mêmed’une politique commune.

Considérant les perspectives à long terme,M. Levi Sandri a déclaré qu’il était entière-ment d’accord avec Mme Maria Weber, délé-guée des syndicats allemands au CES, surl’idée selon laquelle, dans la période de tran-sition vers la réalisation du marché commun,il faudrait amorcer un processus irréversiblequi amènerait les États membres à un niveaucommun de formation professionnelle (13).Ce rapprochement graduel des systèmes deformation des États membres exigeait la mi-se au point d’actions basées sur des initia-tives et des programmes communs; dans cecas, au lieu de se contenter de coordonnerles initiatives des États membres, la Com-mission aurait dû être une véritable forcemotrice de la politique commune. Commele dit M. Levi Sandri, on ne saurait acceptercertaines propositions qui restreindraient lespouvoirs de la Commission, et compromet-traient probablement la mise en œuvre mê-me de la politique commune (14).

Cette conception «active» du rôle de la Com-mission était incarnée dans le quatrième prin-cipe, en vertu duquel, pour assurer la miseen œuvre de la politique commune de for-mation professionnelle, la Commission de-vait faire des propositions concrètes au Con-seil, prendre toute autre initiative appropriée,indiquer l’ordre de priorité des actions, suivreleur évolution, veiller à leur coordination etvérifier leurs résultats (15).

L’organe exécutif de la Communauté, en par-ticulier, pourrait élaborer des programmesd’études et de recherche communs et pro-poser d’une manière générale des mesurespratiques, dont la mise en œuvre serait confiéeaux États membres «sous son impulsion» [cel-le de la Commission], et qui seraient prati-quement illimitées dans le temps et dansl’espace, car les discussions portaient tantsur des projets à court terme que sur desprojets à long terme au niveau national com-me au niveau communautaire (16). Le même

principe prévoyait la création d’un comitéconsultatif de la formation professionnellecomposé à parts égales de représentants desautorités nationales compétentes, des syn-dicats et des organisations patronales, à quiétait assignée la mission d’épauler la Com-mission dans son action dans ce domaine.

Il est intéressant de noter au passage quedans la première version des principes,qui date de février 1961 (la version définiti-ve a été approuvée en septembre), le qua-trième principe prévoyait également la créa-tion d’un centre européen d’information, dedocumentation et de recherche ayant pourmission de diffuser des documents et desinformations sur la formation professionnelleet d’étudier, comme le demandait la Com-mission, les questions techniques liées à laréalisation d’une politique commune (17).Ces passages ne figurent plus dans les ver-sions suivantes, où toutes les fonctions quiavaient été en principe assignées au centreeuropéen pour la formation professionnel-le étaient confiées à la Commission elle-mê-me.

Manifestement, la Commission avait de grandesambitions, qui furent accueillies avec unecertaine perplexité, même par ceux qui étaientles plus favorables aux idées intégration-nistes.

Au Parlement européen (à qui, bien que l’ar-ticle 128 ne l’exige pas, le Conseil deman-da son avis sur les instances de la Com-mission) (18), quelques députés soulevèrentla question du respect des spécificités na-tionales du système éducatif, arguant que laCEE ne pouvait pas aller plus loin que ne lepermettaient les structures établies des Étatsmembres (19). M. Levi Sandri, qui assistait audébat, a assuré l’Assemblée que la Com-mission n’avait pas l’intention de s’immiscerdans les questions relevant de la compé-tence des États membres.

Le CESE (à qui on a aussi demandé son avis,comme on l’avait fait pour le Parlement,bien que cela ne soit pas exigé) a expri-mé des doutes, jugeant que le comité consul-tatif mentionné dans le quatrième princi-pe risquait d’être marginalisé par une Com-mission trop partiale. Ici aussi, M. Levi San-dri est intervenu pour donner l’assuranceque la Commission avait l’intention d’agiren contact étroit avec les catégories concer-nées (20).

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(12) Principi generali op. cit.

(13) Exposé de M. Levi Sandri devantle Comité économique et social,1/3/1962, op. cit.

(14) Idem.

(15) Principi generali op. cit.

(16) Idem.

(17) Principes généraux pour la mi-se en œuvre d’une politique com-mune de formation professionnelle- Projet, 8/2/1961, op. cit.

(18) Voir ASCE, CM2/1961 57. Pro-cès-verbal de la 53e session du Con-seil de la CEE, Bruxelles 23-25/10/1961. Les 10 principes ont étéofficiellement soumis à l’attentiondu Conseil le 3 octobre 1961. VoirASCE, BAC 26/1969, 140. Letter fromMr Hallstein to the President of theEEC Council [Lettre de M. Hallsteinau président du Conseil de la CEE],3/10/1961. Dans cette lettre, M. Hall-stein demande au Conseil d’exami-ner les principes au plus tôt, c’est-à-dire à sa session du 23 octobre,ce qui prouve que cette questionétait prioritaire pour la Commissionet que celle-ci sous-estimait peut-être les résistances que les principesen projet risquaient de susciter auniveau des gouvernements natio-naux. À sa session d’octobre, le Con-seil ne s’est pas attardé sur les mé-rites des principes, mais il a seule-ment approuvé à l’unanimité l’idéede consultation de l’Assemblée par-lementaire et du CESE.

(19) ASCE, BAC 7/1986, 1618. Noted’information - Consultation relati-ve à la proposition de la Commis-sion, 4/4/1962, où on trouvera unrésumé du débat à l’Assemblée. L’As-semblée parlementaire s’est réuniele 30 mars.

(20) En ce qui concerne le débat auCESE, voir ASCE, BAC 7/1986, 1618.Compte rendu des délibérations dela XXe session, 1/3/1962. Déclara-tions de M. Levi Sandri : Exposé deM. Levi Sandri devant le Comité éco-nomique et social, 1/3/1962, op. cit.

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Malgré les doutes suscités par certains pointsde la proposition, on peut affirmer que dansl’ensemble, les deux organes ont apportéleur soutien au grand projet de la Com-mission. L’un et l’autre ont donné un avisfavorable, bien que de nombreux amen-dements au texte présenté par la Commis-sion aient été suggérés, en particulier parl’Assemblée parlementaire (21). Quoi qu’il ensoit, en ce qui concerne le point clé du pro-jet, à savoir le pouvoir de la Commission deprendre des initiatives, le rapport présentépar la commission sociale du Parlement eu-ropéen soulignait l’importance vitale du rô-le de l’organe exécutif de la CEE commepoint de départ d’initiatives et d’incitationspour la mise en œuvre de la politique com-mune ... Il est essentiel de donner à la Com-mission de la CEE des pouvoirs lui per-mettant de prendre des initiatives d’intérêtcommun (22).

En d’autres termes, le Parlement européensoutenait entièrement l’idée d’attribuer à laCommission un rôle de meneur dans le do-maine de la politique commune de forma-tion professionnelle, y compris le droit deprendre des initiatives.

Les gouvernements ont, bien entendu, réa-gi très différemment. Près d’un an après quele Parlement européen eut donné son avis,avec un retard qui étonna les milieux com-munautaires (23), le Conseil examina enfinle projet de principes à sa session du 21 fé-vrier 1963 (24). Les gouvernements étaientreprésentés par leurs ministres du travail, laCommission était représentée par son pré-sident, M. Walter Hallstein, et par M. LeviSandri. La discussion porta essentiellementsur le libellé du quatrième principe. Deuxconceptions s’opposaient: l’une excluaitde confier aux institutions communautairesdes compétences en matière de formulationet d’application des politiques de formationprofessionnelle, l’autre plaidait en faveur deces compétences. La première était défen-due par le ministre français, M. Grandval et,avec plus de vigueur encore, par le ministreallemand, M. Blank. Selon le ministre fran-çais, la Commission avait, semble-t-il, l’in-tention d’aller au-delà de sa fonction de gui-de des politiques des États membres et vou-lait intervenir directement dans les écono-mies nationales. De l’avis de M. Blank, ilconviendrait que la Commission se conten-te de faire connaître ses points de vue et sesopinions aux États membres; il appartien-drait alors aux États membres d’agir en plei-

ne conscience des faits. Si cela n’était pasaccepté, la République fédérale d’Allemagnene pourrait pas approuver un texte autori-sant la Commission à faire au Conseil despropositions que, conformément aux dis-positions du traité, il ne pourrait rejeter qu’àl’unanimité. Pour exclure cette éventualité,le gouvernement proposa que la Commis-sion ne puisse faire des propositions concer-nant la formation professionnelle qu’auxÉtats membres. De cette manière, chaqueÉtat resterait libre de choisir de suivre, ounon, les propositions de la Commission.Comme l’a déclaré le ministre allemand, lesÉtats membres sont compétents en matièrede formation professionnelle et tout textene reconnaissant pas cette situation ne se-rait pas conforme au traité (25).

Outre leurs points de vue sur la question dela compétence, les délégations française etallemande indiquèrent qu’elles n’étaient pasd’accord sur le libellé du dixième principe,qui prévoyait la possibilité d’un financementcommun de certains types d’actions entre-prises en vue de réaliser les objectifs de lapolitique commune de formation profes-sionnelle. Selon les deux ministres, cette dis-position devrait être supprimée et le choixdes moyens de financement devrait être lais-sé à l’appréciation des États membres eux-mêmes.

Le projet de la Commission avait aussi dessupporters au sein du Conseil. C’est l’Italiequi était le plus fervent défenseur des ar-guments avancés par les membres de la Com-mission. Compte tenu de ce qui a été ditplus haut, les raisons de ce soutien sont com-préhensibles: l’Italie était le pays qui avaitle plus grand intérêt à ce qu’une politiquede formation professionnelle véritablementcommune soit établie, en particulier parcequ’elle pourrait conduire au rapprochementdes niveaux de formation nationaux pourles travailleurs, qui était une condition préa-lable à la libre circulation des travailleurs àl’intérieur du marché commun, l’un des prin-cipaux objectifs de la participation de l’Ita-lie à l’intégration européenne (26). Il en ré-sulta que, face à l’opposition franco-alle-mande, M. Bertinelli proposa un compro-mis qui devait permettre à la Commissionde présenter ses propositions en premierlieu au Conseil et, selon les circonstances,aux États membres également.

Au terme d’un long débat, dont le point cul-minant fut le remplacement du terme «pro-

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(21) Voir la version modifiée des prin-cipes proposée par l’Assemblée dansASCE, BAC 7/1986, 1618. Consulta-tion demandée par le Conseil dela CEE à l’Assemblée parlementaireeuropéenne, 2/4/1962.

(22) ASCE, BAC 26/1969, 142, APE,Rapport diligenté par la Commissionsociale, 21/3/1962. Voir aussi lescomptes rendus des discussions àla Commission dans ASCE, BAC173/1995, 2829. Quoi qu’il en soit,l’Assemblée est restée plus pruden-te en ce qui concerne le droit de laCommission de prendre des initia-tives. Il est révélateur que dans l’énon-cé du quatrième principe, le Parle-ment avait proposé de remplacerl’expression «sous son impulsion»par la formule «sur sa demande» àpropos de la manière de procéderde la Commission vis-à-vis des Étatsmembres dans l’exécution des pro-jets élaborés par elle.

(23) Voir la question écrite soumisele 29 octobre 1962 par le député so-cialiste néerlandais, M. Nederhorst,président de la commission socia-le de l’Assemblée parlementaire eu-ropéenne, sur les raisons du retard,et la réponse de la Commission, le29 décembre 1962, dans ASCE, BAC1/1970, 638.

(24) ASCEM CN2/1963, 0009. Procès-verbal de la 96e session du Conseilde la CEE tenue à Bruxelles le21/2/1963, 26/4/1963.

(25) Idem.

(26) Voir, à propos des liens entrel’intégration européenne et l’émi-gration dans la politique italienne,Romero, 1991 et 1993.

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positions» par «actions», considéré commemoins contraignant par la délégation fran-çaise et d’une portée juridique plus limitée,le Conseil vota un texte qui intégrait la so-lution de compromis proposée par la délé-gation italienne. Quatre délégations votèrentpour et deux - celles de la France et de l’Al-lemagne - contre. S’agissant de la ques-tion des fonds de soutien à la politique com-mune, la proposition des Pays-Bas fut ap-prouvée - ici aussi, les délégations de laFrance et de la République fédérale d’Alle-magne votèrent contre: la politique de for-mation professionnelle pourrait donc fairel’objet d’un financement commun, ce qui si-gnifiait toutefois le report à une date ulté-rieure de la décision proprement dite sur lesmodes de financement.

Le programme d’action de 1965

Après un accouchement difficile, la versionfinale des principes fut adoptée par le Con-seil dans sa décision du 2 avril 1963. Dansune deuxième décision, le 18 décembre 1963,le Conseil a approuvé le statut du Comitéconsultatif pour la formation professionnel-le (27). Ce Comité était composé de 36membres, à savoir deux représentants dugouvernement, deux représentants des syn-dicats et deux représentants des employeursde chaque État membre. Il était présidé parun représentant de la Commission. Cettefonction fut assumée pendant les deux pre-mières années d’activité du Comité par M.Levi Sandri, qui était devenu entre-temps Vi-ce-Président de la Commission. Dans sondiscours introductif, prononcé à l’occasionde la première réunion du Comité, le 29 juin1964, il brossa un tableau complet des pro-grammes de la Commission dans le do-maine de la formation professionnelle aprèsl’approbation des principes généraux (28).

Selon le Vice-Président de la Commission,la politique commune de formation profes-sionnelle devait être le résultat d’une actionconcertée des États membres et des insti-tutions communautaires, qui prendrait ap-pui sur les principes généraux. La premièreétape consisterait à définir des lignes direc-tives pour les interventions de la Commu-nauté, à fixer un ordre de priorité à l’aidedes principes et à déterminer les besoins lesplus urgents. Ayant cela à l’esprit, déclaraM. Levi Sandri, la Commission avait l’in-tention d’être le catalyseur de la volonté desÉtats membres (29). En particulier, confor-mément au cinquième principe, il incom-

berait à la Commission de créer un réseaupermanent d’échange d’informations entreles États membres et entre les États membreset la Commission, afin de promouvoir la mi-se en commun fructueuse des expériencesfaites avec les différents programmes natio-naux de formation professionnelle. Maisavant tout, selon le membre italien de laCommission, l’objectif de l’action commu-nautaire devrait être le développement dessystèmes de formation professionnelle etleur adaptation au changement dans le do-maine économique et au progrès technique.M. Levi Sandri ne manqua pas de rappelertous les efforts déployés jusqu’alors par laCommission (30), mais il pensait que le mo-ment d’une action plus structurée pour lamise en pratique des dix principes étaitvenu. De l’avis de la Commission, les prin-cipes étant généraux et souvent théoriques,il était nécessaire de préciser les objectifs dela politique commune de formation profes-sionnelle et les méthodes adoptées pour at-teindre les objectifs du CES et d’établir unordre de priorités en définissant une lignedirectrice générale pour l’action envisagéeet en traçant un cadre dans lequel cetteaction devrait s’inscrire (31).

Pour atteindre cet objectif, la Commissions’occupa en 1964 d’élaborer un Projet deprogramme d’action en matière de politiquecommune de formation professionnelle (quicomportait deux parties, l’une portant plusspécialement sur l’agriculture, et l’autre surd’autres secteurs). L’objectif ultime des ac-tions communes, tel qu’il était défini dansle programme d’action, était la mise en pla-ce d’un système proposant à tous les jeunesde la Communauté européenne et, si né-cessaire, aux adultes, des possibilités deformation adéquates (32). Comme cela étaitexplicitement indiqué dans les considérants,le programme devait constituer un stadeintermédiaire entre les dix principes etles propositions concrètes que la Commis-sion soumettrait au Conseil ou aux Étatsmembres. Un ensemble d’actions à courtet long termes fut prévu dans le but de per-mettre de mettre progressivement en œuvreune politique commune de formation pro-fessionnelle susceptible de contribuer audéveloppement harmonieux des économiesnationales et du marché commun, d’accé-lérer l’élévation du niveau de vie et d’amé-liorer les perspectives de travail pour lesactifs, qu’ils soient salariés ou à leur proprecompte (33).

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(27) Voir la documentation dans ASCE,BAC 64/1984, 969 et BAC 6/1977,679.

(28) ASCE, BAC 26/1969, 467. Comi-té consultatif pour la formation pro-fessionnelle. Discours introductifprononcé par M. Levi Sandri,29/6/1964.

(29) Idem.

(30) Par exemple, M. Levi Sandri rap-pela que suite aux propositions for-mulées par la Commission, le pre-mier programme commun d’échan-ge de jeunes travailleurs avait étéapprouvé le 8 mai 1964, Il mentionnaégalement une série d’initiatives des-tinées à établir une collaborationavec des organismes nationaux (com-me l’université de Francfort-sur-le-Main et celle de Cologne, ou enco-re la société humanitaire de Milan)et des organismes internationaux(Centre d’information sur la for-mation professionnelle de Genè-ve, étroitement lié à l’OIT) dans ledomaine de l’information et de larecherche sur la formation profes-sionnelle. La Commission a alors en-trepris avec conviction d’organiserune conférence internationale surla formation professionnelle, qui aeu lieu à Bruxelles du 16 au 20 no-vembre 1964. Voir les actes de laconférence dans ASCE, BAC 1/1970,637 et ASCE, BAC 26/1969, 467, No-te d’information concernant le Col-loque sur la formation profession-nelle, 25/9/1964.

(31) ASCE, BAC 6/1977, 679. Projetde programme d’action en matièrede politique commune de formationprofessionnelle, 1964, non daté.

(32) Idem.

(33) ASCE, BAC 6/1977, 685. Pro-gramme d’action en matière de po-litique commune de formation pro-fessionnelle en général, non daté.

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L’objectif essentiel des actions à court termeconsistait à promouvoir par la formation etle recyclage l’utilisation du potentiel de lamain-d’œuvre à l’intérieur de la Commu-nauté, ainsi que le transfert de travailleursdes secteurs ayant un excédent de main-d’œuvre vers les secteurs manquant de bras.À cette fin, il était prévu de développer etd’améliorer les initiatives communautairesvisant à élaborer des programmes de for-mation accélérée pour les salariés adultes.

Parmi les actions à long terme, le documentdonnait la priorité à l’élaboration de struc-tures, de programmes et de méthodes deformation, en particulier dans les régions endéveloppement et celles qui étaient mena-cées par le déclin économique. Pour y par-venir, une attention particulière fut attachéeà la formation de personnel enseignant etde formateurs, ainsi qu’au perfectionnementet à la formation continue des salariés, demanière à pouvoir répondre adéquatementaux exigences découlant du progrès tech-nologique.

Le programme d’action mentionnait commeautre priorité le rapprochement des niveauxde formation qui, selon M. Levi Sandri (34),comptait parmi les objectifs fondamentauxde la politique commune, afin que le prin-cipe de la libre circulation des travailleurset de la liberté d’établissement puisse s’ap-pliquer pleinement. Par conséquent, le rap-prochement devait viser en premier lieu lesprofessions et les qualifications où les tauxde migration à l’intérieur de la Communau-té étaient les plus élevés.

En mai 1965, après avis du le Comité consul-tatif, la Commission adopta le programmed’action, qui fut soumis à l’attention d’autresinstitutions communautaires (35). Le Parle-ment donna un avis favorable en mars 1966(36). Le document fut examiné au mois demai de la même année par le groupe de tra-vail «Questions sociales» du Conseil des mi-nistres (37). Dans le groupe, les délégationsallemande et néerlandaise firent observerque la répartition des responsabilités entrela Communauté et les États membres n’avaitpas été définie suffisamment clairement dansle programme d’action. La délégation fran-çaise fit officiellement part de ses réserves,en faisant remarquer que les propositionsde la Commission dépassaient le cadre dela formation professionnelle proprement di-te sur des points significatifs. Selon elle, elless’étendaient à des questions qui relevaient

de la compétence exclusive des États membres(notamment politique de l’emploi, politiquescolaire et politique régionale). Elle signa-la que quelques-unes des actions envisagéesposaient des problèmes de financement etque pour cette raison, le programme ne pou-vait être qu’un fil conducteur, car tout en-gagement concret aurait nécessité une dé-cision unanime des gouvernements. Danscet esprit, la délégation proposa que les gou-vernements se mettent d’accord sur des ini-tiatives concrètes sans définir de mode definancement général. Abondant dans ce sens,la République fédérale d’Allemagne expri-ma l’opinion qu’il était préférable de ne pasadopter de position spécifique sur l’ensembledes actions couvertes par le programme,mais de le faire cas par cas. Cela était ma-nifestement une tentative de la part des gou-vernements d’imposer un compartimentagedes projets de la Commission de manièreà exclure toute forme de supranationalité.

Seule la délégation italienne défendit le pointde vue de la Commission, et elle exprimal’opinion que le Conseil ne devait pas seborner à prendre acte du programme. L’Ita-lie proposa de soumettre au Comité des re-présentants permanents (Coreper) un pro-jet de déclaration dans lequel le Conseil sou-lignerait d’une part la nécessité de considé-rer les initiatives en matière de formationprofessionnelle comme un tout et, d’autrepart, la valeur d’une action conduisant à lareconnaissances mutuelle des qualificationsprofessionnelles afin de faciliter la libre cir-culation des travailleurs. Conformément à ladéclaration proposée par les Italiens, le Con-seil devrait demander à la Commission delui présenter les projets permettant la miseen œuvre du programme d’action (38). La po-sition de l’Italie ne fut pas soutenue parles autres délégations. La Commission elle-même déclara qu’elle retirerait la demandeadressée au Conseil d’examiner son pro-gramme, dont elle reconnaissait - comme el-le l’affirma expressément - le caractère in-dicatif et général (39). Cela étant, l’Italie mo-déra sa position et retira ses demandes. LeConseil ne fit que prendre acte du programmed’action sans en discuter.

Pourquoi la Commission a-t-elle battu en re-traite? À mon avis, l’explication est à cher-cher dans deux facteurs. Le premier est leclimat politique général: nous nous trou-vions dans la période juste après la fin dela crise provoquée par la «politique de lachaise vide», qui fut résolue par le com-

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(34) CCFP. Discours introductif pro-noncé par M. Levi Sandri, 29/6/1964,op. cit.

(35) ASCE, BAC 26/1969, 468. Dis-cours introductif prononcé par M.Levi Sandri, extrait du procès-ver-bal de la 316e session de la Com-mission, 5/5/1965. ASCE, BAC 6/1977,685, CCFP. Avis sur le Programmed’action en matière de politique com-mune de formation professionnel-le, 19/3/1965.

(36) Voir la documentation dans ASCE,BAC 26/1969, 469. L’avis favorabledu Parlement a été rendu le 11 mars1966.

(37) ASCE, BAC 26/1969, 469. Grou-pe de travail «Questions sociales»,Note - Programmes d’action établispar la Commission, 9/5/1966.

(38) ASCE, BAC 26/1969, 469. Texteproposé par la délégation italienne,21/9/1966.

(39) Voir les déclarations du repré-sentant de la Commission au Co-reper dans ASCE, CM/AI 31452. No-te - Programmes d’action établis parla Commission, réunion du Coreperdu 5/10/1966. Voir aussi ASCE, BAC7/1986, 1619. Note à l’attention deMM. les membres de la Commission,14/10/1966.

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promis de Luxembourg (cf. p. ex. Gerbet,1994, p. 269-284). On peut donc supposerque si la Commission avait changé d’attitu-de, c’est aussi parce qu’elle avait eu le des-sous dans sa confrontation avec la France.À la réflexion, l’intransigeance de la Fran-ce peut elle aussi être interprétée commeune conséquence de la crise institutionnel-le des mois précédents. Le deuxième fac-teur réside dans les événements liés plusétroitement à la formation professionnelle,notamment à l’échec de la première initia-tive concrète de la Commission dans ce do-maine.

Fin juin 1965, quelques semaines après laprésentation du programme d’action, la Com-mission soumit au Conseil une propositionde décision, à adopter à la majorité, à pro-pos de la mise en œuvre d’un programmede formation professionnelle accélérée (40).La Commission voyait dans cette initiativeune solution au moins partielle à un pro-blème réel. N’oublions pas qu’en 1964,quelques pays de la «petite Europe» man-quaient cruellement de main-d’œuvre: en Al-lemagne, par exemple, 600 000 emplois qua-lifiés n’étaient pas occupés. En Italie, aucontraire, les statistiques officielles dénom-braient 1 200 000 chômeurs. Comme l’écri-vit la Commission, il y avait dans la Com-munauté une pénurie aiguë de main-d’œuvrequalifiée dont l’ampleur était telle qu’ellecompromettait la croissance équilibrée del’économie communautaire. Seule l’Italie avaitun excédent de main-d’œuvre, qui pourraitêtre formée pour occuper les emplois va-cants dans les autres États membres (41).

D’un point de vue juridique et politique,la proposition de la Commission prenait ap-pui non seulement sur son programme d’ac-tion lancé récemment, mais encore sur lesprincipes généraux, et plus particulièrement,comme cela est signalé dans l’introductionde cette proposition, sur le quatrième et ledixième principes, c’est-à-dire sur les plusviolemment critiqués par les gouvernements.La pression provenait du Comité consulta-tif qui, dans son avis favorable de mars surle programme d’action, avait signalé la né-cessité d’étudier des actions qui contribue-raient à éliminer les déséquilibres existantssur le marché de l’emploi et avait recom-mandé de réaliser des programmes spéciauxde formation professionnelle accélérée pourremédier au problème de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée et de l’excédent de per-sonnel non qualifié (42). Le Comité consul-

tatif suggéra expressément de mettre surpied un programme de formation profes-sionnelle accélérée.

Approuvant le Comité consultatif, la Com-mission élabora un programme de forma-tion pour 3000 travailleurs italiens de 35 anset moins, qui étaient disposés à chercher dutravail dans le bâtiment, la métallurgie etl’hôtellerie dans un autre État membre. Laformation devait durer de huit mois à un anselon le secteur et elle devait se dérouler enpartie en Italie et en partie en Belgique eten France. En Belgique et en France, les par-ticipants devaient avoir droit à une rému-nération et à des conditions équivalentes àcelles qui étaient appliquées aux nationauxen formation dans les centres publics de for-mation professionnelle. Pour l’Italie, il étaitprévu que les stagiaires percevraient, outrela rémunération mensuelle, une prime quiserait versée à la fin de la formation et uneparticipation aux frais de déménagement àl’étranger. Le programme devait être finan-cé sur le budget communautaire (43).

Les projets de la Commission se heurtèrentà la résistance des gouvernements, ici aus-si à l’exception du gouvernement italien.Dans le débat dans le groupe de travail «Ques-tions sociales», qui occupa six réunions, dela fin du mois de mars à la fin du mois d’avril1966, personne ne mit en question le bien-fondé social et économique de la proposi-tion (44). Ce sont les implications politiqueset financières du projet qui suscitèrent l’op-position la plus vive. Comme le soulignala délégation italienne, cette initiative parti-culière avait une grande portée politique,qui allait bien au-delà de l’impact plutôt mo-deste qu’elle pourrait avoir sur la situationdu marché du travail; si elle était réalisée,elle serait la première action communautai-re concrète de formation professionnelle àêtre financée par la Communauté, ce quicréerait un précédent important (45). Mais,pour exclure précisément que soient confiéesà la Communauté des compétences dans cequi était considéré comme le domaine ré-servé des gouvernements nationaux, lesautres délégations proposèrent que le pro-gramme de la Communauté soit ajourné etremplacé par une série d’accords multila-téraux ou bilatéraux entre l’Italie et les autresÉtats membres, ou encore de recourir auFonds social. Outre la question de principeà propos de la compétence, le problème dupartage des coûts de la réalisation du pro-gramme intervenait également dans le dé-

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(40) ASCE, BAC 26/1969, 468. Pro-position de décision du Conseil pré-sentée par la Commission au Con-seil, 29/6/1965, annexe, M. Levi San-dri à M. Couve de Murville, 1/7/1965.

(41) Idem.

(42) Comité consultatif pour la for-mation professionnelle. Avis sur leProgramme d’action en matière depolitique commune de formationprofessionnelle, 19/3/1965, op. cit.

(43) Il était prévu de mettre à la dis-position de l’initiative une enveloppebudgétaire d’un peu plus de 6 mil-lions d’unités de compte au maxi-mum, ventilés de la manière sui-vante: quelque 1 700 000 u.c. pour1965, et le reste pour 1966.

(44) Voir ASCE, BAC 26/1969, 469.Conseil, Note-Proposition de déci-sion du Conseil, 3/5/1966.

(45) Idem.

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bat. Avec le système proposé par la Com-mission, les trois États les plus grands pren-draient en charge la plus grande partie descoûts et les autres auraient également à ap-porter une contribution non négligeable. Encas de recours au Fonds social, l’Italie n’au-rait à supporter que la moitié des dépensesnécessaires (46).

Face à ces résistances, la proposition avor-ta et fut remplacée par une série d’accordsintergouvernementaux. La Commission avaitdonc échoué dans son effort pour jouer lerôle de moteur d’une politique communede formation professionnelle.

Dans les années qui suivirent, la Commis-sion réorienta ses efforts vers des objectifsmoins ambitieux, d’une portée plus limitée.Elle mit en particulier l’accent sur l’exa-men de mesures de rapprochement des qua-lifications de formation professionnelle,conformément au huitième principe géné-ral. C’était là une entreprise qui, si elle avaitété étendue à tous les marchés du travail,aurait été un fardeau excessif en regard desstructures et des compétences limitées dontdisposait la Communauté. On décida doncde concentrer les efforts de la Commissionet du Comité consultatif sur les métiers ré-pandus, présentant un intérêt pour la Com-munauté dans son ensemble, et ayant unecertaine importance en termes de libre cir-culation (47). Les secteurs sélectionnés sur labase de ces trois critères étaient la construc-tion mécanique et le bâtiment/travaux pu-blics. L’objectif était d’établir une liste com-munautaire des compétences requises pourchaque métier et de promouvoir son adop-tion par les États membres. En 1967, la Com-mission communiqua au Conseil un projetde liste des compétences exigées pour lemétier de «tourneur de niveau moyen», puispour celui d’ «ajusteur-opérateur sur frai-seuse» et d’ «opérateur sur rectifieuse». Lestrois listes furent réunies en une Monogra-phie professionnelle pour la formation desouvriers spécialisés sur machines-outils.

Pourtant, même dans un contexte techniquede ce genre, la Commission devait s’attendreà ce que son travail se heurte à l’oppositiondu gouvernement français, qui contestait laméthode choisie au motif qu’elle risquait deconduire à une sous-estimation des spécifi-cités nationales et à une cristallisation desqualifications requises pour des métiers su-jets à des changements technologiquesconstants. Selon la délégation française au

groupe de travail «Questions sociales», le pro-jet de la Commission visait en pratique à dé-finir des contenus uniques pour les forma-tions dans les différents États membres. Lafixation d’un niveau moyen poserait doncde grands problèmes aux États membres,qui resteraient chargés de définir et d’adap-ter des niveaux à imposer aux différents sys-tèmes de formation professionnelle (48).

En raison de l’opposition de la France, lestravaux de la Commission furent suspendusen juillet 1968 par une décision du Conseiljusqu’à ce qu’une méthode de travail ac-ceptée par toutes les délégations soit éta-blie (49). Donc, à la fin de la décennie, l’ac-tion de la Communauté a en fait débouchésur une impasse.

Le programme d’action de 1972

Ce n’est qu’à la fin du mois de novembre1969, quelques jours avant la conférence deLa Haye, que l’on est sorti de l’impasse, toutau moins en partie. Le Conseil se réunit pourune discussion sur la situation des mar-chés du travail dans la Communauté. L’échan-ge d’idées entre les ministères, auquel as-sistait également M. Levi Sandri, attira l’at-tention sur la pénurie persistante de main-d’œuvre qualifiée dans l’industrie dans tousles États membres et sur l’existence de pochesde chômage de longue durée, alors que,d’une manière générale, le chômage dimi-nuait (50). Les ministres s’accordaient à pen-ser qu’il fallait souligner l’importance de laformation professionnelle pour maintenir unéquilibre qualitatif et quantitatif sur le mar-ché du travail et convinrent que des étudeset des recherches étaient nécessaires pourencourager l’échange d’expériences au ni-veau communautaire. La délégation italien-ne préconisa d’intensifier les efforts afin d’ar-river à des engagements plus spécifiques àl’échelon communautaire. À la fin de la ses-sion, le Conseil approuva une déclarationdemandant à la Commission de soumettreson évaluation et ses suggestions à proposde la formation professionnelle des adultes.

La Commission présenta ses propositions enavril 1970. Elle suggéra de mettre au pointau niveau de la Communauté des outils sta-tistiques, d’intensifier l’échange d’informa-tions et d’expériences et d’améliorer la co-ordination des travaux de recherche entre-pris par les États membres (51). On remar-quera qu’il y avait eu bien des changementspar rapport aux grandes ambitions du dé-

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(46) Dans cette hypothèse, en raisondes mécanismes de financement duFSE, la quote-part de l’Italie auraitaugmenté de 85 %, tandis que cellesde la France et de l’Allemagne au-raient diminué respectivement de20 % et de 42 %.

(47) Voir ASCE, CM/AI 31457, Con-seil. Nota-Formazione professiona-le: ravvicinamento progressivo deilivelli di formazione [Note-Forma-tion professionnelle: rapprochementprogressif des niveaux de forma-tion], 15/12/1967, résumant l’ex-posé d’un représentant de la Com-mission au groupe de travail «Ques-tions sociales» sur l’état d’avance-ment du rapprochement des niveauxde formation. Voir aussi ASCE, BAC64/1984, 969. L’action des Commu-nautés européennes en faveur del’harmonisation de la formation pro-fessionnelle. 9/10/1968. Texte de lacommunication du Directeur de laDG Affaires sociales de la Commis-sion, M. Vink, à une conférence or-ganisée par l’Institut européen pourla formation professionnelle.

(48)Voir ASCE, CM/AI 31457. Note-Formation professionnelle: rap-prochement progressif des niveauxde formation, 23/1/1968.

(49) Voir ASCE, CM/AI 31457. Extraitdu procès-verbal de la 44e sessiondu Conseil, 9/7/1968, prenant actedes conclusions du groupe de tra-vail «Questions sociales», dans ASCE,BAC 173/1995, 2840, Note-Forma-tion professionnelle: rapprochementprogressif des niveaux de formation,17/7/1968.

(50) ASCE, CM2/1969, 50. Procès-ver-bal de la 90e session du Conseil, 24-25/11/1969.

(51) Voir ASCE, CM/AI 31441 Con-clusions et suggestions présentéespar la Commission au Conseil aprèsl’échange de vues du 25/11/1969,20/4/1970, annexe à Bodson, V.(membre de la Commission) à Har-mel, P. (Président du Conseil de laCEE), 24/4/1970 et intervention dela Commission mentionnée dansASCE, CM/AI 31389, Note-Travauxdans le domaine de la formationprofessionnelle, 8/7/1970.

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but des années soixante. La seule exceptionà cette politique au profil bas était la pro-position d’envisager la possibilité, suggéréepar le CES, de créer un institut européen derecherche scientifique sur la formation pro-fessionnelle.

En novembre, en réponse aux propositionstimides de la Commission, le gouvernementfrançais présenta une note sur les activitésde la Communauté dans le domaine de laformation professionnelle, qui forma labase des initiatives des trois années à ve-nir (52). Dans cette note, le gouvernementfrançais critiquait violemment les activitésde la Communauté dans le domaine de laformation professionnelle, en particulier lesprincipes généraux. Il reprochait à ces prin-cipes d’être trop généraux, ce qui empêchaitde nombreux progrès ou développementspratiques ou présentant un intérêt signifi-catif. Cette note passait sous silence le faitque la résistance des gouvernements n’étaitpas étrangère à ce résultat décevant.

Selon le gouvernement français, il fallaitmettre sur pied un nouveau programme d’ac-tivités visant à développer l’échange d’in-formations et le rapprochement des niveauxde formation.

Le second objectif devait être poursuivisur une base différente de celle du passé.En d’autres termes, il ne fallait plus consi-dérer chaque qualification professionnelle,prise individuellement, mais des groupes demétiers et de fonctions plus généraux, le butétant une description évoluant en perma-nence de nouvelles méthodes de travail, plu-tôt qu’un relevé statique de pratiques quirisquaient de devenir très vites obsolètes.

Pour terminer, la France proposa de condui-re des actions communes dans des secteursqui, par nature, exigeaient une coopérationinternationale ou étaient liés particulière-ment étroitement aux politiques commu-nautaires. Les domaines identifiés plus spé-cifiquement comme domaines possibles d’uneaction commune étaient les suivants:

(a) apprentissage des langues pour les tra-vailleurs migrants;

(b) production de matériel spécial pour l’en-seignement (p. ex., ordinateurs et simula-teurs);

(c) collaboration aux programmes de ra-dio et de télévision ou échange de pro-grammes;

(d) élaboration de programmes commu-nautaires de formation aux métiers dans les-quels surgissent de nouveaux problèmes liésau développement technologique (p. ex.,technologies de l’information, machines-ou-tils CNC, etc.).

La proposition de la France fut bien accueilliepar les autres délégations (53). Il est inté-ressant de noter que la délégation alleman-de était entièrement d’accord sur le juge-ment négatif porté sur les principes géné-raux de 1963 et les initiatives qui s’ensuivi-rent et que néanmoins, plutôt que de se re-trancher derrière la critique générale à pro-pos de leur nature abstraite, elle reconnuten fin de compte dans une certaine mesu-re la véritable raison de leur échec: les prin-cipes du CES tentaient de définir avant toutun certain nombre de compétences et don-naient l’impression qu’il n’y avait que la Com-mission qui puisse prendre des mesures ef-ficaces. Cette approche ne pouvait pas don-ner de résultats satisfaisants, et il était enoutre sage de ne pas se référer à certainsprogrammes d’action formulés par la Com-mission par le passé (54).

La note française suscita dans le groupede travail «Questions sociales» une discus-sion intense qui conduisit à l’adoption parle Conseil d’un document contenant deslignes directrices de base pour l’élaborationd’un programme d’action communautairedans le domaine de la formation profes-sionnelle (55). Ces lignes directrices, qui re-flétaient largement les idées avancées par ladélégation française, furent acceptées dansleur intégralité par la Commission et servi-rent de base à un nouveau programme d’ac-tion qui vit le jour en octobre 1972 (56). Ilconvient de noter que le processus de dé-cision avait été inversé: désormais, c’étaientles gouvernements qui prenaient les initia-tives, et la Commission suivait. Comme lesoulignait la Commission sociale du Parle-ment européen dans son rapport, le nou-veau document représentait une régressionpar rapport au programme de 1965 (57). Lesactions envisagées avaient une enverguremodeste et consistaient principalement àpromouvoir la coopération et l’échanged’idées et d’informations entre États membres.Manifestement, il n’était pas prévu que laCommission puisse agir de son propre chef.

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(52) ASCE, CM/AI 31389. Note dugouvernement français sur les acti-vités communautaires en matière deformation professionnelle, 16/11/1970.

(53) Voir le débat au groupe de tra-vail « Questions sociales» dans ASCE,CM/AI 31389, Note-Travaux dans ledomaine de la formation profes-sionnelle, 11/1/1971.

(54) Idem. Voir aussi ASCE, CM/AI31459, Note-Avis de la délégationallemande concernant les travauxdans le domaine de la formationprofessionnelle, 24/2/1971.

(55) ASCE, CM/AI 30661. Lignes di-rectrices générales pour l’élabora-tion d’un programme d’action com-munautaire en matière de formationprofessionnelle, 27/7/1971. En cequi concerne la discussion au grou-pe de travail «Questions sociales»,voir l’abondante documentation dansASCE, CM/AI 31459.

(56) ASCE, CM/AI 31416. Premièresmesures pour la mise en œuvre d’unepolitique commune de formationprofessionnelle, 25/10/1972.

(57) ASCE, CM/AI 31419. Parlementeuropéen, rapport établi pour laCommission des affaires sociales etde l’emploi, 5/6/1973.

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Comme le faisait remarquer l’auteur du rap-port, en admettant implicitement que le pro-gramme avait une portée limitée, la Com-mission elle-même suggérait de l’intégrer àun plan d’action futur pour la mise en œuvrede la politique commune de formation pro-fessionnelle et de l’inclure dans le programmed’action sociale, dont la préparation avaitété confiée à la Commission lors du som-met de Paris en octobre 1972 (58).

En quelques mois, le climat sociopolitiquedans la Communauté devait changer du toutau tout. La crise économique qui marquaitla fin de l’ «âge d’or» du capitalisme allaitconfronter les sociétés occidentales à un cer-tain nombre de problèmes et bien des cer-titudes furent remises en question. Dans cet-te situation nouvelle, difficile, qui obligeaitles États à réfléchir à de nouvelles manièresde surmonter le problème, plusieurs projetsconçus au début des années soixante furentsortis des placards. Parmi eux, il y avait l’idée,qui figurait dans la première version desprincipes généraux, de créer un institut eu-ropéen de formation professionnelle.

Conclusion

Pour conclure, j’aimerais revenir sur la ques-tion posée au début: pourquoi, dans la pre-mière décennie de la vie de la Communau-té, les essais de mise en place d’une poli-tique commune de formation profession-nelle ont-ils échoué?

On trouvera diverses explications dans lesévénements qui se sont succédés dans la pé-riode considérée: opposition de certains Étatsmembres réticents à céder à la Communautéleurs pouvoirs dans un domaine qui, bienque n’ayant apparemment qu’une impor-tance secondaire, impliquait en fait des in-térêts très importants dans des pays commela France et l’Allemagne, dont les systèmesde formation professionnelle étaient très dé-veloppés; imprudence de la part de la Com-mission, qui ne réussit pas à maîtriser lespressions intégrationnistes à l’excès et sus-cita donc l’hostilité des gouvernements en-vers des projets jugés par trop «audacieux».Et on pourrait encore examiner dans ledétail les projets présentés par la Commis-sion, afin de détecter les faiblesses et les dé-fauts qui ont contribué à leur échec.

Cependant, la raison essentielle, et l’aspectqui confère de l’importance à l’étude d’unélément relativement secondaire de la construc-

tion européenne, est apparemment très éloi-gnée des problèmes politiques déterminants:les forces entrant en jeu dans la formationprofessionnelle étaient les mêmes que cellesqui ont déterminé le cours de l’intégrationà un niveau plus élevé. En d’autres termes,dans le microcosme des essais de construc-tion d’une politique commune de formationprofessionnelle, on trouve des traces des ef-fets de la dialectique omniprésente entrela dynamique intergouvernementale et lespressions supranationales. Par exemple, dansles premières années de la décennie, on peutvoir une Commission s’efforçant de s’établircomme partenaire sur un pied d’égalité avecles nations individuelles, entre autres en af-firmant sa compétence en matière de for-mation professionnelle et dans les domainesfamiliers du financement des politiques com-munautaires, de la politique commerciale,etc. Cette tentative a provoqué des réactionsde certains gouvernements, qui ont à leurtour modéré les ambitions de la Commis-sion avec, pour résultats, la politique de la«chaise vide» et, au niveau plus «modeste»qui est l’objet de notre propos, un véritableboycott de l’application des principes gé-néraux qui auraient dû guider la politiquecommune de formation professionnelle etles autres initiatives de la Commission en lamatière. À la fin de la décennie, avec la nou-velle phase amorcée à la conférence de laHaye, la poursuite de la politique socialesous la pression de la crise qui mit fin auxTrente glorieuses et le programme d’actionde 1974, les discussions sur une politiquecommune de formation professionnelle re-prirent, mais sur une autre base. En outre,parallèlement à la dialectique communau-taire entre institutions et gouvernements, unconflit entre les intérêts nationaux se fit jouret s’imbriqua dans cette dialectique. Au coursde ces événements, le parti le plus faible,l’Italie, céda devant l’hostilité de la Franceet de l’Allemagne, qui rechignaient mani-festement à supporter le poids financierdu rétablissement d’un équilibre social pourl’Italie, ou ne voulaient pas renoncer à leursouveraineté dans un domaine qui était detoute évidence considéré comme important,en dépit de la technicité de beaucoup dequestions, à cause des répercussions que ce-la aurait sur la vie et les perspectives de leurscitoyens et électeurs.

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(58) Idem.

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Bibliographie

Mots clésEuropean construction, European Treaty, Community policy, European Commission, training policy, vocational training

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Introduction

Il semble utile d’analyser le rôle joué par lessyndicats pour promouvoir une politique so-ciale européenne dans les années 1970, à lafois pour évaluer la capacité des acteurs so-ciaux d’exercer des pressions sur les gou-vernements, de sorte que ces derniers s’in-téressent aux dynamiques sociales du pro-cessus d’intégration, et pour réfléchir sur lelong cheminement et les nombreuses vicis-situdes de la politique sociale de l’UE et lesnombreux obstacles rencontrés par les syn-dicats pour amorcer un dialogue avec lesinstitutions communautaires. Dans ce contex-te, la création du Cedefop en 1975 peut êtreconsidérée comme une des retombées lesplus importantes de la revendication par lesorganisations syndicales d’une plus grandevisibilité dans la CE et de la mise en œuvred’une politique européenne de l’emploi etde la formation professionnelle.

Cette étude, réalisée auprès de l’Institut in-ternational d’histoire sociale d’Amsterdam(International Institute of Social History) (1)et dans les archives du Conseil des ministreset de la Commission à Bruxelles, se concentreprincipalement sur les années 1970. C’est eneffet à partir du Sommet de La Haye de 1969et en particulier de la rédaction du Plan Wer-ner pour la réalisation d’une union écono-mique et monétaire, que les institutions com-munautaires et les gouvernements euro-péens, face à un chômage croissant et à unegrave crise économique, ont commencé àtracer les contours d’une politique sociales’intéressant aux problèmes de l’emploi, non

plus comme un simple élément accessoiredu processus d’intégration économique, maiscomme un objectif autonome, en prenantde nombreuses initiatives dans le domainede l’emploi et de la formation profession-nelle (2).

Les origines de la politique sociale eu-ropéenne

Mis à part le cas de la Communauté euro-péenne du charbon et de l’acier (CECA),dont le traité fondateur contenait un nombreimportant d’articles consacrés au bien-êtredes travailleurs et à leur réemploi en cas derestructuration des entreprises et garantis-sait aux organisations syndicales une re-présentation adéquate au sein de la HauteAutorité et du Comité consultatif (Mechi,1994), les traités de Rome confiaient à la po-litique sociale un rôle marginal, la consi-dérant plutôt comme un reflet du processusd’intégration économique que comme unobjectif à poursuivre en tant que tel (Ciam-pani, 1995a et 2001; Degimbe, 1999). Leconcept même de politique sociale semblaitcomplexe et hétérogène, susceptible de semodifier selon les régions et les acteurs consi-dérés: si pour les syndicats et, dans une cer-taine mesure, pour les institutions euro-péennes, cette notion recouvrait divers as-pects des politiques de l’État-Providence,des mécanismes de protection de la main-d’œuvre au système de retraite, elle servaitaux gouvernements à poursuivre des inté-rêts nationaux spécifiques. Ainsi, le gou-vernement italien, qui avait développé unelongue tradition de diplomatie sociale, consi-

Les syndicats et la relance de la politiquesociale européenne

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MariaEleonoraGuasconiEnseignant en histoiredes relationsinternationales à lafaculté des sciencespolitiques de

l’université d’Urbino (Italie)

L’approche des syndicats eu-ropéens en matière de for-mation professionnelle consti-tue un exemple intéressantqui illustre un problème plusvaste concernant à la fois lerôle des acteurs non gouver-nementaux dans l’élabora-tion de la dimension socialedu processus d’intégration etla nécessité de développer undialogue social dans la Com-munauté. Dans ce contexte,la création du Cedefop en 1975peut être considérée commel’un des résultats d’une longuesérie de pressions et demandesémanant des syndicats euro-péens pour être mieux re-présentés dans la CE et dé-velopper une série d’initia-tives visant à créer une poli-tique sociale commune pourl’Europe dans le domaine del’emploi et de la formationprofessionnelle.

(1) L’auteur remercie Lorenzo Mechiet Francesco Petrini de l’universitéde Padoue pour les documents trou-vés à l’IISH Amsterdam.

(2) Pour une analyse du débat his-toriographique sur la politique so-ciale européenne, voir Geyer, 2000;Hantrais, 2000; Kleinman, 2001; Ko-walsky, 2000; Ivor et Springer, 2001;Vandamme (dir.), 1984.

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dérait le développement d’une politique eu-ropéenne de l’emploi comme l’instrumentnécessaire pour résoudre le problème duchômage, particulièrement grave dans leMezzogiorno.

Les rares paragraphes du traité sur la librecirculation des travailleurs dans la commu-nauté, l’institution d’un Fonds social euro-péen et des mesures spécifiques pour ga-rantir l’égalité des salaires entre les hommeset les femmes, constituaient une concessiondes gouvernements européens aux fortespressions exercées par les représentants ita-liens lors des négociations de Val Duches-se. Cependant, les nations européennes gar-daient le contrôle et la gestion sur le plannational des aspects sociaux du processusd’intégration économique, privilégiant la si-gnature d’accords bilatéraux plutôt que ledéveloppement d’une politique pour l’em-ploi dans le cadre communautaire. D’autrepart, le traité ne prévoyait aucun mécanis-me d’intervention politique: l’article 118 secontentait de confier à la Commission le rô-le d’«encourager une étroite collaboration»entre les États membres, grâce à des ana-lyses, consultations et avis sur les problèmesde l’emploi, du droit du travail, des condi-tions de travail, de la formation profes-sionnelle et des systèmes de sécurité so-ciale (Dølvik, 1999, p. 99), en laissant à l’ins-tance européenne la liberté d’initiative et augouvernement le plein contrôle des poli-tiques sociales.

Si au cours des années 1960 les questionssociales n’ont pas été complètement ou-bliées, notamment grâce à la Commission etau Comité économique et social (CES), quiinsistaient beaucoup pour que soit engagéeune politique sociale communautaire, la com-posante sociale du processus d’intégrationétait écrasée par les intérêts dominants dela France et de l’Allemagne visant à régle-menter la PAC et le libre échange des biensindustriels, selon le principe de la «syn-chronisation» qui, de fait, institutionnalisaitun «donnant-donnant» permanent. Il suffitde se souvenir que les règlements relatifsà la libre circulation des travailleurs n’ontété mis en œuvre qu’en 1968, grâce aux ef-forts du Commissaire italien Lionello LeviSandri, auteur du règlement 1612/68 sur lalibre circulation des travailleurs, et que leFonds social européen, actif depuis 1960,n’avait disposé au cours de ses dix premièresannées d’activité que d’un financement trèsmodeste, quelque 420 millions d’écus des-

tinés pour l’essentiel à l’Italie. Les syndicatseuropéens critiquaient vivement l’activité duFonds, comme le montre un mémorandumrédigé en octobre 1969, à la veille de la pre-mière réforme du Fonds, qui mettait l’accentsur le caractère limité des interventions: «L’au-tomatisme de ses interventions, la rigiditéde sa structure, la complexité de son mé-canisme, les retards provoqués par les cri-tères de remboursement a posteriori ont,entre autres, conduit à l’émiettement des in-terventions du Fonds, sans qu’il soit possiblede coordonner celles-ci dans une perspec-tive communautaire» (IISH, 1969).

Le faible intérêt des bâtisseurs de la Com-munauté pour la composante sociale de laconstruction européenne se reflétait tant parl’exclusion des syndicats des négociationspour la signature du traité de Rome, malgréleurs demandes permanentes et fermes departicipation (IISH et al., 1955; Barnouin,1986; Ciampani, 1995b; Dølvik, 1999; Pas-ture, 2001), que par le rôle effectif de l’ins-tance chargée de devenir le porte-parole despartenaires sociaux à Bruxelles: le Comitééconomique et social (CES), un organe consul-tatif qui n’avait obtenu le droit d’initiativequ’en 1972 (Varsori, 2000). De leur côté, lessyndicats européens ne pouvaient se conten-ter du rôle étroit octroyé par les traités deRome aux forces sociales, dans les limitesd’une consultation qui pouvait difficilementapparaître comme un moyen de participeractivement à la construction européenne.

Les organisations syndicales ont demandé àde nombreuses reprises à être représentéesà l’intérieur de la Commission ou du Con-seil d’administration de la Banque euro-péenne d’investissement, sans cependantobtenir de réponse. En 1964 le Vice-Prési-dent de la Commission, Sicco Mansholt, àl’occasion d’une rencontre avec le comitéexécutif du Secrétariat syndical européen (3),rappelait sa ferme opposition à l’institu-tionnalisation de la coopération avec le mou-vement syndical et sa préférence pour lescontacts informels, qu’il considérait commeplus fructueux (4).

Jusqu’en 1967, le dialogue social commu-nautaire s’est développé exclusivement ausein des Comités consultatifs chargés d’ai-der la Commission à traiter les différentesproblématiques concernant le monde du tra-vail, dont un comité consultatif sur la for-mation professionnelle créé en 1963 etquelques comités paritaires composés de re-

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présentants des syndicats et des employeurs(Degimbe, 1999, p. 114).

Les raisons de ce refus étaient diverses: àcôté de la volonté de la Commission de gar-der le contrôle sur le développement enco-re embryonnaire de la politique sociale, seposait le problème de la représentativité réel-le du Secrétariat syndical européen. Les frac-tures existant entre les syndicats, reflets desdivisions et tensions provoquées par la guer-re froide (il suffit de penser aux scissions dela CGT en France et la CGIL en Italie), maisaussi des approches et des politiques pro-fondément diverses des différentes fédéra-tions, avaient affaibli l’impact et l’image desforces sociales en Europe. Leurs programmeset politiques n’étaient pas les mêmes, com-me le montre la crainte avec laquelle aucours des années 1960 les syndicats du nordde l’Europe abordaient les thèmes liés à l’har-monisation sociale, en invoquant une dé-gradation des conditions de travail et unabaissement aux niveaux italiens.

Par ailleurs, ni les syndicats chrétiens, ni lesorganisations communistes, la Confedera-zione Generale Italiana del Lavoro (CGIL)et la Confédération générale du travail (CGT),n’appartenaient à l’International Confedera-tion of Free Trade Unions (ICFTU), l’orga-nisation internationale créée en 1949 à lasuite de la scission des mouvements syn-dicaux anticommunistes de la World Fede-ration of Trade Unions, ou Fédération syn-dicale mondiale (WFTU ou FSM) (5). En par-ticulier, les organisations communistes avaientdéveloppé une attitude très critique sur laconstruction européenne, considérée, selonun réflexe issu de la guerre froide, commeun outil de l’impérialisme américain; ce n’estqu’au cours des années 1960 qu’ils ontlentement modifié leur approche, après lacréation d’un Comité permanent à Bruxellesen 1966 (6). Ajoutons que l’organisation laplus puissante d’Europe, le TUC britannique,s’était montrée, conformément à la positionadoptée par le gouvernement de Londres,très sceptique face à la construction euro-péenne depuis la création de la CECA (De-laney, 2002).

À cette multitude de voix syndicales s’ajou-tait le désintérêt relatif des employeurs pourune coopération plus étroite avec les syn-dicats, démontré par le fait que jusqu’en1967, l’UNICE refusait de rencontrer offi-ciellement les représentants des travailleurs,préférant des canaux plus directs et infor-

mels pour exercer son activité de lobbying(Segreto, 2000).

Jusqu’aux années 1970, les maigres résultatsobtenus sur le plan européen et les diffi-cultés rencontrées pour définir une positioncommune face à la politique communau-taire ont poussé les syndicats européens àutiliser des canaux plus traditionnels, na-tionaux notamment, pour défendre leurs re-vendications et leur place. Tout en souhai-tant être représentés à Bruxelles, les syndi-cats européens ont joué un rôle plus sym-bolique et de représentation qu’un rôle réel,accordant la priorité aux initiatives natio-nales et considérant l’harmonisation desconditions de vie et de travail comme unobstacle au progrès social (Pasture, 2001,p. 97). En dépit de ces observations, il fautconsidérer que cette première expériencede syndicalisme en Europe n’a pas été né-gative, à la fois parce qu’elle a permis auxsyndicalistes de se confronter à des expé-riences diverses de leur expérience natio-nale, dans un premier processus de forma-tion «européen», et parce qu’elle a constituéune occasion d’entrer en contact avec despersonnalités politiques influentes telles queJean Monnet, qui avait voulu faire entrerdans son propre comité d’action de nom-breux représentants du monde du travail.

La relance de la politique sociale à lafin des années 1960

Le Sommet de La Haye de 1969, et notam-ment le plan Werner de 1970 pour la réali-sation de l’Union économique et monétai-re, représente un tournant pour les inté-rêts des partenaires sociaux et le progrès dela politique sociale en Europe (7).

Au cours de la conférence qui a marqué lepassage de l’Europe à «Six» à l’Europe à «Neuf»avec l’entrée dans la CEE de la Grande-Bre-tagne, de l’Irlande et du Danemark, et quiconstituait la première tentative de pro-mouvoir une Union économique et moné-taire, le chancelier allemand Willy Brandtmettait l’accent, de manière encore très glo-bale, sur la nécessité de faire participer plusactivement les groupes sociaux à la construc-tion européenne. Dans plusieurs de sespoints, le plan Werner soulignait la néces-sité d’engager le dialogue avec les parte-naires sociaux, condition nécessaire pourune réalisation efficace de l’Union moné-taire (8).

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(3) Le Secrétariat syndical européenavait été créé en 1958 par la CISL.Il répondait à la nécessité pour lessyndicats européens anticommu-nistes de coordonner leurs initiativesface aux institutions communautaireset de faire progresser l’initiative syn-dicale. Il s’est ensuite successive-ment appelé Confédération euro-péenne des syndicats libres (CESL),avec la participation des syndicatsscandinaves et anglais et, en 1974,après l’adhésion du syndicat chré-tien et de la CGIL italienne, Confé-dération européenne des syndicats(CES).

(4) La rencontre entre Sicco Mansholtet les syndicalistes est citée dansGuasconi, 1998/1999, p. 249.

(5) Pour une analyse du débat his-toriographique sur la scission de l’or-ganisation internationale WFTU, voirAntonioli et al., 1999; Carew, 1987;Carew et al. (dir.), 2000; Macshane,1992.

(6) Sur la position de la CGIL quantà la construction européenne, voirGalante, 1988; Maggiorani, 1998.

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La première réforme du Fonds social euro-péen est intervenue en 1971 et, l’année sui-vante, les chefs d’État et de gouvernement,réunis au Sommet de Paris, affirmaient so-lennellement qu’«une action vigoureuse dansle domaine social revêt pour eux la mêmeimportance que la réalisation de l’Union éco-nomique et monétaire» (Archives nationales,1972) et chargeaient la Commission de ré-diger un programme d’action sociale à mettreen œuvre en 1974, concentré sur trois grandsobjectifs: plein emploi et meilleur emploi,amélioration des conditions de vie et de tra-vail et participation accrue des travailleursaux décisions économiques et sociales dela Communauté.

Quelles étaient les raisons de ce regain d’in-térêt des institutions et des gouvernementseuropéens pour la promotion du dialogueavec les forces sociales et le développementd’une politique sociale européenne ?

(a) les mouvements de protestation de mai1968, qui avaient mis en évidence dans dif-férents pays d’Europe l’émergence de nou-velles exigences et de nouveaux acteurs so-ciaux;

(b) la crise économique progressive, no-tamment suite au choc pétrolier suivant laguerre du Yom Kippour de 1973, avait tou-ché toutes les nations européennes, mettantfin à la période de forte croissance écono-mique de l’après-guerre et des années 1960.Cette crise faisait passer à l’avant-plan lesproblèmes liés au chômage, incitant forte-ment les gouvernements européens à re-nouveler le dialogue avec les partenaires so-ciaux, et en premier lieu avec les syndicats,dont le rôle apparaissait (il suffit de penserà l’Italie de l’automne chaud de 1969) com-me sensiblement renforcé;

(c) l’élargissement proche de la Commu-nauté aux pays qui avaient déposé unedemande d’adhésion suscitait le problèmede l’harmonisation des traditions et poli-tiques sociales profondément diverses entreelles dans des pays qui, comme la Gran-de-Bretagne, vivaient un déclin dramatiquede leur industrie, et faisait ressentir la né-cessité de construire un espace social euro-péen à côté de la dimension strictement éco-nomique de l’intégration;

(d) le rôle joué par les partenaires européenscomme l’Italie dans la promotion d’une po-litique sociale communautaire, non plus ba-

sée sur la libre circulation des travailleurs,en tant qu’instrument pour résoudre le pro-blème des régions déprimées telles que leMezzogiorno;

(e) enfin, le renforcement sur le plan in-ternational des syndicats, que traduit en 1973la création de la Confédération européennedes syndicats (CES), dont faisaient partie lesorganisations scandinaves, le syndicat bri-tannique, les organisations chrétiennes et,après une longue lutte interne et grâce ausoutien de la CISL et de la UIL, la CGIL. Lanaissance de la CES constituait un véri-table tournant pour la représentation dessyndicats face aux institutions communau-taires, puisqu’elle mettait fin aux divisionsqui avaient émaillé l’histoire du mouvementsyndical après la Seconde Guerre mondia-le, et lui permettait de devenir un interlo-cuteur social des institutions européennes.Si au début la CES était un simple organis-me de liaison et un instrument de lobbyingà Bruxelles entre les mains des syndicats, el-le comptait déjà en 1974 dix-sept syndicatset représentait près de 36 millions de tra-vailleurs. Il était donc évident que «comptetenu du passé de division et de rivalité ausein du mouvement ouvrier, l’établissementd’une association régionale de syndicats,comprenant des syndicats de tous les paysd’Europe de l’Ouest, la plupart des orienta-tions idéologiques et plusieurs internatio-nales syndicales mondiales, représentait unprogrès considérable» (Dølvik, 1999, p. 174).

La première Conférence tripartite de1970 sur l’emploi et le problème de laformation professionnelle

La grave perspective d’une crise de l’éco-nomie et du marché de l’emploi en Euro-pe a suscité un regain d’intérêt de la partdes institutions européennes pour les ques-tions sociales et l’emploi.

En avril 1970, s’est tenue à Luxembourg lapremière Conférence tripartite sur l’emploi,avec la participation des représentants dessyndicats et des employeurs, de la Com-mission et des ministres du travail des Six.Dans le mémorandum soumis par les syn-dicats européens au Conseil des ministresle 25 mars 1970, les organisations souli-gnaient la nécessité de développer une po-litique européenne de l’emploi, dont l’ob-jectif devait être de «promouvoir la créationd’emplois dans les régions où existent desexcédents de main-d’œuvre et encourager

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(7) Sur le Sommet de La Haye, voirBitsch, 2001; Guasconi, 2003.

(8) Sur le plan Werner, voir Giraultet Poidevin, 2002; Frank, 1995; Bos-suat, 1995; Ludlow, 1982; Verdun,2001; Werner, 1991; Wilkens, 1999.

(9) Dans un premier temps, les syn-dicats avaient demandé un comitépermanent de l’emploi dans leur mé-morandum sur la réforme du Fondssocial européen (IISH, 1969).

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les déplacements de main-d’œuvre de cesrégions vers les secteurs les plus productifset en expansion afin de faciliter ainsi l’ajus-tement entre l’offre et la demande d’emploi»et «l’amélioration de la formation et de l’orien-tation de la formation professionnelle desjeunes» (Conseil des ministres, 30567-b).Leur rapport demandait expressément lacréation d’un Comité permanent de l’em-ploi, dans le contexte de la réforme du Fondssocial (9), composé de représentants desgouvernements, de la Commission et despartenaires sociaux. Ce Comité, disposantdu droit d’initiative, devait organiser de ma-nière plus efficace le marché du travail enmettant en place des services adéquats deformation professionnelle et en promouvantune meilleure utilisation des instruments ad-ministratifs existants, tels que le Fonds so-cial et la Banque européenne d’investisse-ment, grâce également à une meilleure co-ordination des comités travaillant dans ledomaine de la formation professionnelle etde la libre circulation des travailleurs (Con-seil des ministres, 30567-a).

Au cours de la Conférence, le débat s’estconcentré sur la nécessité de changer l’ap-proche et la politique de la Communauté fa-ce au problème de l’emploi. Une politiquebasée uniquement sur la libre circulation destravailleurs avait donné des résultats insuf-fisants et créé des déséquilibres régionaux,comme le montre le cas du Mezzogiorno enItalie (10). La Conférence abordait égalementle problème de la formation professionnel-le, définie comme un «processus permanent»(Conseil des ministres, 30566) et instrumentindispensable pour garantir la croissanceéconomique et améliorer les perspectivesdes travailleurs. Le syndicat français Forceouvrière en particulier présentait un plan ac-cepté comme base de débat (IISH, 1970), etle Conseil des ministres dans une note ré-digée après la Conférence soulignait l’im-portance croissante de la formation pro-fessionnelle considérée comme un instru-ment utile pour mettre en œuvre une poli-tique efficace pour l’emploi et comme la cléde nombreux problèmes économiques etsociaux (Conseil des ministres, 30541).

Tandis que le Conseil chargeait la Commis-sion d’étudier le problème de la formationprofessionnelle, le Comité permanent surl’emploi fut créé en décembre 1970, pourdevenir un des premiers espaces du dialoguesocial européen et l’organisme à travers le-quel les partenaires sociaux allaient cher-

cher à influencer le processus de décisioncommunautaire. Dès la première réunion,tenue le 18 mars 1971 à Bruxelles, le syn-dicat allemand DGB soulignait l’importanced’inscrire la formation professionnelle par-mi les priorités du Comité et proposait lacréation d’un institut européen chargé de lacoordination, de la recherche et de la réali-sation d’études techniques et pédagogiquesdans les secteurs de la formation profes-sionnelle et de l’emploi (IISH, 1971a). LaConfédération européenne des syndicatslibres (CESL), ancêtre de la CES, reprit cet-te proposition et la présenta officiellementau cours de la seconde réunion du Comitéà Bruxelles le 27 mai. Comme l’indique lecompte rendu de cette rencontre, rédigé parl’organisation syndicale: «Notre délégation asouligné la nécessité de dépasser le stadedu choix de doctrines et de principes pourpasser à la réalisation d’actions concrètes.La création d’un Institut européen pour l’étu-de scientifique de la formation profession-nelle dont l’objectif serait l’intensification del’information réciproque sur les expériencesfaites et les méthodes et programmes utili-sés, a été demandée» (IISH, 1971b).

Les revendications des syndicats ne furentpas acceptées dans l’immédiat, en raison no-tamment d’un désintérêt contradictoire desorganisations par rapport au Comité, donttémoigne le fait qu’aucun dirigeant de laCESL, ni son secrétaire général ni son pré-sident, n’avait assisté aux deux réunions.Cette attitude donnait une image très né-gative de la capacité des forces syndicaleseuropéennes de participer de manière ap-propriée à la promotion de la politique so-ciale communautaire, ce qui laissait penserque les organisations, bien que favorablesà l’Europe, privilégiaient les initiatives na-tionales par rapport aux initiatives com-munautaires, avec des conséquences for-cément négatives sur la crédibilité du mou-vement syndical aux yeux du Conseil desministres et des gouvernements. Ce com-portement était lié tant au refus du Con-seil des ministres de reconnaître un pou-voir contraignant aux décisions prisespar le Comité (Degimbe, 1999) qu’à l’im-portance accrue accordée par les syndicatseuropéens aux conférences tripartites aux-quelles assistaient également les ministresde l’économie et des finances (Barnouin,1986, p. 89).

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(10) Sur les débats menés lors de laConférence sur l’emploi, voir Guas-coni, 2003.

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Les syndicats européens et la créationdu Cedefop

Le Sommet de Paris d’octobre 1972 repré-sentait une autre impulsion pour la mise enœuvre d’une politique sociale européenne.Les chefs d’État et de gouvernement y sou-lignaient la nécessité de promouvoir «un ac-tion vigoureuse dans le domaine social» etinvitaient la Commission, avec l’aide desautres institutions communautaires et despartenaires sociaux, à définir un program-me d’action sociale, dont l’objectif étaitnotamment de «mettre en œuvre une poli-tique commune de formation profession-nelle en vue d’atteindre progressivement sesobjectifs et en particulier le rapproche-ment des niveaux de formation profes-sionnelle, en créant notamment un centreeuropéen de formation professionnelle» (IISH,1974a), considéré comme étant «de la plusgrande importance». Ce programme dé-montrait clairement que la politique socia-le n’était plus simplement conçue commeun reflet du processus d’intégration éco-nomique, mais qu’elle devenait un objectifen soi, non sans risques et ambiguïtés, dufait qu’il était extrêmement difficile de dis-tinguer précisément le secteur social du sec-teur économique.

L’invitation des chefs d’État et de gouver-nement répondait à une demande explicitedes syndicats européens, qui avaient rédigéen juin 1972 un mémorandum pour prépa-rer le sommet dans lequel ils demandaientexpressément que «les gouvernements et lesinstitutions de la Communauté appuientconcrètement la création d’un institut euro-péen du travail destiné à former et à pré-parer les militants syndicaux à leur tâche dereprésentants des travailleurs face à la di-mension européenne» et affirmaient, à pro-pos de la formation professionnelle: «la for-mation permanente constitue, en mêmetemps qu’une idée généreuse, une exigen-ce fondamentale de notre temps» (IISH, 1972).

Malgré cette relance, le Conseil et la Com-mission s’étaient montrés d’une grande pru-dence sur de nombreux aspects de ce pro-gramme, et notamment concernant la créa-tion d’un Centre européen de formation pro-fessionnelle. Les syndicats communistes cri-tiquaient vivement cette attitude, comme lemontre une lettre envoyée par le Comité dela CGIL-CGT à Bruxelles au président dela CES, Victor Feather, en juin 1973. «Du cô-té gouvernemental - écrivaient les syndicats

- des réserves ont été exprimées sur les pointsles plus significatifs de projet de program-me d’action soumis au débat, portant sur lesmesures concernant l’emploi, les conditionsde travail, la formation professionnelle, l’émi-gration... De là, il suffisait de créer l’incidentpour éviter le débat, c’est chose faite avecle refus de la part du Conseil des ministresde tenir compte de certains avis émis par lesorganisations syndicales le plus représenta-tives» (IISH, 1973b).

De son côté, la CES réagissait à cet immo-bilisme en avançant de nombreuses propo-sitions, dont l’organisation d’une Confé-rence sociale en mai 1973, nouveau lieu deconfrontation avec la Commission et les gou-vernements, dont l’objectif principal était demettre en pratique une concertation effec-tive avec les partenaires sociaux, en fixantensemble les priorités du programme duConseil des ministres (IISH, 1973a). C’étaitl’occasion de proposer à nouveau la créa-tion d’un institut européen pour la forma-tion professionnelle, dont le rôle devait êtrede servir de canal d’information, de pro-mouvoir l’harmonisation de la formation eu-ropéenne et de mettre en œuvre des pro-grammes pilotes visant à réduire les désé-quilibres entre l’offre et la demande detravail.

En décidant de créer le Cedefop, les gou-vernements européens ne se sont pas attar-dés sur des questions essentielles pourson fonctionnement, telles que la composi-tion de ses organes de direction, son bud-get, ses fonctions et la participation des par-tenaires sociaux. Lors d’un débat très vif quis’est tenu en juillet 1974 au cours d’une ré-union du groupe social du Conseil des mi-nistres, la délégation britannique exprimaitde fortes réserves sur la création du Cede-fop et la délégation allemande critiquait avecvirulence la composition du Conseil d’ad-ministration, en soulignant que sur la basedes propositions de la Commission, les par-tenaires sociaux, disposant de deux tiers desvoix, pouvaient imposer leurs propres dé-cisions aux autres membres (IISH, 1974a).Malgré diverses tentatives de la Commissionpour défendre ses propositions, la déléga-tion allemande exerça des pressions sur lesautres partenaires pour modifier la com-position du Conseil d’administration, afind’assurer la majorité des voix aux gouver-nements. Le Conseil d’administration étaitcomposé de neuf représentants des gou-vernements, trois de la Commission, six des

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syndicats et six des employeurs. Les mo-dalités de désignation des représentants despartenaires sociaux firent également l’objetde litiges, les gouvernements français, ir-landais et néerlandais s’opposant à desnominations par les syndicats et leur pré-férant des candidatures nationales (IISH,1974b). Pour leur part, les syndicats accor-daient une grande importance au fait de pou-voir contrôler la nomination du directeur,dont dépendait selon eux l’efficacité futuredu centre (IISH, 1974b).

Le 10 février 1975, le Conseil des ministresannonçait la création d’un Centre européenpour le développement de la formation pro-fessionnelle (Cedefop), dont le siège étaitfixé à Berlin. Trois mois plus tard, le 26 mai,fut créée à Dublin la Fondation pour l’amé-lioration des conditions de vie et de travail.

Les premières années d’existence du Ce-defop ne furent guère faciles. La plus gran-de partie de l’année 1976 fut consacrée aurecrutement du personnel et à la rédactiondu règlement intérieur, et ce n’est qu’au moisde décembre que le Cedefop organisait sonpremier séminaire à Zandvoort, sur le pro-blème du chômage des jeunes. Les membresdu personnel se plaignaient de leurs condi-tions de recrutement, qu’ils considéraientcomme moins avantageuses que celles dela Communauté, et le premier Directeur, KarlJörgensen, décida de démissionner. Malgréces difficultés de démarrage, les syndicatsse montrèrent particulièrement coopératifspour promouvoir les activités du Centre. Àpreuve, la nomination du nouveau Direc-teur, Roger Faist, ex-secrétaire général del’Union confédérale des ingénieurs et cadres(CFDT), proposé par la CES après un voteunanime. C’était là le résultat d’un accordinformel conclu entre les syndicats et les as-sociations des employeurs, l’UNICE, qui de-vait en échange obtenir le contrôle de la no-mination du Directeur de la Fondation deDublin, en laissant aux organisations syndi-cales la possibilité d’exercer leur influencesur les activités du Cedefop (IISH, 1975).

Conclusions

Maria Weber, syndicaliste allemande du DGBet membre du Comité économique et social(CES), promotrice active du Cedefop et Pré-sidente de son Conseil d’administration en1979, soulignait au cours d’une réunion desreprésentants syndicaux du Cedefop et dela Fondation de Dublin, à Düsseldorf en juin

1978, l’engagement des syndicats européenspour la promotion d’un dialogue social com-munautaire, notamment dans la formationprofessionnelle. Je voudrais dire - affir-mait Maria Weber -, sans emphase aucune,que ce sont les représentants des travailleursqui ont obtenu la création de ces trois or-ganes pour une lutte de longue durée au ni-veau des comités consultatifs de la Com-mission, du Comité économique et social etpar les négociations de la Confédération eu-ropéenne des syndicats, trois organes quisont d’une grande importance pour les tra-vailleurs d’Europe [...] Ces institutions étaientnécessaires parce qu’il est apparu de plusen plus que l’administration des Commu-nautés européennes n’était pas en mesurede remplir les tâches nécessaires avec l’ef-ficacité et le succès voulus dans les diffé-rents domaines sociaux, en raison de sa struc-ture et de son organisation, certes, mais aus-si en raison du fait que ses effectifs en per-sonnel au niveau des affaires sociales ontété sans cesse réduits, malgré les fusionsEURATOM-CECA et CEE et malgré l’élargis-sement de la CEE à 9 États membres» (IISH,1975).

Même si les résultats obtenus dans le do-maine social au cours des années 1970 étaientencore embryonnaires, ces premiers pas nedoivent pas être sous-estimés pour toute unesérie de raisons: tout d’abord, la politiquesociale entrait de plain-pied dans l’agendaeuropéen, même si au cours de ces années-là elle était plutôt synonyme de probléma-tique de l’emploi et, en deuxième lieu, cerésultat constituait le point de départ du pro-gramme plus vaste promu par Jacques De-lors au cours des années 1980, qui allait fai-re de la politique sociale l’un des principauxobjectifs de la Communauté. Dans ce contex-te, la création du Cedefop et la thématiquede la formation professionnelle en Europeconstituaient pour les syndicats un «chevalde bataille» utile pour promouvoir le dia-logue avec les institutions communautaireset approfondir le débat sur divers aspectsde la construction européenne, tels que l’em-ploi, le droit au travail, la sécurité sociale,les conditions de travail, la libre circula-tion des travailleurs, qui constituaient jus-qu’alors des domaines réservés des gou-vernements nationaux.

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Introduction

En 2001, sous l’égide et avec le soutien duCedefop ainsi qu’en collaboration avec lesArchives historiques des Communautés eu-ropéennes (IUE), un groupe de chercheursde l’université de Florence dirigés par l’au-teur lançait un projet de recherche sur lespolitiques de formation professionnelle dansle contexte de la construction européenne.Dans ce cadre était menée une enquête mi-nutieuse auprès d’une série de bibliothèques,dont celle du «Centre européen pour ledéveloppement de la formation profession-nelle», mais aussi auprès de diverses archiveseuropéennes (1). Sur la base de ces rechercheset du matériel étudié, l’attention s’est concen-trée sur un certain nombre de thèmes etd’éléments particulièrement importants:

a) le rôle joué par la formation profes-sionnelle au cours des premières phases duprocessus d’intégration européenne (depuisle Plan Schuman jusqu’au début des années1960),

b) les développements les plus significatifsdes politiques communautaires en matièrede formation professionnelle entre la fin desannées 1960 et le début des années 1970,

c) le rôle joué par le Comité économiqueet social (CES), ainsi que par la Commissionet le Conseil dans la création du «Centre eu-ropéen pour le développement de la for-mation professionnelle» (CEDEFOP),

d) l’influence exercée par certains parte-naires sociaux dans le développement despolitiques communautaires en matière deformation professionnelle,

e) les activités menées par le Cedefop de-puis sa création jusqu’aux années 1990.

Ces thèmes ont fait l’objet d’une série d’études.Le présent essai tient compte des résultatsgénéraux de la recherche, tout en se concen-trant sur l’histoire du Cedefop, depuis sacréation jusqu’aux années 1990 (2).

La formation professionnelle au coursdes premières phases de laconstruction européenne jusqu’à lanaissance de la CECA

Lorsque le processus de construction eu-ropéenne débuta au cours de la secondemoitié des années 1940, une bonne partiedes nations du vieux continent devaient fai-re face à de graves problèmes économiqueset sociaux provoqués ou aiguisés par le conflitmondial récent: chômage élevé, manque delogements, problèmes de santé publique,nécessité de réformes radicales dans les sys-tèmes éducatifs. Pour la plupart des leadersdes pays européens, résoudre ces problèmesétait une nécessité primordiale et certainsÉtats du continent s’engageaient à trouverune réponse cohérente et efficace dans lecadre national. À ce propos, que l’on pen-se simplement à l’engagement du nouveaugouvernement travailliste anglais arrivé au

Le rôle de la formationet de l’enseignementprofessionnels dans lapolitique sociale euro-péenne et le Cedefop

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Cet article, largement basésur des archives, examinela création du Cedefop et l’évo-lution de ses activités jusqu’àson transfert à Thessaloniqueau milieu des années 1990.Dans ce contexte, il abordeen premier lieu les prémissesd’une politique européenneen matière de formation pro-fessionnelle, à partir de laCECA et des premiers pas ef-fectués au cours des années1960 dans ce domaine par laCEE. Il se concentre ensuitesur le processus de décisionqui a conduit à la création duCedefop par la Communautéeuropéenne, les événementsqui ont marqué la vie duCentre, sa structure organi-sationnelle et ses objectifs,ainsi que ses relations avecles partenaires sociaux, lesorganisations nationales etles instances communautaires.Son histoire s’inscrit dans cel-le plus vaste de l’intégrationeuropéenne, et notammentdu développement de l’actioncommunautaire dans le do-maine de la formation pro-fessionnelle.

(1) Ces archives sont les suivantes:a) les Archives historiques des Com-munautés européennes auprès del’Institut universitaire européen deSan Domenico di Fiesole (Floren-ce);b) les archives du Cedefop (Thes-salonique);c) les archives de l’Institut interna-tional d’histoire sociale (Amsterdam);d) les archives de la Commission,du Conseil et du Comité économiqueet social européen (Bruxelles).

(2) Cette étude a été possible no-tamment grâce à la coopération d’unesérie d’institutions et de personnes,parmi lesquelles il faut remercier enpremier lieu le Cedefop et tous ceuxqui, en son sein, ont apporté une

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pouvoir en été 1945 pour créer un «État-Pro-vidence» s’occupant des besoins du citoyen«du berceau à la tombe» (3). Cependant, si laconstruction d’un État social se traduisaittout d’abord par des politiques nationales,cette exigence se manifesta également aucours des premiers pas de l’intégration eu-ropéenne. Dans certains points de leurs pro-grammes, les mouvements européens nésau cours de la seconde moitié des années1940 soulignaient l’importance de ce thèmeet proposaient des solutions pour les pro-blèmes sociaux dans les projets qui allaientconduire à la naissance du Pacte de Bruxelleset du Conseil de l’Europe (Hick, 2000). Tou-tefois, la question sociale était souvent consi-dérée comme relevant d’un processus plusvaste de reconstruction économique. Parailleurs, il semblait possible d’apporterune réponse adéquate aux problèmes so-ciaux dans une perspective nationale; la for-mation professionnelle ne faisait pas ex-ception et elle était considérée comme unélément d’une réforme plus vaste des sys-tèmes éducatifs et de l’organisation des mar-chés de l’emploi. Dans ce contexte, une ex-ception s’est fait jour: la position italienne.L’Italie de l’après-guerre, parmi les nom-breux et graves problèmes qu’elle avait à af-fronter, devait faire face à un problème éco-nomique et social d’ampleur: l’existence d’unfort surplus de main-d’œuvre, en particulierdans les régions arriérées et pauvres du Mez-zogiorno; l’émigration représentait - et re-présente encore - un des rares remèdes ef-ficaces à ce problème. Dans ce cadre, lesautorités italiennes concentraient leur at-tention sur l’Europe, car elles estimaient quele processus d’intégration pourrait permettred’ouvrir aux chômeurs italiens les marchésde l’emploi de l’Europe occidentale; or, dansce contexte, la question de la formation pro-fessionnelle ne pouvait être ignorée, mêmesi les initiatives gouvernementales manquaientsouvent d’efficacité et que ce problème n’étaitabordé que dans une perspective nationale(Romero, 1991). Un autre aspect qui ne sau-rait être négligé était l’influence exercée parle Plan Marshall non seulement dans ledomaine économique, mais aussi sur biend’autres plans: l’accent mis sur les nouvellesformes de relations industrielles, ainsi quesur la modernisation, soulignant d’un côtéle rôle des forces économiques et socialesdans la construction d’une société prospè-re et, de l’autre, l’occasion de mettre en pla-ce une formation professionnelle mise à jourpour permettre à la main-d’œuvre de s’adap-ter à un système économique moderne pre-

nant les États-Unis comme point de réfé-rence. À ce propos, un rôle important futjoué par le Productivity Programme (Carew,1987). Comme l’affirme David Ellwood: «...ce qui comptait avant tout était la consom-mation collective et l’amélioration du loge-ment, de l’éducation, de la sécurité dans letravail, du système de retraite et de santé,mis à mal par la guerre. La réalisation de cesobjectifs et l’équilibre économique devaientêtre assurés par les «contrats sociaux» appa-rus à peu près partout au cours de ces an-nées. Impliquant des négociations perma-nentes entre les gouvernements, les em-ployeurs et des syndicats de nature claire-ment «corporatiste», ces dispositions mar-quaient le long boom économique de l’Eu-rope occidentale et apparaissaient commeun élément indispensable dans la mise enplace des économies mixtes de l’après-guer-re (Ellwood, 1992). Même si le Plan Marshallvisait à encourager des formes de coopé-ration étroite entre les pays d’Europe, sesimplications les plus importantes sur les so-ciétés d’Europe occidentale s’exprimaientprincipalement dans un contexte national,et le résultat le plus important des initiativesmises en place dans le cadre du «Program-me de reconstruction européenne» de la se-conde moitié des années 1940, à savoirl’OCDE, finissait par représenter un instru-ment pour la réalisation d’une coopérationintergouvernementale faible, sans la moindretentative sérieuse de créer un modèle socialeuropéen (4).

Comme on le sait, le Plan Schuman lancéen mai 1950 constituait le véritable point dedépart du processus d’intégration européenne,ne serait-ce que parce qu’il privilégiait uneapproche fonctionnaliste et la supranatio-nalité (5). Il devait en effet conduire aussià la mise en place d’une première politiquesociale européenne accordant un certain rô-le à la formation professionnelle. Lorsqueles autorités françaises formulèrent le pro-jet d’une communauté intégrée dans le sec-teur du charbon et de l’acier, Jean Monnetet ses collaborateurs se rendirent comptequ’un tel organisme aurait un grand impactnon seulement sur la production et l’ave-nir de ces industries, mais aussi sur la vie demilliers de travailleurs du charbon et del’acier. Afin de réaliser le Plan Schuman, ilétait donc judicieux de s’appuyer sur un vas-te consensus entre les travailleurs dont la si-tuation allait être fortement influencée parles décisions de la future Haute Autorité.Monnet et Schuman ne pouvaient ignorer

aide souvent précieuse, en particu-lier le Directeur du Centre M. J. vanRens, le Directeur adjoint M. S. Sta-vrou, MM. Wollschläger, Willem, Pe-terson et Nilsson. Mentionnons éga-lement les Archives historiques desCommunautés européennes, et par-ticulièrement M. J.-M. Palayret, lepersonnel de l’Institut internationald’histoire sociale d’Amsterdam, ce-lui des archives de la Commission,du Conseil et du Comité écono-mique et social, et tout spécialementMme J. Collonval et M. J.-M. Libert.Les résultats de la recherche sontprésentés dans le volume The De-velopment of VET in the Context ofthe Construction of the EC/EU andthe Role of Cedefop publié parl’OPOCE de Luxembourg.

(3) Sur l’importante expérience tra-vailliste visant la création d’un «État-Providence», voir, par exemple, P.Addison, 1975; K. O. Morgan, 1984;A. Marvick, 1982. Plus généralement,voir F. A. Ritter, 2003; G. Silei, 2000.

(4) Sur le Plan Marshall et l’OCDE,voir, par exemple, A. S. Milward,1984; R. Girault et M. Levy-Leboyer(dir.), 1993.

(5) Sur le plan Schuman, voir en par-ticulier D. Spierenburg et R. Poi-devin, 1993; R. Poidevin (dir.), 1986et K. Schwabe (dir.), 1988.

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l’atmosphère lourde de la guerre froide etla forte opposition aux projets en faveur del’Europe des partis communistes et des syn-dicats contrôlés par les communistes. Tanten France qu’en Italie, le mouvement destravailleurs était traversé par de graves frac-tures et les syndicats d’inspiration catholiqueet socialiste tentaient de faire comprendreaux travailleurs que leurs intérêts n’étaientpas défendus seulement par les organisa-tions communistes (6), tandis qu’en Alle-magne de l’Ouest le mouvement syndical,bien que sur des positions anticommunistes,était influencé par le SPD qui s’était expri-mé en termes critiques sur le Plan Schuman(Ciampani, 1995; 2001). Ainsi, Monnet dé-cida-t-il de faire participer quelques leaderssyndicaux aux négociations de Paris et cer-tains articles du traité instituant la CECA, si-gné en 1951, prévoyaient la mise en œuvred’une action sociale par la Communauté,même si certaines clauses étaient plutôtvagues. Lorsque la Haute Autorité prit sesfonctions en été 1952, Monnet était conscientque la CECA allait devoir instaurer des rap-ports étroits et constructifs avec les parte-naires économiques et sociaux, y comprisles syndicats non communistes, et qu’il nedeviendrait possible d’obtenir un vaste consen-sus parmi les travailleurs du charbon et del’acier sur la nouvelle communauté qu’àcondition que cette dernière engage des po-litiques nouvelles et efficaces dans le do-maine social.

En premier lieu, la CECA commença par sou-ligner la question de la représentation. Dansce contexte, deux leaders syndicaux, le Bel-ge Paul Finet et l’Allemand Heinz Potthoffdevinrent membres de la Haute Autorité, quipromut par ailleurs la création d’un comitéconsultatif devant être composé de repré-sentants des organisations des employeurs,des syndicats et des associations des consom-mateurs, ainsi que des «commerçants» (Me-chi, 2000).

En ce qui concerne les politiques sociales,la Haute Autorité prit diverses initiatives: a)lancement de projets pour la constructionde milliers de nouveaux logements pour lestravailleurs des secteurs du charbon et del’acier, b) mise en route d’études en vued’améliorer la sécurité et les conditions detravail, c) enfin, et ce n’est pas le moins im-portant, adoption de dispositions en faveurdes travailleurs qui perdraient leur emploisuite aux décisions de la Haute Autorité.Dans ce contexte, la CECA mit en place des

financements pour replacer la main-d’œuvreen surnombre et la formation profession-nelle fut considérée comme l’un des instru-ments les plus efficaces à cette fin (Mechi,1994/1995; 2003).

Les traités de Rome et les premiers pasd’une politique communautaire dansle domaine de la formationprofessionnelle

Si les initiatives de la CECA sont générale-ment considérées comme un important pasen avant pour le développement d’unepolitique sociale européenne dans le cadrede laquelle la formation professionnelle jouaun rôle significatif, la création de la CEE etses premières actions semblent constituerune situation bien différente. Les leaders po-litiques, les diplomates et les experts quijouèrent un rôle de premier plan dans lesnégociations qui allaient conduire à la si-gnature des traités de Rome repoussèrentles propositions de Monnet et les pressionsexercées par les forces syndicales pourobtenir une participation des partenaireséconomiques et sociaux à l’élaboration dutexte des traités (Varsori, 1995; 1999). Ils ma-nifestèrent une attitude très prudente face àl’approche supranationale et à la mise enœuvre de politiques européennes, à l’ex-ception de la création d’une union doua-nière efficace pour les produits industrielset agricoles. Une fois de plus, l’Italie consti-tua un cas à part: du fait de son retard, desa faiblesse économique et de la persistan-ce de la question méridionale, les déléguésitaliens cherchèrent à intégrer dans le trai-té de la CEE diverses clauses prévoyant unecertaine forme de politique sociale euro-péenne. C’est ainsi que fut trouvé un accordinterne sur quelques principes tels que lanécessité de résoudre le problème des désé-quilibres régionaux, la future création d’unFonds social européen, ainsi que d’uneBanque européenne d’investissement. Parailleurs, les partenaires de l’Italie acceptè-rent le principe de la mobilité de la main-d’œuvre. Enfin, dans les phases finales dela négociation, et principalement à la suitedes pressions exercées par divers syndicats,les «Six» abordèrent également la questionde la représentation des forces économiqueset sociales. Malgré la nette opposition de ladélégation de l’Allemagne de l’Ouest, lestraités de Rome prévoyèrent la constitu-tion d’un Comité économique et social dé-pendant de la Commission et du Conseilet composé sur base tripartite par des re-

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(6) Sur les principaux syndicats eu-ropéens en général, voir A. Maiel-lo, 2002.

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présentants des associations d’employeurs,des syndicats de travailleurs et des organi-sations des «intérêts divers». Néanmoins, leCES devait être un organe consultatif ne dis-posant pas du droit de prise d’initiatives au-tonomes (Varsori, 1995; 1999; 2000).

On affirme d’ordinaire qu’à partir de sa créa-tion en 1958 et jusqu’au début des années1970, la CEE n’a pas mené de politique so-ciale effective. Ce n’est que partiellementvrai. La majorité des leaders des «Six» esti-maient que les problèmes de nature socia-le devaient être abordés dans une pers-pective nationale et au cours de ces années-là, les États membres de la Communautécréèrent ou renforcèrent des systèmes na-tionaux de prévoyance sociale (Le poli-tiche sociali in Europa, Bologne, 1999).D’autre part, l’économie de l’Europe occi-dentale était marquée par une croissanceforte et constante avec une situation de qua-si-plein emploi qui finit par alléger les ten-sions sociales (voir, par exemple, D. H. Ald-croft, 1997). Et pourtant, la question socia-le ne fut pas entièrement ignorée (au niveaugénéral, voir J. Degimbe, 1999). Le CES lut-ta beaucoup pour être reconnu comme or-ganisme indépendant en mesure d’influen-cer les décisions de la Commission et duConseil; les représentants des syndicats yétaient particulièrement actifs et de nom-breux appels furent lancés en faveur du dé-veloppement par la Communauté d’une po-litique sociale efficace. Très rapidement, leCES manifesta un intérêt précis pour le lienexistant entre travail et éducation et se concen-tra sur la question de la formation profes-sionnelle conçue comme un instrument de-vant permettre d’améliorer les conditions devie des travailleurs, de moderniser le sys-tème économique, de créer un lien plus étroitet efficace entre le marché du travail et lessystèmes éducatifs. En outre, les autoritésitaliennes réaffirmèrent leur intérêt pour l’éla-boration d’une forme de politique socialeeuropéenne contribuant au développementde la péninsule, ainsi qu’à la solution desproblèmes du Mezzogiorno et de l’émigra-tion (voir Petrini, 2004). En 1960, la CEEcréait le Fonds social européen (FSE), quine disposait cependant pour les dix pre-mières années de son activité que de 420millions d’unités de compte. En tout état decause, il y a lieu de rappeler qu’une partiede ces fonds furent consacrés à des ac-tions de formation professionnelle visant àaider les travailleurs sans emploi, même sic’était dans un contexte national et sans ap-

proche communautaire précise de la ques-tion de la formation professionnelle. En réa-lité, l’article 128 du traité CEE stipulait qu’ilrevenait au Conseil des ministres d’identi-fier certains principes en vue de la miseen œuvre d’une politique commune dans lesecteur de la formation professionnelle contri-buant au développement économique de laCommunauté (7). Les discussions commen-cèrent très rapidement sur la mise en œuvrede l’article 128 et, en mars 1961, le com-missaire aux affaires sociales, l’Italien Lio-nello Levi Sandri, indiquait: «... que l’exi-gence d’une coordination des politiques deformation professionnelle se faisait sentir,non seulement au niveau communautaire,mais aussi à l’intérieur des différents paysdisposant d’organes et d’administrations com-pétents en matière de formation profes-sionnelle». Et il ajoutait: «... La Commission,en proposant un certain nombre de prin-cipes généraux destinés à guider la mise enœuvre de la politique commune de forma-tion professionnelle, vise à donner une orien-tation uniforme au problème dans tous lespays membres» (8). Dans ce contexte, la Com-mission pouvait compter sur le soutien dé-cidé du CES, qui élaborait une série d’étudessur la question (9). Toutefois, ce n’est qu’enavril 1963 que le Conseil énonçait ces prin-cipes, qui restaient par ailleurs très vagues;ils ne clarifiaient pas les devoirs des Étatsmembres et de la Communauté et n’offraientpas de description détaillée des contenusd’une éventuelle formation professionnelleeuropéenne. À la fin de 1963, la CEE n’enconstituait pas moins un Comité consulta-tif pour la formation professionnelle com-posé de 36 membres (chaque délégation na-tionale étant constituée par six personnes,deux représentants des administrations, deuxdes syndicats et deux des organisations d’em-ployeurs) (10). Certains États membres, et enparticulier l’Italie, espéraient que ce Comi-té consultatif allait pouvoir jouer un rôle si-gnificatif pour l’élaboration d’une action eu-ropéenne efficace dans le secteur de la for-mation professionnelle (11). En effet, le Co-mité consultatif engagea des efforts pourlancer des initiatives précises et, par exempleen 1965, instituait un groupe de travail char-gé d’identifier les principes dont devaients’inspirer les experts de la formation pro-fessionnelle dans l’Europe des «Six» («for-mation des formateurs») (12). Au cours dela même année, la Commission envisageaitune politique communautaire dans le sec-teur de la formation professionnelle en met-tant particulièrement l’accent sur l’agricul-

(7) Il faut souligner qu’une politiqueeuropéenne dans le domaine de laformation professionnelle n’était pasconsidérée comme un objectif au-tonome, mais comme un instrumentdu développement économique.

(8) Bruxelles Archives de la Com-mission (BAC), 173/95, 2828, Noted’information sur les travaux du Co-mité économique et social, 7.3.1961.

(9) Voir la documentation dans BAC173/95, 2828.

(10) Journal officiel des Communau-tés européennes, 3090-3092/63,30.12.1963.

(11) BAC 173/95, 2849, CEE, Le Con-seil - proposition italienne, 9.7.1963;CEE, Commission Note pour lesmembres de la Commission,12.11.1963.

(12) BAC 125/94, 361, CEE, Com-mission - Note d’information auxmembres du groupe de travail «For-mation des formateurs» du Comitéconsultatif pour la formation pro-fessionnelle, 28.9.1965.

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ture: il ne faut pas oublier que ce n’estque quelques années auparavant que la CEEavait mis en place la PAC. Il est importantde noter que la Commission comme le Co-mité consultatif proposaient une intégrationaccrue dans ce domaine et la réalisationd’études visant à favoriser une approchecommune par les «Six» en matière de for-mation professionnelle (13). Cette opinionétait partagée par les milieux politiques duParlement européen et, à certaines occa-sions, l’assemblée de Strasbourg souligna lanécessité d’engager des contacts étroits entreles organismes nationaux soucieux de pro-mouvoir la formation professionnelle (14). Enréalité, de nombreux fonctionnaires de laCommunauté semblaient convaincus qu’ilétait dans l’intérêt des «Six» de mettre en pla-ce une politique commune dans le domai-ne de la formation professionnelle, mais desidées claires manquaient, il semblait diffici-le d’identifier un cadre de référence concep-tuel commun et, enfin, chaque État membre,à l’exception peut-être de l’Italie, préféraitsuivre une approche nationale.

Le tournant des années 1970 et lanaissance du Cedefop

L’attitude de la CEE sur la question de la po-litique sociale et de la formation profes-sionnelle évolua de manière radicale entrela fin des années 1960 et le début des an-nées 1970, à la suite d’une série d’événe-ments précis:

(a) le mouvement étudiant de mai 1968, quis’exprima d’abord en France puis dans d’autrespays d’Europe, et qui fit apparaître de nou-veaux besoins de nature sociale, ainsi quede nouveaux acteurs dans la société euro-péenne (par exemple, la nécessité d’une pro-fonde réforme du système éducatif et la pri-se en compte de la question du rapport entreéducation et marché de l’emploi, les reven-dications de certains groupes tels que lesétudiants, les femmes, etc.);

(b) un rôle nouveau et plus actif des syndi-cats aux niveaux tant national qu’interna-tional (par exemple, le mouvement des tra-vailleurs qui avait animé «l’automne chaud»en 1969 en Italie, la décision prise par cer-tains syndicats d’inspiration communiste departiciper aux dynamiques communautaires,la constitution en 1973 de la Confédéra-tion européenne des syndicats, etc.) (Go-bin, 1997);

(c) la crise économique qui frappait unegrande partie des pays d’Europe occidenta-le au cours des années 1970, et en particu-lier après 1973 avec une forte augmentationdu chômage;

(d) le premier élargissement de la CEE à despays tels que la Grande-Bretagne et l’Irlan-de, dont certains secteurs étaient tradition-nellement en retard sur le plan économiqueet social ou connaissaient des phénomènesdramatiques de désindustrialisation;

(e) les nouveaux efforts engagés en Italiepour aborder la question du Mezzogiornoavec l’aide de la Communauté européenne.Une des premières conséquences de ces dé-veloppements fut le regain d’intérêt pour ledialogue social tripartite, désormais non seu-lement au niveau national mais aussi au ni-veau européen. En avril 1970 se tenait àLuxembourg la première conférence tripar-tite avec la participation des représentantsdes syndicats, des associations d’employeurs,de la Commission et des ministres du travaildes «Six». À cette occasion, de nombreux dé-légués proposèrent la création d’un comitépermanent pour l’emploi, qui allait effecti-vement voir le jour quelques mois plus tard.Dans ce contexte, le lancement d’une poli-tique sociale européenne incluant la for-mation professionnelle devint un objet évi-dent de débat à l’intérieur de la Commu-nauté européenne (Guasconi, 2003).

Quelque temps auparavant, en été 1969, unéminent membre italien du CES, MarcelloGermozzi, avait déjà proposé que le Co-mité économique et social s’occupe de laquestion de la formation professionnelle (15).Cette question était abordée en février 1970par la section des affaires sociales du CESet, à cette occasion, divers membres du Co-mité proposaient que la Communauté créeun centre européen pour l’étude de la for-mation professionnelle. En particulier, la syn-dicaliste allemande Maria Weber expliquaitcette proposition en termes très clairs: «... lesactivités de la Communauté en matière deformation professionnelle n’ont pas eu, aucours des dernières années, la même in-tensité et la même importance que les ac-tivités communautaires dans les autres do-maines; or, la formation professionnelleest un élément déterminant, notamment enmatière d’emploi. Certes, la Commission pré-conise l’harmonisation en matière de for-mation, mais il est difficile d’harmoniser ceque l’on connaît peu ou mal; dès lors, il est

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(13) BAC 174/95, 1045, CEE, Com-mission - Programmes d’action enmatière de politique commune deformation professionnelle en géné-ral et dans l’agriculture - Commu-nication de la Commission au Con-seil, 15.5.1965; Comité consultatifpour la formation professionnelle,Avis sur le projet de «Programmed’action en matière de politique com-mune de formation professionnel-le», 19.3.1965.

(14) BAC 174/95, 1045, European Par-liament Social Commission, Notedoc V/SEC(65) 1355/fin, A. Sabati-ni, 21.12.1965.

(15) Archives du Comité économiqueet social (ci-après ACES), 1223/1,lettre, M. Germozzi à M. Berns,22.7.1969. Sur l’action du CES, voiren particulier la contribution de E.Dundovich, 2004.

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important de créer un Institut européen qui,à l’image de ce qui se fait déjà dans cer-tains États membres, (...) permettrait de réa-liser une meilleure coordination entre lespouvoirs publics, les travailleurs et les em-ployeurs (16)». Par ailleurs, la nécessité deréaliser des études précises sur ce secteurétait désormais ressentie avec force dans denombreux pays de la Communauté, puisquela formation professionnelle était perçuecomme un remède efficace à de nombreuxproblèmes économiques et sociaux (chô-mage, adaptation aux nouvelles technolo-gies, relations différentes entre les groupessociaux tels que les jeunes et les femmes etle marché de l’emploi); en outre, la forma-tion professionnelle devait aller de pair avecla réforme des systèmes éducatifs et êtreabordée de manière scientifique, afin dedonner davantage de poids à la rechercheet à l’échange d’informations entre expé-riences diverses. Il faut rappeler à ce pro-pos qu’en 1969, la République fédérale d’Al-lemagne avait créé le Bundesinstitut für Be-rufsbildungsforschung, qui allait devenir unesorte de modèle (17). Pour sa part, le CES,notamment suite aux initiatives de Marcel-lo Germozzi et de Maria Weber, poursuivaitson action, qui finit par se traduire dans laproposition de création d’un institut euro-péen de la formation professionnelle (18).

Entre-temps, entre novembre 1970 et juillet1971, le Conseil lançait son projet de pro-gramme d’action dans le domaine de la for-mation professionnelle visant à réviser lesprincipes élaborés en 1963. Suite à unedécision du Conseil, la Commission était of-ficiellement chargée d’élaborer une politiqueeuropéenne en matière de formation pro-fessionnelle (19). La question était abordée,par exemple, à la fin de mai 1971 par le Co-mité permanent sur l’emploi; Maria Weber,qui était membre de cet organisme, confir-mait que «... son organisation a souhaité, de-puis longtemps, voir créer un Institut eu-ropéen qui puisse promouvoir la recherchescientifique dans le domaine de la forma-tion et constituer le cadre d’une collabora-tion fructueuse entre les institutions natio-nales. Le budget de la Communauté devraitpouvoir financer la création d’un tel Institut»(20). Même si d’autres membres du Comiténourrissaient des visions plus prudentes,l’idée que la formation professionnelle de-vait devenir un thème d’étude et d’échanged’informations et d’expériences au niveaueuropéen commençait à s’imposer, commele montrent les résultats de diverses études

promues par la Commission en 1972; parexemple, dans un rapport consacré aux ac-tivités d’un groupe de réflexion créé par laCommission, l’expert français de ce Comitéévoquait «la création d’un centre européend’études et de recherche sur l’évolution desqualifications et des méthodes d’éducationet de formation professionnelle» (21). Malgrétout cela, la Commission adoptait une atti-tude très prudente et, dans un important do-cument de fin octobre 1972 intitulé «Pre-mières mesures en vue de la mise en œuvred’une politique commune de formation pro-fessionnelle», la création d’un centre d’étudeseuropéennes sur cette problématique étaitdécrite comme un objectif lointain et en-core vague (22).

Le sommet de Paris de décembre 1972 avaitdonné un élan au développement d’une po-litique sociale européenne plus efficace. Pourla première fois, les leaders de l’Europe com-munautaire considéraient la mise en œuvred’une politique sociale comme un objectifimportant, et la Commission était chargéed’élaborer un programme d’action socialeprécis. La formation professionnelle repré-sentait un thème important dans l’ordre dujour des travaux de la Commission. La Di-rection générale «Affaires sociales» et la Di-rection générale «Recherche, Science et Édu-cation» furent chargées de la question surun plan général, mais aussi de la créationd’un institut européen. En réalité, les posi-tions de la Commission face à la créationd’un centre d’études européen sur la for-mation professionnelle restaient prudentes;certains documents soulignaient que lapublication d’un bulletin pouvait représen-ter le meilleur moyen pour diffuser des in-formations sur cette question et qu’unetelle revue pourrait être éditée par un ins-titut national pour être ensuite diffusée auxsoins de la Communauté (23). Malgré cela,certains gouvernements, en particulier lesgouvernements français et italien, manifes-taient un intérêt croissant pour la créationd’un centre européen. En décembre 1973,les travaux de la Commission, en particuliersur la création d’un centre européen de laformation professionnelle, étaient examinéspar le Conseil des ministres des affairessociales; au cours de la première partie deleur réunion, le document élaboré par laCommission fut fortement critiqué par lesreprésentants de certains États, et le délé-gué britannique réussit à faire rejeter le pro-jet de centre européen. En réalité, commel’expliquait un rapport de la Commission:

(16) ACES, 1223/1, Proceedings ofthe 52th meeting of the session onsocial issues, ECOSOC, 4.2.1970.

(17) La création du centre allemandallait être suivie en 1970 par la nais-sance en France du Centre d’étudeset de recherches sur les qualifica-tions (CEREQ) et en Italie en 1973de l’Istituto per lo sviluppo della for-mazione professionale dei lavora-tori (ISFOL), voir Wollschläger, 2000.

(18) Voir les documents dans ACES,1223/2 bis, 1224/4, 1224/5.

(19) BAC 64/84, 970, Communautéeuropéenne - Conseil - Note, 9.6.1971.

(20) BAC 64/84, 970, Comité perma-nent pour l’emploi - Projet de comp-te rendu de la deuxième session duComité permanent pour l’emploi -Bruxelles le 27 mai 1971.

(21) BAC 64/84, 970, Commission desCommunautés européennes - Di-rection générale des Affaires sociales- Direction de la main-d’œuvre,Inventaire des problèmes prioritairesen matière de recherche sur la for-mation professionnelle, Groupe d’ex-perts «Recherche sur l’évolution desprofessions et sur la formation pro-fessionnelle», 13.4.1972.

(22) BAC 64/84, 970, Commission desCommunautés européennes SEC (72)3450 final - Premières mesures envue de la mise en œuvre d’une po-litique commune de formation pro-fessionnelle, 25.10.1972.

(23) BAC 64/84, 971, Communautéseuropéennes - Le Conseil, Note,3.1.1973, à propos d’une réunion te-nue le 19.12.1972. Voir égalementDG XII Programme d’action de laDivision XX-A-2, 30.7.1973.

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«Cette position semble résulter d’une mau-vaise rédaction du texte de la Commission(...) En effet, on ne peut “mettre en œuvreune politique commune de formation par lacréation d’un Centre”. Le Centre appporte-ra un appui opérationnel à la Commission,mais ce sera la Commission qui, avec le Con-seil, aura à mettre en œuvre la politiquecommune de formation professionnelle.Après une intervention énergique du Pré-sident Ortoli en faveur de la création duCentre et la proposition du Président du Con-seil de remplacer les mots “notamment parla création...” par “y compris par la création”,le Royaume-Uni leva son veto». Ce n’étaitcertes pas l’intention du Conseil de susciterla naissance d’une instance faisant des choixde nature politique, et le futur Centre de-vrait se contenter de constituer un supportessentiellement «technique» pour les déci-sions du Conseil et de la Commission. Aumême moment, et ce n’est pas un hasard,les membres du Conseil soulignaient lanécessité de clarifier les objectifs du Centre,alors que les représentants de l’Allemagneet de l’Italie souhaitaient ajouter la notiond’éducation à celle, trop limitée, de forma-tion professionnelle, telle qu’elle figurait dansle document de la Commission (24). À cepoint, les États membres de la Commu-nauté, suite également à la grave crise éco-nomique déclenchée par la guerre du YomKippour en octobre 1973, se montrèrent dé-terminés à concevoir une politique socialeefficace et, en janvier 1974, le Conseil lan-çait son premier programme d’action socia-le qui soulignait trois objectifs fondamen-taux: le plein emploi, la poursuite de meilleuresconditions de vie et de travail, une partici-pation croissante des acteurs sociaux auxdécisions communautaires (Degimbe, 1999;p. 20-21, 93-116) (25). La création d’un Centres’occupant de formation professionnelleconstituait un appendice évident à ces ob-jectifs et la Commission entreprit la rédac-tion d’un projet précis. Dans un documentélaboré par la DG XII, il était dit que ceCentre «devrait être une unité centralisée,ayant un rôle opérationnel au service de laCommission et étroitement rattachée à cel-le-ci»; il était prévu d’instituer un «Comité di-recteur» composé de représentants des forceséconomiques et sociales et des gouverne-ments, mais la Direction générale était fa-vorable à la nomination, en tant que res-ponsable du Centre, d’un haut fonction-naire de la Commission et elle affirmait à cepropos: «... Le personnel du Centre com-prendrait une vingtaine de personnes (en-

gagées par contrat selon une formule ana-logue à celle de l’AEC - Association euro-péenne de coopération)»; Bruxelles devraitêtre le siège de ce Centre (26). Il n’est guè-re surprenant que certains fonctionnaires dela Commission espéraient que le Centre n’ob-tiendrait pas un rôle indépendant et que cepoint fût souligné à diverses reprises (27).Le Centre devait être un «appendice» de laCommission elle-même. Malgré cela, pro-bablement en raison de l’opinion prévalantdans d’autres milieux de la Commission, laproposition qui fut soumise à l’attention duConseil à la fin de mars 1974 comportait deséléments nouveaux importants. Le Centreétait conçu désormais «comme une instan-ce ayant sa propre personnalité juridique etrestant toujours étroitement liée aux insti-tutions communautaires et en particulier àla Commission». Il était prévu d’instaurer unConseil d’administration composé de re-présentants des syndicats, des associationsdes employeurs et de la Commission, ainsique d’un comité constitué par des expertsnationaux. Le document soulignait par ailleursque «le directeur est l’élément clé de la struc-ture du Centre. Son mandat sera fixé par unstatut ad hoc. Le Centre est conçu princi-palement comme un moteur devant, entreautres, servir de catalyseur pour l’élabora-tion de lignes directrices très novatrices vi-sant à réaliser un développement harmo-nieux de la formation professionnelle ausens le plus large au sein de la Communauté».Dernier élément, mais non le moindre, ilétait souhaité que le Centre commence àfonctionner en 1975 et il était prévu que lescoûts pour la première année d’activité s’éta-bliraient à 600 000 unités de compte, puis à1 450 000 en 1976 et à 1 800 000 en 1977(28). Dans cette nouvelle vision, tout en res-tant étroitement lié à la Commission, le Centredevait acquérir un certain degré d’autono-mie et s’appuyer sur une gestion «tripartite».

D’autres institutions européennes s’expri-mèrent également sur ce projet. Le CES sou-lignait pour sa part que «... le terme ‘for-mation professionnelle’ doit être interprétéde la façon la plus large. En ce qui concer-ne le Conseil d’administration du Centre, leComité proposa contre l’avis des représen-tants des travailleurs, une structure quadri-partite, à savoir: les représentants de la Com-mission, quatre représentants des employeurs,quatre représentants des travailleurs et quatrereprésentants des activités diverses; il sug-géra notamment que le président de la sec-tion des affaires sociales en soit membre. Le

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(24) BAC 64/84, 971, Commission desCommunautés européennes, Noted’archives, 13.12.1973 de Van Hoo-rebeek.

(25) Il faut souligner que c’est aussidans ce climat que s’inscrit le ren-forcement du mouvement syndicaleuropéen, notamment par la créa-tion en 1973 de la Confédération eu-ropéenne des syndicats (CES). VoirGobin, 1997; passim.

(26) BAC 64/84, 1001, Commissiondes Communautés européennes,Notes d’archives, 14.1.1974.

(27) BAC 64/84, 1001, Note à l’at-tention de M. Shanks de G. Schus-ter, 18.2.1974.

(28) BAC 64/84, 1001, «Commissiondes Communautés européennes -Établissement d’un Centre européenpour la formation professionnelle(Proposition de la Commission auConseil)» COM(74)352 final, 27.3.1974.

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(29) Voir également la documenta-tion dans ACES, 1260/1 et 1260/2.

(30) BAC 62/86, 8, European Parlia-ment -Revised Draft, rapporteur: F.Pisoni, 12.7.1974.

(31) BAC 627/86, 8, Communautéseuropéennes - Conseil - Doc.R/3101/74 (SOC 253), 6.12.1974.

(32) Cette décision, et ce n’est pas unhasard, fut vivement critiquée parles autorités soviétiques ainsi quepar certaines organisations occi-dentales d’inspiration communiste,comme par exemple le syndicat fran-çais CGT.

(33) Pour une analyse juridique durôle des Agences dans le contexteeuropéen, voir E. Chiti, 2002.

Comité a enfin souhaité que l’ensemble deses propositions relatives aux tâches et mé-thodes de travail du Centre soit porté à laconnaissance du Conseil d’administration duCentre» (CES, 1975) (29). Le CES proposaitdonc ses propres structures comme modè-le et essayait d’identifier un rôle pour le sec-teur des «activités diverses». Quant au Par-lement européen, ses observations avaientdes implications plus profondes, et sa com-mission des affaires sociales et de l’emploiindiquait notamment que le Centre devaitdisposer «d’autonomie et de pouvoir d’ini-tiative» tout en maintenant des contacts étroitsavec les institutions communautaires et avecles centres nationaux existants pour éviterles doubles emplois et le gaspillage de res-sources; par ailleurs, selon l’opinion de l’As-semblée de Strasbourg, il semblait judicieuxd’augmenter le nombre des représentantsdes partenaires sociaux et le nombre des ex-perts nationaux. Enfin, l’Assemblée euro-péenne était d’avis que le budget prévu nesuffirait pas et se montrait surprise de l’ab-sence de décision quant à la désignation dusiège du Centre (30).

La question fut intégralement réexaminéeau cours de la seconde moitié de 1974 parle Conseil qui marqua son désaccord sur cer-tains éléments importants des propositionsde la Commission et, du fait de ses critiques,le texte présenté fut largement modifié. Unegrande partie des États membres souhaitaientlimiter les pouvoirs de la Commission, ensoulignant le caractère essentiellement in-tergouvernemental de la construction euro-péenne. Le Conseil décida de modifier ra-dicalement la composition du Conseil d’ad-ministration, en y ajoutant notamment desreprésentants des gouvernements nationauxà ceux des forces économiques et socialeset de la Commission. Quant à cette derniè-re, elle vit son rôle redéfini, et la délégationallemande en particulier exerça des pres-sions sur les autres partenaires pour obtenirune composition du Conseil d’administra-tion permettant d’éviter que les représen-tants des États membres puissent être misen minorité. Le comité des experts était éga-lement supprimé dans ce nouveau schéma.Le Conseil confirma en revanche que leCentre devait jouir d’une vaste autonomie.Il y eut un vif débat entre les ministres surle rôle du Directeur, et la délégation fran-çaise proposa que celui-ci fût nommé parle Conseil, alors que les Britanniques pré-féraient le voir nommé par le Conseil d’ad-ministration; enfin, sept délégations étaient

d’avis que le Directeur devait être choisi parla Commission sur la base de candidaturesprésentées par le Conseil d’administration(31). Entre-temps, la question du siège dunouvel organisme fut tranchée par le choixde Berlin Ouest; cette décision avait une por-tée politique évidente, puisqu’elle avaitété avancée par le gouvernement de Bonnpour souligner que la partie occidentalede l’ex-capitale allemande faisait pleinementpartie de l’Occident (32). Le 1er février 1975,le Conseil des ministres pouvait enfin an-noncer la décision de créer un «Centre eu-ropéen pour le développement de la for-mation professionnelle» (CEDEFOP) (33).

L’action du Cedefop

Les premières phases de la vie du Cedefopne furent guère faciles. Ce n’est qu’à la find’octobre 1975 que le Conseil d’administra-tion se réunit pour la première fois à la «Kon-gresshalle» de Berlin, sous la présidencede Mr. Shanks, Directeur général des affairessociales à la Commission. Comme l’indiquele procès-verbal de cette réunion: «Le Centrene disposant pas encore d’installations offi-cielles, tout le travail préparatoire fut ef-fectué par la Commission, malgré les res-sources limitées à sa disposition dans le cli-mat actuel d’austérité» (Cedefop, 1975). Àcette occasion furent abordées et résoluesdiverses questions préliminaires. Le Conseild’administration choisit dans un premiertemps un Danois, Carl Jorgensen, considé-ré comme le candidat le plus adéquat pourle poste de Directeur. Quant au siège duCentre, le sénat de Berlin avait offert un bâ-timent situé au n° 22 de la Bundesallee «àtitre gratuit pour une période de trente ans»;par ailleurs, les autorités berlinoises s’étaientdéclarées disposées à contribuer à hauteurd’un million de marks à la restructuration decet édifice. Une bonne partie de l’année sui-vante fut consacrée à la rédaction des rè-glements du Centre et au recrutement deson personnel, ainsi qu’à la rédaction deleurs contrats, pendant que se poursuivaientles travaux d’aménagement de l’édifice dela Bundesallee pour le rendre conforme auxbesoins du nouvel organisme; au cours despremiers mois de 1976, le Directeur et sesdeux adjoints ne disposaient que d’un bu-reau au centre d’information des Commu-nautés européennes, et la première secré-taire ne prit ses fonctions qu’au cours dumois de mars de cette année-là. Pour ce quiest des activités du Centre, le Directeur etses collaborateurs les plus proches effec-

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tuèrent une série de missions auprès de nom-breux instituts nationaux s’occupant de for-mation professionnelle et commencèrent àengager des contacts avec les représentantsdes États membres dans ce secteur et à iden-tifier les principaux thèmes sur lesquels leCedefop devrait concentrer son attention, àcommencer par le chômage des jeunes (34).Il existait encore une incertitude sur les mis-sions du Cedefop, et lors d’une réuniondu Conseil d’administration tenue en juillet1976, il était dit que « le Centre ne devraitpas dupliquer les travaux déjà réalisés ailleursni tenter de formuler des politiques natio-nales» et que «le Centre ne devrait pas don-ner une priorité excessive à l’harmonisation,mais s’intéresser à la nature des différencesexistant entre les divers pays» (Cedefop,1976a). En d’autres termes, on craignait quele Cedefop ne soit un instrument utilisé afinde soustraire des compétences aux gouver-nements nationaux dans des secteurs queles États continuaient à considérer commerelevant de leur stricte compétence. Les pro-cès-verbaux des réunions du Conseil d’ad-ministration donnent clairement la sensationque dans cette phase initiale, cette instanceet son responsable, Jean Degimbe, haut fonc-tionnaire de la Commission, jouaient un rô-le de tout premier plan. Ce n’est finalementque lors de la réunion du Conseil d’admi-nistration de novembre 1976 qu’il fut pos-sible d’établir un programme de travail effi-cace pour l’année 1977. Les principauxobjectifs du Centre étaient les suivants:

a) la publication d’un bulletin

b) «la collecte et le traitement documentai-re et la dissémination de l’information exis-tante»

c) la réalisation d’études sur des thèmes telsque «le chômage des jeunes, notammentdans le cadre de la transition de l’école aumonde du travail» - ce point constituait lapremière des priorités - «les femmes, en par-ticulier les femmes mariées ou plus âgéessouhaitant retrouver un emploi», «l’éduca-tion et la formation continue», «l’élaborationd’un glossaire multilingue sur la formationprofessionnelle», «l’élaboration d’études com-parées sur les systèmes nationaux de for-mation professionnelle» (Cedefop, 1976b).

Il s’agissait d’un programme prudent, quisoulignait l’aspect étude et recherche, sansinfluencer les politiques nationales ni pro-poser de points de départ pour une action

autonome de la Commission. En décembre1976, le Cedefop organisait un premier sé-minaire sur le chômage des jeunes à Zand-voort, en mars 1977 il s’installait définitive-ment dans la Bundesallee (35) et en mai dela même année paraissait le premier numé-ro du «Bulletin» du Centre. Le Cedefop étaitcependant loin d’être une organisation stable,sur le plan tant de ses objectifs que de sonorganisation. Sur ce dernier plan, le recru-tement du personnel notamment posait denombreux problèmes: au début de 1977,deux experts étaient contraints de renoncerà leur emploi au Centre, certains postes res-taient vacants et la disponibilité de troispostes de traducteur de grade A5 et d’unesecrétaire n’était pas confirmée. Par ailleurs,le Directeur, Carl Jorgensen, décida de dé-missionner, mettant ainsi fin à une expé-rience peu significative qui avait duré envi-ron un an et demi (Cedefop, 1977) (36).Enfin et surtout, certains membres du per-sonnel commencèrent à se plaindre de lagrande différence entre leur statut et celui,nettement plus favorable, des fonctionnairesde la Communauté. À l’occasion de la ré-union du Conseil d’administration de sep-tembre 1977, un nouveau Directeur étaitnommé, le Français Roger Faist, alors qu’YvesCorpet, représentant français des associa-tions d’employeurs, prenait le poste de JeanDegimbe à la présidence du Conseil d’ad-ministration. La nomination du nouveau Di-recteur constituait un événement important,car Roger Faist, ancien Secrétaire général de«l’Union confédérale des ingénieurs et cadresC.F.D.T.» (37), entendait tout d’abord confé-rer davantage d’épaisseur à l’action du Ce-defop; par ailleurs, le Centre décidait decontinuer à se concentrer sur les thèmesfixés en 1975, en particulier le chômage desjeunes et l’analyse comparée des systèmesnationaux de formation professionnelle; denouveaux séminaires d’étude furent organi-sés, de nouveaux contacts pris et de nou-veaux efforts engagés pour améliorer le Bul-letin du Cedefop (Cedefop, 1978a). Malgrécela, de nouvelles difficultés apparurenten 1978, notamment au niveau de l’organi-sation du Centre; les membres du person-nel avancèrent de nouvelles protestationsconcernant leur statut juridique, la Com-munauté tenta d’opérer des coupes clairesdans le budget du Centre, et le Conseil d’ad-ministration exprima des réserves sur cer-taines dépenses prévisionnelles (Cedefop,1978b; 1978c). Il n’est donc guère surpre-nant que les activités du Cedefop aient faitl’objet de critiques de la part de certaines

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(34) BAC 18/86, 754, Cedefop, Rap-port annuel 1976.

(35) BAC 64/84, 1009, l’inaugurationofficielle eut lieu le 9 mars 1977.

(36) BAC 18/86, 754, lettre, C. Jor-gensen à R. Jenkins, 23.5.1977.

(37) BAC 18/86, 754, l’autre candidatétait John Agnew, représentant dugouvernement irlandais au Conseild’administration.

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institutions européennes. En avril 1979, unrapport du Parlement européen émettait tou-te une série d’observations négatives et af-firmait en particulier que «... les activités duCentre n’ont donné leurs premiers résul-tats qu’après une période de démarrage re-lativement longue» et «... le choix de Berlincomme siège du Centre, fait par le Conseildes ministres, et le nombre important demembres du Conseil d’administration ontjoué à cet égard un rôle défavorable»; d’autrepart, l’Assemblée de Strasbourg proposaitque le Cedefop «... s’oriente autant que pos-sible dans le sens d’activités pouvant avoir,dans les conditions socio-économiques ac-tuelles, une utilité pratique»; enfin, une co-opération plus étroite était souhaitée entrele Cedefop et des centres internationauxpoursuivant des intérêts similaires, ainsi quedes institutions nationales (38). Ces critiquesétaient le résultat d’enquêtes menées par leParlement, mais, comme l’expliquait J. De-gimbe dans une lettre adressée au Vice-Pré-sident de la Commission européenne, HenkVredeling: «des interventions des parlemen-taires, il ressort que le Parlement est très né-gatif vis-à-vis de ces organes “satellites”sur lesquels il ne peut exercer son contrô-le comme il l’exerce sur les activités de laCommission» (39). Le Parlement estimait doncque les agences échappaient à son contrô-le, ce qui n’était pas une question secon-daire pour un organisme qui se battait avecvigueur pour accroître ses propres compé-tences et pouvoirs. Quant au Cedefop, sui-te à des prises de position similaires au coursdes années suivantes, il était attentif à soi-gner ses relations avec le Parlement, com-me il le faisait déjà avec la Commission, quien tout état de cause était représentée parses fonctionnaires au sein du Conseil d’ad-ministration. Certaines observations critiquesfurent émises à cette période également parla Cour des comptes européenne, qui indi-quait notamment qu’au cours de ses pre-mières années d’activité, le Cedefop n’avaitpas été en mesure d’utiliser pleinement lesressources financières mises à sa dispositionet que les coûts de publication du «Bulletin»étaient trop élevés. Le Centre fit un effortpour faire face à ces critiques en faisant va-loir, par exemple, la publication d’une «News-letter» (Cedefop, 1980a; 1980b).

Malgré ces difficultés, entre 1979 et le dé-but des années 1980, l’activité et les struc-tures du Cedefop s’améliorèrent grandement.Le Centre pouvait compter désormais surenviron 35 agents et son budget enregistrait

une augmentation progressive: en 1979,il disposait de 2 790 808 écus, en 1980 de3 500 000 écus et en 1981 de 3 736 000 écus(Cedefop, 1981b; 1983). L’année 1982 mar-qua un tournant dans les activités du Centre.Du fait de la persistance de la crise écono-mique et du nombre croissant de chômeurs,la Communauté européenne s’efforça d’en-gager une action plus efficace dans le sec-teur de la formation professionnelle et laCommission se concentra sur deux thèmes:d’une part, le lien existant entre les nouvellestechnologies et la formation professionnel-le et, d’autre part, la proposition de lancerun projet favorisant l’harmonisation des qua-lifications professionnelles. Le Directeur duCedefop avait pour sa part déjà envisagéque le Centre inscrive ses activités dans uneperspective de longue durée (Cedefop, 1981a;1982a). Ainsi, en 1982, le Centre élabora-t-il un plan triennal visant à concilier les nou-velles lignes d’intervention indiquées par laCommission avec les recherches engagéesau cours des années précédentes (Cedefop,1983) (40). Cette tendance était confirmée en1983, également du fait que les propositionsde la Commission furent approuvées par leConseil (Cedefop, 1984). D’autre part, le Ce-defop tenait à renforcer tous ses secteursd’activité, tels que la bibliothèque, le servi-ce d’information et les publications; à ce pro-pos, en 1984 fut lancée la publication«CEDEFOP Flash» à côté de la Revue «For-mation professionnelle» et de «CEDEFOPNews». Au cours de la même année, le Ce-defop publiait trois numéros de la Revue«Formation professionnelle» à 10 000 exem-plaires, ainsi que 25 000 exemplaires de«CEDEFOP News», ce qui, selon le Cede-fop, devait lui permettre d’atteindre plusde 40 000 lecteurs. Quant au service d’in-formation, toujours en 1984, le Centre ache-vait un «Thesaurus» et mettait en place denouvelles technologies informatiques. D’autrepart, il était alors en mesure d’utiliser envi-ron 95 % de sa dotation financière. Ces ré-sultats furent obtenus malgré la persistancede certains problèmes d’organisation: la crois-sance du personnel était très lente (en 1984,l’organigramme du Centre se composait de42 personnes), alors que l’augmentation dubudget semblait à peine suffisante pour fai-re face à l’inflation dans la CEE: en 1983,la dotation financière était de 4 210 000 écus,en 1984 de 4 560 000 (Cedefop, 1985a). Parailleurs, le statut juridique du personnel conti-nuait à créer de graves difficultés, car les au-torités communautaires n’avaient aucune-ment l’intention d’appliquer aux agents du

(38) Parlement européen - Documentsde séance 1979-1980 Doc. 90/79,rapport de M. A. Bertrand, 20.4.1979.En réalité, certains membres de lacommission du Parlement avaientadopté une position plus dure surles activités du Cedefop et un do-cument de la Commission notait parexemple que «... Une opinion trèsnégative à l’égard du fonctionne-ment du Centre de Berlin (budgé-taire, personnel inexpérimenté) s’estdégagée du débat et a incité la com-mission parlementaire à ne pas sesoustraire à ses responsabilités». Àcette occasion, Jean Degimbe avaitadopté une position mois négativeet souligné que la présence d’unnouveau Directeur allait permettred’ouvrir des perspectives positives.À ce propos, voir BAC 18/86, 754,Commission des Communautés eu-ropéennes - Secrétariat généralSP(79)311, 5.2.1979.

(39) BAC 157/87, 112, lettre, J. De-gimbe à H. Vredeling, 16.2.1979. Onpeut rappeler que l’on était à la veilledes élections au suffrage universeldirect du Parlement européen quiallaient donner davantage de légiti-mité à l’Assemblée de Strasbourg etque donc, selon toute probabilité,s’exprimait déjà le souhait du Par-lement d’exercer un rôle plus fortpar rapport aux structures com-munautaires.

(40) Cette suggestion avait déjà étéfaite par Roger Faist en 1981.

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Cedefop les normes prévues pour les fonc-tionnaires de la Communauté et les res-ponsables du Centre ne semblaient pas enmesure d’exercer une influence sur les po-sitions de Bruxelles quant à cette questionépineuse. Enfin, en 1982, les problèmes d’or-ganisation apparurent de manière ouverteet le comité du personnel démissionna pourprotester contre cette situation, ce qui tra-duisait un certain niveau de conflictualité in-terne et de malaise parmi les agents du Centre(Cedefop, 1982b; 1982c).

En 1984, le mandat de Roger Faist prit fin;l’Allemand Ernst Piehl fut nommé nou-veau Directeur. E. Piehl, né en 1943, étaitdiplômé de la Freie Universität de Berlinet avait été, entre 1969 et 1975, membrede l’Institut de recherche du DGB à Düs-seldorf avant d’être le Directeur du Centreeuropéen de la jeunesse du Conseil de l’Eu-rope et d’occuper, en 1980, un poste im-portant à la CES (41). L’arrivée d’E. Piehl à ladirection du Cedefop coïncidait avec plu-sieurs développements importants pourles activités et structures du Centre. Enjuin 1984, le sommet européen de Fontai-nebleau ouvrait une nouvelle phase de laconstruction européenne avec un renforce-ment du «couple» franco-allemand, puis, en1985 Jacques Delors devint Président de laCommission et, en juin de la même année,à la suite du Conseil européen de Milan, laCommunauté ouvrait une conférence inter-gouvernementale qui devait conduire à lasignature de l’Acte unique européen, tandisque l’Espagne et le Portugal devenaientmembres de plein droit de la Communau-té européenne. L’augmentation des ressourcesmises à la disposition du budget commu-nautaire, l’accent croissant mis sur une sé-rie de politiques sociales, les besoins dansce domaine, soulignés par l’élargissementvers l’Europe du Sud, ainsi que l’identifica-tion de nouveaux domaines d’interventionpar la Communauté, constituaient autantd’éléments qui avaient renforcé le rôle duCedefop (42). En 1986, le budget du Centreaugmentait d’environ 50 % (de 4 910 000écus en 1985 à 7 388 000 écus en 1986), etle nombre des agents passait à 54. Quantà ses structures, le Cedefop disposait main-tenant de nouveaux bâtiments et d’une nou-velle salle de conférence. Pour ce qui est deses activités, le Cedefop approuvait en 1985un nouveau programme triennal qui souli-gnait les domaines d’intervention habituels;par ailleurs, sur la base des décisions duConseil et de la Commission, le Centre s’in-

téressait à de nouveaux thèmes, tels quel’harmonisation des qualifications des tra-vailleurs dans les différents pays membreset l’utilisation des nouvelles technologies,en particulier l’informatique, dans la forma-tion professionnelle. Le premier thème don-nait lieu à une étude approfondie engagéeavec de nombreux agents du Cedefop et quidevait conduire à un renforcement des contactsavec les institutions nationales et les autori-tés gouvernementales chargées de la pro-motion de la formation professionnelle (Ce-defop, 1987a) (43). Le Centre pouvait alorssouligner qu’il parvenait chaque année à uti-liser quasiment 99 % de sa dotation finan-cière (Cedefop, 1988a). Par ailleurs, il ne fautpas oublier qu’à partir de 1986 la Commu-nauté manifestait un intérêt plus marquépour la formation professionnelle, en lan-çant par exemple de nouveaux programmestels que COMETT. Cet engagement favori-sait un renforcement des contacts entre laCommission et le Cedefop, en particulieravec la DG V, comme le confirme un inté-ressant échange de lettres entre le Directeurde l’éducation et de la formation Hywel C.Jones et Ernst Piehl (voir, par exemple,Cedefop, 1987b; 1987d) (44); les rencontresentre responsables du Cedefop et fonction-naires de la Commission se multiplièrentégalement.

Malgré ces développements positifs, qui ten-daient à renforcer le rôle du Centre, les pro-blèmes et les difficultés ne manquèrent pasau cours de ces années-là. Au moment dela nomination d’Ernst Piehl, le comité dupersonnel rappelait que les agents du Ce-defop n’avaient pas encore réussi à obte-nir un statut contractuel analogue à celui desfonctionnaires communautaires (Cedefop,1985b). De nouveaux efforts en ce sensfurent engagés par le Centre avec quelquesrésultats. À la fin de 1988 eut lieu une di-vergence de vues grave entre E. Piehl et C.Politi, l’un des Directeurs adjoints. Cette di-vergence concernait également la conduitedes activités du Cedefop et, comme l’écri-vait C. Politi dans une lettre à E. Piehl: «...Pendant les trois dernières années, vous avezprivilégié les problèmes d’image du Centreet les contacts politiques; tous les servicesont travaillé pour cet objectif qui nous a ap-porté de grands bénéfices: budget plus éle-vé, nouveaux postes, siège plus fonctionnelet confortable, etc. Cette stratégie s’est dé-veloppée aux dépens de la restructurationinterne, du renforcement des services, dudéveloppement de l’informatique et des ac-

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(41) BAC 511/98, 445, Projet de dé-cision de la Commission.

(42) Pour ce qui est de l’impact del’Acte unique européen sur les po-litiques sociales poursuivies par laCommunauté, voir par exemple Ko-walsky, 2000.

(43) En 1987, le budget était de 6 586 000 écus, soit une diminutiond’environ 10 %.

(44) Sur les rencontres qui ont eu lieuà Bruxelles, voir la documentationexistante dans les lettres Guerra, parexemple Cedefop, 1987c

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tivités de recherche, du contrôle de la qua-lité et au prix d’une forte démotivation in-terne (...). Le moment est venu de rééqui-librer les choses, sinon nous risquons de de-venir une “très belle cage” vide de motiva-tions internes et incapable de faire face auxdéfis de 1992. Le Centre ressemble de plusen plus à un Cabinet ministériel, où tout lemonde peut être appelé à faire n’importequoi pour répondre à des contraintes po-litiques, plutôt qu’être une Agence euro-péenne spécialisée offrant des services derecherche et de développement de haut ni-veau» (Cedefop, 1988b). Il est difficile d’éta-blir si les affirmations de C. Politi se fon-daient sur des postulats valables, ou si ellesn’étaient que l’expression de conflits d’ordrepersonnel. Quoi qu’il en soit, au cours desannées suivantes, C. Politi garda son rôle ausein du Cedefop.

La chute du mur de Berlin, la mise en pla-ce des processus politiques et diplomatiquesqui allaient conduire à la signature du trai-té de Maastricht, l’accent renforcé sur l’ob-jectif de la cohésion économique et socia-le et, enfin, le lancement d’importants pro-grammes tels que Socrates, Petra, Leonardo,Phare, etc. semblèrent des éléments favo-rables pour l’activité du Cedefop. En 1989,la Commission créait une task force pour lesressources humaines, l’éducation, la forma-tion et la jeunesse. Dès le début, cette ins-tance tenait à établir des rapports étroits avecle Cedefop, afin d’utiliser les compétencesde ce dernier (Cedefop, 1990b). Si pour laCommission l’objectif premier était de s’ap-puyer sur l’expérience du Cedefop, celui-cisouhaitait à l’évidence contribuer concrè-tement à la prise de décision au sein de laCommunauté, et il semblait y parvenir aumoins partiellement. À ce propos, une no-te d’Ernst Piehl de janvier 1991, rédigée sui-te à une série de contacts qui avaient eu lieuà Bruxelles entre responsables du Centre etde la Commission, était significative. Ce do-cument soulignait l’engagement direct duCedefop dans les programmes commu-nautaires concernant la formation profes-sionnelle; le Centre était chargé notammentde l’action de sensibilisation des différentesinstitutions nationales sur les choix effectuéspar la Communauté dans ce domaine (Ce-defop, 1991b). Il faut noter, toutefois, quela Commission avait rappelé au Cedefop lanécessité de souligner sa «fonction d’assis-tance technique directe à la Commission»,en d’autres termes sa subordination aux choixde Bruxelles (Cedefop, 1990c). En outre, le

Centre était désormais un organisme conso-lidé dans le panorama des structures com-munautaires. En 1988, le budget du Centreaugmentait de 11 % par rapport à l’annéeprécédente, puis de 14 % en 1989, de 7 %environ en 1990 et de 16 % environ en 1991.Le Cedefop se concentrait sur ses activi-tés d’étude et de recherche, qui représen-taient en 1990 environ 44 % des dépensestotales, alors que 18 % environ étaient des-tinés aux publications et quelque 22 % auxtraductions. Cette tendance se confirmaiten 1991, ainsi qu’au cours des années sui-vantes (Cedefop, 1990a; 1991a; 1992).

Cependant, la réunification de l’Allemagneet le traité de Maastricht allaient avoir desconséquences radicales et imprévues pourle Cedefop. À l’occasion du Conseil euro-péen de Bruxelles en octobre 1993, la plusimportante instance européenne prenait ladécision de déplacer le siège du Centre. Eneffet, l’Allemagne devait accueillir la futureBanque centrale européenne, alors que laGrèce n’avait obtenu jusqu’alors aucune or-ganisation ou institution européenne sur sonterritoire. Ainsi, sur la base d’équilibrespolitiques évidents, le Conseil décida-t-il defaire transférer le Cedefop à Thessalonique.Cette décision inattendue apparaissait com-me un coup de tonnerre dans un ciel sereinpour le Centre et son personnel. Par ailleurs,à peine quelques mois plus tard s’achevaitle mandat d’Ernst Piehl, et il devenait doncnécessaire de nommer un nouveau Direc-teur, qui allait devoir se charger du transfertdu Centre dans des délais relativement brefs.Au printemps 1994, Johan van Rens, un lea-der syndical néerlandais, était nommé nou-veau Directeur du Centre et Stavros Stavrou,un chercheur grec de l’université de Thes-salonique, Directeur adjoint. Le transfert deBerlin à Thessalonique posa une série degraves problèmes: la nécessité de trouverun nouveau siège et, surtout, le refus denombreux membres du personnel de dé-ménager en Grèce. L’Union européenne ac-cepta d’adopter des mesures pour faciliterla mobilité des agents, et les membres dupersonnel du Cedefop qui n’acceptaient pasd’être transférés à Thessalonique se virentproposer des postes dans d’autres institu-tions européennes. Il est toutefois significa-tif de noter qu’en raison du transfert, ainsique de l’élargissement de l’Union européenneà trois nouveaux pays (Suède, Finlande etAutriche) à la même période, le Centre vitson budget augmenter de manière sen-sible (d’environ 48 %). En 1995, il dispo-

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sait de 16 millions et demi d’écus, et sonbudget se stabilisa au cours des années sui-vantes à environ 14 millions et demi; le per-sonnel connut lui aussi une croissance etpassa à 79 agents. L’équipe fut d’autre partradicalement renouvelée et, comme l’indiquele «Rapport annuel» 1998: «Depuis 1995, 14membres du personnel ont quitté le Centrepour différentes raisons; 26 membres du per-sonnel ont été transférés à la Commissioneuropéenne et à d’autres institutions de l’UE.Deux membres du personnel sont en congéde convenance personnelle» (Cedefop, 1999).En 1998, 75 % du personnel était en fonc-tion depuis moins de trois ans et 23 % étaitde nationalité grecque. Malgré ces change-ments profonds, le Cedefop s’efforça de re-venir rapidement au business as usual et,dans le «Rapport annuel» 1996, le nouveauDirecteur Johan van Rens et le Président duConseil d’administration Tom O’Dwyer pou-vaient affirmer avec une certaine fierté: «Ladiscussion et le débat sur le recentrage desactivités du Centre conformément à son en-gagement à “faire mieux” ont abouti à l’ap-probation par le Conseil d’administration despriorités à moyen terme, sur la base deslignes d’orientation indiquées par Mme É.Cresson, Membre de la Commission. Cespriorités à moyen terme ont posé les jalonsd’une future action ciblée visant à répondreefficacement aux besoins d’information,de recherche et de coopération au niveaueuropéen dans le domaine de la formationet de l’enseignement professionnels. Com-me le démontre le rapport ci-après, les ac-tivités du Centre au cours de 1996 reflètentcette transition, se concentrant sur trois prin-cipaux domaines d’activité: les tendancesdes qualifications, l’analyse des systèmes deformation professionnelle et le rôle du Centreen tant que vecteur d’information et de com-munication». (Cedefop, 1997). Le Cedefoptenait à l’évidence à renforcer ses relationsavec les divers organismes communautaires,et notamment la Commission, comme le rap-pellent tous les rapports annuels. C’est pourcette raison que le Cedefop participa acti-vement à une série d’initiatives de la Com-mission, et notamment de la Direction gé-nérale «Éducation et culture» (voir, par exemple,Cedefop, 1999, p. 15; Cedefop, 2000, p. 9).

En 1999, grâce également aux efforts des au-torités grecques, le Cedefop pouvait em-ménager dans un édifice moderne situé dansles faubourgs de Thessalonique. L’année sui-vante marqua son 25e anniversaire (Cede-fop, 2001). À côté de la Fondation euro-péenne pour l’amélioration des conditionsde vie et de travail à Dublin, le Cedefop re-présentait la première agence européenne.Né au milieu des années 1970 dans le cadrede l’attention croissante portée par la Com-munauté à la politique sociale, le Centreavait vécu une phase initiale contrastée, nonseulement en raison de certains problèmesd’organisation, mais aussi à cause des dif-ficultés inhérentes à la définition de sonpropre rôle et de ses relations avec les or-ganismes communautaires. Dans ce contex-te, la relation avec la Commission était cen-trale et, à plus d’une occasion, si Bruxellessemblait considérer le Cedefop comme unsimple «appendice» à utiliser pour des acti-vités d’étude et de recherche, le Centre par-vint à conquérir des marges d’autonomie;en effet, son intention était non seulementd’offrir ses propres compétences, mais aus-si de développer des relations autonomesavec les partenaires sociaux, les gouverne-ments nationaux et les organismes commu-nautaires, en particulier pour l’élaborationdes politiques de formation professionnel-le. Après le milieu des années 1980, le Ce-defop put profiter non seulement de l’élar-gissement des compétences de la Commu-nauté dans le domaine de la formation pro-fessionnelle et du lancement d’une série deprogrammes communautaires, mais égale-ment du lien toujours plus étroit qui s’étaitcréé entre formation professionnelle et édu-cation, ainsi que de la multiplication des ou-tils et besoins d’information, de rencontreet de coopération dans ces domaines en Eu-rope. Il faut mentionner par ailleurs que l’U-nion européenne tend à créer un nombrecroissant d’agences et que le Cedefop re-présente désormais un élément consolidédans le panorama de l’UE qui parvient, dansle cadre des limites institutionnelles prévues,à exercer une fonction autonome dans lespolitiques européennes «de formation et d’en-seignement professionnels», aux niveaux na-tional et, surtout, communautaire.

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Problématique, périodisation et sources

L’objet de cet article est de faire le point surdeux questions étroitement liées entre elles:

❑ comment s’est inséré le thème de la for-mation professionnelle dans l’idée d’espacesocial européen de François Mitterrand entre1981 et 1984;

❑ quels facteurs ont joué, sur cette mêmepériode, pour faire de la formation profes-sionnelle - en particulier celle des jeunes -une priorité de la politique sociale euro-péenne française?

Pourquoi choisir de se concentrer sur la pé-riode 1981-1984? Ce choix se justifie-t-il?

En France, l’année 1981 correspond à l’ar-rivée au pouvoir de la gauche. Après plusde vingt ans d’absence de la gestion du pays,cet événement constitue en lui-même unerupture politique majeure (Berstein, 1998).Quant à l’année 1984, bien que de moindreimportance, elle est aussi un moment derupture, puisque après une crise socialede grande ampleur - autour de la querellescolaire (Bertinotti, 2001) -, François Mitter-rand procède à un important changementde gouvernement. Le 17 juillet 1984, Lau-rent Fabius remplace Pierre Mauroy à l’hô-tel Matignon: une nouvelle page de l’histoirede la gauche s’ouvre alors.

Qu’en est-il pour la Communauté euro-péenne? Les années 1981-1984 correspon-

dent aux années de la crise «agrobudgétai-re», c’est-à-dire à la négociation débutée avecla communication, par la nouvelle Com-mission Thorn, en juin 1981, du rapport surle mandat du 30 mai (1) et à sa fin provisoire,trois ans plus tard, lors du Conseil européende Fontainebleau (2).

En ce qui concerne la politique sociale eu-ropéenne - à laquelle il faut évidemment rat-tacher la formation professionnelle -, ces an-nées coïncident avec les négociations concer-nant la réforme du Fonds social européen(FSE); 1984 étant la première année d’ap-plication, sous présidence française et ir-landaise, des nouvelles orientations adop-tées par les Dix. Rappelons par ailleurs quec’est en 1981 que les questions d’éducationet de formation professionnelle se trou-vent réunies sous l’autorité d’un seul et uniqueCommissaire (3) - en l’occurrence M. Ivor Ri-chard, qui exercera cette responsabilité jus-qu’en 1984. À cette date, la Communautéa donc réuni, dans un même portefeuille,les questions d’emploi, d’affaires sociales etl’ensemble des problèmes liés à l’éducation.

Pour parcourir ces trois années, quellessources avons-nous utilisées? En premierlieu, un grand nombre de documents pu-blics français et européens de l’époque,l’abondante littérature «grise» relative à cet-te période et à ces questions, enfin - et sur-tout - les archives françaises de la présidencede la République. Ces sources écrites ontété complétées par la réalisation d’entretiensavec les acteurs français de l’époque.

La place de la forma-tion professionnelledans l’idée d’espacesocial européen deFrançois Mitterrand(1981-1984)

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GeorgesSaunier

Chargé de mission àl'Institut François

Mitterrand. Enseigne l'Histoire des

relationsinternationales

contemporaines auxuniversités de Cergy-Pontoise et de Paris IPanthéon-Sorbonne

De 1981 à 1984, à l’époque dela crise budgétaire de la Com-munauté, une importante né-gociation se déroule entre lesDix à propos de la réformedu Fonds social européen. Aumême moment la gauche, me-née par François Mitterrand,arrive au pouvoir. Cette der-nière a, dans le domaine so-cial, un large programme àproposer à ses partenaires.François Mitterrand le résu-me sous le terme d’«espacesocial européen».Il s’agit de mettre en œuvre,en Europe, une relanceconcertée de l’activité éco-nomique et de faire de la ré-duction du temps de travailune priorité européenne.Confronté à l’hostilité desautres États membres, ce pro-jet d’espace social européena dû changer. Pour une lar-ge part, cette transformationva intégrer l’idée d’une for-mation professionnelle eu-ropéenne. Au final, aprèsplusieurs mois de négocia-tions, les Français devien-dront d’ardents défenseursdes projets de formation pro-fessionnelle.

(1) Bull. CE, 6-1981, 1.2.1.

(2) 18e Rapp. gén. CE, p. 22-23.

(3) 15e Rapp. gén. CE, 543, p. 228.

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1981-1984: un difficile contextecommunautaire

Le développement de la politique socialeeuropéenne, et donc des projets de forma-tion professionnelle, dépendent largementdu contexte communautaire. Or, la premiè-re moitié des années quatre-vingt est mar-quée par une profonde crise de la Com-munauté. Face aux défis qui se présententà elle - élargissement, crise économique,réformes multiples -, l’Europe doit faire fa-ce à un risque de banqueroute. Les ressourcespropres arrivent à épuisement, alors que pa-rallèlement la Grande-Bretagne de MargaretThatcher cherche - et parvient - à réduiresa contribution au budget. Cette situationconduit les Dix à étendre la rigueur budgé-taire qu’ils pratiquent chez eux à l’ensembledu budget communautaire. Des écono-mies qui concerneront la Politique agrico-le commune - qui représente alors prèsde 70 % des dépenses réalisées par Bruxelles-, mais aussi des économies sur les autrespolitiques de la CEE, donc sur la politiquesociale, donc sur la formation profession-nelle. Le contexte financier apparaît peu fa-vorable au renforcement, voire au déve-loppement, de nouvelles initiatives dans cesdomaines. Au contraire, la plupart des ré-flexions alors menées visent à la rationali-sation, c’est-à-dire à la définition de priori-tés dans les actions à mener.

C’est l’Europe des «trop petits pas», l’Europedes échecs successifs des Conseils européens- à l’image de celui d’Athènes en décembre1983. L’Europe des décisions sans cessereportées. L’Europe du chèque britanniqueet du fameux «I want my money back» deMme Thatcher. C’est aussi une Europe où lecouple franco-allemand connaît lui aussi sespropres vicissitudes: au couple Giscard-Sch-midt doit succéder le couple Mitterrand-Kohl.

La gauche française arrivant au pouvoir adonc devant elle un contexte communau-taire pour le moins agité. Néanmoins, c’està elle qu’incombe désormais la politique eu-ropéenne de la France et la gestion des dos-siers sociaux qui s’y rattachent.

Le projet socialiste et le conceptd’espace social européen

Si l’on en croit leurs textes programmatiquespubliés à la fin des années soixante-dix etau début des années quatre-vingt (Programmecommun de gouvernement, 1973; Manifes-

te..., 1978; Pour la France des années 80,1980), les Socialistes français ont un projetambitieux pour l’Europe. Au centre de ceprojet, la mise en œuvre d’un large volet so-cial.

Cette volonté est très marquée idéologi-quement. Pour les Socialistes français, pourl’entourage de François Mitterrand et pourFrançois Mitterrand lui-même, plus la Com-munauté européenne aura une dimensionsociale affirmée, plus le projet politique desSocialistes sera facilement applicable en Fran-ce. À bien des égards, cette attitude peut serésumer d’une phrase: «communautariser leprogramme commun» (Saunier, 2001). End’autres termes, porter au niveau européenl’essentiel des mesures du programme adop-té par le Parti socialiste et son allié com-muniste au début des années soixante-dix.

Concrètement, quelles sont ces propositionsdans le domaine du social? Trois priorités sedégagent nettement: mettre en œuvre unepolitique de relance concertée de l’activitééconomique inspirée du keynésianisme; pro-mouvoir à l’échelle européenne la réductiondu temps de travail à 35 heures; encouragerà tous les niveaux communautaires le dia-logue social, et notamment la reprise desconférences tripartites dont on parle beau-coup à cette époque - il s’agit d’améliorerles conditions de travail des salariés euro-péens grâce à la signature d’accords cadresentre les partenaires sociaux.

Ces trois points forment le cœur du projetd’Europe sociale de la gauche française aumoment où elle arrive au pouvoir. FrançoisMitterrand n’entend pas autre chose lorsqu’ilpropose à ses partenaires, en juin 1981,quelques jours seulement après son entréeau palais de l’Élysée, de mettre en œuvre ceque le président français appelle un «espa-ce social européen» (4).

Qu’en est-il de la formation professionnel-le dans cet espace social européen? En réa-lité, bien peu de chose.

Les textes programmatiques des Socialistesrestent pratiquement muets sur ce dossier.Préparant les premières élections législativeseuropéennes de 1979, le texte adopté par leParti socialiste ne comporte que quatre lignessur un sujet qui ne constitue en rien unepriorité (5). Quant au mémorandum françaisque Paris dépose sur la table de négocia-tions des Dix en octobre 1981 - bien qu’il

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(4) Archives nationales, 5AG4-2231:Résumé écrit de l’intervention de M.Delors au cours du Conseil conjoint«Ecofin-Social» du 11 juin 1981, 11juin 1981; Archives nationales, 5AG4-2231: Tex-te non officiel de l’intervention deM. Auroux au Conseil «Ecofin-Socialdu 11 juin 1981, 11 juin 1981; Archives nationales, AA64-12581:Conférence de presse de M. Fran-çois Mitterrand, président de la Ré-publique française, à l’issue du Con-seil européen de Luxembourg, pré-sidence de la République, servicede presse, 30 juin 1981; Bull. CE. 6-1981, 1.1.5.

(5) «L’extension à tous les travailleurseuropéens des possibilités de for-mation professionnelle, lorsque ce-la est nécessaire à la poursuite deleur activité et en particulier pourleur promotion» (Manifeste socialis-te pour l’élection européenne, 1978,p. 4).

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se veuille très concret -, il ne comporte quepeu de références à la formation profes-sionnelle. À peine six lignes alors que la par-tie relative à la politique sociale en comporteprès de quatre-vingts. Sur ces six lignes, ilressort que l’effort doit être porté sur les chô-meurs de longue durée et la formation auxnouvelles technologies (6). Ce dernier point,comme on va le voir, a toutefois son im-portance.

Néanmoins, si elle est à peu près absentedu discours européen, la thématique de laformation professionnelle est en revanchetrès présente dans les propositions socia-listes sur le plan intérieur et dans le domai-ne de l’éducation nationale. C’est ainsi quele Plan socialiste pour l’éducation nationa-le (Mitterand, 1978), adopté en 1978, fait dela formation professionnelle un enjeu ma-jeur de la grande réforme de l’éducation na-tionale que la gauche appelle de ses vœux.Face à une situation du marché de l’emploiqui se détériore, ce texte assigne à la for-mation professionnelle un certain nombrede missions: assurer la maîtrise des nouvellestechnologies; rendre les dépenses de l’Étatactives et non passives (mieux vaut payerplus cher la reconversion réussie d’un tra-vailleur que de verser des primes pour lechômage); enfin, permettre à chaque jeunede mieux s’insérer dans la vie active. Cesorientations ont leur importance puisqu’onles retrouvera plus tard au niveau européen.

La gauche française est de longue date at-tentive aux questions d’éducation. Nombrede ses militants, de ses députés, sont en-seignants. L’opposition au gouvernement deFrançois Mitterrand aura d’ailleurs beau jeude dénoncer la «République des professeurs».Toutefois, malgré cet intérêt marqué pour laformation professionnelle, l’école resteaux yeux des Socialistes du début des an-nées quatre-vingt le creuset dans lequel seforment en priorité le citoyen et accessoi-rement le travailleur. C’est donc avec suspi-cion que la formation professionnelle estconsidérée: envoyer des élèves ou des étu-diants en stage à l’issue de leur formation- voire pendant leur formation -, c’est-à-di-re faire entrer l’entreprise dans l’école, n’estpas quelque chose de naturel pour la gauchefrançaise. Cette crainte explique en partie ladistinction typiquement hexagonale entre«formation professionnelle» et «enseignementprofessionnel», c’est-à-dire entre un ensei-gnement à destination des travailleurs (for-mation continue) et un enseignement de ty-

pe professionnel à destination des élèves etétudiants (formation initiale).

Évolution du projet: vers la priorité àla formation professionnelle desjeunes

Relance économique, 35 heures, dialoguesocial: telles sont les trois priorités des né-gociateurs français et les principaux thèmesdu discours socialiste communautaire à l’été1981. Ce n’est que très rarement que la ques-tion de la formation professionnelle appa-raît en tant que telle. En fait, le gouverne-ment de la gauche n’aborde cette questionque par le biais des restructurations indus-trielles. Si l’on trouve quelques réflexions deJacques Attali (7) - le conseiller spécial au-près du président de la République, sortede boîte à idées élyséenne - sur le sujet, ilfaut remarquer que la formation profes-sionnelle est quasiment absente des docu-ments d’archives à cette époque.

Devant ce peu d’intérêt évident, commenten vient-on à une diplomatie française quiva faire de ce thème de la formation pro-fessionnelle l’une de ses positions centrales?

Trois facteurs permettent de l’expliquer.

En premier lieu, il faut le souligner, c’estl’échec de l’espace social européen tel queproposé initialement par François Mitterrand.Pour Margaret Thatcher ou pour Helmut Sch-midt, la réduction généralisée du temps detravail ou encore la relance concertée del’économie n’avait alors pas de sens; ces po-litiques pouvaient même être contre-pro-ductives à l’heure où la lutte contre l’infla-tion était prioritaire à leurs yeux. Quant audialogue social, il n’était pas non plus àl’ordre du jour: la Grande-Bretagne that-chérienne se lançait à la même époque dansune rude bataille contre les syndicats; quantau gouvernement allemand, il préférait queces négociations demeurent au niveau na-tional. Bref, dès l’automne 1981, le gou-vernement français constate l’échec et saitqu’il va devoir adapter son discours et re-voir ses positions. Cette adaptation aura deuxconséquences majeures:

❑ premièrement, les anciennes prioritéssont soit abandonnées, soit adaptées auxrapports de force politique du moment (Sau-nier, 2001). Ainsi, la réduction du tempsde travail devient-elle aménagement du tempsde travail. C’est-à-dire que l’abaissement de

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(6) Bull. CE. 11-1981, 3.5.1.

(7) Jacques Attali développe, à l’at-tention du président de la Répu-blique, divers projets concrets per-mettant d’approfondir l’intégrationeuropéenne. Un point est consacréà la mise en œuvre d’une politiqueindustrielle offensive et innovante -c’est-à-dire qui ne soit pas simple-ment conservatoire à l’image des ac-tions menées dans le cadre de la si-dérurgie européenne. Le conseillerspécial indique qu’une telle poli-tique devrait comporter un pro-gramme de formation profession-nelle orienté vers les nouvelles tech-nologies. Archives nationales, 5AG4-2231: Attali (Jacques), Conseil eu-ropéen du Luxembourg (29-30 juin1981), 29 juin 1981.

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la durée de travail hebdomadaire à 35 heuresn’est plus la priorité et que les Français ac-ceptent désormais de discuter d’autres me-sures - travail à temps partiel, préretraite,etc.;

❑ autre conséquence, les négociateurs fran-çais vont chercher à s’appuyer sur ce quiexiste déjà dans la Communauté, sur l’ac-quis communautaire, c’est-à-dire sur cequi a une chance d’être accepté à Dix. Dansle cas de la politique sociale, le dossier dela formation professionnelle s’impose avecforce. À cette époque, en effet, la Commis-sion gère déjà plusieurs projets pilotes dansce domaine et a l’habitude de traiter deces questions dans le cadre de la CECA (8).

L’échec de la «communautarisation» du pro-gramme commun de la gauche contribuedonc -paradoxalement - à la promotion dela formation professionnelle à l’échelle del’Europe, puisque le gouvernement français,réorientant ses priorités, choisit de défendrece dossier.

Le deuxième facteur explicatif est de natu-re franco-française. L’idée étant que l’actionde la Communauté européenne pourrait êtreun complément utile à l’indispensable effortde formation professionnelle que le gou-vernement décide alors d’accomplir - ou depoursuivre. Là aussi, il s’agit d’un change-ment notable. Limitée dans son ampleur etdans ses effets, la politique de relance éco-nomique (reflation) du gouvernement so-cialiste atteint très vite ses limites. Dès l’au-tomne 1981, il apparaît clairement que la sti-mulation de la demande, dans un marchéeuropéen ouvert, profite davantage aux pro-duits étrangers qu’aux produits français (9).Le résultat est évident: un creusement crois-sant du déficit de la balance commercialeentraînant un affaiblissement du franc et plu-sieurs dévaluations. Les autorités françaisesprennent alors la mesure du retard de l’ap-pareil industriel européen et en particulierfrançais, incapable de répondre à la stimu-lation de la demande, distancé par ses prin-cipaux concurrents que sont les États-Uniset le Japon. Ce retard est important dans dessecteurs économiques traditionnels - char-bonnage, sidérurgie, construction navale,textile, etc. - mais aussi dans le domaine desnouvelles technologies, de l’informatiqueà la robotique en passant par les biotech-nologies. Si dans le premier cas la solutionréside dans de difficiles restructurations in-dustrielles, dans le second, l’effort passe par

un investissement accru et surtout par unemeilleure formation de la main-d’œuvre.

Étroitement liée à ce constat sur l’état du tis-su industriel européen, l’aggravation du chô-mage, et en particulier du chômage desjeunes (10), en dépit des mesures macroé-conomiques prises par le gouvernement so-cialiste, entraîne elle aussi une prise deconscience. La crise n’est pas conjonctu-relle. Elle est structurelle.

Ce double constat - chômage des jeunes;nécessaire modernisation de l’appareil pro-ductif français - conduit le gouvernementà renforcer et à développer les politiques deformation professionnelle nées dans les an-nées soixante-dix (Cedefop, 1999, p. 29 etsuiv.), en particulier au niveau des nouvellestechnologies. Cette politique prend plusieursformes:

❑ la création des missions locales en 1982- suite à la publication de l’important rap-port de Bertrand Schwartz (11) - dont l’ob-jectif était de mieux informer les jeunessur les dispositifs de formation profession-nelle à leur disposition (12);

❑ le plan informatique pour tous, lancé en1983, dont l’un des enjeux est de mettrechaque écolier français devant un ordina-teur pour faciliter son entrée dans la vie ac-tive, ainsi qu’un programme jeunes chômeurset informatique, adopté lui aussi en 1983;

❑ différents accords interprofessionnels etnotamment ceux de septembre 1982 et oc-tobre 1983. Le premier révisait le mode definancement de la formation professionnel-le, le second portait sur des mesures spé-cifiques de formation des jeunes en alter-nance - contrat de qualification, contratd’adaptation, exonérations de cotisations so-ciales, etc. Le tout donnant lieu en février1984 à l’adoption d’une importante loi cadrequi refondait l’ensemble du dispositif de for-mation professionnelle en France;

❑ enfin, le gouvernement socialiste prenaitdes mesures pour inciter à la multiplicationdes stages en entreprise. En trois ans, de1980 à 1983, on passait ainsi de quelquesmilliers de stages à près de cent mille. Unepetite révolution pour l’encadrement socia-liste de l’époque.

Avec cet ensemble de mesures, le gouver-nement se lançait dans un vaste plan d’ac-

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(8) Pierre Morel - conseiller auprèsde François Mitterrand pour les ques-tions communautaires - indique dansune note de novembre 1981 qu’ilfaut s’appuyer sur les documentspréparatoires de la Commission pourfaire entrer la relance de l’Europedans les faits, c’est-à-dire aborderdes discussions concrètes. Donc, sé-parer les projets à moyen et à longterme. L’espace social européen, queles autres partenaires refusent, nepeut être qu’un projet à long terme.En revanche, il est possible d’allerdans la bonne direction, tout en s’ap-puyant sur des projets à court ter-me. Pierre Morel évoque à ce pro-pos le soutien de l’emploi des jeunesqui passe, pour la Commission, parla formation professionnelle. Ar-chives nationales, 5AG4-2232: Mo-rel, Pierre. Préparation du Conseileuropéen de Londres (26-27 no-vembre): entretien avec monsieurThorn, présidence de la République,7 novembre 1981.

(9) Sur les aspects économiques dela politique des Socialistes français,on se reportera aux articles suivants:Asselain, J.-C., 2001 et Saunier, G.,2002.

(10) Entre 1978 et 1982, le nombredes chômeurs enregistrés dans laCEE a doublé. Le phénomène touched’abord les jeunes. En 1982, près de17 % des jeunes actifs français sontau chômage; le taux est de 40 %dans l’ensemble de la Communau-té à Dix.

(11) Ancien élève de l’école Poly-technique, ingénieur au corps desMines, Bertrand Schwartz fut char-gé par le Premier ministre, en mai1981, de la rédaction d’un rapportsur l’insertion sociale et profession-nelle des jeunes en difficulté. Ce rap-port servit de base à la plupart despolitiques d’insertion professionnelleau début des années quatre-vingt.

(12) Ordonnance n° 82-273 du 26mars 1982, relative aux mesures des-tinées à assurer aux jeunes de sei-ze à dix-huit ans une qualificationprofessionnelle et à faciliter leur in-sertion sociale. Disponible sur In-ternet: http://www.legislation.cnav . f r / tex tes/ord/TLR-ORD_82273_26031982.htm

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tions en faveur de la formation profession-nelle. En 1982 et 1983, François Mitterrandprononçait d’ailleurs plusieurs discours surce thème (13). L’objectif affiché était des plussimples: aucun jeune ne devait sortir du sys-tème scolaire sans une formation profes-sionnelle adéquate. Or, le point de vue del’équipe entourant François Mitterrand estque la Communauté européenne peut jouerun rôle dans ce domaine. Pierre Morel, leconseiller technique en charge des questionscommunautaires, rappelait ainsi que l’un desintérêts vitaux de la France était de s’appuyersur l’Europe pour moderniser l’industrie fran-çaise; une modernisation qui comportait se-lon lui le renforcement des politiques de for-mation professionnelle à l’échelle européenne(14). Encore fallait-il convaincre les autrespartenaires et adopter les règlements né-cessaires au niveau du FSE (15). L’Europe de-vait intervenir comme un levier et renforcerles politiques intérieures.

Le troisième et dernier facteur expliquant leglissement français en faveur de la forma-tion professionnelle découle largement duprécédent et se résume par la volonté affi-chée d’enrayer le «déclin» de l’industrie eu-ropéenne. Le gouvernement socialiste, tantdans ses discours que dans ses propositions,va en effet mettre en avant le retard struc-turel de l’économie du Vieux Continent parrapport à ses principaux concurrents. Un re-tard révélé dramatiquement par les chocspétroliers successifs et qui fait courir à l’Eu-rope le risque de manquer ce que d’aucunsappellent la troisième révolution industriel-le, celle de l’information. Paris propose alorsà ses partenaires d’agir de façon volontaris-te et de mettre en œuvre une audacieusepolitique industrielle commune (16). Une idéeque partagent la Commission et plusieursÉtats membres - en particulier l’Italie. Évi-demment, l’accent y est mis sur la formationprofessionnelle des jeunes, qui constituentla main-d’œuvre future d’une industrie eu-ropéenne modernisée:

«La course de vitesse qui s’engage met enjeu l’aptitude de notre système éducatif etde formation à s’adapter rapidement auxmutations technologiques et économiquesen cours.» (17)

Après l’aggiornamento politico-économiquequ’ils ont connu au début des années quatre-vingt, les Socialistes français ont claire-ment choisi le terrain où devait se dérou-ler cette course de vitesse. Ce sera l’Europe.

La négociation

Adaptation au rapport de force commu-nautaire, prise en compte des objectifs na-tionaux, volonté d’enrayer le déclin éco-nomique de l’Europe, ces trois facteurs pous-sent les Français à faire de la formation pro-fessionnelle l’un des points durs de leur pro-position pour la relance de l’intégration eu-ropéenne.

Comment les négociations allaient-elles sedérouler?

Au cours de l’hiver 1981-1982, les repré-sentants français entament des discussionsavec leur partenaire allemand. Ce dernier,s’il est réticent à l’idée de développer denouvelles politiques - qui risqueraient d’êtrecoûteuses -, se déclare prêt à étudier suc-cessivement les réformes du FSE et du Fondseuropéen de développement régional (FEDER)(18). C’est un premier pas. La France for-mule alors certaines propositions dans laperspective de ces réformes. La formationprofessionnelle et les nouvelles technolo-gies y figurent en bonne place (19). Si les pro-positions françaises recueillent dans un pre-mier temps l’accord de la Commission (20),cette dernière tarde cependant à formulerdes propositions concrètes. Ce n’est qu’àl’automne 1982 que Bruxelles publiera unepremière série de mesures, dont quelques-unes très audacieuses (21).

Ce retard explique peut-être que le premieraccord politique d’importance intervienned’abord directement entre les Dix lors d’unConseil européen, à Bruxelles, en mars 1982.Les chefs d’État ou de gouvernement s’y en-gagent en effet à donner à chaque jeune,dans un délai de cinq ans, une formationprofessionnelle adaptée aux nouvelles condi-tions du marché du travail (22). Néanmoins,malgré cette impulsion politique au plus hautniveau, il faudra encore attendre un an pourque cet engagement se traduise par des dé-cisions concrètes vis-à-vis du FSE. C’estqu’entre temps est venu se greffer sur cedossier l’épineux problème budgétaire dontl’équation est des plus simples: devant la cri-se des ressources propres que traverse alorsla Communauté, comment mettre en œuvrede nouvelles politiques? Comment, alors quel’on cherche par tous les moyens à limiterle budget européen, mettre en œuvre unepolitique sociale communautaire d’enver-gure? C’est sur cette base que s’engagent lesnégociations au sein du Coreper et du Con-

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(13) 25 octobre 1982, Discours auConseil international pour l’éduca-tion des adultes. Disponible sur In-ternet: http://www.discours-mitter-rand.org/ rep_file/821025.htm [le11.5.2004]; 14 novembre 1984, Rencontre surl’insertion sociale et professionnel-le des jeunes. Disponible sur In-ternet: http://www.discours-mitter-rand.org/rep_file/831114.htm [le11.5.2004]. Dans ces discours, l’Europe n’est pascomplètement absente. Ainsi, le25 octobre 1982, François Mitteranddéclare: «Je souhaite que l’action dela France [dans le domaine de la for-mation des femmes et des hommes]et de quelques autres s’intègre dansune action à l’échelle de l’Europecommunautaire.»

(14) Archives nationales, 5AG4-21PM:«Intérêts vitaux» de la France en ma-tière européenne, 6 juin 1983.

(15) Fin 1982, une note du Secréta-riat général du comité interministé-riel - organisme français chargé dela coordination ministérielle dans ledomaine communautaire - résumeparfaitement l’attitude française àcet égard. Elle rappelle que la prio-rité donnée à la formation profes-sionnelle est partagée par plusieursÉtats membres qui, comme la Fran-ce, adhèrent à l’objectif de donnerà chaque jeune entrant sur le mar-ché du travail une formation pro-fessionnelle ou une première ex-périence de travail. Priorité qui de-vrait être soutenue par le Fonds so-cial européen, dont les statuts de-vraient être modifiés et adaptés àcette nouvelle mission et les res-sources partiellement redéployées.Archives nationales, 5AG4-2236: Ac-tion en faveur de l’emploi des jeunes,SGCI, 24 novembre 1982.

(16) Archives nationales, 5AG4-24PM:Une nouvelle étape pour l’Europe:un espace de l’industrie et de la re-cherche, 12 septembre 1983.

(17) Archives nationales, 5AG4-27PM:Espace social européen (Schémad’intervention: Matignon), 23 juin1984.

(18) Archives nationales, 5AG4-2233:Delors, Jacques, Tentative de défi-nition d’une position commune fran-co-allemande sur les problèmes eu-ropéens, ministère de l’économie etdes finances, le ministre, 29 octobre1981; Archives nationales, 5AG4-2233: Compte rendu des conversa-tions franco-allemandes du 4 no-vembre 1981, ministère de l’écono-mie et des finances, dir. du Trésor -serv. des affaires internationales -sous-dir. des affaires multilatérales,4 novembre 1981.(19) Archives nationales, 5AG4-2232:Réforme du règlement du Fonds so-cial européen, SGCI, Secrétariat gé-néral, 13 novembre 1981.

(20) Archives nationales, 5AG4-2391:

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seil des ministres. La «machine européen-ne à produire des compromis» ne tardepas à lier entre elles les réformes du FSEet du FEDER. Finalement, un compromis in-tervient entre Paris et Bonn, qui exerce alorsla présidence de la Communauté (23). La Fran-ce accepte d’abandonner la gestion par quo-tas du FEDER, mais obtient en échange quele FSE ne soit pas régionalisé et que sesinterventions soient concentrées sur un ob-jectif plutôt que sur une zone. C’est ce com-promis qui permit au Conseil des ministresde juin 1983 d’aboutir à un premier accord,confirmé en octobre 1983, après la procé-dure de concertation avec le Parlementeuropéen (24). La première réforme d’en-vergure du FSE venait d’intervenir, aux termesde laquelle près de 75 % des moyens duFonds se trouvaient concentrés sur trois ac-tions types en faveur des jeunes chômeurset notamment:

❑ l’éducation aux technologies nouvelles;

❑ l’utilisation des technologies nouvellesdans la formation professionnelle;

❑ le financement d’actions spécifiques enfaveur de l’insertion professionnelle desjeunes.

Ainsi, tout en respectant une certaine disci-pline budgétaire - l’accord ne prévoyait enaucun cas une augmentation importante duFonds -, la concentration des ressources duFSE sur la formation professionnelle allaitdans le sens des demandes françaises. Pa-ris, qui allait immédiatement solliciter le FSEpour appuyer certaines missions d’insertionprofessionnelle des jeunes sur le territoirenational, voyait dans cet accord un premierpas - certes timide - vers la constitution d’unvéritable espace social européen, c’est-à-di-re d’une Europe capable d’appuyer les po-litiques sociales des États membres, définiesen commun.

Si l’on peut parler à propos de cette négo-ciation d’une certaine réussite française, dansla mesure où Paris aura réussi à faire relayercertaines de ses priorités au niveau euro-péen, on peut aussi relever, a contrario, quele débat européen a influencé la gauche fran-çaise. Ce constat, vrai dans de nombreuxdomaines, s’applique aussi dans le cadre dela formation professionnelle et du social. Unbon «marqueur» témoin de cette évolutionréside dans le texte programmatique publiépar le Parti socialiste lors des élections eu-

ropéennes de 1984. Contrairement au do-cument publié en 1978, la place de la for-mation professionnelle y est beaucoup plusimportante (Manifeste..., 1984).

Dès 1984, le FSE se consacrait entièrementà ses nouvelles priorités, confirmant en ce-la une orientation entamée depuis quelquesannées.

Conclusions

Souhaitant le développement d’une ambi-tieuse politique sociale communautaire, lesSocialistes français du début des annéesquatre-vingt ont rapidement perçu la for-mation professionnelle, pourtant éloignéede leur préoccupation initiale, comme unenécessité incontournable. On pourrait d’ailleursfaire ce constat dans d’autres domaines trèsproches, à l’égard de la reconnaissance mu-tuelle des diplômes notamment.

Que peut-on conclure de ces évolutions dansle cadre d’une histoire plus large de la for-mation professionnelle, à l’échelle de l’Eu-rope?

Reprenant la distinction établie par le pro-fesseur Wolf-Dietrich Greinert entre lesdifférents types de systèmes de formationprofessionnelle en œuvre sur le Vieux Con-tinent (Greinert, 2003 et 2004), on voit clai-rement, avec l’exemple français ci-dessusprésenté, où l’on se situe. Ici s’appliqueun modèle normatif dans lequel l’État joueun rôle régulateur et d’impulsion non contes-té - en dehors, peut-être, du cas de la for-mation professionnelle agricole. Remarquonsque l’existence de modèles de formationprofessionnelle alternatifs n’intervient ap-paremment pas dans le processus de déci-sion communautaire du côté français. PourParis, si l’objectif de formation profession-nelle mérite d’être commun, son applicationreste bien du ressort des États membres, mê-me si l’échange d’«idées» entre profession-nels de différents pays peut être recherché.

Apparemment, le cadre normatif reste doncinsuffisant pour expliquer certaines évolu-tions communautaires, puisque plusieursÉtats membres n’en tiennent pas directementcompte au moment d’établir leurs positions- et bien que cela puisse changer au coursde la négociation. En revanche, si l’on seconcentre - comme nous l’avons fait danscet article - sur l’étude du processus dedécision, la notion d’«horizon d’attente»

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La situation économique et socialedans la Communauté (Communica-tion de la Commission au Conseileuropéen de Bruxelles, les 29 et 30mars 1982), CEE, Commission, 22mars 1982.

(21) Notamment l’idée d’une garan-tie sociale à l’embauche des jeunes.Archives nationales, 5AG4-2236: Vo-let social de la session conjointe duConseil (15 et 16 novembre 1982),24 novembre 1982.

(22) Bull. CE 3-1982, 1.3.5.

(23) Archives nationales, 5AG4-21PM:Compte rendu succinct du Conseil«Affaires sociales» du 2 juin 1983 -Réforme du Fonds social européen(FSE), ministère de l’économie etdes finances, dir. du Trésor - serv.des affaires internationales - sous-dir. des affaires multilatérales, 3 juin1983.

(24) 17e Rapp. gén., 305, p. 142.

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paraît plus opératoire. C’est qu’au-delà demodèles de formation nécessairement dis-tincts, les Dix - aujourd’hui les Vingt-cinq- parviennent à s’imposer des objectifs etdes moyens collectifs. Ces petits miraclesquotidiens de l’Europe - pour reprendre l’ex-pression d’une journaliste américaine - pour-raient surprendre (Pond, 1990). En réalité,l’explication réside dans l’examen du couplediversité-nécessité. Alors qu’on pourrait lacroire irrémédiablement problématique, la«diversité» européenne s’efface - sans pourautant disparaître - devant la «nécessité».

Dans notre exemple, on voit bien commentles notions de «déclin» et de concurrence debloc à bloc, souvent sollicitées dans le cadrede la construction européenne, ont joué unrôle moteur dans la définition d’objectifs deformation professionnelle communs. Dansce domaine, comme dans d’autres, la capa-cité intégrative de l’Europe réside avant toutdans la définition d’intérêts communs. Laconvergence, et notamment la convergencedes systèmes éducatifs, n’en étant que laconséquence.

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Informations, étudescomparatives

Arbeitsbeziehungen in Mittelosteuropa:Transformation und Integration: die achtEU-Beitrittsländer im Vergleich / Heri-bert Kohl et Hans-Wolfgang Platzer.[Relations professionnelles en Europecentrale et orientale: transformation etintégration: comparaison des huit payscandidats]Baden-Baden: Nomos Verlags-Gesellschaft,2003, 326 p.ISBN 3-8329-0093-4

À partir d’enquêtes plurinationales menéessur une base analogue et d’auditions d’ex-perts des pays candidats, l’étude analyse latransformation des relations professionnelleset en dresse un constat d’actualité. Elle com-pare la législation du travail, ainsi que lespratiques aux niveaux sectoriel, national etde l’entreprise, dressant ainsi un tableau bientranché des relations professionnelles dansles pays d’Europe centrale et orientale. Si latransformation s’oriente sur l’Europe occi-dentale, elle n’en suit pas moins des voiesdifférentes en fonction des spécificités so-cio-culturelles. En même temps se dégagentdes caractéristiques structurelles révélatricesd’un modèle de relations professionnelles«typique des sociétés en transformation». Cemodèle est caractérisé par des déficits struc-turels spécifiques et par des formes nova-trices de participation au sein de l’entre-prise, ainsi que par la concertation et unepolitique de répartition inter-entreprises. Unecomparaison Est-Ouest des modèles fonda-mentaux et des tendances transnationalesdes relations professionnelles dans l’ancienneUE met en évidence les domaines essentielsd’action de la politique du travail et de lapolitique tarifaire dans l’Union élargie, demême que les défis auxquels le «modèle so-cial européen» se trouve maintenant confron-té. Heribert Kohl est conseiller et auteur in-dépendant et dirige le Bureau de publica-tions scientifiques et de consulting politique(BwP) à Erkrath. Hans-Wolfgang Platzer tra-vaille au département de sciences socialeset culturelles de l’Institut d’études supérieuresde Fulda.

Orientation professionnelle et politiquepublique: comment combler l’écart.Organisation de coopération et de dé-veloppement économiques, OCDEParis: OCDE, 2004, 160 p.92-64-10565-4

Les pays de l’OCDE attachent une impor-tance grandissante aux politiques d’appren-tissage tout au long de la vie et aux poli-tiques actives de l’emploi, en tant qu’ins-truments de la croissance économique et del’équité sociale. Des systèmes efficaces d’in-formation et d’orientation sont essentiels pourétayer la mise en œuvre de ces politiques ettous les citoyens doivent acquérir les com-pétences nécessaires pour gérer eux-mêmesleur évolution professionnelle. Cela étant, ungrand décalage existe entre les objectifs desdécideurs publics et les capacités des sys-tèmes nationaux d’orientation. L’accès auxservices est limité, surtout pour les adultes.Trop souvent, ces services ne donnent pasà leurs clients les moyens de gérer leur évo-lution professionnelle, mais se focalisent surles décisions à prendre dans l’immédiat. Lessystèmes de formation et de certification des-tinés à ceux qui dispensent ces services sontsouvent inadaptés et inappropriés. La coor-dination entre les principaux ministères com-pétents et les parties prenantes est peu dé-veloppée. La base de données est insuffi-sante pour permettre aux décideurs pu-blics de bien piloter ces services, les lacunesétant relatives aux coûts, aux avantages, auxcaractéristiques des clients, ou encore auxrésultats. De plus, les organismes assurantces services ne font pas suffisamment appelaux TIC, ni à d’autres dispositifs rentablespour satisfaire les besoins des clients avecplus de souplesse. Basée sur un examenconduit dans 14 pays de l’OCDE, cette pu-blication étudie les moyens qui pourraientéventuellement permettre de remédier audécalage entre les services d’orientation pro-fessionnelle et l’action gouvernementale. El-le préconise d’améliorer les mécanismesde coordination à l’échelle nationale, d’atta-cher une plus grande attention à la rechercheet à la collecte de données pour éclairer l’ac-tion des décideurs. Elle recommande égale-ment de renforcer et de spécialiser davanta-ge la formation des praticiens et de créer desorganismes d’orientation plus spécialisés pourassurer les services.

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À lire

Europe InternationalRubrique réalisée par

Anne Waniartdu servicedocumentation duCedefop, avec l’appuides membres du réseaudocumentaire

La rubrique «Choix de lec-tures» propose un repéragedes publications les plus si-gnificatives et récentes rela-tives à l’évolution de la for-mation et des qualificationsau niveau européen et inter-national. Privilégiant les ou-vrages comparatifs, elle si-gnale également des étudesnationales réalisées dans lecadre de programmes euro-péens et internationaux, desanalyses sur l’impact de l’ac-tion communautaire dans lesÉtats membres, ainsi que desétudes sur un pays vu par unregard extérieur. La section«Du côté des États membres»rassemble une sélection depublications nationales si-gnificatives.

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Completing the foundation for lifelonglearning: an OECD survey of upper se-condary schools.[Consolider l’apprentissage tout au longde la vie: une enquête de l’OCDE surles établissements d’enseignement se-condaire du second degré]Organisation de coopération et de déve-loppement économiques, OCDEParis: OCDE, 2004, 172 p.ISBN 92-64-10372-4

Les mutations économiques et sociales fontde l’éducation le principal facteur de la réus-site des individus et des nations. Dans lespays de l’OCDE, l’enseignement secondai-re du second degré constitue une étape char-nière essentielle pour la plupart des élèves.Les établissements d’enseignement secon-daire sont-ils à même de répondre aux exi-gences des sociétés modernes ? Quels sontles principaux obstacles que ces établisse-ments doivent surmonter pour préparer lesjeunes à leur vie d’adultes et les aider à réus-sir la transition, de plus en plus longue etcomplexe, entre la période de formation etl’entrée dans la vie active ? Ce rapport réunitpour la première fois des données compa-ratives au plan international sur ces ques-tions, transmises par les établissements sco-laires. L’ouvrage décrit les modes de gestionet de financement de ces établissements, leursapproches et difficultés pour s’assurer les ser-vices d’enseignants qualifiés, ainsi que leursefforts pour favoriser la promotion profes-sionnelle des enseignants. Le rapport com-pare également les politiques d’admission etd’accompagnement des élèves vers la vie ac-tive telles que les pratiquent les différentsétablissements. Le niveau d’intégration destechnologies de l’information et de la com-munication dans les processus pédagogiquesest également pris en compte. Le rapport estbasé sur l’enquête internationale de l’OCDEsur les établissements d’enseignement se-condaire du second degré, conduite en 2001dans les pays suivants: Belgique (Flandres),Corée, Danemark, Espagne, Finlande, Fran-ce, Hongrie, Irlande, Italie, Mexique, Nor-vège, Pays-Bas, Portugal, Suède, Suisse.

Die gestaltende Region: Fallstudien zumHandlungsfeld beruflicher Bildung inSpanien und Grossbritannien / Ute Lan-zendorf.[Politiques régionales: études de cas surla formation professionnelle en Espagneet au Royaume-Uni]

Baden-Baden: Nomos Verlags-Gesellschaft,2003, 456 p.(Gesellschaft und Bildung, 15)ISBN 3-8329-0016-0

Les instances régionales avaient naguèrepour mission soit de s’occuper des affairesde la région concernée, soit d’y exercerles fonctions étatiques. Aujourd’hui, l’Eu-rope découvre dans la région un niveau derésolution des problèmes de la société quiassocie ces deux rôles: la région, entitéauto-organisée, assume dans le cadre de pro-jets de régionalisation certaines tâches rele-vant de domaines d’action qui dans leur prin-cipe continuent de relever du niveau supra-régional. L’ouvrage prend pour exemple laformation professionnelle initiale pour me-ner une analyse des processus de régiona-lisation. Il commence par retracer la consti-tution de communautés autonomes en Es-pagne et l’institution de Conseils formationet entreprise (Training and Enterprise Coun-cils) en Grande-Bretagne. À partir d’étudesde cas, il met pour la première fois en évi-dence que des instances régionales d’un ty-pe nouveau sont à même de faire passerdans les projets de réforme de l’État centralles savoirs pratiques des acteurs locaux. Ils’agit là de constats propres à attirer l’atten-tion tant des décideurs politiques que desacteurs régionaux, de la recherche sur la for-mation, les aspects régionaux ou les poli-tiques, et de tous ceux qui s’intéressent auxquestions de l’agencement de la société.L’auteur travaille en tant que géographe dansle domaine de la recherche internationalesur la formation.

Education, training and labour marketoutcomes in Europe / Daniele Checchi,Claudio Lucifora.[Les performances de l’éducation, de laformation professionnelle et du marchéde l’emploi en Europe]London, Basingstoke: Palgrave Macmillan,2004, 240 p.ISBN 140392080X

Cet ouvrage renoue avec le débat tradition-nel sur les performances de l’éducation,de la formation professionnelle et du mar-ché de l’emploi, en y portant un regard neuf.Il se base sur des études empiriques, consa-crées en particulier à la situation en Italie etau Royaume-Uni. Il ressort des diverses contri-butions que la qualité de l’éducation est dif-ficilement mesurable au sein du marché édu-

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catif, tandis qu’elle n’est pas toujours clai-rement reconnue par les employeurs.

High skills: globalization, competitive-ness, and skill formation / Phillip Brown,Andy Green et Hugh Lauder.[Compétences de haut niveau: mondia-lisation, compétitivité et formation descompétences]Oxford: Oxford University Press, 2001,250 p.ISBN 0-19-924418-9

Cet ouvrage apporte une contribution ma-jeure aux débats actuels sur l’avenir de l’ac-quisition des compétences dans un contex-te caractérisé par la mondialisation de l’éco-nomie, les innovations technologiques ac-célérées et de fortes mutations dans les do-maines de l’éducation, de la formation et dumarché de l’emploi. Cette analyse holistiquede l’économie politique des compétencesde haut niveau représente une avancée théo-rique majeure dont les conséquences s’avè-reront déterminantes pour les stratégies desentreprises et l’action gouvernementale, aus-si bien en Europe qu’en Amérique du Nordou en Asie.

Institutional approaches to teacher edu-cation within higher Education in Eu-rope: current models and new develop-ments / Leland Conley Barrows (dir.).[Approches institutionnelles de la for-mation des professeurs de l’enseigne-ment supérieur en Europe: modèlesactuels et évolutions récentes]UNESCO - CEPES[Paris]: UNESCO, 2003, 343 p.(Studies on higher education)ISBN 92-9069-173-X

Cet ouvrage présente quatorze études na-tionales ainsi qu’une analyse comparative,fruit des travaux réalisés dans le cadre d’unprojet réunissant des experts soigneusementsélectionnés pour rédiger chaque chapitre,d’une part, et de deux rencontres organiséespar le projet, d’autre part. La première ré-union avait pour objectif d’examiner les lignesdirectrices proposées par l’UNESCO-CEPESpour la rédaction des études nationales, afinque la ligne éditoriale finale prenne en comp-te les propositions des participants. Lors dela deuxième rencontre, sous forme de sé-minaire, les auteurs ont présenté et com-menté leurs projets de contribution, puis

examiné le projet d’analyse comparative deleurs textes, avant d’en achever la rédactiondéfinitive. Cette publication constitue la plusimportante réalisation d’un projet consacréà la formation des enseignants. Elle meten évidence la plupart des facteurs com-muns déterminant la formation des ensei-gnants dans la région. Les innovations et lesnouvelles tendances orientant la conceptiondes modèles institutionnels de formation desenseignants sont ainsi identifiées. Des in-formations complémentaires sont consacréesaux politiques et aux lignes d’action com-munes en matière d’éducation et de forma-tion des enseignants, visant à améliorer lesperformances et le statut des enseignants età les aider à s’adapter aux divers change-ments que connaissent l’éducation en gé-néral et l’enseignement supérieur en parti-culier, notamment à la suite du «Processusde Bologne» dont les objectifs sont de créerd’ici à 2010 une aire européenne de l’en-seignement supérieur, d’intégrer les tech-nologies de l’information et de la commu-nication dans tous les secteurs d’activité etde mettre l’accent à long terme sur la for-mation continue et en cours d’emploi detous les enseignants.http://www.cepes.ro/publications/pdf/teacher.pdf

International review of curriculum andassessment frameworks: comparativetables and factual summaries: 2004 / Sha-ron O’Donnell.[Revue internationale des structures desprogrammes et des évaluations: tableauxcomparatifs et résumés factuels: 2004]National Foundation for Educational Re-search, NFERQualifications and Curriculum Authority,QCA12e éd. Slough: NFER, 2004, 51 p.

Cette étude fait partie d’une série d’étudesconduites dans le cadre d’un projet de l’INCA(International review of curriculum and as-sessment frameworks). Le rapport évalue lesrésultats de l’enseignement primaire dans les18 pays inclus dans la base de données del’INCA (Allemagne, Angleterre, Australie, Ca-nada, Corée, Espagne, États-Unis, France,Hongrie, Irlande, Italie, Japon, Nouvelle-Zé-lande, Pays-Bas, pays de Galles, Singapour,Suède et Suisse). Le rapport reprend les in-formations de la base de données de l’INCA,ainsi que les contributions orales présentéeslors d’un séminaire restreint réuni du 19 au

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21 février 2003. Après une section d’intro-duction, la deuxième partie résume les ten-dances mises en évidence lors de l’étude. Latroisième section décrit sommairement lespolitiques et l’offre éducative des 18 pays,en se basant sur un sondage thématiqueintitulé «Enseignement primaire: une pers-pective internationale», ainsi que sur les contri-butions et les documents fournis par les par-ticipants au séminaire et classés sous six ru-briques: contrôle; structure et organisation;programmes; évaluation, relevé et notifica-tion de la progression des élèves; méthodo-logies pédagogiques; matériels didactiqueset apprenants. Les informations concernantl’Irlande du Nord ne figurent pas dans le rap-port, en raison de la réforme en cours desprogrammes scolaires dans ce pays (pourplus de détails, voir http://www.ccea.org.uk/currreview.htm). La quatrième section re-prend les contributions présentées lors duséminaire international organisé dans le cadrede l’étude et reflète les points de vue desparticipants sur les principales priorités deleurs pays, les problèmes rencontrés dansles domaines précédemment évoqués et leurvision de l’avenir.http://www.inca.org.uk/pdf/comparative.pdf

Learners for life: student approaches tolearning: results from PISA 2000 / Cor-dula Artelt et al.[Apprenants à vie: comment les étudiantsabordent l’apprentissage: les résultatsde PISA 2000]Organisation de coopération et de déve-loppement économiques, OCDEParis: OCDE, 2003, 136 p. ISBN 92-64-10390-2

Comment les élèves se définissent-ils en tantqu’apprenants à l’âge où ils s’apprêtent àterminer leur éducation obligatoire? La ré-ponse est lourde de conséquences, non seu-lement parce que ceux d’entre eux qui ontde bonnes dispositions à apprendre ob-tiennent de meilleurs résultats scolaires, maisaussi parce que les jeunes adultes capablesde se fixer des objectifs et de gérer leur ap-prentissage sont mieux armés pour conti-nuer à étudier et devenir des apprenants àvie. Le Programme international pour le sui-vi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE,enquête trisannuelle sur les acquis des jeunesde 15 ans dans les pays membres de l’OCDE,dresse un tableau précieux de la manièredont les élèves abordent l’apprentissage etdécrit leurs performances dans le domaine

de la compréhension de l’écrit. Ce rapportanalyse les résultats de l’enquête, en met-tant l’accent sur la motivation des élèves,leur confiance en soi et les diverses straté-gies apprenantes auxquelles ils ont recours.En particulier, ce document s’attache à dé-crire l’ensemble des caractéristiques qui fontde l’élève un apprenant autonome et confianten ses capacités. Les résultats confirmentune forte corrélation entre les résultats sco-laires mesurables et la manière dont les élèvesabordent l’apprentissage. Par exemple, desélèves qui éprouvent un réel intérêt pour lalecture et se sentent capables de résoudredes problèmes qu’ils jugent difficiles, réus-siront probablement mieux que d’autres àl’école. Le rapport montre également l’étroi-te corrélation entre la volonté des élèves àmaîtriser leur apprentissage en auto-dirigeantleur progression vers un objectif personnelet leur degré de motivation et de confian-ce en eux-mêmes. Il en ressort que la ca-pacité d’apprendre, loin d’être une simplecompétence que l’on transmet, dépend dansune large mesure des attitudes positives quiauront été mobilisées. Le rapport fournit auxdécideurs publics une analyse subtile desprincipales caractéristiques des apprenantsdans chaque pays. Il met également en avantles différences d’attitude face à l’apprentis-sage selon les groupes, notamment en fonc-tion du sexe et du milieu social. Les résul-tats révèlent quelques pistes qui devraientpermettre aux systèmes éducatifs de mieuxcanaliser les efforts en direction des diffé-rents groupes d’élèves, afin que ces derniersdeviennent des apprenants plus efficaces.http://www.pisa.oecd.org/Docs/download/LearnersForLife.pdf

Lifelong learning in the global econo-my: challenges for developing countries/ Banque mondiale.[L’apprentissage tout au long de la viedans l’économie mondialisée: les défispour les pays en développement]Banque mondialeWashington D. C.: Banque mondiale, 2003,172 p.ISBN 9586824837

La mondialisation de l’économie basée surla connaissance est en passe de transformerles exigences du marché de l’emploi partoutdans le monde, avec une nouvelle pressionexercée sur les citoyens, dont la vie quoti-dienne mobilise désormais nombre deconnaissances et de compétences que le sys-

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tème éducatif formel ne permet pas à luiseul d’acquérir. Dans une économie baséesur la connaissance, l’apprentissage tout aulong de la vie (c’est-à-dire, de l’enfance àl’âge de la retraite) est l’éducation de l’ave-nir, tout aussi vitale pour les pays en déve-loppement ou en transition que pour lespays industrialisés. Cet ouvrage destiné auxdécideurs publics des pays en développe-ment retrace les principales difficultés et lesdéfis posés par la société basée sur la connais-sance en matière d’éducation et envisage lesmanières dont les systèmes d’apprentissagetout au long de la vie pourront impulser lacroissance. Les auteurs examinent le chan-gement de nature de l’apprentissage, ainsique la participation croissante du secteurprivé dans l’éducation et la formation au ni-veau mondial. Ils considèrent de manièredétaillée et concrète les options politiqueset financières qui s’offrent aux gouverne-ments désireux d’assurer des possibilitésd’apprentissage adaptées aux besoins descitoyens tout au long de leur vie.

Managing education for lifelong learning/ Júlia Sapsál (dir.).[Gestion de l’éducation pour l’appren-tissage tout au long de la vie]National Institute of Public EducationOCDE/ Séminaire Hongrie, Budapest, 2001Budapest: National Institute of Public Edu-cation, 2003

Cette publication présente les travaux d’unséminaire de deux jours organisé par le Centrepour la recherche et l’innovation dans l’édu-cation (CERI) de l’OCDE et le ministère hon-grois de l’éducation sur le thème de la ges-tion des écoles pour l’apprentissage tout aulong de la vie, organisé à Budapest en dé-cembre 2001. Parmi les participants figu-raient d’éminents spécialistes des politiquesinternationales de l’éducation, qui ont dis-cuté avec ardeur des questions liées à la ges-tion de l’éducation et à la gouvernance. Lesexperts de renommée internationale invitéspar la Direction de l’éducation de l’OCDEet par le ministère hongrois de l’éducationet les représentants internationaux et hon-grois des ministères de plusieurs pays membresde l’OCDE ont ainsi examiné et commentéles enjeux de la gestion des établissementsscolaires et de la gouvernance des systèmeséducatifs nationaux. Le séminaire compre-nait trois séances thématiques successives,au cours desquelles 23 experts internatio-naux et 23 experts hongrois ont donné 14

conférences. Le séminaire poursuivait troisobjectifs principaux: en premier lieu, contri-buer à diffuser sur le plan national et in-ternational l’analyse comparative des nou-velles approches en matière de gestion sco-laire réalisée par l’OCDE-CERI et replacer lagestion institutionnelle dans une perspecti-ve plus large de gouvernance des systèmes;en deuxième lieu, lancer une réflexion com-mune sur la gestion de l’éducation et sonrôle pour réaliser les priorités essentiellesdes pays de l’OCDE en matière d’éducation;en troisième lieu, faire connaître à la com-munauté internationale les initiatives hon-groises dans le domaine de la gestion del’éducation et susciter des commentaires àcet égard.

Review of career guidance policies in 11acceding and candidate countries: syn-thesis report: July 2003.[Bilan des politiques d’orientation pro-fessionnelle dans onze pays adhérentset candidats: rapport de synthèse, juillet2003]Sultana, Ronald G.; Zelloth, HelmutFondation européenne pour la formation,ETFLuxembourg: EUR-OP, 2002ISBN 92-9157-349-3;

La prestation de services d’orientation et d’in-formation professionnelles tout au long dela vie des citoyens constitue désormais unequestion cruciale de par le monde, à me-sure que les sociétés se préparent à rele-ver les défis posés par la transition vers unesociété basée sur la connaissance. C’est pour-quoi l’OCDE a entrepris un travail de re-cherche d’une portée sans précédent, qui acommencé par la diffusion d’un question-naire auprès de 14 pays afin d’obtenir desinformations de base sur l’état actuel des po-litiques en matière d’orientation profes-sionnelle. Ce même questionnaire a été adres-sé par le CEDEFOP auprès des autres Étatsmembres de l’Union européenne, tandis quel’ETF le diffusait parmi 11 pays adhérents etcandidats. La Banque mondiale a, quant àelle, conduit une enquête parallèle en fai-sant circuler le questionnaire auprès d’uncertain nombre de pays moyennement in-dustrialisés. Les organisations partenaires ef-fectueront ultérieurement une analyse thé-matique qui aboutira à la création de la ba-se de données internationale la plus com-plète jamais réalisée sur les politiques et lespratiques d’orientation professionnelle. Ce

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rapport de synthèse dresse l’état des lieuxde l’orientation et de l’information profes-sionnelles pratiquées aux niveaux tant dusystème éducatif que du marché de l’emploidans les pays suivants: Bulgarie, Chypre, Es-tonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Po-logne, Roumanie, Slovaquie et Slovénie. Lesétudes ont été rédigées par des experts dechacun de ces pays en suivant la structurede l’enquête de l’OCDE et en se basant surleurs propres connaissances du terrain, com-plétées le plus souvent par un cycle inten-sif de consultations auprès de partenairesclés. Cet exercice a pour objectif, avant tout,de rendre compte des évolutions les plusrécentes et significatives, ainsi que destendances, défis et problèmes essentiels,et de souligner les points forts et les fai-blesses des systèmes d’orientation profes-sionnelle nationaux et des politiques en lamatière, en présentant les données de ma-nière à faciliter l’analyse comparative. Ledeuxième objectif de ce rapport de syn-thèse est de favoriser la production d’éva-luations comparatives afin que les pays ayantparticipé à l’enquête puissent juger de leursactivités d’orientation et d’information pro-fessionnelles par rapport aux prestationsfournies dans d’autres pays comparables.http://www.etf.eu.int/WebSite.nsf/0/C63B14262A11C92CC1256DB100455C70/$FILE/ENL-Career+guidance-0703_EN.pdf

Student engagement at school: a senseof belonging and participation: resultsfrom PISA 2000 / Jon Douglas Willms.[L’engagement des élèves à l’école: sen-timent d’appartenance et participation:résultats de PISA 2000]

Organisation de coopération et de déve-loppement économiques, OCDEParis: OCDE, 2003, 84 p.ISBN 92-64-01892-1

Quelle est la gravité de la désaffection desélèves à l’égard de l’école dans les différentssystèmes scolaires ? Quelles politiques etquelles mesures sont-elles le plus à mêmede renforcer le sentiment d’appartenance etla participation des jeunes à l’école ? Cesquestions sont au cœur des préoccupationsdes éducateurs dans bien des pays, non seu-lement en raison de la corrélation observéeentre le niveau d’engagement des élèves àl’école et leurs résultats scolaires, maisaussi parce que l’engagement des élèves estun résultat valorisé en tant que tel. Le Pro-gramme international pour le suivi des ac-quis des élèves (PISA) de l’OCDE offre uncadre comparatif international permettantd’évaluer le niveau d’engagement des élèvesà l’âge où ils s’apprêtent à quitter l’ensei-gnement obligatoire. Les résultats de l’en-quête fournissent des indications non seu-lement sur les compétences des élèves entermes de littératie, mais aussi sur leurs at-titudes, leurs valeurs et leur milieu socio-économique d’origine, ainsi que sur lescaractéristiques pertinentes des établisse-ments scolaires. Les analyses soulignent lesfacteurs propres à l’école qui déterminentl’engagement des élèves et montrent que lapoursuite d’un meilleur engagement desélèves ne doit pas se faire au détriment deleurs performances scolaires.

La formation professionnelle continueen Europe: résultats de la deuxième en-quête européenne sur la formation pro-fessionnelle continue dans les entreprises.Commission européenne, Direction gé-nérale de l’éducation et de la cultureBruxelles: Commission européenne, 2003,137 p.

Cette publication présente des résultatsimportants de la deuxième enquête sur la

formation professionnelle continue dans lesentreprises (CVTS2), conduite en 2000/2001.La CVTS est la première et unique enquêtecommunautaire susceptible de fournir desdonnées comparables au plan européen surl’investissement des entreprises en matièrede ressources humaines. Elle est donc à cetitre l’un des principaux instruments dontdispose l’Union européenne pour définir desindicateurs dans le domaine de l’éducationet de la formation tout au long de la vie.

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Union européenne: politiques,programmes, acteurs

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http://europa.eu.int/comm/education/programmes/leonardo/new/leonardo2/cvts/cvts_fr.pdf

Cross-country statistical analysis of ac-ceding and candidate countries: synthesisof challenges in the fields of employ-ment and human resource development.[Analyse statistique transnationale despays adhérents et candidats: synthèse desenjeux dans le domaine de l’emploi et dudéveloppement des ressources humaines]Fondation européenne pour la formation,ETFTurin: ETF, 2004, 27 p.

Dans tous les pays adhérents ou candidats,le développement du capital humain est unpréalable pour que ces pays atteignent desniveaux de prestations et de réactivité au mar-ché de l’emploi comparables à ceux des Étatsmembres de l’UE, et ce dans l’un au moinsdes domaines d’intervention suivants: poli-tiques actives de l’emploi (principalement di-rigées aux chômeurs), renforcement des ca-pacités des services publics pour l’emploi,formation professionnelle continue (destravailleurs actifs), éducation et formation pro-fessionnelle initiale. Dans la plupart des paysétudiés, les besoins les plus impérieux (quine sont pas nécessairement les plus coûteux)concernent les mesures actives pour l’emploiet le renforcement concomitant des capaci-tés de l’administration publique en charge del’emploi. Toutefois, dans pratiquement tousles cas, les besoins les plus coûteux, et par-fois les plus urgents, concernent le renfor-cement des systèmes d’éducation et de FEP.Ces pays ont également un retard à comblerdans le domaine de la formation continuepar rapport aux niveaux européens.

European Union-supported educationalresearch: 1995-2003: briefing papers forpolicy makers / Angelos S. Agalianos.[La recherche pédagogique soutenue parl’Union européenne: 1995-2003: notespour les décideurs politiques]Commission européenne, Direction géné-rale de la rechercheLuxembourg: EUR-OP, 2004, 204 p.(Report, EUR 20791)ISBN 92-894-5770-8;Réf. catalogue KI-NA-20-791-EN-C

La recherche sur les enjeux de l’éducationen Europe fait partie intégrante du programme

de recherche en sciences sociales et hu-maines de l’Union européenne. Un largeéventail de problématiques sont abordées,notamment les enjeux à venir des politiquesde l’éducation et de la formation en Euro-pe; la dynamique de l’éducation et de l’em-ploi; les questions liées à la formation desenseignants; les problèmes de l’enseigne-ment supérieur; le recours aux TIC en tantqu’outils didactiques; les liens entre ap-prentissage et citoyenneté; le rôle de l’édu-cation face à l’exclusion sociale; les straté-gies d’apprentissage tout au long de la vie;le développement des compétences et l’ap-prentissage organisationnel; les pédagogiesinnovantes et l’amélioration des établisse-ments scolaires. Les résultats de la recherchedémontrent que dans les sociétés d’aujour-d’hui, soumises à de rapides transformationssociales, politiques et économiques, l’édu-cation et la formation sont inextricablementliées aux préoccupations relatives à la ci-toyenneté et à la participation démocratique,aux inégalités et à la justice sociale, à ladiversité culturelle et à la qualité de la vie.Ils soulignent, en outre, la nécessité quel’éducation et la formation soient prises encompte lors de l’élaboration des politiquesdu logement, de la santé, de la protectionsociale, de la jeunesse, de l’emploi et desmigrations.http://www.mennt.net/files/%7B6a0d18ed-346f-44f1-9053-050564f5e365%7D_european%20union%20supported%20educaitonal%20research%201995%20-%202003.pdf

Rapport sur une stratégie d’informationet de communication pour l’Union eu-ropéenne (2002/2205(INI)) / Parlementeuropéen - Commission de la culture, dela jeunesse, de l’éducation, des médiaset des sports.Bayona de Perogordo, Juan JoséParlement européenDocument de session, A5-0053/2003Luxembourg: Parlement européen, 2003, 31 p.Parlement européen, Bâtiment Schuman, Place de l’Europe, L-2929 Luxembourg, tél. (352) 430022597, fax (352) 430022457, URL: http://www.europarl.eu.int/

Le fossé entre les citoyens et les institutionseuropéennes pose à ces dernières un graveproblème. Pour le résoudre, l’Union euro-

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péenne devra donner davantage de poidset de vigueur à sa politique de communi-cation. À cet effet, il est aussi utile qu’im-portant de renforcer la coopération entre lesinstitutions européennes, tout comme il im-porte que les États membres contribuent ac-tivement au succès des grandes campagnesd’information sur l’Union. La politique eu-ropéenne de l’information devra combineravec bonheur, créativité et efficacité, la «pro-motion des valeurs communes» que sont ladémocratie, le pluralisme, la diversité cul-turelle et linguistique, la cohésion et la so-lidarité, et les avantages concrets découlantde l’appartenance à l’Union. http://libserver.cedefop.eu.int/vetelib/eu/leg/eprep/2003_0053_en.pdf

Rapport sur la proposition de décisiondu Parlement européen et du Conseil ar-rêtant un programme pluriannuel (2004-2006) pour l’intégration efficace des tech-nologies de l’information et de la com-munication (TIC) dans les systèmes d’édu-cation et de formation en Europe (Pro-gramme eLearning) (COM(2002) 751 -C5-0630/2002 - 2002/0303(COD)) / Par-lement européen - Commission de la cul-ture, de la jeunesse, de l’éducation, desmédias et des sports; Mauro, MarioParlement européenDocument de session, A5-0080/2003Luxembourg: Parlement européen, 2003, 30 p.Parlement européen, Bâtiment Schuman, Place de l’Europe, L-2929 Luxembourg, tél. (352) 430022597, fax (352) 430022457, URL: http://www.europarl.eu.int/

Le programme eLearning est un programmepluriannuel pour l’intégration effective destechnologies de l’information et de la com-munication (TIC) dans les systèmes d’édu-cation et de formation en Europe. Cette pro-position vise à faire approuver un programmede soutien financier. L’objectif global estd’améliorer la qualité et l’accessibilité dessystèmes européens d’éducation et de for-mation par le biais d’une intégration effec-tive des nouvelles technologies (e-learning),afin de soutenir et de compléter les ac-tions déjà entreprises par les États membresdans ce domaine.http://libserver.cedefop.eu.int/vetelib/eu/leg/eprep/2003_0080_en.pdf

Renforcement de la dimension locale dela stratégie européenne pour l’emploi:étude de faisabilité relative aux indica-teurs des niveaux local et régional ainsiqu’à l’économie sociale / Jacques Dahan.Commission européenne, Direction géné-rale pour l’emploi et les affaires sociales;Bruxelles: Commission européenne, 2004,110 p.

L’objectif de l’étude, achevée en 2004, étaitd’identifier l’existence de données fiables etcomparables permettant de mesurer les per-formances au niveau local en matière d’em-ploi et dans l’économie sociale, et de déve-lopper et proposer un panel d’indicateursquantitatifs et qualitatifs communs utilisablespar les acteurs concernés. Cette étude viseà contribuer à une meilleure prise de conscien-ce et à stimuler la discussion aux niveauxnational et sub-national sur l’utilisation desindicateurs et des données en matière dedéveloppement local de l’emploi. Elle ser-vira d’instrument méthodologique utilisé parles acteurs concernés aux niveaux national,régional et local.http://europa.eu.int/comm/employment_social/local_employment/publications/ees_local_fr.pdf

Les qualifications professionnelles dansle cadre du dialogue social: présentationdes résultats, conclusions finales et re-commandations / Esperanza Roqueroet al.Commission européenne, Direction géné-rale pour l’éducation et la cultureMadrid: Forcem, 2003, 45 p.

Les études réalisées jusqu’à présent pour dé-finir les nouveaux besoins en qualificationspar secteurs ne se sont guère intéressées auxnégociations en matière de qualifications,aux systèmes de classification des compé-tences professionnelles mis en place par lesconventions collectives ni, plus générale-ment, aux processus de négociation collec-tive au niveau des partenaires sociaux. Ceprojet de recherche est donc unique en cequ’il tente d’analyser et de reconstruire mi-nutieusement, par secteur d’activité et pardomaine de négociation, les difficultésconcrètes rencontrées par les acteurs de lanégociation collective, notamment celles quitouchent aux critères de qualification, à laformation continue, aux compétences, etc.Il s’agit donc d’illustrer, dans une approcheancrée sur les réalités du terrain, la situation

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actuelle aux niveaux national, régional etsectoriel, ainsi que les préoccupations et lesactivités des partenaires sociaux (par exemple,leurs critères de négociation, le «concept» deformation, etc.). L’étude entreprend une com-paraison sur le plan européen, considéréecomme un préalable pour élucider les dis-parités des qualifications d’un pays à l’autre

et entre différents secteurs. Ce projet se dé-marque par la volonté de se concentrersur les réalités du terrain afin de se rap-procher le plus possible des processus so-ciaux.http://vqt-dialogue.nuov.cz/vicenik/vqt-dialogue/studies/Final_report-VQT-czech.doc

AT AMS-Qualifikations-Barometer.[Baromètre AMS des qualifi-

cations]Arbeitsmarktservice Österreich, AMSVienne: AMS, 2003

Le baromètre AMS des qualifications est lepremier système autrichien global d’infor-mation en ligne sur les tendances des qua-lifications. Il s’adresse tant aux clients et auxagents du service de l’emploi AMS, aux jour-nalistes et responsables politiques et éco-nomiques, qu’à tous ceux qui sont en pas-se d’effectuer un choix sur leur avenir pro-fessionnel. L’abondance des données qu’ilcontient, son actualité et sa fonctionnalitéprévisionnelle, sans oublier la clarté de saprésentation, en font un instrument indis-pensable pour tous ceux qui, pour des rai-sons privées ou professionnelles, s’intéres-sent à l’évolution du marché du travail etdes besoins de qualifications. Le baromètreAMS des qualifications est structuré en troisniveaux: domaines professionnels, champsprofessionnels, professions. Il présente defaçon détaillée, aux niveaux des «domainesprofessionnels» et des «champs profession-nels», les tendances du marché du travail etdes qualifications, en tenant compte des par-ticularités régionales et aussi en effectuantpour la première fois des évaluations au ni-veau micro (celui des professions). Le ba-romètre AMS des qualifications comporteégalement un glossaire portant sur un bonmillier de qualifications. Des hyperliens versdes informations de fond («informations com-plémentaires»), vers quelque 700 profils pro-fessionnels détaillés et près de 500 indica-tions de sources complètent la présentationample et claire. L’évaluation des professionset des catégories professionnelles se basesur les avis d’experts et sur les résultats d’ana-lyses d’offres d’emplois, dont l’accès étaitjusqu’à présent fermé à un large public. Cesinformations sont présentées ici pour la pre-

mière fois en ligne de manière claire etdétaillée.http://www.ams.or.at/b_info/indexqb.htm

DK 10 år med PIU: ti eksempler pågod praksis / Lars Møller Bent-

sen [et al][Dix années de formation en entrepriseà l’étranger: dix exemples de bonnespratiques]Møller Bentsen, Lars CiriusCopenhague: Cirius, 2003, 40 p. ISBN 87-90021-88-6; Cirius, Fiolstræde 44, DK-1171 Copenhagen K, tél. (45-33) 957000, fax (45-33) 957001, E-mail: [email protected], URL: http://www.ciriusonline.dk

En 1992, le Parlement danois a entérinéun dispositif permettant aux élèves en for-mation professionnelle d’effectuer un stageà l’étranger dans le cadre de leur formationpratique (Praktik i Udlandet - PIU). Ce dis-positif visait à compenser la pénurie de placesde stagiaires dans les entreprises danoises,mais également à promouvoir la FEP en larendant plus attractive. Cette publication dé-crit les dix premières années de fonction-nement du dispositif et donne dix exemplesde bonnes pratiques observées aux niveauxtant des lycées professionnels que des en-treprises. En dix ans, le plan PIU a pris tou-te sa place parmi les efforts déployés pourinternationaliser le système de FEP au Da-nemark.http://www.ciriusonline.dk/download/PIU_ti_aar_2848.pdf

Almen voksenuddannelse 2003-2004: avu- om dansk, matematik og alle andre fag /red. af Kirsten Preisler og Iben Svensson.

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Du côté des États membres

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[Éducation générale des adultes 2003-2004: apprentissage des adultes, forma-tion continue, etc.]Preisler, Kirsten; Svensson, Iben Rådet forUddannelses- og Erhvervsvejledning - RUE14e éd.Copenhague: RUE, 2003, 26 p. ISBN 87-7773-442-4RUE, Vester Voldgade 123, DK-1552 Copenhague V, tél. (45-33) 955300, fax (45-33) 955349, E-mail: [email protected], URL: http://www.r-u-e.dk

Cette brochure décrit le plan danois pourl’éducation des adultes (almenvoksenud-dannelse - AVU). Le plan AVU vise à offriraux adultes la possibilité d’améliorer oude mettre à jour leur niveau de qualificationgénérale. Les cours sont structurés par dis-cipline et préparent à un examen dont le ni-veau est équivalent au brevet (folkeskole).Les horaires tiennent compte des contraintesdes participants (cours de jour ou du soir).Les programmes AVU sont assurés dans lescentres de formation pour adultes (voksen-uddannelsescentre - VUC). La brochure dé-crit en détail les matières enseignées dansle cadre du programme AVU.http://www.r-u-e.dk/avu/

EE Access to adult learning in Es-tonia / Talvi Märja.

[L’accès des adultes à la formation en Es-tonie]Märja, Talvi Apprentissage des adultes pour l’emploi etla citoyenneté: conférence internationale,Kaunas, 2003 Kaunas: VMU, 2003, 6 p.

Depuis son adhésion à l’UE en 2004, l’unedes priorités pour l’Estonie consiste à s’ap-proprier rapidement le nouveau modèle surl’éducation élaboré par la Commission eu-ropéenne, notamment pour ce qui concer-ne l’apprentissage tout au long de la vieen tant que nouvelle possibilité ouverte àtous; un meilleur accès à la formation, enparticulier pour les adultes; l’importance deconstruire une nouvelle aire apprenante. Leministre estonien de l’éducation a lancé leprocessus d’élaboration d’une stratégie pourl’apprentissage tout au long de la vie en in-vitant d’éminents spécialistes de divers do-maines à participer à la rédaction d’un livre

blanc sur l’apprentissage tout au long dela vie en Estonie. Afin de fournir à ce col-lectif des informations susceptibles de lesguider dans leur travail, diverses enquêtesont été réalisées pour réunir les donnéespertinentes. Cet article analyse les résultatsdes enquêtes sur la formation des adultes etexamine les possibilités et l’état d’avance-ment actuel de la construction d’une aired’apprentissage tout au long de la vie en Es-tonie. Date de la dernière consultation dusite: novembre 2003.http://www.vdu.lt/alearning2003/II%20 Dalis/Talvi%20Marja_en.doc

FI Towards closer European co-operation in vocational educa-

tion and training: the Leonardo da Vin-ci programme supporting the Copen-hagen Declaration: case Finland / PaulaRouhiainen et Sonja Valjus.[Pour une meilleure coopération euro-péenne dans le domaine de l’éducationet de la formation: le programme Leo-nardo da Vinci en appui à la déclarationde Copenhague: le cas de la Finlande]Helsinki: CIMO, 2004, 44 p.Centre for International Mobility, CIMO, Leo-nardo unit, URL: www.cimo.fi

Cette publication traite du programme Leo-nardo da Vinci et de sa contribution aux dis-cussions sur l’enseignement professionnel enEurope. En particulier, le rapport examine leprocessus dit de Copenhague, dont les ob-jectifs sont de renforcer la coopération dansle domaine de la formation professionnelle,d’améliorer l’attractivité de la formation et depromouvoir la mobilité. Le rapport résumeles résultats d’une enquête réalisée durantl’été 2003 pour identifier les projets Leonar-do soutenant le processus de Copenhague.http://europa.eu.int/comm/education/programmes/leonardo/new/leonardo2/studies/finland.pdf

FR Accord sur la formation: plu-sieurs partenaires sociaux sou-

lignent l’avancée du dialogue social / Phi-lippe Grandin. Inffo Flash, n° 622 (octobre 2003), p. 4Saint-Denis-La Plaine: Centre INFFO, 2003 ISSN 0397-3301

Lors des assises de la formation en septembre2003, la CGT-FO (Confédération générale

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du travail - Force ouvrière), la CFDT (Con-fédération française démocratique du tra-vail) et le MEDEF (Mouvement des entre-prises de France) ont souligné le caractèrenovateur de l’accord sur la formation pro-fessionnelle, en particulier le nouveau dis-positif intitulé «droit individuel à la forma-tion» (DIF), qui donne au salarié les moyensde devenir acteur de sa formation. Un en-cadré rappelle la position de la CGT qui adécidé de signer l’accord du 20 septembre2003.

Apprendre autrement au 3e millénaire:la cyberformation / Stéphane Héroult,Laurence Le Bars.Saint-Denis-La Plaine: Centre INFFO, 2003,372 p.(Dossier documentaire)ISBN 2-84821-014-1

Ces dernières années ont vu se développerde nouvelles pratiques de formation à dis-tance utilisant les technologies de l’informa-tion et de la communication. Quels que soientles termes utilisés: e-formation, e-learning,apprentissage électronique... ou cyberfor-mation, ces modes de formation font désor-mais partie du paysage de l’éducation et dela formation. La littérature très abondante surle sujet reflète bien la multiplicité et la di-versité des expériences et des pratiques, enévolution constante. Ce dossier documentai-re a pour ambition de faire le point sur lestravaux réalisés et en cours, et d’identifier lesprincipales sources d’information. Il contientprès de 900 références bibliographiques illus-trées par une trentaine de morceaux choisis(articles de presse spécialisée et extraits d’ou-vrages), une webographie d’une centaine desites ressources, la liste des revues spéciali-sées diffusées en ligne ou sur papier, ainsique les manifestations organisées autour dela formation ouverte et à distance (FOAD) etde la e-formation en 2003/2004.

DE The OECD-Projekt “The roleof qualifications systems in pro-

moting lifelong learning”: country report:Germany / Georg Hanf, Jochen Reuling.[OECD-Projekt «Rôle des systèmes de qua-lification dans la promotion de l’ap-prentissage tout au long de la vie»: rap-port national: Allemagne]BIBB; Bielefeld: W. Bertelsmann Verlag, 2004,104 p.ISBN 3-7639-1012-3

Le rapport allemand «OECD-Projekt» sur lerôle des systèmes de qualification dans lapromotion de l’apprentissage tout au longde la vie a été élaboré dans le cadre d’unprojet de l’OCDE sur ce thème. Les rapportspréparés par les pays membres participantsvisent à déterminer l’impact des systèmesde qualification nationaux sur les structureset la qualité de l’apprentissage tout au longde la vie et à décrire les actions de promo-tion engagées dans ce domaine dans chaquepays. La première partie décrit les princi-paux sous-systèmes de formation profes-sionnelle de niveau postobligatoire en Al-lemagne. L’influence de ces systèmes de qua-lification sur l’apprentissage est ensuite ana-lysée à la lumière des derniers travaux derecherche. La section suivante décrit et ana-lyse les principales réformes introduites cesdernières années dans les sous-systèmes deformation, ainsi que leurs effets sur les mé-canismes susceptibles de favoriser l’ap-prentissage tout au long de la vie. Enfin, ladernière section tente de mettre en lumiè-re, à partir de quelques exemples, les liensentre les systèmes de qualification et l’ap-prentissage, aux niveaux tant des prestatairesque des utilisateurs des programmes péda-gogiques et didactiques.

GR √È ÊÚÔÓÙÈÛÙ¤˜ Ù˘ Á˘ : ∏∞ÌÂÚÈηÓÈ΋ °ÂˆÚÁÈ΋ ™¯ÔÏ‹ ηÈ

Ë ∂ÏÏ¿‰· ÛÙÔÓ 20fi ·ÈÒÓ·. Stewards of the land: the American FarmSchool and Greece in the 20th Century/ Marder, Brenda L. [Les régisseurs de la terre: le Lycée agri-cole américain et la Grèce au XXe siècle]Macon: Mercer University Press, 2004, 496 p.ISBN 0-86554-8498

Une histoire du Lycée agricole américain ba-sé à Thessalonique.

IE Report of a discussion forum onthe implementation of the Co-

penhagen Declaration on Enhanced Eu-ropean Co-operation in Vocational Edu-cation and Training / National Qualifi-cations Authority of Ireland, Further Edu-cation and Training Awards Council. [Rapport sur le forum de discussionsconsacré à la mise en œuvre de la dé-claration de Copanhague pour unemeilleure coopération européenne dansle domaine de la formation et de l’en-seignement professionnels]

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Dublin: NQAI, 2004, 10 p. National Qualifications Authority, NQAI, 4th Floor, 6-9 Trinity Street, IRL-Dublin 2., tél. (353-1) 6127080, fax (353-1) 6127095, E-mail: [email protected], URL: http://www.nqai.ie/

Ce forum de discussion visait à informer lesacteurs de la formation et de l’enseignementprofessionnels en Irlande des dernières évo-lutions communautaires relatives à la miseen œuvre de la déclaration de Copenhagueet de leurs relations avec la situation irlan-daise. Le forum a été hébergé par le Conseilirlandais de certification chargé des qualifi-cations de l’enseignement postobligatoire(FETAC) et par l’Agence nationale irlandai-se pour les qualifications (NQAI). Les parti-cipants représentaient diverses entités œu-vrant dans le domaine de l’éducation et dela formation professionnelle: agences gou-vernementales, services ministériels, orga-nismes de certification, prestataires. Le fo-rum a reconnu que des progrès significatifsont été accomplis dans des domaines es-sentiels, tels que l’assurance qualité, la trans-parence et le transfert d’unités capitalisables.Un porte-parole du ministère a souligné quela lourdeur du processus de reconnaissanceconstitue le principal obstacle à la construc-tion d’une aire de la connaissance et d’unmarché de l’emploi européens, dans la me-sure où elle empêche la libre mobilité entrepays, secteurs, emplois et institutions. Le pro-cessus de mise en œuvre de la déclarationde Copenhague en Irlande est décrit en re-prenant les termes des différents groupes detravail et groupes techniques constitués à ceteffet, dont les travaux ont été présentés ausein de groupes de discussion spécifiques.Les travaux de ces groupes dans les domainesde l’assurance qualité, la capitalisation et letransfert d’unités et la transparence des qua-lifications y sont décrits en détail. Le rapportde la conférence présente en fin d’ouvrageune liste des cybersites pertinents. http://www.nqai.ie/copenhagenforum.pdf

MT Lifelong guidance and the Eu-ropean challenge: issues for

Malta / by Ronald G. Sultana.Sultana, Ronald G.[L’orientation tout au long de la vie et le dé-fi européen: les enjeux pour Malte]Malte: Government Printing Press, 2003, 144 p.ISBN 99932-666-0-4

Cet ouvrage dresse l’état des lieux de l’orien-tation professionnelle à Malte et la compa-re avec la situation d’autres pays européenset du monde, à partir d’une série de critèreset d’aspects servant à évaluer ce domainesur le plan international. Il décrit les ac-complissements actuels, mais également lesdéficits cruciaux en termes de prestation,ainsi que les défis restant à relever.

ES Derecho del trabajo y formación/ Mario Garmendia Arigón.

[Droit du travail et formation]Montevideo: Cinterfor, 2003, 179 p.(Herramientas para la transformación, 19)ISBN 92-9088-155-0

Cette étude est consacrée à la réglementa-tion de la formation professionnelle en gé-néral et plus particulièrement en Uruguay.Les analyses portent notamment sur les dif-férents types de contrat de travail, le pro-cessus de sélection, la réglementation de laformation professionnelle et de la formationinitiale, les normes salariales, les horaires detravail, les allocations chômage, les procé-dures de licenciement et la négociation col-lective.http://www.cinterfor.org.uy/public/spanish/region/ampro/cinterfor/publ/gar_dtra/index.htm

Trabajo, calificación y formación: com-prender el fenómeno de la formación/ Raquel de la Fuente Anuncibay. [Travail, qualifications et formation: àquoi sert la formation?] Burgos: Université de Burgos, 2002, 686 p. (Estudios y monografías, 22) ISBN 84-95211-60-2; Servicio de Publicaciones, Universidad de Burgos, Plaza de la Infanta doña Elena, s/n, 09001 Burgos

Cette monographie analyse de manièreapprofondie les nombreux problèmes quise posent en Espagne dans le domaine dif-ficile de la formation professionnelle. L’ou-vrage décrit d’abord le contexte socioéco-nomique expliquant les complexités du sys-tème espagnol de formation en ses multiplesvariantes. Il présente ensuite les résultatsd’une étude empirique sur les centres de for-mation, ainsi que sur des besoins et exi-gences des entreprises de Burgos. Pour fi-nir, ces résultats sont analysés et interprétés

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afin d’en tirer les enseignements et de défi-nir les aspects qu’il conviendra d’améliorerà l’avenir dans ce domaine.http://www.cinterfor.org.uy/public/spanish/region/ampro/cinterfor/publ/arte/leite/index.htm

UK The assessment of prior ex-periential learning in Europe:

radical challenges to the idea of a uni-versity / Pat Davies. [L’évaluation des acquis de l’expérienceen Europe: un défi radical lancé à la no-tion d’université]DfES Research Conference 2003, ‘Learningby comparison: International experiences ineducation and training’, Londres, 2003Sheffield: University of Sheffield, 2003, 10 p. University of Sheffield, Elmfield Lodge, Northumberland Road, UK-Sheffield S10 2TY, URL: http://www.shef.ac.uk/

Ce document tente de déterminer quellesseraient les conséquences pour les politiquespubliques britanniques de l’introduction auRoyaume-Uni d’un système d’évaluation desacquis de l’expérience (APEL) similaire à ce-lui que la France a récemment mis en pla-ce. La discussion porte spécifiquement sur

les conséquences pour l’enseignement su-périeur.

The UK education system: an interna-tional perspective / Dr. Anna Vignoles. [Le système éducatif britannique: uneperspective internationale]DfES Research Conference 2003, ‘Learningby comparison: International experiences ineducation and training’, Londres, 2003Londres: London School of Economics, 2003,10 p. London School of Economics and PoliticalScience,Houghton Street, UK-London WC2A 2AE, tél. (44-20) 74057686, URL: http://www.lse.ac.uk/

Ce document examine les principales ca-ractéristiques du système éducatif britan-nique et les compare avec ses principauxconcurrents sur le plan international. Les ca-ractéristiques clés du système britanniquesont comparées à d’autres systèmes, en Eu-rope et aux États-Unis. Ces particularités sontdéfinies et décrites, tant du point de vuequantitatif (performances en termes de ni-veaux de qualifications) que qualitatif (par-ticipation du secteur privé).

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Towards a history of vocationaleducation and training (VET) inEurope in a comparativeperspective

Proceedings of the firstinternational conference

October 2002, Florence

Volumes I + II

5153 EN

Cedefop Panorama series

N° de catalogue: TI-13-04-001-EN-C etTI-13-04-002-EN-C

Disponible sur demande auprès du Cedefop

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CEDEFOP

Centre européen pour le développement dela formation professionnellePO Box 22427GR-55102 Thessaloniki, GrèceTél. (30) 2310 49 00 79Fax (30) 2310 49 00 43M. Marc WillemChef de l’aire D - Information,communication et diffusionE-mail: [email protected] web: http://www.cedefop.eu.inthttp://www.trainingvillage.gr

FOREM

Office wallon de la Formationprofessionnelle et de l’EmploiBoulevard Tirou 104B-6000 Charleroi, BelgiqueTél. (32-71) 20 61 67Fax (32-71) 20 61 74Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Sigrid DieuE-mail: [email protected] web: http://www.leforem.be

NVF

Národní vzdelávací fondOpletalova 25CZ-11000 Praha 1, République tchèqueTél. (420-2) 24 50 05 40Fax (420-2) 24 50 05 02Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Vera CzesanaE-mail: [email protected] web: http://www.nvf.cz

CIRIUS

Center for Information og Rådgivning omInternational Uddannelses- ogSamarbejdsaktiviteterFiolstræde 44DK-1171 København K, DanemarkTél. (45-33) 95 70 00Fax (45-33) 95 70 01Coordinateur national du ReferNet:M. Sven-Erik PovelsenE-mail: [email protected] web: http://www.ciriusonline.dk

BIBB

Bundesinstitut für BerufsbildungRobert-Schumann-Platz 3D-53142 Bonn, AllemagneTél. (49-228) 107 16 02Fax (49-228) 107 29 74Coordinateur national du ReferNet:M. Georg HanfE-mail: [email protected] web: http://www.bibb.de

INNOVE

Elukestva Õppe Arendamise SihtasutusLiivalaia 2EE-10118 Tallinn, EstonieTél. (372) 69 98 080Fax (372) 69 98 081Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Evelin SillaE-mail: [email protected] web: http://www.innove.ee

OEEK

Organismos Epangelmatikis Ekpaidefsis kaiKartartisisEthnikis Antistasis 41 and KaramanoglouGR-14234 Athina, GrèceTél. (30) 210 77 22 08Fax (30) 210 2 71 49 44Coordinateur national du ReferNet:M. Argyros ProtopappasE-mail: [email protected] web: http://www.oeek.gr

INEM

Servicio Público de Empleo EstatalCondesa de Venadito 9E-28027 Madrid, EspagneTél. (34-91) 585 95 82Fax (34-91) 377 58 81Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme María Luz de la Cuevas TorresanoE-mail: [email protected] web: http://www.inem.es

Centre INFFO

Centre pour le développement del’information sur la formation permanente4, avenue du Stade de FranceFR-93218 Saint Denis de la Plaine Cedex,FranceTél. (33-1) 55 93 91 91Fax (33-1) 55 93 17 28Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Henriette PerkerE-mail: [email protected] web: http://www.centre-inffo.fr/

FÁS

Training and Employment AuthorityP.O. Box 45627-33 Upper Baggot StreetDublin 4IrlandeTél. (353-1) 607 05 36Fax (353-1) 607 06 34Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Jean WrigleyE-mail: [email protected] web: http://www.fas.ie

ISFOL

Istituto per lo sviluppo della formazioneprofessionale dei lavoratoriVia Morgagni 33I-00161 Roma, ItalieTél. (39-06) 44 59 01Fax (39-06) 44 29 18 71Coordinateur national du ReferNet:M. Colombo ContiE-mail: [email protected] web: http://www.isfol.it

Human Resource DevelopmentAuthority of Cyprus

2 Anavissou Street, StrovolosP.O. Box 25431CY-1392 NicosiaChypreTél. (357-22) 39 03 63Fax (357-22) 42 85 22Coordinateur national du ReferNet:M. George SiekkerisE-mail: [email protected] web: http://www.hrdauth.org.cy

Academic Information Centre

Valnu iela 2LV-1050 RigaLettonieTél. (371-7) 21 23 17Fax (371-7) 22 10 06Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Baiba RaminaE-mail: [email protected] web: http://www.aic.lv

PMMC

Methodological Centre for VocationalEducation and TrainingGelezinio Vilko g. 12LT-2600 Vilnius, LituanieTél. (370-5) 21 23 523Fax (370-5) 24 98 183Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Giedre BeleckieneE-mail: [email protected] web: http://www.pmmc.lt

Ministère de l’Éducation nationale et dela Formation professionnelle

Service de la Formation professionnelle 29, rue AldringenL-2926 LuxembourgLuxembourgTél. (352) 47 85 241Fax (352) 47 41 16Coordinateur national du ReferNet:M. Jos NoesenE-mail: [email protected] web: http://www.men.lu

OMAI

Oktatási Minisztérium AlapkezelöIgazgatóságaAjtosi Durer Sor 19-21HU-1146 BudapestHongrieTél. (36-1) 30 46 62 391Fax (36-1) 30 13 242Coordinateur national du ReferNet:M. Tamas Köpeczi-BoczE-mail: [email protected] web: http://www.nive.hu

Department of Further Studies andAdult Education

Ministeru ta’ l-Edukazzjoni Room 325,Education DivisionGreat Siege Road, MT-CMR02 Floriana, MalteTél. (356-21) 22 81 94Fax (356-21) 23 98 42Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Margaret M EllulE-mail: [email protected] web: http://www.education.gov.mt

CINOP

Centrum voor Innovatie van OpleidingenPettelaarpark - Postbus 1585NL-5200 BP ‘s-HertogenboschPays-BasTél. (31-73) 680 08 00Fax (31-73) 612 34 25Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Martine MaesE-mail: [email protected] web: http://www.cinop.nl

IBW

Institut für Bildungsforschung der WirtschaftRainergasse 38A-1050 WienAutricheTél. (43-1) 54 51 10Fax (43-1) 54 51 67 122Coordinateur national du ReferNet:M. Thomas MayrE-mail: [email protected] web: http://www.ibw.at

BKKK

Co-operation Fundul. Górnoslaska 4APL-00444 WarszawaPologneTél. (48-22) 62 53 937Fax (48-22) 62 52 805Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Kinga MotysiaE-mail: [email protected] web: http://www.cofund.org.pl

IQF

Institute for Quality in Training (formerINOFOR)Avenida Almirante Reis, n.º 72P-1150-020 LisboaPortugalTél. (351-21) 81 07 000Fax (351-21) 81 07 190Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Fernanda FerreiraE-mail: [email protected] web: http://www.inofor.pt

CP

Centra RS za poklicno izobrazevanjeOb Zeleznici 16SI-1000 LjubljanaSlovénieTél. (386-1) 58 64 216Fax (386-1) 54 22 045Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Mojca CekE-mail: [email protected] web: http://www.cpi.si

SIOV

State Institute of Vocational Education andTrainingCernysevskeho 27SK-85101 Bratislava, SlovaquieTél. (421-2) 62 41 06 78Fax (421-2) 62 41 06 78Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Dagmar JelinkovaE-mail: [email protected] web: http://www.siov.sk

OPH

OpetushallitusHakaniemenkatu 2P.O. Box 380FI-00531 HelsinkiFinlandeTél. (358-9) 77 47 71 24Fax (358-9) 77 47 78 65 or 69Coordinateur national du ReferNet:M. Matti KyröE-mail: [email protected] web: http://www.oph.fi

ReferNet – Réseau européen de référence et d’expertise

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FORMATION PROFESSIONNELLE NO 32 REVUE EUROPÉENNE

Cedefop

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Skolverket - Statens Skolverk

Kungsgatan 53S-10620 StockholmSuèdeTél. (46-8) 723 32 00Fax (46-8) 24 44 20Coordinateur national du ReferNet:M. Sten PetterssonE-mail: [email protected] web: http://www.skolverket.se

QCA

Qualifications and Curriculum Authority83 PiccadillyUK-W1J8QA LondonRoyaume-UniTél. (44-20) 75 09 55 55Fax (44-20) 75 09 66 66Coordinateur national du ReferNet:M. Tom LeneyE-mail: [email protected] web: http://www.qca.org.uk

EDUCATE Iceland

Grensásvegur 16aIS-108 ReykjavikIslandeTél. (354) 511 26 60Fax (354) 511 26 61Coordinateur national du ReferNet:M. Arnbjörn ÓlafssonE-mail: [email protected] web: http://www.mennt.is/

TI

Teknologisk InstituttAkersveien 24CN-0131 OsloNorvègeTél. (47-22) 86 50 00Fax (47-22) 20 42 62Coordinatrice nationale du ReferNet:Mme Signe EngliE-mail: [email protected] web: http://www.teknologisk.no

CINTERFOR/OIT

Centro interamericano de investigación ydocumentación sobre formación profesionalAvenida Uruguay 1238Casilla de correo 1761UY-11000 MontevideoUruguayTél. (598-2) 92 05 57Fax (598-2) 92 13 05Site web: http://www.cinterfor.org.uy

DG EAC

Commission européenneDirection générale de l’éducation et de lacultureRue de la Loi 200B-1049 BruxellesBelgiqueTél. (32-2) 299 42 08Fax (32-2) 295 78 30Site web: http://europa.eu.int

EFVET

European Forum of Technical andVocational Education and TrainingRue de la Concorde 60B-1050 BruxellesBelgiqueTél. (32-2) 51 10 740Fax (32-2) 51 10 756Site web: http://www.efvet.org

ETF

Fondation européenne pour la formationVilla GualinoViale Settimio Severo 65I-10133 TorinoItalieTél. (39-011) 630 22 22Fax (39-011) 630 22 00Site web: http://www.etf.eu.int

European Schoolnet

Rue de Trèves 61B-1000 BruxellesBelgiqueTél. (32-2) 790 75 75Fax (32-2) 790 75 85Site web: http://www.eun.org

EURYDICE

Le réseau d’information sur l’éducation enEuropeAvenue Louise 240B-1050 BruxellesBelgiqueTél. (32-2) 600 53 53Fax (32-2) 600 53 63Site web: http://www.eurydice.org

EVTA

AEFPAssociation européenne pour la formationprofessionnelleRue de la Loi 93-97B-1040 BruxellesBelgiqueTél. (32-2) 644 58 91Fax (32-2) 640 71 39Site web: http://www.evta.net

ILO

Bureau International du Travail4 Route des MorillonsCH-1211 Genève 22SuisseTél. (41-22) 799 69 59Fax (41-22) 799 76 50Site web: http://www.ilo.org

KRIVET

The Korean Research Institut for VocationalEducation and Training15-1 Ch’ongdam, 2-DongKR-135-102 Kangnam-gu, SeoulCoréeTél. (82-2) 34 44 62 30Fax (82-2) 34 85 50 07Site web: http://www.krivet.re.kr

NCVRVER

National Centre for Vocational EducationResearch Ltd.P.O. Box 8288AU-SA5000 Station ArcadeAustralieTél. (61-8) 82 30 84 00Fax (61-8) 82 12 34 36Site web: http://www.ncver.edu.au

OVTA

Overseas Vocational Training Association1-1 Hibino, 1 Chome, Mihama-kuJP-261-0021 Chiba-shiJaponTél. (81-43) 87 60 211Fax (81-43) 27 67 280Site web: http://www.ovta.or.jp

UNEVOC

International Centre for Technical andVocational Education and TrainingUnesco-UnevocGörresstr. 15D-53113 BonnAllemagneTél. (49-228) 243 37 12Fax (49-228) 243 37 77Site web: http://www.unevoc.unesco.org

Organisations associées

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No 29/2003

Recherche

ñ La qualité dans la formation électronique (Ulf Ehlers)

ñ Organisations apprenantes: entre prétendre et être (Christian Harteis)

ñ Formuler les politiques des établissements éducatifs grâce à la discussionélectronique entre enseignants et direction (P.M. van Oene, M. Mulder, A.E. Veldhuis-Diermanse, H.J.A. Biemans)

Analyse des politiques de formation professionnelle

ñ Expériences de création d’entreprises encadrées par des centres de formationprofessionnelle du Pays basque espagnol (Imanol Basterretxea, Ana González,Aitziber Olasolo, María Saiz, Lola Simón)

ñ Difficultés et perspectives de la FEP en Afrique – les expériences de Misereor(Thomas Gerhards)

ñ Stratégies du temps d’apprentissage dans les entreprises – études empiriques sur lamise en œuvre de la formation (Sabine Schmidt-Lauff)

ñ Jeter des ponts entre l’école et la vie active – Comment les écoles s’y prennent-ellespour créer des conditions propices à l’insertion des jeunes dans la vie adulte et lemonde du travail? (Marita Olsson)

No 30/2003

Éditorial

ñ 2003, année européenne des personnes handicapées (Martin Mulder, Éric FriesGuggenheim)

Dossier sur la «formation professionnelle des personnes à besoins éducatifs spéciaux»

ñ Dispositifs inclusifs de formation professionnelle des élèves handicapés (Annet DeVroey)

ñ Aider les jeunes défavorisés à obtenir une qualification générale ou professionnelledu secondaire supérieur (Karl Johan Skårbrevik, Randi Bergem, Finn Ove Båtevik)

ñ De nouveaux acteurs dans la formation des groupes sociaux défavorisés (CristinaMilagre, João Passeiro, Victor Almeida)

ñ Les élèves à besoins spéciaux dans la formation et l’enseignement professionnels enNorvège – Une étude longitudinale (Jon Olav Myklebust)

Recherche

ñ Les influences de l’Union européenne sur le système de formation professionnelle enAllemagne (Dieter Münk)

ñ Mesure des activités de formation (Gottfried Langer)

Derniers

numéros

en français

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FORMATION PROFESSIONNELLE NO 32 REVUE EUROPÉENNE

No 31/2004

Recherche

ñ La formation: une des stratégies dans le processus de création de valeur(Tahir Nisar)

ñ La scolarisation de la formation professionnelle des jeunes en France: l’Étatau service des entreprises (Vincent Troger)

ñ De la suréducation au sousapprentissage: état des lieux de la recherchesuédoise sur l’interaction entre éducation, travail et apprentissage (KennethAbrahamsson, Lena Abrahamsson, Jan Johansson)

Analyse des politiques de formation professionnelle

ñ Une nouvelle approche pédagogique et didactique dans l’enseignementprofessionnel aux Pays-Bas: des intérêts institutionnels aux ambitions desélèves (Elly de Bruijn)

ñ La formation des enseignants des écoles d’infirmiers. Contribution àl’évaluation des pratiques de formation (Maria de Lourdes MagalhãesOliveira)

Article d’opinion

ñ e-learning: université virtuelle en contexte! (Olaf Pollmann)

Prière de découper ou de recopier le bon de commande, de le glisser dans l’enveloppe à fenêtre et de l’envoyer au Cedefop

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FORMATION PROFESSIONNELLE NO 32 REVUE EUROPÉENNE

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Revue européenne«Formation professionnelle»Appel à contributions

La Revue européenne «Formation professionnelle» publie des articles rédigés par des cher-cheurs ou des spécialistes de la formation professionnelle et de l’emploi. Nous sommes enquête de contributions permettant à un vaste public de décideurs politiques, de chercheurset de praticiens à l’échelle internationale d’être informés des résultats des recherches dehaute qualité qui sont menées, notamment de la recherche comparative transnationale.

La Revue européenne est une publication indépendante, dont les articles sont soumis àune critique exigeante. Paraissant trois fois par an en espagnol, allemand, anglais, fran-çais et portugais, elle jouit d’une large diffusion à travers l’Europe, à la fois dans les Étatsmembres de l’Union européenne et au-delà de ses frontières.

La Revue est publiée par le Cedefop (Centre européen pour le développement de la for-mation professionnelle). Elle vise à contribuer au débat et à la réflexion sur l’évolution dela formation et de l’enseignement professionnels, notamment en l’inscrivant dans une pers-pective européenne. La Revue publie des articles qui présentent des idées nouvelles, ren-dent compte des résultats de la recherche ou exposent les expériences et pratiques na-tionales ou européennes. Elle publie également des prises de position et des réactions àpropos des questions liées à la formation et à l’enseignement professionnels.

Les articles proposés à la publication doivent être précis, tout en étant accessibles à unpublic large et varié. Ils doivent être suffisamment clairs pour être compris par des lec-teurs d’origines et de cultures différentes, qui ne sont pas nécessairement familiarisés avecles systèmes de formation et d’enseignement professionnels d’autres pays. En d’autrestermes, le lecteur devrait être en mesure de comprendre clairement le contexte et l’argu-mentation présentés, à la lumière de ses propres traditions et expériences.

Parallèlement à leur publication, les articles de la Revue paraissent sous la forme d’ex-traits sur Internet. Il est possible d’avoir un aperçu des numéros précédents à l’adresse sui-vante: http://www2.trainingvillage.gr/etv/publication/publications.asp?section=18.

Les auteurs des articles peuvent les rédiger soit en leur nom propre, soit en tant que re-présentants d’une organisation. La longueur des articles devrait être de 2000 à 4000mots. Ils peuvent être rédigés dans l’une des 26 langues suivantes: les 20 langues officiellesde l’Union européenne (espagnol, tchèque, danois, allemand, estonien, grec, anglais, fran-çais, italien, letton, lituanien, hongrois, maltais, néerlandais, polonais, portugais, slovaque,slovène, finnois, suédois), les langues des deux pays associés (islandais et norvégien), leslangues officielles des pays candidats (bulgare, croate, roumain, turc).

Les articles seront transmis au Cedefop par courrier électronique (annexe au format Word);ils seront accompagnés d’une biographie succincte de l’auteur indiquant ses fonctions ac-tuelles, d’un résumé pour le sommaire (45 mots au maximum), d’un résumé (entre 100 et150 mots) et de 6 mots clés en anglais non présents dans le titre et correspondant aux des-cripteurs du Thésaurus européen de la formation.

Tous les articles proposés seront examinés par le Comité de rédaction de la Revue, qui seréserve le droit de décider de leur publication et informera les auteurs de sa décision. Lesarticles publiés dans la Revue ne doivent pas nécessairement refléter le point de vue duCedefop. Au contraire, la Revue offre la possibilité de présenter différentes analyses et despositions variées, voire contradictoires.

Si vous souhaitez nous envoyer un article, veuillez contacter Éric Fries Guggenheim (ré-dacteur en chef) par courrier électronique à l’adresse suivante: [email protected], par té-léphone (30) 23 10 49 01 11 ou par fax (30) 23 10 49 01 17.

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No 32 mai - août 2004/II ISSN 0378-5092

Europe 123, GR-570 01 Thessalonique (Pylea)Adresse postale: PO Box 22427, GR-551 02 ThessaloniqueTél. (30) 2310 490 111 Fax (30) 2310 490 099E-mail: [email protected] Page d’accueil: www.cedefop.eu.intSite interactif: www.trainingvillage.gr

Revue européenne Formation professionnelle

No 32 mai - août 2004/II

De la divergence à la convergence Une histoire de la formation et de l'enseignement professionnels enEurope

Recherche

Les «systèmes» européens de formation professionnelle - réflexions sur le contexte théorique de leur évolution historiqueWolf-Dietrich Greinert

Entre école et enterprise. Aspects de l'évolution historique de la formation et de l'enseignement professionnels aux Pays-Bas et en Allemagne dans une perspective comparativeDietmar Frommberger et Holger Reinisch

Modèles, paradigmes ou cultures de la formation et de l'enseignement professionnelsAnja Heikkinen

La politique commune de formation professionnelle dans la CEE de 1961 à 1972Francesco Petrini

Les syndicats et la relance de la politique sociale européenne Maria Eleonora Guasconi

Le rôle de la formation et de l'enseignement professionnels dans la politique sociale européenne et le CedefopAntonio Varsori

La place de la formation professionnelle dans l'idée d'espace social européen de François Mitterrand (1981-1984)Georges Saunier

Rubrique bibliographique réalisée par le service de documentationdu Cedefop, avec l’appui des membres du réseau européen deréférence et d’expertise (ReferNet)Anne Waniart

Une histoire de la formation professionnelle en EuropeDe la divergence à la convergence

Une histoire de la formation professionnelle en EuropeDe la divergence à la convergence

Prix au Luxembourg, TVA exclue:Par numéro EUR 10Abonnement annuel EUR 20

Office des publicationsPublications.eu.int

TI-AA-04-032-FR-C