Wild Seasons Saison 4.5 Not-joe story (French...
Transcript of Wild Seasons Saison 4.5 Not-joe story (French...
ÀPROPOSDESAUTEURS
ChristinaLaurenestlenomdeplumed’unduod’écrivains,demeilleuresamies,d’âmessœurs–dejumellesdetoujours!ChristinaHobbsetLaurenBillingssontlesauteursdeBeautifulBastardetdelasérieBeautiful,entêtedeslistesdebest-sellersduNewYorkTimes,deUSATodayetà travers lemonde.Danslaplupartdeleursromans,aussiromantiquesqu’empreintsd’unesensualitétorride,ons’embrasse.On s’embrassebeaucoup.On les retrouve sur leweb–christinalaurenbooks.com–ousurTwitter–@seeCwriteet@lolashoes–,etsurFacebook:www.facebook.com/HugoNewRomance.
Copyright©2016parChristinaHobbsetLaurenBillings
Tousdroitsréservés.PremièrepublicationparGalleryBooks,2016.
GalleryBooksetcolophonsontdesmarquesdéposéesdeSimon&Schuster,Inc.Titreoriginal:ANot-JoeNot-So-ShortShort
Celivreestunefiction.Touteréférenceàdesévénementshistoriques,despersonnesoudeslieuxréelsseraitutilisée de façon fictive. Les autres noms, personnages, lieux et événements sont issus de l’imagination del’auteur,et toute ressemblanceavecdespersonnagesvivantsouayantexisté,desévénementsoudes lieuxseraittotalementfortuite.
OuvragedirigéparIsabelleSolalCollectionNewRomancedirigéeparHuguesdeSaintVincent
Photographiedecouverture:©ViorelSima/Fotolia
Pourlaprésenteédition:
©ÉditionsHugoRoman,2016
DépartementdeHugo&Cie34-36,rueLaPérouse
75116Pariswwwhugoetcie.fr
ISBN:9782755627282
Dépôtlégal:mai2016
CedocumentnumériqueaétéréaliséparNordCompo.
SweetFILTHYBOYÉLULIVREDEL’ANNÉE2014PARTHEROMANTICTIMES
«Unehistoirecharmanteetsexy.J’enaiaiméchaquepage.»–SylviaDay,numéro1danslalistedesauteursdebest-sellersduNewYorkTimes
«Une aventure audacieuse, touchante, àmourir de rire et surprenante de réalisme…L’une des romances érotiques les plus fraîches,drôlesetpleinesdesentimentsauthentiques.»
–RomanticTimesBookReviews
«Personnen’écritdesromancescontemporainescommeChristinaLauren.AvecSweetFilthyBoy,émotiongarantie!»
–Bookalicious
«Drôleetadorablementcharmant…Tendre,sexy,déchirantparfois,ettellementréussi!»
–HeroesandHeartbreakers
«J’aieulecœurbattantdelapremièreàladernièrepage…Àlireabsolument!»
–Fangirlish
«Uneintriguedélicieusementérotiquequevousallezadorer!»
–MartiniTimesRomance
«SweetFilthyBoyatoutd’unegranderomance.L’amour,lapassion,lesbouleversements,l’humoursontparfaitementdosés.Ajoutezàçaunstyleextraordinaire.Jenevoispasquoidemanderdeplus.»
–BookishTemptations
«ChristinaLaurenestmonpremierchoixquandjesuisd’humeuràrireetàm’émouvoir,uneromancesexyentrelesmains.»
–FlirtyandDirtyBookBlog
DirtyROWDYTHING
«Laurenparvientàorchestrerlarencontredehérosexquisetd’héroïnesàfortepersonnalité.LecontrasteentreFinn,brutdedécoffrage,et la précieuse Harlow débouche sur une romance passionnée. La relation de chacun des personnages avec leurs familles donne àl’intriguetoutesaprofondeuretprépareleslecteursàlaprochainehistoire…»
–RTBookReviews
«Laplupartdutemps,quandjelisdesromances,jen’arrivepasàapprécierlepersonnageféminin.Jenem’identifiepasavecl’héroïne,jenepeuxpasimaginerdevenirsonamie.AprèsavoirluDirtyRowdyThing,jen’aipasseulementenviedeconnaîtreHarlow,j’aienvied’être Harlow. Elle n’a pas peur de dire ce qu’elle pense, elle est sensible, intelligente… C’est le personnage littéraire le plusintéressantquej’aiedécouvertdepuislongtemps.»
–That’sNormal
«Unefoisdeplus,ChristinaLaurenacrééunhommedepapierquiarriveraprobablemententêtedetouslesTop10desblogueurs.»
–TheSubClub
«Unehistoiretorride.Letonmoderne…estrésolumentactuel.»
–DearAuthor
DarkWILDNIGHT
« Des personnages au caractère bien trempé qui vous bouleverseront, un humour qui vous fera glousser,une alchimie aussi renversante u’exceptionnelle, Dark Wild Night est absolument inoubliable. Une romance contemporaine aumeilleurdesaforme!Magnifiquementécritetremarquablementconvaincant,ceromanm’arappelépourquoiChristnaLaurentientuneplacedechoixdansmabibliothèque.»
–SarahJ.Maas
WickedSEXYLIAR«Lesfansdecomicspeuventêtresexyeuxaussi…DarkWildNightnevousdécevrapas.»
_–Hypale
«LeduoChristinaLaurenaencorefrappé!Laparfaitedosederomancequelesamateursdecomédiessexy,enthousiasmésparlasérieBeautifulBastard,attendentetadorent.»
–TheStir
«Laromanceérotiquelaplusfraîche,drôleetpleined’émotionauthentiquequej’aiejamaislue.»
–RTBooksReviews
«ChristinaLaurenestmonauteurderéférencequandj’aienvied’érotismeetdetendresse.»
–JenniferL.Armentrout,#1auteur_debest-sellersduNewYorkTimes
LASÉRIEBEAUTIFULBASTARD
«Torride…Sivousaimezlesscènesdesexedécritesdanstousleursdétails.»–EW.comàproposdeBeautifulStranger
« La confrontation diaboliquement dépravée d’un porno hardcore et d’un épisode très spécial deTheOffice…Un bonheur pour lesfétichistes!»
–PerezHilton.comàproposdeBeautifulBastard
«Unetrèsbelle lecture,unehistoired’amouràcouper lesouffle,uncoupledont la trajectoirem’aémuedudébutà lafin–c’estunlivrequejerecommandedetoutcœur.»_
–NatashaIsaBookJunkieàproposdeBeautifulSecret
«Unparfaitmélangedesexe,d’audaceetdesentiment.BeautifulBastarddépeintunduelérotiquequivousferavibrer.»
–S.C.Stephens,auteurdeThoughtless
DumêmeauteurCHRISTINALAUREN
WILDSEASONS
SweetFilthyBoyDirtyRowdyThingDarkWildNightWickedSexyLiar
THEBEAUTIFULSERIES
BeautifulBastardBeautifulStrangerBeautifulBitch
BeautifulBombshellBeautifulPlayer
BeautifulBeginningBeautifulBelovedBeautifulSecretBeautifulBoss
NOT-JOEStoryNot-Joe.Dylan.Nacho.Lepotedisponible,attentionné,celuiquiréconforte.
Quelquesoitleprénomoulesurnomqu’onluidonne,ilestdanslasérieWildSeasonslepersonnagehilarant,lecopainextravagant,fantaisistedelabande.
Pourlatoutepremièrefois,découvrezlemondedeNot-Joe–sonuniversburlesque,àlafoisdrôleettendre–lorsqu’ilrencontrePerry,quin’estautreque…l’exd’Ansel,le
beauFrenchie.
Chapitre1
Not-Joe
SEIGNEUR,JENESAISPASOÙPOSERLEREGARD.Hors de question de la regarder dans les yeux. Ils sont bien trop obsédants – et, j’insiste, ce
mélange intimidant de bleu et de vert ensorcellerait un saint… Je ne peux pas non plus fixer sabouche:j’aitoujoursétéfascinéparleslèvresdesfillesetjeseraiscapabledemedamnerpourunebouche pareille. Carrément impossible, pour finir, de regarder plus bas, parce que son corps dedéesseestmoulédansunepetiterobenoire,latenueidéalepourbraquerunebanque.
Jesaisàcetinstantaveccertitudequesijedevaischoisirentrel’amouretlaloi,jen’hésiteraispasuneseulesecondeàsortiravecunebraqueusedebanque.
–DoncOlivern’estpaslà?demande-t-ellelentement.J’acquiesceenréalisantquej’ailaissélafindemaphraseenl’air.Elle n’a pas cessé de me fixer pendant mon quart d’heure de délire silencieux causé par sa
boucheetsabeautécriminelle.Ellebaisseunpeulatête,toutenmelançantunregardquimedonnedesfrissonspartout.–Tusaiss’ilserabientôtderetour?Son accent français est si lourd que je me sens coupable de l’obliger à parler anglais. J’ai
soudainl’idéedelâcherquelquesmotshésitants:–SprechenSieDeutsch?Àmongrandétonnement,sesyeuxs’éclairent.–Ja!dit-elle,enajoutantenallemand:C’esttellementplusfacile.J’ail’impressiondenepas
trouvermesmotsenanglais.–Çasesent,jerépliquedanslamêmelangue.–Merci.Ellemesouritd’unairséducteur,etmesyeuxsontautomatiquementattirésparsabouche.Jemeredresse,toussepourm’éclaircirlesidées.
–Donc…Oliver devrait repasser plus tard. Tu veux l’attendre ici et lire quelque chose ? JepourraisteconseilleruneBD.
Disoui,s’ilteplaît.Disoui,s’ilteplaît.Ellejetteunregarddubitatifendirectiondesrayonsetsecouelatête.Eh ouais, je comprends sa réaction. La première fois que je suis entré dans une librairie de
comics, l’odeur de poussière et de vieux papier m’a pris à la gorge.Même si celle d’Oliver estpropreetorganiséecommeilfaut,lescouleurs,lesformesdonnentuneimpressiondechaos.Maisc’est aussi à cause de cette sensation que je suis immédiatement tombé amoureux des bandesdessinées.L’impressionquemesyeuxbougenttropvitepourmoncerveau,commeungaminquisemettraitàcourirpourlapremièrefois,malgrélerisquedetomberlatêtelapremièresurletrottoir.
Maislesenfantsapprennentàcourir.Demoncôté,jesuistoujoursaussienthousiaste.Etj’adoreça,putain.J’adoreavoirl’impressiondepouvoirtomberlatêtelapremièrechaquefoisquej’ouvreunebandedessinée.Lejouroùjecommenceraiàm’ennuyern’estpasprèsd’arriver.
–Non,merci,dit-elle, leregardattiréparuneétagèreconsacréeàRazorFish, laBDdeLola.(Aprèsquelquesinstants,ellecontinued’unairabsent.)Uneamiedevaitmerécupérerà l’aéroport,maiselleaeuunempêchementdedernièreminute,doncj’aiprisuntaxietjesuisvenueiciaprèsuncrochetparmonhôtel.JevaissortiretappelerOliversursonportable.(Ellesouritetavoue.)Ilnesaitpasquejesuisici.
J’acquiesceencorecommeun idiot,esquisseunsignede lamainetquandellese tournepourquitter la librairie, j’ai l’impressiond’avoirétéprofondémentébranlé.Commesiquelquechosedetrèsimportantvenaitd’arriversansquejesachevraimentquoi.
Chapitre2
Perry
LACLOCHETTEENBRONZEPLACÉE au-dessus de la porte tinte aumoment où jesorsdanslalumièreéblouissante.
Deboutdevantlaboutiqued’Oliver,jesorsmontéléphoneetfaisdéfilermonrépertoire.Depuisquejesuissortiedel’avionilyaunpeuplusdedeuxheures,riennes’estdéroulécommeprévu.J’aireçudesmessagesfrénétiquesdeMiam’expliquantqu’elleavaitunempêchementurgent,s’excusantde ne pas pouvoir venir me chercher à l’aéroport. Je lui ai répété que ça ne me posait pas deproblèmeetque jeprendraisun taxipourallerà la librairied’Oliver,mais jenepensaispasqu’ilseraitabsent…etquejerencontreraisquelqu’und’autreàsaplace.
Jenerésistepasàmeretourneretàjeterundernierregardderrièremoi.Ilesttoujourslà,letypeauxcheveuxblondsenbatailleetauxdentsparfaites,quinemequitte
pasdesyeux.Illesécarquillequandnosregardssecroisent,lèvelebras,souritd’unairradieux.J’ai toujourscraquépour lesmecsavecunbeausourire,des lèvrespleines,desdentsdroites,
des fossettes, mais celui-là a un truc en plus. Il semble tellement heureux que son sourire estcommunicatif.Parcequ’iladoresonjobouOliver,ousimplementparcequ’ilaimelesmardis,quisait?Ilsembletotalement,carrémentravid’êtrelà.Icietmaintenant.
Unhomme s’excuse etme contourne, je réalise que jeme trouve en pleinmilieu du trottoir,absorbéedanslacontemplationd’uninconnuàtraversunebaievitrée.Ilestclairementtempsdemesecouer.
Jemeconcentresurmontéléphone,ouvreunefenêtredetexteetcommenceàtaperunmessageenm’éloignantdelalibrairie.
Salutbeaugosse.Uneminuteplustard,unebulleapparaît,indiquantqu’Oliverestentraindetaper.Bordel.Commentvas-tu?Jerépondsrapidement,mesdoigtspianotentsurl’écranàunerapiditéfolle.
Jesuisici!ÀSanDiego!Oliverneprendpaslapeinederépondre,montéléphonesonneunesecondeplustard.–Tuesici?demande-t-il,larespirationcourte.–Oui!–Pourquoinem’as-tupasprévenuquetuvenais,Perrychérie?Depuiscombiendetempses-tu
là?J’éclatederire.L’accentaustraliend’Oliveresttoujoursaussireconnaissable.–J’aiatterriilyaquelquesheuresetjesuisalléedirectementàlalibrairie.C’estgénial,Oliver,
jesuistrèsfièredetoi.–Je…(Ilsetaitquelquessecondes.)Ok,ilfautquejetefasseungroscâlinpourteremercier
d’avoirditça,maisenpersonne.Tuyestoujours?Àlalibrairie?–Jesuisenbasdelarue.J’aidéjàlaissémesaffairesàl’hôtel,jem’apprêtaisàprendreuncafé.
(Jegrogneunpeu,sentantleseffetsdesdouzeheuresdevolsurmonespritetmoncorps.)Sijedorsmaintenant,jevaisêtrecomplètementdécalée.
–Pasfaux,rit-il.Dansquelleruees-tu?Jem’arrêteetregardeautourdemoi,jetantuncoupd’œilauxpanneaux.–Euh…Àl’angledela5eetdeE.–D’accord.Descendsjusqu’àla6e.EntreFetG,ilyaunpetitcaféappeléCoffee&Art.Onse
retrouvelà-basdansvingtminutes?–Parfait.Hâtedetevoir.–Moiaussi,machérie.
Del’extérieur, lecafén’arienderemarquable. Ilest installéaupremierétaged’un immeublerésidentiel,avecdesmursnusetdel’aluminiumbrossédansl’entrée.Maisàl’intérieur,l’ambianceestcosyetchaotique,ladécorationéclectique:photographie,statuesdelézardsetautresobjetsd’artinattendus.Jecommandeunexpresso,consultemesmailssurmontéléphoneetattends.
Laportes’ouvreenvirondixminutesplustard,moncœurseserre.Ilal’airtellementheureux.Olivermesourit,sefraieuncheminentrelestablesdeboissurchargéesetleschaisesenmétal,
etmeprenddanssesbrasenmesoulevant.Ilm’atellementmanqué…jenel’avaispasréaliséjusqu’àmaintenant.
Il est toujours aussi fort, chaleureux, familier. Je pose la tête sur son épaule etme souvienssoudaindesonodeursicaractéristiquedeforêtetdelessive.
Quandilmerepose,jem’essuielesyeux.Luinemequittepasduregard.Ilprendmonvisageentresesmainsetmescruteintensément.
–Tuesmagnifique. (Ilm’embrasse sur le front et tiremachaisepourque jem’y réinstalle.)Bon,maintenant,raconte-moi…
Jel’attrapeparlamainetl’interromps:–Oliver,lalibrairieest…jen’arrivemêmepasàycroire.Ilyavaitbeaucoupdemonde,ettout
ressemblaitexactementàcequetuastoujoursdécrit.Jesuistellementfière.Etquandjeteregarde…tuasl’air…(Jeserresamaindanslamienneenrepensantàtoutcequ’ilnousracontaitpendantnotrevoyageàvélo.)Tuasl’airtellementheureux.
Cette librairie a toujours été son rêve, mon cœur pourrait exploser à la simple idée qu’il aréalisésonrêve.
Oliverregardenosmainsentrelacéesetsecouelatête.Ilrougit.–Parfois,j’aidumalàycroire.–Jel’imaginesanspeine,dis-jeenriant.–C’esthallucinant.Parfois,jemedisqu’ilnepeutpasyavoirplusdemondeetlelendemain,
c’estlecas.–Etàproposdelafillequetuvoyais?Lola?Votrerelationesttoujoursaubeaufixe?Je ne concevais pas que le sourire d’Oliver puisse encore s’élargir, et je me trompais. En
entendantceprénom,sonvisages’illumine.– C’est merveilleux, putain. C’est la meilleure chose qui me soit arrivée. Attends de la
rencontrer,je…Attends.(Ilsecouelatête,sepencheetmelanceunregardmalicieux,commepourmeréprimander.)Jesuistotalementàcôtédemespompes.Quesepasse-t-il?Commentsefait-ilquetusoisvenueicisansprévenir?Jeveuxdire…est-cequ’Ansel…?
–Non.C’étaitMia.(Jesourisdevantsonairabasourdi.)C’estMiaquiatoutorganisé.Illâchemamain,selaisseallersursonsiègeetouvrelabouche.–Mia?Seigneur.J’acquiesce.–Nousavonsdiscutétouteslesdeux.Ellem’aenvoyésonnumérodetéléphoneparmailenme
disant qu’Ansel s’était senti… (je cherche le mot correct en anglais)… coupable ? Plutôt, qu’ilregrettaitlatournurequeleschosesavaientprise.
–Ouais,ilaévoquélesujet,répondcalmementOliver.–J’enaiétédésolée,moiaussi.Miam’acontactéepourmedonnerunenouvellechance.Jeme
suisexcuséemaisah…jedoislefaireenpersonne.Quandjerepenseàmoncomportement,jemeursdehonte.Jen’arrivemêmepasàtrouverlesmots.
Cettefois,Olivermeprendlamain.–Personnenet’enajamaisvoulu,tusais ça?–Oui.–Onsedisaitquetuauraisputecontrôler,maisonatoujourssuqu’Anselavaitété…Ilsouritd’unairtriste,jehochelatête.Anselavaitétéimpulsifetpassionné.Cesontleschosesquej’adorechezlui.
–Jesais.Etjesaisqu’ilestvraimentheureuxavecMia.Maisjesuiscontentequ’ilaitconsciencequ’ilfautréparertoutça.Touslesdeux.
–Nous commettons tous des erreurs, ditOliver en clignant des yeux. Finn etmoi, on auraitprobablementdûagirdifféremment,etj’ensuisdésolé,Perrychérie.
–Tun’aspasàêtredésolé.Jenemerendaispascomptedelacomplexitédelasituationavantquetoutsoitterminé.
–TuasparléàAnseldepuisqu’ilaquittélaFrance?Jesecouelatête.–Parlé?Non.Crié?Hurlé?Oui.Unefois.–Entrevous,leschosesonttoujoursété…–Oui. (Je me passe une main dans les cheveux, en lissant mes mèches folles avant de les
replacer surmes épaules. Je n’ai pas envie d’entendre la fin de sa phrase. EntreAnsel etmoi, leschosesonttoujoursétéhouleuses.)MaisMiaal’airgéniale.Jesuisraviepourlui.
–Moiaussi,ditOliver.(Etjepeuxliresursonvisagel’affectionqu’illuiporte.)Ilsformentuntrèsbeaucoupletouslesdeux.(Jemedemandes’iltentedem’avertirmaisavantquej’aieletempsd’analysersaphrase,ilcontinue).Doncc’étaitsonidée?Tefairevenirici?
–Oui.Elleprévoyaitdemerécupéreràl’aéroport,maisilyaeuunesorted’urgencedanssonstudiodedanse.
–Donctun’asvupersonnepourl’instant?MêmepasFinn?–Non.Jesuisseulementalléevoirtalibrairie.Jenepouvaispasattendre.Etpuisjet’aivutoi,
j’ajouteavecunsourire.Oliversortsontéléphoneetcommenceàécrire.–Onavaitprévudesortirtousensemblecesoir…doncoui…Miacomptaitnouspiéger.(Illève
lesyeuxdesontéléphoneetmedévisageavecdouceur.)Tuestoujourspartante?–Biensûr!Maréponseestpeut-êtreunpeutropenthousiaste.RencontrerlesamiesdeMia?VoirAnsel…
justecommeça?Sitôt?J’aiprofitéduvolpourmepréparerpsychologiquement,maisjenemesenstoujourspasprête.
–Anselseralà.Çaneteposepasdeproblème?Ilmedévisageàtraverssescheveuxquiluitombentdevantlesyeux.Jeprendsuneprofondeinspiration.J’essaiedeconvoquersonvisage,soncorps,demesouvenir
de l’effet qu’il produisait sur moi, et je supplie, supplie, supplie mon esprit d’être passé à autrechose…pourdebon.
–Jepense.–Tuesstressée?– J’ai imaginé les revoir tous les deux au moins mille fois pendant l’année qui vient de
s’écouler.Jenepensepasque«stressée»soitlemotleplusadéquatpourqualifiercequejeressens.Oliviersepenche,relèvemesmainsetm’embrassesurlesphalanges.
–Toutsepasserabien.Jesaisqu’Anselenabesointoutautantquetoi.Ilaimefairecroireàtoutlemondequ’ilchiedesarcs-en-ciel,maisnoussavonstouscequ’ilenest.
– Quellemerveilleusemétaphore, Oliver ! Dieumerci, tu n’as pas changé. (Je jette un coupd’œilpar la fenêtre. J’aienviedevoirAnsel,vraiment,pourclarifier leschoses.Mais l’idéede leretrouveraprèssilongtempsmefaitunpeupeur.Jeveux…non,j’aibesoin,dem’amuserunpeucesoiraprèslaréconciliation.J’aienviedem’éclater.)Toutlemondevient?
–Tuveuxdirequi?–Finnetsafemme.Lola…etlemecmignondetalibrairie?Oliverlèvelessourcils.–Jesuisdésolé,jecroisquej’aimalentendu:tuneparlessûrementpasdunéo-hippieavecune
crête?Jeglousse.–Ilal’airmignon.Oliversecouelatêteetricane:–Enréalité,ilestcomplètementfou.Jehausselesépaules.–Jesuispeut-êtreunpeufolle,moiaussi.Pourcommencer, jesuisici,non?Allez,negâche
pasmesillusions.Trouverungarçonmignon,c’estdéjàchouette.Ilmedévisagependantquelquesinstantspuishochelatête.–Ok,Perrychérie.Ouais,Not-JoevienttoujoursavecnouschezFred’s.–Nacho?jerépète,confuse.–Ouais, répliqueOliver d’un air énigmatique.Quoi qu’il en soit, il sera là. (Oliver jette un
nouveauregardàsontéléphoneavantdeseleveretdemetendrelamain.)Finnvahallucinerquandilsauraquetuesici,allons-y.
Chapitre3
Not-Joe
JENERATEJAMAISUNESOIRÉECHEZFRED’S.Ce n’est pas qu’ils servent de meilleurs verres qu’ailleurs, ou qu’ils aient de meilleures
cacahuètes,ouquecesoitunendroitgénial.Maisj’aimel’idéedemesentirchezmoiquelquepart.J’adorefermerlalibrairie,lancer:«Onvaboireunebière?»etquetoutlemondesachecequeçasignifie. C’est un endroit où, quand vous entrez, on vous fait signe et on prépare d’instinct votrecocktailpréféré.ToutçaàcausedemamèreetdesapassionpourlasérieCheersquiabercétoutemon enfance.Les scènes se déroulaient toujours dans lemêmebar, là où « tout lemonde connaîtvotrenom».Jesupposequel’ironieveutquechezFred’spresquepersonne–àpartLukeetLondon–neconnaissemonvraiprénom.
Jefermelalibrairie,vérifiedeuxfoislesalarmes,puislesverrousunefoisdehors.Jen’aipasfuméunseul jointdepuisdeuxsemaines,mais je ressens toujoursuneboufféedeparanoïachaquefoisquejesuisledernieràpartir,parcequejesaisàquelpointOliverestmaniaque.
En réalité, j’aurais lecœurbrisé siquelquechosearrivait à la librairie.Mêmesimesparentsespèrent toujours que je grandisse et accepte d’occuper un poste dans l’entreprise de servicesfinanciersdemonpère,jepréfèretravaillerici.Jegèrelaplupartdesinvestissementsdemesparentsparcequec’esttrèsamusant–laBoursenem’ajamaisfaitpeur.Jejouedanslemondedelafinanceen suivant mon instinct depuis une époque où je ne comprenais pas vraiment l’importance de laresponsabilité quemon pèreme confiait. Il espérait secrètementme donner envie de rejoindre lemondederobotsdelacomptabilité–maisjen’aiaucuneenviedetravaillerdansunopen-spaceoudansunbureau.J’aimeparlerauxgenstoutelajournée,lire,évoluerdanslemondedel’art,regarderlavillegrouillanted’activitéàtraverslesbaiesvitrées.
Cegrouped’amisestunmélangeunpeuincongrud’individus.Oliverestuntypetrèsintelligent.Il vient d’une famille totalement disloquée et il s’est fait tout seul, mais il ne se plaint jamais ets’apitoieencoremoinssursonsort.Lolaestuneartistesi talentueuseetsihumblequ’ellepourrait
être un ange – sauf que je ne crois pas au paradis. Ansel est professeur de droit. Carrément. Onpourrait penser qu’il n’est qu’un grand dadais sexy et hilarant qui passe son temps à grignoter etplaisanteràproposdemettreMiaenceinteen luienvoyantunbaiser.Etsoudain, il semetàparlertravailetc’estcommes’ilsetransformait,commeuncyborg,enSuper-Héros-Avocat.Ilsedonneàfond pour sa carrière. Mia est une danseuse prodige qui enseigne la danse classique à de jeunesenfantsetquia lapatiencede…quiabeaucoupdepatience,quoi.Jenesaispascommentellefait,maisellearrivetoujourszen.Finnestuntypemassifetmuscléquim’afaitréaliserque,sij’étaisgay,je me le taperais volontiers. Il est également capable de réparer n’importe quoi. Climatisation,moteur,fenêtrecoincée,fermetureÉclaircasséesurmonjean.
Safemme,Harlow,vousregardeetlitenvouscommedansunlivreouvert.Elleressembleauxgens capables d’assembler un Rubik’s cube en dix secondes, mais elle fait ça avec les cerveauxhumains.
EtLondonetLuke,lecoupleleplusrécentdugroupe,sontdesgenstrèsintéressantsquandilsnesontpascollésl’unàl’autre.Elleestjolieetdrôle,passesavieàsurferetàprendredubontemps.IlestbrillantetauncœuraussigrandquelaChine.JeconnaisLukedepuisdesannéesmaintenant,etjedoisadmettrequeçafaitdubiendelevoiraussiheureux.Jenel’aijamaisvucommeça.
EtpuisilyaBetty–mavieilleSaabenruine.Ellen’estpasunmembrehumaindugroupe,maiscommeellemepermetdemedéplacer, elle aune importanceprimordiale.Elle appartenait àmonpère, dans les années 1990, et il pense toujours que c’est la plus belle voiture qu’il ait jamaispossédée.IlconduituneTeslamaintenant,doncc’estunpeuhypocritederegretterlaSaab,mêmesic’est unevoiture géniale.Mais une fois encore, qui suis-je pour juger,moi qui trouveque leRedStripeameilleurgoûtquandonleboitàlabouteilleplutôtquedansunverre…
Et c’est vrai, j’adore conduireBetty,mais surtout parce que je ne suis jamais sûr qu’ellemepermettra d’atteindre ma destination sans incident. Elle ajoute une part de mystère à ma vie. Elletremble,s’arrête,lesvoyantsrougess’éclairentsansraison.Jepourraislafaireréparer,maisj’ailasensationqueceseraitcommeamenerunchienmourantchez levétérinaireet jenesuispasprêtàentendrelavériténiàl’abandonner.
Jem’arrêtesurleparkingdevantchezFred’setj’attendsunebonneminuteavantdesortirdelavoiturepournepastraverserunnuagedefuméenoire.
Quandj’entre,FredmefaitsignedubaretjeluilanceladernièreBDjeunessepoursonpetit-filsavantdemedirigerverslefond.Ilyatoujoursunetablepournous,parcequeHarlow.
ParcequeHarlowestuneraisonquenousinvoquonspourcentchosesdifférentes.Nousavonsunetableréservéedansunbarcool…parcequeHarlow.Nousneparlonsjamaisd’araignéesoud’insectesentoutgenre…parcequeHarlow.Nousbuvonstoujourslesshotsqu’onnousapporte…parcequeHarlow.C’est seulement enm’asseyant que je me souviens de la rousse de la librairie, celle avec le
fameuxregardetlecorpsdefolie…Beaucoupdefillessexylaissentleurnuméroaucomptoir,maisilyaquelquechosechezelle,uneflammedanssesyeux,quim’aébranlé.
Etc’estuneamied’Oliver,cequisignifiequecen’estpasunefandecomicstotalementravagée.Fredm’apporteunamarettosouretjelesiroteenregardantlesgensd’unairabsent.Lebarest
assezcalme.Montéléphonevibreprèsdemoncoude,jereçoisdesmessagesd’AndrewetdeDanieldenotregroupedediscussion. Ilsm’envoient probablementdes liensvers des sites salacesoumedemandentcequejefaiscesoir,maisladernièrechosedontj’aieenvie,c’estdelesvoir.
Surtoutquandjedistinguelasilhouetted’Oliver,suiviedeprèsparcelledeLolaetpar…elle.Ilss’approchent,lesourireauxlèvres,etjeréalisequ’ilssourientparcequemoiaussi,jesourisàenavoirmalauxmâchoires.
–Turessemblesàl’idiotduvillage,lanceOliverens’asseyantàmagauche.–Ouaip.Jemedécalepourlaisserdelaplaceàdroitepourl’adorableFrançaise.Lolalalaissepasserets’installeenmedévisageant,l’airamusé.J’entendsleriredeHarlowauloinpuisjelavois.Finnestderrièreelle.Bientôtnoussommestousinstalléssurl’immensebanquetteronde.J’adorelesobserver.Oliversemblenerveux.Lolaestailleurs,ellecrayonnesuruneservietteen
papier. La braqueuse de banque rousse sourit timidement. Harlow s’efforce de dissimuler sonhostilitéetluitendlamain.
–Salut,raviedeterencontrer,dit-elle.(Jelaconnaisassezpoursavoirqu’elleaquelquechoseentête.)JesuisHarlow.
–Perry,répliquelafilleenbaissantunpeulatête,commesielleétaitnerveuse.Etenentendantsonprénom,jefouilledansmonesprit,cherchantdansmamémoireoùjel’ai
entendu.Oh.Oh.C’estvrai.–Oh,dis-jeàhautevoix.Est-cequec’est…–Oui,répliqueLolaenm’intimantlesilenced’unregard.–Désolé.(Jemepenchepourchuchoter).C’étaitunsecret?Perryritetsecouelatête.–Non.Miam’ainvitéepourquejevousrencontretous.Jeluitendslamain.–Jen’aipaseul’occasiondemeprésenter.JesuisDylan.Lesilencesefait,soudainilsmedévisagenttous,bouchebée.Qu’ai-jeditcettefois?Ah,oui.Harlowlâche:–Quoi?Alors,Oliverlaissetombersonpoingsurlatableencriant,dansunéclatderire:
–NON!–Mec,ilyamonnometmonprénomsurmesfichesdepaie,putain.–Jenem’enoccupepas,merappelle-t-ilavecunsourire.Moncomptablegèretoutça.J’avais
oublié.Joetevasibien.–Maisjenem’appellepasJoe.–Not-Joe.Exactement,renchéritOliver.Lolaexamineattentivementmonvisage,mescheveux,mesvêtements.–Dylan?Ouais,biensûr.MaisNot-Joe,c’estmieux.Je me fiche pas mal du prénom par lequel ils m’appellent, mais je sais qu’ils ont toujours
apprécié lemystère flottant autour demoi, donc je suis un peu triste pour eux.C’est comme si jevenaisdeleurrévélerletrucd’untourdemagieetquetoutlemondesesentaitmalàl’aiseaprèscettedécouverte.
MaisjerefoulecettepenséeetmetourneversPerry:–Pourcombiendetempses-tuici?Elle hausse les épaules, lève les yeux avec un sourire en voyant Fred apporter un plateau de
verresànotretable.Perryacommandéduvinrouge…ellevaêtredéçueparlemerlotlocal.Et,eneffet,ellegrimaceunpeuenbuvantunegorgée,maisj’observe,fasciné,lamanièredont
ellechoisitdedépasserlapremièreimpression,danslegenre tantpis,putain.Elleprenduneautregorgée.
Doncelleabongoûtmaisn’estpaspédante.Chouette.–Unesemaineoudeux,jepense.Jesuisentredeuxjobsetj’avaisenviedevoyagerunpeu,donc
letimingestparfait.Jenesuispasrevenueicidepuisnotrederniervoyageàvéloensemble.–Attends.(Jem’écarteunpeupourlaregarder.C’estseulementàcetinstantquejeremarquele
musclequisedessinesursonbras,etquejedistinguesasoifd’aventuresdanssonsourire.)TuasfaitduvéloavecOliver?
Elleacquiesce,souritpluslargement.–C’estcommeçaquenousnoussommestousrencontrés.J’étaisamieaveclesgarçonsavant
qu’Anseletmoinenousmettionsensemble.Cettefois,personnenesursaute.L’ambianceestdéjàunpeumoinspesante.–Tunelesconnaissaispasdutoutavantça?Perrysecouelatête,sescheveuxglissentsursesépaules.Çamefaitpenseràdel’eaucoulantsur
un rocher, ce quime fait penser à desmaillots debain, cequime fait penser à un corpsnu.Monimaginations’emballe,jemesouvienssoudaindemeconcentrersurlaconversationencours.
–Ons’estrencontréspendantlevoyageàvélo,oui.Çameperturbeunpeu.Certes,elledoitavoirpresquetrenteansmaiscedontnousparlonsaeu
lieuilyadesannées.Cequisignifieaussiqu’elleaunbrindefolie,elleaosévenir ici–dansunautrepays–etfairequelquechosedefou.
–Oùas-tugrandi?
–Seigneur,Joe,arrêtedelaharceler,lanceOliverenm’envoyantuneservietterouléeenboule.–Çava,faitPerryenmeregardant.Orléans.MaisjesuisalléeaulycéeprèsdeZurich.Moncœurbatplusfort.–Lequel?Perryclignedesyeux,ellenecomprendpaspourquoijeluiposelaquestion.–L’InstitutMontana.J’éclatederire:–Jesuisalléàl’AiglonCollège.Ellemedévisage.–Toiaussi,tuasétépensionnairedansuninternatenSuisse?London et Luke arrivent à l’instant où Perry lance cette phrase, London s’assied à côté
d’Harlow:–Attendez.DylanétaitinternedansuncollègeenSuisse? (Elleplaqueunemainsursabouche,
écarquillelesyeuxetmarmonne.)Merde.ToutlemondesetourneversLondon.–Çava,c’estbon.Lemystèreduprénomvientd’êtrerévélé–etonn’enauraitpasreparlési
vousnevousenétiezpasmêléstouslesdeux.–Tuconnaissaissonprénom?demandeHarlowàLondon,ébahie.–LukeetDylanjouaientensembleauwater-poloaprèslagranderupture,expliqueLondonavec
unepetitegrimace.Pourceque çavaut,jemesuissentieunpeutristeaprèsl’avoirdécouvert,moiaussi.
Luke s’assied à côté de London et sourit à Perry en serrant sa main et en se présentant. Jel’observedeprès–laplupartdesfemmesontuneréactionépidermiquequandellesrencontrentLuke.Mais,étantdonnéqu’elleaeuunerelationavecAnsel,elleapeut-êtredéveloppédesanticorps.Perrysecontentedesourirepolimentetmeregardeendemandant:
–Alors,pourquoineparles-tupaslefrançais?Lukemedévisage,commes’illisaitdansmonesprit.–Je…euh,jecommenceàapprendre…Jem’arrêtedevantsamineimpassible.–Hé,Dyl…dit-ilavecunsourirequisignifiejesaisquetuesmalàl’aiseetj’adoreça.–Hé,Sutter.Jeluisouris.Jesensqu’ilveutêtretémoindecetteconversation,doncjehausselesépauleset
metourneversPerry.–Mamèreestallemande,monpèresuisse-allemand.Jeparlel’allemandetlesuisse-allemandde
Zurich.Jen’aijuste…jamaisapprislefrançais.Maiscen’estpasjusteLuke.Latableentièrem’écouteattentivement.–Maisd’oùest-cequetusors,putain?demandeFinnengrognant.
–JesuisnéenSuisse,nousavonsemménagé iciquand j’avaissixansenviron.Aprèsça, j’aigrandiàLaJolla,maisj’aieuenviederetournerenSuissepourétudierquandj’avaisquatorzeans.(Jefaistournerlesglaçonsdansmonverreaveclapailledecocktail.)Mesgrands-parentsviventtousà Zurich, je suis revenu aux États-Unis pour intégrer l’université de San Diego. (Je hausse lesépaules.)J’yretourneraipeut-êtreplustard.
Àcôtédemoi,Oliversursautedesurprise.Perrysepencheunpeuversmoietdemande:–Çaaétédifficilederevenirici?Etquandelleleditcommeça,sidoucement,j’ail’impressionquenoussommeslesdeuxseules
personnesdanslebar.Aussiringardqueçapuisseparaître,jenevoisplusqu’elle.Montéléphonequivibresurlatable,nosamisquisechamaillent,toutdisparaît.
–Ouietnon.(Çasembleluisuffire,maisjeprécise.)L’endroitoùjevisn’apasd’incidencesurmonbonheur.
Ellesourit,puisellehochelatêtecommesiellecomprenait.Commesiellemecomprenait.
Chapitre4
Perry
JEBLUFFECOMMEUNEREINE.Lafilleassiseenfacedemoinepossèdepascedon.Maisjenepeuxpasvraimentluienvouloir:sij’étaisHarlowetsiquelqu’unavaitditàmameilleureamiecequej’aiditàMia,jeregarderaiscettepersonnecommesijevoulaisl’assassiner,moiaussi.
Toutes lespersonnesautourdecette tableontpensé, àunmomentouunautre,que j’étaisunmonstrehaineux.Etmêmesijeméritechacundeséclairslancésparlesyeuxd’Harlow,jedoisfaireuneffortherculéenpournepasluirépondreetl’interpellerfranchement.
Aucontraire,jeresteimpassible,lesmainscrispées,transpirantes,surmesgenoux.Dylanestàcôté de moi, il plie des serviettes de cocktail en forme de grenouille et même si j’aimerais luidemanderdem’endireplussursavieenSuisse,j’ail’impressionqueceseraitmalvenu.J’aimeraistellement revenir à cette conversation – l’intensité de la désapprobation que je lis dans le regardd’Harlowestincroyablementétouffante.
Oliver raconteune anecdote surnotreparcours àvélo enArizona, le jouroùnouspédalionscommedes fous sous la pluie en espérant trouver refugequelquepart avant que l’unde nous soitfrappéparunéclair,soudainjeremarquequeLolaestarrivéeauboutdesapatienceavecHarlowetsesyeuxmeurtriers.Elleluibalanceuncoupdepiedpeudiscretsouslatable.
Harlow grimace et fixe son attention surLola, qui a arrêté de dessiner sur sa serviette et luilanceunregardnoir.
–Oui,MademoiselleCastle?ditHarlow.–Etsionallaitchercherquelquechoseàboire,touteslesdeux?propose-t-elle.Si je n’étais pas déjà tombée amoureuse d’elle sur le chemin, je tomberais amoureuse d’elle
maintenant.Elleestadorable,mêmesiellem’aàpeineditdeuxmotsquandOlivernousaprésentéesdevantsonappartement,maisj’aitoutdesuitecomprisqueçan’avaitaucunrapportavecmoi,qu’elleétaitcommeça.
Dylans’enmêle,sanslaisseràHarlowletempsderépondre.
–MaisHarlowadéjàunverre.Jedevinequ’ilestcommeça:ildittoutcequiluipasseparlatêtesansfiltre.C’esttellementnaturel,tellementspontané,commes’iln’avaitabsolumentpasbesoindecacher
quoiquecesoit,jetrouveçatrèsapaisant.–Ehbien,elleabesoind’unautreverre,s’exclameLolaenselevantetenattendantqu’Harlow
lasuive.Harlowfait signeàLukeetàLondondesepousserpour la laisserpasser,puiselle suitLola
sansdiscuter.Jerespireenfin.–Jevaisallerluiparler,memurmureOliver.Toutvabien?Nulbesoinderéfléchir:non,çanevapasdepuisquejesaisqu’Harlowaenviedememettreson
poingdanslagueuleetqu’AnseletMiavontarriverd’uneminuteàl’autre.Çanevapasdutout.Pourêtrehonnête,jenesaispasquellemouchem’apiquée.Commentai-jepupenserquec’étaitunebonneidée?
Prendrel’avion,fairedesmilliersdekilomètrespourmeréconcilieravecmonexetsanouvellefemme?Jedevaisêtrebourrée.
Maisjemetais,sourisleplussincèrementpossibleetacquiesce:–Biensûr!–Tumenstrèsmal,maisjenevaispast’accablerdavantage.(Ilchuchotedansmonoreille).Ça
vaaller,net’inquiètepas.J’acquiesceencoreetmelaisseallercontreluiavantqu’ilseredresseetsedirigeversLolaet
Harlow,enpleinediscussion.–Harlowestuneterreur,ditDylanavecunevoixd’unedouceursurprenante.–Jevoisça.Il triture la paille de son cocktail et s’affale sur la banquette en regardantOliver et les deux
filles.–Ellenesaitpasaimeravecdiscrétion.Vraimentpas.Parfois,ilestimpossibledelafairetaire.Sinousétionsailleurs,n’importeoùetàn’importequelautremoment,j’éclateraisderireetje
l’embrasseraispourleremercierd’essayerdemeremonterlemoral.–Unequalitétrèsimportantechezuneamie.Miaestsameilleureamie.Jelacomprends.–Ouais. (Il finit sonverreet faitcraquerunglaçonentresesdents.)Tusavaisque lesvaches
aussiavaientdesmeilleuresamies?Jemefige,monverreenl’air.–Pardon…quoi?– Les vaches, répète-t-il, comme si c’était ça que je n’avais pas compris. J’ai regardé un
documentairedanslequellesscientifiquesétudientlerythmecardiaqueetlesniveauxdesérotoninepourdéterminerquandlesvachessontcalmesoustressées,etcertainesontunniveaudestressmoinsimportantquandellessontàproximitéd’uneautrevachedutroupeau.Çafaitsens,quandonypense:desvachesdétenduesproduiraientclairementplusdelait,oudulaitdemeilleurequalité.
Jeposemonverre.–Waouh,c’esttrès…trèsintéressant.Ilal’airpensifpuisajoute:–Ellesnesaventpasnonplusdescendrelesmarchesd’escalier.–Lesmarchesd’escalier?Ilsontétudiéçadansledocumentaire?–Non, j’ai appris ça pendantma semaine d’intégration dans une fraternité. (À cesmots, son
souriredevientsienfantinquej’ensuistoutémue.)Maisc’estunetoutautrehistoire.Je suis sur le point de répondre quand la porte du bar s’ouvre et qu’une silhouette familière
s’avance.Jen’aipasvuAnseldepuispresqueunan,maisj’ail’impressiondel’avoirquittéhier,quenous nous sommes disputés, qu’il s’est rué hors demon appartement il y a vingt-quatre heures àpeine.Iln’apaschangé:grand,finmaisfort,mâchoirecarrée.Sublime.
Moncœurbatplusvite, toutesmes réflexions, tous lesmomentsoù j’ai imaginé la scènecesderniersmoissebousculentdansmonesprit.
JedevinequeMiaaprévenuAnsel,parcequ’il serrenerveusement samaindans la sienneenavançant vers la table. Il s’arrête sur le seuil et cligne des yeux, son regard parcourt la salle avecnervosité,pourchercher…pourmechercher,jesuppose.
Lecœurserré,jel’observeparcourirlafouleduregard,etmêmesijen’étaispasconcentréesursesréactions,jepourraissentirlechangementdanssonattitudequandilcroisemonregard.Ilretientsonsouffle,reculed’unpas,commes’iln’étaitpasprêtàmerevoir,luinonplus.
Une grandemain chaude se pose surmamain crispée sous la table. Je jette un coup d’œil àDylanquitentedemecommuniquersaforce.Sonsourireestradieux,sonregardpétilledemalice.J’aimeraistellementnepasêtreobligéedejouerlerôledel’ex-petitecopinetarée,parcequeDylanmeplaîtvraiment.Ilyaquelquechosede…légerchezlui,quimemetàl’aise,quimefaitmesentirlégère,moiaussi.
Jesaisque jepourraisattendrequ’AnseletMiaviennent jusqu’àmoi,mais j’étouffesurcettebanquette,doncjemetourneversDylanenluisouriant:
–Jevaisjuste…Ilsedécalepourmelaisserpasser.–Vas-y.Jeviensderecevoirlasuited’unefictionquejelis,j’aidequoim’occuper.Etilsepenchepourlirequelquechosesursontéléphone.Jesenssesyeuxdansmondosquand
jetraverselasalleetm’arrêtedevantAnseletMiaprèsdubar.–Perry,ditAnsel.Je…–Jevouslaissedeuxminutes,ajouteMia.Maisjel’arrêted’unemain.–Non,s’ilteplaît.Jevoudraisd’abordteprésentermesexcuses.Ellemefaitsignequecen’estpasnécessaire,maisjecontinue.–Non,jesaisqu’onenaparléautéléphone,maiscen’estpassuffisant.Laruptureétaitencore
fraîchepourmoiquandjet’aivue…(Jerisbrièvement.)J’aiperdulatête.Jemesuissentietrèsmal
ensuite, une foismacolère apaisée, quand j’ai euvéritablement l’occasiondeprendredu recul. Jesuisvraimentdésolée.
Mia ferme lesyeux,puis avanced’unpas etmeprenddans sesbras. Jepasse lesbras autourd’elle,elleest tellement fine,çame fait encoreplus culpabiliser.Commesi j’avaispu labriser endeuxparlaseuleforcedemacolère.
–Iln’yaplusrienàpardonner.(Ellemesourit.)Jepensecequejedis.Jesuiscertainequenoustous–moiycompris–aurionspuréagirdelamêmemanière.
EllegrimacelégèrementenregardantAnsel.Jesaisquecenedoitpasêtrefacilepourelle,caraffirmerquemoncomportementétaitjustifié
déplacelafautesurAnsel.Sonmari.Biensûr,ellearaison,maisçan’excuseenriencequej’aidit.–Parleztouslesdeux,murmure-t-elle.Jeseraijustelà,sivousavezbesoindemoi.Ok?Anselhochelatêteetlâchesamainàcontrecœuravantdesetournerversmoi.–Je…commence-t-ilenfrançais.(Ilpasseunemaindanssescheveux.Cegesteestsifamilier
que ma poitrine se contracte.) J’ai pensé à beaucoup de choses à te dire, mais maintenant… j’ail’impressiond’avoirtoutoublié.
Jesaisexactementcequ’ilressent.–Etsions’asseyait?Jedésigneunebanquettevide.Anselmefaitsigned’avancer,j’entendssespasjustederrièremoi.–Jen’arrivepasàcroirequenousayonscetteconversationpourdebon,jeluidisaprèsm’être
assiseenfacedelui.Jen’auraisjamaiscru…–Jesais.C’estunpeusurréaliste,pourêtrehonnête.Tevoirici.–Miaatoutorganisé.(J’effleurelatableduboutdesdoigts.)Ellevoulaitt’aideràt’apaiseret
ellesavaitquelamanièredontleschosess’étaientpasséesentrenoustetorturaitparfois.–Ellevientdemeledire.–Elleestmerveilleuse,Ansel.–Oui.J’aibeaucoupdechance,ellem’apardonnédeluiavoircachétantdechoses.–Commemoi.Anselsecouelatête,poselescoudessurlatable.– Comme toi, oui. Je… Ce que j’ai fait était injuste, pour toutes les deux. Je peux à peine
imaginercequetuasdûvivre,aprèslarupture,quandtuasapprisquej’étaismariéetquemafemmevivait dans l’appartement que nous avions partagé. Et puis la voir à la fête de Christophe et deMarie… J’aurais dû être honnête avec vous deux… je te le devais, Perry.Après tout ce que nousavonsvécu,j’auraisdûmieuxmecomporteravectoi.J’yaibeaucouprepensécesderniersmois.
–Merci. Je crois qu’une part demoi avait besoin d’entendre que tu le reconnaissais. (Je faistournoyerundessousdeverredevantmoi.)Ettuasraison,çam’afaitbeaucoupdemal,etc’étaitdur,oui,tuauraisdûmeparlerd’elle,avantquej’apprennesonexistenceparquelqu’und’autre.Jenevais
pasmentiren tedisantqueçanem’apas fait souffrirmais…mêmesi tuasarrêtédem’aimer,cen’étaitpasdetafaute.
Jereprendsmonsouffle,meconcentresurlesbruitsdubarautourdenousenpensantàtoutcequej’aienviedeluidire.
– Il m’a fallu unmoment pour réaliser quemême si nous nous aimions, je n’arrivais pas àdistinguernotrerelationréelledecequejevoulaisqu’ellesoit.Jelecomprendsmaintenant.Etjesaisquet’avoirdemandéderesteravecmoiétaitégoïste.Jeveuxtonbonheur.Jeveuxnotrebonheuràtouslesdeux.
–Moiaussi,dit-il.Ilmeprendlesmainset,àmongrandsoulagement,jeressenslamêmechosequelorsqu’Oliver
afaitlemêmegesteunpeuplustôt.Uneétreintepurementamicale.
Chapitre5
Not-Joe
PENDANTQUEPERRYS’ESTABSENTÉEUNMOMENT,j’écouteLolaetHarlowparlerdeleurtristesseàl’idéequeLondonetLukedéménagent.Ilssonttousdésespérésdepuisqu’ilssaventqu’ilsvivrontàBerkeley,mais,franchement,l’AllemagneareconstruitlemurdeBerlindansla régiondeSanFranciscoouquoi?LukeetLondoncesseront-ilsd’existerparcequ’ilsvivrontàseptheuresdevoiture deSanDiego?J’essaiedeleurrappeleràtousquedesamisquidéménagent,cen’estqu’une raisondepluspourvoyager etvivredes aventuresdansdes contrées lointaines,maispersonnenem’écoute,doncj’ouvrel’unedesvidéosqueDanielm’aenvoyéessurmontéléphone.
Ilsfinissentparsetaireet jesensleurregardsurmoi, lesaboiementsquiproviennentdemontéléphonelesétonnent.
–Qu’est-cequec’estquecebordel,Joe?demandeOliver.–Deschiensquifontdubreakdance.Pourunefois, ilsneparviennentpasàrésister,etOliver,Lola,HarlowetFinnregardentpar-
dessusmonépaule.Internetestunlieufascinant,c’estsûr.MaisquandPerryrevientversnotre table,uninstinctétrangemepousseà lever lesyeuxet je
croise son regard. J’ai peut-être simplement vu quelque chose bouger dansmon champde vision,mais j’aime l’idée d’être capable de la sentir. Cette sorte de connexion immédiate entre deuxpersonnesestunechoserare.AvecPerry,j’ail’impressionquenosâmesseconnaissaientetquenousdevonsrattraperletempsperdu.J’avaisoubliéàquelpointc’étaitagréable.
Jeregardesesdentsquandellesourit.Ellessontblanchesmaisloind’êtreparfaites.Sescaninessontpointues,l’unedesesincisiveschevaucheàpeinesadentdedevant,cequilarendencoreplusmignonne.
Etquandelles’approche,jelissursonvisagequ’elleaeuunerévélation.Ilyatoujourscetteflammedanssesyeux–cellequiilluminesonvisagechaquefoisqu’ellebat
despaupières–maiselleal’airapaisée.Celasesentauniveaudesamâchoire,desoncouetdeses
épaules.JepousseOliverettapotelabanquetteàcôtédemoi.Ilrit,maisjel’emmerde.Ellen’estlàque
pour quelques jours, autant profiter d’elle autant que possible et espérer que ce soit un plaisirréciproque,n’est-cepas?
QuandOliver etLola se lèvent pour lui faire de la place, Perry se glisse à côté demoi, nosépauless’effleurent.
–Salut,dit-elleensouriant.–Salut.FinnetHarlowéchangentunregardcompliceàcôtédenous,maisjeneprendspaslapeinede
leurprêterattention.J’aimeraisluidemanderdemeracontersadiscussionavecAnsel,maisjesuissurtouttentédeluidemandertoutcequej’ai toujoursenviedeconnaîtresurlesgens.Quelleest lachoselapluseffrayantequ’elleaitjamaisfaite,oulachoselaplusagréablequiluisoitarrivée,quiestsonchanteurpréféréetquelestlepirelivrequ’elles’estforcéeàfinir…Maiscettefois,j’aienviedemerenouveler.Aveclaplupartdesfilles,j’aijusteenviedelesentendreraconterdeshistoires.Jeleurdemandedemeconfierleurssecretslesplusfous.Est-ceparcequejem’ennuie?Quisait.Maisavec elle, je comprends comme jamais la signification du mot ensorcelé. Je n’ai pas envie dem’amuser d’elle, j’ai envie de m’amuser avec elle. Elle m’attire, mais je n’ai pas envie de toutdécouvrirtoutdesuite.
Nemedonnepastoutd’uncoup.Laisse-moitegoûter,morceauparmorceau.–Toutvabien?jeluidemandeendésignantdumentonAnseletMiaoccupésàcommanderun
verreaubaravantdesedirigerversnous.Elleacquiesce.–Oui, jecrois. (Elle ferme lesyeux,prendunegrande inspirationavecunair sidétenduque
j’aimeraismepencheret l’embrasserdanslecou, làoùrésonnent lesbattementsdesoncœur.Puisellereprendcalmement.)Enfin…
C’estcettemanièred’êtretotalementnaturellequinecessedem’étonner,encoreetencore.Elleneressembleenrienàl’idéequejem’étaisfaited’elleaprèsavoirentendulesrécitsdemesamis.
Je m’attendais à ce qu’elle soit piquante et acerbe. Je m’attendais à ce qu’elle soit froide etdistante.Maiscen’estpaslecas.Elleestdirectemaisdouce,elleaconfianceenelle,maisellen’estpasorgueilleuse.
Seigneur,lehasardfaitdedrôlesdechoses.Anselacessédel’aimeretcen’estpasuncrime,onnechoisitpassonâmesœur.Maisj’ail’impressionqu’elleestunprismequejetiensdanslalumièrepourdéterminersapartdefolie.Jesuissûrqu’elleenaune.Jemedemandesimplementsiellealamêmequemoi.
Oliver lui tapote lamain en continuant à lui sourire. Il ne dit rien de plus, il se contente desourireetacquiesce,etellehochelatêteenretour.Moncœurvaexploser,putain.
Oliverplantesesyeuxdanslesmiensetmarqueuntempsd’arrêt.–Quoi?fait-il.
Ils’essuielabouchecommes’ilpensaitavoirunpeudemousseaucoindeslèvres.–Rien,mec,tuaimesjustelesbonnespersonnes.C’est ce qui m’est passé par l’esprit. Il hoche la tête, sourit, et Lola tend la main pour
m’ébourifferlescheveux.–Desshotspourfêterça?lanceHarlow.Toutlemondegrogne,àpartmoi.–Ohoui.Maisjechoisis.Jesuisassisaumilieude labanquette ronde.Alors,pouréviterde lesobliger tousàse lever
pour me laisser passer, je saute derrière. Tout le monde y est habitué, sauf Perry qui halète desurprise et tend la main, instinctivement, afin de me rattraper. Sa main est petite et froide, fermeautourdemonavant-bras.Jeluidis:
–Çava.Ellemescruteune…deux…troissecondes,puisellemelaissepartir.Mon cœur bat toujours la chamade quand j’atteins le bar, Fred s’avance et pianote sur le
comptoir.–Qu’est-cequetuprendras,Joe?Je jette un coup d’œil derrièremoi pour compter rapidement le nombre de têtes puis jeme
tourneverslui.–DixshotsdePatrón.Ilhaussebrusquementlessourcils,surpris.Engénéral,jeboisunpeun’importequoi.–Patrón,hein?demande-t-ilensetournantpourattraperlabouteille.–Onaquelquechoseàfêter.–Commed’habitude,répond-ilenriant.– Ce soir, c’est différent. (Je jette un coup d’œil derrière moi avec un sourire. Perry a dit
quelquechosequia fait éclaterde rireHarlow,onn’entendqu’elle.)Cesoir, ilsont réussià fairesortirl’échardedeleurpiedetilsontréaliséquec’étaitundiamant.
Chapitre6
Perry
QUANDJEMERÉVEILLELELENDEMAIN,j’aidumalàcroirequelajournéed’hiern’estpasun rêve. J’aipris l’avionpour lesÉtats-Unis. J’aivumesmeilleursamis. J’aienfinparléavecAnsel:pourlapremièrefoisdepuistrèslongtemps,noussommessurlamêmelongueurd’ondeetjepeuxallerdel’avant.Jeneseraiprobablementpasinvitéeàdînerchezeuxetjenelesaideraipasàorganiserunesoiréed’anniversairedesitôtmaisiln’yaplusdemalaise.Jemesensbien.
Jerepousselescouverturesetm’extirpedulitdel’hôtel.Jemesenslégère,unesensationquej’avaisoubliéecesderniersmois. J’avance jusqu’à la fenêtre etouvre les rideaux.Leciel estd’unbleu lumineux, je distingue l’océan par la fenêtre.Les bateaux entrent dans le port, les docks sontenvahispar les joggeurset lesgensquipromènent leurschiens.Lesmouettesvolentdans leciel–cettevilleesttellementbellequejen’aiaucunmalàcomprendrepourquoiOliverachoisideréalisersonrêveici.
Montéléphonesonnesurlatabledechevet,jetraverselachambrepourleconsulter.J’aireçuquelquesmailsetdestextosauxquelsjedoisrépondre,maisriend’urgent.Jepeuxmeconsacrerauxgarçons.EtSeigneur,aprèstoutcetempsetceskilomètresentrenous,jesuisraviedelesretrouver.
JereçoisunmessagedeFinnaumomentoùjedescendsdanslelobbydel’hôtel.JesuisétonnéequeM.Ringardsacheenvoyeruntexto,leFinnquejeconnaissaism’auraitlancéunregardmauvaisetm’auraitditdel’appelersij’avaisbesoindequelquechose.Maintenant,ilvitenCalifornie,ilaunagent,desT-shirtsavecsaphotoetilsaitenvoyeruntexto?Lalistedespointssurlesquelsjepeuxletaquiner s’écrit d’elle-même. Il me dit qu’il est à quelques blocs, que je peux m’installer dans lerestaurantenl’attendant.
L’odeur du café et du bacon me submergent à l’instant où je passe la porte, mon ventregargouille.Jehèleunserveurpourluidemanderunetablepourdeuxetlesuisdanslerestaurant.
Finnarrivequelquesminutesplus tard, l’excitationenvahitmesveinesà l’idéede l’avoir rienquepourmoipendantunpetitmoment.Je tiens tellementàcesgarçons. Ilmesouritetsefrayeun
chemin jusqu’à notre table, enlève sa casquette et passe une main dans ses cheveux en m’offrantl’opportunitédeleregarderdehautenbas.
–MonDieu,tuasdecesbiceps!Ilrouledesyeuxets’assiedenfacedemoi.–Doucement,Frenchie.–Jesaisqueçafaitlongtempsqu’onnes’estpasvus,maisdepuisquandt’es-tutransforméen
Popeye?Iléclatederireetjetteuncoupd’œilaumenu.–TucroisquelesgenssaventencorequiestPopeyedenosjours?Jel’ignoreetdemande:–Tuastoujoursétéaussimusclé?Jenem’ensouvenaisplus.Jetendslebraspourmesurerlalargeurdesesbicepsavecmesdeuxmains.Finnregardeostensiblementsamontre:–Turentresquand,déjà?Jemerassiedsdansmonsiègeetboisunegorgéed’eau.–Cen’estpasmafautesituressemblesàCaptainAmerica.Aprèsonsedemandepourquoiils
t’ontproposédefairedelatélé.Finnretournesatassedecaféquandlaserveuses’arrêteauniveaudenotretable,ellelaremplit
etprendnoscommandes.–Donc,tuasapprispourl’émission?Ilsiroteunegorgéedesoncafé–noir,commeill’aime–,lebreuvageestsichaudquelemug
fume.Êtreaveclui,ici,savoirquemêmeaprèstoutcetemps,ilboittoujoursducafénoir,etqu’ilesttoujoursaussiimpatient,incapabled’attendrequ’ilrefroidisse,estréconfortant.
–Biensûrquej’enaientenduparler.Commetoutlemonde.Oliverm’aenvoyéunecoupuredejournaletj’aivutaphotodanslagaredeLille.
–Pourquoinem’as-tupascontacté?Ilpenchelatêtepourmeregarder.Jehausselesépaules.–Jenesaispas.Onacontinuéàs’écriredetempsentempspoursedonnerdesnouvelles,mais
j’avais trop honte pour t’appeler. C’est aussi peut-être parce que j’avais le sentiment qu’après larupture,Anselavaitledroitderestervotreami,àOliverettoi,etpasmoi.
Ilsouritetcroiselesbrasdevantlui.Maissonsouriren’estpasamusé,ilestdoux,commeunemanière deme prouver à quel point il m’aime. Le silence s’étire, le sourire de Finn devient unemoue,ilfroncelessourcils,l’airsoudainconcentré.
–Tusaisquepersonneneteblâmait,n’est-cepas?Onapenséquetut’étaiscomportéecommeuneconnasseetquetuavaisdéconné,maisonteconnaît.EtAnselaussi.Oncraquetousàunmomentouunautre.
–Jelesaismaintenant.Ettouts’estarrangé.–Bien.
Ilboitunenouvellegorgéedecafé.C’estcequej’aimechezFinn:ilsuffitdeluidirequ’onvabienpourqu’illecroie.Iln’essaie
pasdesavoiràtoutprixcequevouspensezoud’analyserchacunedevospensées.Ilvousfaitassezconfiancepoursavoirquevousditeslavérité.
–Jesuisheureusepourlui,pourvoustous,j’ajoute.D’ailleurs,parle-moidetafemme.C’est…(jecherchemesmots)quelquechose.
Finnéclatederire,trèsfort,sesyeuxpétillentdemalice.–Clairement.Etj’aimeêtremarié–j’adoreça,putain,j’adoreça.Nousprenonsquelquesminutespour rattraper le tempsperdu, pourparler de la santéde son
pèreetdetouslesproblèmesdesesfrèresquandlepetitdéjeunerarrive:porridgeetfruitspourmoi,œufsetcharcuteriepourFinn.Ilneperdpasuneminuteetcommenceàmanger.
–DonctuvisentreVancouveretici?Ilacquiesceenattrapantleketchup.–Jusqu’àlafindel’émission.–Çaal’aircompliqué.Ilhausselesépaules.–Oui.Parfois.–Etcommentçasepasse?Jedoisavouerquejen’aijamaisimaginévoirFinnRobertsàlatélé.–Moinonplus.Jusqu’icitoutvabien.Ilsmepaientincroyablementbienet,aussichiantqueça
puisseêtreparfois,j’appréciedefairecequej’aimesansm’inquiéterdequestionsd’argent.(Ilavaleunebouchée,mâcheetlafaitpasseravecunegorgéedecaféavantdecontinuer.)Tuesalléevoirlalibrairied’Oliver?
–Oui.Jeneconnaisrienauxcomics,maisçaal’airgénial.Çaressembleexactementàcequ’ilnousdécrivait.
–Tuas remarqué?Etc’est toujoursbondé.Dieumerci,Not-Joeestplus intelligentqu’iln’yparaîtetOllspeuts’absenterdetempsentemps.
–TuveuxdireDylan.(Ilmeregardebizarrement,commes’ilnesavaitpasdequijeparlais.)Letypemignonquitravailleàlalibrairie?
Finnseredresseetposesafourchetteàcôtédesonassiette.–Euhoui.(Ilmedévisageunpeupluslonguement.)Mignon?Jehausselesépaulesetmangeunecuilleréesupplémentairedeporridge.–Ehbien,oui,jetrouve.–Cen’estpastongenre.J’éclatederireenvoyantsesépaulescontractées,sonairprêtpourlecombat.–Commentpeux-tu lesavoir?C’estpeut-êtrepourçaque leschosesn’ont jamaisfonctionné
pourmoi–peut-êtreparcequejemesuistoujourstrompéedegenre.Finnmedévisage,l’airsuspicieux.–Tucomptesyretourneraujourd’hui?
Jemélangemonporridgeenignorantsonregardinsistant.–Ouais, après le petit déjeuner.Oliver n’y était pas quand je suis passée la première fois, je
croissavoirqu’ilaenviedemefairefaireletourdupropriétaire.–Certes.Ehbien,jepeuxt’accompagner,siçatetente.J’éclatederire.Ilnepeutpass’empêcherd’êtresurprotecteur.–Commesij’allaistelaissert’échappersirapidement.Turêves!Jem’essuielaboucheetposemaserviettesurl’assiettedevantmoi.–Quandpars-tu?demande-t-il.Onpourraitpeut-êtreallerfaireduvélotousensembleavantton
départ.Monrythmecardiaques’accélère.–J’adorerais!Etjenesaispas,enfait.Monbilletestopen,maisjedoisretravaillermonCVet
réorganisermonportfolioàunmomentouunautre.Probablement leweek-endprochain.Onpeutplanifierçad’icilà?
–Carrément,dit-ilenarrachantlanoteàlaserveuse.Maintenantallonsàlalibrairie,j’aihâtedevoirOliverdéroulerletapisrougepourtoi.
Leweek-end,nouspartonsfaireduvélo:nousempruntonsdessentiersplusraideslesunsqueles autres, en transpirant comme des fous.Oliver, Finn,Ansel etmoi, ensemble à nouveau sur laroute,dévalantlescheminsdemontagne,hurlantdesencouragementsdanslesmontées.C’estencoremieuxqu’avant.
C’estencoremieuxqu’avantentrenous.Ensuite,nousretrouvonsMia,Harlow,LolaetDylandansunpetitcaféàAlpine,oùnousbuvons
delabièrebruneetmangeonstellementquejesuisàdeuxdoigtsdem’endormir.Dylannousapportelesbraceletsqu’ilafabriquésengardantlapetite-filledeFredetjemetslemien,enmedemandantpourquoic’estleseulquin’apasl’aird’avoirétéconfectionnéparunepetitefilledecinqans.
Etfinalement…jeneréservepasdevolretour,aprèstout.Unesemaineentièrefileetjeréaliseque je n’ai pas encore regardé les horaires. Tous les jours, je trouve une excuse pour aller à lalibrairied’Oliver.
Jedoisl’inviteràdéjeuner.Jedoisluiapporteràdéjeuner.JechercheFinn.J’aiabsolumentbesoind’emprunterunchargeurdetéléphone.Jedoisrendreunchargeurdetéléphone.J’aioubliémeslunettesdesoleilsurlecomptoir,paraccident.Chaquefoisquej’entre,laclochettetinteau-dessusdematêteetDylansefige,mesouritcomme
si j’étais lameilleure amiequ’il venait de retrouver etme laissepasser le restede la journée à le
suivredanslapetiteboutique.Nousparlonsdelivres,devêtements,d’architectureetdevaches.Ilmeregarde,ilmesouritetc’estcommesijequittaisleblizzardpourbronzerausoleil.Çasemblefou,jesaisqueçal’est,maisilestsibiendanssapeauquejemesensbiendansla
mienne.
Noussommesmardi.Ledeuxièmemardidepuisquejesuisarrivée,etjesuisarrivéeunjeudi.–Alors çay est, c’est officiel, tu travailles ici ? lanceOliver endéposant unepiledebandes
dessinéessurlecomptoirdevantlui.Je jette un coup d’œil à l’exemplaire de Tank Girl que Dylan a laissé pour moi avec des
instructionspourappréhender«lesnuancessubtilesdesonpersonnage»etendiscuteràsonretour.Jen’avaisjamaisréaliséqu’ilpouvaityavoirdesnuancesdanslesbandesdessinées.
Oliverattenduneréponse,maissoyonsréalistes,jen’enaipas.–Honnêtement,jenesaispascequejesuisentraindefaire,Olls.Ilsouritetjesensqu’illitlaprofondeurdudilemmequevais-jefaireensuiteputaindansmes
yeux,maisiln’insistepas.–Jenemeplainspas,loindelà.EntreLolaettoi,iln’yajamaiseuautantdelecteursmasculins
traînantici.Jeposemonlivresurlecomptoiretjetteuncoupd’œilàlalibrairie.–J’aimepasserdutempsici.J’aime…passermajournéeavectoi.Oliveréclatederireenfaisantletourducomptoirpourrécupérerunepiledelettresàparcourir.–Ouais…–Quoi?–C’estmignon,maissuis-jevraimentcensécroirequetuesicipourmoi?Jeledévisageetlance,hésitante:–Queveux-tudireparlà?–Tupassestouttontempsaveccelui-là,dit-ilendésignantDylanoccupéàsouleveruncarton.
Hier, tu n’asmême pas levé les yeux quand je suis arrivé. Je suis entré, vous étiez tous les deuxpenchéssursontéléphone,entrainderire.
– Il est drôle. (Je baisse les yeux, enlève un cheveu sur mon pull.) Je n’ai jamais rencontréquelqu’uncommelui.Iltransformelessujetslesplusbizarresenconversationsfascinantes.Ilvoitleschosesdifféremment.
Oliverrenifle.–Ça,c’estsûr.
–Jepensevraimentcequejedis.(J’attrapeuneenveloppeetladésigned’unsignedetête.)Toietmoi, en regardantcetteenveloppe,onpenseraitqu’il s’agitd’uneenveloppeetqu’elleestbleue.Dylanraconteraitqu’ilavisitéuneusinedepapeteriequandilétaitpetitetexpliqueraitqu’ilsutilisentuncolorantspécifiquepourobtenircettetonalité.Quecebleuestlemêmebleuqueceluiduplumagede certaines hirondelles qui vivent seulement dans l’Himalaya ou quelque chose dans le genre, etcomment la simplevuedecettecouleurou la sensationde sesdoigts sur lepapier le renvoieàcesouvenir.Àl’usinedepapeterie,pasàl’Himalaya.
–Ilpourraitaussiteraconterqu’ils’estcoupéenessayantdefermeruneenveloppeavecsabite,répliqueOliver.Maisaprèsvousavoirobservéstouslesdeuxcesdernièressemaines,j’imaginequetuéclateraisderireetquetuluidemanderaisdequellecouleurétaitl’enveloppe.
Je laisse tomber l’enveloppesur lapileetparcours laboutiqueduregard.Jenesaispasquoirépondremaisjeferaismieuxdetrouveruneidéepourl’empêcherdecontinueràparler.
Olivercroiselesbras,s’appuiesurlecomptoir.–Ilteplaît.J’yréfléchisuninstantenregardantlesmusclesdudosdeDylansetendrequandilramasseune
boîte,jedevinesoncorpsàtraverssonT-shirt.Physiquement,ilneressembleenrienauxhommesquim’attirentengénéral:ilestbeaumaisdébraillé.Maisilauntrèsgrandcœuretunespritencoreplusaiguisé.
–Peut-être.Est-cequeceseraitsigravequeça?Oliveravanced’unpasetmepasseunbrassurlesépaules.–Cen’estpasgravedutout.Dylan choisit cemoment pour venir vers nous, enme souriant quand il ramasse une pile de
cartonsetlesapporteaufonddumagasin.Ilsifflote:–Jedéplacejustequelquescartons,j’arrivetoutdesuite,joliePerry…Àcôtédemoi,Oliverglousseetsecouelatête.–Disonsquejenepensepasqueçaposeproblème.Vraimentpas.
Chapitre7
Not-Joe
L’AMBIANCEESTTRÈSCALMEPOURUNVENDREDIetjesuisétonnédenepasêtreobligédemettrequelqu’undehorsàl’heuredelafermeture.
Jesorslesclésdemapoche,lesfaistinterdansmamain.Iln’yaquePerryquilitinstalléesurlecanapé,devantlavitrine.Elleestplongéedanslalecture
deNimona.C’estunesuper-bandedessinée,maisc’estunelecturefacile,etellenepeutpasenêtreseulement
aupremiertiersdel’album,mêmesielleadumalàlireenanglais.Ellejouelamontre.–Salut,dis-jeenmeglissantàcôtéd’ellesurlecanapé.Ellelèvelesyeux,appuielatêtesurlescoussinsetmedévisagedesonregardcalme.–Salut.Ladernièresemaineetdemieaété…intense.Elleapassé son temps ici etm’abeaucoupparlé.C’est étrange, j’ai l’impressiond’avoirune
nouvelleamiemystérieuse,etjenesaispasvraimentpourquoi.Jenemeplainspas.Jesuisfoud’elle.Maisjesaisaussiqu’ellevabientôtrentrerenFranceet
quemêmesijesuispersuadéquejeprendraisdubontempsenallantplusloinavecelle,j’aipeurdecequejeressentiraiaprèssondépart.
–Jevaisbientôtfermer.Ellehausselesépaules.–C’estbiencequimesemblait.Lesilence,lourdetintense,s’installeentrenous.Seigneur.Juste…audiable!–Tuveuxvenir chezmoi?
Jenebégayemêmepasetmonrythmecardiaquerestecalme.C’estcequejedésire.Jeladésire.Jeveuxpasserplusdetempsavecelle,jeveuxl’avoirtoutàmoidansmonappartement,dîneravecelle,regarderquelquechose,fairequelquechoseouparlerdequelquechose.
Ellehochelatêteetrefermelelivre,l’airsatisfait,selèveetlerangesuruneétagère.Elleporteunjean,destalons,unT-shirtavecuneénormerosedessus,maisondiraitqu’elleest
nue.Cen’estpasparcequesatenueestobscène–pasdutout.Maiselleportesesvêtementscommeunesecondepeau.Elleportetoutcommeça:naturellement.
Quandelle se tourneversmoi, je luiprends lamain.Çame rappelleàquelpoint sapeauestdouceetfraîche.Etencoreunefois,jenesaispaspourquoijelefais,maisjemesensbien.Elleaussi,ondirait…oualors,elleneveutpasheurtermessentiments.
Moninstinctm’obligeàvérifier:–Çava?dis-jeenlâchantsamain.Maiselleresserrelesdoigtssurlesmiensetm’attireverslaporte.–Viens.J’aifaim.Surletrottoir,elleattendquejefermelaporte.Jesenssonregardsurmoi.Jesenssonattention
fixéesurmonvisage,elleneregardeailleursque lorsquesescheveuxluiviennentdans lesyeuxàcauseduventetqu’ellereplacesesmèchesderrièresesoreilles.
Sescheveuxressemblentàducuivre.Glissantsetbrillants.Desmèchesmétalliques,quelesoleilducouchantillumine.
–Tuescalmeaujourd’hui,dit-elle.– Je n’ai pas mangé de banane au petit déjeuner. Celle qui restait chez moi était marron et
dégueulasse.J’aibeaucoupplusdechosesàdireetencoreplusd’énergiequandj’enmangeuneauréveil.
Elleacquiesce, commesi celaavaitdu senspourelle,mêmesi je saisqu’elle sait–etque laplanèteentièresait–quejedistoutcequimepasseparlatêtesansréfléchir.
–Lesbananessontunesourcetrèsimportantedepotassium,dit-elle.J’éclatederire,parcequec’estexactementlegenrederemarqueridiculequejepourraisfaire.–Exactement.Nousnoustaisons,ellepenchelatêteversmoi.–Pourquoiest-cequejemesenstellementbienavectoi?Jesupposequ’elleveutuneréponse;Perryn’estpasdugenreàposerdesquestionsrhétoriques.Jehausselesépaules.–Peut-êtreparceque tusensque tumeplaismêmesi jene teconnaispas trèsbien?Pluson
passedetempsensembleetmieuxc’est.–Tuasunecopine?–Jenetetiendraispaslamainsij’avaisunecopine.Ellehausselesépaules.
–Jenesaispas.Tumesemblesdugenreàtenirlamaindesfilles.Jevoulaisjusteteposerlaquestion.
Seigneur,jecomprendsmieuxtoutàcoup.–Alors,jesuiscontentquetul’aiesfait.Noustournonsaucoindelarue,ellemesuitjusqu’àlaplacedeparkingoùj’aigaréBetty.Jedéverrouillesaporteenforçantunpeu,etPerrymontesansfairedecommentaire.J’apprécie
qu’ellenetentepasdementirenmedisantquecettevieilleferrailleestgéniale.CertainespersonnespensentqueBettyestincroyable,mêmesielleestassezlaide.Ellesentlevieuxcuiretj’imaginebienquejesuisleseulàtrouverqu’ilestagréablederoulerdansBetty.
Lemoteurrugit,jepasselapremièreetmanœuvretoutenparlant:–Ilyauntypequis’appelleGerdGigerenzerquifaitdesrecherchessurlaprisededécision.(Je
luijetteuncoupd’œil.)Ilexpliquequ’ondevraitleplussouventsefondersurnotreinstinctetsurdesraisonnementssimplespouragir.
Perrymeregardedanslesyeuxethochelatête,l’airpassionnéparmaconversation.Ellenemesouritpascommemesamisavecl’airdedireohSeigneur,c’estreparti.Cesourirenemedérangepas,jelecomprends.Maiselle,ellesaitquecettephrasenesortpasdenullepart,etc’estplutôtcoold’êtreavecquelqu’unquiavraimentenvied’entendrelasuite.
– Ilneproposepasd’utiliserdesstatistiquespourprendredemeilleuresdécisions. Ilparledel’intuition.Genre,croireentoiettirerlesenseignementsdetapropreexpérience.
Ellesourit,l’airincertain.–D’accord…–Ilparlesurtoutd’économieetd’investissement,maisjenesaispas,jeviensd’ypenser,iladit
unjour:sivousvivezdansunmondeincertain,simplifiezleschoses.Sivousvivezdansunmondetrèsprévisible,complexifiez-les.
Perrysecouelatête.–Jenevoispasoùtuveuxenvenir,maisjet’écoute.–Habituellement,jenesaispasoùjevaisavecmesidéesmaistuasdelachance,aujourd’hui,
c’estuneexception.Jeluifaisunclind’œil.Ellerenifleetjecontinueenm’insérantdanslacirculation.– Il veut dire qu’il faut utiliser des modèles mathématiques quand les circonstances sont
prévisiblesetdesmodèlesintuitifsquandlescirconstancessontcomplexes.(Jelaregarde,ellehochela tête.) Sous beaucoupd’aspects,mavie est prévisible. (Je glousse.)Mes parents sont prévisibles,monentourageaussi.Chaquefoisquejefaisquelquechosed’étrange,Oliverrit,cequiaugmenteleschancesquelaprochainefoisoùjediraiouferaiquelquechosed’étrange,ilauralamêmeréaction.De la même manière, je surfe aux mêmes endroits et je tente des figures que je ne devraisprobablementpasréaliser.Maisplusjelefais,etplusjesurvis,plusleschancesserontgrandespourque,laprochainefoisquejeferaiquelquechosedefou,jesurvive.Danslaplupartdemesdécisions,lesprobabilitéssonttrèsutiles.
–D’accord…Nousnousarrêtonsàunfeurougeetjemetourneverselle.– J’évolue dans un monde incertain avec toi, mais malheureusement je n’ai pas assez
d’expériencepourprendreuneinitiativequisimplifieraittout.Moninstinctdéconne.Elleavalesasalive,lesyeuxécarquillés,etacquiesce,soudainsérieuse.–Ilyabeaucoupd’inconnues:quituespourAnseletMia,pourquoituesici,combiendetemps
tucomptesrester.Situasbesoind’unedistractionousitutesenssimplementcommelacinquième roueducarrosse.Sijeteplais.SituasunmecenFrance,situasenviederentrerenFrance.(Jeluisouris.)Tumesuis?
Elleacquiesce:–Oui.–Alors,ondevraitfaireleschosessimplement.Ladéceptionsepeintsursonvisage,monsangseréchauffe.– Je veux dire : agir selon notre instinct. (Le feu passe au vert, j’accélère. Elle ne répond
toujourspas,jemelance.)Tumeplais.J’entendssonsouriredanssavoix:–Tumeplaisaussi.Etc’esttoutcedontj’aibesoin.Delasimplicité.–Chouette.(J’entresurl’autoroute.)Tuaimeslacuisinethaïe?Perryrit,secouelatête.–Tuenasfiniavectesanalogieséconomiquessurlaprisededécision?–Ettoi?Perryplisselesyeux,puisellemesouritd’unairmalicieux:–Oui,j’aimelacuisinethaïe.
Nousemportonslesplatschezmoi,jem’attendsàressentirlatensionliéeàlaprésenced’unefemmedansmonappartement,laquestionobsédanteonvalefaireoupas?,mais riennevient.Perrymesuitets’arrêteaumilieudelapièce,regardanttouteslesœuvresd’artautourd’elle.
Je sais ce qu’elle voit : les murs couverts de photographies, de peintures, de masques, desculptures.Certainsobjetsproviennentdemesvoyagesdansdifférentspays,nombred’entreeuxsontlefruitd’unéchangeavecmesamis:uneœuvred’artcontremonaide,conseilenfinance,réparationdevoiture,fairepasserunCVàmonpère.
Elle cligne des yeux et observe mon salon : canapé, fauteuil, table. Mes parents m’ont toutdonné:mamèrerefaitladécorationtouslescinqans,maisjegardel’ensembledesmeublesdepuisquinzeans,parcequemêmequinzeansaprès, ilsmeplaisent toujourset je les trouvepresquetropsophistiquéspourmonstudio…
Perrymedévisage,l’airsurpris,maisjen’arrivepasàdéchiffrersonexpression.–C’estbienrangé.–Cen’estpastoujoursbienrangé.Ça semble lamettre un peu plus à l’aise, et jeme souviens soudain des tendancesmaniaques
d’Ansel.Ellemesourit:–J’aimetesœuvresd’art.–Merci.Jeposelesplatssurlatableàmangeretrécupèredesassiettesdanslacuisine.MaisPerryattrape
lesbaguettesetcommenceàpiocherdanslaboîteencartontoutenobservantlesalentours.EllesefigeenfacedutableauquemonamieTerraapeintpoursonprojetdefind’études.Elle
lecontemple.C’estimpressionnant.Ils’agitdelapeintured’uncouple.L’hommeregardelafemme,commes’ilessayaitdepercersessecrets.Lesyeuxdelafemmesontfermés,sonvisagepenchéverslamaintenduedel’homme.Lapeintureestépaisse,lesaplatsdonnentuneffettournoyant–c’estlestyledeTerra,pourquelespectateursentelepoidslittéraletmétaphoriquedel’art–etlescouleurssedéclinentdanslestonsdebleu,crèmeetgris.Seulesleurslèvressontd’unrougebrillant.
–C’esttellementmignon.Lamanièredontillaregarde,ditPerry.Laplupartdesgenss’arrêtentsurlacouleurdesbouches.J’appréciequecenesoitpascequ’elle
remarqueenpremier.– C’est ce que j’aime dans ce tableau, moi aussi. Elle n’en a même pas conscience. Il ne la
regardepaspourqu’ellelevoielaregarder.Ellesetourneversmoi:–As-tudéjàétéamoureux?Je mâche mes nouilles en y réfléchissant. Je repense à ma relation d’un an avec Mandy, à
l’université.J’avoue:–Non.–Pourquoipas?Quelâgeas-tu?–J’aivingt-troisans.(Lessouvenirsaffluent,jemevoismettrelewater-poloavanttoutlereste.)
Etjenesaispas.(Jereprendsunebouchée.)J’aieuunecopineàlafac.Jen’étaispasamoureuxd’elle,parcequej’étaisstupide.
–J’aidumalàimaginerquetuaiespuunjourêtrestupide.–Oliverneseraitsûrementpasd’accordavectoisurcepoint.J’aicompristroptardàquelpoint
elleétaitgéniale.Elleacquiesce,enregardantànouveaulapeinture.Ellesourit.–Étais-tuamoureused’Ansel?Ellehochelatêteetj’enfourneplusdenouillesdansmaboucheenessayantdemesurerl’effetde
cet aveu surmoi. Çame rend à la fois heureux etmalheureux.Après avoir avaléma bouchée, je
demande:–Es-tutoujoursamoureused’Ansel?Elle continue àmanger enme faisant attendre sa réponse.Elle réfléchit peut-être.Finalement,
ellelance:–Non.Jel’aime,maisentantqu’ami.Entrenous,c’étaitmalsain.Jegrogne.–Jen’aimepascemot.C’esttrèscliché.–Parcequelesgensl’utilisentdansdescasoùcen’estpasvrai,dit-elleenriant.Maispournous
c’était vrai.On a tout fait pour qu’il ressente quelque chose qu’il ne ressentait pas, donc on a faitsemblantpendanttrèslongtempsetons’enestbeaucoupvouluàlafin.
Je ladévisageetfrissonne.C’estsuper-déprimant,putain.Si jenedispasdebêtises,Anselestrestéavecellependantunbonmoment,genredesannées.
–EtsionregardaitunépisodedeMatlock?–Matlock?Cettevieillesérie?(Perryéclatederireet j’acquiesce.)Tumetrouvesduvin, je
regardeunépisodedeMatlock.Jeluimontremesbouteillesprèsdelatable,elles’approchepourchoisirpendantquejecherche
latélécommandeetallumelelecteurdeDVD.Deux semaines. Je la connais depuis deux semaines et quand elle revient avec deux verres à
cocktail et une bouteille de vin ouverte et se laisse tomber dans le canapé à côté de moi, j’ail’impressionquec’estmapetitecopine,masœuretmameilleureamie.
–J’aimelamanièredonttubouges.Ellemedévisage,l’airfaussementscandalisé.–Jepensecequejetedis.Tutedéplacescommedel’eauoucommeunNinja.–Cesontdeuxchosestrèsdifférentes.Ellesepenche,verseduvindans lesverreset jem’efforcedenepasreluquersoncorps trop
ostensiblement.–Pasvraiment.Ellesecouelatête,boitunegorgéeetm’examine.–Tuaimeslamanièredontjebouge.J’inspire profondément, en me concentrant sur son odeur, douce comme une fleur mais pas
artificielle.Jel’imaginesefrotterdespétalesderosedanslecoutouslesmatinsetj’éclatederire.Jesuisaussifleurbleuequ’unegamine.
–Moiaussi,j’aimetamanièredebouger.C’estcommesitu…commentdire?(Ellesetapoteleslèvres.)Dansais?Cen’estpastoutàfaitça,c’estcommesitubougeaiscommeça.(Ellesautesurlecanapéenlevantlesbrasenl’air.)Tuesbiendanstapeau.
–C’estparcequejevisnudansmonappartement.Ellerougit.–Tuvisnu?
–Ouais.(Jeluisouris.C’estvrai.)Jerestelà,jedessine,jelisoujecuisine.JeregardeMatlock.Àpoil.
Avantquej’aieletempsderéalisercequ’ellefait,elleselèveetenlèvesonT-shirt.Elleretireseschaussures,enlèvesonjeanets’assieddanslecanapéensous-vêtements.Ellemesouritavecl’aird’uneadolescenterebelle.
BonDieu,oui.Jemelève,l’imiteenenlevantmonshortetmonT-shirt.–OnregardeMatlockensous-vêtements.Perryglousseenserecroquevillantsurelle-même.–C’estparfait.Puiselles’étire,commeunchat,ets’approchedemoi.Je suis chaud, elle est douce et froide, la température de nos peaux s’équilibre. J’attrape son
verredevin,jeleluitendsetprendslemien.Ellepasseunecuissesurlamienne,entrelacenosjambesetquandjemetourne,ellemeregarde
fixement.Donc,jel’embrasse.Maboucheest sur la sienne, toutedouce, jem’attarde, surprispar leplaisirquecebaiserme
procure.Jeréalisesoudainque,mêmesij’aienviedetoutvivreavecelle,elleseremetàpeined’unerupture,etjenepeuxpasm’attendreàcequ’elles’engagetoutdesuitedansquoiquecesoit.
Elleselaisseallercontremoi,lesyeuxouverts,sucemalèvreinférieure.Jegémisdoucement.Jesaisdéjàqu’onsecontenterades’embrassercesoir,queceneserapasfou,sauvageoucochon.Mais la sensationqu’ilyaquelquechosedeplusentrenousnemequittepas,etcettealchimiemedonnelachairdepoule.
Perry s’écarteunpeu, s’effleure les lèvreset sourit enmecontemplant, avantde se retournerverslatélévision.Elleappuielatêtesurmonépaule.Jesenssamaindanslamienne.
–J’aimeça,c’estbien,murmure-t-elle.Mêmesielleaprononcécesmotsenfrançais,j’aicompris.J’acquiesceetrépondssimplement:–Ouais.
FIN
Retrouveztoutel’actualitédelasérieWildSeasonsdeChristinaLauren,etdesautrestitresdelacollection«NewRomance»,surnotrepageFacebookdédiée:
www.facebook.com/HugoNewRomance
www.hugoetcie.fr
DÉCOUVREZLESAUTRESTITRESDELACOLLECTIONHUGONEWROMANCE®
hugonewromance
www.festivalnewromance.frwww.hugoetcie.fr
Hugo&RomanRomansparusetàparaître
danslacollection«HugoNewRomance®»:
DeChristinaLauren:TheBeautifulSeriesBeautifulBastardBeautifulStrangerBeautifulBitchBeautifulSexBombBeautifulPlayerBeautifulBeginningBeautifulBelovedBeautifulSecretBeautifulBossBeautiful(Beautiful,Tome10):octobre2016
SérieWildSeasons
WildSeasons-tome1,SweetFilthyBoyWildSeasons-tome2,DirtyRowdyThingWildSeasons-tome3,DarkWildNightWildSeasons-tome4.5,Not-JoeStory(nouvelle):juin2016
DeAnnaTodd:SérieAfterAfter-saison1After-saison2,WecollidedAfter-saison3,WefellAfter-saison4,WeriseAfter-saison5,Everhappy
SérieBefore
Before-saison1Before-saison2SlowBurn-saison1,Protège-moiSlowBurn-saison2,SoustaprotectionSlowBurn-saison3,Enfinréunis?
DeJayCrownover:
MarkedMen-Saison1,RuleMarkedMen-Saison3,Rome:mai2016
DeLaurelinPaige:SérieYouYou-tome2,FoundinYouYou-tome3,ForeverwithYou
DeLexiRyan:SérieUnbreakMe
UnbreakMe-tome1UnbreakMe-tome2,Siseulement…UnbreakMe-tome3,RêvesvolésRecklessandReal-tome1,SomethingReckless:décembre2016
DeEmmaChase:SérieLoveGame:LoveGame-tome1[Tangled]LoveGame-tome2[Twisted]LoveGame-tome3[Tamed]LoveGame-tome4[HolyFriggingMatrimony]LoveGame-Romancourt[Tied]
Nouvellesérie:LegalBrief
LegalBrief-tome1:novembre2016
DeC.S.Stephens:SérieIndéciseIndécise-tome1,IndéciseIndécise-tome2,InsatiableIndécise-tome3,IntrépideIndécise-tome4,Sensible:mai2016Indécise-tome5,Sauvage:juillet2016
DeKatyEvans:
FightforLove-tome1,Real
FightforLove-tome2,MineFightforLove-tome3,RemyFightforLove-tome4,RogueFightforLove-tome5,RippedFightforLove-tome6,Legend:juin2016
DeK.Bromberg:
Driven-saison1Driven-saison2,FueledDriven-saison3,CrashedDriven-saison3.5,RacedDriven-saison4,Aced
DeColleenHoover:Standalones:
UglyLoveMaybeSomedayMaybeNotConfessNovember9:septembre2016
DeColleenHoover&TarrynFisher:Nouvellesérie:Never-Never
NeverNever-saison1:octobre2016NeverNever-saison2:novembre2016NeverNever-saison3:décembre2016
DeMiaSheridanStandalone:
Archer’sVoice
NouvellesérieLeo
Leo-saison1,Leo:septembre2016Leo-saison2,Leo’sChance:octobre2016
DeAlessandraTorreStandalone:
BlackLies
DePenelopeWardStandalone:
StepBrother:mai2016
DeFleurHanaStandalone:Feelinggood:mai2016