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ACADEMIE DE PARIS
Année 2014
MEMOIRE
pour l’obtention du DES
d’Anesthésie-Réanimation
Coordonnateur : Monsieur le Professeur Didier Journois
par
AUDREY TANTOT
Présenté et soutenu le 8 avril 2014
Influence du choc hémorragique et du traumatisme crânien grave sur la coagulopathie liée au traumatisme, évaluée par
thromboélastographie
Travail effectué sous la direction du Docteur Samy Figueiredo
et validé par le Professeur Jacques Duranteau
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Table des matières
LISTE DES ABREVIATIONS 4
1. INTRODUCTION 5
A. TRAUMATISME SEVERE : DONNEES GENERALES 5 B. COAGULOPATHIE LIEE AU TRAUMATISME 5 1. GENERALITES 5 2. PHYSIOPATHOLOGIE DE LA COAGULOPATHIE LIEE AU TRAUMATISME 7 A) LE MAINTIEN DE L’HOMEOSTASIE CELLULAIRE 7 B) MECANISMES PHYSIOPATHOLOGIQUES 9 C. OUTILS DIAGNOSTIQUES DE LA COAGULOPATHIE LIEE AU TRAUMATISME 11 1. LES TESTS D’HEMOSTASE STANDARD 11 2. BIOLOGIE DELOCALISEE : LES METHODES VISCOELASTIQUES 12 3. INTERETS ET LIMITES DES DIFFERENTES METHODES DANS L’EVALUATION DE L’HEMOSTASE 16 4. RECOMMANDATIONS ET PRATIQUE COURANTE 18 D. INFLUENCE DE LA PRESENCE D’UN CHOC HEMORRAGIQUE ET D’UN TRAUMATISME CRANIEN
SUR LA COAGULOPATHIE LIEE AU TRAUMATISME. 19 1. INFLUENCE DU CHOC HEMORRAGIQUE. 19 2. INFLUENCE DU TRAUMATISME CRANIEN 20 E. OBJECTIF DE L’ETUDE 23
2. PATIENTS ET METHODE 24
A. POPULATION D’ETUDE 24 B. DEROULEMENT DU PROTOCOLE 25 1. VALIDATION DU PROTOCOLE 25 2. RECUEIL DES DONNEES DEMOGRAPHIQUES ET CLINIQUES 25 3. RECUEIL DE DONNEES BIOLOGIQUES 26 4. L’ANALYSE PAR THROMBOELASTOGRAPHIE 26 5. RECUEIL DE DONNEES COMPLEMENTAIRES 27 6. DEFINITION DES GROUPES 28 C. ANALYSE STATISTIQUE 28
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3. RESULTATS 30
A. POPULATION ETUDIEE 30 B. ETUDE DES PARAMETRES D’HEMOSTASE STANDARD AU SEIN DES GROUPES 33 C. ETUDE DES PARAMETRES TEG AU SEIN DES GROUPES 34 D. ANALYSE DE L’INFLUENCE DU CHOC HEMORRAGIQUE ET DU TRAUMATISME CRANIEN SUR
L’HEMOSTASE 35
4. DISCUSSION 37
5. RESUME 44
BIBLIOGRAPHIE 46
ANNEXES 50
1. TABLEAU DE RECUEIL DES DONNEES. 50 2. SCORE AIS INTRACRANIEN SPECIFIQUE : REFERENCES AIS 1998 ET 2005. 51 3. COMPTE RENDU DU COMITE DE PROTECTION DES PERSONNES. N° PP 14-‐004 53
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Liste des abréviations
CGR concentré globulaire CL contrôle CH choc hémorragique FC fréquence cardiaque Fg fibrinogène g/dl gramme par décilitre G/l giga par litre g/l gramme par litre INR International Normalized Ratio IMC Indice de Masse Corporelle ISS Injury Severity Score J1 Jour 1 J7 Jour 7 Nb nombre NS non significatif PAD pression artérielle diastolique PAI1 inhibiteur de l’activateur du plaminogène de type 1 PAM pression artérielle moyenne PAS pression artérielle systolique PFC plasma frais congelé TAFI inhibiteur de la fibrinolyse activée par la thrombine TC traumatisme crânien TCA temps de céphaline activé TCI traumatisme crânien isolé TP taux de prothrombine tPA activateur plamatique du plasminogène TT temps de thrombine TRISS Trauma Injury Severity Score
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1. INTRODUCTION
A. Traumatisme sévère : données générales Le traumatisme grave est la première cause de mortalité à travers le monde avant 45 ans. La mortalité précoce est particulièrement sévère : 66% des décès surviennent durant la phase pré hospitalière et plus de 20% dans les 48 premières heures de prise en charge. Les deux principales causes de décès précoce sont le choc hémorragique et le traumatisme crânien grave. L’hémorragie peut entraîner le décès soit par exsanguination massive, responsable de 33% des décès précoces des patients traumatisés, soit par hypoperfusion tissulaire à l’origine d’une défaillance multiviscérale et d’un décès plus tardif1. Le traumatisme crânien est responsable d’un tiers des décès précoces et l’association avec une hémorragie massive représente 17% de la mortalité des patients polytraumatisés2.
B. Coagulopathie liée au traumatisme
1. Généralités
Des troubles de l’hémostase sont mis en évidence chez 25 à 35% des patients traumatisés. Ces anomalies sont définies principalement sur les valeurs du taux de prothrombine absolu (TP) ou normalisé (INR) et/ou du temps de céphaline activé (TCA) et/ou sur le taux de plaquettes. Les seuils retenus pour le diagnostic de coagulopathie liée au traumatisme ne sont pas déterminés de façon consensuelle. Le maintien d’un TP > 70% est admis au sein des études et un seuil de plaquettes > 50G/l est recommandé, majoré à plus de 100G/l en présence d’un traumatisme crânien3.
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Les anomalies de la coagulation sont fréquentes dans la population de polytraumatisés et d’apparition précoce : des troubles de l’hémostase sont mis en évidence sur des prélèvements réalisés sur le lieu même du traumatisme, avant toute intervention thérapeutique, chez 56% des patients d’une cohorte de 45 patients polytraumatisés (ISS médian à 25)4. Les besoins transfusionnels sont par ailleurs corrélés à la présence d’une coagulopathie : le nombre de CGR transfusés ainsi que de PFC est significativement plus élevé chez les patients traumatisés présentant une coagulopathie à l’admission5. De plus, les anomalies de l’hémostase sont associées de façon significative à une augmentation du risque de morbidité et de mortalité intrahospitalière6. Dans une analyse rétrospective de 8646 patients polytraumatisés le score de gravité ISS était plus élevé chez les patients présentant des troubles de l’hémostase (30 versus 21, p<0.001). Le taux de défaillance multi viscérale (29% versus 12%, p<0.001), la durée de ventilation mécanique, la durée de séjour en réanimation ainsi que la durée de séjour intra hospitalière totale étaient allongées de façon significative (p<0.001). La mortalité précoce à 24 heures de prise en charge était de 13% au sein de la population de patient présentant une coagulopathie à l’admission, contre 1.5% dans la population indemne de coagulopathie (p<0.001)7. La coagulopathie liée au traumatisme est une donc atteinte fréquente, associée à augmentation de la morbimortalité au sein de la population de patients polytraumatisés. Il s’agit d’un phénomène complexe dont la physiopathologie est débattue. Le maintien de l’homéostasie cellulaire est nécessaire au déclenchement et au bon déroulement de la cascade de coagulation auxquels se surajoutent des phénomènes multiples conduisant à l’hémorragie massive.
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2. Physiopathologie de la coagulopathie liée au traumatisme
a) Le maintien de l’homéostasie cellulaire
L’hypothermie et l’acidose sont classiquement associées au mécanisme de développement et de pérennisation de troubles de l’hémostase par inhibition enzymatique formant ainsi la « triade létale » : acidose-‐hypothermie-‐coagulopathie. L’hypothermie et l’acidose ont démontré leurs propriétés inhibitrices sur la génération de thrombine au sein de modèles animaux8. Une hypothermie à 32° sur un modèle de porc entrainait l’inhibition de la phase d’initiation de la génération de thrombine. Une acidose (pH à 7.1 par perfusion d’acide chlorhydrique) était responsable quant à elle d’une atteinte préférentielle de la phase d’amplification et de propagation de la cascade de coagulation. De manière intéressante, dans le même modèle le tamponnement de l’acidose par une perfusion de bicarbonate amenant le pH à 7.40 ne corrigeait pas la coagulopathie9. L’hypothermie et l’acidose altèrent de plus la quantité de fibrinogène disponible pour la formation du caillot. L’hypothermie inhibe la synthèse du fibrinogène quand l’acidose en accélère la dégradation8.
L’hypocalcémie est un paramètre majeur dans le développement de troubles de l’hémostase. En effet le calcium libre ou « ionisé » est nécessaire aux facteurs vitamine K dépendants (facteurs X, IX, VII, II, protéine C et S). Le calcium permet la liaison des facteurs aux phospholipides des membranes cellulaires à la surface desquelles se déroulent les réactions enzymatiques de la coagulation. Au sein d’une population de 212 patients traumatisés, l’équipe de Vivien et al. a mis en évidence une incidence de 64% de patients présentant une hypocalcémie modérée (1.05 ± 0.06 mmol/l) et 21% une hypocalcémie sévère (0,77 ± 0.10mmol/l)10.
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L’hémostase était particulièrement perturbée, de façon significative, entre les groupes présentant une hypocalcémie modérée et les patients ayant une calcémie normale : le TP était mesuré à 79% versus 61% en cas d’hypocalcémie modérée (p<0.05). En cas d’hypocalcémie profonde le TP était mesuré à 24% (p<0.05). Les patients ayant une hypocalcémie présentaient des états de choc sévères : score de gravité ISS à 16 chez les patients ayant une calcémie normale versus 59 en cas d’hypocalcémie profonde, p<0.05, un taux de lactate élevé (1.5 versus 9.4mmol/l, p<0.05) et une acidose profonde (pH 7.37 versus 7.05, p<0.05). La perfusion de solutés colloïdes et l’acidose étaient significativement corrélées à la profondeur de l’hypocalcémie : respectivement r=0.658 (p<0.001) et r=0.760 (p<0.001). Enfin, l’hémodilution reste un critère controversé dans la littérature. Aucune corrélation n’est retrouvée par l’équipe de Brohi et al. dans une population de 1088 patients polytraumatisés (ISS médian à 20) entre la quantité de soluté administré et la survenue d’une coagulopathie (r=0.25). Les patients recevaient en moyenne 500 ml de cristalloïdes et 1000 ml de colloïdes, représentant une expansion volémique faible. L’administration de colloïdes n’était pas associée de manière significative à la survenue de troubles de l’hémostase5. A contrario, l’équipe de Maegele, dans une analyse rétrospective de 8646 patients polytraumatisés met en évidence une incidence croissante de coagulopathie avec le volume de solutés administrés en préhospitalier : 2198ml de remplissage vasculaire (ratio cristalloïde sur colloïde de 1:6) avaient été administrés chez les patients présentant une coagulopathie versus 1372 ml chez les patients indemnes de coagulopathie (ratio 2.2:1), p<0.0017. Les patients présentant une coagulopathie avaient d’emblée des états de choc plus sévères avec des scores de gravité plus élevés. Cependant, 10% des patients n’ayant pas reçu un remplissage vasculaire massif (moins de 500ml de solutés en préhospitalier) présentaient une coagulopathie à l’admission.
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b) Mécanismes physiopathologiques
Il existe deux hypothèses principales impliquant des voies physiopathologiques différentes afin d’expliquer le développement de troubles de l’hémostase liés au traumatisme.
ü Conception anglo-‐saxonne de Brohi et al.
La première hypothèse est développée par l’équipe de Brohi et al. en 2003. Selon ces auteurs, l’hypoperfusion systémique associée au traumatisme tissulaire serait l’élément déclencheur indispensable au développement d’un trouble de l’hémostase liée au traumatisme11. L’hypoperfusion systémique serait à l’origine de l’activation de l’un des principaux système endogène d’inhibition de la coagulation : la voie de la protéine C activée. La protéine C activée et son cofacteur la protéine S inhibent deux facteurs spécifiques de la coagulation : le facteur V activé et le facteur VIII activé. L’inhibition de ces facteurs bloque la cascade de coagulation dans sa phase d’amplification et empêche alors la formation de quantité importante de thrombine. La protéine C est activée via la liaison avec un complexe formé à la surface des cellules endothéliales, le complexe thrombomoduline-‐thrombine et un récepteur membranaire à la protéine C. La thrombomoduline lie les petites quantités de thrombine générées de façon précoce dans la cascade de coagulation, c’est un régulateur naturel de la phase d’initiation de la coagulation. Les auteurs ont mis en évidence une élévation du taux de thrombomoduline sérique significative à partir d’un déficit en base supérieur à 6, associée à une chute du taux de protéine C plasmatique, suggérant l’activation importante de la protéine C par la thrombomoduline. De plus, les auteurs ont montré une augmentation des taux plasmatiques d’activateur du plasminogène (t-‐PA) et la diminution de son principal inhibiteur le PAI-‐1.
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Le système de la protéine C activée a en effet des propriétés profibrinolytiques par l’intermédiaire de deux mécanismes principaux : la liaison de la protéine C au complexe thrombine-‐thrombomoduline inhibe l’activation d’un inhibiteur de la fibrinolyse, le TAFI, favorisant ainsi la dissolution du caillot formé. La protéine C repositionne la liaison tPA-‐PAI-‐1, favorisant l’inhibition du tPA. Selon ces auteurs, il existe une nouvelle identité de trouble de l’hémostase : la coagulopathie aigue traumatique (« acute traumatic coagulopathy »), résultant principalement de l’état de choc et de l’hypoperfusion périphérique. La part liée à l’hypothermie, l’acidose et l’hémodilution est jugée plus tardive, tout comme une éventuelle consommation de facteurs de la coagulation.
ü Conception nipponne de Gando et al.
Selon l’équipe de Gando et al. des voies physiopathologiques similaires seraient impliquées suivant des mécanismes différents. Les troubles de l’hémostase post traumatiques seraient dans ce cas attribuables au déclenchement d’un sous type de coagulation vasculaire disséminée déviant vers un phénotype profibrinolytique12. La lésion traumatique et les phénomènes inflammatoires péri-‐lésionnels seraient le point de départ de la libération massive de facteur tissulaire. Le facteur tissulaire est l’élément déclenchant de la cascade de la coagulation, via l’activation du facteur VII. A partir de cette première phase de faibles quantités de thrombine sont générées. La thrombine est nécessaire à l’amplification de la coagulation conduisant à la formation de grandes quantités de thrombine. Au site de la lésion, la libération massive de facteur tissulaire entraînerait la formation importante de thrombine, permettant l’activation de grande quantité de protéine C, aux propriétés anticoagulante et profibrinolytique. Le saignement serait d’autant plus favorisé par la consommation locale de facteurs de la coagulation nécessaires à la génération de thrombine.
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C. Outils diagnostiques de la coagulopathie liée au traumatisme
1. Les tests d’hémostase standard Les tests d’hémostase standard (taux de prothrombine : TP, temps de céphaline activé : TCA, taux de plaquettes et de fibrinogène) sont réalisés sur un plasma isolé appauvri en plaquettes. Ils sont effectués à une température fixe de 37° et nécessitent une recalcification. Le TP évalue la voie dite « extrinsèque » de la cascade de coagulation, met en jeu le fibrinogène, les facteurs II, V, VII et le facteur X. Ce test est effectué en présence de facteur tissulaire, de phospholipide et de calcium. Le facteur tissulaire et le facteur VII interagissent à la surface des phospholipides ajoutés en excès dans la solution. Le facteur VII activé par le facteur tissulaire permet l’activation du facteur X, rejoignant ainsi la voie commune aboutissant à la formation de thrombine. Le TCA évalue la voie dite « intrinsèque », impliquant les facteurs de la phase contact : les facteurs XII, XI, IX et VIII ainsi que la voie commune aboutissant à la formation de thrombine : les facteurs V et X. Le TCA est réalisé en présence de phospholipide, d’un activateur du système contact et de calcium (Figure 1).
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Figure 1. Modèle "classique" de la coagulation
2. Biologie délocalisée : les méthodes viscoélastiques Des méthodes de diagnostic et de monitorage de l’hémostase délocalisées au lit du malade ont été développées et sont de plus en plus utilisées ces dernières années. Trois systèmes sont disponibles en pratique clinique : la thromboélastométrie rotative ROTEM (TEM®), la thromboélastographie TEG (Haemonetic®) et l’analyseur Sonoclot® (Figure 2). Les trois méthodes précédemment citées explorent les propriétés viscoélastiques d’un échantillon de sang total.
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Figure 2. Présentation des différentes techniques viscoélastiques
La thromboélastographie est une méthode décrite pour la première fois en 194813. Son utilisation reste limitée avant de prendre un nouvel essor dans les années 1990 avec le couplage de ces techniques à des systèmes informatiques de traitement des données. A cette époque le thromboélastographe TEG est créé ainsi que son homologue, le ROTEM. La thromboélastographie est réalisée à partir d’un échantillon de 360 ml de sang total déposé dans une cuvette à laquelle est manuellement ajouté un activateur (Kaolin). La cuvette est animée en permanence d’un mouvement de rotation de gauche à droite suivant un angle de 4°45. Chaque cycle de rotation dure 10 secondes. Une tige, reliée à un transducteur électromécanique est plongée dans la cuvette. Le caillot en cours de formation va interférer avec les mouvements de rotation de la tige dans la cuvette. Le déplacement de la tige, proportionnel à la fermeté du caillot formé, est alors retransmis au cours du temps à un système informatique d’analyse des données (Figure 3).
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Figure 3. Principe de la thromboélastographie
Le tracé obtenu par thromboélastographie est divisé en 4 phases, correspondant chacune à une étape de formation puis de dégradation du caillot (Figure 4 et Tableau 1).
• La première phase, nommée R (reaction time) représente le temps nécessaire au processus enzymatique pour générer les premières traces de fibrine. Aucune résistance n’entrave les mouvements de rotation de la tige, ainsi cette phase est représentée par un tracé plat.
• La seconde phase explore la cinétique du caillot en cours de formation.
La formation du caillot interfère avec les mouvements de la tige, entraînant la réalisation d’un tracé en forme de diapason.
Trois paramètres sont alors mesurés (Figure 4) :
1. L’angle α : défini comme l’angle formé entre la ligne de base du tracé TEG et l’amplitude maximum du tracé. L’angle α évalue la cinétique de renforcement du caillot comprenant la vitesse d’accumulation de fibrine ainsi que la qualité de son maillage.
2. Le paramètre K correspond à la mesure du temps entre la variation
d’amplitude du tracé TEG de 2 à 20 mm.
• Cupule
• Dispositif de contrôle de la température
• Tige de rotation
• Dispositif de rotation
• 0.360 ml de sang total
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3. La solidité maximale du caillot est représentée par le paramètre MA
(maximum amplitude). MA est directement fonction de la qualité de l’interaction entre les plaquettes et le fibrinogène ou le facteur Willebrand.
• La dernière phase évalue la fibrinolyse. Elle comprend les paramètres LY 30 et LY 60 représentant le pourcentage de réduction du caillot mesuré 30 et 60 minutes après que l’amplitude maximum ait été atteinte. Ces derniers paramètres évaluent la stabilité et durée de vie du caillot formé.
Figure 4. Tracé obtenu en thromboélastographie
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Paramètres thromboélastographiques
Temps enzymatique R : sang total : 4-‐8 min
Cinétique du caillot K : sang total : 1-‐4 min
Solidité du caillot α : sang total : 47°-‐74°
Solidité maximum MA : sang total : 55-‐73mm
Lyse du caillot LY 30, LY60
Tableau 1. Paramètres obtenus en thromboélastographie et leurs valeurs normales
3. Intérêts et limites des différentes méthodes dans l’évaluation de l’hémostase
Les méthodes viscoélastiques d’évaluation de la coagulation présentent de nombreux avantages par rapport aux analyses d’hémostase réalisées en laboratoire. Tout d’abord, les méthodes de biologie délocalisées sont réalisées au lit du malade. Le délai d’acheminement des examens est aboli et les premiers résultats sont disponibles sur la plupart des analyseurs entre 5 et 10 minutes14 contre 30 à 40 minutes pour les tests standards15. Dans un contexte de situation hémorragique aigue, les résultats obtenus après un délai de plus de 30 minutes reflètent alors une situation largement dépassée.
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Les prélèvements et l’analyse par méthode viscoélastique peuvent de plus être réalisés par des cliniciens, après une formation courte, ne nécessitant ni le matériel ni la maîtrise de techniques de laboratoire approfondies. Les analyses sont par ailleurs réalisées dans des conditions physiologiques à partir de sang total maintenu à une température de 37°, au pH du patient. Les conditions d’analyse en laboratoire sont standardisées à une température de 38° et un pH de 7.40. L’analyse viscoélastique sur sang total ne nécessite pas d’ajout de citrate si elle est réalisée dans les 4 minutes suivant le prélèvement. Dans le cas contraire l’ajout de citrate devient nécessaire afin d’éviter la formation d’un caillot et l’échantillon devra alors être recalcifié avant examen. Cependant, les tests réalisés sur des échantillons citratés ne semblent pas fournir des résultats équivalents. En effet, dans une étude récente sur une population de polytraumatisés, les tests sur sang non citraté sont corrélés de façon supérieure aux besoins transfusionnels par rapport aux tests réalisés sur sang citraté 16. De plus, les échantillons sur sang citraté nécessitent une attente d’environ 30 minutes avant analyse, perdant ainsi le bénéfice de la rapidité des méthodes viscoélastiques15. Concernant les données obtenues, les tests d’hémostase standard et les méthodes viscoélastiques permettent d’obtenir des informations différentes. Les tests d’hémostase standard ont été initialement développés pour le suivi des traitements anticoagulants. Ils sont basés sur la vision « classique » de la cascade de coagulation séparant les voies intrinsèque et extrinsèque et posant le rôle central des facteurs de la coagulation. Ces tests explorent la cascade de déclenchement de la coagulation générant les premières traces de thrombine. Or il a été démontré que 95% de la thrombine participant au caillot est formée après cette phase17. Les différents tests (TP, TCA, INR) ne sont donc pas adaptés au suivi des troubles de l’hémostase, particulièrement en situation aigue et des études maintenant anciennes dans des situations d’hémorragie massive post traumatique retrouvent la discordance entre le TP et le TCA et les besoins transfusionnels des patients18.
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La thromboélastographie/métrie répond au modèle récent de la coagulation basé sur la place centrale du facteur tissulaire et des interactions des différents facteurs avec les membranes cellulaires, support des réactions enzymatiques. Ce modèle est divisé en 4 phases : la phase d’initiation où l’interaction entre le facteur tissulaire et le facteur VII déclenche la génération de traces de thrombine, la phase d’amplification où de grandes quantités de thrombine sont générées via différents catalyseurs (facteurs V et VIII en particulier), la phase de propagation du caillot et enfin la phase de terminaison correspondant à la mise en jeu des phénomènes de régulation et la destruction du caillot. La thromboélastographie permet par ailleurs d’évaluer la fibrinoformation, du développement du clou fibrinoplaquettaire à sa dégradation. Ainsi il est possible d’obtenir une valeur de « fibrinogène fonctionnel » avec l’ensemble des résultats disponibles en fin de processus. Le tracé obtenu par méthode viscoélastique fournit une évaluation complète du processus d’hémostase, de la génération des premières traces de thrombine jusqu’à la formation du caillot et sa destruction par fibrinolyse19.
4. Recommandations et pratique courante
Les informations fournies par les méthodes viscoélastiques sont nombreuses, obtenues de façon rapide dans des conditions plus physiologiques que les tests d’hémostase standard. L’apport de ces nouvelles techniques dans le monitorage de l’hémostase a donc fait l’objet de recommandations, particulièrement dans les situations à risque hémorragique. Ces nouvelles techniques ont initialement été développées comme outils de monitorage des chirurgies présentant des risques de troubles de l’hémostase telles que la chirurgie cardiaque, hépatique ainsi que la neurochirurgie34–35. Le bénéfice des méthodes de biologie délocalisée a particulièrement été démontré en chirurgie cardiaque. Dans une étude randomisée récente, le monitorage de l’hémostase par thromboélastographie permettait une épargne transfusionnelle en PFC et en plaquettes ainsi qu’une réduction significative de la morbimortalité en post opératoire de chirurgie cardiaque hémorragique36.
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Ces méthodes viscoélastiques ont de plus été développées dans le monitorage des traitements anticoagulants23 ou en obstétrique, dans le cadre de la prise en charge des hémorragies du postpartum où des algorithmes décisionnels incluant les méthodes viscoélastiques ont été créés24. L’utilisation des techniques viscoélastiques en traumatologie est actuellement recommandée dans la prise en charge des patients polytraumatisés pour le diagnostic et le monitorage de la coagulopathie post traumatique (Grade 1c)3.
D. Influence de la présence d’un choc hémorragique et d’un traumatisme crânien sur la coagulopathie liée au traumatisme.
1. Influence du choc hémorragique.
Le choc hémorragique est défini comme une situation hémorragique aigue entraînant une hypovolémie responsable d’une inadéquation entre les apports et les besoins en oxygène de la cellule25. Il n’existe pas de consensus actuel sur la définition du choc hémorragique en terme de volume des pertes sanguines ou de besoin transfusionnel. La mortalité par exsanguination massive reste à ce jour la première cause de décès évitable dans la population de patients traumatisés1. L’urgence est donc au contrôle du saignement et au maintien d’apport adéquat en oxygène par l’expansion volémique, l’administration de vasopresseurs et la transfusion de produits sanguins afin de prévenir les troubles de l’hémostase26. L’identification des patients à risque de saignement majeur nécessitant une transfusion massive et la surveillance rapprochée des troubles de l’hémostase occupent donc une place centrale dans la prise en charge des patients polytraumatisés. L’utilisation des techniques viscoélastiques en traumatologie a été particulièrement étudiée sur des bases de données militaires. L’équipe de Plotkins et al. évalue en 2008 l’utilisation du TEG dans un hôpital militaire en zone de combat.
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Sur 44 patients polytraumatisés, la force maximale du caillot (MA) est faiblement corrélée aux besoins transfusionnels (CGR, PFC et plaquettes confondus) : r=0.57 (p<0.01), tandis que les paramètres d’hémostase standards ne le sont pas (TP, TCA et INR)27. Chez l’ensemble des patients présentant une valeur de MA pathologique, les paramètres K et l’angle α, reflets de la cinétique du caillot en cours de formation, sont significativement modifiés (p<0.05). L’intérêt des méthodes viscoélastiques a, de plus, été étudié dans la participation de la fibrinolyse au développement des troubles de l’hémostase post traumatique. Il est à noter qu’une valeur de fibrinogène « fonctionnel » est évaluée par thromboélastographie et disponible dans des délais plus rapides que le fibrinogène plasmatique par la technique de Clauss. Dans une étude prospective menée par l’équipe de Rourke et al., une concentration de fibrinogène inférieure à 1,5g/l est mise en évidence dans 58% de la population de polytraumatisés présentant une coagulopathie à l’admission (p<0,001)28. Les patients présentant un fibrinogène bas (inférieur à 1,5g/l) présentent des scores de gravité ISS plus élevés (p<0,001) et une mortalité à J1 significativement augmentée (p<0,001). La transfusion en cryoprécipité ou en PFC guidé par le FibTEM (thromboélastométrie ROTEM) dans une population de 131 patients polytraumatisés est associée à une réduction de la mortalité observée par rapport à celle prédite par le score de gravité TRISS (p=0,032)29.
2. Influence du traumatisme crânien Dans le contexte du traumatisme crânien, l’incidence réelle de la coagulopathie reste difficile à évaluer devant l’hétérogénéité des définitions utilisées, de celle du traumatisme crânien et de la méthodologie des études : une méta analyse regroupant 34 études met en évidence une incidence variant de 10 à 97,5% au sein d’une population de traumatisés crâniens isolés (TCI)30. La coagulopathie dans les suites d’un traumatisme crânien grave est précoce et d’aggravation progressive dans les 24 premières heures 31–33 : observée chez 45 % des patients présentant un TCI dans les 12 premières heures de prise en charge, l’incidence de troubles de l’hémostase progresse à 65 % à 24 heures.
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La morbidité des patients présentant un trouble de l’hémostase est significativement plus élevée en terme de défaillance d’organe, de durée de ventilation mécanique et de séjour prolongé en réanimation, indépendamment de sa chronologie d’apparition31,34,35. Au sein d’une population de 3114 patients présentant un TCI grave (AIS intracrânien ≥ 3), 22.7 % des patients présentent une coagulopathie à l’admission et une mortalité à 30 jours évaluée à 50.4 % contre 17.3% dans la population contrôle (p<0.001) 35. La morbidité neurologique est particulièrement influencée par les troubles de l’hémostase : un TP inférieur à 70% mesuré à l’admission est identifié dans 3 études comme un facteur indépendant de dégradation du score neurologique à 6 mois d’un TCI grave36. La coagulopathie post traumatique semble favoriser la progression des lésions hémorragiques mais aussi ischémiques, à l’origine d’une morbidité neurologique élevée. L’équipe d’Allard et al. publie en 2009 une étude rétrospective analysant 107 patients présentant un TCI. Dans la population présentant une coagulopathie à l’admission (35% des patients), la progression des lésions hémorragiques entre l’imagerie initiale et la seconde réalisée dans les 48 premières heures est évaluée à 80% par rapport à la population indemne de coagulopathie (p=0.004). La mortalité globale est multipliée par 4 en cas de progression des lésions associées à une coagulopathie37. Des lésions ischémiques sont par ailleurs observées. De multiples microthrombi composés de plaquettes activées, de fibrine et de facteur Von Willebrand semblent impliqués dans le développement de lésions ischémiques secondaires : la présence de microthrombi dans les artères et veinules de petit et moyen calibre (10 à 600 µm) de spécimens animaux soumis à un traumatisme crânien isolé sévère ainsi que chez des patients décédés dans les 48 heures d’un TCI ont été observés38,39. Les microthrombi sont identifiés localement et à distance des lésions dans les 2 heures suivant le traumatisme et persistent sur des durées prolongées allant jusqu’à 8 jours 40,41.
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Devant la complexité des lésions, associant des phénomènes hémorragiques et thrombotiques, les méthodes viscoélastiques sont progressivement apparues comme pertinentes dans le diagnostic et le monitorage des troubles de l’hémostase. Cependant, peu d’études à ce jour ont été publiées et présentent des résultats significatifs. Un travail réalisé en 2011 par Kunio et al. étudie de façon prospective l’association entre le diagnostic d’anomalie de l’hémostase par thromboélastographie et la morbimortalité au sein d’une population de 69 patients présentant un TCI grave (AIS intracrânien > 3)42. L’incidence des patients présentant un intervalle R allongé est de 8%. Ce profil est associé à un score ISS et un score AIS crânien significativement plus élevés par rapport à l’ensemble de la population (p=0.04 et p<0.01 respectivement), un taux d’intervention neurochirurgicale plus importante (p=0.03), une durée de séjour hospitalière (p=0.03) ainsi qu’une mortalité à 30 jours augmentée (50% versus 11.7% dans l’ensemble de la cohorte, p=0.04). Cependant, les tests d’hémostase standards ont des résultats significatifs en termes de morbidité et de mortalité chez les patients présentant des troubles de l’hémostase comparés à l’ensemble de la cohorte, rendant difficile de conclure à un bénéfice de l’analyse par thromboélastographie. De plus, le diagnostic positif de troubles de l’hémostase par thromboélastographie met en évidence un unique paramètre TEG significatif, l’intervalle R.
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E. Objectif de l’étude
Dans la littérature, la contribution respective du traumatisme crânien grave et du choc hémorragique sur la coagulopathie liée au traumatisme n’est pas clairement déterminée. Or, si des profils d’hémostase différents sont mis en évidence dans une situation clinique par rapport à l’autre, ceci peut aboutir à définir des priorités thérapeutiques différentes selon le type de traumatisme (administration plus précoce de fibrinogène par exemple). L’objectif principal de cette étude est donc d’étudier l’influence du choc hémorragique et du traumatisme crânien grave sur la coagulopathie liée au traumatisme, évaluée par thromboélastographie.
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2. PATIENTS ET METHODE
A. Population d’étude
Il s’agit d’une étude rétrospective observationnelle, analysant des données collectées de façon prospective, monocentrique. L’étude s’est déroulée au centre d’accueil des patients polytraumatisés de l’hôpital de Bicêtre dans le département d’anesthésie réanimation. Les patients ont été inclus de janvier 2011 à août 2013.
Les critères d’inclusion comprenaient :
-‐ Tout patient polytraumatisé, admis en transfert primaire pour traumatisme sévère dans le service d’anesthésie réanimation de l’hôpital de Bicêtre
Les critères d’exclusion étaient définis par :
-‐ L’existence d’antécédents de troubles de l’hémostase précédant le traumatisme
-‐ La prise d’un traitement au long cours par antiagrégant plaquettaire et/ou anticoagulant.
-‐ Les patients ayant bénéficié d’une transfusion de produits sanguins labiles ou de l’administration d’acide tranexamique avant la réalisation des tests d’hémostase et/ou de l’analyse par thromboélastographie.
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B. Déroulement du protocole Il s’agit d’une étude observationnelle dite « de soins courants », qui ne modifiait pas les pratiques diagnostiques ni la prise en charge thérapeutique des patients.
1. Validation du protocole
Cette étude a été approuvée par le comité d’éthique en date du 12 février 2014 (N° PP14-‐004).
2. Recueil des données démographiques et cliniques
Les informations concernant les données générales étaient collectées :
-‐ âge, sexe, ethnie -‐ poids, taille, IMC -‐ comorbidités : antécédents d’anomalie de l’hémostase, d’insuffisance
hépatique -‐ traitement habituel : prise d’anticoagulant ou d’antiagrégant plaquettaire
L’ensemble des informations relatives à la réanimation initiale était recueilli :
-‐ heure du traumatisme -‐ mécanisme -‐ bilan lésionnel initial -‐ statut neurologique : score de Glasgow, anomalie pupillaire, reflexes du
tronc cérébral
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-‐ paramètres hémodynamiques et respiratoires : fréquence cardiaque, pression artérielle, saturation périphérique en oxygène, fréquence respiratoire
-‐ mesures de réanimation initiales : remplissage vasculaire, administration de catécholamines, contrôle des voies aériennes, massage cardiaque externe.
-‐ délais de prise en charge jusqu’à l’arrivée en salle de réveil
3. Recueil de données biologiques
Les prélèvements sanguins étaient effectués par ponction franche d’une veine périphérique ou lors de la pose d’un cathéter artériel si celui-‐ci était indiqué par le réanimateur en charge du patient. Ces prélèvements comprenaient : -‐ une numération formule sanguine et plaquettaire, adressée au laboratoire
d’hématologie -‐ un bilan biochimique comprenant notamment une lactatémie et la mesure
des gaz du sang artériels, adressé au laboratoire de biochimie -‐ un bilan d’hémostase « standard » sur tube citraté (TP, TCA, un dosage de
fibrinogène par Méthode de Clauss et INR), adressé au laboratoire d’hémostase
-‐ une seringue de 1.5 ml de sang total afin de réaliser une analyse de l’hémostase par thromboélastographie.
4. L’analyse par thromboélastographie
L’analyse par thromboélastographie était réalisée sur sang total, non citraté, dans un délai de 4 minutes après le prélèvement, en accord avec les recommandations du fabriquant.
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ü 1 ml de sang total était prélevé et mélangé avec le réactif Kaolin. Un volume de 0.360 ml du mélange était alors aspiré par une pipette et introduit dans une cupule sur un canal de l’analyseur TEG. L’analyse du tracé correspondant était alors débutée.
ü 0.5 ml de sang total était prélevé et mélangé avec le réactif Fibrinogène fonctionnel. Un volume de 0.360 ml était alors aspiré par une pipette et introduit dans une cupule sur un second canal de l’analyseur TEG. L’analyse du tracé correspondant était alors débutée.
L’identité du patient ainsi que sa date de naissance étaient associées à l’analyse du tracé obtenu. L’ensemble des données était anonymisé et protégé par un code d’accès spécifique, tout comme l’ordinateur dédié à l’analyseur TEG.
5. Recueil de données complémentaires Des données complémentaires étaient recueillies ultérieurement, comprenant les paramètres de la réanimation spécialisée en salle de réveil et dans les 24 heures post admission :
-‐ bilan lésionnel clinique définitif complété par le bilan radiologique : radiographie thoracique, radiographie du bassin et des membres suivant le bilan clinique, tomodensitométrie corps entier
-‐ paramètres hémodynamiques et respiratoires -‐ mesures de réanimation : remplissage vasculaire, administration de
catécholamines -‐ transfusion de produits sanguins labiles -‐ administration de facteurs hémostatiques spécifiques : facteur VII
activé (Novoseven®), anti fibrinolytique : acide tranexamique -‐ geste hémostatique en urgence : embolisation par voie radiologique ou
geste d’hémostase chirurgical -‐ mortalité à J1, J7
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6. Définition des groupes Les patients inclus étaient rétrospectivement divisés en 4 groupes suivant le bilan lésionnel complet à l’admission après évaluation clinique et radiologique.
1. Traumatisme crânien isolé : score AIS intracrânien ≥ 3 et AIS extra crânien < 3
2. Choc hémorragique isolé : Pression artérielle systolique (PAS) inférieure à 90 mmHg et saignement actif
3. Traumatisme crânien associé à un choc hémorragique : score AIS intracrânien ≥ 3 et PAS < 90 mmHg et saignement actif
4. Groupe contrôle : Pas de critères de traumatisme crânien ni de choc hémorragique
C. Analyse statistique
L’analyse statistique a été effectuée à l’aide du logiciel JMP®, version 9, SAS Institute Inc., NC, 1989-‐2007. Les données continues sont exprimées en moyenne ± SD (écart-‐type) pour les variables paramétriques, en médiane [interquartile] pour les variables non paramétriques. Les données qualitatives sont exprimées en nombre (%). Les calculs de moyenne et de médiane étaient réalisés sur les données des recueils cliniques et biologiques au sein des quatre groupes définis rétrospectivement : CH, TCI, CH+TC et groupe contrôle (CL). Les données cliniques et les paramètres d’hémostase standard et thromboélastographiques ont été comparés entre le groupe contrôle et chacun des autres groupes.
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Un test d’analyse de variance ANOVA sur les rangs à deux facteurs (facteur « traumatisme crânien » et facteur « choc hémorragique») a été réalisé afin d’évaluer l’influence du facteur choc hémorragique, du facteur traumatisme crânien isolé et leur interaction sur les paramètres des tests d’hémostase standard et thromboélastographiques. Un p<0.05 était considéré comme significatif.
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3. RESULTATS
A. Population étudiée Entre janvier 2011 et août 2013, 85 patients polytraumatisés ont présenté tous les critères d’inclusion sans critère d’exclusion (Figure 4). Au total 28 patients ont été inclus dans le groupe contrôle (CL), 26 patients dans le groupe traumatisme crânien isolé (TCI), 19 patients dans le groupe choc hémorragique (CH) et 12 patients dans le groupe choc hémorragique et traumatisme crânien (CH + TC) (Figure 4).
85#pa&ents#inclus#
CL#n=28#
TCI#n=26#
CH#n=19#
CH+TC#n=12#
Ni#critère#de#CH#ni#de#TCI#
AIS#intracrânien≥3##
+#AIS#extracrânien<3##
PAS#<#90#mmHg#+#saignement#
ac&f#
AIS#intracrânien#≥3##et#
PAS<90#mmHg#+#saignement#ac&f#
Figure 4. Diagramme de flux
Les caractéristiques générales de chaque groupe sont présentées dans le tableau ci-‐dessous (Tableau2). Les données sont exprimées en médiane [interquartile]. Les données cliniques et biologiques ont été comparées pour chacun des groupes avec le groupe contrôle.
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CL
n= 28 TCI n= 26
CH n= 19
CH+TC n= 12
Age (années) 39 [21-‐47]
36 [22-‐51]
28 [24-‐44]
48 [39-‐53]
Sexe masculin (%) 68
77
79
58
Score Glasgow ≤ 8 (%) 4
46 ***
21
92 ***
Lactatémie (mM)
1 [1-‐2]
2 [1-‐3]
4 [3-‐6] ***
5 [3-‐11] ***
Score ISS à l’admission 9 [6-‐17]
21 [15-‐36] **
33 [17-‐45] **
42 [37-‐75] ***
Nombre de concentrés globulaires à J1
0 [0-‐0]
0 [0-‐0]
7 [3-‐10] ***
6 [3-‐9] ***
Nombre de PFC à J1 0 [0-‐0]
0 [0-‐0]
5 [3-‐9] ***
6 [3-‐8] ***
Administration Fibrinogène à J1 ( g)
0 [0-‐0]
0 [0-‐0]
3 [0-‐3] ***
3 [0-‐4] ***
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Les patients étaient en majorité de sexe masculin et âgé de moins de 45 ans. Le groupe TCI présentait une proportion de patients présentant un score de Glasgow inférieur à 8 à l’admission significativement plus élevé que le groupe contrôle (p<0.001), de même que le groupe CH+TC versus groupe contrôle (p<0.0001). Le score de gravité ISS était significativement plus élevé au sein des groupes CH (33 [17-‐45]) p<0.001, CH+TC (42 [37-‐75]) p<0.0001 et TCI (21 [15-‐36]) p=0.003. La lactatémie suivait la même tendance avec une augmentation significative dans le groupe CH (4 [3-‐6]) p<0.0001 et dans le groupe CH+TC (5 [3-‐11]) p<0.0001 par rapport au groupe contrôle. Les besoins transfusionnels en concentrés globulaires, PFC et fibrinogène ont été significativement plus élevés au sein des groupes CH et CH+TC (p<0,001 dans les deux groupes). Aucune transfusion de produit sanguin labile ou de fibrinogène n’a été réalisée dans le groupe TCI ni dans le groupe contrôle.
Tableau 2. Caractéristiques générales
Données exprimées en médiane [interquartile]
Légende : *p<0.05, **p<0.01, ***p<0.001
CL
n= 28 TCI n= 26
CH n= 19
CH+TC n= 12
Mortalité à J1 (%) 0
0
11 *
42***
Mortalité à J7 (%) 3
12
16
75***
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La mortalité précoce à J1 de prise en charge était de 11% dans le groupe CH (p<0.05) et de 42% dans le groupe CH+TC (p=0.0002) tandis qu’elle était nulle dans le groupe TCI et le groupe contrôle. La mortalité a atteint 75% à J7 dans le groupe CH+TC (p<0.0001) tandis qu’elle était non significative dans les autres groupes. Il est à noter une mortalité tardive de 3% dans le groupe contrôle.
B. Etude des paramètres d’hémostase standard au sein des groupes
Le taux de prothrombine (TP), le taux de fibrinogène, le taux d’hémoglobine et de plaquettes ont été étudiés dans chaque groupe (Tableau3). Les données biologiques de chacun des groupes ont été comparées au groupe contrôle. Il a été observé un TP plus bas dans le groupe CH : médiane à 65% [37-‐75] p<0.0001 et dans le groupe CH+TC : médiane à 45% [20-‐74] p<0.0003.
Tableau 3. Paramètres d’hémostase standard entre les différents groupes
Données exprimées en médiane [interquartile]
Légende : *p<0,05, **p<0,01, ***p<0,001
CL n = 28
TCI n = 26
CH n = 19
TC+CH n = 12
TP (%) 85 [75-‐95] 82 [73-‐93] 65 [37-‐75] *** 45 [20-‐74] ***
[Fibrinogène] (g.L-‐1) 2 [1.8-‐2.9] 2.5 [1.8-‐3] 1.4 [0.8-‐1.9] *** 1 [0.3-‐1.7] ***
[Hb] (g.dL-‐1) 13 [11-‐14] 13 [11-‐14] 10 [8-‐11] *** 8 [8-‐10] ***
Plaquettes (G.L-‐1) 207 [185-‐234] 225 [170-‐279] 190 [136-‐240] 199 [106-‐249]
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Le taux de fibrinogène était plus bas dans ces deux derniers groupes : dans le groupe CH le fibrinogène a été mesuré en médiane à 1,4 g/l [0.8-‐1.9] p=0.0001 et dans le groupe CH+TC en médiane à 1 g/l [0.3-‐1.7] p=0.0023. Le taux de plaquettes n’était pas différent de façon significative entre les groupes et restait supérieur à 150 G/l. Le taux d’hémoglobine était plus bas dans le groupe CH avec une médiane à 10 g/dl [8-‐11] p<0.0001 et dans le groupe CH+TC avec une médiane à 8 g/dl [8-‐10] p<0.0001.
C. Etude des paramètres TEG au sein des groupes
Les paramètres obtenus par thromboélastographie dans chaque groupe sont représentés dans le tableau ci-‐dessous (Tableau 4).
CL n = 28
TCI n = 26
CH n = 19
TC+CH n = 12
R (min) 4 [3-‐6] 5 [3-‐7] 5.5 [5-‐12] ** 11 [7-‐234] ***
Angle α (°) 67 [62-‐72] 66 [56-‐72] 56 [38-‐68] ** 57 [39-‐67] *
MA (mm) 70 [66-‐73] 70 [62-‐73] 58 [24-‐68] *** 63 [25-‐66] **
Ly30 (%) 0.1 [0-‐0.6] 0 [0-‐1] 0.05 [0-‐4] 0 [0-‐0.5]
Fibrinogène fonctionnnel (g. L-‐1)
3 [2.8-‐4] 3.5 [2.2-‐4] 1.7 [0-‐3] ** 1.1 [0-‐2.4] ***
Tableau 4. Paramètres TEG entre les différents groupes
Données exprimées en médiane [interquartile]
Légende : *p<0,05, **p<0,01, ***p<0,001
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Les données thromboélastographiques de chacun des groupes ont été comparées aux données du groupe contrôle. Les résultats ont mis en évidence un allongement de l’intervalle R (5.5 [5-‐12]) p=0.01, une réduction de l’angle α (56 [38-‐68]) p<0.01, de l’amplitude maximum MA (58 [24-‐68]) p<0.001 et du fibrinogène fonctionnel (1.7 [0-‐3]) p<0.01 dans le groupe CH. Dans le groupe CH + TC les mêmes tendances ont été observées : allongement de l’intervalle R (11 [7-‐234]) p<0.001, réduction de l’angle α (57 [39-‐67]) p=0.03, de l’amplitude maximum MA (63 [25-‐66]) p=0.0013 et du fibrinogène fonctionnel (1.1 [0-‐2.4]) p=0.0003. Le groupe TCI n’a présenté aucune modification significative des paramètres thromboélastographiques par rapport au groupe contrôle. Aucune modification significative de Ly30 n’a été mise en évidence au sein des chacun des groupes versus groupe contrôle.
D. Analyse de l’influence du choc hémorragique et du traumatisme crânien sur l’hémostase
Un test d’analyse de variance ANOVA sur les rangs à deux facteurs (facteur « TCI » et facteur « CH ») a été réalisé afin d’évaluer l’influence du facteur choc hémorragique, du facteur traumatisme crânien isolé et leur interaction sur les paramètres des tests d’hémostase standard et thromboélastographiques. Les résultats sont présentés dans le tableau ci-‐dessous (Tableau 5).
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Il a été mis en évidence une influence du facteur choc hémorragique sur les paramètres d’hémostase standard : taux de prothrombine (p<0.001) et de fibrinogène (p<0.001) à l’exception du taux de plaquettes. La présence d’un choc hémorragique a influencé aussi les paramètres obtenus par thromboélastographie : l’intervalle R (p<0.001), l’angle α (p<0.001) et l’amplitude maximum (MA) (p<0.001). Le temps de lyse du caillot à 30 minutes (Ly30) n’a pas été modifié par le choc hémorragique (NS). Le facteur traumatisme crânien n’a pas exercé d’influence significative sur les valeurs d’hémostase standard ni sur les paramètres obtenus par thromboélastographie, à l’exception de l’intervalle R (p=0.02). De plus il n’a pas été mis en évidence d’interaction entre le TCI et le CH sur les paramètres d’hémostase standard ou mesurés par thromboélastographie (NS).
Tableau 5. Présentation des résultats des tests ANOVA entre chaque groupe
Légende : NS= non significatif
Taux de TP Fg Taux de plaquette R α MA Ly30
CH < 0.001 < 0.001 NS < 0.001 < 0.001 < 0.001 NS
TCI NS NS NS 0.02 NS NS NS
TCI * CH NS NS NS NS NS NS NS
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4. DISCUSSION
Résultats principaux
L’étude présentée ici met en évidence l’influence du choc hémorragique sur les paramètres d’hémostase mesurés par méthode standard : TP (p<0.001) et taux de fibrinogène mesuré par la technique de Clauss (p<0.001) ainsi que par méthode thromboélastographique : intervalle R, angle α et MA (p<0.001). Le traumatisme crânien semble exercer une influence relativement limitée sur l’hémostase à l’exception de la variation de l’intervalle R en thromboélastographie (p=0.02). De plus, il n’a pas été mis en évidence d’effet synergique du traumatisme crânien associé au choc hémorragique sur la survenue de trouble de l’hémostase dans les suites du traumatisme. Les troubles de l’hémostase post traumatiques sont caractérisés par la défaillance du système d’hémostase à maintenir une coagulation sanguine normale dans les suites d’un traumatisme14. Cette défaillance est d’origine multifactorielle, favorisée par l’état de choc post traumatique entraînant des troubles de l’homéostasie cellulaire11,12. Les troubles de l’hémostase sont d’apparition précoce, d’aggravation rapide et associés à une mortalité élevée4–6. La prévention et la correction de ces troubles est donc un point déterminant dans la prise en charge du polytraumatisé et nécessite le développement de nouvelles techniques de diagnostic et de monitorage26. Les méthodes viscoélastiques sont actuellement recommandées dans la prise en charge du choc hémorragique post traumatique suivant les dernières recommandations Européennes publiées en 20133. Choc hémorragique et anomalies de l’hémostase Les résultats de cette étude mettent tout d’abord en évidence un taux de TP médian observé dans le groupe CH ainsi que CH + TC inférieur à 70%. Il est ainsi démontré une influence significative du choc hémorragique sur le TP (p<0.001).
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Ces résultats sont cohérents avec la littérature où les valeurs de TP inférieur à 70% (études Européennes) ou de TP ratio supérieur à 1,2 (études Nord Américaines) sont utilisées comme valeurs seuils de définition de la coagulopathie liée au traumatisme et associées à une augmentation significative de la morbimortalité5–7,43. Une valeur seuil de TP supérieure à 70 % fait actuellement parti des recommandations Européennes dans la gestion du choc hémorragique post traumatique3. Un allongement de l’intervalle R a de plus été mis en évidence dans le groupe CH+TC (11 [7-‐234]) avec une influence significative du choc hémorragique sur l’intervalle R (p<0.001). Un allongement de l’intervalle R est révélateur d’un état d’hypocoagulabilité dans la population étudiée. Dans la littérature, une étude prospective sur une population de 161 patients polytraumatisés a identifié l’allongement de l’intervalle R supérieur à 8 minutes comme la valeur la plus fréquemment retrouvée à l’admission des patients et corrélée de façon significative à la mortalité (p<0.01)23. Il est observé dans la population de cette étude une réduction importante du taux de fibrinogène mesuré par la technique de Clauss et par thromboélastographie dans le groupe CH (1.4 [0.8-‐1.9]) et CH+TC (1 [0.3-‐1.7]). Le choc hémorragique exerce dans ce travail une influence significative sur le taux de fibrinogène (p<0.001) de façon cohérente avec la littérature mettant en évidence une incidence de 58 % d’hypofibrinogénémie (Fg < 1.5 g/l) dans une population de polytraumatisés présentant une coagulopathie à l’admission (p<0.001)28. Les patients présentant un fibrinogène bas (inférieur à 1.5g/l) présentaient des scores de gravité ISS plus élevés (p<0.001) et une mortalité à J1 significativement augmentée (p<0.001). Il est à noter que les valeurs de fibrinogène mesurées par la technique de Clauss et le fibrinogène fonctionnel par thromboélastographie présentent des valeurs différentes. La corrélation entre le fibrinogène mesuré par les méthodes viscoélastiques et la technique de Clauss est à ce jour variable suivant les études.
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Alors qu’une corrélation élevée (r=0.87) entre le fibrinogène fonctionnel mesuré par le TEG et la technique de Clauss est mise en évidence dans une étude incluant 68 patients traumatisés44, une corrélation médiocre (r=0.44) est mise en évidence par l’équipe de Rourke et al. par la méthode Fibtem (ROTEM)28. Cependant, une corrélation élevée entre le fibrinogène fonctionnel et la technique de Clauss est mesurée dans une population présentant des valeurs de fibrinogène supérieures à 2 g/l tandis que des corrélations faibles sont mises en évidences pour des valeurs de fibrinogène inférieures à 1.5g/l. La population de l’étude réalisée ici présente des valeurs de fibrinogène basses pour lesquelles la corrélation entre les deux méthodes est donc sujette à caution. Certaines équipes proposent une transfusion en fibrinogène guidé par les méthodes viscoélastiques dans une population de polytraumatisés dont la pertinence peut alors être discutée45. Les patients inclus au sein de la présente étude ne présentent pas d’hyperfibrinolyse sur les profils d’hémostase évalués à l’admission par le paramètre Ly30, que ce soit dans le groupe CH ou TCI, malgré des taux de fibrinogène bas. Il existe un manque global de sensibilité et de spécificité des méthodes biologiques standard (PDF, d-‐Dimères) et des méthodes viscoélastiques dans l’évaluation de la fibrinolyse. L’incidence de la fibrinolyse varie entre 5 et 10% dans la population de coagulopathie liée au traumatisme mais la mortalité est proche de 100%46. Malgré des recommandations récentes sur l’administration de molécules antifibrinolytiques dans les 3 heures suivant le traumatisme47, la littérature ne comporte pas d’étude analysant la performance des méthodes viscoélastiques sur de grandes cohortes. Le taux de plaquettes ne semble pas être modifié par la présence d’un choc hémorragique : groupe CH (médiane à 190 G/l) et CH+TC (médiane à 199 G/l). Dans la littérature, l’incidence d’une thrombopénie post traumatique inférieure à 100 G/l est particulièrement variable, allant de 3 à 35% 37,48,49. Un taux de plaquettes inférieur à 100 G/l est mis en évidence en tant que facteur prédictif indépendant de mortalité et un taux ≤ 175 G/l est associé à un risque multiplié par 2 de progression des lésions hémorragiques37,49.
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Un taux de plaquette normal peut cependant être associé à des anomalies de la fonction plaquettaire conduisant à des lésions hémorragiques. L’équipe de Jacoby et al. observe ainsi dans une population de 100 traumatisés dont 22 traumatismes crâniens associés (AIS intracrânien ≥ 4) une activation plaquettaire importante associée à une dysfonction plaquettaire significative et persistante sur 72 heures, mesurée par PFA-‐100 50. L’étude présentée ici évalue uniquement le taux de plaquettes sans réaliser de mesure complémentaire de la fonction plaquettaire. Or la participation des plaquettes à la solidité du caillot est démontrée in vitro et influence donc les paramètres MA et l’angle α mesuré par thromboélastographie. Dans l’étude présentée, le choc hémorragique exerce une influence significative sur ces deux paramètres (p<0.001) sans qu’il soit possible de fournir une interprétation complète en l’absence de la fonction plaquettaire. Traumatisme crânien et anomalies de l’hémostase Il n’est pas mis en évidence dans cette étude de modification des paramètres d’hémostase standard dans la population de TCI par rapport à la population contrôle : TP médian à 82% [73-‐93], taux de fibrinogène à 2.5g/l [1.8-‐3] et taux de plaquettes normal (225 G/l [170-‐279]). L’incidence de trouble de l’hémostase dans le cadre du traumatisme crânien est extrêmement variable au sein des études, allant de 10 à 97% 30. Cependant, l’incidence de la coagulopathie dans la population de traumatisés crâniens a probablement été sous-‐estimée en réalisant les tests d’hémostase standard et l’analyse par thromboélastographie uniquement à l’admission du patient sans les répéter par la suite. Or la chronologie d’apparition des troubles est particulièrement déterminante, une coagulopathie se manifestant chez 45% de la population présentant un TCI dans les 12 premières heures, cette proportion progressant à 65 % à 24 heures de prise en charge51. Concernant l’analyse par thromboélastographie, les résultats obtenus dans la présente étude mettent en évidence l’influence du traumatisme crânien sur la coagulopathie post traumatique par la modification de l’intervalle R (p=0.02). L’équipe de Windelov et al. met particulièrement en évidence une discordance entre l’évaluation de l’hémostase par thromboélastographie et les tests
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biologiques standards à l’admission de 78 patients présentant des lésions hémorragiques intracrâniennes52. Seuls 2 patients répondent aux critères d’hypocoagulabilité suivant la méthode thromboélastographique (R > 8min, angle α < 55°, MA < 51mm) et par la biologie standard (TP < 70% et taux de plaquettes < 100G /l). Au sein de la population présentant des anomalies TEG (n=8), la morbidité neurologique et la mortalité à 30 jours sont significativement plus élevées par rapport à l’ensemble des patients inclus (p=0.02). Il n’est pas observé de dégradation neurologique ni de mortalité à 30 jours significativement plus élevées parmi la population identifiée par les tests biologiques standard (n=16) comparée à l’ensemble de la cohorte. Le profil TEG défini par les auteurs semble plus spécifique dans l’évaluation du risque de morbimortalité (p=0.006). Ce résultat est plus cohérent avec les conclusions de l’équipe de Kunio et al. pour lesquels l’intervalle R était le seul paramètre obtenu par thromboélastographie corrélé de façon significative avec les besoins transfusionnels et la morbimortalité de patients présentant un TCI grave 42. Limites méthodologiques de l’étude Plusieurs limites peuvent être relevées dans ce travail. Le caractère rétrospectif représente une des principales limites de cette étude et expose au risque de biais de sélection. Il s’agit d’une étude observationnelle analysant rétrospectivement des données collectées de façon prospective. Ainsi, certains patients admis durant la période d’étude n’ont pu être inclus du fait de données manquantes principalement par l’absence d’analyse de l’hémostase par méthode thromboélastographique. Cependant, un groupe contrôle a été crée afin d’évaluer si les anomalies de l’hémostase observées dans les groupes TC, CH et CH+TC étaient en relation avec les lésions présentées par les patients inclus dans ces groupes.
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La seconde limite concerne les faibles effectifs inclus dans cette étude. Ceci peut être expliqué tout d’abord par des critères de non inclusion ne retenant pas les patients sous anticoagulant, antiagrégant ou présentant des troubles de l’hémostase connus. Ces critères permettent de s’affranchir des difficultés d’interprétation des examens d’hémostase standard et du thromboélastogramme en présence d’un inhibiteur de l’agrégation ou de la coagulation. Ainsi, dans la population de TCI en particulier il existe une proportion conséquente de patient recevant l’un ou l’autre de ces traitements voire les deux et n’ayant par conséquence pas été inclus dans cette étude. De plus, les patients ayant reçu des produits sanguins avant la réalisation de prélèvements biologiques pour les tests d’hémostase standard et la thromboélastographie ont été exclus afin de ne pas sous-‐estimer l’incidence de la coagulopathie liée au traumatisme. Ce dernier critère a exclu ainsi de cette étude de nombreux patients du groupe CH et CH+TC présentant des lésions graves d’emblée nécessitant une transfusion lors de la prise en charge préhospitalière ou dès l’arrivée au déchocage en extrême urgence. De même l’administration d’acide tranexamique, de plus en plus effectuée par les équipes en préhospitalier chez les patients présentant un choc hémorragique post traumatique, ne permettait pas d’inclure les patients au sein de cette étude. L’administration d’acide tranexamique est par ailleurs fortement recommandée par les dernières recommandations Européennes dans les 3 heures de la prise en charge d’un choc hémorragique post traumatique (Grade 1a)47. L’exclusion des patients transfusés en urgence vitale concerne une population de choc hémorragique grave et constitue un biais de sélection majeur de la présente étude. Cependant, des résultats significatifs sur l’influence du facteur choc hémorragique sur les paramètres d’hémostase standard et thromboélastographiques ont été mis en évidence dans cette étude. Le groupe TCI, présentant des résultat non significatifs, est rarement transfusé d’emblée et l’impact d’un tel biais de sélection semble limité sur ce groupe. La technique de réalisation du thromboélastogramme représente aussi une restriction à l’inclusion de nombreux patients.
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En effet cette technique était effectuée par le médecin en charge du patient traumatisé lorsque celui-‐ci maîtrisait la technique de réalisation de ce test, ce qui était le cas d’un nombre limité de praticiens. Une dernier point concerne le caractère restrictif de la définition du traumatisme crânien isolé utilisé dans cette étude, ayant conduit à l’inclusion de patients ayant les TCI les plus graves. La définition du traumatisme crânien grave retenue dans cette étude est plus restrictive notamment que dans les dernières études publiées sur l’association entre traumatisme crânien et thromboélastographie42,52. Le score AIS utilisé a été mis à jour en 2005, les versions antérieures surestimant le score 53. La population incluse dans l’étude est composée en majorité de patients présentant des contusions hémorragiques intraparenchymateuses et des hématomes sous-‐duraux de grande abondance post traumatiques. Toute lésion extra crânienne grave a été exclue (AIS extra crânien strictement inférieur à 3). Perspectives apportées par l’étude réalisée
Une étude prospective incluant un effectif de patient plus important est souhaitable afin de confirmer les résultats observés au sein de cette première étude. De plus, il serait intéressant d’étudier la fonction plaquettaire afin de mieux caractériser l’existence d’une éventuelle d’une dysfonction plaquettaire et son éventuel retentissement. L’étude de la fibrinolyse par thromboélastographie semble être insuffisante et nécessite d’être complétée par des méthodes de biologie plus sophistiquées. Enfin les différences des taux de fibrinogène fournis par la technique de Clauss et par thromboélastographie (fibrinogène fonctionnel) posent le problème du choix de la méthode à utiliser pour guider l’administration de fibrinogène dont l’objectif recommandé est supérieur à 1.5 à 2 g/l suivant les recommandations Européennes publiées en 201347.
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5. RESUME DE L’ETUDE
Influence du choc hémorragique et du traumatisme crânien sur la coagulopathie liée au traumatisme, évaluée par thromboélastographie.
Introduction : La coagulopathie liée au traumatisme est observée chez 25 à 35% des patients polytraumatisés et est associée à une augmentation de la morbimortalité. Les troubles de l’hémostase semblent différer entre les patients présentant un choc hémorragique (CH) ou un traumatisme crânien isolé (TCI). La contribution exacte du TCI sur la coagulopathie liée au traumatisme n’est pas clairement définie, des profils hypocoagulables ou hypercoagulables ayant été décrits.
Objectif principal : Décrire et comparer les paramètres d’hémostase standard et thromboélastographiques (TEG) chez les patients présentant un traumatisme crânien isolé (TCI), un choc hémorragique (CH) ou l’association des deux pathologies (CH + TC).
Patients et méthode : Une étude rétrospective observationnelle a été réalisée dans un centre d’accueil des polytraumatisés de niveau 1, à l’hôpital de Bicêtre. Des tests d’hémostase standard (TP, TCA, Fibrinogène) et une analyse par thromboélastographie (Kaolin et Fibrinogène fonctionnel) ont été réalisés à l’admission, avant toute transfusion. La population (n=85) a été répartie en 4 groupes : 1/ Groupe contrôle (CL) : ni TC ni CH (n=28), 2/ TCI: Abbreviated Injury Score (AIS)intracrânien ≥ 3 (n=26), 3/ CH: PAS<90 mmHg et saignement actif (n=19), 4/ CH et TC (n=12). Les données biologiques (tests de coagulation standard et TEG) ont été comparées entre le groupe contrôle et chacun des trois autres groupes par des tests statistiques non paramétriques et une analyse ANOVA sur les rangs à deux facteurs.
Résultats : Entre février 2011 et août 2013, 85 patients ont été inclus, en majorité de sexe masculin et âgé de moins de 45 ans. Le groupe CH et CH+TC présentaient des scores ISS significativement plus élevés (33 [17-‐45] et 42 [37-‐75] respectivement, p<0,001) ainsi que le groupe TCI (21 [15-‐36], p=0.003). La proportion de patients présentant un score de Glasgow inférieur à 8 à l’admission était significativement plus élevée dans le groupe TCI et CH+TC.
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Il a été mis en évidence une influence du facteur choc hémorragique sur les paramètres d’hémostase standard : taux de prothrombine (p<0.001) et de fibrinogène (p<0.001) à l’exception du taux de plaquettes. La présence d’un choc hémorragique a influencé aussi les paramètres obtenus par thromboélastographie : l’intervalle R (p<0.001), l’angle α (p<0.001) et l’amplitude maximum (MA) (p<0.001). Le facteur traumatisme crânien n’a pas exercé d’influence significative sur les valeurs d’hémostase standard ni sur les paramètres obtenus par thromboélastographie, à l’exception de l’intervalle R (p=0.02). De plus il n’a pas été mis en évidence d’interaction entre le TCI et le CH sur les paramètres d’hémostase standard ou mesurés par thromboélastographie. Conclusion : Le facteur choc hémorragique a influencé de manière statistiquement significative tous les paramètres d’hémostase standard et thromboélastographiques à l’exception du taux de plaquettes. Le facteur traumatisme crânien a influencé de manière significative uniquement l’intervalle R, reflet des facteurs de la coagulation.
Aucun effet synergique entre les deux facteurs n’a été mis en évidence.
Ce travail a fait l’objet d’une présentation orale au 26ème congrès annuel de l’European Society of Intensive Care Medecine (ESICM) à Paris en octobre 2013
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Annexes
1. Tableau de recueil des données.
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2. Score AIS intracrânien spécifique : Références AIS 1998 et 2005.
INJURY DESCRIPTION AIS-‐1998 SCORE
AIS-‐2005 SCORE
*Cerebellum: contusion, single or multiple: tiny; <1cm diameter 3 2
Cerebellum: hematoma (hemorrhage): epidural or extradural: NFS 4 3
*Cerebellum: hematoma (hemorrhage): epidural or extradural: tiny; <0.6cm thick 4 2
Cerebellum: hematoma (hemorrhage): intracerebellar including petechial and subcortical: NFS 4 3
*Cerebellum: hematoma (hemorrhage: intracerebellar including petechial and subcortical: tiny; <0.6cm diameter [includes radiographic “shearing” lesions] 4 2
Cerebellum: hematoma (hemorrhage): subdural: NFS 4 3
*Cerebellum: hematoma (hemorrhage): subdural: tiny; <0.6cm thick 4 2
Cerebellum: laceration [not from penetrating injury]: NFS 4 3
Cerebellum: laceration [not from penetrating injury]: ≤2cm length or depth Cerebellum: subarachnoid hemorrhage
4 3
3 2
Cerebellum: subpial hemorrhage 3 2
*Cerebrum: contusion: single: tiny; <1cm diameter 3 2
*Cerebrum: contusion: multiple, on same side: tiny; each <1cm diameter 3 2
*Cerebrum: contusion: multiple, at least one on each side: tiny: each <1cm diameter 3 2
Cerebrum: diffuse axonal injury: NFS 5 4
Cerebrum: diffuse axonal injury: confined to white matter or basal ganglia 5 4
Cerebrum: hematoma (hemorrhage): NFS or “extra axial” 4 3
Cerebrum: hematoma (hemorrhage):epidural or extradural: NFS 4 3
*Cerebrum: hematoma (hemorrhage):epidural or extradural: tiny; <0.6cm thick 4 2
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INJURY DESCRIPTION AIS-‐1998 SCORE
AIS-‐2005 SCORE
Cerebrum: hematoma (hemorrhage): intracerebral: NFS 4 3
* Cerebrum: hematoma (hemorrhage): intracerebral: tiny; single or multiple <1cm diameter 4 2
* Cerebrum: hematoma (hemorrhage): intracerebral: petechial hemorrhage(s) [includes radiographic “shearing” lesions] 4 2
* Cerebrum: hematoma (hemorrhage): intracerebral: petechial hemorrhage(s) [includes radiographic “shearing” lesions]; not associated with coma >6 hours 4 2
Cerebrum: hematoma (hemorrhage): intracerebral: small; ≤30cc or ≤15cc if age ≤ 10; 1–4cm diameter or ≤1cm if ≤age 10; subcortical hemorrhage: not associated with coma >6 hours 4 3
Cerebrum: hematoma (hemorrhage): subdural: NFS 4 3
Cerebrum: hematoma (hemorrhage): subdural: tiny; <0.6cm thick [includes tentorial (subdural) blood one or both sides] 4 3
Cerebrum: hematoma (hemorrhage): subdural: small; moderate; ; ≤50cc or ≤25cc if age ≤10; 0.6–1cm thick: bilateral [both sides 0.6–1.0cm thick] 5 4
Cerebrum: laceration [not from penetrating injury]: NFS Cerebrum: laceration [not from penetrating injury]: ≤2cm length or depth
4 4
3 3
Cerebrum: intraventricular hemorrhage: NFS 4 2
Cerebrum: intraventricular hemorrhage: not associated with coma >6 hours 4 2
**Cerebrum: ischemic brain damage directly related to head trauma: associated with coma >6 hours 3 5
Cerebrum: subarachnoid hemorrhage: NFS Cerebrum: subarachnoid hemorrhage: not associated with coma >6 hours
3 3
2 2
Cerebrum: subpial hemorrhage: NFS 3 2
Cerebrum: subpial hemorrhage: not associated with coma >6 hours 3 2
Cerebral Concussion: NFS 2 1
*New injury descriptor in AIS-‐2005, captured by AIS-‐1998 code with less specific size discrimination;
**AIS-‐2005 Score increased versus AIS-‐1998 Score; NFS = Not Further Specified
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3. Compte rendu du Comité de Protection des Personnes. N° PP 14-‐004
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