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Research Collection
Doctoral Thesis
Le Courant résiduel dans les multiplicateurs d'électronsélectrostatiques
Author(s): Rajchman, Jan
Publication Date: 1938
Permanent Link: https://doi.org/10.3929/ethz-a-000092069
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LE COUMNT RÉSIDUEL
DANS LES MULTIPLICATEURS
D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES
THÈSE
présentée a
l'école polytechnique fédérale, zurich
pour l'obtention du grade de
docteur es sciences techniques
PAR
Jan RAJCHMAN
de Pologne.
Rapporteur: M. le Prof. Dr P. Scherrer.
Co-rapporteur: M. le Prof. Dr. F. Tank.
GENÈVE
Imprimerie Albert Kundig
1938
Extrait des Archives des Sciences physiques et naturelles.5m. période: Vol. 20. — Fasc. Sept.-Oct. et Nov.-Déc. 1938.
CURRICULUM VITAE
Né à Londres, Angleterre, le 10 août 1911.
Enseignements primaires de l'Ecole Privât et de
VEcole professionnelle à Genève et enseignementsecondaire à la Section technique du Collège de
Genève. Maturité scientifique du Canton de
Genève en juillet 1930.
Admission à la Section d'électricité (Section III B)de l'Ecole polytechnique fédérale. Diplôme d'in¬
génieur électricien en 1934.
Depuis 1935, au service de la « Radio Corporation
of America, Manufacturing Company », à Cam-
den N.-J., aux Etats-Unis de l'Amérique, en
qualité d'ingénieur aux Laboratoires de Re¬
cherches électroniques.Jan RAJCHMAN.
PRÉFACE
Le travail expérimental décrit dans cette thèse
en vue d'obtenir le grade de docteur es sciences
techniques à l'Ecole polytechnique fédérale à
Zurich, a été entrepris sur le conseil de M. le
professeur Dr P. Scherrer. Il a été exécuté dans
les Laboratoires de Recherches électroniques à la
R.C.A. Manufacturing Company, à Camden N.-J.,
dirigés par le Dr V. K. Zworykin, qui a bien
voulu donner son approbation pour le texte
anglais.
Camden N.-J., Etats-Unis d'Amérique.Juin 1938.
Traduction française.
Genève, septembre 1938.
Jan Rajchman.
LE COURANT RÉSIDUEL
DANS LES MULTIPLICATEURS
D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES
PAR
Jan ISAJCHVlArV
(Avec 28 flg.) .
I. INTRODUCTION
Lorsque la surface d'un solide est bombardée par des élec¬
trons, c'est-à-dire par des rayons cathodiques, elle est en
général capable d'émettre d'autres électrons. Ce phénomène,connu sous le nom d'« émission secondaire », a été étudié par
maint auteur x * tant au point de vue théorique que pratique.Il a été découvert que le courant secondaire émis est propor¬
tionnel au courant primaire. Le coefficient de proportionnalité
dépend de la vitesse des électrons bombardeurs et de la nature
de la surface émissive. Il peut atteindre 15 dans certains cas.
Un multiplicateur d'électrons est un appareil qui utilise le
phénomène d'émission secondaire pour amplifier un courant
d'émission électronique. Cela est réalisé par le moyen suivant:
Les électrons originels bombardent une cible dont la surface
est particulièrement apte à l'émission secondaire, puis les
électrons secondaires obtenus deviennent à leur tour les pro¬
jectiles d'une cible nouvelle. Ce procédé qui peut être répété à
volonté multiplie chaque fois le courant par le coefficient
* Les chiffres renvoient aux indications bibliographiques groupéesà la fin de ce mémoire
10 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
d'émission secondaire. Le quotient du courant final au courant
initial, le gain, peut ainsi atteindre d'énormes valeurs, même
lorsque le coefficient d'émission secondaire n'est que de 4 ou 5.
Le processus de multiplication peut être réalisé en contrôlant
le mouvement des électrons par un champ électromagnétique
soit .constant2, soit variable3. A cause de sa plus grande
stabilité, seul le type statique sera considéré ici.
En principe, un multiplicateur statique consiste en une série
d'électrodes maintenues à des potentiels positifs croissants et
dont la surface est susceptible d'émission secondaire. Un
courant initial d'électrons produit par son choc sur la première
cible un courant secondaire qui est dirigé sur la cible suivante
et engendre a son tour de nouveaux électrons. Ce processus est
répété autant de fois qu'il y a d'électrodes multiplicatrices. Les
électrons acquièrent l'énergie cinétique nécessaire à l'émission
secondaire, par la perte de leur énergie potentielle dans le
champ électrostatique. Le phénomène de l'émission secondaire
n'est effectif que si les électrons primaires se meuvent dans une
direction opposée au champ dans le voisinage immédiat des
cibles puisqu'un tel champ y est nécessaire pour libérer les
électrons secondaires émis à la surface de l'électrode. Le champ
électromagnétique existant dans le multiplicateur doit donc
tendre à extraire les électrons des régions effectives des élec¬
trodes. De plus, en dépit de cette condition adverse, il faut qu'il
soit capable de diriger l'émission d'une électrode à la suivante
sans perte d'électrons. Ce champ dépend de la configuration
et des potentiels des électrodes ainsi que d'un système extérieur
éventuel tel qu'un aimant.
Dans le type magnétique i le processus de multiplication est
réalisé grâce à une combinaison de champs électro- et magnéto-
statiques. Le fonctionnement de cet appareil ne laisse rien à
désirer. Cependant, il nécessite l'usage d'un aimant extérieur
au tube, dont le champ doit être minutieusement ajusté en
intensité et en direction, ce qui est un inconvénient pratiqueconsidérable dans la plupart des cas. L'aimant devient un
obstacle dans le cas où le champ magnétique, qui est difficile à
localiser, est d'un effet néfaste par ailleurs. Ceci a lieu, par
exemple, dans les multiplicateurs dans lesquels l'émission
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 11
thermique des électrons initiaux est contrôlée par une grille,ou dans le cas de l'application du multiplicateur à l'iconoscope.Le mouvement des électrons lents compris dans l'espace ca¬
thode-grille dans le premier cas ou de ceux dans le voisinagede la surface de la mosaïque de l'iconoscope dans le second cas,
est considérablement altéré par le champ magnétique.Les multiplicateurs purement électrostatiques des types L
et T 4 développés antérieurement ne nécessitent pas d'aimant.
Ils ont cependant l'inconvénient de ne pouvoir opérer qu'avecdes courants de sortie assez faibles à cause des effets des charges
spatiales. De plus, ils sont difficiles à construire et le traitement
dans le vide de leurs surfaces émettrices est délicat.
La première partie de cette dissertation décrit le développe¬ment d'un multiplicateur purement électrostatique qui ne
possède ni les inconvénients du type magnétique ni ceux des
types L et T. Elle traite plus particulièrement des méthodes
utilisées pour la solution des problèmes de trajectoires d'élec¬
trons dans le champ électrostatique, c'est-à-dire des méthodes
de l'optique électronique qui, quoique développées pour les
multiplicateurs, ont un intérêt plus général pour la construction
de toutes sortes de tubes à vide. La majeure partie du sujet de
cette première partie est commune avec un mémoire en publi¬cation 5 et est présentée ici parce qu'elle est une introduction
indispensable à la thèse proprement dite.
Le multiplicateur peut multiplier le nombre des électrons
émis par photo-émission ou par émission thermique ou par
tout autre procédé. Le multiplicateur photo-électrique, le seul
qui sera décrit ici, peut avoir une sensibilité énorme en compa¬
raison de celle des cellules photo-électriques ordinaires. Le
nombre des photo-électrons qui n'est pas amplifié du tout dans
les cellules à vide et qui n'est amplifié que de 20 fois au maxi¬
mum dans les cellules à gaz, peut être multiplié dans cet appareil
par un facteur qui est pratiquement aussi grand que l'on veut.
Des gains de 108 à 109 ont été observés. De plus, le courant de
sortie est strictement proportionnel à l'intensité de la lumière
excitatrice, grâce à la linéarité de l'émission photo-électriqueet à la dépendance linéaire des courants primaires et secon¬
daires. La grande sensibilité et la linéarité parfaite du multi-
12 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
plicateur le rendent un instrument idéal pour la mesure
d'intensités de lumière très faibles.
Le multiplicateur est capable de suivre des variations d'in¬
tensité de lumière très rapides, comme il a déjà été montré *.
La limite fondamentale à la fréquence qu'il peut suivre est
déterminée uniquement par l'étendue de la bande des tempsde transit des électrons d'électrode à électrode, puisque le
processus de l'émission secondaire lui-même est pratiquementinstantané. Dans les conditions habituelles, cette fréquence de
variation limite est de l'ordre de 109 par seconde. On voit
ainsi que le multiplicateur est susceptible de multiplier directe¬
ment tout signal électronique, qu'il soit faible, constant ou
variant très rapidement. Il est très difficile, sinon impossible,de réaliser ces mêmes propriétés au moyen d'un autre dispositiftel qu'une cellule photo-électrique suivie d'un amplificateur à
tubes. Il a été démontré 4que du point de vue du « souffle » ou
bruit dû aux fluctuations du courant électronique (shot effect)le multiplicateur est fondamentalement supérieur à tout autre
dispositif, puisque le bruit provient uniquement des fluctuations
du courant photo-électrique lui-même. Un article intéressant
vient d'être publié 8 qui développe une théorie du « shot effect »
dans les multiplicateurs d'électrons.
Les propriétés remarquables du multiplicateur qui viennent
d'être décrites ouvrent d'énormes champs d'applications à cet
appareil. Malheureusement il se présente un sérieux obstacle.
Dans tout multiplicateur photo-électrique il existe, en général,un courant de sortie lorsque le tube est dans l'obscurité la plus
totale, c'est-à-dire lorsqu'il est complètement à l'abri de toute
radiation, visible aussi bien qu'invisible (de Finfra-rouge à
l'ultra-violet). Ce courant de sortie qui est présent en l'absence
de toute lumière excitatrice, sera appelé dans la suite le
« courant résiduel » (the dark current, der Dunkelstrom).Suivant son ordre de grandeur et sa stabilité, le courant
résiduel est nuisible pour les raisons suivantes:
Lorsque le courant résiduel est suffisamment grand pour
être comparable au courant de sortie maximum dont le tube
est capable, il restreint le courant de sortie effectif, c'est-à-dire
le courant de sortie dépendant de l'intensité de la lumière
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 13
excitatrice. Dans ce cas, évidemment, il est impossible de
mesurer des intensités de lumière très faibles, puisqu'elles ne
causent qu'un courant de sortie négligeable en face du grandcourant résiduel existant en permanence.
Lorsque le courant résiduel est plus petit, il devient nuisible
à cause de son instabilité. Si les irrégularités sont grandes
comparativement à celles provenant du « shot effect », on dira
que le courant résiduel est « erratique ». Dans ce cas, la plus
petite intensité de lumière mesurable devra être considérable¬
ment plus grande que la plus grande variation du courant
résiduel. C'est ainsi que le pouvoir du multiplicateur de mesurer
de faibles intensités de lumière sera déterminé par les fluctua¬
tions de son courant résiduel plutôt que par son gain qui,
pratiquement, peut être augmenté à volonté.
Enfin, lorsqu'on est parvenu à établir un état dans lequelle courant résiduel est très faible et que ses variations sont dues
exclusivement au « shot effect », celui-ci devient beaucoupmoins gênant. Pour la mesure d'intensités constantes, il est
presque inofïensif, puisqu'il peut être neutralisé par un circuit
de compensation approprié. Cependant, pour un signal lumi¬
neux modulé, le rapport du signal aux fluctuations dues au
« shot efîect » est diminué à cause des fluctuations addition¬
nelles du courant résiduel. Cet apport devient gênant surtout
pour des signaux faibles, dont les fréquences sont réparties
sur une large bande.
Ainsi, il est clair que le courant résiduel est tout à fait indé¬
sirable. L'objet principal du présent travail consiste à découvrir
et analyser les causes du courant résiduel et à préconiser les
moyens de le réduire. La seconde partie de cette dissertation
est consacrée à la description des principaux phénomènes quicausent le courant résiduel et à celle des moyens utilisés dans
la construction de multiplicateurs dont le courant résiduel est
réellement très faible. Lorsque toutes les autres causes sont
éliminées, l'émission thermique des électrodes emettrices elle-
même reste la cause ultime du courant résiduel et constitue
ainsi une limite fondamentale au-dessous de laquelle celui-ci ne
peut plus être réduit. Dans ces conditions, le multiplicateur est
un appareil idéal pour la détermination des constantes ther-
14 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
miques des surfaces émettrices. Ces constantes sont déterminées
en observant le courant résiduel en fonction de la températuredu tube, qui est variée par rapport à celle du laboratoire. Les
constantes thermiques de la surface photo-émettrice conven¬
tionnelle de l'oxyde d'argent traité au caesium ont été déter¬
minées par ce procédé.L'étude du courant résiduel fut commencée avec des multi¬
plicateurs magnétiques. Cependant, pour conserver la clarté
de l'exposé, nous n'avons pas mentionné spécifiquement les
résultats obtenus qui sont inclus ipso facto dans la présenteétude.
Les multiplicateurs photo-électriques dont le courant résiduel
est très faible ont un vaste champ d'application. Ils ont été
spécialement développés en vue d'obtenir un appareil susceptiblede mesurer directement des intensités de lumière très faibles.
Un instrument de cette sorte peut être particulièrement utile à
des applications scientifiques. En spectroscopie 7, par exemple,
l'énergie de radiation dans une bande étroite du spectre peut
devenir très faible, particulièrement lors de l'examen de la
luminescence ou de l'absorption des matériaux. Un autre champ
d'application est l'astronomie 8. Le multiplicateur permet, en
effet, de mesurer avec précision l'intensité de la lumière d'étoiles
de grande magnitude et d'obtenir aisément un enregistrementcontinu de la variation de cette intensité.
II. LES TRAJECTOIRES ÉLECTRONIQUES
DANS LE CHAMP ÉLECTROSTATIQUE
1. Considérations analytiques.
Considérons un certain nombre d'électrodes maintenues à
des potentiels constants donnés et la trajectoire que décrit une
particule chargée sous l'unique influence de leur champ électro¬
statique. En particulier, nous ne considérerons pas l'influence
d'un champ magnétique ou celle du champ électrostatique
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 15
créé par d'autres particules chargées, c'est-à-dire que nous
négligerons les charges spatiales.Les lois du champ électrique et du mouvement d'un point-
charge sont classiques. Le potentiel V satisfait à l'équation de
Laplace
AV = 0 (1)
pour tous les points du champ, et il est assujetti aux conditions
limites, c'est-à-dire qu'il doit prendre les valeurs données à la
surface des électrodes.
Considérons maintenant, dans ce champ, une particule de
masse m et de charge e. Nous admettrons que cette particulede nature subatomique se comporte comme une sphère de
rayon infiniment petit. Son mouvement, dû aux forces d'un
système potentiel, obéira à l'équation de Newton:
m-jj= |egrad.V| (2)
dans laquelle R est le rayon vecteur de la particule. Il devra,en plus, respecter les conditions initiales.
Pour obtenir l'équation de la trajectoire il suffît, en principe,
d'intégrer l'équation de Laplace (1), d'introduire la valeur
trouvée du potentiel V dans l'équation (2) et d'éliminer le
temps. Au lieu de cela, il est souvent plus facile de se servir
du principe de la moindre action qui fournit des équationsdans lesquelles le temps est éliminé de lui-même. D'après ce
principe, la trajectoire entre deux points A et B dans un
champ de forces potentielles est telle que l'intégrale S
B B
S = C 2Wdt = ( mvds (3)A À
devienne extrémale. Dans cette intégrale, W est l'énergie ciné¬
tique, v la vitesse de la particule, ds un élément de sa trajectoireet dt un élément de temps.
Si l'on choisit l'origine du potentiel V de telle sorte que
16 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
l'énergie totale de la particule soit toujours nulle, par consé¬
quent leVl = W, l'intégrale devient:
B
S =
A
fVVrfs (4)
en négligeant toutes les constantes. Nous supposons que la parti¬cule se meut suffisamment lentement pour qu'une correction
relativistique soit négligeable. Si l'on considère un problème à
deux dimensions dans un système de coordonnées cartésiennes
(x, y), l'intégraleB
s = | Vv Vi + y'2 dx (5)
A
devient stationnaire si l'équation différentielle d'Euler est
satisfaite :
dans laquelle
¥(x,y,y') = y/Vjx~,y) V'^y'2 (?)
Cette équation (6) se réduit ici à l'équation appelée l'« équationdu rayon »
dx* IV [ày dx àx\ [ \dxj \ [ '
Une inspection de cette équation (8) montre que la trajectoired'une particule chargée dans un système d'électrodes donné est
indépendante de sa masse et charge, et qu'elle est invariante
par rapport à une variation proportionnelle des potentiels de
toutes les électrodes. L'équation du mouvement (2) dans laquelle
on remplace R par sR montre aussi que la trajectoire dans un
modèle agrandi linéairement est simplement agrandie à la même
échelle. Ces observations seront importantes dans la suite.
En général, l'intégration analytique des équations ci-dessus
est impossible même lorsque l'arrangement des électrodes
paraît très simple. La principale difficulté est de satisfaire aux
conditions limites. Une intégration numérique approchée,
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 17
utilisant, par exemple, un développement en série pour le
potentiel et remplaçant la trajectoire cherchée par des
segments de courbes algébriques, peut toujours être effectuée à
condition que le calculateur possède une patience à toute
épreuve. Toutefois, une telle intégration numérique est dénuée
de toute généralité et fournit seulement une solution à un
problème spécifique donné. Par conséquent, la conception d'un
appareil électronique que l'on développerait par ce procédé,doit consister en l'examen successif de beaucoup de cas parti¬culiers dans l'espoir d'arriver à une vue d'ensemble du problème,
susceptible d'inspirer un dessin optimum.
La longue et laborieuse intégration numérique peut être
remplacée avec avantage par des procédés expérimentaux.Certains d'entre eux sont très expéditifs et en même temps
suffisamment exacts pour les besoins de la pratique. Une des
méthodes décrite plus bas fournit une vue d'ensemble sur un
problème, en un temps qui suffirait à peine pour une seule
intégration numérique des équations différentielles.
2. Le bain électrolytique et les méthodes
graphiques.
La difficile détermination du champ potentiel par l'inté¬
gration de l'équation de Laplace peut être évitée si l'on se sert
de la méthode bien connue du bain électrolytique. On placedans un électrolyte des électrodes homothétiques aux électrodes
considérées, puis on applique à celles-ci des tensions propor¬
tionnelles aux potentiels correspondants des électrodes du tube.
Le potentiel en chaque point de l'électrolyte est alors propor¬
tionnel à celui qui règne au point correspondant dans le champ
examiné; il est alors facile d'obtenir les surfaces équipoten-tielles. La distribution du potentiel à la surface de l'électrolyte,facilement déterminée, est celle d'un plan central d'une struc¬
ture d'électrodes qui serait composée de la partie immergée des
électrodes et de son image réfléchie par rapport à la surface du
liquide II se trouve précisément qu'un tel plan central existe
dans les deux structures les plus usitées, qui sont celles possé-
18 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
dant une symétrie axiale et celle composée de cylindres à
génératrices parallèles. La théorie complète de cette méthode,
et des réalisations pratiques diverses ont été décrites dans bien
des ouvrages9 et ne seront pas discutées ici.
Le problème de la détermination des trajectoires des élec¬
trons, une fois le champ potentiel connu, peut être résolu par
une intégration numérique comme il a été indiqué plus haut.
Cependant, il est plus expéditif de se servir d'une méthode
graphique qui consiste à remplacer la trajectoire cherchée par
des segments de courbes algébriques, telles que lignes droites,
cercles, paraboles, etc. L'une d'entre elles, appelée la « méthode
du cercle », est basée sur une relation très simple entre le rayon
de courbure R de la trajectoire en un point P, le potentiel V
en P et la composante EB du champ normal à la trajectoire
en P.
En appliquant le principe de la conservation de l'énergie à
une particule, dont l'énergie initiale est eV0, on peut écrire
-mv* = e(\ + V.) . (9)
La force centrifuge étant égale à la force radiale, nous avons
Ç = «B. • <>
En éliminant la vitesse v entre les équations (9) et (10) on
trouve :
R =2(^±V»)- (il)
Cette relation (11) sert de base à la méthode graphique.
Supposons que les lignes équipotentielles soient dessinées
et que la particule soit arrivée en un point P, situé sur la ligne
équipotentielle V — AV, à une vitesse v (voir fîg. 1). Le
centre C de l'arc de cercle remplaçant le segment de trajectoire
entre les lignes équipotentielles V — AV et V, se trouve sur une
normale PTC à la trajectoire en P. La distance y = PQ étant
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 19
la plus courte distance entre les lignes V — AV et V, il en résulte
que le champ E en P est approximativement:
E = ^ (12)y
La composante ER du champ E le long de PC est donnée par:
ER = E cos a (13)
/\
expression dans laquelle oc = QPG. Si l'on construit QT per¬
pendiculaire à QP et si l'on appelle z = PT, l'on obtient:
cos a =y~ (14)z
Fig. 1.
Méthode du cercle.
La combinaison des équations (11) à (14) fournit simplement:
B = 2-±p», . (15)
Le coefficient.-^——
et la distance z qui sont tous deux
connus déterminent ainsi le rayon R et la position de C sur la
droite PTC. L'arc PPX de centre C et de rayon R est l'approxi¬mation de la trajectoire cherchée entre les lignes équipoten-tielles V — AV et V. La répétition de ce procédé permetd'obtenir toute la trajectoire. Il n'est pas nécessaire de cons¬
truire la vitesse v chaque fois, en raison du fait que les segments
20 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
de trajectoire doivent se rejoindre sans discontinuité, et que
par conséquent le point Cx doit être sur la ligne P^C. Les seuls
éléments qui doivent être construits sont le point Q, la tangente
QT et l'arc de cercle PPX.Plusieurs sources d'erreurs sont inhérentes à ce procédé.
Tout d'abord, la trajectoire réelle est remplacée par une série
d'arcs de cercle dont le rayon est seulement une approximationdu rayon de courbure moyen du segment de la trajectoireconsidéré. De plus, chacun de ces arcs est construit d'après son
précédent de sorte que l'on introduit des erreurs systématiquesaussi bien que des erreurs accidentelles. Si l'on choisit de petitesdifférences de potentiel entre les lignes équipotentielles, on
augmente le nombre d'opérations successives et bien que l'on
réduise l'erreur systématique on augmente les erreurs acciden¬
telles. Une solution pratique à ce dilemme consiste à choisir
de grands « pas » de potentiel lorsque la particule se meut
rapidement et de petits lorsqu'elle se meut lentement. Il est
assez difficile de donner une analyse quantitative exacte des
approximations que cette méthode introduit. Son importanceconsiste en la rapidité avec laquelle les trajectoires électro¬
niques peuvent être obtenues, et non pas en une précision
garantie à tel ou tel degré.On a construit 10,11 des machines traçant automatiquement
les trajectoires électroniques dont le principe est basé sur la
relation (11). Cette même relation est aussi utilisée indépen¬damment dans une méthode graphique ressemblant à celle
décrite ci-dessus 12.
3. Une propriété générale.
Une propriété générale des trajectoires des particules chargéesa été découverte en relation avec une difficulté rencontrée dans
l'application de la méthode des cercles à la trajectoire d'une
particule sans vitesse initiale. En effet, il résulte des considéra¬
tions précédentes que cette méthode donne un résultat d'autant
plus précis que la particule a une vitesse initiale plus grande.Pour une particule sans vitesse initiale, on se trouve embarrassé
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 21
pour commencer la construction de la trajectoire. Ce cas est
régi par le théorème qui suit:
Le rayon, de courbure de la trajectoire d'une particule chargéedont la vitesse est nulle en un point P d'un champ électrostatique,est égal à trois fois le rayon de courbure de la ligne de force passant
par P.
Ce théorème peut être démontré comme suit:
Choisissons un système de coordonnées cartésiennes ayant
son origine en P et son axe des x normal à la ligne équipoten-tielle passant par P (voir fig. 2). Nous supposerons que le poten¬
tiel est nul au point P. Cette hypothèse, faite déjà lors de la
dérivation de l'équation du rayon (8), n'enlève rien à la géné¬
ralité de la démonstration.
Flg. 2.
La courbure de la trajectoire d'une particule de vitesse nulle.
Le rayon de courbure est donné, en coordonnées cartésiennes,
par la relation:
r =\L2LlU—
. (16)y
Soit y = yt(x) l'équation de la trajectoire et y — yf(x) l'équa¬
tion de la ligne de force passant par P. Puisque les deux courbes
sont tangentes à l'axe des x, c'est-à-dire que yt = yf= 0, les
rayons de courbure Rt et R^ seront respectivement égaux à
1.
1— et —
.
yt Vf
22 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
Calculons y\ à l'aide de l'équation du rayon (8):
Vtd^dx2
—jl r^z ôV dy
dx dx1 +
dx(17)
Pour x = y = dy/dx = V = 0, cette expression est indéter¬
minée. Sa limite peut cependant être facilement calculée au
moyen du théorème de L'Hospital. Ce calcul fournit:
\Vt x=0
ô2V
dx dy~~ÔV~
àx
(18)
x=0
Calculons maintenant y,. Soit U(a;, 2/) = constante, l'équa¬tion de la ligne de force passant par P. On peut écrire succes¬
sivement :
et
ÔU,7 , dU,7ox oy
= 0
dU ÔU2 ôU ô2U
d*yf ôa: dx dy/ÔU
ôî/ or2
dt* \2
U* )
(19)
(20)
Soient V(x, y) = const., les équations des lignes équipoten-tielles et V (x, y) = const., celles des lignes de force. Les
conditions de Riemann-Caucby peuvent s'écrire alors:
ôa:
ÔU
dyet
ÔV
dy
ÔU
dx(21)
En se servant de ces conditions pour éliminer U de l'équa¬
tion (20), et en remarquant que-—- = 0 grâce au choix du sys¬
tème de coordonnées, on obtient pour y^ au point P-
ô2V
l»/lx-0dx dy~~d\~~
dx
(22)
x=0
La comparaison des équations (18) et (22) prouve le
théorème.
multiplicateurs d'électrons électrostatiques 23
4. Le modèle mécanique et les vérifications
électroniques.
Une méthode expérimentale très expéditive, résolvant
simultanément le problème du champ potentiel et celui de la
trajectoire, est basée sur l'analogie qui existe entre la trajectoired'une balle sphérique roulant sur une membrane de caoutchouc
convenablement tendue et celle d'une particule chargée se
mouvant dans un champ électrostatique. Bien des auteurs 9|13
se sont servi de cette analogie, connue depuis fort longtemps,
pour démontrer le fonctionnement de divers systèmes d'optique
électronique. Une analyse détaillée montre que si certains soins
sont pris, cette analogie peut servir de base à une méthode
expérimentale extrêmement utile dans les recherches électro¬
niques. La méthode s'applique au cas d'une particule chargée,
qui se meut dans un plan normal aux génératrices d'un système
d'électrodes cylindriques supposées infiniment longues ou en
tout cas suffisamment longues pour que l'effet des extrémités
soit négligeable.Sur une table horizontale on dispose des portions de cylindres
rigides dont les directrices sont une image à l'échelle des traces
des électrodes dans le plan de la trajectoire de la structure
électrique analogue et dont la hauteur verticale des génératrices
des divers cylindres est proportionnelle au potentiel des élec¬
trodes correspondantes. Si l'on considère la trajectoire d'une
particule négative, telle qu'un électron, à l'électrode la plus
négative correspondra le cylindre le plus haut. Pour un ion
positif l'inverse serait vrai.
Une membrane de caoutchouc qui a été préalablementtendue sur un cadre, est alors appliquée sur l'ensemble de ces
cylindres de telle sorte que la membrane soit en contact avec le
bord supérieur tout entier de tous les cylindres. Cela exige des
moyens auxiliaires pour presser le caoutchouc contre les
cylindres aux endroits où le contact ne se serait pas établi
autrement.
Il se trouve alors que la projection horizontale de la trajectoiredu centre d'une sphère solide roulant sur la surface de cette
24 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
membrane sous l'influence de la pesanteur est similaire à la
trajectoire d'une particule chargée se mouvant dans le système
électrique correspondant, pourvu que les conditions initiales
soient analogues dans les deux cas. Nous allons démontrer que
cette assertion est approximativement vraie, en considérant
successivement plusieurs problèmes dans lesquels les conditions
réelles seront quelque peu idéalisées.
Tout d'abord considérons la forme que la membrane prendra
dans les conditions décrites ci-dessus. Nous admettrons que la
membrane a été tendue sur son cadre de telle sorte que la
tension soit partout uniforme et grande par rapport aux tensions
supplémentaires qui résulteront des déformations dues aux
cylindres. Le problème peut être posé quantitativement de la
façon suivante: La membrane, initialement plane et horizon¬
tale, a été élevée le long de certaines lignes à une hauteur
z(x, y) par rapport à un plan horizontal contenant les axes x
et y d'un système de coordonnées rectangulaires. Nous suppo¬
sons que la membrane est un corps à deux dimensions idéal
qui ne présente aucune résistance au fléchissement et dont
l'énergie potentielle de tension est proportionnelle à l'accrois¬
sement de l'aire. La membrane assumera une forme qui rend
son énergie potentielle de tension superficielle minimum,
c'est-à-dire telle que l'aire de sa surface soit un minimum.
L'aire S d'une surface z(x, y) est donnée par l'intégrale
"-/.V'+W+W**- |23>A
Dans cette expression, A est la projection horizontale de l'aire.
La fonction z(x, y) cherchée, rendant cette intégrale extrémale,
satisfera à l'équation d'Euler:
~ F2 +A
Fz - Fz = 0 (24)
dans laquelle
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 25
Tous les calculs faits, cette équation (24) devient
dH r /ô£\2] a2zr (dzY)2
d'z dzdz_ 0
àx2 L \di// J ôy2 [ \ôx/ J dxàydxày
Si t— et t— sont petits, l'équation (26) se réduit à:
Ô2Z ÔZ2
OI2 01/''
qui est précisément l'équation de Laplace (1) dans laquelle V
aurait été remplacé par z. En d'autres termes, lorsque les pentesde la membrane sont faibles, et que par ailleurs les conditions
aux limites sont les mêmes, l'altitude d'un point quelconquede la membrane est proportionnelle au potentiel électrostatiquedu point correspondant du système électrique.
Il est intéressant d'observer ici, en passant, que l'expression
(26) est un facteur de celle de la courbure moyenne de Gauss
(somme des courbures principales). Ainsi, en tout point de la
membrane, les rayons de courbure principaux sont égaux et
de signe contraire. En d'autres termes, chaque point de la
surface est un point de selle.
Considérons maintenant une balle sphérique de rayon R,
roulant sur cette surface z (x, y) sous l'influence de la pesanteur.
Les déplacements élémentaires du centre de la sphère et de son
point de contact avec la surface peuvent être considérés égauxsi le rayon de la sphère est suffisamment petit en comparaisonde ceux de la surface de la membrane. Par conséquent, si le
centre de la sphère se déplace d'une distance ds, la sphère aura
tourné d'un angle dix. tel que
da = g (28)
L'énergie cinétique totale W de la balle sera donc:
W = \mV* + |lo>2 = ^^(m + ij) • (29)
Dans cette expression, v est la vitesse du centre de la sphère,
w sa vitesse angulaire et I son moment d'inertie diamétral.
26 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
Nous avons implicitement admis l'existence du frottement,
car la balle glisserait mais ne roulerait pas en son absence.
Cependant nous admettrons seulement l'existence du frotte¬
ment statique qui assure le roulement et nous négligerons les
frottements dynamiques tels que ceux dus au glissement partiel,au couple de frottement, à la déformation du caoutchouc, etc.
Nous aurons ainsi « un roulement parfait » où toutes les forces
dissipatives sont négligées. Il en résulte que la balle se meut
dans le système potentiel des forces dues à la pesanteur et que
le principe de la moindre action est applicable. Ce principe
exige que la trajectoire du centre de la sphère entre deux
points A et B soit telle que l'intégrale S devienne extrémale.
B B B
S = fvNdt = fv*(m + ^jdt = fvim + ^\ds . (30)
\ A A
Avec un choix approprié de l'origine des z on pourra écrire, grâceau principe de la conservation de l'énergie:
2~p,(m + S"1) = |mgz| • (31)
En substituant dans l'intégrale (30) le deuxième membre de
l'équation (31) et en négligeant toutes les constantes, l'inté¬
grale S devient
A A
La fonction caractéristique F qui est sous le signe d'intégration:
peut être considérée comme une fonction de x, y et y' seulement,
puisque z est une fonction connue de x et y.
Comparons maintenant cette fonction caractéristique (33)
avec la fonction analogue (7) relative au mouvement d'une
particule chargée dans un champ électrostatique. Nous avons
vu (voir éq. 27) que z peut être considéré comme proportionnel
MILTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 27
à V. Les fonctions (7) et (33) seront donc approximativementfdz a
proportionnelles dès que (j- ) sera négligeable par rapport à 1,
ce qui revient de nouveau à admettre de petites pentes à la
membrane de caoutchouc. Les fonctions caractéristiques étant
proportionnelles, les équations d'Luler seront identiques et par
conséquent les trajectoires dans les cas mécanique et électriqueseront homothétiques, pourvu que les conditions initiales et
aux limites soient les mêmes dans les deux cas. Cela prouve
i-ik. a.
Le modèle mécanique.
l'assertion énoncée plus haut. Dans toutes ces déductions, nous
nous sommes tacitement servi de l'invariance de la trajectoire
par rapport à la masse ou a la charge de la particule, aux chan¬
gements proportionnels de l'énergie potentielle, etdesonhomo-
thétie par rapport à un changement d'échelle, qui sont toutes
des propriétés établies auparavant.
Dans l'appareil de notre laboratoire 14 (voir lig. 3), une table
d'acier, dont les pieds sont montés sur des vis calantes, supporte
une plaque de verre de 86 x 86 cm. Les électrodes cylindriques
28 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
sont faites de bandes d'aluminium de 1,5 mm d'épaisseur quiont été coupées au préalable à la hauteur convenable. Pour
permettre une adaptation facile aux contours les plus compli¬
qués, l'aluminium peut être rendu suffisamment malléable par
un recuit à 300° ou 400° C. Les cylindres, une fois formés, sont
disposés sur la plaque de verre sur laquelle il a été facile de
dessiner les contours désirés et ils sont fixés au verre par une
bande gommée (Decorator's Scotch Tape). Le caoutchouc doit
être lisse et très élastique et cependant il doit pouvoir résister
à un déchirement éventuel dû aux cylindres et à une déforma¬
tion due au poids des balles. Nous avons trouvé que le caout¬
chouc « Latex chirurgical » n° 29 ou 32 était parfaitementsatisfaisant. La membrane est tendue sur son cadre en bois
auquel elle tient par de simples punaises. On peut s'assurer, en
pratique, d'une tension uniforme en dessinant d'abord sur la
membrane une figure similaire à celle du cadre, mais plus petite,
puis en tirant le caoutchouc de tous les côtés, jusqu'à ce que
la figure dessinée coïncide avec les bords du cadre. Une fois
que la membrane est posée sur l'ensemble des cylindres fixés
au verre, on la presse vers le bas contre la partie des cylindres
avec laquelle elle ne serait pas en contact autrement, au moyen
de cylindres auxiliaires qui sont maintenus par des tiges verti¬
cales tenues elles-mêmes par des pinces de laboratoire. Ces
pinces sont fixées à des barres horizontales montées sur la
table d'acier de l'appareil. L'« électron » est simplement une
bille d'acier pour roulement à billes. L'expérience a montré
que des billes de 1,5 à 7 mm de diamètre sont également satis¬
faisantes, de sorte que l'on a adopté dans la suite des billes de
5 mm. Pour des trajectoires parcourues sans vitesse initiale, la
bille est posée à l'endroit voulu où elle est maintenue par un
électro-aimant. Pour assurer un départ certain de la bille, le
courant de l'aimant, une fois interrompu, s'amortit dans une
oscillation qui supprime toute magnétisation rémanente. Les
trajectoires sont simplement observées. En général, de toute
la trajectoire, on s'intéresse seulement aux points de départet d'arrivée qui peuvent être facilement enregistrés, si l'on
marque des échelles convenables sur les électrodes terminales.
Ces échelles peuvent être dessinées, par exemple, sur la plaque
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 29
de verre et projetées sur le caoutchouc au moyen d'une lumière
placée en dessous (visible sur la fig. 3).
En pratique les conditions idéales admises pour les déductions
mathématiques du fonctionnement du modèle mécanique ne
sont pas réalisées, à cause des forces dissipatives du frottement,
de la déformation de la membrane due au poids de la balle,
des irrégularités dans l'épaisseur et la rugosité du caoutchouc,
du fait que de trop faibles pentes ne sont pas pratiques, etc.
La valeur pratique de la méthode doit donc être vérifiée par
l'expérience. Pour cela, plusieurs épreuves électroniques ont
été faites. Un modèle à l'échelle de la structure des électrodes
sous investigation est mis dans le vide. La cathode, c'est-à-dire
l'électrode d'origine des électrons, est rendue photo-sensible,
permettant ainsi d'émettre des électrons au point voulu en
illuminant au moyen d'un petit projecteur le point ou la ligne
convenable sur la cathode. Le collecteur, c'est-à-dire l'électrode
que les électrons bombardent, est pourvu d'une électrode-
sonde unique et mobile ou bien d'une série de sondes fixes.
L'aire illuminée sur la cathode ou la sonde mobile du collecteur
est déplacée jusqu'à ce que la sonde ou une sonde donnée
collecte un courant maximum. La figure 4 montre schématique-
ment un tel tube, dont le collecteur porte une série de sondes
fixes et qui fut construit pour vérifier l'opération d'un des types
de multiplicateur d'électrons adopté dans la suite (type C).
Les courbes de la figure 5, déterminées l'une par le modèle
mécanique et l'autre par le tube vérificateur, montrent la
coordonnée d'arrivée (bombardement) y, en ionction de la
coordonnée de départ (émission) x, ces coordonnées étant
définies sur la figure 8. La conformité des deux courbes qui est
très apparente dans ce cas et qui fut trouvée aussi dans
tous les autres cas examinés, justifie amplement l'usage du
modèle mécanique et inspire de la confiance pour son usage
dans un champ d'application très vaste.
On ne peut pas se servir du modèle mécanique pour des confi¬
gurations d'électrodes possédant une symétrie axiale parce que
la forme de la membrane est définie par l'équation (27) au lieu de :
*" = £ + £+ ^o <34>ox* oy' y oy
30 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
ELECTRONS
Fig. 4.
Tube vérificateur des trajectoires électroniques.
y
12
10
s
6
4
2
0 2 4 6 6 10 12 14 X
Fig. 5.
Comparaison des résultats.
A Tube vérificateur.
B Modèle mécanique.
——^—» A
B1 /A / IlOjv11 kIIu1 \
1S
\
V
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 31
qui régit le potentiel électrostatique dans un plan axial. D'autre
part, le modèle ne tient pas compte des charges spatiales quisont importantes dans bien des cas. En dépit de ces restrictions,le modèle mécanique est une aide presque indispensable qui
permet d'estimer rapidement et assez exactement la trajec¬toire des électrons dans les appareils électroniques. Si l'on
désire une très grande précision, il vaut mieux s'en servir
concurremment avec d'autres méthodes.
III. LE DÉVELOPPEMENT D'UN MULTIPLICATEUR
ÉLECTROSTATIQUE
1. Conditions a remplir.
Le processus de multiplication d'électrons décrit brièvement
dans l'introduction sera réalisé avec succès si certaines condi¬
tions sont remplies. Ces conditions peuvent être analysées
comme suit:
Appelons, par définition, « rayon électronique », la ligne
géométrique formée en reliant successivement les trajectoires— d'un électron originel qui se meut d'une première électrode
jusqu'à la deuxième — d'un électron secondaire libéré en son
point d'impact qui se meut de cette deuxième électrode jusqu'à
une troisième — d'un des nouveaux électrons libérés au point
d'impact nouveau, etc. jusqu'à ce que le dernier impact ne
produise plus d'émission. Nous appellerons « faisceau électro¬
nique » l'ensemble des rayons électroniques. On dit qu'un
multiplicateur d'électrons statique possède des propriétés de
« concentration » adéquates (is properly focussed) lorsque tout
rayon électronique ayant un départ convenable connecte
successivement toutes les électrodes multiplicatrices dans
l'ordre des potentiels croissants. Les termes « rayons » et « fais¬
ceau » sont empruntés à l'optique géométrique.
Nous avons déjà vu que l'émission secondaire d'une électrode
n'est effective que si le champ électrostatique dans son voisi-
32 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
nage immédiat s'oppose au mouvement des électrons primaires
bombardeurs. L'intensité de ce champ doit être suffisamment
grande, pour que le courant secondaire soit saturé, pour réduire
au minimum l'effet des vitesses initiales sur le trajet ultérieur
des électrons secondaires et réduire l'effet des charges spatiales
qui produit une « déconcentration » (defocusing) qui est spé¬
cialement accentuée aux fortes densités de courant présentes
surtout dans les derniers étages de multiplication.Les électrodes sont généralement traitées dans le vide afin
de leur donner leurs propriétés d'émissions secondaire et
photo-électrique. Pour cela, le libre accès du métal activateur
à leur surface est essentiel, particulièrement pour l'activation
habituelle de l'oxyde d'argent par le caesium. On dira dans
ce cas que la construction est « ouverte ».
Pour compléter la liste des conditions à remplir, nous anti¬
cipons ici sur les résultats relatifs à la suppression du courant
résiduel. Ces conditions sont:
L'arrangement des électrodes du multiplicateur doit être
tel qu'une particule chargée positivement, telle qu'un ion,
qui se trouve dans l'espace compris entre les électrodes des
derniers étages de multiplication, décrive une trajectoire qui
se termine à ces étages mêmes. Une des conséquences est qu'ildoit être impossible de relier par une droite un point quelconque
compris dans l'espace des derniers étages à un point quelconque
compris dans l'espace des premiers sans intercepter une élec¬
trode quelconque. Comme il sera expliqué, ceci est indispensable
pour supprimer la « réaction ionique ».
Les interstices entre les électrodes doivent être grands. Ceci
est particulièrement important à cause des arêtes des électrodes,
à la surface desquelles la direction du champ tend à extraire
des électrons. Ces arêtes peuvent être une source d'émission
froide qui est nuisible à la réduction du courant résiduel.
Finalement, non seulement la construction doit posséder des
propriétés de concentration adéquates et d'intenses champs
collecteurs, être « ouverte » et être « étanche aux ions » et
posséder de larges interstices entre les électrodes, mais encore
elle doit être conçue de façon qu'elle soit simple et aisée et
admette des tolérances suffisantes.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 33
2. L'ÉVOLUTION DU DÉVELOPPEMENT.
Un multiplicateur remplissant les conditions esquissées ci-
dessus fut finalement obtenu grâce à l'évolution d'un prototype.
L'idée fondamentale consiste à se servir du type appelé« linéaire à électrodes alternées ». Ce type de multiplicateur
comprend deux rangées parallèles d'électrodes cylindriques
équidistantes, toutes identiques, dont les génératrices sont
toutes normales à un plan dans lequel leurs directrices sont
alternées, c'est-à-dire que les directrices d'une rangée sont
décalées par rapport à celles de l'autre, d'un intervalle égal
à la moitié du pas. La recherche d'une structure d'électrodes
remplissant les conditions voulues est réduite ici à celle de la
forme des directrices et de leur position relative donnant les
résultats les plus favorables. Un système d'électrodes cylin¬
driques fut choisi de préférence à un système à symétrie axiale,
principalement parce que les champs collecteurs à la surface
des électrodes peuvent être rendus plus intenses dans le
premier cas que dans le second. La figure 6, A, B, C, D, illustre
les arrangements des directrices de divers multiplicateurs de
ce type1S dans l'ordre chronologique de leur conception. De
toute l'évolution, seuls les quatre types A, B, C, D sont men¬
tionnés à titre d'échelons logiques du développement. Les
électrodes numérotées dans l'ordre de propagation du faisceau,
sont maintenues à des potentiels proportionnels à leur numéro
d'ordre, la différence de potentiel entre deux électrodes consé¬
cutives variant entre 30 et 300 volts. La première électrode
(n° 0) est la photocathode, qui est l'origine des électrons émis
par la lumière excitatrice, la dernière (n° 11) est le collecteur
qui reçoit le courant multiplié.Le champ potentiel de la structure n'est pas altéré si un
conducteur métallique remplace la surface équipotentielle
ayant le potentiel d'une électrode, l'électrode numéro n par
exemple, qui s'étend entre l'électrode n et l'interstice comprisentre les électrodes (n — 1) et {n -f- 1). Il en résulte que, si
la structure est terminée par un tel conducteur, appelé doré¬
navant le « terminateur », les rayons électroniques de tous les
3
34 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
étages multiplicateurs seront identiques et le fonctionnement
d'un seul étage ou « cellule élémentaire » décrira celui du
multiplicateur tout entier. C'est ainsi que le problème de la
10
B
6 8 10
II
0 2 4 6 8 10
Fig. 6.
Types de multiplicateurs électrostatiques.
recherche d'un type satisfaisant toutes les conditions voulues
est réduit à celle des directrices d'une cellule élémentaire
unique.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 35
Le type A de la figure 6 comporte simplement des électrodes
planes. Des calculs préliminaires 16 démontrèrent que les pro-
Fig. 7.
Cellule élémentaire du type B.
priétés de concentration de ce type étaient insuffisantes mais
indiquèrent, cependant, la possibilité de les perfectionner.L'étude systématique des trajectoires électroniques dans les
36 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
cellules élémentaires, faite d'après les méthodes d'optique élec¬
tronique décrites plus haut, fournit le type B (flg. 6) qui est
capable d'une parfaite concentration. Les directrices sont des
demi-cercles et les terminateurs des plans. La figure 7 repré¬sente une cellule élémentaire dans laquelle les lignes équipo-tentielles furent obtenues dans le bain électrolytique et les
trois trajectoires dessinées par la méthode des cercles. Les
propriétés de concentration de ce type sont excellentes et des
tubes à étages multiples eurent réellement de très grands gains.
Fig 8.
Cellule élémentaire du type C.
Cependant, ce type fut abandonné pour des raisons qui seront
données plus tard en relation avec la réaction ionique, de
sorte que la discussion détaillée de la concentration est réservée
aux types adoptés ultérieurement.
Le type C (flg. 6) fut conçu dans le but de prévenir la réaction
ionique ainsi qu'il sera expliqué. La figure 8 représente une
cellule élémentaire. Une inspection des lignes équipotentiellesmontre l'uniformité, la forte intensité et la grandeur de l'aire
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 37
effective du champ collecteur. Les lignes grasses montrent les
trajectoires approximatives que suivent les électrons d'une
électrode à l'autre. Ces trajectoires furent déterminées par le
modèle mécanique et le résultat obtenu fut confirmé par le
tube vérificateur.
Le type D (fig. 6) est une légère modification du type C quifut élaborée dans le but d'accroître l'interstice entre les élec¬
trodes et diminuer ainsi l'émission froide. Ceci sera discuté en
Y
12
10
8
/
/
l ^: / £o
6 y
/1 '
I T:
A, ^L
/
i
/2
A/'
X. k 1A 6 8 10 12
Fig. 9.
Courbe de concentration du type D.
14
détail plus bas. Les propriétés de concentration des types C et
D sont presque identiques.L'excellence des propriétés de concentration du type D peut
être démontrée à l'aide d'une courbe montrant les coordonnées
terminales x et y d'un rayon électronique dans une cellule
élémentaire. Ces coordonnées sont définies sur la figure 8.
Considérons une telle courbe, donnée sur la figure 9, et suivons
la marche du rayon électronique à travers le tube. Un rayon
38 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
dont l'origine est à Fabcisse xx d'une électrode quelconque,
numéro 1 par exemple, atteindra l'électrode 2 de la même
cellule élémentaire en l'ordonnée yx qui sera à son tour la nou¬
velle abcisse pour la cellule suivante. En se servant de la bis¬
sectrice du quadrant formé par les axes x et y, il est facile
d'obtenir l'abcisse x2 du point 2 qui n'est autre que celle de
l'intersection 12 de la dite bissectrice et d'une parallèle à l'axe
des x par le point 1. La marche du rayon à travers le multipli¬
cateur est ainsi illustrée par la ligne brisée 1, 12, 2,23,3,34,etc.,
qui forme une sorte de « spirale rectangulaire ». Puisque cette
spirale converge sur un point P, quelle que soit l'origine du
rayon, il est évident que, quel que soit le nombre des élec¬
trodes multiplicatrices, le faisceau ne peut jamais s'étendre
sur une électrode quelconque en dehors de l'aire de largeur d.
Les propriétés de concentration de toutes les structures d'élec¬
trodes examinées furent analysées par un tel diagramme et le
type fut jugé par la largeur de la région des électrodes qui
peut contenir l'origine d'un rayon correspondant à une spirale
convergente.
Si la longueur des électrodes, qui doit être nécessairement
finie, est deux fois plus grande que leur largeur totale on peut
constater au moyen du bain électrolytique que le champ
potentiel dans le plan central ne s'écarte pas d'une façon
appréciable de celui qui existerait si la structure était infini¬
ment longue. D'autre part, des mesures effectuées dans des
tubes dont les électrodes étaient sectionnées transversale¬
ment pour créer des sondes latérales, ont montré que, grâce
aux champs accélérateurs intenses qui réduisent les effets de
dispersion des vitesses initiales etc., le faisceau électronique ne
s'étend latéralement que d'une façon à peine mesurable aussi
longtemps que la densité du courant reste assez faible. Aux
fortes densités de courant les charges spatiales provoquent un
élargissement latéral du faisceau dont il peut résulter un
débordement des électrodes causant à son tour une diminution
du facteur de multiplication. Ceci est un inconvénient sérieux
parce que la dépendance linéaire du courant de sortie et du
courant originel est une qualité primordiale du multiplicateur.
L'élargissement latéral du faisceau peut être considérablement
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 39
réduit si l'on ferme les extrémités des électrodes par des parois
métalliques pleines ou en forme de bande, ainsi qu'il est montré
sur la figure 10 A et B. Les plaques latérales de montage en
mica que l'on peut observer sur les figures 26 et 27 produisent
un effet de concentration qui fut découvert déjà dans les mul¬
tiplicateurs magnétiques 4. Lorsqu'un de ces moyens de concen¬
tration est employé, les mesures limitées par des densités de
courant admissibles (les densités supérieures à 7-1 0 mA par cm2
Fig. 10.
Terminaisons des électrodes.
endommagent la surface habituelle de l'oxyde d'argent traité
au caesium) ne révèlent aucun écart de la linéarité.
Les propriétés de concentration des types C et D étant
presque parfaites, il est possible de construire un multiplicateur
avec autant d'étages de multiplication que l'on le désire. Des
multiplicateurs à 16 étages fonctionnèrent parfaitement. On
doit prendre un soin suffisant dans la concentration pour
respecter les tolérances admissibles dans la forme et la position relative des électrodes. Les électrodes sont faites d'un
40 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
métal malléable de 0,10 à 0,30 mm d'épaisseur et portant des
nervures de renforcement. Elles peuvent être formées par une
presse à emboutir dont le flan 17en acier peut être facilement
usiné grâce à sa simple forme cylindrique. L'ensemble des élec¬
trodes est monté sur des supports isolants qui peuvent être en
mica, en « lavite » ou en verre, suivant les applications auxquelleson destine le multiplicateur. Des guides d'assemblage appropriésdoivent être utilisés durant le montage des électrodes sauf si
les supports isolants eux-mêmes sont convenablement conçus.
La construction et le fonctionnement des divers tubes cons¬
truits seront décrits par la suite en relation avec les nombreux
problèmes spécifiques que la réduction du courant résiduel a
posés.
3. L'appareillage pour les essais.
La figure 11 est un schéma de l'appareillage utilisé pour les
essais des multiplicateurs.Le convertisseur de puissance S peut fournir 250 watts sous
4000 volts. Puisque le coefficient de l'émission secondaire varie
aux tensions utilisées à peu près linéairement avec le potentiel,le gain total du multiplicateur suivra une loi de puissance par
rapport au potentiel. Par conséquent, pour des mesures stables,
il sera essentiel que la tension reste parfaitement constante.
Le régulateur R, basé sur un principe à réaction inverse18 a été
prévu dans ce but.
Les potentiels nécessaires aux diverses électrodes du mul¬
tiplicateur sont obtenus au moyen du potentiomètre P dont la
résistance totale de 64.000 ohms est divisée en 16 parties égales.Cette faible résistance a été choisie de façon que le courant
des électrodes elles-mêmes soit négligeable par rapport à celui
du potentiomètre, ce qui rend les potentiels indépendants du
courant de sortie auquel on opère. Sauf indication contraire,
les différences de potentiel entre étages ont été maintenues
égales pendant toutes les expériences pour préserver la nature
cyclique du potentiel que l'on avait admise pour toutes les
considérations relatives aux propriétés de concentration. Il faut
ajouter, cependant, qu'une certaine déviation d'une telle
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 41
distribution uniforme des potentiels ne cause pas, en fait, de
déconcentration appréciable.Les conducteurs de toutes les électrodes du multiplicateur
passent indépendamment par les parois de verre de l'enveloppedu tube, de sorte que le courant de chaque étage peut être
mesuré. Pour faciliter l'insertion d'un instrument de mesure
dans les circuits, des fiches spéciales J ont été insérées en série
"u
S
R-—
4-
V
PiP_J=yiMA/
o 'T T Y 1
T T T' '
T
41^L
=t>
A
MJS
B
Fig. 11.
Schéma de l'appareillage pour les essais.
avec ces conducteurs. On peut se servir d'un potentiomètre
monté à l'intérieur du tube pour réduire le nombre des conduc¬
teurs à sceller par le verre 4. Cependant, ces potentiomètresinternes n'ont pas été utilisés dans le présent travail pour éviter
les complications qu'ils ne manqueraient pas d'apporter au
problème de la réduction du courant résiduel.
42 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
Le multiplicateur M est placé dans une boîte B qui le protège
contre toute radiation lumineuse. On peut mettre à l'épreuve
l'efficacité de cette protection en observant qu'une forte illu¬
mination extérieure à la boîte ne produit aucun changement
dans le courant résiduel. Une lumière peut être projetée sur la
photocathode à travers l'ouverture A qui peut être fermée à
volonté.
Les courants mesurés au cours de ce travail varient de 10""
à 10~2 ampères. Les mesures furent rendues particulièrement
commodes grâce à un microampèremètre à lampes développé
dans notre laboratoire 19 et qui est maintenant fabriqué par la
R.C.A. Manufacturing Co. Il est basé sur le principe de la
contre-réaction. La déviation totale de l'échelle de l'instrument
utilisé au cours de ce travail varie entre 10~9 et 10" ampères
par multiples de 10. L'instrument est capable de mesurer des
courants de l'ordre de 10M1 ampères. L'erreur relative est
inférieure à0,5% pour des courants supérieurs à 10 ampères.
IV. LE COURANT RÉSIDUEL
1. Introduction.
Dans tout multiplicateur d'électrons dans lequel le courant
électronique originel est dû à la photo-émission, un courant
résiduel de sortie est observé dans le circuit du collecteur lorsque
le tube se trouve dans l'obscurité totale, c'est-à-dire lorsqu'il
est protégé complètement contre toute radiation lumineuse
(de l'infra-rouge à l'ultra-violet). Ce courant résiduel de sortie
sera appelé dorénavant le « courant résiduel » ou parfois le
« courant sombre » (the dark current, der Dunkelstrom).
Ainsi qu'il a été expliqué dans l'introduction, le courant
résiduel est tout à fait indésirable. Son existence est un obstacle
sérieux à l'application du multiplicateur aux domaines dans
lesquelles il doit faire concurrence à d'autres appareils, tels,
par exemple, que des cellules photo-électriques suivies d'un
amplificateur à lampes, et limite essentiellement son application
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 43
dans les domaines scientifiques tels que la spectroscopie ou
l'astronomie.
Le but du présent travail est de découvrir et analyser les
causes du courant résiduel et de préconiser les moyens de le
réduire.
Les quatre causes suivantes ont été découvertes:
1° Le courant de fuite ohmique s'écoulant entre le circuit
du collecteur et celui de n'importe quelle autre électrode;
2° Les effets que produisent les ions positifs résultant de
l'ionisation du gaz resté dans le tube;
3° L'émission froide des électrodes et de leur connection quiest provoquée par le champ électrostatique;
4° L'émission thermique des surfaces émissives, secondaire
et photo-électrique.
Toutes les observations faites peuvent être expliquées par
ces quatre phénomènes. Il n'y a ainsi aucune donnée expéri¬mentale pour supposer d'autres causes au courant résiduel.
Cependant, si ces causes prédominantes étaient complètement
supprimées, il est probable qu'un courant résiduel resterait
encore. Il pourrait être dû à la radio-activité des parois de
verre, aux radiations cosmiques, aux rayons X mous résultant
du bombardement électronique des électrodes ou à toute autre
cause.
A l'exception des fuites ohmiques, les facteurs contribuant
au courant résiduel sont décrits dans l'ordre chronologique de
leur analyse, qui coïncide avec l'ordre de leur importancerelative.
2. Les fuites ohmiques.
Les pertes ohmiques entre le collecteur et une électrode
quelconque, ou entre leurs fils de connection respectifs, est la
cause la plus évidente, mais non pas la plus importante, du
courant résiduel. Elle est traitée en premier lieu, parce que des
précautions relativement simples pour la rendre négligeablefurent prises au cours de tout ce travail.
44 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
L'isolement nécessaire peut être estimé en anticipant sur les
valeurs du courant résiduel les plus petites qui peuvent être
obtenues lorsque toutes les autres causes du courant résiduel
ont été réduites au minimum. Elles sont de l'ordre de 10"10 am¬
pères. Puisque la tension totale appliquée au multiplicateur
varie entre 2000 et 3000 volts, la résistance de l'isolement doit
être de l'ordre de 1013 ohms.
Les fuites extérieures au multiplicateur peuvent être mesurées
en déconnectant, dans le voisinage du tube, le conducteur du
collecteur sans déranger par ailleurs le reste de l'appareillage.
Lorsque l'on se sert de fds isolés par une couche de caoutchouc
très épaisse (supportant une tension nominale de 10.000 volts)
et que le multiplicateur soit tenu dans une boîte dont l'atmos¬
phère est desséchée par un agent convenable tel que le chlorure
de calcium, les pertes ohmiques externes deviennent négli¬
geables. On doit aussi prendre soin d'isoler convenablement le
microampèremètre du circuit de sortie.
Les pertes ohmiques internes peuvent être distinguées des
autres causes du courant résiduel de plusieurs manières diffé¬
rentes. Le processus de multiplication peut être détruit en
déconnectant une ou plusieurs électrodes multiplicatrices. Le
courant résiduel qui existe alors ne peut pas être dû à un bom¬
bardement électronique du collecteur et doit par conséquent
provenir d'une conductibilité ohmique directe. Une autre
méthode consiste à mesurer le courant résiduel en fonction de
la tension appliquée au tube. Puisque le coefficient de l'émission
secondaire varie linéairement en fonction du potentiel pour
les tensions utilisées, le gain total variera suivant une puissance
de ce potentiel. Ainsi qu'il sera montré, le courant résiduel
provenant des autres causes est proportionnel au gain total et
par conséquent varie suivant la même loi de puissance du
potentiel. La conductibilité électrique est, par contre, propor¬
tionnelle à la tension appliquée. En particulier, il est bien
évident que s'il existe un courant résiduel pour une tension
très basse, telle que 10 ou 15 volts par étage multiplicateur, les
fuites ohmiques doivent prédominer, puisque le gain total est
plus petit que 1 et toutes les autres causes du courant résiduel
sont pratiquement inexistantes.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 45
Au début de ce travail toutes les surfaces émettrices étaient
d'oxyde d'argent traité par un métal alcalin tel que le caesium
ou le rubidium. Ce métal alcalin, ayant une tension de vapeur
élevée, peut se condenser facilement sur les supports des élec¬
trodes et créer ainsi une sérieuse diminution de l'isolement.
Les fuites ohmiques entre les diverses électrodes autres que le
collecteur n'augmentent pas le courant résiduel et sont inoffen-
sives, puisque le potentiel des électrodes est maintenu par des
moyens extérieurs appropriés. Cependant, si ces fuites sont
très grandes, il devient impossible de mesurer les courants
électroniques émis aux diverses électrodes, en particulier à la
photo-cathode. Cela était le cas lorsque les supports des élec¬
trodes étaient en mica, parce que le métal alcalin qui pénètre
entre les couches de clivage du mica augmente de beaucoup sa
conductibilité. C'est pourquoi l'usage pratique de ce corps
dut être abandonné en faveur du verre avec lequel la construc¬
tion est plus délicate. Le verre procure un isolement suffisant
pour toutes les électrodes, excepté le collecteur.
Le collecteur est supporté directement par son fil conducteur
scellé dans l'enveloppe du tube et il n'est en contact avec
aucun autre corps. Le seul chemin restant pour les courants
de fuite est à la surface de verre du pied du tube, entre le fil
connectant le collecteur et ses voisins. Ce chemin de fuite
peut être allongé en scellant un petit tube en verre au pieddu fil du collecteur. Cette précaution fut tout à fait suffisante
pour rendre les fuites ohmiques négligeables, même lorsqu'un
excès de métal alcalin était resté dans le multiplicateur. Il n'a
pas été nécessaire de recourir aux « anneaux de protection »
bien connus.
Ces précautions très simples relatives à l'isolement du
collecteur furent adoptées dans le cours de ce travail tout
entier, même vers sa fin, lorsque l'usage du métal alcalin était
strictement localisé au traitement de la photo-cathode. Les
supports en mica furent utilisés à nouveau, mais leur contact
avec le collecteur ou son fil de connection fut soigneusement
évité.
46 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
3. L'effet uk^ ions.
a) Inlniiliiclioi).
Ainsi qu'il a été dit plus haut, l'étude systématique des
trajectoires d'électrons dans les cellules élémentaires a fourni
le dessin du multiplicateur du type B (fig. 6). Les résultats
prévus par cette étude, quant aux propriétés de concentration,
furent entièrement confirmés par l'expérience.
Le premier tube de ce type était à 10 étages multiplicateurs.
Ce nombre fut choisi, parce que l'on avait cru qu'un défaut
1
nu. ::
Multiplicateur à 10 étages du t\pe H.
éventuel de la concentration n'aurait pas été détecté dans un
multiplicateur avec moins d'étages. Les électrodes en nickel
argenté électrolytiquement étaient montées sur des supports
en lavite et étaient activées par l'oxygène et du caesium de
la manière habituelle (fig. 12). Le processus de multiplication
a été trouvé en parfait accord avec les prédictions, car aucune
déconcentration ne put être observée aux faibles tensions.
Malheureusement, pour une tension suffisante, le courant
résiduel était énorme et pouvait atteindre jusqu'à 6 raA, l'n
état pouvait même être établi dans lequel le gain, mesuré
comme le quotient des augmentations des courants de sortie
et de la photo-cathode provoquées par une lumière excitatrice,
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 47
diminuait lorsque la tension augmentait. Cela est causé par
l'effet de déconcentration dû aux charges spatiales produites
par l'intense courant résiduel.
Une réduction radicale du courant résiduel devint absolu¬
ment indispensable, à ce point des recherches, non seulement
pour permettre l'emploi du multiplicateur pour la mesure
d'intensités de lumières très faibles, mais aussi à d'autres appli¬cations. La source des difficultés fut trouvée dans l'ionisation
du gaz présent dans le tube.
L'explication du phénomène en jeu sera esquissée, puis les
données expérimentales qui confirment les spéculations seront
exposées et enfin les méthodes utilisées pour supprimer les
effets indésirables des ions seront décrites.
b) Théorie.
Les courants électroniques intenses présents dans les
derniers étages de multiplication ionisent le gaz résiduel. Les
ions positifs ainsi produits se trouvent dans un champ qui est
à peu près parallèle aux rangées des électrodes, et sont par
conséquent contraints à se mouvoir vers la photo-cathode.Ils bombardent une des électrodes multiplicatrices initiales,
ou la photo-cathode elle-même, avec une énergie cinétique
acquise par la perte de leur énergie potentielle, ce qui corres¬
pond à une grande fraction de la tension totale appliquée au
tube. Le choc de ces ions à la surface des électrodes bombardées
produit des électrons secondaires. Ces électrons, s'ils sont
libérés à un endroit convenable de l'électrode bombardée ou
bien s'ils ont acquis une vitesse initiale suffisante pour vaincre
l'effet d'un champ adverse, seront multipliés par le processus
de multiplication normalement établi pour les photo-électrons.
Le courant électronique multiplié qui en résultera, produirade nouveaux ions positifs qui, à leur tour, vont libérer de
nouveaux électrons secondaires. Ce mécanisme régénérateur
peut se maintenir de lui-même ou bien il augmente simplementle gain effectif du multiplicateur. Dans le premier cas, le
courant de sortie, c'est-à-dire le courant résiduel, qui est
amorcé par des électrons émis thermiquement ou « par acci-
48 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
dent », sera limité par les effets des charges spatiales et, par
conséquent, deviendra très grand. La figure 13 illustre un
schéma de ce mécanisme régénérateur; les lignes grasses repré¬
sentent les trajectoires des électrons et les lignes pointillées
symbolisent celles des ions. Ce processus régénérateur, quelque
peu similaire à celui qui a lieu dans les cellules photo-électriques
à gaz, ne devient un phénomène observable dans ces tubes à
vide très poussé, que grâce à l'énorme multiplication du
courant électronique qui, en un sens, compense l'inefficacité
de la production des ions et de la régénération des électrons.
0 2 4 6 8 10
ELECTRONS IONS
Fte. 13.
La réaction ionique.
Considérons maintenant les choses d'une façon quelque peu
plus détaillée. D'abord, pour simplifier, nous admettrons que
tous les ions produits près du collecteur le sont par le courant
électronique final I et que les électrons secondaires qui résultent
du bombardement ionique ont leur origine à la photo-cathode.Cette hypothèse réduit à un mécanisme régénérateur uniquela réalité complexe des électrons secondaires libérés à chaque
électrode par des ions provenant de tous les étages qui la
suivent.
Cela revient à remplacer la somme d'une série géométrique
par son premier terme ce qui est parfaitement justifié, si l'on
se sert dans ce qui suit de coefficients « réduits » appropriés.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 49
Supposons maintenant que le courant électronique final I
produise un courant ionique al s'écoulant vers les électrodes
les plus négatives. Une fraction [3al seulement de ce courant
ionique al atteindra réellement la photo-cathode. Si S est le
quotient du courant électronique secondaire au courant ionique
primaire, un courant électronique secondaire Spal sera libéré
à la photo-cathode. Une partie seulement y8(3al des électrons
libérés sera vraiment multipliée. Les coefficients réduits P et y
tiennent compte de la complexité de la distribution et de
l'efficacité des ions et des électrons qui sont produits aux
divers étages. Le coefficient a mesure l'efficacité de l'ionisation
tandis que le coefficient S mesure celle de l'émission électro¬
nique par le bombardement des ions. Il résulte de ces consi¬
dérations que le courant électronique total i libéré à la photo¬
cathode est composé du courant originel i0 dû à l'émission
photo-électrique, thermique ou toute autre et du courant
additionnel y§(3al dû à la réaction des ions. Nous avons ainsi
la relation
i = i0 + XI (35)
dans laquelleX = apyâ . (36)
Le gain G du multiplicateur est, par définition, le quotient
du courant de sortie au courant émis à la photo-cathode,
c'est-à-dire que:
I = Gi. (37)
La combinaison des équations (35) et (37) fournit la relation
1 = r=W° = G'l° • (38)
On voit ainsi que la réaction ionique augmente le gain effectif
de G à G'. Pour établir l'équation (38) nous avions admis que
le coefficient X était constant, c'est-à-dire qu'il était indépen¬
dant de I. Cela cesse d'être vrai pour des courants très forts,
parce qu'alors les charges spatiales altèrent complètement le
champ et changent toutes les conditions. Lorsque les coeffi¬
cients X et G sont tels que XG = 1, cela signifie simplement que
i
50 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
la relation (38) d'après laquelle G' serait infini, n'est pas valable
et que l'on a à faire en réalité à un état stationnaire maintenu
par la régénération et limité par les charges spatiales. Dans
ce cas, un électron thermique ou « accidentel » suffira pour
amorcer un courant résiduel très grand. Analysons maintenant
la validité de l'explication ci-dessus en considérant successi¬
vement l'ordre de grandeur des divers phénomènes en jeu.
Les tubes sont vidés au moyen d'une pompe de diffusion à
mercure, à deux étages, et d'une pompe mécanique préliminaire.
Une trappe à air liquide assure la condensation des vapeurs
de mercure et autres. La pratique habituelle consiste à
chauffer le tube dans un four pendant 3 à 4 heures à 475-500° G
et à chauffer ensuite les parties métalliques par induction
jusqu'à ce qu'aucune augmentation de pression ne résulte d'une
prolongation de la chauffe. Ensuite les surfaces émettrices sont
traitées d'une façon convenable. La pression est mesurée avec
une jauge à ionisation qui est calibrée au moyen d'une jauge
de McLeod. La pression dans les tubes au moment où ils sont
scellés, devient de l'ordre de 10"6 mm de Hg.Il est difficile de calculer le coefficient oc, c'est-à-dire le cou¬
rant ionique auquel on doit s'attendre au dernier étage multi¬
plicateur pour un courant électronique I donné. Tout d'abord
la nature et la pression de l'atmosphère gazeuse du tube ne
sont pas bien connues. D'autre part la disposition compliquéedes électrodes et le champ potentiel non uniforme qui en
résulte, rendraient les calculs encore plus difficiles. Cependantle coefficient oc peut être estimé directement en se basant sur
les indications de la jauge à ionisation. En dépit du fait que les
dispositions des électrodes et des potentiels des électrodes du
multiplicateur et de la jauge à ionisation sont complètement
différentes, l'on peut néanmoins raisonnablement admettre que
l'ionisation est du même ordre de grandeur dans les deux cas.
C'est ainsi que, à partir des courants de grille et de plaque de
la jauge à ionisation, le coefficient oc a été estimé à 10"4.
On peut se faire une idée des trajectoires des ions produitsdans l'espace entre les électrodes du dernier étage multiplicateur
par une inspection de la figure 7. On peut, en effet, observer
qu'en moyenne, les surfaces équipotentielles sont perpendi-
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 51
culaires aux rangées des électrodes et que, par conséquent, un
ion dont un point tel que A est l'origine, décrira une trajectoireressemblant à une sinusoïde amortie et viendra heurter le ter-
minateur de la photo-cathode. L'énergie de l'impact correspondà la tension totale appliquée au tube et sera donc de l'ordre
de 1500 à 3500 électrons-volts. Des expériences faites sur le
modèle mécanique dont les cylindres les plus hauts correspon¬
daient aux électrodes les plus positives, montrèrent bien les
trajectoires attendues. Cependant, elles indiquèrent aussi que,
suivant la position du point A et suivant la vitesse initiale de
l'ion, certains ions ne réussissent pas à parvenir jusqu'à la
photo-cathode et sont collectés par quelque autre électrode. Le
quotient des ions effectifs aux ions produits, le coefficient (},
peut être estimé ainsi à 10_1 ce qui n'est sûrement pas une
valeur exagérée. Un raisonnement quelque peu analogue peut
être tenu pour les électrons secondaires libérés à la photo¬cathode et l'on peut bien admettre que le coefficient y est aussi
égal à 10_1. Si nous admettons que le coefficient S de l'émission
secondaire par ions est égal à 1, il résulte des estimations des
coefficients p et y que chaque 100 ions positifs produits prèsdu collecteur donnent naissance sur la photo-cathode à un seul
électron secondaire effectivement multiplié.Des mesures du coefficient S de l'émission secondaire par ions
positifs furent faites dans ce laboratoire 20en utilisant une cible
d'oxyde d'argent traité au caesium et des ions de Li comme
projectiles. Le coefficient S variait entre 0,5 et 2,0 pour des
voltages primaires de 500 à 2000 volts. Par conséquent, nous
pouvons bien admettre, dans nos considérations approxima¬
tives, que le coefficient S est égal à l'unité.
En introduisant les valeurs estimées des coefficients a, (3, y
et S dans la relation (36), le coefficient de réaction ionique X
devient :
X = a (3-y 8 = 10~4 x 10"1 x 1CT1 x 10° = 10"6 •
Si le gain G du multiplicateur est 106 ainsi qu'il le devient
facilement dans un tube à 10 étages multipliant chacun 4 fois,
le produit XG est égal à l'unité et l'on doit s'attendre à un très
grand courant (résiduel) de sortie stationnaire. Les ordres de
52 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
grandeur des divers coefficients furent estimés simplement
pour montrer que l'effet de la réaction ionique, dont on observe
les effets, est une hypothèse raisonnable.
Le mécanisme de la réaction ionique est assez compliqué et
une étude beaucoup plus approfondie de tous les phénomènes
en jeu serait nécessaire pour le bien comprendre. Cependant,la simple analyse qui vient d'être esquissée et dont la validité
est confirmée par les expériences décrites plus bas, nous a
permis d'atteindre notre but immédiat, c'est-à-dire de réduire
la réaction ionique jusqu'au point où sa contribution au courant
résiduel n'est plus mesurable. Cependant, il se peut parfaite¬ment que la réaction ionique puisse devenir très utile, si l'on
apprend à la contrôler convenablement. On peut s'en servir
simplement pour augmenter le gain effectif ou par exemple
pour créer une source d'électrons à la cathode. Si cette source
est modulée, le multiplicateur peut devenir un tube amplifi¬cateur ou oscillateur sans posséder pour cela de cathode ther¬
mique. Des applications de ce genre ne semblent pas, cependant,être très pratiques parce qu'il est très difficile de contrôler et
de stabiliser la réaction ionique qui dépend de beaucoup de
facteurs critiques, dont en particulier la pression de l'atmos¬
phère du tube. L'inertie des ions constituerait aussi un obstacle,
si l'on désire que le tube opère à de très hautes fréquences.
c) Les données expérimentales.
La validité de l'explication ci-dessus, à laquelle il vient d'être
donné une justification théorique, peut être confirmée par les
deux groupes d'expériences suivantes:
1. Les résultats des mesures obtenues avec le multiplicateurmentionné au paragraphe a) sont donnés par les courbes des
figures 14,15,16 et 17. Ce tube du type B possédait 10 électrodes
multiplicatrices maintenues à des potentiels proportionnels à
leur numéro d'ordre (voir fig. 6).Les courbes de la figure 14 représentent le courant résiduel (B)
et le courant de sortie (A) (c'est-à-dire l'augmentation du courant
dans le circuit du collecteur provoquée par l'illumination de la
photo-cathode) en fonction de la tension par étage. Il en ressort
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 53
clairement qu'à 120 volts par étage le courant résiduel devient
si grand que les charges spatiales produisent une déconcen¬
tration suffisante pour créer la condition paradoxale dans
laquelle le gain diminue lorsque la tension augmente. Les
valeurs énormes du courant résiduel sont dignes d'être remar¬
quées tout particulièrement.
Fig. 14.
Courant de sortie en fonction de la tension par étage.
A Courant de sortie utile dû à l'éclairement.
B Courant résiduel.
La courbe de la figure 15 représente le changement i du
courant de la photo-cathode que provoque une illumination
constante de celle-ci, en fonction de la tension, lorsque le
multiplicateur tout entier est en opération. Si toutes les élec¬
trodes, excepté la photo-cathode et la première électrode
multiplicatrice, sont déconnectées, il reste simplement une
cellule photo-cathode à vide poussé et le courant d'émission
54 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
atteint une valeur saturée i0 indiquée sur la figure 15. La diffé¬
rence entre le courant mesuré et le courant saturé est la contri¬
bution de la réaction ionique. Cette différence atteint un maxi¬
mum pour la même tension (120 volts) que le courant de sortie
utile.
Il est particulièrement significatif de représenter l'augmen¬tation i du courant de la photo-cathode que provoque une
illumination constante en fonction du courant de sortie I, ce
dernier étant varié par le changement de la tension. Cela a été
fait sur la figure 16. On trouve une dépendance linéaire presque
parfaite qui peut s'exprimer par la relation:
i = i0 + al (39)
dans laquelle a est une constante égale à 7,8 X 10~6 dans ce
cas. Cette relation ressemble à celle (35) qui fut déduite théo¬
riquement et confirme ainsi les hypothèses faites.
Il est intéressant de considérer plus en détail la similitude
des relations (39) et (35). Le courant de sortie I est varié, dans
les expériences, en changeant la tension, ce qui strictement
parlant, altère l'ionisation (coefficient oc) et le bombardement
ionique (coefficient S), et par conséquent on ne devrait pas
s'attendre à une variation linéaire du courant de la photo¬cathode en fonction du courant de sortie. Cependant, comme
de très petites variations de tension suffisent pour la variation
du courant de sortie dont on se sert pour la courbe, elles ne
produisent pas une altération substantielle du mécanisme de la
réaction, puisque l'ionisation du gaz et l'émission secondaire
par ions ne varient toutes deux que de très peu aux tensions
utilisées. C'est ainsi que la dépendance linéaire est préservée.Il faut remarquer, de plus, que le coefficient X de la relation
(35) et le coefficient a de la relation (39) n'ont pas exactement
la même signification. Les ions positifs arrivant et les électrons
secondaires partant sont des courants de la photo-cathodes'écoulant dans le même sens, ce qui rend le courant mesuré i
plus grand que le courant électronique réel émis à la photo¬cathode. Ce courant électronique serait donné par la relation
i = h + a(s^rj)ï <4°)
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 55
.016
b
l'A „
.012
~/ ,i
/004
J
V VOLTSt
40 160 20080 120
Fis. 15-
Courant de la photo-cathode en fonction du courant de sortie.
L
0.01
0.00
"z
5
0.00
o
1
0 Ï00 4<>0 fi00 e100 K>00 (JA
Pie. 16.
Courant de la photo-cathode en fonction !du courant de sortie.
Courbe de réaction ionique. Type P.
56 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
D'autre part, il faut remarquer aussi que le coefficient X est
« réduit », c'est-à-dire qu'il a une valeur telle que l'effet composéde toutes les réactions ioniques partielles qui ont lieu de toutes
les manières possibles entre les diverses électrodes, est similaire
à celui d'une réaction idéale unique prenant place entre le
collecteur et la photo-cathode. Par conséquent, il doit avoir
une valeur beaucoup plus grande que celle qu'il aurait s'il
correspondait seulement au courant réel émis à la photo-
//
f
m
-ION^
•*•"^
2
I
1 V V OLT5
O 40 80 120 ISO 200
Flg 17.
Gourant résiduel en fonction de la tension par étage (type B).
cathode. Ces deux différences entre a et X rendent difficile une
comparaison directe entre ces deux coefficients.
Il ne faut pas chercher dans les mesures ci-dessus une confir¬
mation numérique de la théorie, mais plutôt une confirmation
expérimentale de l'existence de la réaction ionique. Son
existence est symbolisée par l'équation (39) dans laquelle le
coefficient a est d'un ordre de grandeur tout à fait raisonnable.
La courbe de la figure 17 représente le courant dans le circuit
de la photo-cathode, lorsque le tube est dans l'osbcurité totale,
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 57
en fonction de la tension par étage. La partie de la courbe de 0 à
110 volts correspond simplement aux fuites ohmiques qui sont
assez élevées parce qu'aucune précaution pour les réduire n'a
été prise dans ce tube. La différence entre le courant total et
ces fuites ohmiques est la contribution de la réaction ohmique.Si cette différence est l'ordonnée d'une courbe dont le courant
résiduel est l'abscisse (ce dernier variant avec la tension), la
courbe est une droite passant par l'origine. La constante a
correspondante se trouve être égale à 8,8 X 10~6, ce qui est
presque la même valeur que celle obtenue en illuminant la
photo-cathode.
Le coefficient a de « la courbe de réaction ionique », c'est-à-dire
de la courbe représentant l'augmentation i du courant de la
photo-cathode en fonction de la tension par étage, est la même
pour toutes les illuminations constantes de la photo-cathode,et même, comme il vient d'être indiqué, lorsque cette illu¬
mination est nulle. Ainsi ce coefficient a peut très bien être
considéré comme une mesure de l'intensité de la réaction
ionique puisqu'il ne dépend pas des conditions de l'opérationdu tube mais seulement de ses caractéristiques intrinsèques.
Plusieurs tubes du type B furent construits pour faire des
mesures relatives aux propriétés de concentration. Nous
n'indiquons pas ici les résultats obtenus puisque ce sujet fut
déjà traité dans le chapitre précédent. Cependant il est inté¬
ressant de remarquer que des courbes de réaction ionique furent
trouvées pour tous les tubes construits et que le coefficient a
était toujours du même ordre de grandeur, c'est-à-dire 10~5.
2. Une autre confirmation de l'existence de la réaction
ionique fut obtenue comme suit:
Dans un multiplicateur du type B analogue à celui qui fut
utilisé pour les expériences précédentes, la photo-cathode portaitune grille qui constituait le terminateur nécessaire à la conser¬
vation de la nature cyclique du champ. Une plaque P activée
comme les autres électrodes (c'est-à-dire recouverte d'oxyde
d'argent traité au caesium) était montée derrière la grille
terrninatrice, ainsi qu'il est montré sur le schéma de la figure 18.
Le courant résiduel I était mesuré en fonction de la différence
58 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
de potentiel V0 entre la photo-cathode et la plaque P, pour
différentes valeurs V de la tension par étage. Les courbes de la
figure 19 montrent les résultats obtenus.
Fig. 18.
Tube vérifiant l'hypothèse de la réaction ionique.
II I I I I I I | I k. IVOLTSl I
-*0 -M O 20 *0 60 60
Fig. 19.
Courant résiduel en fonction du potentiel de la plaque P.
Une inspection de ces courbes montre que le courant résiduel
est réduit par un très grand facteur (10 à 1000) lorsque le
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 59
potentiel de la plaque P est de quelques volts au-dessus de
celui de la grille terminatrice. Cela provient de l'existence à
la surface de la plaque P d'un champ qui s'oppose à la libération
des électrons secondaires résultant du choc des ions passant
par les trous de la grille. Comme une petite fraction seulement
des électrons secondaires a une vitesse initiale suffisante pour
surmonter cette barrière de potentiel de quelques volts, l'effi¬
cacité de la réaction ionique est considérablement réduite.
Cela produit, à son tour, la diminution observée du courant
résiduel.
Ce dispositif, quoiqu'il réduise énormément le courant
résiduel, ne le supprime pas complètement. La réaction ioniquea encore lieu entre les paires d'électrodes qui ne comprennent
pas la photo-cathode, et est maintenue aussi par les ions quiheurtent les fils de la grille terminatrice. On avait espéré, tout
d'abord, que ce dispositif serait suffisant, mais comme les
expériences ont détruit cet espoir, on chercha un autre remède.
Avant d'aborder la description des moyens utilisés pour
supprimer la réaction ionique, il est intéressant de mentionner,
en passant, que le dispositif de la grille terminatrice permet
de mesurer approximativement le coefficient S des électrons
secondaires aux ions primaires. Le courant de la plaque P est
composé des ions arrivant et des électrons partant. En rendant
la plaque P de quelques volts positive par rapport à la photo¬
cathode, le courant électronique est supprimé et il peut par
conséquent être déterminé par la diminution résultante du
courant total. Si, lorsque cela est fait, le courant de sortie I
qui a changé à cause de la diminution de la réaction ionique,
est maintenu constant par un réajustement approprié de la
tension par étage V, le courant ionique qui bombarde la
plaque P restera le même. L'expérience est faite de préférenceen illuminant la photo-cathode de sorte que le réajustement
de la tension soit aussi faible que possible. Le résultat, pour
une cible d'oxyde d'argent traitée au caesium et bombardée
probablement par des ions de caesium à 2000 volts fut
S = + 0,4. Les erreurs présentes dans cette détermination sont
très nombreuses et proviennent de toutes sortes de causes
intempestives telles que l'effet des électrons secondaires pro-
60 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
duits sur les fils de la grille par le heurt des ions et collectés
par la plaque P, ou l'émission photo-électrique de la plaque P.
La valeur trouvée est probablement trop petite.
d) L'élimination de la réaction ionique.
Au lieu de supprimer la libération des électrons secondaires
produits par le retour des ions, il est plus effectif d'annihiler
la réaction ionique en empêchant ce retour lui-même. Cela fut
réalisé en abandonnant le dessin du type B et en cherchant
un type entièrement nouveau dans lequel la trajectoire d'un
ion quelconque se termine dans l'étage même de son origine,
pour qu'il lui soit impossible de produire de la réaction.
En plus d'être susceptible d'éliminer la réaction ionique, le
nouveau type doit remplir les conditions déjà décrites concer¬
nant les propriétés de concentration et les champs collecteurs
intenses. Le dessin d'un tel tube multiplicateur fut obtenu
après une série de conceptions successives qui furent toutes
examinées sur le modèle mécanique. La figure 6 C illustre
le type obtenu. Les directrices des électrodes sont des arcs de
cercle prolongés par des segments tangents. Les extrémités de
ces tangentes sont des points équidistants sur une ligne droite.
Il est clair qu'il est impossible de relier par une droite un point
quelconque compris dans l'espace des derniers étages multi¬
plicateurs à un point quelconque compris dans celui des étages
initiaux, sans intercepter la plupart des électrodes.
Les excellentes propriétés de concentration de ce type furent
déjà décrites. De plus, il fut facile de constater, avec l'aide du
modèle mécanique, que la trajectoire d'un ion produit en un
point quelconque se terminait réellement à l'électrode négativela plus proche. On peut d'ailleurs s'en rendre compte aisément
par une inspection de la figure 8 qui représente les lignes
équipotentielles et les trajectoires électroniques d'une cellule
élémentaire de ce type C.
Le premier multiplicateur de ce type, à 10 étages, fut
construit avec des dimensions plus grandes que d'habitude,
Les électrodes étaient montées sur des plaques de verre tan¬
gentes aux rangées des électrodes de sorte que leurs extrémités
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 61
étaient restées libres. La figure 20 montre le tube qui a un
diamètre de 9 cm et une longueur de 30 cm à peu près. La
multiplication n'a rien laissé à désirer, comme il a déjà été
dit. Cependant le courant résiduel, quoique considérablement
réduit, était encore assez intense (300 jaA pour un gain de 106).
Décevante aussi, fut l'observation de la réaction ionique.
Toutefois, une nouvelle propriété de celle-ci fut observée.
La constante a de la réaction ionique était égale à 10~6, lors-
Fig 20
Multiplicateur a 10 étages du type C, avec écrans protecteurs.
qu'elle fut déterminée par la variation du courant de sortie
résultant d'une illumination de la photo-cathode tandis que
cette même constante a était égale à 10~5, lorsqu'elle fut
déterminée par la variation du courant résiduel. Quoique cette
dernière détermination ait été assez délicate et n'ait probable¬
ment pas été très précise, les résultats obtenus n'en indiquent
pas moins que la réaction ionique influence plus fortement le
courant résiduel que le courant de sortie utile.
Le fait que la réaction ionique affecte le courant de sortie
utile fut attribué aux ions qui s'échappent par les interstices
compris entre les électrodes, aux endroits où celles-ci ne sont
pas couvertes par les plaques de support qui étaient plus
étroites que les électrodes. Ces ions étaient probablement
collectés par le fil reliant la photo-cathode au pied du tube,
car ce fil avait été laissé nu. Une certaine contribution à la
62 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
réaction ionique peut être due à des électrons s'échappantlatéralement. Ces pertes sont spécialement accentuées aux
grandes intensités de courant, ainsi que l'on peut en juger
par la légère courbure positive de la courbe de réaction.
La prédominance de l'influence de la réaction ionique sur
le courant résiduel peut être attribuée à un phénomène quiexiste aux bords des électrodes. Si l'alignement de celles-ci
n'est pas parfait, le retour des ions peut prendre place légère¬ment en dehors de la structure des électrodes et pourtant le
mécanisme de multiplication électronique peut encore être
possible aux bords mêmes des électrodes. Les densités des
courants sont très fortes à cause des petites surfaces en jeu,
de sorte que les charges spatiales qui en résultent, causent
une déflection latérale des électrons. Si ceux-ci sont défléchis
vers le milieu des électrodes, le retour des ions qu'ils produisentest impossible. Si, au contraire, les électrons sont défléchis vers
l'extérieur, le mécanisme de multiplication est gêné. Il résulte
de là qu'il s'établit un courant stationnaire aux bords des
électrodes laissés libres, qui se maintient grâce au mécanisme
habituel de la réaction ionique et qui est limité par les charges
spatiales.Il résulte de ces considérations que le courant résiduel serait
considérablement réduit si l'on arrivait à supprimer « l'efïet
des bords ». Or cet effet est détruit si les courants électroniques
sont maintenus au milieu de la structure. Une concentration
latérale de cette sorte est aussi désirable, comme on le sait,
pour accroître la région de dépendance linéaire du courant
de sortie. Les moyens susceptibles de produire cette concen¬
tration furent déjà décrits dans le chapitre relatif à la concen¬
tration en général. Le premier de ces moyens qui fut utilisé,
consiste à fermer les extrémités des électrodes par des cloisons
planes normales aux génératrices (voir fig. 10 A). Un multi¬
plicateur à 10 électrodes multiplicatrices de ce genre avait en
effet une région aggrandie dans laquelle le courant de sortie
était proportionnel au courant originel. Cependant, le courant
résiduel, quoique un peu réduit, était resté encore assez grand
(100 [iA pour un gain de 106). De plus la réaction ionique
est restée mesurable.
MULTIPLICATEURS d'ÉLKCTRONS ÉLECTROSTATIQUES 63
Puisque la suppression de «l'effet des bords» s'est montrée
insuffisante, il fut décidé d'obstruer toutes les trajectoires
possibles que les ions peuvent emprunter pour se diriger vers
les électrodes négatives, et de voir si alors le courant résiduel
devenait vraiment petit. Dans ce but, le premier tube du
type C construit, fut ouvert et plusieurs écrans métalliques y
furent insérés. Ces écrans métalliques s'étendent normalement
de la structure des électrodes jusqu'aux parois du tube. Sur
les côtés des électrodes, ils ont la forme de la surface équi-
potentielle de l'électrode à laquelle ils sont attachés, de façon
à ne pas altérer le champ et conserver les propriétés de concen¬
tration. Ils pénètrent légèrement à l'intérieur de la structure
des électrodes pour supprimer « l'effet des bords ». La figure 20
montre le tube après sa modification. Trois écrans furent
placés à divers étages de façon à assurer une protection généraleaussi parfaite que possible et aussi pour empêcher les réactions
« partielles ». L'insertion de ces écrans se révéla un parfaitremède car le courant résiduel devint de quelques microampèresseulement avec un gain d'un million. La réaction ionique,
encore mesurable, la constante a étant égale à 2 X 1CT7, fut
considérée inoffensive parce qu'elle fut attribuée aux ions
collectés directement par le fil de la photo-cathode laissé nu.
D?s écrans furent aussi introduits dans le multiplicateur dont
les électrodes étaient terminées par des plans latéraux. Ces
écrans s'étendaient seulement de l'arrière des électrodes
jusqu'aux parois de l'enveloppe sans protéger les côtés de la
structure des électrodes. Le courant résiduel devint 1 jxA pour
un gain de 106 et la réaction ionique devint enfin non mensu-
rable. Cette expérience confirma l'hypothèse relative à « l'effet
des bords », puisque celui-ci est effectivement supprimé par
les plans latéraux fermant les électrodes. Elle confirma aussi
celle relative à la collection des ions par le fil de la photo¬
cathode, qui était soigneusement isolé sur toute sa longueur.Dans tous les tubes construits par suite il a été indispensable
d'empêcher complètement tout retour des ions. Cela fut réalisé
par des moyens divers qui seront décrits en relation avec les
diverses constructions spécifiques adoptées pour réduire les
autres causes du courant résiduel. L'expérience a montré d'une
64 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
façon définitive qu'aucune liberté ne peut être prise dans cette
protection contre les ions intempestifs et que la réaction
ionique est toujours observée si une voie quelconque est laissée
non obstruée. L'existence de la réaction ionique, autre que
celle due aux ions collectés par le fil de la photo-cathode, est
toujours accompagné d'un fort courant résiduel. Il est difficile
de justifier la nécessité d'une obstruction si complète. En
particulier, il n'est pas immédiatement évident que les ions
qui heurtent les parties des électrodes d'où les électrons secon¬
daires ne peuvent pas être libérés puissent donner lieu à un
mécanisme régénérateur quelconque. Il n'est pas très étonnant,
par contre, qu'avec les gains énormes obtenus par la suite
(108 à 109) la moindre régénération provoque immédiatement
un grand courant stationnaire. L'étude de ce mécanisme de
régénération n'a pas été plus approfondie puisque notre but
immédiat, la réduction du courant résiduel, est atteint. En
effet, l'expérience montre l'absolue nécessité d'une obstruction
complète de tous les chemins possibles par lesquels les ions
pourraient passer des étages de multiplication finals aux
étages initiaux.
4. L'ÉMISSION FROIDE.
a) Introduction.
Une contribution sérieuse au courant résiduel provient de
l'émission des électrodes qui résulte de l'action du champ
électrostatique agissant à la surface des électrodes ou d'autres
conducteurs présents dans le tube. En général des champs
extrêmement intenses tendant à extraire les électrons, sont
nécessaires pour créer une émission appréciable. Cependant,à cause du gain énorme possible avec le multiplicateur, l'émis¬
sion par ailleurs imperceptible due à des champs relativement
faibles peut causer des courants appréciables.On sait 21
que le courant d'émission électronique I créé par
un champ extracteur E agissant à la surface d'un conducteur
est donné par la relation:
_^
I = aWeE
(41)
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 63
dans laquelle a et b sont des constantes qui dépendent de la
nature du conducteur. Ces constantes sont en relation étroite
avec le travail de sortie, car il est bien évident qu'à une faible
énergie nécessaire à la libération d'un électron correspondraune grande probabilité d'émission par un champ extérieur
donné. En réalité l'émission thermique et l'émission due au
champ sont presque toujours présentes simultanément. Si
l'émission thermique prédomine, l'émission du champ se mani¬
feste en ce que l'on appelle « l'effet de Schotky ». Si, au contraire,
le champ prédomine, l'émission, appelée alors « l'émission
froide » est indépendante de la température, en première
approximation. Pour les besoins pratiques de ce travail, les
deux phénomènes seront considérés indépendamment en dépitde leur relation.
Le gradient du champ est particulièrement grand aux
endroits où les rayons de courbure de la surface sont petits.C'est pourquoi, comme on le sait, les bords tranchants, les
pointes aiguës ou des particules collées à une surface lisse par
ailleurs, sont d'excellentes sources d'émission froide. L'émission
qui en résulte est généralement très erratique, parce que les
propriétés des points émetteurs changent incessamment sous
l'influence de la haute densité du courant qui provient d'une
surface d'émission très petite.
b) Expériences.
Du point de vue des remèdes à appliquer, il est très important
de pouvoir déterminer dans tous les cas la cause du courant
résiduel. En particulier, lorsque l'expérience a montré que les
fuites ohmiques et la réaction ionique n'y contribuent plus,
il est important de pouvoir distinguer entre les émissions
froide et thermique. Pour supprimer la première, un dessin
approprié ou des soins spéciaux dans la construction peuvent
être suffisants, tandis que la seconde dépend spécifiquementde la nature des surfaces émettrices (photo-électrique et à
émission secondaire) utilisées. Bien des expériences furent
imaginées pour les distinguer.Le courant résiduel résultant de l'émission froide est géné-
5
66 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
ralement plus intense que celui auquel on doit s'attendre de
l'émission thermique à la température habituelle du laboratoire,
et il est assez erratique en comparaison de la stabilité de ce
dernier. Cependant, ces différences ne sont pas générales et on
ne peut pas en juger â priori avant d'avoir établi, auparavant
et par ailleurs, quels sont les ordres de grandeur en jeu.
Si toutes les électrodes émettent uniformément un courant iset si le gain par étage R est le même pour tous les n étages
multiplicateurs, le courant résiduel I sera donné par la relation:
Par conséquent, si le quotient du courant résiduel au coefficient
RG
P ,ou même simplement au gain G, reste approximativement
constant lorsque la tension est variée, il y a lieu de croire que
l'émission est uniforme et très probablement de nature ther¬
mique. Si, au contraire, ce quotient varie beaucoup (par un
facteur supérieur à 5, par exemple) il est à présumer que c'est
la tension même qui affecte l'émission et que, par conséquent,
l'émission froide est la cause prédominante du courant résiduel.
En général, dans ce dernier cas, l'émission froide est localisée
à une électrode particulière et peut être évaluée en divisant
le courant résiduel par le gain correspondant au nombre réduit
des étages multiplicateurs. Cette émission devrait être régie par
la relation (41), si elle était réellement d'origine froide. Il a été
en effet observé, dans deux cas, que le logarithme du courant
résiduel divisé par le coefficient approprié dépendait à peu prèslinéairement de l'inverse de la tension par étage. Ces mesures
montrent clairement l'existence de l'émission froide. Cependantles constantes caractéristiques trouvées n'ont pas grande signi¬fication parce que la source de l'émission froide était purementaccidentelle et sa véritable origine était inconnue.
Une autre expérience très simple peut être effectuée comme
suit: Les fils connectant les diverses électrodes à leur source
de potentiel sont déconnectés successivement, en commençant
par les électrodes les plus négatives. Si toutes les électrodes
y contribuaient uniformément, l'abandon d'un étage devrait
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 67
diviser le courant résiduel par un facteur égal au gain de l'étageabandonné. Si, cependant, cet abandon produit une diminution
beaucoup plus grande (10 à 10.000 par exemple au lieu de 5 à 6)
la contribution prédominante d'une électrode particulière est
ainsi décelée. Dans la plupart des cas, cette contribution peut
être attribuée à l'émission froide. Cependant on a observé avec
des surfaces activées par un métal alcalin des émissions ther¬
miques très intenses qui provenaient de régions dont le travail
de sortie était particulièrement petit. Pour différencier ces deux
possibilités, le potentiel de l'électrode considérée peut être varié
par rapport à celui de l'électrode multiplicatrice suivante. Si
ce potentiel est suffisamment différent de sa valeur nominale,
les propriétés de concentration sont altérées et le gain décroît.
Gela fut confirmé en étudiant l'effet qu'a le potentiel de la
photo-cathode sur le courant de sortie utile. Si, en dépit de
cette diminution du gain, le courant résiduel augmente lorsquele potentiel de l'électrode à émission prédominante est beaucoup
plus négatif que sa valeur nominale, la forte dépendance de
celui-ci par rapport à l'intensité du champ qui a augmenté,
indique clairement une origine due à l'émission froide. Si, au
contraire, le courant résiduel diminue (ou change très peu)
l'origine de l'émission peut être déclarée thermique.
Bien d'autres expériences furent effectuées dans lesquelles
la nature de l'émission produisant le courant résiduel fut jugée
par la variation des potentiels d'opération. Elles étaient
adaptées spécialement aux divers cas particuliers rencontrés.
Enfin, une méthode décisive pour distinguer entre les émis¬
sions thermiques et froides consiste à varier la température de
l'ambiance du tube. S'il a été établi auparavant qu'il n'y a
plus de réaction ionique, qui dépend de la pression, qui elle
dépend de la température, et qu'un changement du courant
résiduel est observé, son origine peut être déclarée thermique
puisque l'émission- froide est indépendante de la température.
Cette méthode, qui sera décrite en détail, fut développée pour
étudier l'émission thermique. Comme elle met en jeu une tech¬
nique assez délicate, on y a eu recours seulement dans les cas où
toutes les autres causes du courant résiduel furent presque
complètement éliminées.
68 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
c) Vélimination des effets de rémission froide.
Il n'y a malheureusement pas de méthode spécifique pour
réduire l'émission froide d'une façon radicale. Cependant, une
série de mesures peuvent être prises pour rendre négligeableson influence sur le courant résiduel. Elles consistent à réduire
les gradients du champ, éviter les bords tranchants et autres
points à grande courbure, utiliser des matériaux possédant un
grand travail de sortie et finalement elles consistent à empêcher,
par des protections convenables, que les électrons libérés par
l'émission froide en dehors de la structure même des électrodes
multiplicatrices ne soient multipliés ou même simplementcollectés directement par le collecteur.
Puisque les valeurs des potentiels à utiliser sont déterminées
par les conditions qu'exige l'efficacité de l'émission secondaire,
l'intensité du champ peut être contrôlée seulement par la
disposition géométrique des électrodes. Comme aux petitesdimensions linéaires les champs sont intenses, il ne sera possiblede construire un tube de petites dimensions que si l'on prévoitde grands interstices entre les électrodes. Ainsi qu'il apparaît
par une inspection de la figure 8, un endroit particulièrement
dangereux du point de vue de l'émission par le champ, se trouve
au bord (de coordonnée zéro) des électrodes, puisque le champ
y est particulièrement intense et qu'il y a une direction quiconvient à l'extraction des électrons. La plupart des électrons
émis seront collectés directement par l'électrode voisine et ne
causeront par conséquent aucun mal. Cependant, grâce à la
nature erratique de l'émission froide et à la complexité de la
surface du bord de l'électrode à l'échelle miscroscopique, quel¬
ques-uns d'entre eux réussiront à heurter une des électrodes de
la rangée opposée. Ces électrons seront multipliés et contri¬
bueront au courant résiduel. L'on se rendit compte de cet état
dangereux dès que la réaction ionique fut suffisamment atté¬
nuée, et le dessin d'un type de multiplicateur nouveau fut
cherché dans lequel ces interstices critiques seraient aggrandis.Dans cette recherche il fallait tenir compte de toutes les condi¬
tions imposées déjà par une concentration adéquate, les champscollecteurs intenses et la suppression de la réaction ionique.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 69
Le type D (voir figure 6) dans lequel l'interstice critique est
approximativement doublé fut élaboré grâce à l'aide du modèle
mécanique. La forme des électrodes du type précédent fut
conservée, seul leur arrangement fut changé. Les excellentes
propriétés de concentration de ce type furent déjà décrites. La
suppression de la réaction ionique est encore plus certaine
dans ce type nouveau à cause du « recouvrement » des extré¬
mités planes des électrodes. De plus la recherche du dessin
nouveau possédant les mêmes directrices, arrangées à nouveau,
montra qu'une inexactitude considérable pouvait être tolérée
dans la construction de ce type sans affecter sérieusement la
concentration.
On peut réduire encore plus l'émission du bord critique des
électrodes en augmentant la courbure de celui-ci. Cela pourraitêtre fait simplement en enroulant ce bord sur lui-même. Cepen¬dant ce moyen compliquerait l'estampage des électrodes. Le
moyen utilisé consiste à protéger les bords tranchants des
électrodes par des bandes en forme de U. Ces bandes sont faites
en nickel ayant 0,13 mm d'épaisseur, les bras du U ayant
environ 1,5 mm. Elles sont appliquées sur le bord de l'électrode
et sont ensuite fortement comprimées pour éviter la nécessité
de la soudure électrique qui laisse en général de petites aspéritésà la surface du métal. Pour éviter les extrémités tranchantes
qui existeraient si on coupait les bandes à la longueur exacte
des électrodes, celles-ci sont laissées plus longues et sont ensuite
pliées de façon que leurs extrémités se joignent à l'autre bord
de l'électrode. L'émission froide n'est pas observée en cet endroit
à cause de la direction adverse du champ, de sorte que les
extrémités tranchantes et la soudure électrique peuvent y être
tolérés. La figure 10 B montre une électrode pourvue d'un
arrangement protecteur de cette sorte. L'existence des bandes
sur les côtés des électrodes produit simultanément l'effet de
concentration latérale qui est désirable à bien des points de
vue, comme on le sait.
Au début, les fils reliant les diverses électrodes au pied du
tube étaient laissés nus. Les électrons libérés par le champ à
leur surface, plus particulièrement près du pied où les champssont intenses, pénétraient alors dans la structure des électrodes
70 LE COlItANT RÉSIIM'EI. DANS LES
et contribuaient, par conséquent, au courant résiduel directe¬
ment ou après avoir été multipliés. Pour empêcher cela, les
électrons libérés furent arrêtés par des tubes en verre protégeantla longueur tout entière des fils. Les seules parties laissées
découvertes étaient aux endroits indispensables au contact
avec les électrodes. A ces endroits on prit un soin particulier
pour éliminer toute possibilité' d'émission froide.
L'émission froide due à des particules de poussière ou à des
aspérités collées à la surface des électrodes peut devenir très
sérieuse. Pour la prévenir, la structure des électrodes, après son
assemblage et avant d'être scellée dans son enveloppe de verre,
est exposée pendant quelques secondes à une flamme de gaz
brûlant avec un excès de gaz. Par ce procédé les aspéritésfusibles sont fondues et les particules combustibles brûlées,
sans cependant que l'argent des électrodes soit oxydé ou que
la structure soit abîmée par ailleurs.
d) Résultats.
La figure 21 montre un multiplicateur qui satisfait à toutes
les exigences imposées pour prévenir les fuites ohmiques, la
réaction ionique et l'émission froide. Les deux rangées d'élec¬
trodes en nickel électrolytiquement recouvert d'argent sont
KlK. Jl.
Multiplicateur à 10 étages du type D.
montées sur des plaques de verre reliées par des bras de verre
l'une à l'autre, ainsi qu'au pied du tube. Les connections sont
assurées par des fils llexibles qui sont entièrement protégés par
des tubes en verre, même au voisinage du pied. Les bords
tranchants des quatre écrans anti-ions en nickel sont dirigés
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 71
du côté des potentiels négatifs et ne constituent donc pas de
source d'émission froide.
Dans plusieurs tubes de ce genre, la contribution du courant
résiduel due à l'émission froide ne pouvait réellement pas être
observée et la seule contribution restante était, sans aucun
doute, l'émission thermique des électrodes.
Les surfaces émettrices de ce tube, et des tubes similaires,
étaient traitées de la manière habituelle aux surfaces photo¬
électriques activées par un métal alcalin. Ce traitement procèdeessentiellement comme suit: L'argent est oxydé par une
décharge électrique dans une atmosphère d'oxygène de 1 à 2 mm
de Hg. Ensuite le métal alcalin (Cs, Rb, Li, Na ou K) est intro¬
duit dans le tube. Il est obtenu en général en chauffant par
induction une petite capsule métallique contenant un mélangede l'oxyde de l'alcalin désiré avec un réducteur tel que l'alu¬
minium ou le chrome. Le tube est alors chauffé pendant plu¬sieurs minutes (10 à 30) à une température variant entre 150°
et 270° C. suivant le métal utilisé. Ce traitement a fait l'objet
de bien des publications 22 et ne sera pas décrit plus longuement.
Plusieurs multiplicateurs à dix étages analogues à celui qui
est représenté par la figure 21 furent construits. Les mesures
fournirent pour six d'entre eux, la tension étant de 200 volts
par étage, les caractéristiques résumées par le tableau suivant:
Numéro du tube....
1 2 3 4 5 6
Alcalin utilisé pour l'acti-
vation Cs Cs Rb Rb Cs Cs
Gain total en millions. . 10,0 4,2 2,2 5,0 1,0 10,0
Gain moyen par étage . . 5,01 4,59 4,29 4.68 3,98 5,01Sensibilité de la photo¬
cathode en jxA/lumens .10 15 0,5 1 12 5
Sensibilité du tube en
Amp/lumens 100 63 1,1 5 12 50
Courant résiduel à la tem¬
pérature du laboratoire
(27° C.) en [xA . . ..' 0,95 1,2 0,6 10 1,5 9
Intensité de lumière pro¬
duisant un courant de
sortie égal au courant
résiduel, en lumens
X 10-8 0,95 1,9 55,0 — — —
Cause principale du cou¬
rant résiduel émission therra ique émission froide
72 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
Les plus grands soins possibles furent pris dans la construc¬
tion des tubes pour prévenir l'émission froide. En dépit de ces
soins, dans la moitié des tubes construits, cette émission resta
encore la cause principale du courant résiduel. L'émission
froide est de toutes les causes du courant résiduel celle qui est
la plus difficile à éliminer d'une façon radicale, c'est-à-dire
d'une façon que l'on puisse reproduire à volonté. Dans la plupartdes cas où elle prédominait, on ne pouvait rien déceler d'anormal
en regardant l'électrode dont elle provenait. Il est très probable
que c'est le métal alcalin qui produit cet état fâcheux, car on a
observé en sa présence la création de points ayant un travail
de sortie très faible. Ces points peuvent se trouver, par hasard,
aux endroits où le champ est très intense. D'ailleurs, on verra
par la suite que si l'usage du métal alcalin est évité pour le
traitement des surfaces à émission secondaire, l'émission
froide n'apparaît que dans une fraction très faible de cas, à
condition que certaines autres précautions soient aussi prises.
Si, en plus des difficultés habituelles de la technique du vide,
celles dues à un traitement par un métal alcalin de beaucoup
d'électrodes disposées d'une façon compliquée sont à surmonter,
la fabrication de multiplicateurs ayant de grandes sensibilités
photo-électriques et à émission secondaire est un processus qu'ilest difficile de reproduire avec de la constance. Souvent, après
une première activation non satisfaisante, le tube a été vidé
et activé à nouveau pour essayer d'améliorer son fonctionne¬
ment. Les caractéristiques du tableau ci-dessus se rapportent à
l'état final des tubes.
La susceptibilité du multiplicateur pour la mesure des lu¬
mières de très faible intensité peut être exprimée par l'intensité
de la lumière qui produit un courant de sortie égal au courant
résiduel, ainsi qu'il a été indiqué sur le tableau. Cette intensité
de lumière n'est évidemment pas la plus faible que l'on puissedéceler. Elle représente néanmoins l'ordre de grandeur des
intensités qui peuvent être mesurées avec une grande précision.
Lorsque le courant résiduel provient de l'émission froide, il
est assez erratique et cette intensité de lumière perd de sa
signification caractéristique. C'est pour cette raison qu'elle a
été omise pour les tubes nos 4, 5 et 6. La très grande sensibilité
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 73
des meilleurs tubes obtenus peut être appréciée, si on la compare
à celle des cellules photo-électriques à vide ou même à gaz.
Une lumière de 1CT8 lumens, facilement mesurable par le multi¬
plicateur, produit un courant de 5 X 10~13 amp. au plus dans
une cellule à vide et 100 fois cette valeur au plus dans une
cellule à gaz. Il est bien évident que la mesure directe de cou¬
rants si faibles est à peine possible ou, même si elle l'est, elle
devient extrêmement difficile.
5. L'ÉMISSION THERMIQUE.
a) Introductien.
Le courant résiduel provenant de l'émission thermique est
petit et stable, si on le compare à celui qui est dû à la réaction
ionique ou à l'émission froide. Par conséquent, il ne diminue
pas d'une manière sérieuse la capacité du multiplicateur à
mesurer des lumières d'intensités faibles et constantes. A cause
de sa stabilité relative, ce courant peut même être neutralisé
par un circuit de compensation approprié. Cela est cependantune complication indésirable. Une objection plus sérieuse
apparaît lorsque la lumière est modulée. Le rapport du signalau « souffle » (fluctuations dues au « shot effect ») est alors
diminué par le souffle additionnel provenant du courant résiduel,ce qui se remarque surtout pour des signaux faibles. C'est ainsi
que si la contribution thermique au courant résiduel n'est pas
aussi fondamentalement gênante que celles dues aux autres
causes, elle n'en est pas moins parfaitement indésirable.
La réduction du courant résiduel provenant des fuites
ohmiques, de la réaction ionique et de l'émission froide fut
réalisée surtout par une construction appropriée du multipli¬cateur. L'émission thermique ne saurait être traitée de la même
manière, puisqu'elle dépend spécifiquement de la nature des
surfaces émettrices et de leur température.Etant donné la nature fondamentale de cette contribution
thermique qui met une limite à une nouvelle diminution du
courant résiduel, il fut décidé d'étudier la variation du courant
résiduel en fonction de la température. Cette expérience fut
74 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
entreprise primitivement pour prouver d'une façon concluante
que le reste du courant résiduel était vraiment d'origine ther¬
mique, chose qui fut établie bien vite. En effet, par un refroi¬
dissement approprié du multiplicateur, le courant résiduel
atteignit une valeur très petite et l'appareil était susceptiblede mesurer des intensités de lumière très faibles.
L'intérêt principal de cette expérience ne réside cependant
pas en ce qu'elle fournit un instrument d'une certaine utilité,
mais plutôt en ce qu'elle est une façon idéale de mesurer les
constantes thermiques des surfaces à émission photo-électrique.Ceci est particulièrement important pour les surfaces traitées
par un métal alcalin. En effet, lorsque la température de ces
surfaces est variée de façon à ne pas altérer leur nature, le
courant thermique est si petit que sa mesure directe est difficile
même si l'aire de la surface émettrice est assez grande. Nous
avons entrepris avec l'aide du multiplicateur de mesurer les
constantes thermiques de l'oxyde d'argent traité au caesium.
L'émission thermique obéit à l'équation de Richardson
I = AT2eT= A.H*e~W (43)
dans laquelle I est le courant émis en ampères/cm2, A est une
constante en ampères/cm2 degré2, T la température en degrésabsolus et B une constante égale à
B = 1,16 x 104 x W (44)
si e, la charge de l'électron, est exprimée en coulombs, k, la
constante de Bolzman, en joules/degré et W, le travail de sortie,
en volts. La théorie a montré que A est une constante univer¬
selle, indépendante de la nature du corps émetteur et qu'elleest égale à:
A = 120 amp/cm2 deg2 . (45)
Les déterminations expérimentales fournissent, en effet, cette
valeur pour beaucoup de métaux purs. Cependant, pour les
surfaces composées, les valeurs mesurées de A diffèrent de la
valeur théorique dans des rapports énormes (jusqu'à 10 30!).On explique cet écart en admettant que dans ce cas le travail
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 75
de sortie est une fonction de la température. Cette hypothèseconduit à une forme plus générale de l'équation de Richardson
dans laquelle le coefficient B (ou le travail de sortie) est un
développement en série de puissances de T. Cependant, on
retient généralement la forme simple (43) de l'équation, même
pour les surfaces composées, à cause de la difficulté énorme quise présente lors de la détermination expérimentale des cons¬
tantes de la série de l'équation généralisée. Les deux constantes
A et W caractérisent donc une surface donnée. Les résultats
des mesures sont généralement exprimés en portant le log (I/T2)en fonction de (1/T). Une droite est dessinée de façon à corres¬
pondre au mieux aux points expérimentaux. La pente de cette
droite et sa position par rapport aux axes déterminent respec¬
tivement le travail de sortie W et la constante A. Ainsi qu'onle sait, la plupart des expériences fournissent une valeur rela¬
tivement précise du travail de sortie W tandis que de grandeserreurs sont généralement présentes dans la détermination de
la constante A. Le but de nos expériences est strictement limité
à la détermination du travail de sortie de certaines surfaces
traitées par un métal alcalin.
b) Vappareillage expérimental.
La variation de la température des surfaces activées par un
métal alcalin, le caesium en particulier, qui est appropriée à
la détermination du travail de sortie, a une limite supérieure,environ 100° C, au-dessus de laquelle les propriétés de la surface
seraient altérées en permanence. Il a aussi une limite inférieure,
environ — 50° C, au-dessous de laquelle le courant d'émission
n'est pas mesurable même lorsqu'il est multiplié par l'énorme
gain du multiplicateur. Pour utiliser entièrement toute la
variation de température disponible, il est nécessaire de pouvoirmesurer des courants très faibles aux basses températures. Par
conséquent, il est essentiel que les fuites ohmiques externes
soient aussi petites que possible pour qu'elles ne masquent par
le courant d'origine interne. La réalisation de ce besoin est
rendue difficile par la vapeur d'eau de l'atmosphère qui, si on
ne l'empêche, se condense sur et entre les divers conducteurs
du tube et devient ainsi la cause de fortes fuites ohmiques.
76 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
Dans les multiplicateurs décrits antérieurement, les électrodes
émettrices sont thermiquement bien isolées de l'enveloppe de
verre du tube, car elles prennent la température de celle-ci
principalement par radiation et partiellement seulement par la
conductibilité thermique de leurs supports. Pour arriver à
connaître avec certitude la température des électrodes, il faut
donc que celle du tube varie lentement et soit uniforme.
Une méthode expérimentale pratique qui permet une variation
de température lente et uniforme et en même temps qui résoud
la question des fuites ohmiques consiste à faire circuler un
liquide entre un récipient contenant le tube et une spiralemétallique ayant une grande surface, et dont la température
peut être contrôlée à volonté. Le liquide ne doit pas être hygros-
copique, il doit avoir une faible conductibilité électrique, son
point d'ébullition doit être supérieur à 100° C et il doit
conserver à — 50° C une viscosité suffisamment faible pour ne
pas gêner la circulation. Le pétrole, essayé tout d'abord, satis¬
fait à toutes ces exigences sauf la dernière. L'éthylbenzène
purifié (CeH5. C2H5) est parfaitement satisfaisant.
L'appareillage utilisé est illustré par la photographie 22 et
il est dessiné schématiquement sur la figure 23. Le liquidecircule du récipient TH, à travers la pompe P, la spirale S et
le filtre F, pour retourner au récipient TH.
Le récipient TH est une bouteille thermos. Une région de
sa surface n'a pas été couverte par la couche métallique réflé¬
chissante pour permettre d'éclairer le multiplicateur. Le bon
isolement thermique de la bouteille économise la chaleur (ou« le froid ») de la source de chaleur et empêche que la conden¬
sation de la vapeur d'eau n'obstrue la fenêtre réservée à l'éclai-
rement.
La pompe P est simplement une pompe à essence pour
bateaux, type à membrane vibrante. Elle est mue par un
accumulateur de 6 volts et produit une circulation d'environ
3 litres à la minute.
La spirale de cuivre S est immergée dans un bain B. Pour
élever la température au-dessus de celle du laboratoire, on
chauffe simplement de l'eau dans B. Dans ce but on utilise un
réchaud électrique de préférence à un bec Bunsen à cause du
<X.
Ml I.TUM.H \TKl IIS I) I.I.KI.T IK > N > Kl.KCTitl )ST \TIQl Ks //
FifT. ::.
Appareil puur la ilrlerniinalion des constantes thermiques.
Nï
TH
Fie •::;.
Appareillage puur la détermination du courant thermique.
78 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
danger d'explosion de l'éthylbenzène. Pour abaisser la tem¬
pérature, un bain constitué par un mélange de glace carbonique
(C02) et d'alcool est utilisé. La température minimum obtenue
par ce moyen, mesurée dans le récipient TH était de — 75° C,
ce qui est plus bas que nécessaire. Pour la vidange un robinet V
fut aménagé dans la spirale.Le filtre F, un filtre à essence d'automobile, n'est pas abso¬
lument nécessaire. Cependant grâce à cette précaution de
propreté supplémentaire, il était possible de se servir du même
liquide pour plusieurs expériences.Les conducteurs C qui sont nécessaires aux courants du
multiplicateur M, sont isolés par une épaisse couche de caout¬
chouc supportant une tension nominale de 10.000 volts.
L'éthylbenzène dissout le caoutchouc ce qui augmente sa
conductibilité. Le même inconvénient se présente pour tous
les autres liquides et isolations qui furent envisagés. Pour
empêcher cette dissolution du caoutchouc, les fils C sont terminés
par des tubes de verre G dans lesquels ils sont scellés. Ces
tubes, plantés dans un bouchon E, sont immergés profondémentdans le liquide de manière qu'en dépit des variations du
niveau dues à la dilatation du liquide, les fils nus restent au
sein du liquide. Cela élimine la possibilité des fuites ohmiques
provenant de la condensation de la vapeur d'eau au pied du
tube. Le multiplicateur M pend par ses fils qui sont maintenus
par de simples fiches J. Pour simplifier le dessin, deux fils
seulement sont indiqués sur la figure 23 au lieu des 16 fils
réels de l'appareil.L'eau qui se condense sur le bouchon E ne produit pas de
fuites ohmiques à cause du bon isolement des fils. Cependant,comme précaution supplémentaire, de l'air chaud et sec est
amené sur cet endroit par le tuyau A. Un simple « fœhn » est
utilisé dans ce but. L'eau est absorbée par du chlorure de
calcium introduit dans la circulation de l'air.
Pour assurer une parfaite obscurité, le récipient TH est
contenu dans une boîte D. On met à l'épreuve l'efficacité de
la protection de cette boîte en observant qu'une forte illumi¬
nation extérieure ne produit aucun changement du courant
résiduel.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 79
La température du liquide est mesurée par un couple thermo¬
électrique T. Le calibrage des Tables Critiques Internationales
a été utilisé.
Certaines difficultés techniques furent rencontrées tout
d'abord. Elles provenaient des fuites ohmiques, des fuites du
liquide et d'une protection incomplète contre la lumière. Elles
furent surmontées bien vite et l'appareil fonctionna parfaite¬ment dorénavant. L'isolement était suffisant pour permettre
des mesures sûres de courants de l'ordre de 10~10 ampères
lorsque la tension totale était de 2500 volts.
c) Les mesures initiales.
Les tubes de la table de la page 71 ont été construits dans
le but de déterminer les constantes thermiques des surfaces
émettrices aussi bien que pour être susceptibles de mesurer
de faibles intensités de lumière. Le traitement par métal
alcalin de leurs électrodes est, comme on l'a vu. une opérationdélicate dont le résultat est, en général, une sensibilité secon¬
daire inégale des diverses électrodes. Il est donc à présumer
que l'émission thermique sera aussi différente suivant les
électrodes. Ce fait est d'ailleurs confirmé par l'expérience.Les hypothèses faites pour la dérivation de l'équation (42) ne
sont donc pas valables et le courant résiduel d'origine thermiquen'est pas proportionnel à l'émission d'un étage donné quel¬
conque.
Dans le cas des émissions thermiques inégales, on peut
établir une propriété générale assez intéressante. Dans ce cas
le courant résiduel I peut être exprimé par la relation
s^n bs
I = T2 ^V" • <46>S = l
Dans cette expression les constantes as tiennent compte des
constantes A de l'équation de Richardson et des gains partiels
correspondants à l'étage de multiplication s, les constantes bs
80 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
sont proportionnelles aux travaux de sortie et n est le nombre
des électrodes émettrices. En posant x = 1/T on peut écrire:
y = log(^) = logl + 21ogz = \og(^ase-bsA (47)
et calculer aisément la valeur de cPy/dx2
d2y_
s h(48)
Dans l'expression (48), s et k sont des indices de sommation
variant entre 1 et n. Si les travaux de sortie, c'est-à-dire les
coefficients bs et bh, sont inégaux, l'expression (48) sera toujours
positive, et par conséquent la courbe de Richardson y = y(x)
pour laquelle le courant résiduel total serait utilisé pour
l'ordonnée, aura toujours une courbure positive. En effet, des
courbes de ce genre eurent toujours des courbures nulles ou
positives dans tous les cas examinés au cours de ce travail.
Cela prouve clairement qu'il y a de très grandes variations
dans les propriétés thermiques d'électrode à électrode, puisque
celles-ci peuvent être décelées par un moyen si indirect et en
dépit de l'effet compensateur provenant des grandes différences
du facteur de multiplication des émissions des diverses élec¬
trodes.
Il résulte de ce qui précède que la contribution au courant
résiduel d'une seule électrode doit être considérée, si l'on veut
obtenir des résultats significatifs. La photo-cathode est tout
indiquée dans ce but, puisque pour elle le gain est le plus grand.C'est pourquoi la diminution du courant résiduel qui résulte
de la suppression de la contribution de la photo-cathode obtenue
par une certaine variation appropriée de la tension de cette
dernière fut considérée comme une mesure de l'émission
thermique et fut étudiée en fonction de la température.Ainsi qu'il a été expliqué, la température des éléments
internes du tube diffère, en général, de celle de l'enveloppe de
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 81
verre, c'est-à-dire de celle du liquide ambiant, et n'égale
celle-ci que dans un état stationnaire. Pour obtenir une indi¬
cation sûre et continue de la température de la photo-cathode,
un couple thermo-électrique fut monté à l'intérieur des tubes
et mis en contact direct avec le métal de la photo-cathode. Il
est difficile de sceller du constantan et du cuivre à travers le
verre (verre doux ou Pyrex) ou bien de sceller deux autres
métaux qui conviendraient à un couple thermo-électrique.C'est pourquoi l'expédient suivant a été adopté 23. Le coupleest constitué par des fils très fins, soudés électriquement aussi
près du verre que possible, aux fils de « nichrome » scellés dans
le pied. A l'extérieur, un fil de constantan est soudé au fil en
contact interne avec le fil de constantan. Il en a été de même
pour le cuivre. De cette manière, dans chaque conducteur,
deux forces électromotrices thermiques opposées furent pro¬
duites, qui se compensent parfaitement à condition qu'il n'y ait
pas de différence de température entre les deux côtés de la paroide verre.
Bien des difficultés furent rencontrées dans les expériences.
Elles peuvent être attribuées au traitement alcalin des élec¬
trodes et peuvent être résumées comme suit:
Premièrement, ainsi qu'il a été dit, c'est seulement par un
hasard heureux que l'émission thermique de la photo-cathode
est la cause prédominante du courant résiduel. Les mesures
sont encore possibles dans le cas contraire, mais leur précision
en souffre et peut même devenir insuffisante.
Deuxièmement, il arrive que la valeur du courant résiduel à
une température donnée dépende de la manière de laquelle
cette température a été atteinte, c'est-à-dire par refroi¬
dissement ou par échauffement. La courbe correspondanteressemble à une courbe d'« hystérèse ». Une relation peut être
établie entre ce phénomène et la distribution des contributions
au courant résiduel des diverses électrodes. Cette distribution
est, en effet, entièrement différente à une température donnée
(celle du laboratoire) après que la température du tube a été
changée et ramenée ensuite à sa valeur originelle. Ces phéno¬
mènes peuvent être attribués aux migrations d'électrode à
électrode du métal alcalin à l'état libre.
6
82 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
Enfin, parfois, après un intense éclairement du tube produi¬sant un fort courant de sortie, le courant résiduel prenait pour
commencer une valeur assez grande et décroissait ensuite
asymptotiquement. La valeur stationnaire était souvent 50 fois
plus petite que la valeur initiale observée et n'était atteinte
dans certains cas qu'après 30 à 40 minutes. Ce phénomène,
quoiqu'il ne soit pas entièrement expliqué, peut aussi être
attribué à des migrations du métal alcalin, parce qu'il ne fut
jamais observé dans les tubes qui ne contenaient pas un tel
métal, ainsi qu'il sera indiqué dans la suite.
En dépit de ces difficultés, l'expérience réussit avec le tube
n° 3 de la table de la page 71. dont les électrodes étaient traitées
au rubidium. Dans ce tube, la contribution au courant résiduel
de la photo-cathode prédominait. Le phénomène de la dimi¬
nution du courant résiduel était particulièrement prononcé.Les mesures ont été faites à l'état stationnaire. L'expériencea été répétée et a fourni chaque fois W = 1,03 volt et des
valeurs de A égales respectivement à 5 x 10~9 et 50 x 10"9
amp/cm2 deg2. A cause de cette variation dans les résultats
et à cause du phénomène de « diminution », ces résultats ne
doivent pas être considérés comme aussi sûrs que ceux quiseront obtenus plus tard pour l'oxyde d'argent traité au
caesium. C'est pourquoi la courbe de Richardson a été omise
dans ce cas.
Le tube n° 1 de la même table, traité au caesium, ne possède
pas de couple thermo-électrique interne, de sorte que seuls les
états stationnaires pouvaient être examinés. Le courant résiduel
était de 0,004 jj.A à -71,3° C, 0,95 jxA à 27° C et 65,0 y.A à
98,4° C. Ces trois valeurs ne suffisent pas à une détermination
autre que très approximative du travail de sortie. Cependant,il est intéressant d'observer la grande sensibilité du tube à
— 71,3° C, puisque à cette température une lumière de 4x 10-11
lumens produit un courant de sortie égal au courant résiduel.
Il est possible que des perfectionnements appropriés de ce
genre de multiplicateur dont les électrodes sont traitées par un
métal alcalin suffiraient à l'obtention des résultats désirés.
Cependant le développement de ce type de multiplicateur fut
arrêté en ce point, grâce à la découverte d'un corps ayant un
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 83
grand coefficient d'émission secondaire et n'exigeant aucun
traitement dans le vide.
d) Le multiplicateur à cloison.
Une méthode habituelle du traitement simultané par un
métal alcalin de beaucoup d'électrodes en argent ne fournit
pas de résultats uniformes ni reproductibles. De plus, le métal
alcalin est particulièrement nuisible à la réduction du courant
résiduel parce que son dépôt sur les isolants augmente les fuites
ohmiques, sa présence produit des places où l'émission froide
est particulièrement forte et enfin sa migration incessante
produit une émission thermique instable.
A la suite d'une investigation générale des surfaces à émis¬
sion secondaire faite dans notre laboratoire, un corps fut décou¬
vert dont la sensibilité ne dépend d'aucun métal alcalin et
qui ne nécessite aucun traitement dans le vide. C'est un alliagedont le coefficient d'émission secondaire varie entre 5 et 6 pour
une vitesse de bombardement primaire de 200 électrons-volts.
Il peut être facilement laminé en feuilles qui peuvent être
ensuite embouties. Une description détaillée de la préparation
et des propriétés de ce corps sera publiée 24.
La découverte de ce matériel élimine la nécessité d'utiliser
des surfaces alcalines pour les électrodes multiplicatrices et
élimine ainsi bien des difficultés. Cependant, la sensibilité
photo-électrique de cet alliage étant nulle (ou du moins non
mesurable) dans la partie visible du spectre, il est encore
nécessaire d'utiliser un autre corps pour la photo-cathode. Si
une surface photo-électrique traitée par un métal alcalin est
retenue pour cet usage, il devient important de pouvoir empê¬
cher les vapeurs alcalines de pénétrer jusqu'aux électrodes
multiplicatrices et leurs supports, puisque leur présence est
nuisible à la réduction du courant résiduel. Pour cela, il serait
désirable d'avoir un multiplicateur dans lequel la photo-cathodeet les électrodes multiplicatrices pussent être entièrement
isolées les unes des autres pendant le traitement de la photo¬cathode. Ce traitement fini, une voie d'accès serait établie entre
les deux parties du tube, à travers laquelle passent les photo-
84 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
électrons qui iraient bombarder la première électrode multi-
plicatrice. Par ailleurs, l'intérêt qu'offre la possibilité de traite¬
ments indépendants des surfaces à émission secondaire et
photo-électrique est plus général, parce que les surfaces ayant
une sensibilité très grande pour un type d'émission ne sont pas
nécessairement les meilleures pour l'autre.
Pour faciliter la détermination des constantes thermiques, il
est désirable que la photo-cathode de ce multiplicateur du type
« à cloison » soit portée directement par la paroi de verre. La
température de celle-ci est alors égale à celle du milieu ambiant
et peut être déterminée sans la complication supplémentaire
Le multiplicateur à cloison.
qu'introduit un couple thermo-électrique interne. Cela restreint
le choix de la forme de la photo-cathode à une forme qui peut
être facilement soufflée et ajoute ainsi une condition au problèmedu dessin d'un système d'optique électronique susceptible de
forcer les photo-électrons à traverser un passage étroit.
Le dessin d'un multiplicateur à cloison fut obtenu grâce aux
méthodes d'optique électronique décrites précédemment et plus
particulièrement grâce au modèle mécanique. La figure 24 repré¬sente une coupe longitudinale du tube. Les électrodes multi-
plicatrices nos 2 à 10 sont identiques à celles du type D. La
première électrode n° 1 porte un écran S pourvu en son centre
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 85
d'un cylindre circulaire R dont l'axe est dans le plan de la
figure. La cloison métallique P, dont les bords s'adaptentexactement à l'enveloppe du tube, porte un trou H coaxial
avec R. Les bords de ce trou peuvent devenir une origine d'émis¬
sion froide. Pour écarter ce danger, un anneau épais, tourné
et poli est soudé à la cloison à cet endroit. L'enveloppe du tube
qui est un cylindre circulaire est terminée par un hémisphère.A l'intérieur, une partie métallisée de cet hémisphère cons¬
titue la photo-cathode. Pendant le traitement de la photo¬
cathode, le trou H est formé par un volet approprié, qui peut
être par exemple une petite plaque de mica posée sur le plancentral de la cloison P, placé horizontalement dans ce but. Les
deux parties du tube sont ainsi entièrement isolées l'une de
l'autre et le métal alcalin introduit par le tube latéral A ne peut
pas contaminer les électrodes multiplicatrices. Le traitement
fini, le trou H est ouvert et le tube est prêt à fonctionner. La
photo-cathode sphérique PC, l'ouverture H et le cylindre R
créent un champ à symétrie axiale qui guide les photo-électronsà travers le trou H et les force à bombarder la partie active
de l'électrode n° 1. L'écran S et le cylindre R séparent presque
complètement les champs cylindriques et à symétrie axiale qui
ne se combinent que dans une très petite région au voisinagede R. A partir de l'électrode n° 1 jusqu'à l'électrode n° 10, la
marche du faisceau électronique se poursuit comme dans le
type D. Le collecteur n° 11 est un cylindre circulaire dont le
dessin fut conçu lors du développement d'un autre genre de
multiplicateur, dans le but d'accroître le champ collecteur25.
Il est utilisé ici parce qu'il est facile de le monter directement
par son fil et d'empêcher ainsi les fuites ohmiques qui résul¬
teraient de son contact avec les supports isolants des autres
électrodes.
L'emploi de l'alliage pour les électrodes et la suppression
du métal alcalin qui en résulte, facilitent beaucoup la cons¬
truction et la prévention des effets nuisibles de l'émission froide
et de la réaction ionique. La structure des électrodes ne doit
plus être « ouverte », ainsi que le nécessitait l'efficacité du
traitement. Les électrodes sont montées sur deux plaques de
mica convenablement perforées dont l'emploi avait été évité
86 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
jusqu'alors à cause des fuites ohmiques résultant de la péné¬tration du métal alcalin dans les couches de clivage. Des bandes
de nickel en forme de U sont fixées sur chacun des deux bords
des électrodes pour éviter complètement la soudure. Les prolon¬
gements passent par les trous des mica, maintenant les électrodes
dans leur position exacte. Deux autres feuilles de mica sont
disposées tangentiellement à l'arrière des électrodes et enfer¬
ment ainsi toute la structure dans une boîte de mica étanche.
Une des extrémités de cette boîte est terminée par la cloison P
et l'autre par un disque de mica. Cet arrangement élimine
complètement la réaction ionique. Les fils reliant les électrodes
au pied du tube peuvent être laissés nus puisque un électron
libéré à leur surface par émission froide ou toute autre, ne peut
pas pénétrer jusqu'aux électrodes multiplicatrices qui sont
complètement protégées par la boîte de mica. Les électrons
libérés dans l'espace compris entre le disque en mica et le pieddu tube sont encore nuisibles puisqu'ils peuvent venir bom¬
barder le fil du collecteur. C'est pourquoi l'on évite avec soin
les points saillants dans cet espace. La figure 25 montre l'assem¬
blage complet juste avant qu'il ne soit scellé, et la figure 26 le
tube fini.
Les multiplicateurs de ce type étaient satisfaisants à bien
des points de vue. Dans plusieurs tubes à 9, 11 et 12 étages
respectivement, le gain moyen par étage était compris entre
3,7 et 4,9 lorsque la tension par étage était de 200 volts. Cela
correspond à un gain total de 106 à 107. Le traitement par métal
alcalin de la photo-cathode est plus simple que celui de l'en¬
semble des électrodes du type précédent et l'on devrait donc
s'attendre à une sensibilité supérieure. Cependant, à cause de
divers accidents, la meilleure sensibilité obtenue n'était que de
10 fiA/lumen. De plus, le champ à la surface de la photo-cathode
(qui dépend du cylindre R dont l'effet est fortement masqué
par la cloison P) est assez faible, de sorte qu'avec les tensions
habituelles le courant photo-électrique n'est pas saturé. Cepen¬dant, ce manque de saturation n'affecte pas la linéarité de
l'émission en fonction de l'intensité de la lumière mais cause
une parte des électrons disponibles qui est inférieure à 40%
lorsque la tension est de 200 volts par étage.
MULTIl'LlCATEl'HS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 87
En général, le courant résiduel est très petit et les fuites
ohmiques et la réaction ionique n'y contribuent pas. Cependant
les effets de l'émission froide étaient encore observés dans
certains cas, à un degré moindre, il est vrai, que dans les tubes
FIg. 25.
Assemblage complet d'un multiplicateur à cloison.
FIk. iS.
Multiplicateur à cloison à 10 étages.
du genre précèdent. L'origine de cette émission froide se
trouvait dans des endroits répartis au hasard dans les divers
tubes, de sorte qu'il n'est pas possible de l'attribuer à une
cause définie.
88 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
e) La détermination des constantes thermiques de la surface
d'oxyde d'argent traitée au caesium.
Le multiplicateur à cloison employé pour cette détermina¬
tion fonctionna parfaitement à tous les points de vue. Il avait
onze électrodes en alliage. Le gain moyen par étage était de 3,7
pour une tension de 200 volts par étage. Le gain total était
de 1,5 X 106 à 200 volts par étage et 600.000 à 180 volts par
étage. La sensibilité de la photo-cathode était de 10 jxA/lumen.Le courant résiduel était presque entièrement d'origine
thermique. Ce fait pouvait être vérifié par l'un quelconque des
essais déjà décrits ou bien de la façon suivante. La photo¬cathode est reliée à la cloison P en fonctionnement normal.
Cependant cet état peut être changé à volonté dans ce tube
parce que la couche d'argent formant la photo-cathode PC,
qui n'est pas en contact interne avec la cloison, est reliée à
un fil séparé scellé dans le verre. Les courants de sortie résultant
respectivement de l'éclairement et de l'obscurité furent mesurés
en fonction de la tension V0 entre la cloison P et la photo¬cathode PC. Ces deux courants sont proportionnels entre eux
de sorte que, pour simplifier, seule la variation du courant
résiduel est représentée par la figure 27. Pour des valeurs
négatives de V0, les électrons libérés ne s'échappent que grâceà leur énergie initiale, ils peuvent être arrêtés complètement
par une barrière de potentiel de quelques volts. Pour des
valeurs positives de V0, le courant croît tout d'abord grâce au
champ collecteur plus intense et à une « optique » améliorée.
Pour des valeurs positives de V0 encore plus grandes, le courant
diminue à cause de la « déconcentration » (ce qui n'est pas
montré sur la courbe de la figure 27). Cette expérience montre
d'une façon indubitable que presque la totalité du courant
résiduel provient bien de l'émission de la photo-cathode.
Lorsque l'émission de la photo-cathode est supprimé, en
rendant V0 = V, c'est-à-dire en reliant la photo-cathode PC
à la première électrode multiplicatrice, il reste encore un
courant résiduel très petit qui dépend légèrement de la tempé¬
rature. Ce courant, provenant de la partie purement multi¬
plicatrice du tube, était compris entre 0,003 et 0,0003 fxA, et
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 89
il fut soustrait du courant résiduel total. Cette correction est
importante surtout aux basses températures.Les résultats des mesures du courant thermique en fonction
de la température sont illustrés par la courbe de la figure 28.
L'abcisse est proportionnelle à l'inverse de la températureabsolue. L'ordonnée est le logarithme de la densité du courant
émis à la photo-cathode. L'aire de la partie effective de la
pA I
0 16
^~ ~^
/^^\/
^>
/^ 0.12
V.* \
////
\ .
1
.^"A_L V0 VOLTS
12
Fig. 27.
Courant résiduel en fonction du potentiel de la photo-cathode dansun multiplicateur à cloison.
photo-cathode fut déterminée en explorant celle-ci avec une
petite tache lumineuse. Elle fut trouvée égale à 3,3 cm2. La
tension par étage fut maintenue à 180 volts, ce qui correspondà un gain total de 600.000.
La courbe qui suit le mieux les points expérimentaux a une
légère courbure positive. La présence de celle-ci peut être
expliquée au moyen des deux hypothèses suivantes:
90 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
a) Il existe, en dehors de l'émission thermique, une autre
émission constante provenant de la photo-cathode, émission
qui ne dépend pas de la température. Cette émission est déter¬
minée de telle sorte que quand elle est déduite de l'émission
360-340°—320°—300°— 280° 260 > ?A<\\oc
j
T°
K
cA
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\°
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r \
s?8 30 32 3 3 6 3 S i\Q\
Fig. 28.
Courbe de Richardson pour l'oxyde d'argent traité au ceesium.
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 91
totale, la courbe résultante est aussi voisine que possible d'une
droite de Richardson. Un choix de 3 X 10~17 amp/cm2, c'est-
à-dire approximativement 200 électrons par cm2 et par seconde,
correspond à la ligne pointillée que l'on remarque aux basses
températures (1/T = 3,9 à 4,2 X 10~5). Bien des phénomènes
pourraient être invoqués pour expliquer cette émission secon¬
daire, tels que, par exemple, l'émission froide, la radiation
cosmique, la radio-activité des parois de verre, etc. Ceux-ci ne
seront pas examinés parce que l'hypothèse de cette émission
constante n'a été faite que pour expliquer la forme de la
courbe expérimentale.
b) On a vu (voir équation 48) que lorsqu'un courant est la
somme d'émissions thermiques diverses caractérisées toutes
par des travaux de sortie différents, la courbure de la courbe
de Richardson est toujours positive. Par conséquent, la cour¬
bure positive réduite, mais non nulle, de la courbe déjà corrigéesuivant l'hypothèse a) peut être expliquée en supposant que
la photo-cathode n'est pas sensibilisée uniformément et que le
travail de sortie n'est pas le même pour tous les points de
sa surface.
C'esc ainsi que, en réalité, il n'existe pas de constantes A
et W bien définies qui caractérisent la surface. Cependant, on
peut dessiner une droite qui passe au mieux par les points
expérimentaux, avec l'hypothèse de la validité absolue de
l'équation de Richardson. On peut alors envisager que l'équa¬tion correspondante
8750
I = 2,5 x 10"7T2e T amp/cm-2 (49)
représente les données expérimentales avec la meilleure approxi¬mation possible. Les constantes sont donc A = 2,5 X 10"'
amp/cm2 deg2 et W = 0,75 volt. De plus on peut supposer rai¬
sonnablement, grâce à l'hypothèse b), que les tangentes de la
courbe aux températures hautes et basses respectivement,
correspondent aux cas extrêmes déterminant les limites de
variation du travail de sortie à la surface de la photo-cathode.Les constantes de ces droites sont respectivement A = 1,6 X
92 LE COURANT RESIDUEL DANS LES
1(T6 amp/cm2 deg2, W = 0,80 volt et A = 2,3 x 10~8 amp/cm2 deg2, W = 0,70 volt.
Ces mesures ont montré premièrement la non-uniformité
de l'émissivité de la photo-cathode et deuxièmement, que si
l'opposé n'en est pas moins admis et l'écart entre les courbes
expérimentales et théoriques est attribué à des erreurs expéri¬
mentales, le travail de sortie est W = 0,75 volt (± 0,05 volt)
et la constante A, A = s x 2,5 x 10~7 amp/cm2 deg2
(0,1 < s < 10).Les mesures faites avec un multiplicateur magnétique dont
les électrodes étaient aussi d'oxyde d'argent traité au caesium
fournirent un travail de sortie de W de 0,70 volt et une cons¬
tante A = 2,2 X 10~7 amp/cm2 deg2. Cette détermination n'est
pas aussi sûre que celle qui vient d'être décrite parce que les
contributions au courant résiduel de la réaction ionique et de
l'émission thermique des autres électrodes ne furent pas élimi¬
nées. Cependant, il est remarquable que les valeurs trouvées
soient comprises entre les limites expérimentales des mesures
ci-dessus.
Il ressort des mesures et autres données accumulées au
cours de ce travail que l'émission thermique de l'oxyde d'argent
traité au caesium est très variable. C'est pourquoi, à moins
que l'on n'arrive à perfectionner une méthode susceptible de
fournir des résultats reproductibles, il n'y a aucun intérêt à
déterminer très exactement des constantes thermiques. La
valeur du travail de sortie trouvée peut être comparée à celle
que l'on peut déduire du seuil de fréquence. Les expériences
précédentes montrent indubitalement que le courant résiduel
est, pour finir, dû à l'émission thermique, et fournissent, de
plus, une première approximation des constantes thermiques.
Le seuil en longueur d'onde pour cette surface est compris
entre 12.000 et 16.000 Â, ce qui correspond à un travail de
sortie de 0,77 à 1,03 volt. Les valeurs obtenues par des phéno¬
mènes thermiques et photo-électriques sont donc approxima¬tivement égales, la première étant légèrement inférieure à la
seconde.
L'intensité du courant résiduel à la plus basse températureatteinte présente un intérêt tout particulier. Elle était de
MULTIPLICATEURS D'ÉLECTRONS ÉLECTROSTATIQUES 93
1,1 X 10"10 ampères à — 28° C. Pour le gain et la sensibilité de
la photo-cathode observés, un courant de sortie égal à ce
courant résiduel serait obtenu par une lumière de 2 X 10"11
lumens,
V. CONCLUSIONS
Les conclusions principales de ce travail peuvent être
résumées comme suit:
1. L'élaboration de plusieurs méthodes expérimentales
permet de résoudre aisément et rapidement des problèmes
compliqués relatifs aux trajectoires électroniques dans des
champs électrostatiques. Grâce à ces méthodes, on a réussi à
réaliser un multiplicateur électrostatique satisfaisant à toutes
les conditions qui dépendent de la disposition et de la forme des
électrodes.
2. Les causes du courant résiduel ont été découvertes. Elles
sont:
a) les fuites ohmiques du circuit du collecteur;
b) l'effet de l'ionisation de l'atmosphère gazeuse du tube;
c) l'émission froide provenant des conducteurs contenus dans
le tube;
d) l'émission thermique des électrodes émettrices.
On a imaginé les moyens de supprimer complètement les
contributions des causes a) et b) et de supprimer dans la plupartdes cas celle de la cause c). Toutefois, en dépit de toutes les
précautions prises, dans quelques tubes le courant résiduel
provenait encore, en grande partie, de l'émission froide.
3. La nature fondamentale de la contribution au courant
résiduel de l'émission thermique étant reconnue, le multiplica¬teur a pu servir à la détermination des constantes thermiquesde deux surfaces photo-émettrices d'oxyde d'argent traité par
des métaux alcalins. Pour la surface traitée au caesium, on
trouve un travail de sortie de 0,75 volts (± 0,05 volt) et une
constante A de s x 2,5 X 10""7 amp/cm2 deg2 (0,1 < s < 10).
94 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
Pour la surface traitée au rubidium, le résultat, malheureuse¬
ment moins bien fondé, a été que le travail de sortie était
de 1 volt et la constante A de l'ordre de 10~8 amp/cm2deg2.
4. Dans les meilleurs tubes obtenus, l'intensité de la lumière
qui produit un courant de sortie égal au courant résiduel était
égale à 2,5 X 10"11 lumens à — 28° C.
Il est donc possible de construire un multiplicateur photo¬
électrique à concentration purement électrostatique d'une
sensibilité donnée aussi grande que l'on veut et dont le courant
résiduel ne dépend que de l'émission thermique de la photo-
.
cathode (puisque l'émission thermique des électrodes en alliageest négligeable). Par conséquent, le rapport des émissions
thermiques à l'émission photo-électrique déterminée égale la
capacité du multiplicateur à mesurer des lumières faibles et
constantes. Pour d'autres surfaces que celles traitées par un
métal alcalin, ce rapport caractéristique peut être plus petit.Cela est le cas, par exemple, pour une surface récemment
décrite 26 d'un alliage de caesium et de bismuth évaporé sur
de l'argent.Grâce à la réduction du courant résiduel, le facteur décisif
intervenant dans les applications du multiplicateur dans le
domaine de l'effet des lumières de faible intensité est, en pra¬
tique, le souffle ou le « shot effect » du courant photo-électrique.C'est le cas même si l'emploi des surfaces alcalines est conservé
et que le courant résiduel d'origine thermique n'est pas aussi
petit qu'il pourrait l'être avec une surface photo-émissive à
caractéristiques plus favorables. Il est facile de s'en rendre
compte en considérant que dans un multiplicateur dont la
photo-sensibilité (10 nA par lumen) et le gain (600.000) ne sont
que passables, la valeur la plus petite du courant résiduel
(9 x 10"11 amp) observée à la température de —28° C. cor¬
respond à une émission originelle de la photo-cathode d'environ
1000 électrons par seconde.
Un refroidissement convenable des surfaces alcalines ou
l'emploi éventuel d'une autre surface photo-émettrice suffit donc
à réduire le courant résiduel jusqu'à un degré où il n'est plusle facteur décisif pour la possibilité d'emploi du multiplicateur à
MULTIPLICATEURS D'ELECTRONS ELECTROSTATIQUES 95
opérer avec de petites intensités de lumière. Le « shot effect »
devenant alors ce facteur décisif, il n'est plus possible d'ap¬
porter une amélioration nouvelle a l'appareil puisque ce phéno¬
mène dépend de la nature même de l'électricité qui est corpus¬
culaire
VI RÉFÉRENCES
1 II n'est pas possible de donner ici une bibliographie complètede tous les travaux concernant l'émission secondaire On peut en
trouver une, et un excellent résume du cujet, par R Kollath,
Physikahsche Zeitschrift, vol 138, n° 7, p 202 204 1937
2 Des brevets de multiplicateurs d'électrons ont ete pris déjà en
1919 Parmi les premiers inventeurs on peut citer Slepien, Jarvis,
Blair, Iams et Farnsworth
3« Télévision by Electron Image Scannmg » Journal of the
Franklin Institute, vol 218 Oct 1934, p 441 444, par P T Farns¬
worth
4« The secondary émission électron multiplier » par Dr V K
Zworykin, Dr G A Morton et L Malter Institute of Radio
Engineers, vol 24, n° 3 Mars 1936
5« The electrostatic électron multiplier », par Dr V K Zworykin
et Jan Rajchman Proc of the Institute of Radio Engineers (1938)6 «A Theory of IN oise for Electron Multiphers », pirW Shockley
et J R Pierce Proc Institute of Radio Engineers, vol 26, n° 3
Mars 1938
7 Un multiplicateur a ete utilise dans ce laboratoire pour un
photospectrometre-enregistreur pour corps luminescents a rayons
cathodiques Cet appareil sera décrit bientôt dans The Review of
Scientific Instruments par Dr V K Zworykin sous le titre «An
Automatic Recordmg Spectrophotometer for Cathode-lummescent
Materials > Un multiplicateur photo électrique construit dans ce
laboratoire est en usage dans le département de «pectroscopie du
« Massachusetts Institute of Technology » dirige par le Prof G R
Harnson8 l n multiplicateur photo électrique construit dans ce laboratoire
est en usage a l'observatoire du Cahfornia Institute of Technologj >
a Pasadena, Cahfornia
9 Geometrische Elektronenoptik, par E Bruche et O Schfrzfr
Juhus Sprmger, 1934
10« Mechanical Tracer for Electron Trajectones » par D Gabor
JSature p 373, vol 139 27 février 1937
11 Résultats inédits de D langmuir, de la «RC4 Radiotron
Co > de Harnson N -J
12 Electronics, par Dr H Sallinger, de la « Farnsworth Co » Oct
1937, p 50
13( The motion of an électron in a two dimensional electrostatic
field > par P II J KLEY^LN Philips Technical Review, vol 12
n° 11 p 321 352 ]\ov 1937
96 LE COURANT RÉSIDUEL DANS LES
14 M. L. R. Snyder, de notre laboratoire, contribua énormément
à la réalisation de cet appareil.16 Les types A, B, C, D sont en instance de brevet (U.S. patents).14 Les calculs ont été faits par le D1 E. G. Ramberg, de notre
laboratoire.17 Le Dr E. W. Pike, de notre laboratoire, aida à réaliser ces flans.18 Ce régulateur fut conçu par M. A. W. Vance, de notre labo¬
ratoire.19 «A vacuum tube microammeter », par A. W. Vance. Review of
Scientific Instruments, déc. 1936, vol. 7, p. 49.
20 Tiré d'un travail inédit du Dr E. R. Piore.
81 Voir, par exemple, De Boer, Emission and Absorption Pheno-
mena.
22 Voir, par exemple, Photocells and Their Applications, par
D' V. K. Zworykin et Dr E. D. Wilson (1934). Ed. John Wiley& Sons, Inc., New-York.
23 Cet expédient est l'idée de M. L. E. Flory, de notre laboratoire.
24 Cette description sera publiée par le Dr V. K. Zworykin,M. H. W. Leverenz et le Dr J. Ruedy, de notre laboratoire.
26 Tiré d'un travail inédit de M. R. L. Snyder.26 Gôrlich und Saur, Zeit. j. Instrumentenkunde, LVI, p. 423
(1936).
VII. REMERCIEMENTS
Je désire exprimer ici toute ma gratitude au Dr V. K.
Zworykin, directeur des Laboratoires de recherches électriques
de la « R.C.A. Manufacturing Company », qui a bien voulu
m'encourager à entreprendre ce travail dans ses laboratoires et
qui ne m'a pas épargné ses conseils les plus précieux au cours
de toutes mes recherches.
A mes collègues les Drs G. A. Morton et E. G. Ramberg
j'adresse mes remerciements très sincères pour maints échangesde vue pleins d'inspiration.Au Dr E. W. Pike et à M. E. L. Snyder je suis redevable
pour une collaboration relative à de nombreux problèmes
d'optique électronique.
Les Drs L. Malter et E. G. Ramberg ont bien voulu vérifier
le texte anglais et mon ami M. Koulikowitch le texte français,
ce dont je leur tiens bien gré.
Finalement, je tiens aussi à remercier M. M. S. Cytowic,
souffleur de verre, dont l'habileté remarquable a permis de
mener ce travail à bonne fin.
TABLE DES MATIÈRES
Pages
I. Introduction 9
IL Les trajectoires électroniques dans le champ
ÉLECTROSTATIQUE 14
1. Considérations analytiques 14
2. Le bain electrolytique et les méthodes gra¬
phiques 17
3. Une propriété générale 20
4. Le modèle mécanique et les vérifications élec¬
troniques 23
III. Le développement d'un multiplicateur électro¬
statique31
1. Conditions à remplir 31
2. L'évolution du développement 33
3. L'appareillage pour les essais 40
IV. Le courant résiduel 42
1. Introduction 42
2. Les fuites ohmiques 43
3. L'effet des ions 46
a) Introduction 46
b) Théorie 47
c) Les données expérimentales 52
d) L'élimination de la réaction ionique .60
4. L'émission froide 64
a) Introduction 64
b) Expériences 65
c) L'élimination des effets de l'émission
froide 68
d) Résultats 70
98 LE COURANT RESIDUEL
Pages
5. L'émission thermique 73
a) Introduction 73
b) L'appareillage expérimental 75
c) Les mesures initiales 79
d) Le multiplicateur à cloison 83
e) La détermination des constantes ther¬
miques de la surface d'oxyde d'argenttraitée au caesium 88
V. Conclusions 93
VI. Références 95
VII. Remerciements 96