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La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XIII - n ° 6 - novembre-décembre 2010 | 177 DOSSIER THÉMATIQUE Radiofréquence dans l’endobrachyœsophage : indications, résultats Radiofrequency ablation of Barrett’s esophagus: to whom and for which results? Frédéric Prat* * Unité d’endoscopie, service gastroentérologie, hôpital Cochin, Paris. L a muqueuse de Barrett, couramment appelée en France endobrachyœsophage (EBO), est une lésion précancéreuse de l’œsophage liée au reflux gastro-œsophagien et caractérisée par une néoplasie de type intestinal. Elle est relative- ment fréquente, puisque sa prévalence est estimée à 1,6 % de la population générale (1), et qu’on la découvre au cours d’au moins 1 % des endoscopies hautes, quelle qu’en soit l’indication (2, 3). Chez les patients atteints de reflux gastro-œsophagien (RGO), la prévalence de la muqueuse de Barrett peut atteindre 15 % (2, 3). La transformation maligne en adénocarcinome suit une séquence métaplasie intestinale-dysplasie de bas grade (DBG)-dysplasie de haut grade (DHG)-cancer. La prévalence de la dysplasie, tous stades confondus, est de l’ordre de 10 % en cas d’EBO court (moins de 3 cm de hauteur) et de 15 à 25 % en cas d’EBO long, selon les séries (3, 4). L’incidence de l’adénocarcinome sur EBO est estimée à 0,5 % par an (4). Actuellement, on dénombre en France environ 1 000 nouveaux cas d’adénocarcinome sur Barrett chaque année, qui sont à mettre en perspective avec les 24 000 œsophages de Barrett diagnostiqués sur la même période (4). La dysplasie est le seul marqueur disponible du risque de cancer, mais c’est un marqueur imparfait, car la reconnaissance de la DBG est à la fois inconstante (d’un examen à l’autre) et variable (d’un histopa- thologiste à l’autre) ; cette variabilité est aussi vraie pour la distinction DHG/carcinome intramuqueux ; enfin, il n’y a pas de technique endoscopique fiable d’identification des foyers de DBG/DHG, car les lésions sont volontiers multifocales. La muqueuse de Barrett, communément appelée endobrachyœsophage, est une lésion précancé- reuse d’évolution lente fréquemment rencontrée lors d’une endoscopie haute, particulièrement en cas de reflux gastro-œsophagien. Le seul marqueur du risque évolutif est la présence d’une dysplasie épithéliale sur les biopsies endoscopiques systé- matiques. L’enjeu de la prise en charge endoscopique est la prévention du cancer, soit par la détection et la destruction de lésions de haut grade, soit par l’éradi- cation de lésions potentiellement évolutives, comme la DBG. Nous disposons de recommandations de surveillance et de prise en charge de la muqueuse de Barrett selon les aspects histologiques observés sur des biopsies systématiques. Les recommandations de la Société française d’endoscopie digestive (SFED) rejoignent celles des sociétés savantes américaines, notamment celles de l’AGA et de l’ASGE (5, 6). Selon ces recommandations, la métaplasie intestinale sans dysplasie doit être surveillée, alors que la DHG doit être traitée. En cas de DBG, une surveillance est également recommandée, plus étroite qu’en cas de simple métaplasie. Cette attitude pourrait être remise en cause par l’évolution des techniques endoscopiques. Les circonstances qui imposent une attitude théra- peutique – en dehors du cas de l’adénocarcinome invasif sur Barrett, dont le traitement est bien encadré par des recommandations oncologiques – sont la présence d’une DHG et/ou d’un carcinome in situ (intra-épithélial) ou intramuqueux (respectant la muscularis mucosae) [7, 8]. Ces lésions peuvent être focalisées et bien visibles en endoscopie, sous la forme d’une surélévation, d’une irrégularité de surface muqueuse ou d’une zone dyschromique. La mise en évidence de ces anomalies muqueuses est

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La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XIII - n° 6 - novembre-décembre 2010 | 177

DOSSIER THÉMATIQUE

Radiofréquence dans l’endobrachyœsophage : indications, résultats Radiofrequency ablation of Barrett’s esophagus: to whom and for which results?

Frédéric Prat*

* Unité d’endoscopie, service gastroentérologie, hôpital Cochin, Paris.

La muqueuse de Barrett, couramment appelée en France endobrachyœsophage (EBO), est une lésion précancéreuse de l’œsophage liée

au reflux gastro-œsophagien et caractérisée par une néoplasie de type intestinal. Elle est relative-ment fréquente, puisque sa prévalence est estimée à 1,6 % de la population générale (1), et qu’on la découvre au cours d’au moins 1 % des endoscopies hautes, quelle qu’en soit l’indication (2, 3). Chez les patients atteints de reflux gastro-œsophagien (RGO), la prévalence de la muqueuse de Barrett peut atteindre 15 % (2, 3). La transformation maligne en adénocarcinome suit une séquence métaplasie intestinale-dysplasie de bas grade (DBG)-dysplasie de haut grade (DHG)-cancer. La prévalence de la dysplasie, tous stades confondus, est de l’ordre de 10 % en cas d’EBO court (moins de 3 cm de hauteur) et de 15 à 25 % en cas d’EBO long, selon les séries (3, 4). L’incidence de l’adénocarcinome sur EBO est estimée à 0,5 % par an (4). Actuellement, on dénombre en France environ 1 000 nouveaux cas d’adénocarcinome sur Barrett chaque année, qui sont à mettre en perspective avec les 24 000 œsophages de Barrett diagnostiqués sur la même période (4). La dysplasie est le seul marqueur disponible du risque de cancer, mais c’est un marqueur imparfait, car la reconnaissance de la DBG est à la fois inconstante (d’un examen à l’autre) et variable (d’un histopa-thologiste à l’autre) ; cette variabilité est aussi vraie pour la distinction DHG/carcinome intramuqueux ; enfin, il n’y a pas de technique endoscopique fiable d’identification des foyers de DBG/DHG, car les lésions sont volontiers multifocales.La muqueuse de Barrett, communément appelée endobrachyœsophage, est une lésion précancé-

reuse d’évolution lente fréquemment rencontrée lors d’une endoscopie haute, particulièrement en cas de reflux gastro-œsophagien. Le seul marqueur du risque évolutif est la présence d’une dysplasie épithéliale sur les biopsies endoscopiques systé-matiques.L’enjeu de la prise en charge endoscopique est la prévention du cancer, soit par la détection et la destruction de lésions de haut grade, soit par l’éradi-cation de lésions potentiellement évolutives, comme la DBG. Nous disposons de recommandations de surveillance et de prise en charge de la muqueuse de Barrett selon les aspects histologiques observés sur des biopsies systématiques. Les recommandations de la Société française d’endoscopie digestive (SFED) rejoignent celles des sociétés savantes américaines, notamment celles de l’AGA et de l’ASGE (5, 6). Selon ces recommandations, la métaplasie intestinale sans dysplasie doit être surveillée, alors que la DHG doit être traitée. En cas de DBG, une surveillance est également recommandée, plus étroite qu’en cas de simple métaplasie. Cette attitude pourrait être remise en cause par l’évolution des techniques endoscopiques.Les circonstances qui imposent une attitude théra-peutique – en dehors du cas de l’adénocarcinome invasif sur Barrett, dont le traitement est bien encadré par des recommandations oncologiques – sont la présence d’une DHG et/ou d’un carcinome in situ (intra-épithélial) ou intramuqueux (respectant la muscularis mucosae) [7, 8]. Ces lésions peuvent être focalisées et bien visibles en endoscopie, sous la forme d’une surélévation, d’une irrégularité de surface muqueuse ou d’une zone dyschromique. La mise en évidence de ces anomalies muqueuses est

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Résumé » La muqueuse de Barrett (EBO) est une lésion précancéreuse d’évolution lente au sein de laquelle les

foyers de dysplasie sont souvent difficiles à identifier. Leur éradication pourrait réduire l’incidence de l’adénocarcinome de l’œsophage et alléger la surveillance endoscopique des patients. L’apparition récente de la technologie Halo®, qui utilise la radiofréquence administrée par voie endoscopique comme méthode de destruction de l’EBO, est une option séduisante en cas de dysplasie de haut grade multifocale, ou en complément de la mucosectomie endoscopique. Son application à l’éradication du Barrett en dysplasie de bas grade ou sans dysplasie ne peut être envisagée qu’après validation par des études prospectives.

Mots-clésRadiofréquenceExérèseEndobrachy-œsophage

KeywordsRadiofrequency

Ablation

Barrett’s esophagus

aidée par l’endoscopie en haute définition associée à la préparation de la muqueuse par l’acide acétique à 1 % et aux techniques de magnification endoscopique telles que le zoom et les “colorations virtuelles” ou filtres optiques comme le NBI® (Olympus), le FICE® (Fujinon) ou le I-Scan® (Pentax) [9, 10]. Chez d’autres patients, les lésions dysplasiques sont au contraire multifocales et alors souvent peu visibles, même avec l’aide de ces techniques. En cas de DHG ou de cancer superficiel, le traitement de référence est l’œsophagectomie. Cette option est cependant associée à une mortalité opératoire de 2 à 5 % et à une morbidité significative, qui la rendent discutable en regard de l’efficacité des moyens endoscopiques disponibles. L’intérêt de la mucosectomie endosco-pique est maintenant bien établi pour les lésions focalisées et visibles, pour autant qu’elles n’imposent pas une exérèse circonférentielle, associée à environ 30 % de sténoses œsophagiennes sequellaires. La dissection endoscopique sous-muqueuse est une alternative permettant l’exérèse carcinologique en monobloc de lésions de plus de 2 cm de diamètre. En revanche, ces techniques endoscopiques ne sont pas parfaitement adaptées au traitement des lésions de DHG ou cancers, superficielles multifocales, car cette situation impliquerait un traitement étendu avec une morbidité per- et postopératoire plus importante. La thérapie photodynamique (PDT) est une option thérapeutique réservée à de tels cas lorsque la chirurgie n’est pas envisagée en raison de comorbidités sévères. Cependant, elle est associée à un risque de sténose séquellaire d’environ 30 % lorsqu’elle est appliquée de façon circonférentielle, elle ne permet l’éradication complète des lésions que dans environ 70 % des cas, et elle impose des contraintes spécifiques liées au risque de photo-sensibilisation (isolement de plusieurs jours dans la pénombre). La muqueuse de Barrett doit être traitée lorsqu’elle est le siège d’un adénocarcinome ou d’une dysplasie de haut grade (DHG). Dans les formes superficielles (DHG et cancer T1is ou T1m), le trai-tement endoscopique est maintenant préféré à la chirurgie.L’application de radiofréquence, telle qu’elle a été développée dans le système Halo®, permet un dépôt de chaleur à la fois suffisamment homogène pour

ne pas laisser subsister d’îlots de muqueuse non traités et suffisamment superficiel pour ne détruire essentiellement que la couche muqueuse, atté-nuant le risque de sténose associé aux exérèses et ablations plus profondes. Le principe du procédé Halo® est l’application sur la muqueuse d’une antenne de radiofréquence (figures 1a et 1b) faite de multiples éléments juxtaposés dans lesquels le passage du courant électrique assure un échauf-fement suffisant pour entraîner une nécrose de coagulation et une diffusion limitée à 1 mm, alors que la profondeur d’une métaplasie ou d’une DBG au sein d’un EBO est de l’ordre de 500 µm (figure 1c). Des biopsies systématiques des zones traitées après radiofréquence, y compris les biopsies profondes et macrobiopsies par mucosectomie, ont montré que la néomuqueuse malpighienne régé-nérée avait une morphologie et un comportement biologique identiques à ceux de l’épithélium normal (11, 12). La présence de glandes enterrées sous la couche squameuse semble exceptionnelle, mais a toutefois été rapportée dans deux cas (13). La profondeur traitée étant faible, le risque théorique de sténose cicatricielle post-procédure est réduit. Certaines contre-indications doivent cependant être respectées, comme la présence d’une sténose préexistante ou d’une œsophagite sévère. L’homo-généité de l’application est assurée par deux types de dispositifs : le Halo 360® (figure 1b) est une antenne arrangée autour d’un ballon gonflé de façon à épouser parfaitement le calibre de l’œsophage, grâce à un précalibrage par un ballon dédié. Cet applicateur permet d’obtenir une nécrose circon-férentielle superficielle sur une hauteur de 3 cm. Plusieurs applications successives sont possibles, avec un chevauchement permettant le traitement d’un œsophage de Barrett jusqu’à environ 9 cm de hauteur totale. Le Halo 360® est introduit sur un fil-guide et l’application est faite sans contrôle endoscopique, après avoir pris les repères de hauteur lors d’une endoscopie de repérage. Le second dispo-sitif, appelé Halo 90®, est un applicateur sectoriel adapté à l’extrémité (figure 1a) de l’endoscope et permettant le traitement de secteurs de muqueuse pathologique sous contrôle de la vue. Il est parti-culièrement adapté au traitement d’îlots résiduels après traitement par Halo 360® ou à la destruc-

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DOSSIER THÉMATIQUE

tion de languettes. La destruction est faite sur un secteur de 90°. Quel que soit le dispositif utilisé, deux applications successives de radiofréquence sont nécessaires pour obtenir une ablation effi cace. Le coagulum muqueux doit être décapé mécanique-ment entre les deux applications (figure 2, p. 180). Une seule séance de radiofréquence n’est généra-lement pas suffi sante pour assurer la destruction complète de la muqueuse. Suivant l’étendue et la complexité des lésions, deux à quatre séances sont habituellement nécessaires. La réalisation du traite-ment par radiofréquence nécessite une anesthésie générale et une intubation. Le traitement peut être administré sur un mode ambulatoire, dans le cadre d’une hospitalisation de jour. Actuellement, le coût en France d’une séance de radiofréquence par le système Halo® est estimé à environ 1 500 euros, hors coût du générateur.L’ablation épithéliale par radiofréquence est un procédé endoscopique peu invasif permettant une destruction homogène de la muqueuse de Barrett, de façon circonférentielle ou sectorielle suivant la topographie des lésions. Le traitement est faisable en ambulatoire. En général, au moins deux séances sont nécessaires pour obtenir l’éradication de la muqueuse pathologique.Les tableaux présentés résument quelques-uns des principaux résultats de la radiofréquence dans le traitement du Barrett. La principale étude a été publiée par Shaheen et al. en 2009 (14). Cette étude prospective randomisée multicentrique établit une base scientifi que solide pour montrer que la radiofré-quence permet d’obtenir l’éradication de la dysplasie de haut et bas grade avec une faible morbidité liée aux gestes (tableau I). Dans cette étude, le suivi des patients était limité à un an, mais des résultats à cinq ans ont récemment été publiés (15) : chez 50 patients en réponse complète à deux ans et demi, 92 % étaient encore en réponse complète à cinq ans. Il s’agissait cependant de patients initialement sans dysplasie, et il reste à savoir si le maintien de la réponse est aussi favorable chez les patients pour lesquels le traitement a une indication indiscutable, c’est-à-dire la DHG et le cancer superfi ciel.L’effi cacité de la radiofréquence est maintenant bien établie, avec des taux d’éradication des foyers de dysplasie et de la muqueuse métapla-sique dépassant ceux des autres méthodes, et une morbidité très faible. Les résultats endoscopique et histologique semblent se maintenir plusieurs années.L’éradication des lésions de DBG par radiofréquence pourrait aussi à l’avenir faire partie de ces indications

Tableau I. Principaux résultats de l’étude prospective multicentrique randomisée américaine (d’après 14).

Éradication (%)

DBG DHG Global (MI) Progression à 12 mois

Incidence cancer

Radiofréquence 90,5 81 77,4 3,6 1,2

Contrôle 22,7 19 2,3 16,3 9,3

p < 0,001 p = 0,03 p = 0,04

MI : métaplasie intestinale.

Figure 1c. Le générateur de radiofréquence.

HALO 360

HALO 90

Figures 1a et 1b. Les applicateurs Halo 90® et Halo 360®.

HALO 90

HALO 360

(tableau II, p. 180). Sans entrer dans le détail d’un débat complexe, il existe de forts arguments pour défendre cette option, tant scientifi ques (la relation DBG-cancer) que médico-économiques (des études de coût-effi cacité suggèrent que l’ablation du Barrett

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DOSSIER THÉMATIQUENouvelles techniques

endoscopiques Radiofréquence dans l’endobrachyœsophage : indications, résultats

est intéressante si elle élimine défi nitivement au moins 30 % de la DBG ou si elle est la stratégie dominante par rapport à la surveillance habituelle ou à l’absence de surveillance) [16, 17]. Cette stratégie devrait même, selon certains, être étendue à l’éradi-cation de la métaplasie sans dysplasie (tableau III). Cette attitude ne sera vraiment défendable dans nos systèmes de santé que si elle peut se substituer presque totalement à la surveillance endoscopique, ce qui ne pourra être certain que dans quelques années. Une étude européenne est en cours, et une autre démarre en France, afi n de valider la stratégie d’éradication de la DBG sur Barrett par la radiofré-quence.La longueur du Barrett pourrait être une limite rela-tive au traitement par radiofréquence, avec l’aug-mentation du risque de complications. Vassiliou et al. ont récemment rapporté une morbidité de 12 % dans une série de Barrett longs (8 à 12 cm) [18]. La réali-sation de mucosectomies pour des lésions focalisées de DHG ou de cancer n’est pas une contre-indication à la radiofréquence. Au contraire, celle-ci pourrait être le complément naturel de la mucosectomie lorsque cette dernière n’a pas éliminé la totalité du Barrett, car le risque de foyer dysplasique synchrone ou métachrone est accru lorsqu’un foyer a déjà été identifi é. L’effi cacité de cette combinaison a déjà été rapportée par Gondrie et al. en 2008 (19).La radiofréquence peut actuellement être consi-dérée comme le traitement de référence de la muqueuse de Barrett avec dysplasie de haut grade ou cancer superfi ciel multifocal. Elle peut être utilisée en complément de la mucosectomie en cas de dysplasie résiduelle après exérèse d’un foyer de DHG ou de cancer focalisé. Des études sont en cours visant à évaluer son intérêt pour éradiquer la DBG, voire la métaplasie intestinale sans dysplasie.Actuellement, il n’existe pas de méthode de trai-tement du Barrett qui assure 100 % de réponse complète avec une garantie de durabilité du résultat de plus de dix ans, sans effet secondaire et pour un coût plus bas que la surveillance aujourd’hui recom-mandée. En attendant, la radiofréquence est une méthode qui présente un bon profi l de sécurité et d’effi cacité. Elle constitue aussi une réponse appro-priée à la diffi cile prise en charge de la dysplasie multifocale, malgré l’absence de pièce histologique. Son coût élevé doit encore être justifi é par la modi-fi cation des règles de surveillance qu’elle pourrait induire. ■

Figures 2.a. Muqueuse de Barrett comportant une partie circulaire et des languettes, avant trai-tement.b. Aspect immédiat après une séance de radiofréquence par Halo 360® et décapage mécanique du coagulum épithélial.c. Mise en évidence au contrôle endoscopique d’un îlot résiduel de Barrett : traitement complémentaire par Halo 90®.d. Aspect immédiat après application de radiofréquence, avant décapage, montrant la nécrose de coagulation superfi cielle et homogène.

a

c

b

d

Tableau II. Principaux résultats dans la littérature de l’effi cacité de la méthode de destruction par radiofréquence endoscopique de l’EBO en DBG.

Auteur Année n Suivi (années)

Taux d’éradication DBG (%)

Taux d’éradication EBO (%)

p

Fleischer et al. 2008 69 2,5 DM 97 < 0,05

Gondrie et al. 2008 12 1 100 (n = 1) 100 DM

Sharma et al. 2008 10 1 100 90 < 0,01

Sharma et al. 2009 63 2 87 (n = 39) 79 < 0,001

Shaheen et al. 2009 127 2 90,5 77,4 < 0,001

DM : Donnée manquante

Tableau III. Relation entre risque de cancer sur Barrett et stade des lésions, avant et après traitement d’éradication (d’après Wani S. Am J Gastro 2009;104:502).

Incidence adénocarcinome (/1 000 patients-année)

Sans traitement Après éradication Barrett

Sans dysplasie 6 1,6

DBG 17 11,6

DHG 66 17

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DOSSIER THÉMATIQUE

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Références bibliographiques

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