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KERSHAW (Greet) - Mau Mau from Below. - Oxford-Nairobi-Athens, James Currey-East African Publishing House-Ohio University Press, 1997, 354 p.
Les spĂ©cialistes du mouvement mau mau (Kenya, 1952-1956) ont attendu ce livre pendant plus de 30 ans. On savait en effet que Greet Kershaw avait eu lâoccasion - privilĂšge abso- lument unique - dâeffectuer, en 1956-1957, alors que la rĂ©volte mau mau Ă©tait encore active, une longue Ă©tude de terrain parmi deux commu- nautĂ©s lukuyu dans le district de IGambu. On savait Ă©galement quâelle sâĂ©tait de nouveau rendue sur place en 1962 pour complĂ©ter son enquĂȘte et quâelle dĂ©tenait ainsi des donnĂ©es dĂ©tail- lĂ©es et chiffrĂ©es concernant des centai- nes dâinformateurs. Cependant, la publication de lâensemble de son travail se faisait attendre parce que certaines de ses informations Ă©taient tellement sensi- bles quâune publication trop prĂ©cipitĂ©e pouvait mettre en danger quelques-uns de ses informateurs.
Aujourd:hui, le dĂ©lai de (e prescrip- tion I) Ă©rant rĂ©volu, nous pouvons enfin nous rendre compte de ce quâune Ă©tude anthropologique faite (e Ă chaud I) peut apporter Ă la comprĂ©hension dâun mou- vement contestataire armĂ©. On peut dâabord constater que lâapport de Greet Kershaw est fondamental. DĂ©sormais, on ne pourra plus Ă©crire sur le mouve- ment mau mau sans se rĂ©fĂ©rer Ă son tra- vail. On sâĂ©tait dĂ©jĂ rendu compte, plus
ou moins confusĂ©ment, quâil nây a pas eu un seul mouvement mau mau, mais plusieurs. On soupçonnait Ă©galement que la dimension inteme, le caractĂšre de guerre civile qui sâappuyait sur certains conflits fonciers prenant leur origine au XMâ siĂšcle, Ă©tait essentielle pour com- prendre le mouvement, ou les mouve- ment mau mau. GrĂące Ă ses donnĂ©es chiffrĂ©es, Greet Kershaw nous le dĂ©montre de façon presque mathĂ©mati- que. Les traditions orales rĂ©coltĂ©es sur le terrain lui permettent en effet de remonter jusquâĂ environ 1835 pour sui- vre lâĂ©volution de la situation fonciĂšre dans les deux communautĂ©s Ă©tudiĂ©es et de dĂ©celer lâopposition entre paysans (e aisĂ©s n, cultivateurs de subsistance et (( mĂ©tayers )) sans terre (uhoi), opposition rendue plus aiguĂ« par les (( vols D de terre du dĂ©but du xrsiĂšcle au profit de colons europĂ©ens. Notons au passage la profondeur historique absolument uni- que de lâenquĂȘte. De mĂȘme, Greet Kershaw nous montre que lâadhĂ©sion au mouvement mau mau, qui se faisait en prĂȘtant serment, nâavait pas le mĂȘme sens selon la date de la cĂ©rĂ©monie et le lieu ou elle sâeffectuait. Tous ces ser- ments ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©s par lâadminis- tration coloniale comme des actes sub- versifs et agressifs, alors quâune bonne partie dâentre eux ne IâĂ©taient pas, ou moins quâon ne le pensait Ă lâĂ©poque.
Tout cela est essentiel pour com- prendre le mouvement mau mau, et on voit ici lâimportance des Ă©tudes du genre cc politique par le bas)) telles que les appelaient de leurs vĆux les fondateurs de Politique aficaine. Pour une fois, nous
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sommes vraiment (( servis D. A cet Ă©gard, lâouvrage de Greet ICershaw est exem- plaire pour dâautres raisons aussi. Dâune part, il sâagit dâune Ă©tude ((transpa- rente )) abondant dâinformations sur la façon de travailler et dâenquĂȘter de lâauteur, et que lâon pourrait presque refaire pour vĂ©rification, chose assez rare dans le domaine des publications anthropologiques. Dâautre part, lâauteur nous montre quâil est possible de (( sym- pathiser D avec les enquĂȘtĂ©s (sa solidaritĂ© avec les villageois transpire Ă chaque pape du livre), sans tomber dans les tra- vet9 de la recherche militante. La encore, ce livre a valeur dâexemple.
Ceci dir, il convient aussi de signa- ler les limites de cette Ă©tude. Dâune part - pĂ©chĂ© vĂ©niel - le rĂ©cit est parfois dif- ficile Ă suivre, parce que la matiĂšre trai- tĂ©e est complexe, mais aussi parce que lâauteur a parfois du mal Ă bien structu- rer ses donnĂ©es. Câest notamment le cas des premiers chapitres historiques oĂ lâon doit sâaccrocher pour ne pas perdre le fil du raisonnement. Dâautre part - et câest un problĂšme plus fondamental - lâauteur se refuse de sortir du cadre de lâĂ©tude par le bas, comme elle lâadmet dâailleurs elle-mĂȘme [p. 7). Elle ne nous parle que de ce quâelle connaĂźt bien, câest-Ă -dire du phĂ©nomĂšne mau mau dans les deux communautĂ©s Ă©tudiĂ©es, sans se rĂ©fĂ©rer au contexte plus large, et som livre ne reflĂšte donc que lâexpĂ©rience vĂ©cue Ă ce niveau. Or, cette approche extrĂȘmement locale ne rend pas compte de tous les aspects du mouvement mau mau, et ceci dâautant plus que les deux communautĂ©s Ă©tudiĂ©es, tout en ayant participĂ© (pour certains de ses membres) au mozivement (par le biais du serment), sont restĂ©es en dehors de la rĂ©volte. Aucun de ses informateurs, en effet, nâa fait partie des (( combattants de la forĂȘt )) qui ont luttĂ© pendant quatre ans contre lâarmĂ©e coloniale britannique.
Le livre de Greet Kershaw, tout en Ă©tant dĂ©sormais incontournable, ne rend donc pas pour autant obsolĂšte lâensem- ble de la littĂ©rature existante. Pour com- prendre le phĂ©nomĂšne mau mau, on doit aussi tenir compte de la lutte armĂ©e dans la forĂȘt, dimension dâailleurs occul- tĂ©e ou nĂ©gligĂ©e par la plupart des publi- cations plus rĂ©centes (Throup, Lons-
dale, Furedi, et, dans une moindre mesure, Kanogo et Tamarkin). On doit aussi sortir de la perspective extrCme- ment Ă©clatĂ©e du mouvement telle que lâont vĂ©cu les informateurs de Kershaw. Cette perspective est salutaire, car, comme le souligne John Lonsdale dans sa prĂ©face, une optique trop unitaire, inspirĂ©e par lâadministration coloniale, a longtemps prĂ©valu dans la littĂ©rature, mais on ne doit pas aller trop loin dans lâautre sens non plus. A notre avis, il est peut-ĂȘtre temps dâessayer une nouvelle synthĂšse qui tiendrait compte de lâapport essentiel de Greet ICershaw, tout en gardant Ă lâesprit que le mouve- ment mau mau, Ă dâautres niveaux (celui de Nairobi notamment), Ă©tait quand mĂȘme moins Ă©clatĂ© que ne le sug- gĂšre une monographie villageoise. On demande des volontaires. [Robert Buijtenhuijs]
(Collectifj -Terrain no 28, miroirs du colonialisme. - Paris, ministĂšre de la Culture, 1997, 174p.
A lâheure oĂ les anthropologues, historiens, politologues redĂ©couvrent lâintĂ©rĂȘt de travaux aficanistes ou orien- talistes produits par certains coloniaux (M. Delafosse, R. Montagne...), on ne peut que saluer ce numĂ©ro spĂ©cial que Terrain consacre aux rapports entre anthropologie et colonialisme. On ne peut que souligner Ă©galement la volontĂ© clairement exprimĂ©e par les contribu- teurs de ce numĂ©ro de dĂ©passer la littĂ©- rature (( culpabilisante et auto- flagĂ©latrice )) (J.C. Muller, p. 60) qui prĂ©sente la colonisation des Blancs comme un mal absolu et un processus Ă sens unique dans lequel les colonisĂ©s nâauraient fait que subir la domination coloniale, en spectateurs infortunĂ©s dâun destin quâ.ils ne pouvaient inflĂ©chir. Comme le rappelle en introduction, G. Lenclud, lâeuropĂ©ocentrisme a mal- heureusement survĂ©cu Ă la dĂ©colonisa- tion et, sur fond de mauvaise conscience, a souvent biaisĂ© lâinterprĂ©- tation dâun passĂ© que lâon dĂ©sirait rĂ©pu- dier. Câest Ă rompre avec cette tradition
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que vise ce numĂ©ro spĂ©cial de Terrain : il sâagit de prĂ©senter un portrait de nous- mĂȘmes, EuropĂ©ens, Ă travers cet Ă©pisode encore proche, voire inachevĂ© de notre histoire, que fut la colonisation, en fai- sant notamment appel au regard que les colonisĂ©s ont portĂ© sur les colonisateurs, seule maniĂšre peut-ĂȘtre de (( dĂ©coloniser le nĂŽtre propre )) (G. Lenclud, p. 6 ) 6 . . et premier pas sans doute vers une rĂ©habi- litation des peuples dominĂ©s comme acteurs de leur propre histoire ...
Les contributions de ce numĂ©ro Ă©tant particuliĂšrement riches et diverses, nous nâen retiendrons que quel- ques-unes susceptibles dâintĂ©resser plus spĂ©cifiquement les politologues. Avec les articles de B. de lâEstoile ((1 Au nom des vrais Afiicains 8 ) et P. Centlivres (((Julius Lips et la riposte du sauvage o), nous avons deux exemples opposĂ©s de rapport entre colonialisme et anthropo- logie, plus largement entre savoir et pou- voir. Le premier insiste sur la façon dont les anthropologues fonctionnalistes anglais ont, dans les annĂ©es 1930, appuyĂ© la politique lugardienne dâIndi- rect Rule, câest-Ă -dire de gouvernement Ă travers les chefs indigĂšnes : en caution- nant lâidĂ©e selon laquelle 1âAfĂŹique authentique ne pouvait ĂȘtre que lâAfri- que traditionnelle, leur analyse a large- ment confortĂ© un systĂšme dans lequel les chefs traditionnels Ă©taient considĂ©rĂ©s comme les seuls reprĂ©sentants sociaux et politiques des sociĂ©tĂ©s indigĂšnes, les seuls interlocuteurs valables et lĂ©gitimes de lâadministration coloniale. Elle devait renforcer par lĂ mĂȘme les critiques des Ă©lites Ă©duquĂ©es, ou plutĂŽt selon la ter- minologie fonctionnaliste, (( dĂ©raci- nĂ©es o, vis-Ă -vis dâun systĂšme quâelles considĂ©raient alors comme une tentative dĂ©libĂ©rĂ©e de la part de la nation coloni- satrice de les Ă©carter des processus dĂ©cisionnels et de bloquer un dĂ©velop- pement politique et social qui dĂ©bou- cherait inĂ©vitablement sur lâautonomie, voire lâindĂ©pendance politique des colo- nies. Lâanthropologie, complice dâune domination par trop endurĂ©e? Câest ainsi que semblent lâavoir conçue bon nombre de ces Africains europĂ©anisĂ©s dont la reprĂ©sentativitĂ© et les revendica- tions politiques nâĂ©taient peut ĂȘtre pas plus lĂ©gitimes que celles des Ă©lites tradi-
tionnelles ... mais dont le regard critique rappelait certainement quâune Afkique nouvelle Ă©tait en train de naĂźtre. Leur mĂ©fiance Ă lâĂ©gard des anthropologues pouvait ĂȘtre justifiĂ©e, elle Ă©tait dâailleurs largement rĂ©ciproque. Mais il est Ă noter que, de par leur analyse, ces derniers ont tout autant servi les intĂ©rĂȘts de certains colonisĂ©s - en lâoccurrence les Ă©lites tra- ditionnelles - que ceux du colonisateur.
Du reste, vis-Ă -vis du pouvoir colo- nial, la discipline a souvent entretenu des rapports ambigus. Elle sâest mĂȘme parfois retournĂ©e contre lui, comme le rappelle P. Centlivres Ă travers lâexem- ple de Julius Lips et son intĂ©rĂȘt pour les arts indigĂšnes dĂ©peignant, caricaturant le colonisateur. I1 est vrai quâen confĂ©- rant Ă lâart et au regard indigĂšnes une valeur de plus en plus Ă©gale Ă lâart et au regard europĂ©ens, ce dernier en venait Ă saper lâun des fondements de la domi- nation coloniale : lâidĂ©e dâune supĂ©rio- ritĂ© culturelle de lâoccident. ReconnaĂź- tre que les peuples colonisĂ©s ont su mettre Ă nu le roi, câest reconnaĂźtre Ă©ga- lement quâils nâont pas Ă©tĂ© ces enfants passifs dĂ©peints par le colonisateur ... et les analystes post-coloniaux Du reste câest ce que confirme lâarticle de J.C. Muller sur le Cameroun colonial (o Merci Ă vous les Blancs de nous avoir libĂ©rĂ©s n) : les populations colonisĂ©es nâont pas fait que subir passivement la domination coloniale ; elles ont su Ă©ga- lement lâutiliser Ă leurs propres desseins et se la rĂ©approprier dans leurs stratĂ©gies de pouvoirs. Câest ainsi que profitant dâune politique coloniale fi-ançaise tour- nĂ©e vers le plus ou moins grand respect des institutions traditionnelles, certaines tribus se sont dĂ©barrassĂ©es de leurs anciens maĂźtres peuls, de mĂȘme que cer- tains chefs peuls ont rĂ©ussi inversement Ă conserver leurs pouvoirs et leurs fiefs. Ce qui ne serait pas sans expliquer la persistance aujourdâhui encore au Cameroun de vĂ©ritables Etats dans lâEtat. Si la colonisation fut une rencon- tre, cette rencontre a donc pu dans cer- tains cas se retourner au profit du peu- ple colonisĂ©. Dans dâautres, elle a pu avoir des effets plus traumatisants, lais- sant dans la mĂ©moire collective certains rĂ©flexes, systĂšmes de reprĂ©sentations qui continuent Ă conditionner lâattitude
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politique de certains peuples. Câest la conclusion que lâon pourra tirer de la contribution de J. Cole (((Quand la mĂ©moire resurgit n), portant sur la rĂ©ac- tion plutĂŽt mĂ©fiante de certaines parties de la population malgache Ă lâĂ©gard du processus de dĂ©mocratisation et notam- ment des elections de 1992. Parce que lâĂ©lection proprement dite est encore associĂ©e Ă la rĂ©pression sanglante de 1947 ayant suivi les premiĂšres conces- sions politiques françaises, parce que dans lâesprit des paysans betsimisar?kas toute activitĂ© politique dĂ©finie par lâEtat est synonyme de rĂ©pressions, troubles sociaux, insurrection et souffrances, elle ne peut que gĂ©nĂ©rer peur, voire mĂȘme refus de participation. Dans ce cas prĂ©- cis la population considĂ©rĂ©e sâest dâune certaine façon rĂ©appropriĂ©e lâĂ©vĂ©ne- ment, lâa interprĂ©tĂ© Ă sa maniĂšre et sâen est servi bien des gĂ©nĂ©rations plus tard comme sys;Ăšme de rĂ©fĂ©rence dans sa relation Ă 1âEtat et plus gĂ©nĂ©ralement au politique. Exemple supplĂ©mentaire qui prouve que la rĂ©fĂ©rence au passĂ© colo- nial peut parfois aider Ă la comprĂ©hen- sion du prĂ©sent politique et social. Mais ce passĂ© est plus complexe et moins dichotomique quâon ne lâa laissĂ© suppo- ser, Quâil y ait eu des dominants et des dominĂ©s, cela va de soi, mais les seconds nâont pas toujours subi une histoire imposĂ©e par dâautres ... il faudra bien un jour lâadmettre. vĂ©ronique Dimiez]
BLANCEL (Nicolas), DELABARRE (Francis) (dirs) - Images dâEmpire. 1930-1960 : trente ans de photogra- phies officielles sur l â e q u e fian- çaise. - Paris, Ă©d. de La MartinitreLa Documentation française, 1997, 336 p. (Collectif) - Imaginaire colonial et figures de lâimmigrĂ©. - Hommes et Migrations, no 1207, mai-juin 1997, 167 p.
La rĂ©flexion iconographique sur les images coloniales est actuellement fort Ă la mode. Des expositions se multiplient, en France et ailleurs en Europe, qui exhibent des clichĂ©s tirĂ©s dâarchives pri-
vĂ©es ou publiques. Le superbe ouvrage (( Images dâEmpire )), dont nous rendons compte ici est publiĂ© sous lâĂ©gide de res- ponsables de lâAssociation Connais- sance de lâHistoire de lâAfrique Contemporaine. I1 prĂ©sente une sĂ©lec- tion de photographies officielles, dont a hĂ©ritĂ© la Documentation française au lendemain des indĂ©pendances. Le remarquable agencement des images, dâarticles de grande qualitĂ© et de notules fort pertinentes contribue Ă la rĂ©ussite de ce projet trĂšs maĂźtrisĂ©. A travers les nombreux thĂšmes et sous-thĂšmes abor- dĂ©s (de ((lâAfrique dĂ©couverte)) Ă la dĂ©colonisation et aux images postcolo- niales de lâimmigration) se trouve fort bien soulignĂ©e une dynamique des reprĂ©sentations liĂ©e Ă lâĂ©volution des rapports entretenus entre colonisateurs et colonisĂ©s : du hĂ©ros casquĂ© de blanc au technicien qui assiste, de lâindigĂšne disciplinĂ© Ă la thĂ©Ăątralisation des rĂ©for- mes politiques. En echo au compte rendu prĂ©cĂ©dent, soulignons que si les techniques de propagande, les logiques de mises en scĂšne de lâordre colonial ou de la ((mission civilisatrice )) sont bril- lamment dĂ©montĂ©esldĂ©montrĂ©es, les commentaires relatifs aux imaginaires, aux stĂ©rĂ©otypes coloniaux Ă©vitent le piĂšge de la dĂ©nonciation systĂ©matique. MĂȘme si dans sa prĂ©face (par ailleurs plutĂŽt nuancĂ©e), Albert Memmi nous met en garde contre les dangers du (I rĂ©visionnisme )) apologĂ©tique, il est Ă©crit plus loin, en introduction au cha- pitre intitulĂ© o Portrait de lâautre o, quâil ((sâagit au fond dâĂ©tablir, Ă partir de documents iconographiques officiels, une sorte dâarchĂ©ologie de la psychologie coloniale en ce quâelle a de profondĂ©ment humain, et non pas seulement, comme câest souvent le cas dans de telles Ă©tudes, de distribuer des satisfecit ou des condamnations )) (p. 103). Bref, ce tra- vail sur les clichĂ©s sait se doter du recul indispensable Ă ce genre dâentreprise.
Notre rĂ©daction a Ă©galement reçu, en complĂ©ment, une livraison de la revue Hommes et Migrations, consacrĂ©e Ă une tentative de mise en regard de lâima- ginaire colonial et des figures contem- poraines de lâimmigrĂ©. Entretiens et arti- cles se succĂšdent, qui sâefforcent de traiter de cette thĂ©matique fort dĂ©licate.
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Le ton est ici souvent plus incisif et lâon se demande Ă la lecture de certains arti- cles sâil est possible de dĂ©noncer certai- nes attitudes persistantes sans sombrer dans le (( politiquement correct D le plus saugrenu. Une illustration parmi dâautres : le passage sur (I la bande des- sinĂ©e comme vecteur privilĂ©giĂ© de diffu- sion des stĂ©rĂ©otypes (p. 37 et suivan- tes) se rĂ©vĂšle surtout obnubilĂ© par lâidĂ©e de rĂ©clamer que Tintin au Congo soit prĂ©cĂ©dĂ© dâune (( prĂ©face prĂ©cisant quâil sâagit dâune vision dâĂ©poque influencĂ©e par lâidĂ©ologie coloniale B. Câest faire bien peu de cas des excellentes B.D. apparues depuis quelques annĂ©es (citons par exemple les sĂ©ries ((Jimmy Tousseul )) ou (( Alice et LĂ©opold )) pour rester dans le domaine belge) qui prĂ©- sentent une image rĂ©aliste et fonciĂšre- ment antimanichĂ©enne de lâAfrique cen- trale (avec des Blancs et des Noirs alternativement bons, mĂ©chants, sym- pathiques, ridicules). Dâune certaine maniĂšre toute lâĆuvre dâHergĂ© est datĂ©e, caricaturale et maintes catĂ©gories (Ă commencer par les Femmes ou les Japonais) seraient fondĂ©es Ă se plaindre de la maniĂšre dont elles sont traitĂ©es. Faudrait-il donc annoter toute la littĂ©ra- ture dont les personnages et les compor- tements ne seraient plus dans lâair du temps ? Imagine-t-on des syndicats de policiers, ou des sociĂ©tĂ©s savantes sâoffusquer de lâimage qui est donnĂ©e dâeux par lâintermĂ©diaire des Dupondt ou de notre cher professeur Tournesol ? Dean-Pascal Daloz]
CONSTANTIN (François), COULON (Christian) (dirs) - Religion et transi- tion démocratique en Afrique. - Paris, Karthala, 1997, 387 p.
Ce volume, fruit dâune rĂ©flexion collective de treize chercheurs africanis- tes entre 1992 et 1995, dĂ©passe en fait trĂšs largement les limites du titre. I1 sâagit - et il faut sâen fĂ©liciter - dâune sĂ©rie dâanalyses sur la relation entre poli- tique et religion en Afrique contempo- raine - champ de travail autrement plus vaste que celui qui concerne les transi-
tions dites dĂ©mocratiques. A lâheure o Ă lâon se pose la question de savoir dans quelle mesure il y a eu effectivement transition (I dĂ©mocratique en Mique, il est impĂ©ratif de ne pas perdre de vue que, quelle que soit la nature des chan- gements politiques en cours, la question du rĂŽle du religieux pour le politique est de plus en plus pertinente. Comme le disent Ă juste titre Constantin et Coulon dans lâintroduction : (( LâĂ©tude des faits religieux apparaĂźt de plus en plus nette- ment aujourdâhui comme analyse des dynamiques sociales et politiques de la âmodernitĂ©â, conçue non comme âmodernisationâ Ă lâoccidentale mais comme âmouvement historiqueâ du changement (p. 17). . . (( Les faits reli- gieux africains sont bien marquĂ©s par le changement quâils contribuent expri- mer, Ă formuler, 21 organiser D (p. 18). Premier point donc, et non des moin- dres : le religieux en Afrique participe de la modernitĂ© du continent. Quâil sâagisse des religions universelles monothĂ©istes ou des religions soi-disant traditionnel- les, cet ouvrage montre bien que lâimportance considĂ©rable que joue le religieux dans les rapports entre pouvoir et sociĂ©tĂ© ne saurait sâexpliquer sans prendre en compte la religiositĂ© dans la vie de lâAfrique contemporaine. DeuxiĂšme point, mais qui nâapparaĂźt quâen filigrane dans ce volume : les for- mes du religieux africain nâĆuvrent pas forcĂ©ment Ă la transition dĂ©mocratique. En effet, au-delĂ du rĂŽle ponctuel quâont pu jouer certains hommes de reli- gion dans ce processus de ((transition dĂ©mocratique )), notamment les confĂ©- rences nationales, il nâest pas certain que les faits religieux et mĂȘme les institu- tions religieuses favorisent la dĂ©mocra- tie, du moins dans sa variante occiden- tale. Et ceci pour la bien simple raison que la religiositĂ© en &que ne se disso- cie pas facilement de la sociĂ©tĂ© africaine. Or cette sociĂ©tĂ©, pour pluraliste quâelle soit, nâen est pas moins compatible avec une forme de dĂ©mocratie occidentale qui reflĂšte, bien Ă©videmment la sociĂ©tĂ© occidentale. Quelle que soit lâopinion que lâon puisse avoir de lâavenir de ces (I transitions dĂ©mocratiques I), ce volume - et câest lĂ tout son intĂ©rĂȘt - nous per- met pour le moins de cerner plus aisĂ©-
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ment et, oserions-nous le dire, de façon plus scientifique, lâimportance du reli- gieux en Afrque contemporaine. Or cette importance est beaucoup plus considĂ©rable que ce que lâanalyse (1 clas- sique r) du politique en Aii-ique laisse entehdre. Non seulement, il sâavĂšre que le monde de la croyance (religion ou sor- cellerie) est vĂ©cu au quotidien mais il est probable quâil influe fortement sur les pratiques poliuques qui rĂ©gissent les rapports entre Etat et sociĂ©tĂ© (civile).
La premiĂšre partie du livre est prĂ©- cisĂ©ment axĂ©e sur la question de ce rap- port entre le politique et la sociĂ©tĂ© civile. I1 sâagit ici dâune sĂ©rie dâĂ©tudes de cas sur le Ghana, le Nigeria, le Kenya, le BĂ©nin et la Somalie, oĂ les auteurs sâefforcent de mettre en Ă©vidence le rĂŽle politique du religieux. Les six chapitres ici prĂ©sentĂ©s sont tous dignes dâintĂ©rĂ©t au niveau de lâanalyse ponctuelle mais lâon retiendra peut-Ă©tre surtout le mes- sage Ă©quivoque quâils transmettent quant au potentiel (I dĂ©mocratique )) des faits religieux en question. La seconde partie, elle, se penche plus directement sur le rĂŽle des Eglises et de leurs clergĂ©s dans le passage au politique. Ici, des Ă©tu- des de cas sur le Cameroun, le Burkina Faso, le Congo, la Zambie, le Kenya et la Tanzanie, ainsi que le Burundi, mon- trent bien toute lâambiguĂŻtĂ© de lâaction politique des institutions religieuses, chrĂ©tiennes et musulmanes. Car ce qui ressort de ces chapitres, Ă©tayĂ©s par une recherche solide et fort bien pr;Ă©sentĂ©e, est que la dialectique entre Eg!ise et pouvoir est fort complexe. Les Eglises etant des corps constituĂ©s de la sociĂ©tĂ© civile, leurs interventions politiques rĂ©pondent autant Ă un dĂ©sir dâĆuvrer au changement politique quâĂ leurs soucis corporatistes. Par ailleurs, il apparaĂźt clairement que les clergĂ©s et autres hiĂ©- rarchies religieuses ne rĂ©pondent pas forcĂ©ment aux dĂ©sirs des communautĂ©s religieuses quâils sont censĂ©s reprĂ©sen- ter.
On ne peut en fin de compte que rejoindre lâopinion Ă©mise par Guy Her- met en conclusion de ce volume pas- sionnant : (I &]âidĂ©e sâimpose donc que IâAfrque nâillustre que marginalement lâengagement des acteurs religieux dans- le dĂ©bat dĂ©mocratique de ce temps.
Mais dans ce domaine comme dans les autres, il est patent, Ă©galement, quâelle ne prĂ©sente aucune unitĂ© en raison mĂ©me de sa fragmentation multiforme. Et dans ce domaine encore, on peut conjecturer sans risquer trop le dĂ©menti quâelle demeurera aussi peu conforme aux schĂ©mas reçus dans le cas oĂ une consolidation dĂ©mocratique de grande envergure sây rĂ©aliserait )) @. 369). LâintĂ©rĂȘt de ce volume est, Ă mon sens, quâil suscite plus de questions que de rĂ©ponses, ce qui, au stade oĂč nous en sommes de la comprĂ©hension du rap- port entre religieux et politique en &- que contemporaine, est tout Ă fait sain. Religion et mansition dĂ©mocratique en Afn- que ouvre donc un dossier fondamental et qui, rĂ©pĂ©tons-le, dĂ©passe trĂšs large- ment les pĂ©ripĂ©ties actuelles des Ă©lec- tions multipartisanes que lâon associe trop facilement Ă des transitions dĂ©mo- cratiques durables. I1 est dâespĂ©rer que ce recueil suscitera dâautres recherches sur le rĂŽle que peut jouer le cĂŽtĂ© plus occulte (dont entre autres la sorcellerie) du religieux en Afrique. Mais pour lâheure, il faut saluer la publication de cet ouvrage collectif qui dĂ©montre bien lâimportance que lâanalyse du religieux a pour le politiste africaniste. [Patrick Chabal]
MANE (Ibrahima) (dir.) -Ătat, dĂ©mo- cratie, sociĂ©tĂ©s et culture en Afri- que. - Dakar, DĂ©mocraties Africaines, 1996, 213 p.
Cet ouvrage reprend les communi- cations prĂ©sentĂ©es lors dâun colloque organisĂ© par lâUNESCO et lâInstitut africain pour la dĂ©mocratie (IAD). La douzaine de textes rassemblĂ©s tĂ©moigne de lâĂ©clatement de la recherche africa- niste dans ses efforts pour traiter les pro- cessus de dĂ©mocratisation. Cette libertĂ© amĂšne des ouvertures originales sous la plume dâAchille Mbembe qui tire un texte dense dâune rĂ©flexion sur les (I rap- ports entre la disette, la pĂ©nurie et la dĂ©mocratie 1). Encore, lâauteur prend-il soin de rappeler, in $ne, quâil a (( volon- tairement laissĂ© en suspens la question
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des liens entre IâĂ©conomique, le politi- que et le culturel B (p. 62). Dâautres auteurs, en circonscrivant leur recher- che Ă un terrain particulier et Ă la connexion du politique avec une seule autre dimension, font aussi des dĂ©mons- trations probantes. Ainsi procĂšdent Luc Sindjoun pour (I lâexploitation de la rente identitaire âanglophoneâ par les entrepreneurs politiques o camerounais ou encore Henri OssĂ©bi qui pose des jalons pour une Ă©tude des enjeux sociaux dans la transition congolaise.
Cependant, tous les textes ne sont pas aussi novateurs. Certaines rĂ©flexions individuelles prĂ©sentĂ©es dans cet ouvrage ont tendance Ă sâinstaller dans les gĂ©nĂ©ralitĂ©s ou encore Ă mĂȘler les registres du descriptif, de lâexplicatif et du normatif. Traiter de la dĂ©mocratie comme processus global, sans distinguer les logiques dâactions et les rĂ©pertoires de reprĂ©sentations, pousser la pluridis- ciplinaritĂ© dans ses derniers retranche- ments, conduit, souvent, Ă une perte de sens plutĂŽt quâĂ un gain de connais- sance. En effet, Ă suivre certains des auteurs les moins inspirĂ©s de ce livre, la dĂ©mocratisation nâa pas de sens sans rĂ©fĂ©rence aux problĂšmes sociaux ; ceux-ci ne peuvent ĂȘtre rĂ©solus sans changement Ă©conomique ; lequel ne peut pas ĂȘtre abordĂ© en termes vulgai- rement utilitaristes mais doit tenir compte de Ia culture qui elle-mĂȘme dĂ©pend du religieux, etc. Bref, comment ne pas aboutir Ă un complet dĂ©senchan- tement face Ă des expĂ©riences de dĂ©mo- cratisation quant on affecte aprioriĂ cel- les-ci le statut de potion magique ?
Enfin, on est tentĂ© de sâinterroger sur la fonction de la rĂ©fĂ©rence Ă la (( dĂ©mocratie dans des travaux dâune valeur indiscutable mais dont lâambition semble plutĂŽt rĂ©sider dans la formula- tion dâun mode de domination lĂ©gitime dont les fondements seraient radicale- ment daĂ©rents de ceux qui ont prĂ©sidĂ© Ă Emergence des modĂšles occidentaux. Le texte consacrĂ© Ă la Somalie par M.A. Mohamed illustre bien cette diffi- cultĂ© puisque son plaidoyer pour la rĂ©ha- bilitation du systĂšme politique prĂ©valant antĂ©rieurement Ă Ia pĂ©riode de Siyad Barre prendrait une toute autre force sâil allait jusquâau bout de sa logique. I1
serait intĂ©ressant en effet dâĂ©valuer les coĂ»ts du rĂ©tablissement dâun systĂšme quâil dĂ©crit comme un ((modĂšle dâune tradition dĂ©mocratique af?icaine 1)
(p. 159) et qui prĂ©sente un caractĂšre cla- nique equilibrĂ©, comportant (( des castes et des marginaux)) (p. 159), ((segmen- taire et hiĂ©rarchisĂ©)) (p. 169), ne connaissant pas dâexĂ©cutif au niveau national et dont ((chaque segment est dirigĂ© par un conseil de sages et un roi (ou chef) (p. 159).
On ne contestera pas Ă lâauteur le caractĂšre authentiquement somali de ce modĂšle, ni le droit, pour les Somaliens, dâen revendiquer lâinvention et dâen regretter lâĂ©rosion. Toutefois, si la dĂ©fi- nition des appartenances de clan, de caste, lâaccession Ă la notabilitĂ© et Ă la royautĂ©, constituent bien un contexte social idĂ©al (ou idĂ©alisĂ©) que lâauteur peut estimer plus apte Ă assurer la paix sociale que lâautoritarisme et la corrup- tion qui se sont dĂ©veloppĂ©s sous Siyad Barre, on prĂ©fĂ©rerait que la rĂ©fĂ©rence Ă la dĂ©mocratie soit reservĂ©e Ă des expĂ©- riences qui ne sâappuient pas sur lâinĂ©- galitĂ© des sujets et des groupes ni sur lâhĂ©rĂ©ditĂ© et la sĂ©nioritĂ© des positions de pouvoir. Le vocabulaire de la sociologie historique pourrait ĂȘtre utilement solli- citĂ© pour trouver une qualification com- parative plus crĂ©dible. Patrick Quantin]
WAUTHIER (Claude) - Quatre prĂ©si- dents et lâAfrique : de Gaulle, Pom- pidou, Giscard dâEstaing, Mtter- rand. - Paris, Le Seuil, 1995, 723 p.
Longtemps dĂ©laissĂ©e par lâanalyse, la politique africaine de la France occupe aujourdâhui une place centrale dans la recherche africaniste. Au milieu de cette littĂ©rature en expansion, lâouvrage de Claude Wauthier fait partie des contri- butions majeures. Lâauteur ne prĂ©tend pas rĂ©volutionner la perspective. Entre les tenants dâun neocolonialisme fran- çais, manifestation particuliĂšre de lâimpĂ©rialisme Ă©conomique occidental, et les adeptes dâune approche plus spĂ©- cifiquement politique fondĂ©e SUT la connivence des Ă©lites, des rĂ©seaux et
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lâimbrication dâintĂ©rĂȘts croisĂ©s, Claude Wauthier a prĂ©fĂ©rĂ© opter pour le mode narratif, loin de la prĂ©occupation conceptuelle ou thĂ©orique. Son propos nâest pas de nourrir telle ou telle thĂšse gĂ©nĂ©rale mais de restituer la trame des relations franco-africaines sous les prĂ©- sidents successifs de la Ve RĂ©publique. AdossĂ© depuis 1953 au poste dâobserva- tion privilĂ©giĂ© du journaliste, Claude Wauthier reprend le fil dâune relation ancienne, tissĂ©e par le gĂ©nĂ©ral de Gaulle sur les dĂ©combres de 1940 et prolongĂ©e jusquâau Mitterrand des annĂ©es 90. Scrupuleusement, lâauteur sâattache Ă dissĂ©quer les episodes les plus marquants dâune histoire tourmentĂ©e. Combinant les vertus du clinicien et de lâhomme de presse, Claude Wauthier relate sans complaisance les heurs et malheurs des r,apports complexes entre la France et les Etats subsahariens. Servi par un style dĂ©pouillĂ©, par une connaissance prĂ©cise, et souvent vĂ©cue de prĂšs, des Ă©vĂ©nements et des hommes, il comble un vide dans la connaissance des relations franco- africaines. Evitant les facilitĂ©s du dis- cours moralisateur, lâauteur conduit le lecteur dans les mĂ©andres, souvent trou- bles, de la politique africaine de la France.
Bien que journaliste, Claude Wau- thier nâest pas un adepte du scoop. Son genre est celui du chroniqueur, accumu- lant quotidiennement lâinformation, sachant que de celle-ci surgit progressi- vement une rĂ©alitĂ© moins simple que celle Ă laquelle la passion mal maĂźtrisĂ©e peut conduire. Chacun des prĂ©sidents français est successivement passĂ© au cri- ble, Ă travers un dĂ©coupage en chapitres qui scandent, de façon souvent impitoya- ble, lâaction menĂ©e par la France en direction de lâAfrique. La grande politi- que y apparaĂźt comme nĂ©cessairement habitĂ©e par des pratiques et des person- nages qui façonnent la singularitĂ© de la politique africaine. Certes, seule la naĂŻ- vetĂ© peut conduire Ă penser que la poli- tique Ă©trangĂšre Ă©chapperait aux brouets confectionnĂ©s dans certaines (i arriĂšre- cuisines D selon lâexpression dâun ancien Premier ministre. Encore existe-t-il des degrĂ©s dans lâinterpĂ©nĂ©tration des gen- res.
Sur ce plan, la lecture de lâouvrage
ne laisse planer aucune ambiguĂŻtĂ© quant Ă la spĂ©cificitĂ© de lâAfrique dans la poli- tique extĂ©rieure de la France. De façon permanente surgissent sur scĂšne, pĂ©le- mĂȘme, les services de renseignements, officiels et officieux, les mercenaires, les conseillers, les affairistes (dont Bernard Tapie, convoitant dĂšs 1979 les chĂąteaux de Bokassa...). ,Les relations entre la France et les Etats africains relĂšvent dâun genre radicalement diffĂ©rent et le sentiment prĂ©vaut dâune impossibilitĂ© quasi structurelle Ă les organiser sur le mode diplomatico-stratĂ©gique classi- que. Câest pourquoi les prĂ©sidents fran- çais apparaissent presque comme des personnages secondaires, impuissants Ă façonner les rĂšgles dâun jeu dont il leur faut Ă©pouser les contours sous peine dâexclusion. Le poids de la contrainte crĂ©e lâimpression dâune quasi-similitude entre les quatre prĂ©sidents au point quâils semblent interchangeables. Cha- que prĂ©sidence est Ă la fois singuliĂšre par les Ă©vĂ©nements qui la caractĂ©risent et, dans une moindre mesure, par les acteurs. Mais toutes se ressemblent par les mĂ©thodes utilisĂ©es. La violence par exemple, y compris lâassassinat, de FĂ©lix MoumiĂ© et de lâamant de JosĂ©phine Bongo, fait partie de la trame normale des relations franco-africaines de mĂȘme que la corruption et les barbouzes ...
Ătrange tableau dont lâauteur se refuse pourtant Ă systĂ©matiser les rĂ©gu- laritĂ©s. Faut-il y voir la simple convic- tion que toutes ces manĆuvres, comme lâĂ©crit lui-mĂȘme lâauteur, (i rĂ©pondaient Ă celles non moins tortueuses de Mos- cou, de Washington, de Londres, de PrĂ©toria et de Lisbonne )) ? Auquel cas, les diffĂ©rents acteurs ne feraient quâinterprĂ©ter une partition nĂ©cessaire au nom de la raison dâEtat. Lâinterroga- tion demeure. Claude Wauthier a prĂ©- fĂ©rĂ© arrĂȘter sa plume au stade de la chro- nique, sĂšche et lucide. I1 le fallait. Reste Ă rĂ©pondre Ă la question jamais pleine- ment traitĂ©e, y compris dans les cercles acadĂ©miques : la France pouvait-elle conduire au sud du Sahara une politique conforme Ă ses principes sans remettre en cause ses intĂ©rĂ©ts ? Pouvait-elle, et peut-elle aujourdâhui plus quâhier, com- biner morale et rĂ©alisme ? [Daniel Bour- maud]
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OTAYER (René), SAWADOGO (Filiga Michel), GUINGANà (Jean-Pierre) (dirs) - Le Burkina entre révolution et démocratie (1983-1993), Ordre politique et changement social en Afrique sub-saharienne. -Paris, Icar- thala, 1996, 387 p.
Depuis la rĂ©volution du 4 aoĂ»t 1984, le Burkina nous a fourni un excep- tionnel laboratoire tant sur le plan des innovations institutionnelles que de la crĂ©ativitĂ© sociale, au point quâon pour- rait intervertir la place des qualificatifs du sous-titre et parler Ă©galement N dâordre social et de changement poli- tique B tant il est vrai quâune quinzaine dâannĂ©es aprĂšs le grand chambardement des annĂ©es sankaristes, la sociĂ©tĂ© paraĂźt avoir digĂ©rĂ© les innovations et trouvĂ© une sorte dâĂ©quilibre, prĂ©caire, entre les diverses tensions qui la façonnent.
Au dĂ©but des annĂ©es quatre-vingt et malgrĂ© une vie active, un pluripar- tisme et la prĂ©sence de plus en plus forte des militaires dans les affaires politiques, malgrĂ© (mais aussi Ă cause dâ) une bureaucratie aussi nombreuse quâineffi- cace, il nâexistait pas #Etat en Haute Volta. Ce qui en tenait lieu sâexprimait bien dans la figure bonhomme de Lami- zana. Câest Thomas Sankara qui a accouchĂ© lâEtat burkinabĂ©, aux forceps. Quinze ans aprĂšs, câest un pays inven- tant une voie capitaliste et dĂ©mocratique originale, pragmatique, Ă©conome de grands sentiments (une ((culture de la sobriĂ©tĂ© I) dit-on dans lâintroduction) mais efficace, qui fait du (I pays des hom- mes intĂšgres i), et avec lâAfrique du sud, un des phares de l âa ique en transition vers le XXIâ siĂšcle.
Le colloque organisĂ© Ă Talence par le CEAN et lâuniversitĂ© de Ouagadou- gou en juillet 1994 avait donc pour objet non seulement dâĂ©clairer cette dĂ©cennie dâun point de vue politique et juridique mais aussi de combler le vide des Ă©tudes pluridisciplinaires sur ce pays. La publi- cation de ces travaux, loin dâĂȘtre exhaus- tive nous indiquent les Ă©diteurs scienti- fiques, est construite autour de trois thĂšmes, Q IdentitĂ©s et reprĂ©sentations )), (( Dynamiques socio-Ă©conomiques D et a Vers un nouvel ordre politique D.
Comme le reconnaissent les Ă©diteurs, câest la deuxiĂšme partie qui se rĂ©vtle la plus passionnante, non seulement parce quâelle traite dâun de mes thĂšmes de recherche, lâimpact de la rĂ©forme fon- ciĂšre du 4aoĂ»t 1984 et de son Ă©chec, mais aussi parce quâelle met en lumiĂšre la confrontation entre forces de change- ments et permanences en tentant de rĂ©pondre Ă deux questions : - (( la contrainte nâest-elle pas inhĂ©rente au changement ? - Q la dĂ©mocratie est-elle un luxe pour les pays pauvres ? o (p. 9).
Si lâouvrage a tendance Ă rĂ©pondre oui Ă la premiĂšre et non Ă la seconde question, ce nâest de maniĂšre ni explicite ni uniforme. Car prĂ©cisĂ©ment, un des intkrĂȘts majeurs de lâouvrage est de nous faire dĂ©couvrir (ou redĂ©couvrir) les ver- tus du pluralisme derriĂšre la prise en compte de la diversitĂ© rĂ©elle des compo- santes de la nation burkinabĂ©. Un autre intĂ©rĂȘt est de nous donner Ă penser, B travers ces multiples (( petits riens D qui font la quotidiennetĂ© et la routinisation, cette invention dâune voie capitaliste, ce que P. ZagrĂ© appelle la new wzoney. Ce nouvel argent qui circule, doit-on ajou- ter, nâest plus seulement liĂ© aux flux financiers intemationaux mais aussi au rapatriement de lâargent des plantations ivoiriennes soldĂ©es par leurs auteurs pour cause dâinsĂ©curitĂ© politique. Un dernier intĂ©rĂȘt, enfin, de cette publica- tion est de faire reconnaĂźtre intematio- nalement la recherche en sciences poli- tiques et juridiques burkinabĂ©, capable, ce nâest pas si frĂ©quent, de pratiquer fort opportunĂ©ment la pluridisciplinaritĂ© et de rĂ©cuser le provincialisme scientifique. Trois raisons, donc, de dĂ©couvrir der- riĂšre un ouvrage une facette de lâAfrique en mutation. Etienne le Roy]
ADISA Uinmi) - The Comfort of Strangers. The impact of Rwandan Refugees on Neighbouring Coun- tries. - Nairobi UNCHS (Habitat)/ Ibadan, IFRA, 1996, Xii-101 p.
Parmi les innombrables livres sur le Rwanda, celui de cet enseignant en
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science politique de lâuniversitĂ© dâIba- dan, expert auprĂšs dâorganisations inter- nationales, tranche par son originalitĂ©. Certes, au dĂ©but de son Ă©tude, il sâinter- roge - une fois de plus - sur les causes lointaines et rĂ©centes du gĂ©nocide mais en sâappuyant surtout sur des sources en anglais, tout en citant les principaux tex- tes en fiançais (voir les notes et la biblio- graphie).
Les chapitres suivants sont les plus intĂ©ressants : Ă lâaide dâenquĂȘtes, dâinterviews, de rapports peu connus du public francophone, le Dr Jinmi Adisa fait une synthĂšse de la situation des rĂ©fu- giĂ©s pays par pays : Tanzanie, Ouganda, Burundi et ZaĂŻre. I1 Ă©tudie les diffĂ©rents mouvements et leurs consĂ©quences. Si lâOuganda sâest vidĂ© de ses Q Rwandais o, si le Burundi a connu des allers et venues au grĂ© des Ă©vĂ©nements politiques, la Tanzanie et le ZaĂŻre se sont remplis au point que dans certaines rĂ©gions on a comptĂ© deux rĂ©fugiĂ©s pour un Tanza- nien.
Quoi quâil en soit, partout ces migrations ont apportĂ© des permrba- tions socio-Ă©conomiques (fuite des cer- veaux en Ouganda et au Burundi, pĂ©nu- rie de bĂ©tail en Ouganda, dĂ©rĂ©gulation des prix partout, etc.), politiques (par exemple utilisation des rĂ©fugiĂ©s par les extrĂ©mistes au Burundi) et plus encore Ă©cologiques. Lâauteur, dans chacun des chapitres rĂ©gionaux, Ă©numĂšre les innombrables atteintes, irrkmĂ©diables, Ă lâenvironnement : dĂ©forestation massive et systkmatique, pollution des eaux, Ă©pi- dĂ©mies ...
En conclusion, il analyse, une Ă une, les solutions prĂ©conisĂ©es. I1 ne voit dâissue que dans un retour progressif et contrĂŽlĂ© du million et demi ou des deux millions -environ - de rĂ©fugiĂ©s dans leur patrie. Lâouvrage a Ă©tĂ© publiĂ© en 1996 et ignore, par la force des choses, les retours massifs au pays. Cependant, cette limite ne nuit pas Ă la pertinence des renseignements et des tĂ©moignages consignĂ©s. [Annie Lenoble-Bart]
Hw (Margaret), YOUNG (Tom) - Co&onting Leviathan : Mozambi- que since independence. - Londres, Hurst, 1997, 262 p.
Voici un livre trĂšs attendu que lâĂ©di- teur annonce depuis fort longtemps. I1 est vrai que ces derniĂšres annĂ©es ont Ă©tĂ© riches en Ă©vĂ©nements et que lâhistorien du Mozambique contemporain aurait eu du mal Ă conclure un tel volume sans pouvoir sâassurer que lâaccord de 1992 entre Frelimo et Renamo allait tenir, que les elections promises allaient avoir lieu et que lâaprĂšs-Ă©lection allait enfin permettre au pays de vivre en paix. I1 Ă©tait donc peut Ă©tre sage de ne publier ce livre quâaujourdâhui. Mais le pro- blĂšme est que lâhistoire avance trĂšs vite et que depuis 1994, date limite des Ă©vĂ©- nements dont le livre traite, il sâest passĂ© bien des choses. De plus, il esr paru beaucoup de travaux rĂ©cents sur ce pays. Alors, lâattente valait-elle la peine ? La question nâest en fait guĂšre de savoir si ce livre nous livre lâinformation la plus utile sur les tous demiers Ă©vĂ©nements mais plutĂŽt de voir en quoi lâinterprĂ©ta- tion quâil nous propose de lâhistoire du Mozambique depuis lâindkpendance se dĂ©marque de ce qui se publie depuis quelques annĂ©es. Disons-le tout de suite, Confronting Leviathail, sâacquitte honnĂȘtement de sa tĂąche. I1 sâagit ici dâune des meilleures synthĂšses de lâhis- toire contemporaine du Mozambique que lâon puisse consulter. Les deux auteurs ont su allier intelligemment leurs compĂ©tences respectives et nous proposent une analyse Ă©quilibrĂ©e sur les bases dâune recherche fouillĂ©e. On trou- vera dans ce livre un rĂ©sumĂ© concis mais complet de lâĂ©volution du Mozambique depuis lâindĂ©pendance que lâon pourra recommander sans ambages Ă tous ceux qui cherchent Ă sâinstruire.
Toutefois, lâhistoire du Mozambi- que est fort complexe et lâon peut se poser la question de savoir dans quelle mesure les auteurs ont rĂ©ussi Ă rendre compte de cette complexitĂ©. Vu la bibliographie importante que lâon pos- sĂšde sur cette ancienne colonie portu- gaise - et en particulier le livre magistral de Newitt (A History of Mozambique) -
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par rapport Ă lâAngola, Confronting LeviuthuTi nous laisse sur notre faim. Ce livre souffĂe, Ă mon sens, de trois caren- ces importantes. I1 ne fait presque aucun lien avec lâhistoire coloniale et prĂ©colo- niale du Mozambique, histoire pourtant capitale pour une comprĂ©hension des Ă©vĂ©nements rĂ©cents. I1 ne fait pratique- ment aucun cas de la littĂ©rature scienti- fique sur lâAfrique post-coloniale, littĂ©- rature qui rend compte de lâĂ©volution comparative des pays africains depuis leur indĂ©pendance. Enfin, il exhibe des carences notoires sur lâanalyse politique africaniste, analyse qui aurait sans doute permis dâĂ©clairer le parcours du pays de façon plus nette. Illustrons notre pro- pos. Lâhistoire dâabord. I1 est indĂ©nia- ble, comme le montre bien Newitt, que la guerre civile au Mozambique trouve en partie ses racines dans lâhistoire du XMâ siĂšcle de la partie centrale du pays -zone oĂč dâailleurs la Renamo a obtenu la majoritĂ© aux Ă©lections rĂ©centes. DâoĂ la faiblesse de lâanalyse de Hall et Young qui ne conçoivent cette guerre civile quâĂ partir de la crĂ©ation de la Renamo. LittĂ©rature scientifique ensuite. LâĂ©chec de la tentative de (( villagisauon )) forcĂ©e aurait Ă©tĂ© mieux comprise si les auteurs avaient pu prendre en compte des tra- vaux ayant trait aux tentatives faites ail- leurs en Afrique pour (( capturer )) la pay- sannerie et, en particulier, tout ce qui a Ă©tĂ© Ă©crit sur la faillite de lâexpĂ©rience tanzanienne. Analyse politique enfin. I1 aurait Ă©tĂ© prĂ©fĂ©rable, voire indispensa- ble, dâasseoir lâanalyse de lâĂ©chec socia- liste au Mozambique sur des bases plus comparatives, et en particulier de relier lâhistoire de ce pays Ă la trajectoire du modĂšle dĂ©veloppementaliste/parti uni- que en Afrique post-coloniale.
Ceci Ă©tant prĂ©cisĂ©, Confronti~ig Leviutlzun demeure un bon livre sur le Mozambique depuis lâindĂ©pendance, complet au niveau de la recherche effec- tuĂ©e et relativement mesurĂ© dans les conclusions quâil fournit. Mais ce nâest pas un ouvrage qui sâinscrit dans la recherche afi-caniste actuelle, dont les auteurs ne font pratiquement aucun cas. En consĂ©quence, le lecteur nây trouvera ni le contexte historique qui Ă©clairerait plus utilement le devenir du Mozambi- que, ni lâanalyse politique qui permet-
trait de situer lâexpĂ©rience de ce pays par rapport Ă lâĂ©volution de IâMque contemporaine. Saluons tout de mĂȘme la parution dâun volume sur un pays afri- cain lusophone - domaine dans lequel il se publie encore trop peu. [Patrick Cha- bal]
ALDEN (Chris), DALO2 aean-Pascal) (eds.) -Paris, Pretoria and the ĂU%- can Continent: the International Relations of States and Societies in Transition. - Londres/Macmillan, New YorWSaint Martinâs Press, 1996, xiii-240 p.
Ce livre, fruit dâune confĂ©rence tenue en Afrique du Sud, sâemploie Ă rĂ©examiner le rĂŽle de la France et de lâ&que du Sud post-apartheid - et par la mĂȘme leurs relations - en Afrique contemporaine. A lâheure oh la nouvelle Afrique du Sud redĂ©finit sa politique Ă©trangĂšre et la France cherche 1 se faire une raison au-delĂ de son ciprĂ© carrĂ©)) habituel, il nâĂ©tait pas inutile dâaffermir un dialogue entre les deux. Quels sont les intĂ©rĂȘts français en Afrique du Sud, quel sera le rĂŽle de lâAfrique du Sud au sein dâune Afrique en crise, dans quelle mesure Paris et Pretoria sâavĂ©reront par- tenaires ou rivaux ? Autant de questions que ce volume cherche Ă dĂ©broussailler. Le livre est divisĂ© en quatre parties : la France et l'Afrique ; la France et lâ&i- que australe ; IâAtĂique du Sud et lâAfri- que francophone ; nouveau contexte, nouvelles directions ? Les articles qui forment ces diffĂ©rentes sections sont dâordre trĂšs divers - de lâanalyse histo- rique rigoureuse au rapport dâactivitĂ©s - et donnent Ă ce volume un ton dâactua- litĂ© qui sied aux sujets abordĂ©s. I1 faut cependant lui reconnaĂźtre une diversitĂ© un peu dĂ©concertante, le thĂšme mĂȘme de lâouvrage ne se prĂȘtant dâailleurs guĂšre Ă lâuniformisation.
Lâon retiendra de ce livre toute une sĂ©rie de prĂ©sentations utiles mais, peut- ĂȘtre plus particuliĂšrement, une excel- lente introduction de Chris Alden sur lâĂ©volution du rĂŽle de la France en Afri- que, une Ă©tude sĂ©rieuse de Chantal
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Cuddumbey sur la France et lâAfrique du Sud, un article intĂ©ressant dâEmeka Nwokedi sur la politique Ă©trangĂšre de la France en Afrique de lâOuest Ă lâaune du nouvel ordre intemational et un sti- mulant papier de Jean-Pascal Daloz sur la marginalisation intellectuelle de lâAfXque. Pans, Pretoria and the African Continent est lâun des premiers livres en anglais sur ce sujet et le lecteur de lan- gue anglaise y trouvera certainement une somme dâinformations sur la com- plexitĂ© des rapports entre la France et Y a q u e du Sud qui nâest disponible nulle part ailleurs. [Patrick Chabal]
excellent outil pour approcher Ă la fois la pĂ©riode de lâaparrheid et la nouvelle Afrique du Sud. I1 faut regretter que la typographie, la mise en page et la cou- verture soient des plus modestes; en souhaitant que cela qe dĂ©courage pas de nombreux lecteurs potentiels. On ne peut manquer de laisser briĂšvement la parole Ă lâauteur e ... PlutĂŽt que de faire un portrait biographique, jâai essayĂ© de cer- ner la dimension politique et lâombre lĂ©gen- daire que lâhomnze projette sur son envirotz- nement immĂ©diat et sur la sociĂ©tĂ© sud-africaine.. . u. Wean-Christophe Simon]
BOSCH (Alfred) -NelsonMandela : le JOHNSTON (Deborah) - Lesotho. - dernier titan. - Paris, LâHarmattan, Oxford, Clio, nouvelle Ă©dition 1996, 1996, 214 p. xvi-199 p.
Cet ouvrage trĂšs recommandable apporte Ă la fois une information dense et une analyse rĂ©digĂ©e dans un style ori- ginal. Le premier aspect fait de ce livre un travail de sciences politiques tout autant quâune biographie de celui qui fut un des piliers de 1âAfrican National Congress sous lâapartheid avant de devenir un des prisonniers politiques les plus cĂ©lĂšbres, pour terminer comme lâhomme dâEtat le plus en vue et le plus estimĂ© de la prĂ©sente dĂ©cennie, Co-Prix Nobel de la Paix en 1993. Le style de lâouvrage est probablement redevable autant Ă la personnalitĂ© de lâauteur, enseignant et journaliste Ă Barcelone (bien Ă©voquĂ©e par le prĂ©facier, C. Cou- lon) quâĂ la traduction du catalan - dont nous ne pouvons bien sĂ»r juger de la valeur. I1 prĂ©sente une analyse socio- politique solide, oĂč se mĂȘlent heureuse- ment des remarques critiques et des tou- ches dâillustrations baroques. I1 apporte Ă lâouvrage une authenticitĂ© qui renou- velle les Ă©crits universitaires et contraste avec la mĂ©diocritĂ© de maintes biogra- phies journalistiques ou Ă©crites sur com- mande. Les lecteurs bĂ©nĂ©ficieront dâune analyse serrĂ©e du parcours politique de Mandela (avec une excellente - et fort Ă©difiante - confrontation des thĂšses et des analyses des principaux auteurs sud- africains). La bibliographie constitue un
La ((World Bibliographical Series )) couvre maintenant plus de 193 pays et sâest enrichie dâune nouvelle Ă©dition sur le Lesotho sĂ©lectionnĂ©e et commentĂ©e. I1 sâagit de lâĂ©dition rĂ©visĂ©e de la biblio- graphie de David Punbrose et Shelagh Willet parue en 1980 dans la mĂȘme col- lection, et câest la plus, rĂ©cente bibliogra- phie sur ce pays. Son auteur, Deborah Johnston y a effectuĂ© de nombreuses recherches depuis 1989. Elle propose, par rapport Ă lâĂ©dition prĂ©cĂ©dente, des entrĂ©es thĂ©matiques diErentes comme par exemple (1 Constitution, Legal Sys- tem and human Rights i), (( International Relationsr ou encore {(Women and Gender Issues 1). Elle a pour intĂ©rĂȘt de prĂ©senter les titres parus aprĂšs 1950 et aussi de complĂ©ter lâĂ©dition de David Ambrose et Shelagh Willet en rĂ©parant ses oublis pour les ouvrages antĂ©rieurs, en abordant un certain type dâouvrages jusque-lĂ nĂ©gligĂ©s comme par exemple les autobiographies et mĂ©moires. De plus, lâĂ©dition de Deborah Johnston insiste sur le thĂšme des conditions de vie dans ce pays : les conditions sociales (enquĂȘtes de pauvret,Ă©, etc.), les services sociaux (santĂ©, etc.), ressources humai- nes et emploi, ripondant ainsi Ă la voca- tion de cette collection qui se veut plus axĂ©e sur une thĂ©matique de la vie quo- tidienne.
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Toutefois il est Ă noter que cette bibliographie ne mentionne pas celle publiĂ©e par 1â0 Institute of African Stu- dies o de lâuniversitĂ© du Lesotho, en 7volumes. Entreprise sous lâĂ©gide de David Ambrose, dâaoĂ»t 1982 fĂ©vrier 1984, il sâagissait dĂ©jĂ dâune mise 1 jour de sa prĂ©cĂ©dente publication qui prenait par exemple en compte des rapports non publiĂ©s, des thĂšses, sĂ©minaires, aupara- vant laissĂ©s de cĂŽtĂ©, et mettait lâaccent sur les ouvrages en fiançais alors que la bibliographie de Deborah Johnston sâadresse au lecteur anglophone exclusi- vement. [Caroline Abela]
DU BOIS DE GAUDUSSON (Jean), CONAC (Gérard), DESOUCHES (Christine) (dirs) - Les constitutions africaines publiées en langue &an- çaise (tome 1). - Paris, La Documen- tation française, 1997, 456 p.
On pourra regretter lâabsence de commentaire des constitutions prĂ©sen- tĂ©es, les textes Ă©tant seulement encadrĂ©s par une chronologie politique et des orientations bibliographiques. On apprĂ©ciera que ces textes de plus en plus difficiles Ă trouver soient ainsi mis Ă dis- position en espĂ©rant quâau moins le tome 3 sera consacrĂ© aux constitutions
des pays anglophones et lusophones. La nĂ©cessitĂ© de publier un recueil de texte constitutionnel relance Ă nouveau la question de lâabsence du droit en Afri- que. [Dominique Darbon]
(Collectif) - Pétrole et développe- ment dans le golfe de Guinée. - Ren- nes, Bulletin du CRIDEV no 4, 1996.
DâemblĂ©e est posĂ©e la problĂ©mati- que, Ă savoir que les richesses pĂ©troljĂšres nâont pas profitĂ© pleinement Ă ces Etats et Ă toutes les couches sociales des sociĂ©- tĂ©s qui y vivent. A cela les auteurs sâefforcent de rĂ©pondre. Lâouvrage nâest pas dĂ©nuĂ© dâintĂ©rĂȘt, car on y glane, au fil des pages des renseignements trĂšs prĂ©cieux, tel ce passage consacrĂ© au futur olĂ©oduc permettant dâamener le pĂ©trole tchadien au littoral du Came- roun. Mais ce nâest quâune sĂ©rie de six monographies construites toutes s,ur le mĂȘme plan (histoire rĂ©cente des Etats, bilan pĂ©trolier, consĂ©quences). Enfin et surtout nâest pas faite la dĂ©monstration scientifique, que le lecteur attendait, sur lâimportance des revenus pĂ©troliers et le pourcentage rĂ©ellement utilisĂ© (et par voie de consĂ©quence celui qui est dĂ©tournĂ©) de ces revenus. Câest dom- mage. [Serge Lerat]
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