Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la...

6
22 | La Lettre du Rhumatologue • N o 411 - avril 2015 MISE AU POINT Ligaments de Grayson Fascia digital latéral Fascia digital AC : aponévrose centrale ; FT : fascia thénarien ; FH : fascia hypothénarien. Ligament natatoire Fascia digitopalmaire Fascia palmaire Bande prétendineuse Ligament commissural proximal Ligament commissural distal FH FT AC Figure 1. Structures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1 re partie) : anatomie et bilan clinique Dupuytren’s Disease (part I): anatomy and clinical evaluation M. Chammas*, T. Waitzenegger*, T. Delcour* * Service de chirurgie de la main et du membre supérieur, hôpital Lapeyronie, CHU de Montpellier ; UFR de médecine, université de Montpellier. L a maladie de Dupuytren est une affection bénigne dont l’origine est une prolifération fibroblastique de l’aponévrose palmaire entraî- nant des rétractions des chaînes digitales en flexion pouvant altérer considérablement la fonction de la main. La maladie de Dupuytren survient géné- ralement à partir de 50 ans, avec une prévalence accrue dans les populations caucasiennes d’Eu- rope du Nord (1), touche davantage les hommes que les femmes (le ratio hommes/femmes est de 6 pour 1) [2], et est considérée comme une maladie génétique, avec un mode de transmission auto- somique dominant à pénétrance variable (3). Les autres facteurs de risque sont le diabète sucré (4), l’épilepsie et la consommation d’alcool et de tabac. Même si elle peut affecter n’importe quel doigt, il s’agit le plus souvent d’une atteinte de l’annulaire et de l’auriculaire, souvent bilatérale mais asymétrique. Rappels anatomiques Anatomie normale des structures aponévrotiques palmaires La peau palmaire de la main est attachée de façon relativement fixe au squelette osseux, ce qui lui permet d’être fixe lors des prises, contrairement à la peau dorsale, qui, elle, y est attachée de façon très souple. De plus, l’aponévrose palmaire renforce le revêtement cutané, augmentant sa résistance pour les prises manuelles. Les structures aponévrotiques palmaires sont constituées de différents éléments qui peuvent être atteints de façon variable dans la maladie de Dupuytren au niveau palmaire, palmodigital à la base des doigts ou au niveau digital (5) [figure 1 et tableau]. Au niveau de la paume de la main Aponévrose centrale De forme triangulaire, c’est la zone principalement intéressée par la maladie de Dupuytren. Il y a des composantes longitudinales, transversales et ver- ticales. Composantes longitudinales : bandes prétendi- neuses en avant des tendons fléchisseurs se terminant par une trifurcation en 3 couches : couche superficielle se terminant dans le derme entre pli palmaire distal et pli de flexion métacarpo- phalangien (MCP), expliquant ombilication et enva- hissement cutané à ce niveau ; couche intermédiaire se poursuivant par les bandes spirales qui passent sous les pédicules neuro- vasculaires et les ligaments natatoires pour ensuite contribuer à former le fascia digital latéral ; couche profonde verticale vers la gaine des fléchis- seurs. Composantes transversales : ligament natatoire. Il croise superficiellement la base des phalanges proximales et forme le squelette

Transcript of Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la...

Page 1: Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1re partie): anatomie et bilan clinique

22 | La Lettre du Rhumatologue • No 411 - avril 2015

MISE AU POINT

Ligaments de Grayson

Fasciadigitallatéral

Fascia digital

AC : aponévrose centrale ; FT : fascia thénarien ; FH : fascia hypothénarien.

Ligament natatoire

Fascia digitopalmaire

Fascia palmaire

Bande prétendineuse

Ligament commissuralproximal

Ligament commissuraldistal

FH FTAC

Figure 1. Structures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5) .

Maladie de Dupuytren (1re partie) : anatomie et bilan cliniqueDupuytren’s Disease (part I) : anatomy and cl inical evaluation

M. Chammas*, T. Waitzenegger*, T. Delcour*

* Service de chirurgie de la main et du membre supérieur, hôpital Lapeyronie, CHU de Montpellier ; UFR de médecine, université de Montpellier.

La maladie de Dupuytren est une affection bénigne dont l’origine est une prolifération fi broblastique de l’aponévrose palmaire entraî-

nant des rétractions des chaînes digitales en fl exion pouvant altérer considérablement la fonction de la main. La maladie de Dupuytren survient géné-ralement à partir de 50 ans, avec une prévalence accrue dans les populations caucasienne s d’Eu-rope du Nord (1), touche davantage les hommes que les femmes (le ratio hommes/femmes est de 6 pour 1) [2], et est considérée comme une maladie génétique, avec un mode de transmission auto-somique dominant à pénétrance variable (3). Les autres facteurs de risque sont le diabète sucré (4), l’épilepsie et la consommation d’alcool et de tabac. Même si elle peut affecter n’importe quel doigt, il s’agit le plus souvent d’une atteinte de l’annulaire et de l’auriculaire, souvent bilatérale mais asymétrique.

Rappels anatomiques

Anatomie normale des structures aponévrotiques palmaires

La peau palmaire de la main est attachée de façon relativement fi xe au squelette osseux, ce qui lui permet d’être fi xe lors des prises, contrairement à la peau dorsale, qui, elle, y est attachée de façon très souple. De plus, l’aponévrose palmaire renforce le revêtement cutané, augmentant sa résistance pour les prises manuelles.Les structures aponévrotiques palmaires sont constituées de différents éléments qui peuvent être atteints de façon variable dans la maladie de Dupuytren au niveau palmaire, palmodigital à la base des doigts ou au niveau digital (5) [fi gure 1 et tableau].

◆ Au niveau de la paume de la mainAponévrose centraleDe forme triangulaire, c’est la zone principalement intéressée par la maladie de Dupuytren. Il y a des composantes longitudinales, transversales et ver-ticales.

➤ Composantes longitudinales : bandes prétendi-neuses en avant des tendons fl échisseurs se terminant par une trifurcation en 3 couches :

• couche superfi cielle se terminant dans le derme entre pli palmaire distal et pli de fl exion métacarpo-phalangien (MCP), expliquant ombilication et enva-hissement cutané à ce niveau ;

• couche intermédiaire se poursuivant par les bandes spirales qui passent sous les pédicules neuro-vasculaires et les ligaments natatoires pour ensuite contribuer à former le fascia digital latéral ;

• couche profonde verticale vers la gaine des fl échis-seurs.

➤ Composantes transversales : • ligament natatoire. Il croise superfi ciellement la

base des phalanges proximales et forme le squelette

0022_LRH 22 29/04/2015 17:04:27

Page 2: Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1re partie): anatomie et bilan clinique

La Lettre du Rhumatologue • No 411 - avril 2015 | 23

Points forts » Il existe 3 structures aponévrotiques palmaires, palmodigitales et digitales au niveau de la main. La plupart

de ces éléments peuvent être atteints dans la maladie de Dupuytren. Le bilan clinique doit permettre de préciser le ou les types de brides à l’origine des rétractions et leurs rapports neurovasculaires. Le test de la table de Hueston permet de distinguer les formes sans rétraction (test négatif) dans lequel la main peut être mise à plat sur la table et les formes avec rétraction (test positif).

» Quatre principales formes cliniques sont individualisées : la forme nodulaire palmaire sans rétraction, la forme palmaire avec rétraction métacarpophalangienne, la forme digitale isolée avec rétraction inter-phalangienne proximale, la forme palmodigitale avec rétraction métacarpophalangienne, interphalangienne proximale, voire interphalangienne distale.

» La notion de diathèse doit être précisée en cas de début précoce avant 50 ans, chez un homme, d’atteinte bilatérale, d’antécédents familiaux ou de localisations ectopiques.

Mots-clés Maladie de Dupuytren

Fascia palmaire

Aponévroses de la main

Highlights » There are 3  aponeurotic

structures in the hand: palm, palmodigital and digital. In Dupuytren’s disease, most of these structures may be affected. The clinical appraisal must make it possible to specify the type or types of cords at the origin of retrac-tions and their neurovascular relationships. With Hueston’s table test, it is possible to distinguish the forms without retraction, in which the hand may be put flat on the table (the test is negative), from the forms with retraction (the test is positive). » Four main clinical forms may

be distinguished: the palmar nodular form without retrac-tion, the palmar form with metacarpophalangeal retrac-tion, the isolated digital form with proximal interphalangeal retraction, the palmodigital form with metacarpophalan-geal, proximal interphalangeal or even distal interphalangeal retraction. » The notion of diathesis must

be specified in cases of early onset before 50 years, in men, for bilateral damage, family history, and ectopic locations.

KeywordsDupuytren’s disease

Palmar fascia

Hand aponeurosisfibreux des commissures interdigitales. Il contribue à la formation des fascias digitaux latéraux ;

• ligament transverse superficiel. Il est sous-jacent aux 4 bandes prétendineuses en regard des plis palmaires distal et moyen. C’est l’origine des septa de Legueu et Juvara qui protègent les pédicules neurovasculaires. Il joue un rôle de poulie addition-nelle aux tendons fléchisseurs.

➤ Composantes verticales : • septa de Legueu et Juvara. Ils sont sous le ligament

transverse superficiel. Il y en a 8, un radial et un ulnaire pour chaque rayon digital des doigts longs, qui délimitent 4 défilés ostéofibreux contenant les tendons fléchisseurs séparés par 3 défilés contenant les nerfs et vaisseaux digitaux communs ainsi que les muscles lombricaux.

Tableau. Structures aponévrotiques normales de la main et correspondances pathologiques.

Localisation Aponévrose normale

Aponévrose pathologique

Rapports avec les pédicules neurovasculaires

Conséquences

Fascia palmaire

Aponévrose radiale

Bandelette prétendineuse Bride prétendineuse Superficielle/pédicules Rétraction des MCP

Ligament commissural distal

Bride commissurale distale

Superficielle/pédicules Rétraction de la 1re commissure

Ligament commissural proximal

Bride commissurale proximale

Superficielle/pédicules Rétraction de la 1re commissure

Aponévrose centrale

Bandelette prétendineuse Bride prétendineuse Médiane entre les 2 pédicules Rétraction des MCP

Septa de Legueu et Juvara Bride verticale Au contact des pédicules

Ligament transverse Non atteint dans la maladie de Dupuytren

Sous les brides prétendineuses

Aponévrose ulnaire

Expansion de l’abducteur du 5e doigt

Bride digitale isolée

Autres constituants :• fascia digital latéral• ligaments de Grayson• bande prétendineuse

Rapports avec le pédicule identiques aux brides spirales ou latérales

Rétraction des MCP

Fascia palmodigital

Ligament natatoire Bride natatoire Superficiel/pédicules Rétraction commissurale

Bande spirale Bride spirale des autres constituants :• fascia digital latéral• ligaments de Grayson• bande prétendineuse

Déplace le pédicule neurovasculaire en superficie

Rétraction des MCP et IPP

Fascia digital

Bandelette prétendineuse Bride centrale Médiane entre les 2 pédicules Rétraction des IPP

Fascia digital latéral Bride latérale Déplace le pédicule neurovasculaire vers la ligne médiane

Rétraction des IPP ± IPD

Fibres rétrovasculaires Bride rétrovasculaire En arrière du pédicule Rétraction des IPP ± IPD

IPD : articulations interphalangiennes distales ; IPP : articulations interphalangiennes proximales ; MCP : articulations métacarpophalangiennes.

0023_LRH 23 29/04/2015 17:04:28

Page 3: Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1re partie): anatomie et bilan clinique

24 | La Lettre du Rhumatologue • No 411 - avril 2015

MISE AU POINTMaladie de Dupuytren (1re partie) : anatomie et bilan clinique

Aponévrose radiale ➤ Bande prétendineuse du pouce, très fine. ➤ Ligament commissural distal (prolongement du

ligament natatoire du côté radial). ➤ Ligament commissural proximal (prolongement

du ligament transverse superficiel de l’aponévrose palmaire).

➤ Fascia thénarien.

Aponévrose ulnaire ➤ Bande prétendineuse du 5e rayon. ➤ Fascia hypothénarien. ➤ Expansion (coalescence) de l’abducteur du

5e doigt.

◆ Au niveau des doigts ➤ Fascia digital latéral : il est dense sur les côtés et

plus ou moins cylindrique, avec des renforcements que sont les ligaments de Grayson et Cleland.

➤ Ligaments de Grayson : tendus de la gaine des tendons fléchisseurs à la peau latérale du doigt en palmaire par rapport au pédicule neurovasculaire.

➤ Ligaments de Cleland : tendus de la face latérale de la phalange à la peau latérale du doigt, en dorsal par rapport aux pédicules.

➤ Fibres rétrovasculaires.

Aponévrose pathologique

Toutes les structures aponévrotiques de la main ne sont pas atteintes par la maladie de Dupuytren (tableau). La fibrose rétractile atteint essentielle-ment les plans superficiels de l’aponévrose centrale. Les aponévroses thénarienne et hypothénarienne sont rarement intéressées (6). Le ligament trans-verse superficiel n’est pas atteint (7) ; cependant, son prolongement dans la première commissure appelé ligament commissural proximal peut être envahi avec rétraction.

Notion de diathèse

Le terme de diathèse de Dupuytren a été introduit par Hueston (8) puis complété par Hindocha et al. (9) ; elle comporte les critères suivants :

➤ un début précoce avant 50 ans ; ➤ un sujet de sexe masculin ; ➤ une atteinte bilatérale ; ➤ l’origine ethnique (elle est fréquente chez les

Anglo-Saxons et les Scandinaves, moins fréquente dans les populations méditerranéennes, exceptionnelle

chez les Noirs, les Indiens et les Chinois). Dans cer-taines régions du Japon et de Taïwan, la prévalence est la même qu’en Europe du Nord ;

➤ des antécédents familiaux ; ➤ des localisations ectopiques (coussinets dorsaux

interphalangiens, maladie de Ledderhose, maladie de Lapeyronie). Hindocha et al. (9) ont retrouvé un risque de récidive après traitement chirurgical de 71 % lorsque tous les critères étaient présents, alors que ce risque est de 23 % en l’absence d’au moins 1 de ces critères.

Bilan clinique

La maladie de Dupuytren provoque la formation de nodules souvent inauguraux, d’ombilications cutanées, puis de brides qui peuvent être à l’origine de rétraction digitales. L’évolution se fait en règle générale par poussées, avec une activité variable. L’évolution n’est pas prévisible et ne se fait pas sur le mode linéaire. Les patients présentant des facteurs de risque de diathèse doivent être prévenus du fait que l’aggravation est quasi certaine.Il s’agit le plus souvent d’une atteinte bilatérale asymétrique. Les lésions peuvent être uni- ou pluri-digitales et prédominent au niveau des 4e et, surtout, 5e doigts.Le test de la table de Hueston permet de distinguer les formes sans rétraction (test négatif), où la main peut être mise à plat sur la table, et les formes avec rétraction (test positif), où la main se décolle de la table.Quatre principales formes cliniques sont individua-lisées :

➤ la forme nodulaire palmaire sans rétraction (test de la table de Hueston négatif) ;

➤ la forme palmaire avec rétraction MCP (figure 2A) ;

➤ la forme digitale isolée avec rétraction inter-phalangienne proximale (IPP) [figure 2B] ;

➤ la forme palmodigitale avec rétraction MCP, IPP, voire interphalangienne distale (IPD).Au-delà de 60° de flessum IPP, il y a une distension de la bandelette médiane de l’appareil extenseur affaiblissant la force d’extension active du doigt et favorisant une récidive partielle du flessum après traitement.Au fur et à mesure de l’évolution, une rétrac-tion en flexion capsuloligamentaire articulaire, observée surtout au niveau IPP, compliquera la rétraction en flexion des parties molles périarticu-laires des doigts à cause de la bride pathologique.

0024_LRH 24 29/04/2015 17:04:28

Page 4: Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1re partie): anatomie et bilan clinique

La Lettre du Rhumatologue • No 411 - avril 2015 | 25

MISE AU POINT

Pédiculevasculonerveux

Bride spirale

Bride spiraleissue d’un noduleprétendineux

Bride spiraleissue del’abducteurdu V

Bride spirale

Nerf collatéralMusclelombrical

A B

C

Bride centrale

Bride latérale

Bride natatoire

Bride prétendineuse

Figure 3. A. Différents types de brides au niveau digital (d’après Alnot et Tubiana) .B. Deux types de bride spirale au bord ulnaire du 5e doigt (d’après Alnot et Tubiana) .C. Bride spirale soulevant le pédicule vasculonerveux, le rendant d’autant plus superfi ciel en sous-cutané que la rétraction est importante (d’après Alnot et Tubiana) .

A

B

Figure 2. A. Forme palmaire avec bride prétendi-neuse. B. Forme digitopalmaire avec fl essum inter-phalangien proximal . Au niveau du pouce, bride prétendineuse, nodule adhérant au pli de fl exion MCP, bride commissurale.

Section percutanée, dégradation enzymatique ou résection chirurgicale de la bride ne suffiront pas à redonner l’extension digitale. Seule une libéra-tion articulaire, ou arthrolyse, pourra redonner l’extension digitale.En cas de rétraction en fl exion IPP sévère, une hyper-extension IPD est fréquente, occasionnant une déformation de type boutonnière.L’envahissement du ligament natatoire entraîne un défaut d’écartement des doigts longs par rétraction des commissures interdigitales. S’il s’agit des liga-ments commissuraux distal ou proximal, il y a une rétraction de la 1re commissure.

Caractéristiques selon le rayon atteint

➤ Pour le pouce, il y a souvent un nodule adhé-rant à la peau au pli de fl exion MCP, qui peut être connecté (fi gure 2B) :

• à une bride commissurale distale se prolongeant par une bride latérale sur l’index ;

• à une bride commissurale proximale ;

• à une bride prétendineuse pouvant rétracter à un degré variable la MCP. Parfois, il y a une bride radiale rétractant l’ IP .Ces brides sont superfi cielles par rapport aux pédi-cules qui sont assez médians au niveau du pouce.

➤ Pour l’index, qui est peu souvent atteint, il y a une continuité entre une bride commissurale distale de la 1re commissure et une bride du fascia latéral sur le bord radial pouvant occasionner une rétraction IPP.

➤ Pour les 3e et 4e doigts, plusieurs variétés de brides digitales existent, qui ont été bien décrites par McFarlane (10) [fi gure 3] :

• la bride axiale digitopalmaire : elle constitue le pro-longement de la bandelette prétendineuse. Elle est médiane entre les 2 pédicules et très adhérente à la peau au niveau de l’IPP et s’attache en aval de l’IPP à la gaine des fl échisseurs ou au périoste de la 2e phalange ;

• la bride latérale : elle naît en proximal au niveau du ligament natatoire et est constituée par l’enva-hissement du fascia digital latéral. Elle s’interpose entre la peau et le pédicule vasculonerveux, qu’elle peut refouler vers la ligne médiane (figure 3A).

0025_LRH 25 29/04/2015 17:04:29

Page 5: Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1re partie): anatomie et bilan clinique

26 | La Lettre du Rhumatologue • No 411 - avril 2015

MISE AU POINTMaladie de Dupuytren (1re partie) : anatomie et bilan clinique

Stade I : 1°-45°

1° à 45°

30°

45°

80°

45°

85°

45°30°

50°

10°

50°

10°110°

110°

45°

80°

70°

Stade IV : > 135°Stade II : 45°-90°

Stade III D+

Stade IV D+

Stade IV H+

D+ : rétraction interphalangienne proximale > 60°. H+ : raideur en extension interphalangienne distale et déformation en boutonnière.

Stade II D+

Stade III : 90°-135°

Figure 4. Classifi cation des rétractions digitales selon Tubiana, Michon et Thomine (11).

Distalement, elle s’insère dans le derme, avec parfois une extension fi breuse qui s’insère sur la gaine fi breuse à la base de la 2e phalange passant en avant du pédicule vasculonerveux ;

• la bride spirale, qui a un trajet spiralé autour du pédicule vasculonerveux. Cette bride provenant de la bande spirale passe d’abord sous le pédicule puis rejoint le fascia digital latéral pour ensuite recroiser le pédicule en passant en superfi cie par rapport à lui et enfi n se fi xer à la gaine des fl échisseurs (via le ligament de Grayson) ou bien à la base de la 2e phalange. Au fur et à mesure de l’aggravation de la déformation, le pédicule est déplacé vers la ligne médiane, mais surtout vers la surface cutanée (fi gure 3C), ce qui a pour conséquence un risque de lésion lors de toute dissection ou aponévrotomie percutanée à ce niveau ;

• la bride rétrovasculaire longitudinale, qui emprunte la bandelette rétrovasculaire, se prolongeant jusqu’à

la phalange distale avec rétraction de l’IPP et, parfois, de l’IPD. Ces fi bres rétrovasculaires non excisées pourraient être responsables d’une récidive.

➤ Pour l’auriculaire, qui est le doigt le plus souvent atteint, les brides présentent des caractères parti-culiers (fi gure 3B) :

• il peut y avoir une bride digitale isolée latérale ou spiralée provenant du tendon de l’abducteur du 5e doigt sans extension à l’aponévrose palmaire. Il y a alors une rétraction IPP sans rétraction en fl exion MCP ;

• le plus souvent, l’atteinte est palmaire et digitale avec rétraction en fl exion MCP et IPP, voire IPD, avec un ou plusieurs des types de brides décrits précé-demment. La participation de l’abducteur du 5e doigt est quasi constante. L’auriculaire peut être attiré en abduction quand la commissure avec l’annu laire n’est pas envahie ;

• c’est à l’auriculaire que les rétractions IPP les plus importantes sont observées ; elles peuvent atteindre les 90°. Dans ce cas, il peut y avoir une hyperextension IPD, susceptible de ne pas se réduire lors de la fl exion digitale, créant une déformation en boutonnière.

Degré de déformation

L’importance de la rétraction peut être chiffrée en utilisant la classifi cation en 4 stades de Tubiana, Michon et Thomine (11), avec maintenant 6 stades pour les 4 doigts longs (fi gure 4) :

➤ stade 0 : absence de lésion ; ➤ stade N : nodule palmaire ou digital sans rétraction ; ➤ stade I : total des rétractions des 3 articulations

(MCP, IPP, IPD) entre 1 et 45° ; ➤ stade II : total des rétractions des 3 articulations

entre 45 et 90° ; ➤ stade III : total des rétractions des 3 articulations

entre 90 et 135° ; ➤ stade IV : total des rétractions des 3 articulations

supérieur à 135° ; lorsqu’il y a une hyperextension IPD, on parle de stade IV H+.En ce qui concerne la colonne du pouce, Tubiana propose une double évaluation :

➤ à la première commissure, en 5 stades corres-pondant à des pertes de 15° (stade 0 : absence de lésion ; stade N : nodule sans rétraction ; stade I : angle d’écartement entre 45 et 30° ; stade II : angle d’écartement entre 30 et 15° ; stade III : angle d’écar-tement inférieur à 15°) ;

➤ Pour la MCP et l’interphalangienne, chaque stade correspond à une progression de 45°, avec 6 stades, comme pour les doigts longs. ■

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

0026_LRH 26 29/04/2015 17:04:29

Page 6: Maladie de Dupuytren anatomie et bilan cliniqueStructures aponévrotiques palmaires normales de la main et des doigts (5). Maladie de Dupuytren (1re partie): anatomie et bilan clinique

MISE AU POINT

Journées Francophones d’Hépato-gastroentérologie et d’Oncologie Digestive

Avec le soutien institutionnel de

ROME 10-13 JUIN

2015RETROUVEZ-NOUS À PARTIR DU 10 JUIN SUR :

www.edimark.fr/ejournaux/EULAR/2015Site réservé aux professionnels de santé

Attention, ceci est un compte-rendu de congrès et/ou un recueil de résumés de communications de congrès dont l’objectif est de fournir des informations sur l’état actuel de la recherche ; ainsi, les données présentées sont susceptibles de ne pas être validées par les autorités de santé françaises et ne doivent donc pas être mises en pratique. Le contenu est sous la seule responsabilité du coor-donnateur, des auteurs et du directeur de la publication qui sont garants de son objectivité. Sous l’égide de La Lettre du Rhumatologue Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson - Rédacteur en chef : Pr Bernard Combe (Montpellier)Cet e-journal est édité par Edimark SAS, 2, rue Sainte-Marie - 92418 Courbevoie Cedex - Tél. : 01 46 67 63 00 - Fax : 01 46 67 63 10

E-journal en direct des JFHOD 2013

JEUDIMERCREDI VENDREDI SAMEDI

11 JUIN10 JUIN 12 JUIN 13 JUIN

Journées Francophones d’Hépato-gastroentérologie Journées Francophones d’Hépato-gastroentérologie et d’Oncologie Digestiveet d’Oncologie Digestive

E-journal en direct des JFHOD 2013JFHOD 2013E-journal

JFHOD 2013E-journal

EUropean League Against Rheumatism

E-journal en direct de l’EULAR 2015

1. Ross DC. Epidemiology of Dupuytren’s disease. Hand Clin 1999;15:53-62, vi.

2. Wilbrand S, Ekbom A, Gerdin B. The sex ratio and rate of reoperation for Dupuytren’s contracture in men and women. J Hand Surg Br 1999;24:456-9.

3. Ling RS. The genetic factor in Dupuytren’s disease. J Bone Joint Surg Br 1963;45:709-18.

4. Chammas M, Bousquet P, Renard E, Poirier JL, Jaffiol C, Allieu Y. Dupuytren’s disease, carpal tunnel syndrome, trigger finger, and diabetes mellitus. J Hand Surg Am 1995;20:109-14.

5. Rayan GM. Dupuytren disease: Anatomy, patho-logy, presentation, and treatment. J Bone Joint Surg Am 2007;89:189-98.

6. Watson HK, Fong D. Dystrophy, recurrence, and salvage procedures in Dupuytren’s contracture. Hand Clin 1991;7:745-55; discussion 757-8.

7. Skoog T. Dupuytren’s contracture: pathogenesis and surgical treatment. Surg Clin North Am 1967;47:433-44.

8. Hueston J. Dupuytren’s contracture. J Hand Surg Br 1993;18:806.

9. Hindocha S, Stanley JK, Watson S, Bayat A. Dupuytren’s diathesis revisited: Evaluation of prognostic indicators for risk of disease recurrence. J Hand Surg Am 2006;31:1626-34.

10. McFarlane RM. Patterns of the diseased fascia in the fingers in Dupuytren’s contracture. Displacement of the neurovascular bundle. Plast Reconstr Surg 1974;54:31-44.

11. Tubiana R, Michon J, Thomine JM. Scheme for the assess-ment of deformities in Dupuytren’s disease. Surg Clin North Am 1968;48:979-84.

Références bibliographiques

AutoévAluAtion

1. Quelles sont les complications d’une rétraction interphalangienne proximale supérieure à 60° ? Quelles en sont les conséquences ?

2. Les pédicules neurovasculaires sont rarement déviés par les brides pathologiques au niveau palmaire.

3. Les pédicules neurovasculaires sont rarement déviés par les brides pathologiques au niveau digital.

Réponses : 1. Rétraction capsuloligamentaire interphalangienne proximale, distension de l’appareil extenseur. Section percutanée, dégradation enzymatique ou résection chirurgicale de la bride sans libération articulaire ne suffiront pas à redonner l’extension digitale.2. Vrai.3. Faux, les brides spirales, notamment, les dévient en position superficielle sous-cutanée ou médiane à la base des doigts.

0027_LRH 27 29/04/2015 17:04:31