LA PRISE EN CHARGE DES TROUBLES...
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UNIVERSITE MONTPELLIER I
UFR DE MEDECINE
THESE
Pour obtenir le grade de
DOCTEUR EN MEDECINE
Présentée et soutenue publiquement
Par
Marine COUVREUR
Le 6 mars 2015
LA PRISE EN CHARGE DES TROUBLES SOMATIQUES A LA MAISON DES
ADOLESCENTS DE L’HERAULT : PERCEPTIONS ET ATTENTES DES
PROFESSIONNELS. UNE ETUDE QUALITATIVE.
JURY
Président : Professeur Amaria BAGHDADLI,
Professeur des Universités – Praticien Hospitalier
Assesseurs : Docteur Pascale FABBRO-PERAY,
Maitre de Conférence des Universités – Praticien Hospitaliser
Professeur Michel AMOUYAL,
Professeur Associé
Directeur de thèse : Docteur Philippe TRICHARD
ANNEE UNIVERSITAIRE 2014 - 2015
PERSONNEL ENSEIGNANT
Professeurs Honoraires
ALLIEU Yves ALRIC Robert AUSSILLOUX Charles AVEROUS Michel AYRAL Guy BAILLAT Xavier BALDY-MOULINIER Michel BALMES Jean-Louis BALMES Michel BALMES Pierre BANSARD Nicole BAYLET René BILLIARD Michel BLARD Jean-Marie BLAYAC Jean Pierre BONNEL François BOUDET Charles BOURGEOIS Jean-Marie BRUEL Jean Michel BUREAU Jean-Paul BRUNET Michel CALLIS Albert CANAUD Bernard CASTELNAU Didier CHAPTAL Paul-André CIURANA Albert-Jean CLOT Jacques D’ATHIS Françoise DEMAILLE Jacques DESCOMPS Bernard DIMEGLIO Alain DU CAILAR Jacques DUBOIS Jean Bernard DUMAS Robert
DUMAZER Romain ECHENNE Bernard ELEDJAM Jean Jacques FABRE Serge FREREBEAU Philippe GALIFER René Benoît GODLEWSKI Guilhem GRASSET Daniel GROLLEAU-RAOUX Robert GUILHOU Jean-Jacques HERTAULT Jean HUMEAU Claude JAFFIOL Claude JANBON Charles JANBON François JARRY Daniel JOYEUX Henri LABAUGE Robert LAFFARGUE François LALLEMANT Jean Gabriel LAMARQUE Jean-Louis LAPEYRIE Henri LESBROS Daniel LOPEZ François Michel LORIOT Jean LOUBATIERES Marie Madeleine MAGNAN DE BORNIER Bernard MARY Henri MATHIEU-DAUDE Pierre MEYNADIER Jean-Charles MICHEL François-Bernard
MICHEL Henri MIMRAN Albert MION Charles MION Henri MIRO Luis NAVARRO Maurice NAVRATIL Henri OTHONIEL Jacques PAGES Michel PEGURET Claude POUGET Régis PUECH Paul PUJOL Henri PUJOL Rémy RABISCHONG Pierre RAMUZ Michel RIEU Daniel RIOUX Jean-Antoine ROCHEFORT Henri ROUANET DE VIGNE LAVIT Jean Pierre SANCHO-GARNIER Hélène SANY Jacques SENAC Jean-Paul SERRE Arlette SIMON Lucien SOLASSOL Claude SUQUET Pierre THEVENET André VIDAL Jacques VISIER Jean Pierre
Professeurs Emérites
ARTUS Jean-Claude
BLANC François
BLOTMAN Francis
DEDET Jean-Pierre
GUERRIER Bernard
JOURDAN Jacques
MONNIER Louis
PREFAUT Christian
ROSSI Michel
SULTAN Charles
TOUCHON Jacques
UFR Médecine Montpellier-Nîmes univ-montp1.fr
ANNEE UNIVERSITAIRE 2014 - 2015
PERSONNEL ENSEIGNANT
Professeurs des Universités - Praticiens Hospitalie rs
PU-PH de classe exceptionnelle ASENCIO Gérard Chirurgie orthopédique et Traumatologique BACCINO Eric Médecine légale et droit de la santé BONAFE Alain Radiologie et imagerie médicale BOULENGER Jean Philippe Psychiatrie d’adultes ; addictologie BOUSQUET Jean Pneumologie ; addictologie
BRINGER Jacques - Doyen Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ; gynécologie médicale
CAPDEVILA Xavier Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence CLAUSTRES Mireille Génétique COMBE Bernard Rhumatologie COSTA Pierre Urologie CRAMPETTE Louis Oto-rhino-laryngologie DAURES Jean Pierre Epidémiologie, Economie de la santé et Prévention
DAUZAT Michel Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire : option médecine vasculaire
DAVY Jean Marc Cardiologie DE LA COUSSAYE Jean Emmanuel Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence DOMERGUE Jacques Chirurgie générale GUILLOT Bernard Dermato-vénéréologie
HAMAMAH Samir Biologie et Médecine du développement et de la reproduction ; gynécologie médicale
HEDON Bernard Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale HERISSON Christian Médecine physique et de réadaptation
JEANDEL Claude Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
JONQUET Olivier Réanimation ; médecine d’urgence LANDAIS Paul Epidémiologie, Economie de la santé et Prévention LARREY Dominique Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie MARES Pierre Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale MARTY-ANE Charles Chirurgie thoracique et cardiovasculaire MERCIER Jacques Physiologie MILLAT Bertrand Chirurgie digestive MOURAD Georges Néphrologie PELISSIER Jacques Médecine physique et de réadaptation REYNES Jacques Maladies infectieuses, maladies tropicales
RIBSTEIN Jean Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
SCHVED Jean François Hématologie; Transfusion UZIEL Alain Oto-rhino-laryngologie
UFR Médecine Montpellier-Nîmes univ-montp1.fr
VANDE PERRE Philippe Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière VOISIN Michel Pédiatrie
PU-PH de 1re classe
ALBAT Bernard Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
ALRIC Pierre Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire (option chirurgie vasculaire)
AVIGNON Antoine Nutrition AZRIA David Cancérologie ; radiothérapie BASTIEN Patrick Parasitologie et mycologie BEREGI Jean-Paul Radiologie et imagerie médicale
BLAIN Hubert Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
BLANC Pierre Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie BOULOT Pierre Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale CHAMMAS Michel Chirurgie orthopédique et traumatologique COLSON Pascal Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence COSTES Valérie Anatomie et cytologie pathologiques COTTALORDA Jérôme Chirurgie infantile COUBES Philippe Neurochirurgie COURTET Philippe Psychiatrie d’adultes ; addictologie CRISTOL Jean Paul Biochimie et biologie moléculaire CYTEVAL Catherine Radiologie et imagerie médicale DAUVILLIERS Yves Physiologie
DE TAYRAC Renaud Gynécologie-obstétrique, gynécologie médicale (option gynécologie-obstétrique)
DE WAZIERES Benoît Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
DELAPORTE Eric Maladies infectieuses ; maladies tropicales DEMARIA Roland Chirurgie thoracique et cardio-vasculaire DEREURE Olivier Dermatologie - vénéréologie DUFFAU Hugues Neurochirurgie
DUJOLS Pierre Biostatistiques, informatique médicale et technologies de la communication
ELIAOU Jean François Immunologie FABRE Jean Michel Chirurgie générale FRAPIER Jean-Marc Chirurgie thoracique et cardiovasculaire HAMEL Christian Ophtalmologie
JABER Samir Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence (option anesthésiologie-réanimation)
JORGENSEN Christian Thérapeutique ; médecine d’urgence ; addictologie KLEIN Bernard Hématologie ; transfusion KOENIG Michel Génétique Moléculaire KOTZKI Pierre Olivier Biophysique et médecine nucléaire KLOUCHE Kada Réanimation ; médecine d’urgence LABAUGE Pierre Neurologie
UFR Médecine Montpellier-Nîmes univ-montp1.fr
LAVABRE-BERTRAND Thierry Cytologie et histologie
LE QUELLEC Alain Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
LEFRANT Jean-Yves Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence LEHMANN Sylvain Biochimie et biologie moléculaire LEROUX Jean Louis Rhumatologie LUMBROSO Serge Biochimie et Biologie moléculaire MARIANO-GOULART Denis Biophysique et médecine nucléaire MAUDELONDE Thierry Biologie cellulaire MAURY Michèle Pédopsychiatrie ; addictologie MESSNER Patrick Cardiologie MEUNIER Laurent Dermato-vénéréologie MONDAIN Michel Oto-rhino-laryngologie MORIN Denis Pédiatrie NAVARRO Francis Chirurgie générale PAGEAUX Georges-Philippe Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
PETIT Pierre Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie
PUJOL Jean Louis Pneumologie ; addictologie PUJOL Pascal Biologie cellulaire
QUERE Isabelle Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire (option médecine vasculaire)
RENARD Eric Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ; gynécologie médicale
RIPART Jacques Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence ROUANET Philippe Cancérologie ; radiothérapie SAINT AUBERT Bernard Cancérologie ; radiothérapie SARDA Pierre Génétique SOTTO Albert Maladies infectieuses ; maladies tropicales TAOUREL Patrice Radiologie et imagerie médicale YCHOU Marc Cancérologie ; radiothérapie ZANCA Michel Biophysique et médecine nucléaire
PU-PH de 2ème classe
AGUILAR MARTINEZ Patricia Hématologie ; transfusion ASSENAT Éric Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie BAGHDADLI Amaria Pédopsychiatrie ; addictologie BORIE Frédéric Chirurgie digestive BOURDIN Arnaud Pneumologie ; addictologie CAMBONIE Gilles Pédiatrie CAMU William Neurologie CANAUD Ludovic Chirurgie vasculaire ; Médecine Vasculaire CANOVAS François Anatomie CAPTIER Guillaume Anatomie CARTRON Guillaume Hématologie ; transfusion CAYLA Guillaume Cardiologie
UFR Médecine Montpellier-Nîmes univ-montp1.fr
CHANQUES Gérald Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence CORBEAU Pierre Immunologie COSTALAT Vincent Radiologie et imagerie médicale COULET Bertrand Chirurgie orthopédique et traumatologique DADURE Christophe Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence DE VOS John Cytologie et histologie DEMOLY Pascal Pneumologie ; addictologie DORANDEU Anne Médecine légale - DROUPY Stéphane Urologie DUCROS Anne Neurologie - DUPEYRON Arnaud Médecine physique et de réadaptation
FESLER Pierre Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
GARREL Renaud Oto-rhino-laryngologie GENEVIEVE David Génétique GUILLAUME Sébastien Urgences et Post urgences psychiatriques - GUITER Jacques Urologie GUIU Boris Radiologie et imagerie médicale HAYOT Maurice Physiologie KALFA Nicolas Chirurgie infantile KOUYOUMDJIAN Pascal Chirurgie orthopédique - LAFFONT Isabelle Médecine physique et de réadaptation LALLEMANT Benjamin ORL - LAVIGNE Jean-Philippe Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière LE MOING Vincent Maladies infectieuses ; maladies tropicales LECLERCQ Florence Cardiologie MATECKI Stéfan Physiologie MAURY Philippe Chirurgie orthopédique et traumatologique MOREL Jacques Rhumatologie NOCCA David Chirurgie digestive PASQUIE Jean-Luc Cardiologie PEREZ MARTIN Antonia Physiologie
PERNEY Pascal Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
POUDEROUX Philippe Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie PRUDHOMME Michel Anatomie PURPER-OUAKIL Diane Pédopsychiatrie ; addictologie RAFII TABRIZI Jérémie Gynécologie - Obstétrique RIVIER François Pédiatrie ROGER Pascal Anatomie et cytologie pathologiques ROSSI Jean François Hématologie ; transfusion SEGNARBIEUX François Neurochirurgie SIRVENT Nicolas Pédiatrie SOLASSOL Jérôme Biologie cellulaire TOUITOU Isabelle Génétique
UFR Médecine Montpellier-Nîmes univ-montp1.fr
TRAN Tu-Anh Pédiatrie VERNHET Hélène Radiologie et imagerie médicale VILLAIN Max Ophtalmologie
VINCENT Denis Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie
WOJTUSCISZYN Anne Endocrinologie-diabétologie-nutrition
PROFESSEURS DES UNIVERSITES
COLINGE Jacques (Cancérologie, Signalisation cellulaire et systèmes complexes)
LAOUDJ CHENIVESSE Dalila (Biochimie et biologie moléculaire)
VISIER Laurent (Sociologie, démographie)
PROFESSEURS DES UNIVERSITES - Médecine générale
BOURREL Gérard
LAMBERT Philippe
PROFESSEURS ASSOCIES - Médecine Générale
AMOUYAL Michel
DAVID Michel
PROFESSEUR ASSOCIE - Médecine
PANARO Fabrizio (Chirurgie générale)
niv-montp1.fr
ANNEE UNIVERSITAIRE 2014 - 2015
PERSONNEL ENSEIGNANT
Maîtres de Conférences des Universités - Praticiens Hospitaliers
MCU-PH Hors classe CHARACHON Sylvie Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
HILLAIRE-BUYS Dominique Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie
LACHAUD Laurence Parasitologie et mycologie
MICHEL Françoise Biochimie et biologie moléculaire
PIGNODEL Christine Anatomie et cytologie pathologiques
PRAT Dominique Anatomie
PRATLONG Francine Parasitologie et mycologie
RAMOS Jeanne Anatomie et cytologie pathologiques
RICHARD Bruno Thérapeutique ; médecine d’urgence ; addictologie
RISPAIL Philippe Parasitologie et mycologie
SEGONDY Michel Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
MCU-PH de 1re classe
ALLARDET-SERVENT Annick Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
BADIOU Stéphanie Biochimie et biologie moléculaire
BOUDOUSQ Vincent Biophysique et médecine nucléaire
BOULLE Nathalie Biologie cellulaire
CACHEUX-RATABOUL Valère Génétique
CARRIERE Christian Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
FABBRO-PERAY Pascale Epidémiologie, économie de la santé et prévention
GIANSILY-BLAIZOT Muriel Hématologie ; transfusion
GIRARDET-BESSIS Anne Biochimie et biologie moléculaire
GODREUIL Sylvain Bactériologie-virologie
LAVIGNE Géraldine Hématologie ; transfusion
MOLINARI Nicolas Biostatistiques informatique et technologies de la communication
NAGOT Nicolas Biostatistiques informatique et technologies de la communication
PARIS Françoise Biologie et médecine du développement et de la reproduction
PELLESTOR Franck Cytologie et histologie
PHILIBERT Pascal Biologie et médecine du développement et de la reproduction
PUJOL Joseph Anatomie
niv-montp1.fr
RAVEL Christophe Parasitologie et mycologie
RIGAU Valérie Anatomie et cytologie pathologiques
SCHUSTER-BECK Iris Physiologie
STERKERS Yvon Parasitologie et mycologie
STOEBNER Pierre Dermato-vénéréologie
SULTAN Ariane Nutrition
TUAILLON Edouard Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
VINCENT Thierry Immunologie
YACHOUH Jacques Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie
MCU-PH de 2éme classe
MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES - Médecine G énérale
COSTA David
MAITRES DE CONFERENCES ASSOCIES - Médecine Générale CLARY Bernard
DUTILLEUL Patrick
FOLCO-LOGNOS Béatrice
GARCIA Marc
RAMBAUD Jacques
BOURGIER Céline Cancérologie ; Radiothérapie
BRET Caroline Hématologie biologique
BRUN Michel Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
COSSEE Mireille Génétique Moléculaire
GABELLE DELOUSTAL Audrey Neurologie
GALANAUD Jean Philippe Médecine Vasculaire
GRAAFLAND Hubert Hématologie ; transfusion
GUILPAIN Philippe Médecine Interne
JEZIORSKI Éric Pédiatrie
JUNG Boris Anesthésie-réanimation ; médecine d’urgence
MATHIEU Olivier Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie
MEKKAOUI Choukri Radiologie et imagerie médicale
MENJOT de CHAMPFLEUR Nicolas Neuroradiologie
MOUZAT Kévin Biochimie et biologie moléculaire
PANABIERES Catherine Biologie cellulaire
SEBBANE Mustapha Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence
THURET Rodolphe Urologie
ANNEE UNIVERSITAIRE 2014 - 2015
PERSONNEL ENSEIGNANT
Maitres de Conférences des Universités
Maîtres de Conférences hors classe
BADIA Eric Sciences biologiques fondamentales et cliniques
CHAMBON Monique Sciences biologiques fondamentales et cliniques
PROVANSAL Monique Sciences biologiques fondamentales et cliniques
SIESO Victor Sciences biologiques fondamentales et cliniques
Maîtres de Conférences de classe normale
AOUN Manar Science biologiques, fondamentales et cliniques
BECAMEL Carine Neurosciences
BERNEX Florence Physiologie
CADILHAC-BONNET Claire Sciences du langage : linguistique et phonétique générales
CHAUMONT-DUBEL Séverine Sciences du médicament et des autres produits de santé
CHAZAL Nathalie Biologie cellulaire
DELABY Constance Biochimie et biologie moléculaire
DUFFOUR Jacqueline Sciences du médicament et des autres produits de santé
GUGLIELMI Laurence Sciences biologiques fondamentales et cliniques
HENRY Laurent Sciences biologiques fondamentales et cliniques
LADRET Véronique Mathématiques appliquées et applications des mathématiques
LAINE Sébastien Sciences du Médicament et autres produits de santé
LE GALLIC Lionel Sciences du médicament et autres produits de santé
LOZZA Catherine Sciences physico-chimiques et technologies pharmaceutiques
MAIMOUN Laurent Sciences physico-chimiques et ingénierie appliquée à la santé
MOREAUX Jérôme Science biologiques, fondamentales et cliniques
MORITZ-GASSER Sylvie Neurosciences
MOUTOT Gilles Philosophie
NEVEU Dorine Sciences biologiques fondamentales et cliniques
PASSERIEUX Emilie Physiologie
TAULAN Magalie Biologie Cellulaire
VIGNAUD Mireille Sciences du médicament et des autres produits de santé
-montp1.fr
ANNEE UNIVERSITAIRE 2014 - 2015
PERSONNEL ENSEIGNANT
Praticiens Hospitaliers Universitaires
DU THANH Aurélie Dermato-vénéréologie
FAILLIE Jean-Luc Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie
FUNAKOSHI Natalie Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
GAUJOUX-VIALA Cécile Rhumatologie
GOUZI Farès Physiologie
HERLIN Christian Chirurgie plastique ; reconstructrice et esthétique ; brûlologie
HERRERO Astrid Chirurgie générale
LETOUZEY Vincent Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
LUKAS Cédric Rhumatologie
MICHON Anne-Laure Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
MURA Thibault Biostatistiques, informatique médicale et technologies de la communication
THOUVENOT Eric Neurologie
VENAIL Frédéric Oto-Rhino-Laryngologie
Remerciements
Au Professeur Amaria BAGHDADLI. Vous avez accepté de présider le jury de cette thèse,
veuillez recevoir mes sincères remerciements pour l’intérêt que vous avez porté à mon travail.
Au Docteur Pascale FABBRO-PERAY et au Professeur Michel AMOUYAL. Vous avez
accepté de prendre part au jury de cette thèse, veuillez recevoir ma gratitude pour votre
disponibilité.
Au Docteur Philippe TRICHARD. Tu m’as donné l’opportunité de faire ce travail de thèse à la
Maison des Adolescents de l’Hérault et tu m’as accompagné tout au long de sa réalisation. Je te
remercie pour ces échanges enrichissants.
Aux professionnels de la Maison des Adolescents de l’Hérault. Vous m’avez accueilli avec
bienveillance dans « votre maison » et avez fait preuve d’une grande disponibilité. Au delà de
votre participation aux entretiens, vous avez su me faire partager votre engagement
professionnel. Vous m’avez permis de partager avec vous les Journées Nationales des Maisons
des Adolescents. Je vous remercie.
A Zoé Dagniaux et Maëva Garin. Nos échanges autour de votre activité d’interne de Médecine
Générale à la Maisons des Adolescents de l’Hérault ont beaucoup apporté à mon travail. Je vous
remercie pour votre investissement.
A mes parents et à mes sœurs. Vos relectures attentives et conseils éclairés m’ont été d’une
grande aide. Je vous remercie pour votre soutien sans faille.
A Sylvie. Ton accompagnement pour mon travail de thèse et depuis le début de mes études est
précieux. Je t’en remercie.
A mes amis. Je vous remercie pour vos encouragements et conseils tout au long de ce travail.
SOMMAIRE
INTRODUCTION ......................................................................................................................... 1
1. Les adolescents et leur santé ............................................................................................... 1
1.1. Définir l’adolescence .................................................................................................... 1
1.2. Adolescents et système de soin ..................................................................................... 2
1.3. Morbi-mortalité à l’adolescence ................................................................................... 2
1.4. Comportements de santé et santé perçue des adolescents ............................................ 3
2. Le dispositif Maison des Adolescents ................................................................................. 6
2.1. Les Maisons des Adolescents au cœur des enjeux stratégiques de santé publique....... 6
2.2. Missions et objectifs des Maisons des Adolescents ...................................................... 7
2.3. La Maison des Adolescents de l’Hérault (MDA34) ..................................................... 8
3. L’objet de recherche .......................................................................................................... 10
3.1. Problématique ............................................................................................................. 10
3.2. Objectifs ...................................................................................................................... 11
METHODE .................................................................................................................................. 12
1. Choix de l’approche qualitative ........................................................................................ 12
2. Conception de l’enquête .................................................................................................... 12
2.1. Population ................................................................................................................... 12
2.2. Mode d’accès aux interviewés .................................................................................... 13
2.3. Recueil des caractéristiques des participants et des conditions de réalisation ............ 13
2.4. Réalisation des entretiens ............................................................................................ 14
3. Analyse des entretiens ....................................................................................................... 15
3.1. Retranscription ............................................................................................................ 15
3.2. Analyse thématique ..................................................................................................... 15
4. Approches complémentaires ............................................................................................. 16
4.1. Observation sur le terrain ............................................................................................ 16
4.2. Lien avec les autres MDA ........................................................................................... 16
4.3. Lien avec les internes en SASPAS à la MDA34 ........................................................ 16
RESULTATS ............................................................................................................................... 17
1. Caractéristiques des entretiens .......................................................................................... 17
2. Les troubles somatiques des adolescents abordés par les professionnels ......................... 18
2.1. Une distinction somatique/psychique parfois compliquée ......................................... 18
2.2. Les questionnements liés au corps .............................................................................. 19
2.3. Les manifestations physiques de troubles psychiques ................................................ 20
2.4. La consommation de substances psycho-actives et les conduites addictives ............. 24
2.5. Les plaintes en lien avec des pathologies organiques ................................................. 24
3. Le recours aux soins somatiques des adolescents ............................................................. 27
3.1. Le refus de voir le médecin généraliste « de famille » ............................................... 27
3.2. L’absence de lien avec un médecin généraliste .......................................................... 29
3.3. L’absence d’obstacle au recours soin ......................................................................... 30
4. Les attentes des professionnels vis-à-vis de l’organisation de la prise en charge somatique
à la MDA34 ............................................................................................................................... 32
4.1. L’intérêt d’une consultation de médecine générale à la MDA34 ............................... 32
4.2. Les limites et réticences à la consultation de médecine générale à la MDA34 .......... 37
4.3. L’orientation vers l’extérieur ...................................................................................... 40
5. Les spécificités de l’approche de la santé à la MDA34 .................................................... 43
5.1. L’interdisciplinarité ..................................................................................................... 43
5.2. La promotion de la santé ............................................................................................. 45
5.3. L’approche socio-culturelle ........................................................................................ 46
5.4. Un lieu de recherche et d’expérimentation ................................................................. 47
DISCUSSION .............................................................................................................................. 49
1. Forces et limites méthodologiques du travail .................................................................... 49
1.1. S’intéresser au regard des professionnels : un choix .................................................. 49
1.2. L’approche qualitative par entretiens individuels ....................................................... 49
1.3. L’échantillon des participants ..................................................................................... 50
1.4. Le recueil des données ................................................................................................ 50
1.5. L’analyse qualitative ................................................................................................... 51
2. Principaux résultats ........................................................................................................... 51
2.1. La prise en charge somatique à la MDA34 : une alternative à la médecine générale
libérale ................................................................................................................................... 51
2.2. L’intérêt d’une approche conjointe psyche-soma ....................................................... 53
2.3. L’interdisciplinarité à la MDA34 : forces et obstacles ............................................... 57
2.4. Une approche biopsychosociale de la santé de l’adolescent ....................................... 59
3. La prise en charge somatique dans les autres MDA ......................................................... 61
3.1. Les consultations « somatiques » au sein des MDA ................................................... 61
3.2. Les structures partenaires pour la prise en charge somatique ..................................... 62
3.3. Au delà des consultations, d’autres approches ........................................................... 62
3.4. L’hétérogénéité des MDA, limite à la comparaison ................................................... 63
4. Perspectives pour la MDA34 ............................................................................................ 63
4.1. Implications pratiques ................................................................................................. 63
4.2. Perspectives de recherche ........................................................................................... 64
CONCLUSION ............................................................................................................................ 65
BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................................................... 67
ANNEXES .................................................................................................................................... 70
Annexe 1 : Charte de l’Association Nationale des Maisons des Adolescents .......................... 70
Annexe 2 : Cahier des charges des Maisons des Adolescents .................................................. 73
Annexe 3 : Chiffres clés de rapport d’activité 2013 de la MDA34 ........................................... 78
Annexe 4 : Note d’information aux participants ....................................................................... 79
Annexe 5 : Guide d’entretien .................................................................................................... 80
Annexe 6 : Questionnaire de pré-consultation du Pr Alvin ...................................................... 81
Annexe 7 : « Météo perso » INPES .......................................................................................... 82
Annexe 8 : Questionnaire MDA Yvelines Sud ......................................................................... 83
CD ROM : Verbatims des entretiens
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Arbre thématique 1 : troubles somatiques des adolescents évoqués par les professionnels ......... 26
Arbre thématique 2 : recours aux soins somatiques des adolescents ............................................ 31
Arbre thématique 3 : organisation de la prise en charge somatique à la MDA34 ......................... 42
Arbre thématique 4 : spécificités de l'exercice à la MDA34 ......................................................... 48
LISTE DES ABREVIATIONS
ADAGES : Association de Développement d’Animation et de Gestion d’Etablissements
Spécialisés
ANMDA : Association Nationale des Maisons des Adolescents
ARS : Agence Régionale de Santé
CFTMEA : Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfant et de l’Adolescent
CHRU : Centre Hospitalier Régional Universitaire
CMP : Centre Médico-Psychologique
CMPP : Centre Médico-Psycho-Pédagogique
CPE : Conseiller Principal d’Education
CREAI-ORS : Centre Régional d’Etudes, d’Actions et d’Informations en faveur des personnes
en situation de vulnérabilité – Observatoire Régional de Santé
DSM-IV-TR: Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, 4th edition, Text Revision
HIV: Human Immunodeficiency Virus
INPES : Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé
IVG : Interruption Volontaire de Grossesse
MDA(34) : Maison des Adolescents (de l’Hérault)
MLI : Mission Locale d’Insertion
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
PAEJ : Point Accueil Ecoute Jeunes
PEPA : Point Ecoute Parents Adolescents
PJJ : Protection Judiciaire de la Jeunesse
PRS : Projet Régional de Santé
SASPAS : Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée
UNICEF: Fond de Nations Unis pour l’Enfance
WONCA: World Organization of Family Doctors
1
INTRODUCTION
Comment définir l’adolescence ? Quelles sont les particularités de cette période de la vie
en termes de santé ? Comment les instances politiques ont-elles pris en main la santé des
adolescents, amenant entre autres à la création des Maisons des Adolescents ? Quelles sont les
spécificités de la Maison des Adolescents de l’Hérault (MDA34) ?
1. Les adolescents et leur santé
1.1. Définir l’adolescence
L’adolescence est une période de transition au cours de laquelle un sujet n’est plus tout à
fait un enfant, mais pas encore l’adulte qu’il est en passe de devenir. L’adolescence ne
correspond pas à une entité mais à un ensemble de phénomènes, dont la notion fondamentale est
celle du changement. Les transformations à la fois biologiques, psychiques et sociales, ancrées
dans un contexte socioculturel donné, conduisant à un bouleversement identitaire (1).
La définition de l’adolescence ne peut être restreinte à une classe d’âge. Elle est au moins
double, médicale et sociologique.
Sur le plan médical, l’adolescence est la période transitoire débutant avec les premiers
signes pubertaires et se terminant avec l’accession de la maturité physiologique de l’âge adulte.
L’OMS la situe entre 10 et 19 ans (2). Il s’agit d’une période de transformations du corps qui
conduit notamment à la maturation sexuelle, associée à l’affirmation de l’identité sexuelle
propre.
Du point de vie sociologique l’adolescence s’inscrit dans un processus identitaire
d’autonomisation, se mettant à l’œuvre au sein de la famille, dans les établissements scolaires et
auprès des pairs (3).
« C’est dans ce temps de bouleversement pubertaire visible, défini par l’apparition des
caractères sexuels secondaires, que va s’élaborer un travail psychique interne de deuil et
d’individuation, à l’articulation de deux générations ; moment fécond dans la destinée de
l’homme centré sur l’interrogation de son identité, qui suis-je ? et confronté dans son
émancipation à une périphérie sociale » (4).
2
Etre en bonne santé physique et psychique constitue un bon atout pour franchir cette
période de transition vers l’âge adulte qu’est l’adolescence. C’est aussi à cette période que sont
adoptés des nouveaux comportements en matière de santé.
1.2. Adolescents et système de soin
L’adolescent acquiert progressivement une autonomie vis-à-vis de la prise en charge
médicale, qu’il s’agisse du choix du médecin, de la prise en rendez-vous, ou de la venue à la
consultation. L’organisation du système de soin favorise cette autonomisation (5).
A partir de 16 ans, chaque bénéficiaire de l’Assurance Maladie reçoit sa propre carte
vitale, avec son numéro d’immatriculation propre, lui permettant de gagner de l’autonomie dans
ses démarches de soin. Il peut aller consulter le professionnel de santé de son choix sans en faire
part à ses parents.
Cependant cette autonomie est relative car le jeune est généralement dépendant de ses
parents financièrement. Dans les situations où il doit avancer les frais médicaux, il est donc
compliqué de ne pas éveiller l’intérêt de ses parents. Jusqu’à l’âge de 20 ans, l’individu est
considéré comme ayant droit de ses parents. Les frais médicaux sont généralement remboursés
sur le compte bancaire du parent.
Concernant le parcours de soin coordonné, rappelons que jusqu’à 16 ans il n’y a pas
nécessité de déclarer un médecin traitant. A partir de 16 ans, le jeune doit faire le choix d’un
médecin traitant pour respecter le parcours de soin coordonné. Entre 16 et 18 ans l’accord ou la
signature du titulaire de l’autorité parentale est nécessaire.
1.3. Morbi-mortalité à l’adolescence
A l’adolescence, la plupart des jeunes sont objectivement en bonne santé, comme en
témoignent les taux de mortalité et de morbidité inférieurs à ceux des adultes et des enfants plus
jeunes.
Au premier janvier 2011, les 15-24 ans constituaient 12,4% de la population française
(6). Les principales causes de décès étaient les accidents de la route et les suicides. Les
principales pathologies dont souffraient les jeunes étaient (6) :
- Les maladies oculaires, concernant 25 % des garçons et 32 % des filles.
- Les manifestations respiratoires et ORL dont souffrent 19 % des garçons et 20 % les
filles.
3
- Les pathologies cutanées atteignant 9 % des garçons et 11 % des filles.
1.4. Comportements de santé et santé perçue des adolescents
Outre les chiffres de morbi-mortalité, l’analyse des comportements des adolescents en
matière de santé1 est indispensable. Quatre études récentes apportent de nombreux éléments de
compréhension des comportements de santé et recueillent une appréciation de leur santé par les
jeunes eux-mêmes, à l’échelle nationale et régionale (Languedoc Roussillon).
Le rapport « La Santé des Collégiens » analyse les données françaises de l’enquête
internationale Health Behaviour In School-Aged Children (7) réalisée en 2010 auprès d’environ
14000 collégiens âgés de 11 à 15 ans. L’image de la santé donnée par les adolescents eux-mêmes
est contrastée :
- Ils sont 95 % à déclarer que leur santé est « plutôt » ou « très » satisfaisante par rapport
aux jeunes de leur âge. Ce chiffre est cependant légèrement inférieur chez les filles et
diminue avec l’âge.
- 15 à 30 % des adolescents interrogés présentent des plaintes psychiques telles que des
difficultés d’endormissement, une irritabilité, une nervosité, se sentent déprimés ; ainsi
que des symptômes physiques comme des maux de tête, de dos ou de ventre. Ces
plaintes sont une fois et demie à deux fois plus nombreuses chez les jeunes filles. Elles
sont récurrentes et multiples (au moins deux symptômes plus d’une fois par semaine)
chez 30 % des garçons et chez une fille sur deux.
- Le recours aux médicaments n’est pas négligeable. 15 % des garçons et 20 % des filles
ont pris des médicaments au cours du mois précédent pour des céphalées.
- Quatre collégiens sur 10 ont eu recours à un médecin ou un infirmier pour une blessure
au cours de l’année, avec une récurrence de trois fois ou plus pour 10 % des jeunes.
- 19,2 % se déclarent porteurs d’une maladie chronique ou d’un handicap.
La perception de la santé est affectée par les influences sociales et culturelles. Les
adolescents jugeant leur santé mauvaise et faisant état d’une symptomatologie riche et récurrente
sont ceux qui ont un mode de vie à risque, une certaine solitude, un vécu scolaire défavorable. Et
inversement.
1 « La notion de comportement lié à la santé correspond à tout comportement ou toute activité faisant partie de la vie
quotidienne mais qui influe sur l’état de santé de la personne. Presque tous les comportements ou activités peuvent
avoir une influence sur la santé et dans ce contexte il peut être utile de considérer les comportements liés à la santé
comme partie intégrante des modes de vie d’un individu ou d’un groupe. » (Banque de données en Santé Publique)
4
Le « Baromètre Santé 2010 » fait état des comportements de santé des jeunes français.
Les données sont issues d’une enquête téléphonique réalisée auprès de 6000 jeunes (8). 96 % des
jeunes de 15-30 ans se déclarent plutôt en bonne santé. 3,8 % ont une représentation négative de
leur santé. Il s’agit en majorité de chômeurs et de personnes présentant des comportements
à risque (fumeurs quotidiens, consommateur d’alcool à risque chronique). Les jeunes interrogés
disent avoir un niveau d’information très élevé sur le tabac, l’alcool, la contraception et le SIDA.
79,2 % ont consulté au moins une fois un médecin généraliste au cours des 12 derniers mois.
Le rapport « Adolescents en France, le grand malaise » publié par l’UNICEF en octobre
2014 (9) analyse les résultats de la consultation nationale des 6-18 ans réalisée entre mars et mai
2014. 11232 enfants et adolescents ont répondu à un questionnaire explorant quatre axes : les
droits, la vie de tous les jours, l’éducation et les loisirs, la santé. L’axe santé explorait
majoritairement les dimensions psychiques.
36,5 % des adolescents interrogés peuvent être considérés en souffrance psychologique.
28 % ont déjà eu des pensées suicidaires et 11 % ont tenté de se suicider. Le maillage social
constitué des relations familiales, des établissements scolaires et de l’environnement proche,
semble être le principal vecteur de la souffrance psychoaffective.
L’étude « Santé des Jeunes de 15-25 ans en Languedoc-Roussillon » (10) a été menée en
2007 puis 2012 par le CREAI-ORS dans le cadre du diagnostic Santé Jeunes commandité par le
Conseil Régional. L’objectif de cet état des lieux régional était de produire de la connaissance
sur les conditions de vie et de santé des jeunes en de la région Languedoc-Roussillon, afin
d’orienter les actions et les programmes visant les jeunes, de faire évoluer la conscience des
risques et leur gestion par les jeunes, et de mieux identifier les déterminants socio-économiques
de la santé chez les jeunes.
3420 questionnaires ont été auto-administrés à trois publics : les apprentis, les jeunes
des missions locales d’insertion, les étudiants. Ils exploraient les conditions de vie, la
perception de la santé, les conduites alimentaires, les addictions, la vie affective et contraception,
la violence et les accidents. Les résultats obtenus ont été comparés entre les trois publics et avec
ceux de l’enquête similaire menée en 2007.
5
Les résultats principaux sont les suivants :
- La perception de la santé a été évaluée par le profil de Duke2. Les différentes dimensions
de la santé (santé physique, santé mentale et santé sociale) ressenties sont plus
favorables chez les garçons, chez les étudiants et chez les jeunes avec une
qualification bac et plus.
- Il existe une hausse de la proportion de jeunes qui sont dans le déni du risque lié à la
prise d’alcool, entre 2007 et 2012. Ce phénomène est plus accentué chez les jeunes avec
une qualification bac et plus.
- La surcharge pondérale est en aggravation significative entre 2007 et 2012.
- Le recours à l’aide alimentaire chez les jeunes est en augmentation, concernant 25,2%
des jeunes sans qualification en 2012.
- La non-utilisation de moyen de contraception à chaque rapport sexuel est en
augmentation. Les plus négligents sont les garçons, les jeunes suivis en MLI et les jeunes
sans qualification. Le recours à l’IVG est en augmentation.
- Le recours à un médecin généraliste dans les six mois est de 88,8% chez les apprentis,
86% chez les jeunes suivis en MLI et 90,9% des étudiants.
- Le renoncement au soin est relevé chez un tiers des jeunes suivis en MLI, un quart des
apprentis et 20% des étudiants. La principale raison évoquée est financière.
Ces quatre enquêtes nous montrent que les jeunes eux-mêmes se perçoivent globalement
en bonne santé, ce qui avait déjà été mis en évidence par plusieurs études dans les années 1990-
2000 (11,12).
Ceci étant, le tableau dressé dans ces récentes études donne une image plus nuancée.
Elles attirent l’attention sur les comportements de santé témoignant d’un mal-être, dont les
manifestations peuvent s’exprimer de façon somatique :
- les attaques du corps avec au premier plan le suicide, deuxième cause de décès de cette
classe d’âge,
- les consommations de substances psycho-actives,
- les plaintes physiques multiples et récurrentes.
2 Instrument générique de mesure de la qualité de vie liée à la santé. Comporte 17 questions regroupées en plusieurs
dimensions (physique, mentale, sociale, santé perçue, incapacité, anxiété, douleur, estime de soi et dépression).
6
Autre éclairage majeur de ces enquêtes, tant à l’échelle nationale que du Languedoc-
Roussillon : les inégalités sociales de santé n’épargnent pas les jeunes. Ils « héritent » des
difficultés socio-économiques de leurs parents, notamment en matière d’accès aux soins. Au delà
des contraintes économiques, la situation de précarité va de pair avec certains comportements de
santé défavorables (13).
Cet effort de compréhension des comportements de santé des jeunes s’inscrit dans les
orientations actuelles des politiques publiques, avec notamment la volonté de rééquilibrer la
politique de santé au profit d’une action sur les déterminants de santé.
2. Le dispositif Maison des Adolescents
2.1. Les Maisons des Adolescents au cœur des enjeux stratégiques de
santé publique
La notion de « capital-santé » constitué au cours de l’adolescence préoccupe les instances
politiques depuis la fin des années 1990.
En 1997 le Haut Comité de Santé Publique publie un rapport intitulé « Santé des enfants,
santé des jeunes » (14) dans lequel la jeunesse est décrite comme une phase de transition
marquée par des conduites à risque et nécessitant une prise en charge globale.
La loi de Santé Publique du 9 aout 2004 (15) met en avant le principe de « protection de
la jeunesse » : les objectifs et plans stratégiques doivent systématiquement prendre en compte
l’amélioration de la santé des nourrissons, des enfants et des adolescents.
C’est dans ce contexte de focalisation des politiques publiques autour de la santé des
jeunes que naissent les Maisons des Adolescents. A la suite du rapport de la Défenseure des
enfants en 2003 puis de la Conférence de la famille en 2004, les instances politiques se
positionnement clairement en faveur de la création d’un dispositif de type Maison des
Adolescents. Cette volonté est réaffirmée par le rapport de 2007 de la Défenseure des enfants
(16).
Plus récemment, le Plan « Santé des jeunes » (17) centré sur 15-25 ans, présenté en 2008,
donne aux Maisons des Adolescent un rôle central : « des Maisons des Adolescents destinées
aux jeunes en grande vulnérabilité seront créées dans tous les départements d’ici 2010 ». Il a été
suivi d’une série de mesures spécifiques énoncées dans la loi « Hôpital, Patients, Santé,
Territoires » en juillet 2009.
7
Comme le souligne A. de Fleurian dans son très riche travail de thèse « la Maison des
adolescents, écho d’un changement sociétal ? » (18), rappelons que « les instances politiques se
sont appuyées sur une dynamique déjà engagée par le secteur sanitaire. La création de la
première Maison des adolescents par le Groupe hospitalier du Havre remonte à 1999. Il s’agissait
alors de créer un lieu d’accueil spécifique pour adolescent, temporellement compatible avec la
réalité adolescente et détaché d’une image hospitalière. »
Ainsi, reprenant un projet émanant du sanitaire, les pouvoirs publics ont voulu
mutualiser les compétences autour de l’adolescence, en associant au soin d’autres champs
d’action. L’ensemble des intervenants, relevant de différents organismes de tutelle, ont eu pour
mission, dans chaque département, de créer un projet satisfaisant pour tous et adapté aux
besoins spécifiques du territoire. Ces structures doivent se fondre dans le paysage installé et y
assurer une meilleure coordination et une lisibilité pour le public. Cela explique la grande
diversité de fonctionnement des différentes Maisons des Adolescents.
L’Association Nationale des Maisons des Adolescents, fondée à Caen en 2008, fédère et
homogénéise le fonctionnement de la centaine de structures existantes, autour de la Charte des
Maisons des adolescents (annexe 1).
2.2. Missions et objectifs des Maisons des Adolescents
Le Programme national de soutien aux Maison des Adolescents a été lancé en 2004 à
l’issue de la Conférence de la famille. Il a pour mission d’accompagner la création des Maisons
des Adolescents. Le comité de pilotage du programme sélectionne les projets en accord avec le
Cahier des charges des Maisons des Adolescents (annexe 2), décrivant les objectifs et les
conditions requises, élaboré par la délégation interministérielle de la famille en janvier 2005. Les
projets choisis reçoivent un soutien financier de l’état qui s’associe aux financements obtenus
auprès des partenaires locaux.
8
S. Rivet (19) synthétise les missions, objectifs et organisation des MDA :
« Les Maisons des Adolescents ont pour mission d’informer, conseiller, accompagner
les adolescents, leurs familles et les acteurs au contact des jeunes. Les MDA sont des lieux
polyvalents où la santé est considérée à la fois dans sa dimension physique, psychique,
relationnelle et sociale, éducative. Les MDA sont ouvertes aux adolescents et leurs familles,
mais également aux professionnels au contact de l’adolescence (Education nationale, justice,
service sociaux, police…) et soucieux de s’informer ou de faire part de leurs difficultés. Ce sont
des structures ouvertes, situées dans des lieux facilement repérables et accessibles (idéalement en
centre ville), gratuites et offrant des plages horaires d’accueil souples et adaptées.
Elles ont pour vocation de mettre en œuvre les objectifs généraux suivants :
- Apporter une réponse de santé et, plus largement, prendre soin des adolescents en leur offrant
les prestations les mieux adaptées à leurs besoins et attentes.
- Fournir aux adolescents des informations, des conseils, une aide au développement de projet de
vie.
- Favoriser l’accueil en continu par des professionnels divers.
- Garantir la continuité et la cohérence des prises en charge.
- Constituer un lieu ressource sur un territoire donné pour l’ensemble des acteurs concernés par
l’adolescence (familles, professionnels, institutions). »
2.3. La Maison des Adolescents de l’Hérault (MDA34)
2.3.1. La santé des jeunes, une priorité régionale
Institué par la loi HPST du 21 juillet 2009 en même temps que les ARS, le Projet
Régional de Santé (PRS) fixe tous les cinq ans les orientations et les actions contribuant à
améliorer la santé de la population.
En Languedoc-Roussillon la santé des adolescents et des jeunes a été définie par le
PRS comme une préoccupation prioritaire. « Le « mal-être » et les difficultés d’accès à la
santé de cette population en font une priorité pour une approche globale de promotion de santé
(santé mentale, éducation à la sexualité, accessibilité) qui sera mise en œuvre de façon
coordonnée et territorialisée. » (20).
Dans le domaine de la santé mentale, un focus est porté sur les adolescents et les jeunes
adultes avec pour objectif d’éviter les ruptures de parcours en santé mentale.
9
C’est dans ce contexte national et régional qu’est née la Maison des Adolescents de
l’Hérault (MDA34).
2.3.2. Création de la MDA34
Depuis le début des années 2000, le « collectif montpelliérain pour une Maison des
Adolescents » réfléchissait à l’idée d’une maison commune entre l’hôpital et les organisations de
la ville.
En janvier 2008, l’Agence Régionale Hospitalière mandate l’association ADAGES et le
CHRU pour concrétiser le projet d’une Maison des Adolescents à Montpellier, pour le territoire
de l’Hérault (21). La MDA34 a ouvert ses portes le 3 septembre 2012 dans ses locaux actuels, au
9 rue de la République à Montpellier.
La MDA34 est portée par un groupement de coopération sociale et médico-sociale. Il
associe des acteurs impliqués dans la question de l’adolescence : le CHRU de Montpellier,
l’association ADAGES, et l’association Montpellier Ados. Le groupement assure le portage
juridique, technique et financier du projet. Les financements sont issus de l’Etat, de l’ARS, du
Conseil Général de l’Hérault, de la ville de Montpellier, de la Fédération des Hôpitaux de Paris
Hôpitaux de France (22).
2.3.3. Fonctionnement de la MDA34
La MDA34 regroupe de façon permanente une équipe comprenant, en avril 2014 (22) :
- un éducateur spécialisé,
- un responsable Technologies de l’Information et de la Communication,
- une secrétaire de direction, une secrétaire d’accueil, une maitresse de maison,
- deux pédopsychiatres, un psychiatre,
- trois psychologues,
- une infirmière art-thérapeute,
- deux assistantes de service social,
- un directeur,
- une animatrice coordinatrice de projets,
- un animateur culturel.
D’autres professionnels interviennent de façon ponctuelle : psychologue spécialisée en
addiction, stagiaires de tous métiers, dont un interne en médecine générale.
Son fonctionnement peut être décrit selon quatre axes :
10
- L’axe Accueil, mission première d’une MDA. Il s’agit d’un accueil physique,
téléphonique ou numérique, qui a pour objectif d’établir un climat de confiance. Les
plages horaires sont étendues, du lundi au samedi.
- L’axe Santé Social. Les jeunes et/ou leur famille peuvent être reçus dans un second
temps lors d’un entretien dit d’accueil. Cet entretien réalisé par un binôme de
professionnels mixte est destiné à prendre le temps de mieux percevoir la situation du
jeune de façon globale. A son issue, la situation est discutée en équipe pluridisciplinaire.
Il en résulte des propositions de suivi ou d’orientation, faites à l’adolescent et/ou à ses
parents.
Le soin s’organise au sein de la MDA34 par des consultations auprès de l’infirmière, des
psychologues, des médecins psychiatres et pédopsychiatres qui réalisent une évaluation
puis un suivi clinique si nécessaire. Un entretien avec une assistante de service social
peut également être proposé.
- L’axe Socio-culturel. Les activités socioculturelles recouvrent plusieurs fonctions. Elles
permettent entre autre de proposer un accompagnement plus global à certains jeunes.
- L’axe Ressources et réseau auprès des partenaires.
3. L’objet de recherche
3.1. Problématique
A l’automne 2013, certains professionnels de la MDA34 ont exprimé le fait qu’ils étaient
sollicités par les adolescents présentant des « problèmes somatiques ». Ils pensaient nécessaire
de prendre en charge ces plaintes à la MDA34, mais n’avaient aucun moyen d’y répondre.
Rappelons que les médecins exerçant à la MDA34 étaient jusqu’alors des pédopsychiatres et
psychiatres.
Le lien a été fait avec le Dr Philippe Trichard, médecin généraliste et maitre de stage des
universités à Montpellier. Il a été décidé de mettre en place une consultation de médecine
générale réalisée par un interne de médecine générale en fin d’internat dans le cadre d’un
SASPAS3.
La prise en charge des aspects physiques, ou somatiques, de la santé des adolescents est
inscrite dans le cahier des charges des Maisons des Adolescents et rappelée dans la charte de
3 Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée. L’interne en fin de cursus réalise des
consultations une demi-journée par semaine à la MDA34. Il est encadré par le Dr Trichard, médecin généraliste
maitre de stage universitaire, et un pédopsychiatre à la MDA.
11
l’Association Nationale des MDA : « […] il est toutefois indispensable de retrouver une plate-
forme d’évaluation des manifestations adolescentes, et la possibilité de dispenser, au moins à
court terme ; des soins somatiques et psychiques. » (23)
Ainsi il nous paraissait intéressant d’améliorer la compréhension de ce besoin exprimé
par les professionnels de l’adolescence de la MDA34 autour de la prise en charge de la santé
somatique. Quels sont ces « problèmes somatiques » auxquels ils sont confrontés ? Comment
perçoivent-ils les plaintes et questionnements somatiques des adolescents ? Comment imaginent-
ils le rôle de la MDA34 dans les réponses à y apporter ?
3.2. Objectifs
L’objectif principal de ce travail était d’analyser le besoin exprimé par les professionnels
de la MDA34 de prendre en charge les troubles somatiques des adolescents.
L’objectif secondaire était de comprendre les attentes des professionnels concernant le
rôle de la MDA34 dans la prise en charge des troubles somatiques des adolescents.
12
METHODE
1. Choix de l’approche qualitative
La méthode qualitative (24–27) a pour objectif la compréhension de phénomènes dans
leur environnement. Issue des Sciences Humaines, elle est particulièrement adaptée au domaine
de l’organisation des soins primaires. Elle permet de faire apparaitre des systèmes de valeurs, de
représentations et de pratiques sociales. Cette approche interprétative se place dans le paradigme
compréhensif. Le respect de procédures méthodologiques rigoureuses à chaque étape du travail
de recherche garantit des résultats scientifiquement valides.
Dans le cas de notre travail cette approche qualitative permettait de faire émerger les
représentations et l’expérience des professionnels, dans l’objectif d’apporter des éléments de
compréhension de la prise en charge somatique à la MDA34.
L’entretien individuel semi-directif est l’un des moyens de recueil de données en
méthodologie qualitative. Il place l’interviewé au premier plan en interrogeant son point de vue,
ses représentations, ses pratiques. L’enquêteur guide l’entretien grâce à un fil conducteur issu des
objectifs et hypothèses de recherche. Ce processus interlocutoire se différencie d’un prélèvement
d’information par la présence d’un certain nombre d’inconnues malgré la standardisation. Cette
« improvisation réglée » (Bourdieu) permet d’obtenir un discours, contrairement au
questionnaire qui lui produit une réponse. Cette information subjective permet la compréhension
du phénomène étudié. Les « faits de parole » obtenus explorent les systèmes de représentations
et de pratiques des personnes interrogées.
Au sein de la structure, le choix des entretiens individuels nous a paru pertinent. Cela
permettait d’approfondir la compréhension des perceptions des professionnels autour des
questions de santé somatique des adolescents, en leur laissant l’initiative du contenu du discours.
2. Conception de l’enquête
2.1. Population
En recherche qualitative les informations issues des entretiens sont validées par le
contexte et n’ont pas besoin de l’être par leur probabilité d’occurrence.
13
La sélection des participants a recherché la variation maximale des opinions dans le but
de faire émerger tous les points de vue. L’ensemble des professionnels de la MDA34, toutes
professions confondues, soit 20 personnes, constituait la population source de notre étude.
Le critère d’inclusion était d’avoir une activité professionnelle à la MDA34. Il n’y avait
pas de critère d’exclusion.
Dans ce cas particulier d’une enquête au sein d’une structure à effectif limité et défini, la
taille de l’échantillon été fixée par le nombre de personnes exerçant à la MDA34, sans objectif
de saturation de donnée.
2.2. Mode d’accès aux interviewés
Le projet de thèse a été présenté en janvier 2014 au directeur de la MDA34 lors d’une
réunion. Il s’est montré favorable à sa réalisation. Le projet a ensuite été exposé aux
professionnels lors d’une réunion de fonctionnement en avril 2014, en sollicitant leur
participation. La présentation du thème général et de la méthode de recueil des données a été
suivie d’un échange.
Je les ai ensuite contactés individuellement par mail afin de décider d’un rendez-vous
pour la réalisation de l’entretien, selon leurs disponibilités. Je leur demandais de prévoir un
temps suffisamment important (une heure). Un rappel par mail était envoyé une semaine avant la
date de l’entretien. Une note d’information (annexe 4) contenant le thème général et les
modalités pratiques des entretiens, précisant l’enregistrement audio et l’anonymat, y était
associée. Lors de l’entretien la note d’information était donnée sous format papier associée à
des explications orales.
Les entretiens ont été conduits à la MDA34, selon le choix du participant dans son bureau
personnel ou dans une salle de réunion.
2.3. Recueil des caractéristiques des participants et des conditions de
réalisation
Les données caractérisant les participants étaient recueillies par l’interviewer en début ou
en fin d’entretien, selon un questionnaire. L’âge, le sexe, la profession, le statut à la MDA 34, le
nombre d’année exercée à la MDA 34 et le nombre d’années d’exercice auprès d’adolescents
étaient collectés.
Les conditions de réalisation de l’entretien étaient relevées selon un questionnaire rempli
par l’interviewer après l’entretien, afin d’en tenir compte dans l’analyse : date, horaire, lieu,
impressions de l’interviewer concernant le déroulement de l’entretien (environnement…).
14
2.4. Réalisation des entretiens
2.4.1. Interviewer
Les entretiens ont été menés par un seul interviewer, moi-même.
2.4.2. Guide d’entretien
Le guide d’entretien (annexe 5) a été réalisé dans le but d’obtenir un discours librement
formulé par l’interviewé mais répondant à la question de recherche (25).
- Une première partie « brise-glace » permettait à l’interviewé de présenter son rôle à la
MDA 34, et sa perception du rôle et du fonctionnement de la MDA34.
- Une deuxième partie visait à le faire parler de façon plus personnelle, de ses perceptions
au sujet de la santé des adolescents, en particulier somatique. Le récit de ses expériences
professionnelles autour des questions de santé physique des adolescents était sollicité.
- La troisième partie abordait ses attentes vis-à-vis de la prise en charge des aspects
physiques de la santé des adolescents à la MDA34.
Le guide d’entretien a été modifié suite aux quatre premiers entretiens, en intégrant des
questions de relance quand les thèmes suivant n’étaient pas abordés de façon spontanée : le
rapport au corps à l’adolescence et les expériences vécues vis-à-vis des questions de sexualité-
contraception et d’addiction des adolescents.
2.4.3. Stratégie d’intervention
Les questions étaient volontairement très ouvertes afin de laisser les participants
s’exprimer librement sur le thème abordé. Les interventions de l’interviewer se voulaient neutres
et avaient pour but de produire un discours plus complet et plus cohérent.
Les relances permettaient d’expliciter la pensée de la personne interrogée en reformulant,
en reprenant en échos ses propos, ou en le questionnant sur un aspect oublié ou rapidement
abordé. Des notes rapides étaient parfois prises au cours de l’entretien pour relancer ensuite sans
interrompre l’interlocuteur.
15
3. Analyse des entretiens
3.1. Retranscription
3.1.1. Options textuelles
Tous les entretiens ont été enregistrés intégralement par deux appareils.
Ils ont ensuite été retranscrits mot à mot par moi-même à l’aide du logiciel Sonal4.
La retranscription s’est attachée à conserver le sens du discours. Un compromis a été fait
entre retranscription littérale et retranscription réécrite afin de faciliter la lecture tout en restant le
plus fidèle possible au contenu et en conservant les traces expressives.
La retranscription littérale a conservé les éléments du discours parlé en utilisant certaines
conventions (les « heu… » pour marquer les hésitations). Les éléments non verbaux de
communication (rires, hésitation, silence…) ont été précisés. La retranscription réécrite, en
intégrant certaines conventions grammaticales et formelles, visait à rendre la lecture plus fluide.
3.1.2. Anonymisation
Les variables d’identification de la personne interviewée ou d’autres personnes ou
situations citées ont été masquées, par l’utilisation de X ou Y ou par la suppression de certains
passages.
Cependant l’enquête portant sur un terrain très localisé, les professions étaient
mentionnées et les personnes interviewées étaient reconnaissables. Il a donc été choisi de ne pas
faire figurer les verbatims en annexe papier, et de ne pas détailler les caractéristiques des
participants dans les résultats.
3.2. Analyse thématique
L’analyse des verbatims a été conduite selon une méthode thématique dans l’objectif de
dégager des éléments de signification et de les organiser de façon à répondre à la question de
recherche.
Les étapes ont été les suivantes :
- Lecture flottante du corpus.
- Découpage en unité de sens, c’est-à-dire fragment de discours portant une signification
(mots, phrase, paragraphe), de chaque entretien.
- Codification.
4 Sonal est un logiciel gratuit de retranscription d'entretiens. Il permet de facilement retranscrire les interviews
directement à partir de des fichiers audio. http://www.sonal-info.com/
16
- Thématisation inductive : constitution de thèmes et sous thèmes, « noyaux de sens » non
définis a priori, regroupant les éléments du corpus codifiés, repérables en fonction de la
problématique et des hypothèses de recherche.
- Construction des arbres thématiques et synthèse.
4. Approches complémentaires
4.1. Observation sur le terrain
Dans le but de me familiariser avec le fonctionnement de la MDA34, j’ai passé deux
demi-journées en observation auprès des professionnels de la MDA, dans les temps d’entretien
d’accueil et de réunions cliniques pluridisciplinaires.
4.2. Lien avec les autres MDA
Afin d’enrichir notre réflexion sur la prise en charge somatique à la MDA, je suis entrée
en contact avec les autres MDA françaises afin de connaitre leurs besoins et les réponses mises
en place. J’ai pour cela envoyé un mail avec un questionnaire à l’ensemble des MDA.
Notre participation à l’Atelier Mixité des pathologies psychiatriques et somatiques lors
des Journées Nationales des Maisons des Adolescents les 8-9 octobre 2014 a été l’occasion
d’échanges intéressants avec des médecins généralistes, pédiatres et pédopsychiatres travaillant
dans des MDA, venant nourrir notre travail.
4.3. Lien avec les internes en SASPAS à la MDA34
Entre novembre 2013 et octobre 2014 deux internes de Médecine Généraliste en
SASPAS ont successivement réalisé des consultations à la MDA34, une demi-journée par
semaine. Nos échanges m’ont permis de mieux appréhender la question de la prise en charge
somatique à la MDA34.
17
RESULTATS
N. B. :
- Les verbatims des entretiens se trouvent sur le CD ROM en annexe.
- Dans les extraits d’entretien (en italique), « I » désigne l’interviewer, « Px » le participant de
l’entretien numéro x.
1. Caractéristiques des entretiens
Les 20 professionnels exerçant à la MDA34 ont été sollicités pour participer aux
entretiens. Deux mails sont restés sans réponse, trois rendez-vous n’ont pas pu être organisés en
raison d’incompatibilité de planning.
Quinze entretiens ont été réalisés entre le 4 mai 2014 et le 17 juillet 2014. Les
rencontres ont eu lieu dans les locaux de la MDA34 à l’exception de deux entretiens.
La durée moyenne des entretiens était de 30 minutes, allant de 10 minutes à 47 minutes.
Tous les corps de métier exercés à la MDA34 étaient représentés parmi les participants :
secrétaire, éducateur, pédopsychiatre et psychiatre, psychologue, animateur,
cyberdocumentaliste, directeur, coordinateur de projet, interne de médecine générale, assistante
de service social.
L’ancienneté d’exercice à la MDA34 était variable : six participants étaient présents
depuis l’ouverture en septembre 2012, les autres y exerçaient depuis 9 mois ou moins.
Les entretiens ont tous été retranscrits grâce au logiciel Sonal.
L’analyse thématique des verbatims a permis de faire émerger quatre axes de
compréhension des besoins exprimés des professionnels au sujet de la santé somatique à la
MDA34, que nous allons développer :
L’identification des troubles somatiques des adolescents (arbre thématique 1)
Le recours aux soins somatiques des adolescents (arbre thématique 2)
La prise en charge des problèmes somatiques à la MDA34 (arbre thématique 3)
Les spécificités de l’exercice à la MDA34 (arbre thématique 4)
Nous insistons ici sur le fait qu’il s’agit bien des besoins perçus par les professionnels, issus des
entretiens.
18
2. Les troubles somatiques des adolescents abordés par les
professionnels
A la question « pouvez vous me raconter une situation où un adolescent avait un
problème de santé physique ? » les réponses des participants sont souvent riches en
enseignement.
Le malaise est parfois provoqué par l’abord de l’aspect somatique. Au fur et à mesure des
entretiens le terme « problème » ou « souffrance » a été remplacé par « plainte » ou
« questionnement », et celui de « physique », par « somatique » ou « corporel », permettant une
meilleure adhésion de l’interviewé.
Ces récits d’expérience des professionnels nous permettent de dresser un tableau des
besoins qu’ils perçoivent autour de la santé somatique des adolescents qu’ils rencontrent.
2.1. Une distinction somatique/psychique parfois compliquée
Les participants expriment parfois en début ou au cours de l’entretien leur malaise pour
parler des questions de santé somatiques, ou demandent des précisions sur la définition sur
les termes. Cette incompréhension est plus marquée quand le « langage commun » n’est pas
le même (professionnels non issus du milieu sanitaire).
P4 :
Alors j'ai failli me sentir un peu démunie quand j'ai lu le premier paragraphe [de la note
d’information], j'espère que vos questions vont me guider. Quand je dis démunie c'est par
rapport à la souffrance physique...
P6 :
Quand tu parles "physique" c'est ...?
Les difficultés des participants à citer des exemples de problèmes somatiques rencontrés
traduisent un problème de définition de la santé physique/somatique et un clivage parfois
artificiel entre problématiques somatiques et psychiques.
P4 :
Moi le mal-être dont j'ai l'habitude d'entendre parler il est psychique si on veut, mais il
peut avoir des résonances physiques aussi. Il y a des malaises physiques qui sont
exprimés. Alors après moi je ne suis pas très calée pour faire la différence. Mais par
19
exemple il y a un truc qui revient très souvent, c'est le sommeil. Le sommeil c'est un peu
les deux non ?
P9 :
I : Pourrais tu me raconter une situation que tu as rencontrée où un jeune avait un
problème de santé physique ?
P9 : (cherche dans sa liste de patients suivis) Alors est-ce que par exemple... ? Un
problème physique qui nécessite des soins ? J'ai une jeune qui avait une légère
déficience. Ça ce n’est pas... C'est physique en même temps mais ce n’est pas très..., voilà
pas très médical. Enfin...
La santé physique est parfois perçue comme « ce qui se voit ».
P14 :
Après ce n’est pas non plus marqué tout le temps sur leur font. Et c'est aussi parce qu'il y
en a qui ont certains handicaps qui se voient, psychiques et donc physiques aussi un petit
peu.
P8 :
I : Est-ce que ici vous avez été confronté, ou vous avez entendu parler d'une situation où
un jeune avait un problème de santé, lié au corps, plus ou moins ?
[…]
P8 : J'ai vu un jeune qui est suivi ici qui a un problème au niveau d'une jambe, il boite.
2.2. Les questionnements liés au corps
Les participants rencontrent des adolescents emprunts à des questionnements ou des
inquiétudes au sujet de leur corps.
Il peut s’agir de préoccupations liées aux transformations physiques accompagnant la
puberté.
P7 :
Et puis les changements physiques, c'est quelque chose ça qui la gène énormément. Elle a
du mal, vraiment, à assumer... Elle a beaucoup de poitrine, par exemple, c'est très lourd,
elle peut plus faire du sport comme elle voudrait.
P12 :
20
Ils sont questionnés par rapport à la question de leur corps : "Qu'est-ce que c'est que cet
espèce de corps qui m'arrive, je comprends pas ? "
Les questionnements autour de la normalité de leur apparence physique sont relevés par les
professionnels.
P1 :
Au cours de l'entretien au bout d'un moment je lui ai demandé s'il avait une demande
particulière. Il m'a parlé de sa petite taille, son complexe autour de sa croissance. Il
avait 16 ans, il était très petit et se demandait s'il était normal au niveau physique.
P12 :
Ils sont questionnés par rapport à l'image de leur corps : "Est-ce que je suis normal ?
Pas normal ? Est-ce que je suis assez grand ? Pas assez grand ? Est-ce que je suis assez
gros ? Pas assez gros ?"
Et après vous avez tout un tas d'éléments qui confinent à la dysmorphophobie. Sauf que
dysmorphophobie ça renvoie à la psychose, alors qu'eux c'est un signe banal. C'est "est-
ce que je n’ai pas trop de boutons, pas assez de boutons, est-ce que j'ai ci, est-ce que j'ai
ça ?".
Les questionnements au sujet du fonctionnement du corps humain ou des demandes de
conseils ou de renseignements sont soumis aux professionnels, notamment dans le domaine
de la sexualité.
P12 :
J'ai vu une jeune fille qui me disait "qu'est-ce que ça fait si on prend une pilule du
lendemain tous les jours ?".
2.3. Les manifestations physiques de troubles psychiques
Les exemples cités de manifestations somatiques des adolescents sont très souvent en lien
avec un trouble psychique.
21
2.3.1. Les plaintes fonctionnelles ou psychosomatiques
Les professionnels évoquent quasi-systématiquement la grande famille des troubles
somatoformes.
Les termes utilisés sont variables mais les définitions données évoquent toutes des
manifestations physiques d’une souffrance psychique.
P1 :
Ce que l'on a pas mal, beaucoup même, c'est ce qu'on appelle le psychosomatique. C'est-
à-dire qu'il y a un jeune avec des difficultés psychologiques, souvent anxieuses. Et il va y
avoir des manifestations physiques : maux de ventre, vomissements, maux de tête... Des
plaintes corporelles.
P3 :
Il y a beaucoup de jeunes qui disent "j'ai des maux de tête, des maux de ventre". Alors ce
n'est peut-être que psychique, dans un second temps c'est peut-être un travail psychique.
Mais dans un premier temps en tout cas ils parlent d'une souffrance physique, de quelque
chose qui dans leur corps.
P9 :
Toutes les plaintes corporelles que j'ai sont des plaintes qui sont en lien avec une
problématique psychosomatique. C'est-à-dire des difficultés à trouver le sommeil, de
l'eczéma, des enfants qui rongent leurs ongles, qui sont angoissés, qui ont des sentiments
d'être dans quelque chose de..., de déprimer.
P10 :
Il y a des fois avec les jeunes c'est assez impressionnant, le corporel qui se rappelle à
eux, ils ne comprennent pas, en fait très vite tu vois que c'était juste quelque chose qui se
manifestait qu'ils n'arrivaient pas à parler.
C'était vraiment quelque chose de somatique, même plus, c'était de la conversion. Elle
était vraiment dans une problématique hystérique où tout passait par le corps, et il fallait
qu'elle mette en avant ce corps, par tous les moyens possibles. Elle me menaçait de vomir
pendant l'entretien...
P12 :
Par exemple dans le cadre général des somatisations : "j'ai mal au ventre"... Et puis tous
ces signes très subjectifs, comme les vertiges, les migraines, les trucs de ce style.
22
Les professionnels soulignent la difficulté, dans certaines situations, du diagnostic
différentiel avec une pathologie organique.
P2 :
Je l'ai reçue en consultation pour une prise en charge spécifique, et au cours de cette
consultation, un jour elle est arrivée en se plaignant d'une douleur de genou. Dans le
contexte de relations très compliquées avec sa famille, je ne savais pas trop si ces
douleurs au genou étaient une plainte somatique, ou une plainte psychique. […] Elle a
été examinée et il s'est avéré qu'elle avait réellement un problème somatique de genou.
P10 :
La limite entre soma et ce qui est psychisme, ce n’est pas évident. Parfois... Nous en plus
les psys on a tendance à dire c'est uniquement psychisme, alors à les voir pendant des
entretiens..., "c'est bon, t'as mal au ventre", "ça se voit par rapport à ta problématique,
c'est dans ta tête, tu n'as pas mal au ventre !". En fait à un moment, tu découvres que
"bah si, il a une appendicite !"
C’est quand il existe un retentissement sur le fonctionnement, notamment scolaire de ces
troubles dits « psychosomatiques » que les jeunes viennent à la MDA34.
P1 :
I : Et ça arrivent qu'ils s’adressent à la MDA pour un problème somatique ?
P1 : Oui par exemple des jeunes qui n'arrivent plus à aller à l'école et qui tous les matins
ont des maux de ventre, des nausées, des vomissements, des maux de tête, des troubles du
sommeil. Il y a des conséquences sur une baisse d'alimentation, plus d'appétit.
P4 :
Ils ne viennent pas en disant "on a des maux de ventre". Ils disent "on n'arrive pas à aller
au collège ou au lycée parce qu'à ces moments là, c'est les maux qui nous assaillent". Ou
même ça leur arrive là bas. A ce moment là ils vont voir l'infirmière scolaire. Il y en a qui
passent leur vie dans les infirmeries.
2.3.2. Les troubles du comportement alimentaire
Le cas particulier des troubles du comportement alimentaire, troubles psychopathologiques à
incidence somatique, est évoqué.
23
P3 :
Il a aussi tout ce qui est trouble du comportement alimentaire. Des jeunes filles qui se
trouvent trop grosses, trop maigres. A la limite entre anorexie, boulimie... Je ne dirais
pas forcément je dirais avéré, mais on sent qu'elles sont entre deux.
P9 :
Des jeunes qui se plaignent de ne pas pouvoir résister à la tentation de manger plus qu'il
ne faudrait, d'être dans des comportements un peu boulimiques à certains moments, et
qui les dérangent. Alors il y a forcément le lien avec une problématique psychique,
toujours, avec cette façon de manger compulsive.
La nécessité d’un bilan somatique est soulignée.
P2 :
Il y a une situation où je ne reçois les jeunes en consultation que s'ils ont vu un
généraliste, c'est dans le cas de problèmes de comportement alimentaire.[…] Avant
quand il n'y avait pas de consultation [de l’interne de médecine générale], je ne recevais
pas les jeunes s'ils n'avaient pas été vus par le généraliste, avec un contrôle poids, taille,
IMC, un examen clinique.
2.3.3. Les attaques du corps
Les scarifications, exemple spectaculaire de mise en avant du corps pour traduire une
souffrance psychique, sont mentionnées à deux reprises.
P7 :
Après, ce qui concerne les domaines assez précis, autour des scarifications, les jeunes
qui se font du mal, qui se coupent, qui se tailladent, qui se... Il y en a aussi, mais c'est loin
d'être la majorité. Ça peut être aussi évoqué, et ça, ça inquiète souvent les familles,
évidemment. Parfois il ya même un passage aux urgences par rapport à ça.
P12 :
Mais ça va aussi vers des espèces de destruction. C'est-à-dire je vais marquer, faire des
cicatrices. Et j'amène ce corps meurtri comme une espèce de tableau sur lequel j'aurai
écrit mes douleurs et tout ça, afin de le lire. […]Donc on a parfois ces ados qui vont
utiliser leur corps comme une page d'écriture. Ils vous amènent des scarifications, des
plaies, des bosses.
24
2.4. La consommation de substances psycho-actives et les conduites
addictives
Les consommations de toxiques sont évoquées par les professionnels, fréquemment en
premier lieu, comme exemple de situation de problème somatique.
Concernant l’alcool, les consommations excessives, aigues, festives sont citées.
P4 :
« De l'alcool dans des quantités incontrôlées assez régulièrement […] lors de sorties. »
Le cannabis est évoqué et souvent associé à des situations d’isolement social, de rupture
scolaire ou professionnelle.
P4 :
Beaucoup de cannabis […]. Avec un retentissement sur leur vie sociale indéniable. Avec
un décrochage scolaire.
P7 :
Il consommait du cannabis, il se rendait compte que ce n’était pas bon pour lui.
Les autres substances psycho-actives n’ont pas été évoquées.
En revanche les addictions sans produit, aux jeux vidéos, aux écrans plus généralement,
sont mentionnées.
P9 :
L'addiction, où je la rencontre le plus, c'est autour des ordinateurs. Les jeux, les réseaux,
l'écran.
2.5. Les plaintes en lien avec des pathologies organiques
Les professionnels citent spontanément certaines pathologies somatiques, bénignes ou
plus lourdes, qu’ils rencontrent à la MDA34. Le retentissement psychique de ces pathologies est
parfois évoqué.
25
Les problèmes dermatologiques, l’acné au premier plan, sont cités fréquemment.
P14 :
Ce qu'on remarque, c'est forcément des bouleversements au point de vue de la peau.
Alors j'ai vu des gamins qui effectivement sont très marqués par l'acné. J'en ai vu
effectivement deux, trois, où ça saute aux yeux.
P9 :
Des questions autour de la peau, aussi il y en a beaucoup. On a quand même des jeunes
qui sont abîmés par l'acné, et qui peuvent avoir besoin d'un peu d'aide là dessus.
Les accidents de la voie publique et leurs conséquences, ainsi que la traumatologie du sport
sont évoqués.
P7 :
Un jour il est venu, il s'était fait mal avec son vélo, je ne sais pas comment il s'était
débrouillé, il s'était cogné avec la pédale, il s'était ouvert au niveau du mollet... Mais
bien ouvert.
P9 :
J'en ai une autre aussi qui a mal au cou […]. Elle a eu deux accidents de voiture, deux
fois le coup du lapin. Et c'est vrai qu'elle reste avec des douleurs permanentes au cou.
P4 :
Il y a beaucoup de jeunes aussi qui ont déjà des problèmes de dos, de choses comme ça.
Des jeunes aussi qui ont des activités physiques qui les mettent peut-être en ... Qui font
beaucoup de sport.
P7 :
[…] il nous disait qu'au rugby à l'entraînement il se cassait sans arrêt. Il se faisait tout le
temps des entorses, il avait tout le temps des reproches de l'entraineur parce qu'il était
tout le temps, comme il disait, "pété de partout".
Enfin certaines pathologies chroniques somatiques sont mentionnées. Celles-ci peuvent
intégrer dans leur tableau clinique des manifestations psychiques, ou du fait de leur gravité
être à l’origine d’une souffrance morale.
P1 :
Une jeune fille qui a eu un diagnostic récent d'hypothyroïdie, et qui se sent triste, et ne
sait plus trop qu'est ce qui est de la maladie, et qu'est ce qui est de la psychologie.
26
P12 :
Je pense à un gamin dont je m'occupais qui était séropositif au HIV, et qui commençait à
développer le SIDA. […] Parler, construire l'avenir chez un type qui entend partout que
son avenir il est de courte durée, c'était un peu compliqué.
Arbre thématique 1 : troubles somatiques des adolescents évoqués par les professionnels
27
3. Le recours aux soins somatiques des adolescents
Les participants, au travers leurs récits d’expériences, perçoivent les différents aspects
des relations de l’adolescent au système de santé. Dans la majorité des cas ces relations ne posent
aucun problème. Au contraire dans certaines situations plusieurs obstacles entravent le recours
aux soins de l’adolescent. Dans le cadre de notre étude, nous nous intéressons au recours aux
professionnels de la santé physique, qui s’articulent autour du médecin généraliste dans le cadre
du parcours coordonné de soin.
3.1. Le refus de voir le médecin généraliste « de famille »
Dans certaines situations, il existe un médecin généraliste « de famille » que les jeunes
rencontrés ont réticence à consulter.
Le médecin généraliste de l’adolescent est souvent le médecin choisi par les parents, le
même que les autres membres de la famille et que l’adolescent connait depuis l’enfance.
P0 :
A cet âge là, c'est souvent le médecin généraliste des parents.
P6 :
Parce que parfois le médecin généraliste en fait il a été choisi par les parents, c'est le
médecin de famille.
P4 :
[…] je vois toujours des jeunes avec le même médecin traitant que la famille.
L’adolescent est généralement accompagné par ses parents et n’a pas la possibilité d’être
entendu à part entière.
P0 :
Et le patient va rarement voir le médecin généraliste seul. […] Donc dans la relation
entre le patient ado et le médecin généraliste, il y a une triangulation. Il y a le regard du
parent qui est là, et qui va émettre son propre jugement. Et du coup, cette relation elle est
un peu gâchée, si je peux dire, par la simple présence du père ou de la mère qui va
émettre un jugement.
P2 :
28
Pour elle à chaque fois les consultations avec le médecin généraliste ont lieu avec les
parents, et ça posait problème […] Ils ont des difficultés à trouver leur place et à être
entendus en tant que personnes à part entière. Ils perçoivent la consultation comme
encore très reliée à la dynamique familiale.
P4 :
Moi je pense que c'est plutôt les parents qui s'expriment face au médecin généraliste. De
leur conflit, de leur ras-le-bol, plutôt que le jeune lui-même.
D’après les professionnels, le médecin généraliste « de famille » est parfois perçu par les
adolescents comme le « complice » des parents. Le secret médical envers les parents n’est
pas forcément garanti.
P0 :
Le médecin généraliste il a plus d'affinités avec le parent.
P2 :
[…] le médecin ne tiendra pas le secret professionnel par rapport aux parents qu'il
connait depuis très longtemps.
P6 :
Peut-être qu'en tant que jeune, justement, dans une période où, même s'il y a le secret
médical, est-ce que véritablement on y croit à cet âge là ? Peut-être qu'il y a des choses
qu'on n'osera pas dire au médecin de famille parce qu'"il risque d'en parler à ma mère"...
P10 :
Et le jeune peut avoir la crainte qu'il y ait des choses qui soient répétées, donc ne pas
dire la même chose qu'il dirait à son propre médecin indépendant de celui des parents.
P12 :
Parce que le médecin de famille c'est le complice des parents. Même s’il ne parle pas
trop, il risque de laisser traîner un papier et les parents peuvent le voir.
P13 :
Du fait que ça soit un médecin traitant, forcément il va en parler aux parents.
Un conflit avec les parents renforcent ce refus de consulter le médecin généraliste « de
famille ».
P2 :
29
Dans les situations où le médecin traitant est le médecin de famille et où il y a une
problématique parentale un peu compliquée, la consultation va entrainer un
renforcement des difficultés familiales.
3.2. L’absence de lien avec un médecin généraliste
Dans d’autres situations évoquées par les professionnels, les adolescents ne sont pas en
lien avec un médecin généraliste.
C’est le cas quand les parents eux-mêmes n’ont pas de médecin traitant, dans des contextes
de déménagement ou de situations familiales compliquées. L’adolescent de moins de 16
ans ne pouvant avoir sa propre carte vitale et son propre médecin traitant, il est alors
dépendant de ses parents.
P1 :
Elle n'en avait pas, parce qu'il y avait eu une succession de déménagements, et elle avait
perdu son médecin référent. Elle ne savait plus à qui s'adresser.
P7 :
C'était ce qu'on appelle un "papa ado". Il disait "mais moi j'en ai marre...". Il avait perdu
son boulot, il était hébergé chez sa propre mère, et il me disait "j'ai deux jumeaux de 12
ans, plus le petit de 7 ans...". Il se retrouvait père au foyer avec 3 gamins, et c'était un
adolescent. Il disait "mais moi j'ai besoin de sortir aussi, j'ai besoin d'aller en boite...".
C'était un type qui devait avoir pas loin de 40 ans quand même. Mais avec un discours
d'ado. À un moment donné il faut assurer, assumer, mais lui il en était pas là. C'était sa
propre mère qui l'hébergeait, il avait trois gamins, trois garçons et..., "moi des fois je
pète un boulon, je suis seul à les élever". Et donc on avait saisi ce truc là. Le généraliste
il y en avait peut-être mais le papa je pense qu'il n'était pas très fiable, au niveau médical
etc.
Les professionnels évoquent également des situations d’absence de couverture médicale où
il existe des difficultés financières pour recourir aux soins.
P0 :
Au début il m’a même dit « je n’ai pas assez d’argent pour payer la consultation
ophtalmo ». Je lui ai demandé quelle mutuelle il avait, il m’a répondu qu’il n’avait pas
assez d’argent pour se payer une mutuelle, mais gagnait trop pour avoir la CMU.
P3 :
30
C'était une jeune qui n'avait pas eu de soins depuis des mois parce que les parents étaient
partis à l'étranger. Il n'y avait pas vraiment de couverture sociale ou en tout cas de prise
en charge.
Enfin certains adolescents, même s’ils sont âgés de 16 ans ou plus, ne font pas les démarches
eux-mêmes de consulter un médecin généraliste. L’une des raisons perçues par les
professionnels est les difficultés de compréhension du système de soin.
P1 :
Ils ne connaissent d'ailleurs pas forcément le parcours du soin.
P8 :
Parce que parfois ils sont un peu perdus, ils ne savent pas trop qui choisir à l'extérieur
comme ça.
P9 :
[…] la plupart du temps ils ne comprennent pas, ils ne savent pas trop comment ça
marche, une carte vitale, tout ça, ça complique.
P2 :
D'abord il n'y a en pas beaucoup qui ont leur propre carte vitale et qui font les
démarches. Ça c'est quand même une réalité. Et je pense que c'est une catégorie de la
population qui n'est pas forcément très bien suivie.
3.3. L’absence d’obstacle au recours soin
Un participant souligne que dans la majorité des situations qu’il rencontre, il n’existe pas
de difficulté pour la prise en charge des problèmes de santé physiques.
P9 :
J'ai des grandes, moi. En général, elles sont suivies sur le plan de la santé. Je n'en ai pas
où j'ai eu l'impression qu'il n'y ait eu aucun médecin consulté ou qu'elles aient été dans
un désert médical. Elles sont suivies, […]
32
4. Les attentes des professionnels vis-à-vis de l’organisation de la
prise en charge somatique à la MDA34
4.1. L’intérêt d’une consultation de médecine générale à la MDA34
La consultation de médecine générale, réalisée par un interne en SASPAS depuis
quelques mois lors des entretiens, semble pour les professionnels apporter des réponses aux
problèmes soulevés autour de la prise en charge de la santé physique.
Le rôle du médecin généraliste au sein de la MDA34, selon les professionnels, recouvre
plusieurs aspects.
4.1.1. L’avis du somaticien
Le rôle du médecin généraliste au sein de la MDA34 est avant tout perçu comme celui du
somaticien, spécialiste de la santé physique, expert du corps, donnant une réponse à une
inquiétude de l’adolescent ou son avis sur une plainte physique.
P0 :
Et donc quand l’adolescent a une plainte somatique, par exemple une douleur
abdominale, une suspicion de retard pubertaire, les psychologues ou pédopsychiatres
peuvent l’orienter ce patient pour un avis « somatique ».
P2 :
Dans le contexte de relations très compliquées avec sa famille, je ne savais pas trop si
ces douleurs au genou étaient une plainte somatique, ou une plainte psychique. Elle a
très volontiers accepté de rencontrer l'interne en médecine générale, parce que justement
c'était une consultation sans être accompagnée par ses parents. Elle a été examinée et il
s'est avéré qu'elle avait réellement un problème somatique de genou. Ca a pu être dit aux
parents et au niveau de l'école pour que ça soit pris en compte.
P9 :
J'y pense à un moment donné, juste pour être dans une question de sécurité corporelle. Je
pense beaucoup à ça pour ça. Je pense que le discours médical peut calmer un certain
nombre d'inquiétudes que peuvent avoir des jeunes. Ils ont une espèce d'étrangeté
corporelle. Et cette étrangeté corporelle, si la médecine dit "tout va bien", elle est moins
étrange.
P12 :
C'est vrai que le fait d'avoir quelqu'un qui pourrait amener une réponse plus technique
que la mienne, sur un problème somatique…
33
4.1.2. Une porte d’entrée dans le dispositif
La consultation de médecine générale semble pour les professionnels un moyen de faire
venir des jeunes à la MDA34, de faire connaitre le dispositif pour qu’ensuite ils puissent si
nécessaire rencontrer d’autres professionnels.
P0 :
C’est pour certains patients qui ne veulent pas rencontrer un psychologue ou un
psychiatre parce qu’ils ne se considèrent pas comme relevant d’une pathologie
psychiatrique. Mais ils veulent bien rencontrer un médecin généraliste, pour parler de
leur corps et à travers leur discours sur leur corps vont en fait délier leur parole sur
leurs expériences vécues. Je pense notamment à un patient qui venait pour des migraines
et qui ne voulait pas du tout s’investir dans une prise en charge psychiatrique mais qui
avait vécu la guerre en Afrique et qui présentait un état de stress post traumatique –
troubles du sommeil , migraines, etc. – et qui a commencé à me raconter ce qu’il avait
vécu, à moi médecin généraliste, alors qu’il n’avait pas voulu parler à un psychiatre.
Donc ça peut être aussi un point d’accroche pour les adolescents qui auraient beaucoup
de choses à raconter mais qui ne veulent pas le faire à un psychiatre ou un psychologue.
P5 :
La question de la place de la Médecine Générale ici, on le voit comme porte d'entrée
possible. C'est-à-dire c'est un problème de santé somatique qui fait que l'on vient ici,
mais la problématique majeure elle est ailleurs.
P7 :
Quand on passe par le corps, je trouve que c'est un intéressant, pour les gamins qui en
ont besoin. Et après on peut parler d'autre chose, on peut embrayer…
P10 :
C’est plus simple d'aller faire un point avec le médecin et ça dédramatise un peu le truc.
Parce que le médecin tu le vois depuis que tu es petit, tu l'a toujours vu, tu sais ce que
c'est, il n'y a pas trop de surprise, même si c'est dans un lieu différent. Pour moi c'était
vraiment une porte d'entrée qui était hyper riche.
Ils ont eu l'entretien d'accueil, et après cet entretien, c'était un peu flou, le jeune n’était
pas trop en demande, ils n'avaient pas forcément envie. Le psy faisait peur aux parents,
au jeune, l'éducateur pareil. Du coup..., médecin !
34
4.1.3. L’autonomisation vis-à-vis des parents
La consultation de médecine générale à la MDA est perçue comme une étape dans
l’autonomisation par rapport aux parents, permettant à l’adolescent de prendre en charge
lui-même sa santé.
P0 :
Donc là, le fait de rencontrer l'ado seul, dans une MDA, donc dans une structure toute
entière qui est vouée à la santé de l'ado, et qui est concentrée dessus, c'est déjà une
chance pour l'ado d'être pris en sérieux, d'un point de vue du médecin généraliste.
P2 :
Ce qui me semble important, en tout cas pour les grands adolescents, c'est cette
consultation médicale où les parents ne sont pas systématiquement reçus. Cet examen
corporel leur appartient. C'est de leur santé dont il s'agit. Ce n'est plus un enjeu
relationnel. Ca déplace bien les choses je trouve.
C'est vrai que nous on travaille vraiment pour soutenir l'individuation. C'est-dire que le
jeune il se construit de plus en plus au regard de ce qu'il veut de lui, de ce... Et puis on
travaille à séparer, à différencier les espaces.
P10 :
[…] ça peut apporter autre chose, parce que forcément tu ne vas pas lui parler de la
même façon dans ce cadre là. Il y a aussi l'aspect où c'est séparé de ta mère, donc
pourquoi pas.
P12 :
Ensuite il y a beaucoup d'ados pour qui le fait que ça soit la MDA, ils ont l'impression
que c'est quelque chose qui, comme si ce trouble leur appartient vraiment. Ce n’est plus
une affaire de famille.
La gratuité et l’anonymat facilitent cette autonomisation.
P1 :
Il y a un facteur qui me semble important c'est l'aspect un peu précaire, ou financier, ou
facilitateur parce qu'il n'y pas les parents présents, qui permet à l'adolescent d'avoir une
consultation avec un médecin généraliste sans l'accord parental, sans qu'il soit au
courant du contexte familial. Et que ça soit sa démarche à lui.
35
Pas de carte vitale... Et pour un adolescent tout seul justement avec la carte vitale tout de
suite les parents vont être au courant. Là ils ne sont pas au courant.
P7 :
Je lui avais dit "écoute, ça serait bien que tu viennes là, d'autant plus que, l'un des gros
avantages, c'est que tu n'as pas besoin d'amener une carte vitale, t'as pas besoin de
papiers d'identité, t'as pas à payer, à faire l'avance de frais".
P10 :
Le fait que ça soit ici, et qu'il y ait le côté anonyme et gratuité, ils peuvent venir et ils ont
LEUR médecin. […] Et le jeune peut avoir la crainte qu'il y ait des choses qui soient
répétées, donc ne pas dire la même chose qu'il dirait à son propre médecin indépendant
de celui des parents. Ça crée de la différenciation là où à cet âge là ils ont un peu de mal
à en avoir. Je trouve ça pas mal.
P12 :
L'autre chose c'est tout se qui touche à l'anonymat. C'est-à-dire qu'ils peuvent très bien
venir raconter à ce médecin généraliste des choses qu'ils ne raconteront pas au médecin
en ville et encore moins au médecin de famille.
4.1.4. Dans un lieu rassurant
La MDA34, lieu reconnaissable, accueillant dans lequel l’adolescent est à l’aise et où il se
sent soutenu et écouté, peut faciliter l’accès à une prise en charge somatique.
P2 :
Je trouve en tout cas que pour les jeunes il y a un côté pratique et rassurant, parce qu'ils
connaissent la structure.
P12 :
L'intérêt, c'est que le médecin généraliste est sur place. Il ne faut pas traverser la ville
pour le voir. Et du coup comme c'est un médecin qui est dans la MDA, il se dit "il doit
être abordable celui-là". Ils sont un peu rassurés.
P10 :
Je pense que c'est plus largement l'institution qui la porte quelque part. Je trouve qu'elle
a réussi à créer un étayage ici avec différents professionnels […] Elle sent qu'il y a une
institution avec différents professionnels qui la reconnait et qui peut la soutenir. Du coup
c'est différent d'un rendez-vous à l'extérieur, qui serait quelque part plus anonyme. Elle
sait qu'entre nous on peut parler d'elle, et le fait d'être parlée quelque part dans un lieu,
je pense que ça change beaucoup. Ce n’est pas quelqu'un qui te voit un quart d'heure,
36
une demi-heure et qui ne te reparle pas après. Elle existe pour des gens, dans un lieu, et
elle l'a déposé, ça.
4.1.5. Permettant ensuite l’orientation vers l’extérieur
La consultation de médecine générale à la MDA est le plus souvent perçue comme un
passage, permettant ensuite la mise en lien avec un médecin généraliste ou autre spécialiste à
l’extérieur.
P0 :
Je pense que la médecine générale dans la MDA est une bonne manière de rencontrer,
d'aller à la rencontre des ados et les familles. Mais pas forcément pour faire un suivi au
long cours pendant des années. Je pense que le but c'est de les amener vers le parcours
de soin habituel, que la société française a construit, c'est-à-dire le médecin généraliste
en premiers recours, médecin de famille, avec de droits ouverts […] Donc, euh... L'idéal
ça serait qu'une fois qu'ils ont rencontré le médecin généraliste de la MDA, qu'on puisse
ensuite les amener vers un cabinet médical référent. Mais il faudrait que ce soit le jeune
qui le choisisse.
P8 :
Je pensais en fait que l'orientation ici c'était un palier pour après orienter vers
l'extérieur, pour des jeunes où c'est vraiment le physique qui ne va pas très bien, mais
pour qui au niveau mental ça va. Tout va bien va bien sauf des petits problèmes de santé,
des petits bobos, donc on peut l'orienter. Lui dire qu'il y a des contacts en libéral.
P9 :
Et ce qui m'aurait paru intéressant aussi, c'est que le médecin qui pourrait être ici à la
MDA, puisse avoir un carnet d'adresses qui permette aussi de mettre en lien. Pour ses
soins de peau, dermato par exemple, sur la sexualité, des gynécos... Qui sont aussi des
gens..., pas facile d'avoir un rendez-vous chez un gynéco si on ne passe pas par sa
maman.
P12 :
Je crois que le boulot d'un médecin généraliste n'est pas de soigner tout le monde sur
place évidement, ça serait également de permettre une mise en lien, une mise en réseau,
une mise en ... je dirais en synchronie, de ce dispositif général, y compris le médecin de
famille.
37
4.2. Les limites et réticences à la consultation de médecine générale à la
MDA34
Les professionnels expriment plusieurs réticences vis-à-vis de la consultation de médecine
générale au sein de la MDA34. Il peut s’agir de freins liés à la MDA34 elle-même et aux
professionnels y exerçant, aux relations avec les médecins extérieurs, ou à des exigences vis-à-
vis du médecin généraliste exerçant à la MDA34.
4.2.1. L’orientation psychiatrique de la MDA34 : parents et professionnels
L’historique de sa création et son fonctionnement actuel expliquent l’orientation vers la
santé mentale de la MDA34.
Intégrer les dimensions physiques de la santé n’est pas spontané pour les professionnels y
exerçant. Les professionnels ne s’intéressent pas systématiquement au lien avec le médecin
généraliste extérieur.
P4 :
I : Vous parliez des maux divers, de dos, de tête, de ventre... Comment c'est pris en
charge au sein de la MDA, pour faire la part des choses ? Comment elle est reçue, la
plainte de l'adolescent ?
P4 : […] Nous par rapport à ça on ne fait rien. Enfin ce n’est pas qu'on ne fait rien, on
discute de ça, c'est tout. On n'est pas... […] Les maux qui sont cités, mais après nous a
vraiment l'habitude d'analyser ça "oui, ça somatise vachement" et puis on en reste là.
Sauf si on nous fait une demande claire.
P3 :
I : Généralement les jeunes voient leur médecin généraliste ou c'est compliqué ?
P3 : Je ne pourrais pas répondre, parce qu’on ne leur pose pas forcément
automatiquement la question.
De même l’image perçue par les usagers, parents notamment, et celle d’un lieu de prise en
charge des troubles psychiques.
P10 :
Et il y a une assimilation qui est faite ici. Il y a un moment où on demande s'il y a eu des
suivis antérieurs. Systématiquement, soit ils disent non, soit ils disent "ah si il y a eu un
pédopsy, un psy, un psychiatre, un éduc, un truc comme ça, mais si on ne creuse pas un
peu, ils ne vont pas penser à dire que le gamin, il a été suivi..., je ne sais pas, par un kiné
pour tel truc. Tout ce qui est au niveau corporel, ici t'as l'impression que les parents,
38
non, il n'y a pas besoin d'en parler, ce n'est pas le lieu pour, là on vient pour des
problèmes de comportement, donc il n'y a pas de raison qu'on dise, suivi antérieur, il a
un appareil dentaire..., je dis n'importe quoi.
Même si tu les incites, et les parents et les jeunes, à se le rappeler, tu as l'impression que
dès l'entrée une partie est mise de côté. Et ça crée des trucs complètement aberrants. Moi
il y a une mère que j'ai reçue pendant des séances et des séances, avant qu'elle me dise
qu'on son fils était énurétique et encoprétique depuis tout petit, alors qu'il a 16 ans. Et
depuis le début, c'était "je ne comprends pas pourquoi il ne veut plus aller au lycée...".
Quand elle m'a dit ça j’étais... "Mais enfin, quand même, à un moment, c'est une maladie
qui, au niveau des rapports sociaux..., normal qu'il n'ait pas envie d'y aller ! Et est-ce que
vous en avez déjà parlé au médecin ?" "Ah ben non ...".
T'as l'impression que parfois ça vient vraiment en second plan, par le lieu. Comme quand
on va chez le dentiste, on ne va pas parler de problèmes perso. Il y a un moment où on
clive les deux.
4.2.2. La crainte d’une mise à l’écart des problèmes psychiques
Certains professionnels ont exprimé la crainte de voir la prise en charge somatique
éclipser les problèmes psychiques.
P12 :
Mais à condition que aussi bien le type qui le fait [le cours de maths] que le médecin
généraliste qui serait à la MDA ne nous confisque pas le patient. Ce n’est pas parce qu'il
fait des cours de maths et tout ça que du coup, toutes les questions autour de
l'appréhension qu'il peut avoir, ça passe inaperçu. De la même façon que ce n’est pas
parce que je prends un charge un jeune sur un plan strictement médical, enfin médical au
sens "technique médicale", que j'oublie toutes les dimensions autres qu'il peut y avoir.
4.2.3. La crainte d’interférer avec le médecin généraliste habituel
Quand il existe un médecin traitant, les professionnels soulignent la nécessité de le prendre
en compte et de ne pas s’y substituer. Le travail des deux médecins est parfois vu comme
complémentaire, le médecin de la MDA34 s’occupant plutôt de la prévention et des
pathologies considérées comme bénignes.
39
P6 :
Pour du suivi, vraiment médical et physique, je ne sais pas trop. Je pense que la question
se pose aussi de... En général on a un médecin généraliste ailleurs, pour les
prescriptions. Donc du relais, du lien, et du sens, du coup, ici.
Mais c'est la question du lien justement peut-être avec le médecin généraliste. Comment
ça se passe, est-ce que dans ce cas justement on prend contact avec le médecin
généraliste pour lui dire... Je ne sais pas.
Donc c'est peut-être plutôt prévenir qu'on le suit, sans forcément entrer les détails. C'est
pareil, c'est difficile de faire des réponses générales. Je crois que c'est au cas par cas.
Parce que si ça va dépendre pourquoi. Si c'est juste prescrire la pilule, ou si c'est des
choses plus essentielles, ou en tout cas qui engendrent des conséquences totalement
différentes, dans un traitement. Là il faut le dire. On ne va pas changer le traitement d'un
diabétique..., parce qu'on change de médecin. Il me semble que c'est important, mais il y
a des niveaux, et ça ne peut être que du cas par cas.
P13 :
C'est vrai que le médecin généraliste de la MDA a une place un peu compliquée. Parce
que le jeune est parfois déjà pris en charge par un médecin traitant. Donc moi, si j'avais
eu ce rôle là, c'est un peu compliqué d'empiéter sur les plates-bandes du médecin
traitant...
Après, si ça concerne vraiment sa santé heu..., sa santé, tout simplement, dans le sens où
ça peut empiéter sur des conditions de vie, où il faut apporter un traitement sur une
longue durée, je pense que là il serait peut-être plus adéquat de le rediriger vers son
médecin traitant, car c'est son médecin traitant qui le connait le plus. [….] [le médecin
de la MDA34] ne connait pas ses antécédents. Il y a plein de facteurs qui font que ça
serait toujours plus adéquat d'aller voir le médecin traitant. On va dire ça en général.
C'est vrai que sur d'autres questions, qui sont, on va dire, un peu plus légères, là ça
serait peut-être plus adéquat d'aller voir un médecin de la MDA, tout simplement.
40
Des risques liés à un défaut de communication sont perçus.
P0 :
C'était un peu compliqué, j'ai prescrit une prise de sang à un ado, mais je n'ai jamais eu
les résultats, parce que c'est le médecin généraliste qui l’a reçue, et il ne m'a pas
rappelé.
P6 :
Je pense qu'il faut avoir un lien, parce que c'est un problème réel, la multiplication des
diagnostics, la multiplication des ordonnances.
4.2.4. La nécessité d’une formation spécifique
Certains professionnels soulignent la nécessité d’une formation spécifique du médecin
généraliste exerçant à la MDA34.
P3 :
Après ça peut être médecin généraliste pédiatre. Mais avec une connaissance aussi du
développement de l'adolescent. Il y a aussi des médecins généralistes qui ont des DU de
gynéco, des complémentarités.
Ils expriment leur méconnaissance de la formation actuelle des médecins généralistes.
P3 :
Ca peut être un généraliste qui a quand même des connaissances, je me rends pas
compte de la formation de la médecine générale, mais des connaissances en dermato, en
gynéco, ...
P2 :
Parce que je ne sais pas si au niveau du cursus de formation en médecine générale le
soin aux adolescents est traité.
4.3. L’orientation vers l’extérieur
L’orientation vers des professionnels ou structures extérieurs est une autre réponse
apportée aux problèmes de santé somatiques des adolescents.
41
4.3.1. Orientation vers un professionnel extérieur
L’orientation peut être faite vers un médecin généraliste extérieur ou vers un médecin d’une
autre spécialité.
P2 :
Ça m'arrive d'adresser vers des pédiatres, neuropédiatre, endocrinologues...
4.3.2. Orientation vers une structure partenaire
L’hôpital est parfois cité.
P4 :
Ce dont je me souviens le plus, c'est quand il y a eu l'exploration, c'est plutôt des services
spécialisés de l'hôpital.
Les professionnels soulignent les liens avec certaines structures institutionnelles telles que
le centre de planification, ou associatives.
P2 :
On s'appuie beaucoup sur le planning familial.
P4 :
On peut aussi voir avec le Zinc, avec Arc-en-ciel.5
5 Centre de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) de Montpellier (Arc-en-ciel), et
son espace ressource de formation et de prévention (le Zinc).
43
5. Les spécificités de l’approche de la santé à la MDA34
5.1. L’interdisciplinarité
Au cours des entretiens les participants insistent sur l’interdisciplinarité au sein de la
MDA et sur la richesse créée par la rencontre de professionnels de cultures différentes,
permettant une prise en charge globale adaptée à la problématique adolescente.
Les réunions pluridisciplinaires sont l’occasion d’échanges autour de situations.
P5 :
Et là je crois que c'est des rencontres de cultures professionnelles différentes qui sont
assez fructueuses.
Le fait d'avoir des réunions cliniques très instituées, qu'il faut absolument préserver,
garantir, c'est déjà un élément important.
P6 :
Le lien avec le soin, se fera et se fait par le biais aussi de reprises et d'échanges entre,
justement, les animateurs présents au nom de la MDA, ou les éducateurs qui peuvent être
présents aussi, et l'équipe soignante, dans le cadre des réunions pluridisciplinaires.
C'est-à-dire que la richesse, c'est bien d'être pluridisciplinaire. Et donc de pouvoir avoir
des regards croisés, de pouvoir aussi s'enrichir de nos expériences, de nos pratiques.
P7 :
Ça me permet d'évaluer toutes ces choses là, et après à charge pour moi de le ramener
en réunion, et de dire ce qu'il s'est passé, ce que moi j'en pense. Ça peut alimenter les
échanges avec le pédopsy si c'est lui qui m'a demandé de les prendre en charge sur ce
volet là. Et en pluridisciplinarité on en reparle et on voit ce qu'on peut modifier,
proposer... Il y a cet aspect là.
P10 :
Et puis même, des médecins généralistes qui travaillent en équipe pluridisciplinaire, ce
n'est pas souvent, et c'est riche aussi.
44
P13 :
En même temps, une MDA ça sert à ça. C'est répondre à la question de l'adolescence. Il
vaut mieux avoir tous les outils en main pour y répondre. Surtout qu'elle est très variée et
très compliquée.
L’interdisciplinarité permet l’articulation des soins somatique et psychiatriques.
P2 :
Quand je pense qu'il est important en fait qu'on puisse articuler le soin psychique et le
soin somatique.
Le regroupement au sein du même établissement des différents professionnels permet un
cheminement des adolescents au sein de la structure.
P5 :
Ce qui est intéressant c'est qu'on peut proposer des parcours variés, qui peuvent passer
par les ateliers culturels, l'art-thérapie, une consultation de médecine somatique, un
échange avec l’assistante sociale.
Le travail avec les partenaires, le réseau de professionnels, renforce cette interdisciplinarité.
P7 :
Les partenaires, c'est pour nous, c'est tous les gens qui sont amenés à travailler autour
des ados. Ça peut être aussi bien, les partenaires, des médecins généralistes qui envoient
des jeunes ici. Ça peut être des médecins hospitaliers, des psychologues en libéral, des
éducateurs de l'Aide Sociale à l'Enfance du département. Ça peut être des assistantes
sociales ou des CPE de collège ou lycée. Voilà tous les partenaires avec qui on peut
travailler. Les collègues de la PJJ, de façon un peu plus éloignée les Juges des enfants et
agents de la justice. Tous les gens qui ont à faire aux jeunes.
Le caractère collectif de l’institution prime alors sur l’individualité de chaque professionnel.
P10 :
Et c'est vrai que là, pour avoir fait les entretiens d'accueil, ça sert aussi, dans le sens où
tu vois que la plupart ils sont plutôt dans une demande d'écoute, de parler à quelqu'un. A
45
la limite, que ce professionnel ça soit un infirmier, un éduc, un psycho, un médecin, il
s'en fiche un peu, ça change pas grand chose.
5.2. La promotion de la santé
La richesse naissant du regroupement de ces professionnels différents, et notamment de la
rencontre des mondes médicaux et socio-éducatif, permet de développer une vision
« positive » de la santé.
P7 :
Ce qui m'intéresse moi dans mon parcours c'est d'être plus sur le "prendre soin" des
adolescents. Je trouve que c'est une notion qui est finalement assez novatrice et
intéressante si on parle de santé globale. C'est la définition de l'OMS, un état de complet
bien-être, physique certes, mais aussi psychique et social. Un ado qui ne va bien sur le
plan de sa santé, parfois ça peut être..., on peut soigner, on peut amener quelque chose
de technique etc., si on ne soigne pas l'environnement, il y a des chances aussi que ça ne
fasse pas trop effet.
P5 :
Je viens plutôt du champ éducatif et ça, ça m'intéresse. Et le champ sanitaire je le
connaissais assez peu. Et je vois une différence, mais c'est presque une de mes..., un de
mes engagement militant éducatif. Quand on voit un jeune, on peut dire, on peut être
tenté de voir d'abord quel est son problème, quelle est sa maladie. Et moi je n'ai pas ce
regard là, ce n'est pas ma culture. […] De plutôt chercher, chez chacun, notamment chez
un jeune, quel est son potentiel, qu'est ce qu'il a envie de faire. Il a forcément des
difficultés, mais comment tirer vers le haut à partir de son potentiel, de sa richesse.
Les professionnels imaginent une pratique non uniquement centrée sur le soin curatif mais
orientée vers la prévention et l’éducation à la santé, à la croisée des différentes disciplines.
P6 :
Et après, sur certaines problématiques, il me semble qu'il y ait des ateliers, des
animations, qui permettent d'aborder un certain nombre de question, je ne sais pas, de
prévention, d'addiction... Il faut aussi en mettre en place. Concrètement, c'est plus dans
une notion de prévention ou d'échange, pour permettre de comprendre, d'expliquer des
choses.
46
S'il y a une activité autour du jardinage et qu'on plante un certain nombre de choses,
venir parler à un moment donné des besoins de variété alimentaire, pour lutter contre
par exemple le diabète, ou pour... Il me semble que les liens doivent se faire.
P0 :
Pour moi il y aura toujours un intérêt à rencontrer un patient. Même s'il n'y a pas de vrai
besoin d'orientation, de prise en charge symptomatique, il y a un intérêt à faire du
préventif, de l'éducation thérapeutique...
5.3. L’approche socio-culturelle
Les activités socio-culturelles proposées aux adolescents illustrent cette approche globale
de la santé. Celles-ci sont réfléchies par les animateurs et intervenants extérieurs dans le but de
favoriser l’épanouissement des jeunes, en leur proposant des activités développant l’expression
sous toutes ces formes, la relation aux autres.
Ces activités constituent parfois un véritable outil thérapeutique.
P6 :
L'idée étant de favoriser l'expression et la socialisation, c'est quelque part de permettre
au jeune d'être en groupe. Ce n’est pas tout à fait la même chose quand on fait une
activité en groupe que quand on fait avec un soignant, là on est vraiment dans du
thérapeutique. Le socioculturel peut servir à aller mieux, et doit servir à aller mieux,
mais ne doit pas être vécu comme un temps de soin.
P7 :
On ne va pas être dans un face à face, un dialogue dans le lequel le gamin est en
difficulté, mais c'est une autre manière de le connaitre et peut-être de le soutenir. […]
mon boulot ici c'est aussi en partie de prendre des gamins, d'amener du soutien, je dirais
comme ça, mais à travers des activités, à travers un faire, quelque chose qui va
médiatiser un peu la relation. Pour ça moi j'ai des jeux de société sur lesquels on peut
s'appuyer, et il y a des activités plutôt sportives. Il y a un petit gymnase, un garage où il
y un filet de badminton, un ring de boxe, de quoi faire du tir à l'arc, des vélos... […]Et ça
permet parfois de voir un peu les potentialités des jeunes, leurs soucis, leurs difficultés.
47
Les animateurs et éducateurs présents lors des activités apportent leurs observations lors des
réunions pluridisciplinaires, permettant d’améliorer la prise en charge des jeunes.
P6 :
Le lien avec le soin, se fera et se fait par le biais aussi de reprises et d'échanges entre,
justement, les animateurs présents au nom de la MDA, ou les éducateurs qui peuvent être
présents aussi, et l'équipe soignante, dans le cadre des réunions pluridisciplinaires. […]
Justement ça permettra, on commence tout juste, de relever, quand on voit quelque chose,
que ça puisse être dit et que l'on puisse en parler en équipe pour réfléchir à ce qu'on fait,
ce qu'on propose. Il y a vraiment une idée de complémentarité.
Lors des activités, les plaintes physiques ne sont pas exprimées par les adolescents.
P6 :
Parce qu'ils vont se concentrer sur autre chose, parce qu'ils vont vivre autre chose. Et du
coup le trouble ne parait pas à ce moment là. Où en tout cas il est vraiment réduit.
5.4. Un lieu de recherche et d’expérimentation
La rencontre de professionnels d’horizon différents peut être à l’origine de projets
expérimentaux novateurs dans le domaine de la santé des adolescents. Un exemple est donné
par un participant.
P14 :
Après il y a des choses qui sont..., moi que j'aimerai réfléchir... C'est la MDA 43, alors 43
c'est Haute-Loire, ou j'en sais rien, qui font une permanence de cyber harcèlement. Et je
trouve que c'est intéressant parce que le cas se retrouve... C'est assez fréquent. Dans les
cas que moi j'ai été amené à voir. La dimension de la rumeur sur Facebook, ou des
choses comme ça... C'est assez important. Et donc voilà, c'est une question à laquelle j'ai
envie de réfléchir en équipe, pour savoir s'il n'y a pas... Aider un ado qui se fait harceler,
comment supprimer son compte, comment repérer... Enfin, repérer... C'est compliqué.
Mais comment on peut avoir une culture... Etre alerté sur les dangers. Et donc voilà, moi
je suis un spécialiste, enfin c'est mon taf, mais accompagné d'un professionnel de la
santé.
49
DISCUSSION
1. Forces et limites méthodologiques du travail
1.1. S’intéresser au regard des professionnels : un choix
Nous avons choisi de nous intéresser aux besoins exprimés par les professionnels. Le
regard des professionnels est pertinent à plusieurs titres :
- Les professionnels de la MDA34 sont au cœur des problématiques des adolescents. Les
liens privilégiés qu’ils établissent avec les jeunes à travers leurs rencontres successives
permettent de créer un climat de confiance. Le caractère accueillant et rassurant de la
MDA34 favorise cette confiance. Les conditions sont réunies pour que l’adolescent se
sente libre d’exprimer ses inquiétudes et questionnements.
- Leur expérience apporte un éclairage non seulement sur les plaintes et questionnements
des adolescents, mais également sur leur rapport au système de santé.
- Interroger les professionnels permet d’améliorer la compréhension du fonctionnement de
la MDA34 et de leurs attentes vis-à-vis de la prise en charge somatique en son sein.
Les besoins exprimés par les professionnels ne sont pas assimilables à ceux des
adolescents. S’intéresser aux besoins des adolescents serait un travail différent, probablement
riche et complémentaire de celui-ci.
1.2. L’approche qualitative par entretiens individuels
L’approche qualitative apporte des éléments de compréhension d’un phénomène
complexe. Elle permet de faire émerger des éléments nouveaux au delà des préconceptions des
chercheurs (25). Cela nous paraissait la meilleure façon de recueillir les données les plus riches
et inédites possibles.
Nous avons choisi les entretiens individuels semi-directifs plutôt que des entretiens
collectifs (focus group). Nous voulions ainsi permettre l’expression d’expériences vécues et de
ressentis individuels sans tabou. Nous craignions que le caractère collectif rende les discours
plus consensuels et peu informatifs. Le fait que les participants appartiennent tous à la même
institution a renforcé ce choix. On peut cependant se demander si les entretiens collectifs
auraient pu créer un débat à l’origine de données plus riches, du fait de l’interactivité entre les
participants.
50
L’expression de points de vue subjectifs, l’utilisation du « je », l’émergence de
représentations inédites permettent d’affirmer la qualité de certains passages des entretiens. Nous
regrettons que ces passages soient peu nombreux. Une grande partie des entretiens est constituée
d’un discours objectif apportant des notions générales au sujet de la MDA34. Le point de vue
porté est dans l’ensemble celui de l’institution plus que celui de l’individu.
Des entretiens plus longs auraient peut-être permis d’obtenir un discours davantage
« personnel », en permettant aux participants de se détacher de la situation d’entretien et de
parler en confiance.
Mon manque d’expérience en tant qu’interviewer est peut-être à l’origine de cet écueil.
Le contexte institutionnel a peut-être également limité l’expression de points de vues subjectifs,
le participant pouvant percevoir la situation d’entretien non pas comme un travail de recherche
mais comme une « évaluation des pratiques ».
1.3. L’échantillon des participants
Le nombre de participants était limité par l’effectif fixe des professionnels de la MDA34.
Cela n’a pas permis d’avoir un objectif de saturation des données. Nous avons interrogé le plus
grand nombre possible de professionnels de la MDA34, avec un participant au moins de chaque
profession.
L’origine professionnelle diverse des participants permet d’obtenir une variation
maximale de points de vue, en ne se contentant pas du regard des professionnels médicaux et
paramédicaux.
La limite constatée est le malaise parfois créé auprès de certains professionnels ne se
sentant par légitimes pour être interrogés ou estimant ne pas avoir « d’éléments de réponse à
apporter » au travail.
1.4. Le recueil des données
L’entretien semi-directif nécessite l’utilisation de techniques de relances, de
reformulation ou de clarification. Les relances étaient parfois inductrices ou laissaient apparaitre
des éléments d’ordre interprétatif. Cela pouvait influencer l’expression de l’opinion propre de
l’interviewé.
Le positionnement de l’interviewer était différent selon la personne interrogée : les
questions étaient adaptées aux participants.
La retranscription au fur et à mesure des entretiens a permis un regard critique face à ces
défauts faisant apparaitre les préconceptions de l’interviewer, pouvant nuire à la qualité de
l’entretien. Des corrections ont été apportées ensuite.
51
1.5. L’analyse qualitative
La force de notre travail d’analyse réside dans l’absence de grille d’analyse préétablie. La
construction de la grille d’analyse au fur et à mesure de la lecture des entretiens a permis
l’émergence de thème et sous-thèmes inédits (25).
L’analyse qualitative thématique nécessite une appropriation des techniques de
découpage en unité de sens, de thématisation. Mon absence d’expérience a pu limiter la qualité
de la production de sens à partir des entretiens.
On peut regretter l’absence de triangulation de l’analyse qui aurait peut-être permis
d’affiner les résultats et de leur donner plus d’objectivité.
2. Principaux résultats
2.1. La prise en charge somatique à la MDA34 : une alternative à la
médecine générale libérale
2.1.1. Le médecin généraliste libéral, interlocuteur privilégié des
adolescents
Les professionnels, au fil des entretiens, le soulignent : la plupart des adolescents
consultent leur médecin généraliste, et leur prise en charge ambulatoire est adaptée. Ils ne
rencontrent généralement pas d’obstacle ou de difficulté pour recourir aux soins. Ce ressenti est
confirmé par les données épidémiologiques : le médecin généraliste, médecin de premier
recours, est l’interlocuteur privilégié des adolescents (28,29).
Ainsi en Languedoc-Roussillon, 91% des étudiants interrogés pour l’étude « Santé des
Jeunes de 15-25 ans en Languedoc-Roussillon avaient consulté un médecin généraliste dans les
six derniers mois (10).
Le médecin généraliste, comme le définit la WONCA (30), est « chargé de dispenser des
soins globaux et continus à tous ceux qui le souhaitent indépendamment de leur âge, de leur sexe
et de leur maladie. Il soigne les personnes dans leur contexte familial, communautaire, culturel et
toujours dans le respect de leur autonomie. Il accepte d’avoir également une responsabilité
professionnelle de santé publique envers sa communauté. Dans la négociation des modalités de
prise en charge avec leurs patients, il intègre les dimensions physique, psychologique, sociale,
culturelle et existentielle, mettant à profit la connaissance et la confiance engendrées par des
contacts répétés. »
Ces caractéristiques du médecin généraliste en font un interlocuteur adapté à la
population adolescente. Au-delà de la prise en charge somatique, la médecine générale, de part
52
ses spécificités permet une approche globale particulièrement adapté à l’adolescence. Le
médecin généraliste « de famille » qui connait et suit le jeune depuis l’enfance, peut constituer
un « adulte transitionnel », à l’interface entre le jeune et les parents (29).
Les travaux de recherche de ces quinze dernières années, autour du groupe ADOC6, sur
l’adolescent en consultation de médecine générale (31), le dépistage de la souffrance de
l’adolescent en médecine générale (32,33) montrent l’intérêt porté par la discipline pour cette
population.
2.1.2. Les difficultés de recours au médecin généraliste libéral
Dans certaines situations identifiées par les professionnels interrogés, le recours au
médecin généraliste libéral est difficile, et la consultation d’un médecin généraliste à la MDA34
apparait comme une solution.
Lorsque l’adolescent est en conflit avec ses parents, il refuse parfois de consulter le
médecin généraliste de famille, considéré comme l’allié des parents et non garant du secret
médical. La consultation d’un médecin généraliste à la MDA34 est vue par les professionnels
comme la possibilité d’une autonomisation de l’adolescent vis-à-vis de sa santé, dans un lieu
rassurant. Elle peut permettre dans un second temps l’orientation vers un médecin généraliste
libéral différent de celui des parents.
Certaines familles repérées par les professionnels, dans des situations sociales ou socio-
économiques complexes, avec des déménagements répétés, n’ont pas de médecin généraliste
« de famille ». La consultation de médecine générale à la MDA34 peut être utile.
Certains jeunes isolés en rupture familiale cité par les professionnels n’ont pas de droits
ouverts à la Sécurité Sociale, ou ne comprennent pas le fonctionnement du système de soin. Pour
eux il est compliqué de faire les démarches auprès de la sécurité sociale, de prendre rendez-vous
avec un médecin généraliste libéral inconnu. La prise en charge à la MDA34, gratuite, peut être
une solution. La consultation de médecine générale peut être accompagnée d’un entretien avec
une assistante de service social.
6 Le groupe ADOC (ADOlescents et Conduites à risque) comprend 14 médecins généralistes et un psychiatre
libéral. A partir de leurs observations cliniques confrontés à la littérature, ils élaborent, testent et valident de
nouvelles possibilités pour dépister, accueillir et accompagner en cabinet l'adolescent en mal-être voire en risque
suicidaire. http://www.medecin-ado.org/infos/groupe_adoc.htm
53
Outre ces situations de difficultés d’accès au médecin généraliste libéral, l’approche
somatique à la MDA34 prend tout son intérêt pour les professionnels dans les cas où pathologies
somatiques et troubles psychiques sont intriqués.
2.2. L’intérêt d’une approche conjointe psyche-soma
2.2.1. Le corps à l’adolescence
« Un adolescent, c’est quelqu’un qui a été convoqué à l’adolescence par la puberté » dit
l’un des professionnels interviewé.
Les transformations corporelles sont au cœur du processus d’adolescence. La maturation
neuro-hormonale entraîne le pic de croissance et l’apparition des caractères sexuels secondaires.
L’irruption de la maturité sexuelle remet en cause l’image du corps que l’enfant avait pu
constituer (34). Cette perte de repère est à l’origine de nombreuses inquiétudes des adolescents,
qui tentent de comprendre ce nouveau corps étranger (35).
Ces préoccupations autour du corps et de sa normalité sont relevées par les
professionnels. La peau, théâtre des modifications hormonales, devient éruptive : l’acné est citée
dans plusieurs entretiens. Ces changements physiques sont à l’origine d’une vulnérabilité décrite
par Françoise Dolto dans « le complexe du Homard » (36) cité par un professionnel interviewé.
2.2.2. Les troubles fonctionnels
Le corps apparait à l’adolescence comme un lieu d’expression privilégié du mal-être.
Les plaintes somatiques identifiées par les professionnels sont souvent qualifiées de
« psychosomatiques » ou « somatisations ». Ils désignent ainsi les manifestations physiques
d’une souffrance psychique.
Selon les classifications et les théories, ces manifestations sont regroupées sous des
appellations différentes (37) : « troubles fonctionnels », « somatofomes » pour le DSM IV-TR7,
« troubles psychofonctionnels » dans la CFTMEA.
Les troubles fonctionnels sont définis par la présence de symptômes physiques faisant
évoquer des troubles somatiques sans qu’aucune anomalie organique ne puisse être décelée, ni
aucun mécanisme physiopathologique reconnu (37).
Les différentes classifications psychiatriques distinguent les troubles fonctionnels :
- Des troubles factices et simulations, où la production de symptômes est feinte
intentionnellement.
7 La définition donnée par le DSM V, remplaçant les « troubles somatoformes » par les « troubles de symptômes
somatiques », ne sera pas utilisée ici.
54
- Des troubles psychosomatiques, définis comme des troubles somatiques à déterminisme
psychique, où des lésions sont objectivables (par exemple l’eczéma).
La présence de plaintes « floues » n’est pas forcément synonyme de trouble fonctionnel.
Ces symptômes peuvent être passagers, sans retentissement et n’aboutissant pas forcément à une
consultation. Les plaintes peuvent également persister et entraver le fonctionnement de
l’adolescent, notamment au niveau scolaire, comme l’ont fait remarquer certains professionnels
interrogés.
Les plaintes « floues » sont un motif fréquent de consultation des adolescents en
médecine générale (38). Leur prévalence est difficile à évaluer, évaluée selon les études à 5 à 10
% des garçons et 10 à 15 % des filles à l’adolescence (39).
Marianne Caflisch et son équipe de la consultation pour adolescents de l’hôpital
universitaire de Genève ont publié leurs travaux sur les troubles fonctionnels des adolescents
(39). Les plaintes les plus fréquentes sont les céphalées, les douleurs abdominales, les myalgies,
les malaises ou la fatigue chronique. Cela correspond aux symptômes cités par les professionnels
de la MDA34 quand ils évoquaient les troubles fonctionnels.
Les liens entre les symptômes flous et la souffrance psychologique ont été documentés
par plusieurs travaux. Chez les jeunes patients de Marianne Caflisch, plus la prise en charge était
motivée par une cause d’ordre psychologique ou psychosociale, plus on retrouvait des
symptômes flous associés (39). Dans une étude menée à l’hôpital Bicêtre, les jeunes suicidants
présentaient davantage de plaintes somatiques chroniques que leurs pairs (40).
Ces constatations ont plusieurs conséquences dans la prise en charge des plaintes
fonctionnelles, dont font état les professionnels interrogés :
- L’élimination de l’organicité de la plainte est un pré-requis indispensable. La
démarche diagnostique constituée d’un examen clinique et si nécessaire d’examens
complémentaires doit permettre d’écarter tout doute sur une origine organique des
symptômes. Le temps même de l’examen physique est important : il permet de rassurer
le patient de sa normalité et du « bon fonctionnement » de son corps. Au cours des
entretiens, les professionnels expriment leur besoin de s’assurer dans certaines situations
de l’absence d’organicité.
55
Il est nécessaire de signifier au patient et à sa famille l’inutilité de poursuivre les
investigations et les consultations spécialisées. Parfois, comme le remarque un participant
interrogé, la cristallisation des préoccupations autour de la recherche d’une cause
organique entraine une multiplication des examens et un nomadisme médical (41).
- Exclure une pathologie organique n’est pas suffisant. Les arguments positifs en faveur
d’une pathologie fonctionnelle doivent être recherchés : aucun effet des différents
traitements proposés, aucune fluctuation dans le temps, multitude de plaintes
différentes… (39)
- Il est indispensable de ne pas se contenter d’un traitement symptomatique de ces
plaintes fonctionnelles. Le langage corporel doit être décodé (1). Ces plaintes constituent
des indicateurs de risque et peuvent être un outil de dépistage d’une souffrance
psychique pour les professionnels.
Il faut amener l’adolescent à prendre conscience que ses symptômes peuvent témoigner
d’un mal-être plus profond, à faire le lien entre sa plainte physique, sa souffrance
psychique et son histoire personnelle. Cette démarche peut prendre du temps. Il n’est pas
forcément évident de proposer d’emblée une prise en charge psychothérapeutique (39).
- Même s’il n’existe pas d’urgence médicale au sens propre, ces troubles fonctionnels
doivent être pris en charge car présentent des conséquences : retentissement sur le
fonctionnement notamment absentéisme scolaire, surmédicalisation, évolution vers la
chronicité.
2.2.3. L’approche collaborative
Les professionnels interrogés expriment la nécessité d’une approche conjointe et non
clivante de la santé des adolescents. Ils soulignent parfois l’absurdité du clivage artificiel psyche-
soma, notamment pour des symptômes « carrefour » comme les troubles du sommeil et la
fatigue. Ceci est particulièrement évoqué pour les troubles fonctionnels.
L’éclairage de la médecine psychosomatique est intéressant. Elle constitue une discipline
en soi, reposant sur les théories et courants de pensées bien définis à la croisée de la biologie et
la psychanalyse (37). La psychosomatique s’intéresse à l’unité fondamentale de l’être humain et
aux interactions entre psychisme et soma. Elle apporte une conception cohérente et objective et
phénomènes de somatisation, en considérant l’individu comme un tout (42).
Philippe Duverger et son équipe de pédopsychiatrie de liaison en service de pédiatrie au
CHU d’Anger, soulignent la nécessité d’une bonne coopération entre les professionnels afin
d’articuler soins somatiques et psychiques (37).
56
La présence d’un médecin généraliste au sein de l’équipe de la MDA34 est, pour les
professionnels, intéressante à plusieurs titres :
- L’avis du somaticien : le médecin généraliste est alors considéré comme « expert du
corps » et apporte une réponse technique à la question « n’y a-t-il pas une organicité ? »
- La porte d’entrée dans le dispositif : certains adolescents exprimant leur mal-être à
travers le corps sont réticents à rencontrer un « psy », mais favorable à une approche
centrée sur leurs symptômes physiques.
Outre les troubles fonctionnels, l’approche conjointe peut-être intéressante dans les autres
situations où pathologies psychiques et somatiques se mêlent (37) :
- Les troubles du comportement alimentaire. Leur retentissement somatique est au
devant de la scène et inquiète l’entourage. Mais leur origine est psychique, partageant des
mécanismes psychopathologiques communs avec d’autres troubles du comportement,
sous l’appellation de conduites d’addiction ou de dépendance. La nécessité d’une
collaboration étroite entre somaticiens et psychiatres est établie, à toutes les étapes de la
prise en charge. Lors du diagnostic, l’un des professionnels interrogés souligne la
nécessité d’écarter une origine secondaire et d’évaluer le retentissement somatique. La
prise en charge psychothérapique ne peut débuter qu’après la remise en état physique.
- Les attaques du corps. Les scarifications, évoquées par les professionnels, sont souvent
un motif d’admission aux urgences pédiatriques. Le corps est mis en avant, mais pour
traduire une difficulté psychique. Les premiers temps du soin sont d’ordre somatique :
prendre soin du corps, panser les plaies. « Une petite qui s'est scarifiée, on s'occupe, on
nettoie… » dit l’un des professionnels. Le deuxième temps est celui de la mise en mots,
afin de verbaliser la souffrance et révéler les difficultés.
- Le retentissement psychique des pathologies somatiques. Les professionnels citent
certaines situations rencontrées : retards de croissance, troubles pubertaires, dysthyroïdie.
Les soignants doivent être attentifs au vécu psychique de ces perturbations corporelles.
Dans certaines maladies chroniques l’image du corps est attaquée par les effets de la
maladie et parfois des traitements. Les soins peuvent être lourds et interférer dans le
rythme de vie. L’observance des soins (médicaments, régimes, consultations) peut poser
des problèmes.
57
L’approche collaborative de ces situations où troubles somatiques et psychiques se
côtoient permet d’améliorer la qualité de la prise en charge des adolescents. Au-delà de
l’approche médicale, la présence de professionnels socio-éducatifs renforce l’interdisciplinarité
au sein de la structure.
2.3. L’interdisciplinarité à la MDA34 : forces et obstacles
L’échantillon des professionnels interrogés reflète l’ensemble des métiers exercés à la
MDA34. Les entretiens apportent un éclairage intéressant sur l’une des spécificités des MDA :
l’interdisciplinarité. A travers leurs perceptions de la santé physique des adolescents et de sa
prise en charge à la MDA34, on distingue la richesse mais également les obstacles au travail
interdisciplinaire.
2.3.1. Forces de l’interdisciplinarité
Entre discipline et indiscipline
Rappelons, comme l’a défini Edgar Morin (43), que la discipline est une catégorie
organisationnelle au sein de la connaissance scientifique. Elle répond à la diversité des domaines
qui recouvrent les sciences. Une discipline tend naturellement à l’autonomie : elle développe des
frontières, un langage, des techniques et des théories qui lui sont propres. Morin souligne
l’importance de cette délimitation dans l’histoire de la recherche scientifique.
Le risque de cette spécialisation de la discipline autour de l’objet étudié est d’oublier les
liaisons de cet objet avec ceux des autres disciplines. « La frontière disciplinaire, son langage et
ses concepts propres vont isoler la discipline par rapport aux autres et par rapport aux problèmes
qui chevauchent les disciplines » (43).
L’ouverture est nécessaire car « le réel n’est pas découpé en créneaux » (44). La pluralité
de la définition de l’adolescence, au carrefour de la biologie, de la psychanalyse et de la
sociologie, le rappelle.
Interdisciplinarité, Pluridisciplinarité, Pluriprofessionnalité
La nature des relations qui sont développées entre les disciplines est variable (45) :
- Il peut s’agir d’une interaction voire d’une intégration : le travail interdisciplinaire
correspond au processus de synthèse et d’analyse à partir des perspectives de plusieurs
disciplines, autour d’un objet d’étude commun.
- Ou d’une juxtaposition : dans le travail pluridisciplinaire les disciplines sont réunies afin
d’aborder un objet d’étude selon plusieurs points de vue, sans qu’il soit tenter d’intégrer
collectivement ces divers points de vue.
58
Cependant ces définitions restent floues et polysémiques.
La pluriprofessionnalité, définie notamment par la Fédération Française des Maisons et
Pôles de Santé (46), consiste à faire concourir à un même objectif plusieurs professionnels de
professions différentes. Elle utilise la complémentarité des savoirs et des compétences pour
améliorer la résolution des problèmes rencontrés.
La richesse du travail interdisciplinaire à la MDA34
L’un des objectifs des MDA, décrit dans le cahier des charges (annexe 2) est de
« favoriser la synergie des acteurs et la mise en œuvre de prises en charge globales pluri-
professionnelles et pluri-institutionnelles (à la fois médicales, psychologiques, sociales,
éducatives, voire judiciaires). »
Nous l’avons vu plus haut, la mixité des pathologies psychiatriques et somatiques à
l’adolescence rend indispensable l’approche interdisciplinaire entre psychiatres, pédopsychiatres
et psychologues d’un coté, et médecins somaticiens de l’autre.
Au-delà des professionnels du soin, la MDA34 intègre dans le travail interdisciplinaire
les professionnels du médicosocial (assistantes de service social, éducateur) et du socioculturel
(coordonnateur de projets et animateur).
Les professionnels interrogés ont à de nombreuses reprises insisté sur l’importance des
réunions cliniques pluridisciplinaires. Les professionnels apportent des éléments de réflexion
issus de leurs rencontres avec les adolescents : entretiens d’accueil, consultations, activités
éducatives et socioculturelles. Ces temps d’échange et de travail en équipe autour des problèmes
rencontrés permettent d’apporter des éléments de réponses, grâce à la complémentarité des
savoirs et des compétences.
2.3.2. Risques de l’interdisciplinarité et obstacles
Edgar Morin insiste sur les risques inhérents au décloisonnement des disciplines :
approximation conceptuelle, confusion des concepts… « On ne peut pas briser ce qui a été créé
par les disciplines ; on ne peut pas briser toute clôture, il en est du problème de la discipline, du
problème de la science comme du problème de la vie : il faut qu'une discipline soit à la fois
ouverte et fermée. » (43)
59
Au travers des entretiens émergent plusieurs obstacles pouvant nuire au travail
interdisciplinaire. Ces freins ont également été évoqués par Georges Picherot8 lors de son
intervention aux Journées Nationales des Maisons des Adolescents en octobre 2014.
- Les habitudes de séparation des disciplines. Certains professionnels soulignent leur
tendance à mettre de coté les dimensions physiques de la santé. Ils expliquent que les
adolescents et leurs parents également n’ont pas le reflexe d’évoquer les aspects
somatiques. Rappelons cette situation évoquée par un professionnel, d’un jeune
déscolarisé pour qui l’équipe n’a su qu’après plusieurs semaines de suivi qu’il souffrait
d’énurésie et d’encoprésie. Ce clivage fait à la fois par les professionnels et les patients
peut trouver une explication dans l’histoire de la création et le fonctionnement actuel de
la MDA34.
- La rencontre de cultures professionnelles diverses. Langages différents, divergences et
clivages conceptuels peuvent induire des difficultés dans le travail interdisciplinaire. La
méconnaissance des métiers exercés par les autres professionnels renforce ces difficultés.
Un professionnel issu du milieu éducatif explique que sa conception de la santé n’est pas
la même que celle des professionnels du soin : il s’intéresse au potentiel du jeune plutôt
que ses problèmes ou maladies.
- Les rapports de force. Un professionnel exprime sa crainte de voir la prise en charge
somatique à la MDA « éclipser » la problématique psychique des adolescents.
Il est important de connaitre et d’analyser ces obstacles pouvant nuire à
l’interdisciplinarité. Le respect des spécificités de chaque profession, la connaissance et
l’appropriation de la culture professionnelle de l’autre semblent être des clés pour lever les freins
au travail interdisciplinaire.
2.4. Une approche biopsychosociale de la santé de l’adolescent
Nous l’avons vu, l’adolescence est une période de la vie où les bouleversements
physiques, psychiques et sociaux se mêlent. L’approche biomédicale de la santé de l’adolescent
ne peut être suffisante.
A la question « Qu’est ce que c’est pour vous, un adolescent en bonne santé ? » les
réponses des professionnels traduisent leur vision globale et positive de la santé de
l’adolescent, bien au delà de l’absence de maladie.
8 Pédiatre et coordonnateur médical de la MDA de Loire Atlantique
60
Un adolescent en bonne santé se sent « bien dans sa tête » (P8) et « bien dans sa peau »
(P3). L’environnement scolaire et familial, les dimensions relationnelles avec les pairs sont cités
comme des éléments importants de la santé de l’adolescent.
Outre ces déterminants de santé assez classiques, il est intéressant de voir que les
professionnels mettent en avant les compétences psychosociales de l’adolescent, définies par
l’OMS en 1993 comme les « capacités à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves
de la vie quotidienne ». Ainsi, se poser des questions et en parler avec d’autres personnes (P5),
être dans une dynamique créative (P2), sont autant d’éléments cités par les professionnels
définissant un adolescent en bonne santé.
Cette approche de la santé à la MDA34 s’intègre dans le modèle biopsychosocial. Décrit
par Engel en 1980 (47), il s’agit d’une « représentation de l’être humain dans laquelle les
facteurs biologiques, psychologiques et sociaux sont considérés comme participant
simultanément au maintien de la santé ou au développement de la maladie » (48). Il ne nie
pas mais intègre le modèle biomédical qui considère la santé comme l’absence de maladie ou
d’infirmité. Le modèle biopsychosocial fait écho à la définition de la santé donnée par l’OMS,
« état de complet bien-être physique, mental et social » (49), cité par l’un des professionnels.
Appliqué à la pratique clinique, ce modèle induit une modification de la relation patient-
soignant et une participation active du patient. La démarche d’éducation pour la santé est
issue de la promotion de la santé9 (50) qui vise notamment le développement des aptitudes de
chaque individu à prendre en charge sa propre santé.
L’éducation pour la santé se distingue de l’information et du conseil. « C’est un acte
d’accompagnement qui repose sur une alliance entre le patient et le professionnel qui devra faire
preuve d’empathie et utiliser des techniques d’entretien qui favorisent le dialogue. Son objectif
n’est pas que le patient suive aveuglement les conseils du médecin mais qu’il fasse son propre
choix, en connaissance de cause, et qu’il soit accompagné dans ce choix par le médecin » (51)
L’INPES a crée en 2009 « entre nous », un outil d’intervention en éducation pour la santé
des adolescents (51) destiné aux professionnels de santé. Il s’appuie sur cette approche
9 La promotion de la santé, telle que définie par la charte d’Ottawa, est le processus qui confère aux populations les
moyens d’assurer un plus grand contrôle sur leur santé, et d’améliorer celle-ci. L’intervention en promotion de la
santé passe par le développement de cinq axes : élaboration de politiques publiques saines, création de milieux
favorables, renforcement de l’action communautaire, acquisition d’aptitudes individuelles et réorientation des
services de santé.
61
biopsychosociale. Il a pour but d’aider les professionnels à favoriser leurs relations avec les
adolescents, afin de créer des conditions favorables à une démarche d’éducation pour la santé.
Cet outil propose notamment plusieurs supports « d’appui à la relation » entre le
professionnel et l’adolescent. Deux de ces supports sont exposés en annexe : le questionnaire de
pré-consultation du Pr Alvin10
(annexe 6) et la « météo perso » (annexe 7) développée par
l’INPES. Ils explorent les habitudes générales, les consommations, les symptômes flous, les
préoccupations sur la croissance et l’image corporelle, les relations avec les parents, la scolarité,
l’amitié et la sexualité, les idées suicidaires…
A la MDA34 plusieurs éléments relevés par les professionnels interrogés témoignent de
cette approche biopsychosociale de la santé de l’adolescent :
- La pluridisciplinarité, nous l’avons vu plus haut, favorise l’approche globale et la prise en
compte des différents déterminants de la santé.
- La présence de professionnels socio-éducatifs incite à considérer la santé de l’adolescent
de façon positive : il s’agit d’une ressource, un potentiel, plus que de l’absence de
maladie.
- Les activités socio-éducatives et socio-culturelles peuvent favoriser le développement des
compétences psychosociales des adolescents.
3. La prise en charge somatique dans les autres MDA
Les échanges établis avec les autres MDA par mail ou lors des Journées Nationales des
Maison des Adolescents en octobre 2014 sont venus enrichir notre réflexion. Les
questionnements autour de la place et de l’organisation de la prise en charge de la santé physique
concernent de nombreuses MDA.
Les réponses apportées sont variées et s’organisent à la fois au sein des MDA et avec les
professionnels et partenaire extérieurs.
3.1. Les consultations « somatiques » au sein des MDA
La prise en charge des troubles somatiques a parfois lieu au sein des MDA. Il peut s’agir
d’une présence médicale, par un pédiatre ou par un médecin généraliste, qui réalise des
consultations et/ou participe aux réunions pluri-disciplinaires. Des consultations de médecins
d’autres spécialités sont parfois organisées : gynécologue, endocrinologue, dermatologue,
médecin nutritionniste… La réponse aux troubles somatiques est également apportée par la
10
CHU de Bicêtre, service de médecine pour adolescents
62
présence de professionnels para-médicaux : infirmière, sage-femme, puéricultrice. Le temps de
présence des professionnels est variable, de la vacation d’une demi-journée au temps-plein.
Ainsi, dans le cas particulier de la MDA de Papeete en Polynésie Française, la demande
des jeunes est parfois uniquement somatique. Un médecin généraliste et deux infirmières à temps
plein y répondent. A la MDA des Yvelines Sud, un médecin généraliste est présent à mi-temps
dans la structure. Il réalise les entretiens d’accueil en binôme avec un autre professionnel. Citons
également l’exemple de la MDA de Côte-d’Or, où, après évaluation par l’entretien d’accueil, le
jeune peut être vu en consultation de médecine de l’adolescence. Le médecin, spécialiste du
développement à l’adolescence, procède à une évaluation globale somatique et psychique du
jeune. A Pau, une pédiatre du service hospitalier travaille également à la MDA, permettant une
prise en charge continue et pluridisciplinaire notamment pour les patients sortant
d’hospitalisation pour des TCA.
3.2. Les structures partenaires pour la prise en charge somatique
L’autre axe de réponse développé par les MDA est l’orientation vers l’extérieur. Il peut
s’agir d’une orientation vers le médecin généraliste habituel ou un autre médecin généraliste,
vers un pédiatre libéral ou hospitalier, ou vers un médecin d’une autre spécialité. On constate un
lien fort avec les dispositifs existants, institutionnels ou associatifs : Centre de Planification et
d’Education Familiale (« Planning familial »), Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit
(CDAG), Protection Maternelle et Infantile (PMI), Centre d’examen de santé de l’Assurance
Maladie.
Ainsi, à Nice, la MDA oriente les jeunes présentant des plaintes somatiques au Carrefour
Santé Jeune situé dans les mêmes locaux, où ils peuvent voir en consultation une infirmière, un
médecin généraliste ou un médecin d’autre spécialité.
3.3. Au delà des consultations, d’autres approches
D’autres formes de réponses sont apportées aux questions de santé somatique.
A la MDA des Yvelines Sud un questionnaire (annexe 8) explorant différents éléments
de la santé somatique, inspiré du questionnaire de pré-consultation du Pr Alvin cité plus haut, est
proposé systématiquement aux jeunes.
63
Des projets de prévention et des actions autour des questions de santé sont mis en place
dans plusieurs MDA, souvent en lien avec d’autres professionnels non médicaux (éducateurs,
animateurs…).
A Strasbourg par exemple, des ateliers collectifs de réalisation de court-métrages sont
proposés aux jeunes filles en souffrance avec leur corps. Ils sont co-animés par un cinéaste, un
art-thérapeute, un médecin généraliste et un psychiatre.
Ce tour d’horizon national permet de constater que plusieurs MDA se sont emparées de la
question de place de la santé somatique dans le dispositif. Les réponses apportées s’appuient très
souvent sur les structures existant localement. Au sein des MDA sont mises en place des
solutions intéressantes et innovantes permettant une approche globale, tant dans les domaines de
la prévention que du soin, adaptée aux spécificités de la mixité soma-psyche à l’adolescence.
3.4. L’hétérogénéité des MDA, limite à la comparaison
Malgré un cahier des charges commun, les MDA ont pour mission de s’inscrire dans
l’organisation médico-sociale locale et de s’adapter aux besoins spécifiques du territoire.
La place accordée aux questions de santé somatique est très variable, adaptée à chaque
lieu. Les solutions développées dans une MDA ne sont pas forcément transposables à une autre
MDA.
4. Perspectives pour la MDA34
4.1. Implications pratiques
4.1.1. « Ouvrir la porte » à la santé physique
Les participants le soulignent, la question du corps et la santé physique ne sont pas
ancrées dans leur « culture » professionnelle et plus largement dans l’orientation historique de la
MDA34. Les parents et les professionnels partenaires considèrent avant tout la MDA comme un
lieu de prise en charge du mal-être psychique et de la santé mentale.
Différentes pistes sont apportées par les professionnels pour intégrer les dimensions
somatiques de la santé des adolescents dès l’entretien d’accueil. A l’issue de notre travail
plusieurs suggestions peuvent être faites pour améliorer la prise en charge somatique à la MDA
34 dès l’accueil :
64
- Parler de la consultation de médecine générale à la MDA34 lors de l’entretien
d’accueil, premier contact avec l’adolescent.
- Demander systématiquement s’il existe un lien avec un médecin généraliste libéral
référent, un médecin traitant déclaré pour les jeunes âgés de 16 ans et plus.
- Soumettre aux adolescents un questionnaire à remplir en salle d’attente. Il explorerait
les dimensions psychiques et physiques de leur santé, sur le modèle sur questionnaire de
pré-consultation du Pr Alvin ou de la « météo perso » cités plus haut et exposés en
annexe. Cela permettrait un premier dépistage, en explorant les plaintes physiques, le
sommeil, la prise de médicaments, les consommations de substance psycho-actives, le
recours au soin, leur perception de leur état de santé … Les informations apportées
pourraient être reprises pendant l’entretien ou plus tard au cours de la prise en charge.
Ces données pourraient également être analysées afin d’améliorer la connaissance des
comportements de santé des jeunes fréquentant la MDA34. Cela permettrait d’adapter les
actions menées à la MDA34.
4.1.2. La place du médecin généraliste dans le dispositif
Le médecin généraliste pourrait avoir plusieurs rôles à la MDA34, évoqués par les
professionnels au cours des entretiens :
- La consultation de médecine générale, à la demande de l’adolescent à son arrivée ou
plus tard dans son parcours au sein de la MDA34, ou à la demande d’un professionnel qui
solliciterait son avis. Cette consultation est actuellement réalisée par l’interne en
SASPAS.
- La participation aux réunions cliniques pluridisciplinaires.
- Le travail de lien avec les professionnels de santé extérieurs, et notamment les
médecins généralistes.
- L’animation d’ateliers d’éducation pour la santé, selon les demandes des adolescents,
en lien avec les professionnels de l’axe socio-culturel.
4.2. Perspectives de recherche
Plusieurs travaux pourront venir enrichir la compréhension des enjeux liés à la prise en
charge somatique à la MDA34.
On pourra réaliser une étude qualitative des besoins ressentis par les adolescents se
rendant à la MDA34, vis-à-vis des questions de santé physique.
65
CONCLUSION
La création de la Maison des Adolescents de l’Hérault, dispositif d’accueil et de soin des
adolescents, est récente. Son fonctionnement est en cours de définition.
A l’automne 2013 certains professionnels de la MDA34 ont exprimé le besoin de prendre
en charge les « problèmes somatiques » des adolescents. Notre travail a permis de préciser les
perceptions et attentes des professionnels vis-à-vis des troubles somatiques des adolescents
accueillis à la MDA34.
Les jeunes rencontrés par les professionnels ont des questionnements au sujet de leur
corps et de ses transformations, de son fonctionnement et de sa normalité. Certains présentent
des plaintes somatiques parfois floues – céphalées, troubles digestifs, dorsalgies, malaises –
traduisant un mal-être psychique. D’autres ont des plaintes physiques en lien avec des
pathologies organiques, bénignes le plus souvent, parfois plus lourdes.
Pour les professionnels interrogés, certains adolescents ont des difficultés à consulter un
médecin généraliste. Souvent le médecin généraliste est le médecin « de famille », connu depuis
l’enfance. Il est parfois difficile pour l’adolescent de consulter ce médecin seul et de s’y confier,
d’autant plus quand les relations avec les parents sont conflictuelles. Mais les adolescents ont
également des difficultés à aller consulter seuls un autre médecin.
La prise en charge des troubles somatiques par un médecin généraliste au sein de la
MDA34 a, d’après les professionnels, plusieurs intérêts :
- Dans les situations de mixité des pathologies psychiatriques et somatiques, donner un
avis somatique dans le cadre de l’approche pluridisciplinaire.
- Rassurer et répondre aux questionnements des adolescents dans un lieu de confiance où
ils peuvent être faire en sécurité leurs premiers pas vers une autonomisation vis-à-vis de
leur santé.
- Etre une « porte d’entrée » dans le dispositif pour des jeunes en souffrance psychique
réticents à rencontrer un psychologue, psychiatre ou pédopsychiatre.
Notre travail souligne également les freins exprimés par les professionnels vis-à-vis de la
prise en charge des troubles somatiques. Issus des secteurs psychiatriques et pédopsychiatriques,
66
la prise en charge des dimensions physiques de la santé n’est pas inscrite dans leur culture
professionnelle. Les habitudes de clivage des disciplines renforcent cette difficulté.
Or l’accueil et le soin des adolescents demandent une approche globale de leur santé, en y
intégrant toutes les dimensions et tous les déterminants. Le dispositif MDA permet ce travail
interdisciplinaire qui s’inscrit dans le modèle biopsychosocial de la santé.
67
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70
ANNEXES
Annexe 1 : Charte de l’Association Nationale des Maisons des
Adolescents
votée le 13 mars 2009
PRÉAMBULE
Les Maisons des Adolescents sont des dispositifs créés depuis 1999 sur le territoire français afin
de favoriser l’accès aux aides, accompagnements et soins pour les adolescents en souffrance
physique, psychique et sociale. Cette charte rappelle les principes cliniques et éthiques qui
régissent tant leur fonctionnement que l’esprit dans lequel les premières Maisons des
Adolescents ont été fondées et souhaitent se développer sur le territoire français. Ces principes
sont en accord avec les préconisations de la défenseure des enfants (rapport 2003 et suivants), de
la conférence de la famille 2004 et du cahier des charges des Maisons des Adolescents élaboré
par la délégation interministérielle à la famille (janvier 2005).
1- La modélisation des Maisons des Adolescents est non seulement impossible mais irait à
l’encontre de l’esprit de ces dernières. Les Maisons des Adolescents doivent se développer
dans un territoire donné en prenant en compte l’existant, l’historique des structures déjà
développées sur ce territoire. Loin de tout esprit d’hégémonie, les MdA apportent par leur
création un atout supplémentaire dans le territoire défini, soit par la création, soit par la mise en
commun de moyens matériels ou humains afin de rendre plus facile et plus cohérent l’accès aux
soins des adolescents en souffrance.
2- Les Maisons des Adolescents se veulent des espaces pluridisciplinaires et
pluripartenarials. Leur pluridisciplinarité, essentielle dans leur conception, implique la possibilité d’y faire
intervenir, tant dans leur création que dans leur fonctionnement quotidien, des professionnels
d’horizons et de formations variées. Cette pluridisciplinarité permet de proposer aux adolescents
la richesse de regards croisés, allant du médical au social et du juridique à l’éducatif. Cette
pluridisciplinarité s’inscrit dans un réseau pluripartenarial, soit existant préalablement aux MdA,
soit à créer autour des MdA dont une des vocations est de devenir le support des réseaux
adolescents. Pluridisciplinarité et pluripartenariat sont les conditions nécessaires pour assurer un
accueil adapté à la pluralité des adolescences (dont on connaît la grande variabilité selon les
âges, le sexe, les lieux, les histoires personnelles et l’environnement social), leur garantissant
ainsi autant que possible un parcours d’aide, d’accompagnement et de soin cohérent.
Le pluripartenariat s’inscrit dans un décloisonnement indispensable des structures juridiques
porteuses des MdA, afin de favoriser les partenariats financiers, théorico-cliniques et humains.
3- Il appartient à chaque MdA de déterminer le territoire susceptible d’être couvert par
leurs services. L’objectif national d’une maison des adolescents par département semble licite,
mais ne peut être considéré comme systématique. La grande variabilité des répartitions
démographiques peut autoriser plusieurs MdA par département. L’objectif principal doit rester la
facilité d’accès pour les adolescents. Cette accessibilité se décline autour de trois axes :
71
Une disponibilité et une ouverture d’esprit des professionnels susceptibles de recevoir les
adolescents. Ceci implique des professionnels formés tant aux mouvements psychiques
de l’adolescence, qu’à la diversité des expressions symptomatologiques, qu’aux
interactions sociales générées par celles-ci.
Une proximité géographique. Le territoire géographique couvert implique une certaine
proximité, ou tout au moins, une certaine facilité d’accès. En cas de territoire étendu, des
relais peuvent être imaginés afin de favoriser l’accès des adolescents les plus éloignés.
Des horaires d’ouverture en cohérence avec les adolescents. Autant que possible, les
MdA offriront la possibilité d’accueillir les adolescents sur des temps ou ces derniers sont
disponibles. Elles organiseront leur ouverture en tenant compte de la temporalité
adolescente (relative rapidité d’accès, ouvertures en soirée et le week-end par exemple…)
4- Les missions des MdA peuvent varier selon l’existant sur un territoire donné. Au cœur du
dispositif, il est toutefois indispensable de retrouver une plate-forme d’évaluation des
manifestations adolescentes, la possibilité de dispenser, au moins à court terme, des soins
somatiques et psychiques, et, si un suivi au long cours est impossible, la possibilité d’une
orientation rapide et adaptée. Les MdA s’appuient donc sur un réseau de partenaires identifiés,
couvrant les champs du soin (somatique et psychique, ambulatoire et hospitalier), de l’éducatif,
du social, de la réinsertion et du juridique ainsi que les services des collectivités locales.
L’articulation avec les établissements relevant de l’éducation nationale et de l’éducation
spécialisée doit être forte, en particulier avec les services de santé scolaire.
5- Au-delà des adolescents, les MdA s’adressent aussi aux adultes en charge de ces
adolescents, et en particulier aux parents. Les missions des MdA peuvent ainsi, selon les cas,
prévoir de développer des structures de soutien spécifique à la parentalité, ou de s’adosser à
celles existantes.
Le travail de prévention est un axe de travail fort des MdA. Elles s’adressent en ce sens aussi
bien aux adolescents, qu’à leurs parents ou aux éducateurs en charge de ces adolescents. En
particulier une écoute appropriée des professionnels de l’adolescence doit pouvoir être
développée au sein des MdA.
6- Les MdA sont un lieu d’échanges et de croisement des compétences autour de
l’adolescence.
Elles peuvent dans cet esprit supporter des centres de formation, de recherche ou de
documentation autour de l’adolescence. Elles constituent des lieux ressources pour les
professionnels travaillant avec les adolescents.
7- Les MdA sont un lieu généraliste s’adressant à tous les publics adolescents. A ce titre,
elles n’ont pas pour vocation à se spécialiser « exclusivement » dans la prise en compte de
certains publics adolescents. Leur mission généraliste est leur essence même, ce qui ne leur
interdit pas, en fonction de leur implantation, d’avoir un regard plus aigu sur certaines modalités
d’expression adolescentes ou sur certaines populations aux caractéristiques plus spécifiques.
8- Les MdA constituent une interface entre les lieux existants de prise en compte des
adolescents. A ce titre, elles travaillent en étroite collaboration avec des structures d’amont ou
d’aval, en particulier les Points Accueil Ecoute Jeunes, les Espaces Santé Jeunes, les missions
locales, l'éducation nationale, les services de justice, les services de protection de l'enfance, les
services de pédiatrie et de médecine de l’adolescent, les centres de planification et d'éducation
familiale, REAPP etc., l’ensemble des secteurs de pédopsychiatrie et de psychiatrie générale, les
72
praticiens libéraux et les structures d’accueil social et médico-social. L’existence de ces
dispositifs constitue un complément indispensable au bon fonctionnement des MdA.
9- Les MdA constituent entre elles un réseau national appelé « Association Nationale des
Maisons des Adolescents ». Cette mise en lien vise à appuyer le développement, sur l’ensemble
du territoire français, de nouvelles maisons des adolescents afin d’assurer aux populations
concernées (adolescents, familles et professionnels) un service de qualité homogène. Elle vise en
outre à développer les réflexions locales, régionales, nationales et européennes autour des MdA.
Cette association se veut un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics afin de défendre les
principes communs aux MdA et d’être si besoin, leur porte-parole auprès de leurs interlocuteurs
institutionnels.
L’adhésion à cette association implique l’acceptation des principes énoncés dans cette charte.
73
Annexe 2 : Cahier des charges des Maisons des Adolescents
I - CONSTAT
Alors que ce sont encore trop souvent les aspects négatifs de l’adolescence qui sont mis en avant,
il est utile de rappeler que la grande majorité des adolescents, 8 d’entre eux sur 10, n’éprouve pas
de difficultés particulières.
Ceux qui souffrent, ceux qui vont mal doivent pouvoir être accompagnés et bénéficier d’un suivi.
C’est généralement le cas, parce que les professionnels sont alertés, lorsque les troubles
psychopathologiques s’extériorisent par des passages à l’acte mettant en question l’équilibre
social. Cela devient beaucoup plus difficile à réaliser lorsque la souffrance est intériorisée,
s’exprime à bas bruit ou dans le registre psychosomatique (ce qui est plus fréquent chez les
filles).
Les structures existent, multiples, qui remplissent chacune leur rôle. Ce qui peut manquer, c’est
l’approche et l’aide pluridisciplinaires qui semblent s’imposer. Les différents acteurs, la famille,
l’école et les différentes institutions ayant des adolescents en charge (aide sociale à l’enfance,
protection judiciaire de la jeunesse…), les professionnels de santé ont du mal à partager une
analyse et à coordonner leurs actions.
Si les structures intervenant en faveur des jeunes sont nombreuses, on peut regretter une absence
de lisibilité pour le public, mais aussi pour les professionnels, de l’organisation des différents
services. C’est le cas notamment de l’organisation des services de psychiatrie
.
On a pu constater également que si d’importants moyens de prévention sont mis en oeuvre chez
les jeunes enfants jusqu’à l’âge de 6 ans (20 consultations médicales chez le généraliste, le
pédiatre ou à la PMI, prises en charge à 100 %), tel n’est pas le cas au cours de l’enfance ni
pendant l’adolescence, bien que certaines manifestations psychopathologiques s’expriment
électivement à cette période (dysmorphophobies, émergences de pathologies psychiatriques
lourdes, troubles des conduites alimentaires, tentatives de suicide…). De même les adolescents
atteints de maladies chroniques nécessitent une attention particulière.
Par ailleurs, les professionnels en charge d’adolescents ont besoin d’être soutenus dans leur rôle
et sensibilisés à la spécificité de l’adolescence.
Il est également important de mieux répondre au besoin d’information et d’accompagnement des
parents, qui sont des partenaires pour tout ce qui concerne la santé de leurs enfants, considérée
dans sa dimension physique, mais également psychique, sociale ou éducative.
Enfin, l’intrication, au niveau individuel, des difficultés observées ne permet plus la prise en
charge de certains adolescents par une seule institution.
74
II - OBJECTIFS DES MAISONS DES ADOLESCENTS
Les maisons des adolescents ont pour vocation de mettre en œuvre les objectifs généraux
suivants :
Apporter une réponse de santé et plus largement prendre soin des adolescents en leur
offrant les prestations les mieux adaptées à leurs besoins et attentes, qui ne sont pas
actuellement prises en charge dans le dispositif traditionnel.
Fournir aux adolescents des informations, des conseils, une aide au développement d’un
projet de vie.
Favoriser l’accueil en continu par des professionnels divers pour faciliter l’accès de ceux
qui ont tendance à rester en dehors des circuits plus traditionnels.
Garantir la continuité et la cohérence des prises en charge.
Constituer un lieu ressource sur un territoire donné pour l’ensemble des acteurs
concernés par l’adolescence (parents, professionnels, institutions). De ce point de vue les
maisons des adolescents auront un rôle d'appui dans la mise en oeuvre des entretiens de
santé des 12‐ 13 ans ainsi qu'en amont et en aval des consultations annuelles et gratuites
de prévention prévues dans le plan Santé des Jeunes et concernant les jeunes de 16 à 25
ans.
Les objectifs opérationnels qui en découlent consistent à :
Favoriser la synergie des acteurs et la mise en oeuvre de prises en charge globales
pluri‐ professionnelles et pluri‐ institutionnelles (à la fois médicales, psychologiques,
sociales, éducatives, voire judiciaires).
Développer chez ces professionnels une culture commune sur l’adolescence.
Organiser l’expertise interprofessionnelle sur des situations individuelles en vue de la
définition d’une prise en charge précisant les engagements et les limites des différents
intervenants.
Evaluer le suivi des prises en charge et des méthodes dans un souci d’amélioration de la
qualité de ces prises en charge.
Assurer la cohérence des actions menées en faveur des jeunes sur le territoire concerné.
Permettre un complet décloisonnement des secteurs d’intervention.
III - CONDITIONS REQUISES
1. Analyse de l’existant et des besoins
Le projet de maison des adolescents s’appuie sur un diagnostic des besoins du territoire et de
l’existant. Celui‐ ci devra notamment faire l’inventaire de l’offre tant publique que privée,
analyser les points forts et les points faibles et s’appuyer sur des éléments de connaissance de la
situation locale des adolescents (données démographiques, sanitaires…).
Ce diagnostic doit être partagé a minima par les partenaires suivants : éducation nationale,
justice, conseil général et autres collectivités locales, acteurs de la santé et de l’action sociale
75
(ARH, DRASS, DDASS, missions locales…). Il doit également en tant que de besoin associer
les autres acteurs concernés (police, gendarmerie...).
A la lumière de ce diagnostic, des objectifs sont élaborés pour le territoire et les conditions
d’évaluation précisées.
Dans la dynamique "Espoir Banlieues", une priorité sera donnée à des projets implantés sur des
territoires identifiés comme étant en difficulté en termes de vulnérabilité et de fragilité de leur
population adolescente.
2. Missions des maisons des adolescents
D’une manière générale, les missions des maisons des adolescents s’articulent autour de:
L’accueil, l’écoute, l’information, l’orientation
L’évaluation des situations
La prise en charge médicale et psychologique
L’accompagnement éducatif, social et juridique.
S’il reste souhaitable de maintenir l’accueil d’un public adolescent large, les maisons des
adolescents s’adressent en priorité à des adolescents en proie à des difficultés faisant que leurs
familles, les professionnels et les institutions atteignent, isolément, les limites de leurs
compétences.
Il appartient aux décideurs locaux d’élargir l’accueil à un public adolescent plus large en
fonction des besoins identifiés localement et des ressources du territoire.
3. Organisation des maisons des adolescents
Ce sont des structures ouvertes où les adolescents peuvent se rendre librement et gratuitement
sans qu’une autorisation préalable des parents soit nécessaire.
Leur implantation géographique sera choisie de façon à être aisément accessible pour les
populations adolescentes.
Ces lieux doivent être clairement identifiés et individualisés afin de faciliter leur repérage.
Ils offrent des plages horaires d’accueil souples et adaptées Les maisons des adolescents
réunissent les dispositifs sanitaires, sociaux, éducatifs et juridiques dont les jeunes peuvent avoir
besoin pour faire face aux difficultés qu’ils rencontrent.
A cet effet, la mobilité des équipes travaillant au sein des maisons des adolescents est fortement
recommandée. Elles s’organisent pour pouvoir aller au devant de certains adolescents en
fonction des besoins repérés.
Les maisons des adolescents peuvent être créées à partir de structures, équipements ou services
existants qui satisfont à ces orientations. Les liens avec une ou plusieurs structures permettant
l’hospitalisation des adolescents en tant que de besoin seront précisés dans le projet.
76
Le porteur du projet peut être notamment un établissement de santé, une association, une
collectivité locale.
Les responsabilités et engagements respectifs sont formalisés sur la base d’une contractualisation
à charge pour les acteurs locaux de trouver, en fonction de la structure qu’ils envisagent de
mettre en place, la formule la plus appropriée.
4. Prestations proposées
Les maisons des adolescents s’adressent principalement aux adolescents, mais également à leurs
familles et aux autres partenaires intervenant dans le secteur de la santé, de l’éducation, de la
justice, de la culture, du sport, de la sécurité…
Actions en direction des adolescents
Elles peuvent être individuelles (permanences de conseil et d'orientation dans les domaines
social, éducatif, juridique…, consultations médicales, entretien avec un psychologue, entretien
dans le cadre de la planification familiale, consultation de diététique...) mais également
collectives (groupes de parole, ateliers thérapeutiques…).
Elles sont organisées en articulation avec les structures intervenant en faveur des jeunes,
notamment, les points accueil écoute jeunes (PAEJ) et les Espaces Santé Jeunes, qui sont des
structures de proximité dont les missions doivent rester distinctes des maisons des adolescents.
Elles sont proposées dans le cadre de la maison des adolescents ou sur les différents lieux de
présence des adolescents.
Actions en direction des familles
Elles doivent faire l’objet d’une réflexion partagée notamment pour ce qui concerne la place des
parents dans la prise en charge.
Elles peuvent être individuelles ou collectives.
Elles s’organisent en articulation avec les réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des
parents (REAAP), ainsi qu’avec les Points info famille (PIF).
Actions en direction des partenaires
Des professionnels de la MDA peuvent :
- intervenir, à la demande des professionnels, au sein des institutions, établissements et services
- recevoir les membres d’une équipe venant présenter la situation d’un adolescent qu’ils ont en
charge
- apporter un concours dans l’élaboration des contenus d’une formation destinée à des
professionnels.
Les maisons des adolescents participent à la sensibilisation des professionnels intervenant auprès
d’adolescents.
Elles ont vocation à être des lieux ressources avec notamment un centre documentaire sur la
santé des adolescents.
77
5. Acteurs
Les cinq compétences-clés sont : Santé, Action Sociale, Education, Justice, Collectivités
territoriales.
Les acteurs principaux qui participent au projet de mise en place d’une maison des adolescents
sont :
- Les professionnels de santé, de l’hôpital et de la ville,
- l’Etat : Santé, Action sociale, Education nationale, Justice (procureur, protection judiciaire de la
jeunesse), et l'Assurance Maladie,
- les collectivités territoriales,
- le secteur associatif.
6. Elaboration du projet
Il est indispensable, dès la phase d’élaboration du projet, de mettre en place un comité de
pilotage réunissant les principaux partenaires et les services concernés : ARH, URCAM,
DRASS, DDASS…
Les acteurs principaux formalisent leurs apports et leurs engagements respectifs par voie de
convention.
Ils veillent à associer l’ensemble des professionnels concernés par l’adolescence: représentants
d’institutions (culture, sport, police et gendarmerie, missions locales), du monde associatif et du
secteur privé…
Ces partenaires s’organisent en réseau afin de développer la prévention et d’éviter les ruptures de
prise en charge. Si les besoins du territoire le justifient, et sous réserve qu’il soit prévu un
adossement à une MDA, la prise en charge des adolescents peut être prévue dans le cadre d’un
réseau de santé, au sens de l’article L 6321-1 du code de la santé publique.
7. Suivi de la mise en œuvre de la maison des adolescents
Les partenaires ayant conventionné en vue de la création d’une maison des adolescents mettent
en place un comité local de suivi qui a, entre autres, la mission d’évaluer la réalisation des
objectifs fixés. Les modalités de cette évaluation doivent avoir été définies en commun dès le
début du projet.
Le comité de suivi peut, s’il le souhaite, s’adjoindre des représentants d’institutions et
d’associations concernées par l’adolescence.
Une évaluation nationale des maisons des adolescents a été réalisée : elle est jointe au présent
envoi. Afin de poursuivre l’indispensable processus évaluatif au niveau national, une liste de
critères à remplir par chaque maison des adolescents sera diffusée début 2010. Elle n’est pas
exclusive d’indicateurs complémentaires qui seraient définis au niveau local ou régional.
78
Annexe 3 : Chiffres clés de rapport d’activité 2013 de la MDA34
A- Activités vers les adolescents
Répartition par âge et sexe des jeunes reçus
- 710 jeunes ont été reçus
- 58,2 % de filles et 41,8 % de garçons
- 60 % âgés de 15 à 18 ans, 24,8 % de 19 ans ou plus, 15,2 % de 14 ans ou moins
Modes d’arrivée des adolescents
- 33 % adressés par le secteur sanitaire : hôpital, CMPP, CMP, professionnels libéraux
(médecins généralistes, pédiatres, psychiatres…)
- 18 % adressés par l’Education Nationale (CPE, infirmière scolaire, assistants de service
social des collèges, lycées…)
- 16 % par le réseau relationnel : bouche à oreille, associations (le Refuge, le Zinc…)
- 6 % adressés par les services sociaux (Conseil Général de l’Hérault, agences de la
solidarité…)
- 4 % adressés par les points d’écoute (PAEJ, PEPA, Allô-parents…)
- 3 % par les médias (site internet, journaux, radio, plaquette d’information)
- 1 % adressés par le secteur judiciaire (PJJ, juge des enfants, juge des affaires familiales,
avocats)
- 1 % adressés par les services municipaux (espace jeunesse, maison de la prévention,
services jeunesse des mairies, maison des jeunes)
B- Activités vers les parents
- 70 parents venus seuls, 433 accompagnaient leurs enfants
- Mise en place d’un groupe de parole pour parents d’ados en partenariat avec
l’association « Allô-parents »
79
Annexe 4 : Note d’information aux participants
Les besoins ressentis par les professionnels de la Maison des Adolescents de
l’Hérault (MDA34) concernant la santé des adolescents
Information aux participants
Thèse de Médecine Générale – Marine Couvreur, Philippe Trichard
Dans le cadre de mon travail de thèse de Médecine Générale, je sollicite votre participation.
Vous trouverez dans ce document les informations concernant l’objectif du travail et le recueil
des données par entretien. Merci pour votre contribution.
L’objectif de ce travail est d’identifier les besoins ressentis par les professionnels exerçant à la
MDA34 de prendre en charge les problèmes de santé, et notamment la souffrance physique, des
adolescents fréquentant la MDA34.
En accord avec la direction de la MDA34, les données sont recueillies grâce à des entretiens
individuels de tous les professionnels de la MDA34.
Je vous propose donc d’avoir une discussion qui sera orientée par les questions, selon un guide
d’entretien validé par le Département de Médecine Générale, Cela durera une demi-heure à une
heure environ. Cette discussion sera enregistrée de façon audio, puis retranscrite par écrit, de
façon anonyme. Les retranscriptions seront ensuite analysées.
Les données recueillies seront utilisées uniquement pour la thèse.
Vous pourrez si vous le souhaitez avoir accès aux retranscriptions et à la thèse, une fois
terminée.
80
Annexe 5 : Guide d’entretien
Entrée en matière et données sur l’interrogé
J’aimerai d’abord vous poser des questions d’ordre général afin de mieux vous connaitre :
- Pouvez-vous me décrire votre métier ?
- Quel rôle jouez-vous dans la MDA34 ?
La MDA34
- Comment décririez-vous les missions de la MDA ?
- Comment les jeunes connaissent ils la MDA ?
- Pour quelles raisons y viennent-ils ?
Les besoins ressentis de prendre en charge la santé physique
- Qu’est-ce que pour vous un adolescent en bonne santé ?
- Racontez-moi une situation où un jeune avait un problème de santé somatique / de santé
physique / était en souffrance physique ?
o Quelle réponse a été apportée ?
o Avez-vous été satisfait de la prise en charge ?
o Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
- Cela vous parait-il être une situation fréquente ?
Les réponses possibles à ce besoin
- Comment voyez-vous la prise en charge des problèmes de santé physiques à la MDA34 ?
(Quelle réponse peut-elle apporter la MDA
o Que pensez-vous d’orienter le jeune vers son médecin traitant ? vers un médecin
généraliste proche du cabinet ? vers un pédiatre libéral ? dans un service de
pédiatrie à l’hôpital ?
o Pensez vous qu’il doit y avoir une consultation d’un médecin à la MDA ? Si oui
quel type de médecin ?)
84
SERMENT
En présence des Maîtres de cette école, de mes chers condisciples et devant l’effigie d’Hippocrate, je promets et je jure, au nom de l’Etre suprême, d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l’exercice de la médecine.
Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent et n’exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail.
Admise dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira les secrets qui me seront confiés, et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs, ni à favoriser le crime.
Respectueuse et reconnaissante envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.
Que les hommes m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses. Que je sois couverte d’opprobre et méprisée de mes confrères si j’y manque.
Résumé
Introduction. Plusieurs études récentes montrent que, bien que se percevant généralement en
bonne santé, les adolescents font preuve de comportements de santé défavorables témoignant
d’un mal-être. Les Maisons des Adolescents sont des structures d’accueil et de soin visant à
prendre en charge de façon globale la santé des adolescents, dans ses dimensions physiques,
psychiques et sociales. La Maison des Adolescents de l’Hérault (MDA34) regroupe des
professionnels de santé issus de la pédopsychiatrie et de la psychiatrie. Notre travail avait pour
objectif d’analyser le besoin exprimé par les professionnels de la MDA34 de prendre en charge
les troubles somatiques des adolescents.
Méthode. Etude qualitative par entretiens semi-directifs de 15 professionnels de la MDA34,
toutes professions confondues (équipe socio-éducative, équipe médicale et paramédicale, équipe
de direction). Le guide d’entretien explorait les représentations et les expériences des
professionnels. L’analyse thématique des entretiens, enregistrés et intégralement transcrits, a fait
émerger les perceptions et attentes des professionnels vis-à-vis de la santé physique des
adolescents.
Résultats. Les professionnels de la MDA34 rencontrent des adolescents présentant des
questionnements au sujet de leur corps et des plaintes physiques parfois floues. Certains ont des
difficultés à consulter un médecin généraliste. La prise en charge de ces plaintes somatiques à la
MDA34 apparait pertinente pour les professionnels, notamment dans les situations où
manifestations physiques et troubles psychiques sont mêlés. Elle s’intègre dans l’approche
globale et pluridisciplinaire des Maisons des Adolescents.
Conclusion. Cette étude permet de mieux comprendre le besoin ressenti par les professionnels
face aux troubles somatiques des adolescents et d’envisager le rôle attendu du médecin
généraliste dans le dispositif MDA34.
Mots Clés : Adolescents - Maison des Adolescents - Santé physique - Etude qualitative -
Interdisciplinarité - Médecine Générale - Modèle biopsychosocial