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Sorbonne Universit ´ e Master Physique Fondamentale et Applications (U.E. 4P062) Introduction à l’´ elastostatique et à l’´ elastodynamique dans les solides Simon AYRINHAC

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Sorbonne UniversiteMaster Physique Fondamentale et Applications

(U.E. 4P062)

Introduction à l’elastostatique et àl’elastodynamique dans les solides

Simon AYRINHAC

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Table des matières

0.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1. Élasticité dans les milieux continus 71.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.1.1. Définition du milieu continu et notion de particule . . . . . . . . . . 71.1.2. Forces . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.2. Contraintes (stress) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121.2.1. Le théorème de Cauchy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121.2.2. Utilité des tenseurs : effets et causes dans un milieu anisotrope . . . . 131.2.3. Une illustration : le cas du liquide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131.2.4. Représentation des contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141.2.5. Contraintes : définitions et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171.2.6. Équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181.2.7. Contraintes particulières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24Testez vos connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

1.3. Déformations (strain) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 311.3.1. Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 311.3.2. Propriétés du tenseur des déformations linéarisées. . . . . . . . . . . 331.3.3. Dilatation θ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 351.3.4. Déformations particulières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 361.3.5. Tableau comparatif des contraintes et des déformations . . . . . . . . 43Testez vos connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

1.4. Relation contraintes-déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 471.4.1. La loi de Hooke . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 471.4.2. Le tenseur des constantes élastiques (stiffness tensor) . . . . . . . . . 491.4.3. Matériaux isotropes et anisotropes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope . . . . . . . . . . . . . . . . . . 571.5.1. Constantes de Lamé λ et µ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 571.5.2. Module d’Young E (Young modulus) et cofficient de Poisson ν (Pois-

son’s ratio) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

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Table des matières

1.5.3. Module d’incompressibilité K (ou B) (bulk modulus), et coefficient decompressibilité χ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

1.5.4. Module de rigidité G (shear modulus) . . . . . . . . . . . . . . . . . 621.5.5. Bilan : couples de constantes caractérisant un solide isotrope . . . . . 631.5.6. Relation structure-propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65Testez vos connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

2. Propagation des ondes dans les solides 692.1. Modélisation d’une onde progressive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

2.1.1. Champ de déplacement et opérateurs vectoriels . . . . . . . . . . . . 752.2. Ondes planes dans un cristal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

2.2.1. Détermination de la relation de dispersion . . . . . . . . . . . . . . . 89Testez vos connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu . . . . . . . . . . . . . . . . . 932.3.1. Équation de propagation pour un milieu continu . . . . . . . . . . . . 932.3.2. Équation de Christoffel et détermination des vitesses . . . . . . . . . 942.3.3. Résolution de l’équation de propagation dans le cas du solide isotrope 101Testez vos connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs . . . . . . . . 1072.4.1. Phénoménologie de l’atténuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1072.4.2. Mesure de l’atténuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1102.4.3. Détermination de l’atténuation pour un solide isotrope viscoélastique 1132.4.4. Origines de l’atténuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1162.4.5. Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

A. Annexes mathématiques 123A.1. Algèbre tensorielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123A.2. Algèbe matricielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

A.2.1. Diagonalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126A.3. Analyse vectorielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

Solutions des QCM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

0.1. Introduction

Ce document est basé sur le cours donné à Sorbonne Université (campus Université Pierre etMarie Curie), option "Acoustique des Matériaux" (code 4P062, anciennement MP056), pour le

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0.1. Introduction

Master physique fondamentale et applications 1. Il équivaut à environ 15h de cours magistral.Le livre de référence est Ondes élastiques dans les solides de D. Royer et E. Dieulesaint(Masson, 1996) 2. Les encadrés donnent des approfondissements, des applications notables oudes résultats récents.

Merci à Philippe Bourges pour ces éclaircissements concernant la diffusion de neutrons.(Il s’agit d’un document en construction, le lecteur devra donc être attentif aux étourderies

ou fautes éventuelles)

1. Site web : http://www.upmc.fr/fr/formations/diplomes/sciences_et_technologies2/masters2/master_physique_et_applications_m1.html

2. Daniel Royer et Eugène Dieulesaint, Ondes élastiques dans les solides, Tome 1 : Propagation libre etguidée, éd. Masson (1996).

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1. Élasticité dans les milieux continus

1.1. Introduction

1.1.1. Définition du milieu continu et notion de particule

La matière est constituée d’atomes, elle ne remplit pas tout l’espace. Si cela est vrai à petiteéchelle (échelle atomique), c’est faux à l’échelle macroscopique où un solide sera considérécomme plein et pourra remplir l’espace. La distribution de matière varie suivant l’échelleconsidérée. Autrement dit, la densité varie suivant le volume de matière considéré (la figure 1.1en propose une illustration).

Figure 1.1. – Densité de particules réparties aléatoirement dans une boîte 2D en fonction dela taille de la boîte considérée. Pour une boîte de petite taille, il n’y a aucuneparticule donc la densité est nulle. Pour des grandes tailles de boîtes, la densitémoyenne est atteinte donc la valeur ne dépend plus de la taille. Entre les deux onobserve des fluctuations de la densité.

Dans le cadre de la mécanique des milieux continus, on attribue à chaque point de l’espaceune grandeur physique moyennée sur l’ensemble des atomes ou molécules qui occupent lo-calement cet espace. En mécanique des milieux continus, une particule n’est pas une entitéphysique réelle, mais une région suffisamment petite pour coïncider avec un point donné del’espace à tout instant. Même si une particule se déplace par rapport à sa position d’équilibre,

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1. Élasticité dans les milieux continus

il n’y a pas de « vide » autour d’elle. L’échelle de taille de la particule est l’échelle mésosco-pique.

Domaine de validitéCette approche par milieu continu est valable jusqu’à l’échelle nanométrique. Des assem-blages sphériques formés de 20 atomes possèdent les mêmes modes de vibration que dessphères "pleines" ; il faut seulement 20 atomes pour retrouver le mode de vibration fonda-mental à l’identique et 100 atomes pour le premier harmonique ! 1.

Continuité en mathématiquesOn peut s’étonner qu’en décalant les points de l’espace par rapport à leur position d’ori-gine, on ne créée pas de "trous". Dit autrement, on peut relier entre eux tous les pointsde deux segments de différentes longueurs. Il s’agit en fait d’une bijection entre l’espaceréel de départ et l’application qui correspond à la déformation. C’est ce qu’on appelle enmathématiques l’hypothèse du continu, qui affirme que les ensembles de points comprisentre deux points arbitraires restent équipotents.

1.1.2. Forces

Il existe deux types de forces :

— Les forces à distance, ou forces de volume : elles agissent à distance, voire à très grandedistance pour certaines. Pour les solides indéformables, elles s’appliquent au centre demasse (appelé aussi centre d’inertie) qui est le barycentre des points du solide affectésde leur masse.Exemples : la force gravitationnelle, la force électrostatique.

Remarque : la mécanique newtonienne a imposé l’idée de forces qui agissent à dis-tance, et instantanément. Ces idées, choquantes pour le sens commun, sont main-tenant dépassées. La physique moderne nous enseigne que les forces agissent parl’intermédiaire d’un champ (champ de gravitationnel, champ électromagnétique,champ électrofaible, etc) qui est un objet physique concret comme l’eau ou l’air,

1. Nicolas Combe et Lucien Saviot, Acoustic modes in metallic nanoparticles : atomistic versus elasticitymodeling, Physical Review B, 80(3), 035411 (2009), DOI : doi.org/10.1103/PhysRevB.80.035411.

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1.1. Introduction

par exemples 2. Elles agissent aussi avec un certain retard (la force n’agit pas instan-tanément) qui dépend d’une vitesse limite (égale à c).

— Les forces de contact, ou forces de surface : elles agissent à très courte portée. Lesforces internes à un solide proviennent des forces de rappel à l’échelle atomique.Exemples : les forces de pression, les contraintes. Une contrainte peut être définie, demanière simple, comme une force F appliquée sur une surface d’aire S σ “ F

S . Lacontrainte possède donc la même dimension que la pression P, soit rPs “ M.L´1.T´1,et son unité est le pascal

rσs “ rPs “ M.L´1.T´1pkg.m´1.s´1, Paq.

Sur l’énergie potentielleLa force est reliée à l’énergie potentielle par la formule ~F “ ´

´ÑgradEp soit Fx “

´dEppxqdx à une dimension.Sur le développement limité

N’importe quelle fonction f pxq peut être décrite par un polynôme au voisinage d’un pointx0 : c’est ce qu’on appelle un développement limité. La formule au deuxième ordre donne :

f pxq » f px0q ` px´ x0q

ˆ

B fBx

˙

x0

`12px´ x0q

2

ˆ

B2 fBx2

˙

x0

` ... (1.1)

Si la fonction décrit un minimum, comme la fonction énergie potentielle décrivant unminimum, la dérivée première en x0 s’annule, et on a

Epprq “ U0 ` kpr ´ r0q2

avec k “ 12

´

B2Ep

Br2

¯

r0

soit

Uprq9r2.

2. Ce point de vue est défendu par Friedrich Herrmann et Georg Job dans leur ouvrage Le poids del’Histoire sur la physique, Quelques propositions pour un enseignement plus efficace, voir section 5.3 Ac-tions à distance disponible en ligne http://www.physikdidaktik.uni-karlsruhe.de/publication/pub_fremdsprachen/franzoesisch.html. À ce propos, voir aussi Guy Bouyrie, L’arpenteur du web : champscalaire, champ vectoriel en géophysique, Bull. Un. Prof. Phys. Chim., vol. 108, n° 965, p. 981-1007, juin 2014.

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.2. – Énergie potentielle pour un système de 2 atomes (ou molécules) en inter-ation, en fonction de la distance r. Cette énergie potentielle est la somme de2 contributions : une contribution répulsive (due au non-recouvrement des orbi-tales lié au principe d’exclusion de Pauli) et d’une contribution attractive (due àl’attraction électrostatique). U0 est l’énergie de liaison par atome. Proche de laposition d’équilibre stable (à une distance r “ r0), l’énergie potentielle forme un"puits" : ce puits de potentiel est considéré comme harmonique (U9r2), la forceassociée est une force de rappel ou force élastique. On peut donc modéliser lesatomes liés par des "petits ressorts". L’élasticité macroscopique des matériauxprovient de cette force de rappel microscopique entre atomes.

Sur la notion d’équilibreAu point r0, il y a équilibre car BEp

Br “ 0 et c’est un équilibre stable car B2Ep

Br2 ą 0. Cela signi-fie que, suite à une toute petite perturbation, le système revient en sa position d’équilibrer “ r0.

Sur la notion d’harmonicitéNon loin de son point d’équilibre, le comportement du système est harmonique. Par contre,lorsque la température augmente, et que l’énergie cinétique entraîne la particule loin deson point d’équilibre, son comportement est anharmonique. Cela se traduit par exempleen mécanique du solide par l’existence du phénomène de dilatation. En effet, dans le casanharmonique, la position moyenne de la particule ne correspond plus avec sa positiond’équilibre 3.

Sur l’énergie interne La fonction potentiel présentée ci-dessus (Fig. 1.1.2) est la fonc-tion énergie potentielle entre deux atomes isolés. Mais dans certains cas (les métaux par

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1.1. Introduction

exemple), il est possible de la considérer comme analogue à l’énergie totale du cristal (onpasse de l’un à l’autre avec les facteurs d’échelle "qui vont bien").

3. Voir Charles Kittel, Physique de l’état solide, 7e édition, éd. Dunod (2005), p. 120.

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1. Élasticité dans les milieux continus

1.2. Contraintes (stress)

Dans un milieu matériel, un état de contraintes est décrit mathématiquement par un tenseur.La question que l’on se pose au début de ce chapitre est la suivante :

Pourquoi est-il nécessaire d’utiliser l’algèbre tensorielle pourdécrire un état de contraintes ?

1.2.1. Le théorème de Cauchy

Un état de contrainte, à l’intérieur d’un solide, est unique en un point M quelconque. Laforce surfacique (qui est une entité vectorielle), dépend de l’orientation de la surface sur la-quelle elle s’appuie. Or, en un point M à l’intérieur d’un solide, il existe une infinité de facettes(qui sont des coupes imaginaires d’un solide), car il existe une infinité de manières d’orienterune facette. L’orientation d’une facette est repérée par son vecteur normal ~n.

Le lien entre la force surfacique, c’est-à-dire le vecteur contrainte ~σ, et le vecteur normal àla surface ~n est le tenseur des contraintes ¯σ tel que (théorème de Cauchy, attribué à A. Cauchy1823) :

~σ pM, ~nq “ ¯σ~n. (1.2)

Donc à l’orientation d’une facette notée ~n correspond le vecteur ~σ par une application linéairesous forme de tenseur, qui est ici le tenseur ¯σ représenté par une matrice 3ˆ 3

¯σ “

¨

˝

σ11 σ12 σ13

σ21 σ22 σ23

σ31 σ32 σ33

˛

‚. (1.3)

Un tenseur est représenté par 9 nombres (composantes) dans un système d’axes.Attention : un tenseur n’est pas une matrice, il faut aussi lui adjoindre une base vectorielle.

Comment utiliser la formule 1.2 ?

La force s’exerce sur une facette repérée par le vecteur normal ~n tel que

~n “ n1Ñe1 ` n2

Ñe2 ` n3Ñe3 .

Ce vecteur ne sert qu’à définir l’orientation de la facette, il est unitaire : sa norme est égale à1, soit

~n “ 1,b

n21 ` n2

2 ` n23 “ 1.

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1.2. Contraintes (stress)

On effectue le produit matriciel de ¯σ (voir Eq. 1.3) par ~n et on trouve les trois équationssuivantes :

σ1 “ σ11n1 ` σ12n2 ` σ13n3,

σ2 “ σ21n1 ` σ22n2 ` σ23n3,

σ3 “ σ31n1 ` σ32n2 ` σ33n3,

qui sont les 3 composantes de ~σ dans la base choisie telles que ~σ “ σ1Ñe1 ` σ2

Ñe2 ` σ3Ñe3 .

Par exemple, si ~n “ Ñe1 alors n1 “ 1, n2 “ 0, n3 “ 0, donc ~σ “ σ11Ñe1 ` σ21

Ñe2 ` σ31Ñe3 .

1.2.2. Utilité des tenseurs : effets et causes dans un milieuanisotrope

L’objet mathématique tenseur est utile pour décrire la relation entre effets et causes dans unmilieu anisotrope 4.

Une cause appliquée suivant une direction quelconque peut donner naissance à un effetorienté suivant une autre direction. L’application linéaire qui fait correspondre un vecteur ~a àun autre vecteur ~b est tout simplement un tenseur, ici noté ¯A :

a1 “ A11b1 ` A12b2 ` A13b3,

a2 “ A21b1 ` A22b2 ` A23b3,

a3 “ A31b1 ` A32b2 ` A33b3.

On écrira (en se restreignant au domaine linéaire) :

~a “ ¯A~b.

1.2.3. Une illustration : le cas du liquide

Supposons que l’état de contraintes soit le même en tout point M d’un liquide à l’équilibre,et que celui-ci n’est pas modifié par l’introduction d’un objet (voir Fig. 1.16). Cet objet sert àintroduire une surface plane dans le liquide, et cette surface passe par M.

Nous savons que, en statique des fluides, "la force exercée par un fluide au repos sur toutesurface rigide est toujours perpendiculaire à cette surface" 5.

Cela signifie qu’en M la force de pression est toujours normale à cette surface (ou colinéaireà ~n), quelque soit l’orientation de l’objet. Donc la force de pression dépend de l’orientation de

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.3. – Dans un liquide, la force s’exerce toujours normalement à une surface. Une des-cription mathématique rigoureuse des forces de pression doit tenir compte del’état de contraintes dans le liquide, exprimé sous forme tensorielle.

~n, or ce vecteur orientation possède virtuellement une infinité de directions possibles, il n’estdonc pas possible de décrire l’état de contraintes par un simple champ vectoriel.

L’objet mathématique le plus adapté pour décrire un état de contrainte est donc un tenseur,qui permet (en tout point) de faire un correspondre au vecteur ~n un vecteur contrainte ~σ.

À retenir :La pression dans un fluide est un état de contrainte particulier,qui se décrit à l’aide d’un tenseur.

1.2.4. Représentation des contraintes

De la même façon qu’une force est représentée par une flèche (un vecteur), un état decontrainte peut être représenté 6.

Voici trois représentations possibles (voir figure 1.2.4) :

— Ellipsoïde : l’ellipsoïde est décrit par l’extrémité du vecteur contrainte ~σ lorsque ~nbalaie tout l’espace. Les demi-axes de l’ellipsoïde (notés a, b et c) correspondent auxcontraintes principales σ1, σ2 et σ3. Dans le cas d’une pression hydrostatique (voirpage 26) σ1 “ σ2 “ σ3, et l’ellipsoïde est une sphère avec a “ b “ c.

4. Voir D. Royer, op.cit., p. 87.5. Voir Eugène Hecht, Physique : Tome 1, Mécanique, éd. De Boeck (2007).6. Voir la page internet du Comparative Visualization Group : https://www.zib.de/hotz/projects/

projects.html

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1.2. Contraintes (stress)

Attention, l’ellipsoïde est un cas particulier. Dans le cas général, un tenseur d’ordre 2 estreprésenté par une quadrique. Lorsque les 3 coefficients sont positifs, c’est un ellipsoïde.Lorsque deux coefficients sont de signe opposé au troisième, c’est un hyperboloïde com-posé d’un hyperboloïde à une nappe et un à deux nappes 7.

— Cercles de Mohr ou tricercle de Mohr. Dans cette représentation 2D, le tenseur descontraintes est représenté par 3 cercles imbriqués. L’intérêt de cette représentation estde pouvoir déterminer graphiquement la cission maximale (c’est-à-dire la contraintetangentielle maximale, notée τmax dans la figure 1.2.4), qui est le paramètre clef dans larupture d’un matériau.

— Cube des contraintes : la contrainte en un point M peut être visualisée par un objetimaginaire appelé élément de contrainte. Cet élément est un volume infinitésimal centrésur le point M. L’élément est défini par 3 surfaces perpendiculaires, qui sont perpendicu-laires aux 3 axes du repère. Ensuite, pour chaque face, on exprime le vecteur contraintesuivant 3 composantes perpendiculaires : une composante normale et 2 tangentielles.Ces 3 composantes sont repérées par des vecteurs σi j.Remarque : en coordonnées cartésiennes, l’élément de contrainte est un cube ; c’estun fragment de cylindre en coordonnées cylindriques ; c’est un fragment de sphère encoordonnées sphériques.

7. Pour plus de détails, voir : Cécile Malgrange, Christian Ricolleau et Françoise Lefaucheux, Symétrie etpropriétés physiques des cristaux, EDP Sciences, (2011), p. 197.

8. Pour la distinction entre "champ physique" et "champ mathématique", voir F. Herrmann, op. cit., section3.8, le champ vu comme une région de l’espace munie de propriétés.

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.4. – Le tenseur des contraintes (et, de manière plus générale, tout tenseur d’ordre 2)peut être représenté de plusieurs manières différentes. σ1, σ2 et σ3 sont lescontraintes principales.

Figure 1.5. – De la même manière qu’il existe des champs scalaires et vectoriels, il existe deschamps tensoriels. Rappelons que le mot "champ" désigne ici "un concept ma-thématique qui décrit la distribution des valeurs d’une grandeur physique dansl’espace" 8.

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1.2. Contraintes (stress)

1.2.5. Contraintes : définitions et notations

En résumé, le mot « contrainte » recouvre plusieurs types de notions :— le tenseur des contraintes ¯σ (tenseur d’ordre 2, symétrique, à valeurs réelles).— le vecteur contrainte ~σ (voir relation 1.2 page 12).— la contrainte normale, notée σn telle que σn “ ~σ ¨ ~n (voir figure 1.6).— la contrainte tangentielle, de cisaillement, ou cission, notée σt, telle que σt “ ~σ ¨~t. On

a donc~σ “ σn~n` σt~t

etσ “

b

σ2n ` σ2

t .

Figure 1.6. – Vecteur contrainte ~σ au point M.

Concernant le tenseur des contraintes ¯σ, il existe plusieurs notations :

1. la notation de Lamé :

σ “

¨

˝

N1 T3 T2

T3 N2 T1

T2 T1 N3

˛

où la lettre N signifie "normale" et la lettre T signifie "tangentielle",2. la notation "ingénieur" :

σ “

¨

˝

σ1 τ12 τ13

τ12 σ2 τ23

τ13 τ23 σ3

˛

‚.

3. il existe aussi une notation appelée "notation de Voigt", où la matrice de 3ˆ 3 est trans-formée en un vecteur de 6ˆ 1 ; nous la verrons plus loin (voir équation 1.12 page 49).

17

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1. Élasticité dans les milieux continus

1.2.6. Équilibre

Rappelons qu’en mécanique du solide, un solide rigide indéformable est à l’équilibre sideux conditions sont respectées :

— L’équilibre translationnel : la résultante des forces est nulle, tout le solide est au repos.Pour un ensemble de forces extérieures, on a :

ÿ

i

´ÑFi,ext “ ~0.

— L’équilibre rotationnel : la résultante des moments des forces est nulle, le solide netourne pas. Pour un ensemble de moments de forces calculé au point O, on a :

ÿ

i

ÑMO

´

´ÑFi,ext

¯

“ ~0,

avecÑ

MO

´

´ÑFi,ext

¯

“´ÑOMi ^

´ÑFi,ext. Ce terme n’existe pas en « mécanique du point », car

un point ne peut pas tourner ! Voir Fig. 1.7.

Figure 1.7. – Les différents domaines de la mécanique et leurs apports respectifs.

18

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1.2. Contraintes (stress)

En mécanique des milieux continus, ces deux types d’équilibre ont une conséquence surl’expression du tenseur des contraintes ¯σ :

— L’équilibre translationnel implique, en l’absence de forces à distance (forces de volume)

Bσik

Bxk“ 0 . (1.4)

Cette formule cache en fait les 3 relations suivantes :$

&

%

Bσ11Bx1`Bσ12Bx2`Bσ13Bx3

“ 0,Bσ21Bx1`Bσ22Bx2`Bσ23Bx3

“ 0,Bσ31Bx1`Bσ32Bx2`Bσ33Bx3

“ 0,

qui s’écrivent de manière plus compacte avec l’opérateur divergence :

Ñdiv ¯σ “ ~0.

En coordonnées cartésiennes, on retrouve la formule 1.4 ; en coordonnées cylindriquesou sphériques, l’écritue de la divergence en fonction des dérivées partielles est pluscompliquée.

— L’équilibre rotationnel implique, en l’absence de couple externe au solide,

σi j “ σ ji , (1.5)

c’est-à-dire que le tenseur ¯σ est symétrique. Cette relation est aussi appelée réciprocitédes contraintes tangentielles 9.

— Il faut rajouter une troisième relation 10

σi jn j “ σexti , (1.6)

Cette équation porte aussi le nom de condition limite en contrainte. Dans le cas d’unesurface libre, le vecteur contrainte

´Ñσext est nul.

9. Voir C.Potel et M. Bruneau, Acoustique générale, Ellipses, 2006, page 276.10. Voir Nicolas MOËS, Mécanique des milieux continus, École Centrale de Nantes, page 72.

19

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1. Élasticité dans les milieux continus

Sur les lois de conservationLa formule sur l’équilibre translationnel est aussi appelée "principe fondamental de ladynamique appliqué aux translations", ou encore "loi de conservation de la quantité demouvement". En effet, c’est bien la quantité de mouvement ~p “ m~v (rappelons que cetteformule n’est valable que pour des vitesses v ! c) qui est la quantité fondamentale, plutôtque la force. Ce n’est donc pas une simple quantité dérivée construite en multipliant lamasse par la vitesse.

Pour un système isolé ou pseudo-isolé, la quantité de mouvement se conserve : lors-qu’une grenade "au repos" explose, la quantité de mouvement totale de tous les morceauxplus la fumée est nulle. La quantité de mouvement ne peut être ni créée, ni détruite, dela même manière que l’énergie : cet énoncé remplace les 3 lois de Newton ! Une interac-tion mécanique se traduit par un échange de quantité de mouvement entre les systèmes eninteraction 11.

Montrons que l’équilibre translationnel implique l’équation 1.4 12

Considérons un volume V enclot par la surface fermée d’aire S .L’équilibre des forces volumiques et surfaciques implique :

y

V

~f dV `

S

~TdS “ ~0.

Remarque 1 : cette équation provient d’une équation plus générale de « conservation »,qui traduit le fait que la variation d’une quantité est égale à un terme de production interneplus un terme d’échange avec l’extérieur 13.

Remarque 2 : au passage d’une onde l’équilibre translationnel n’est plus vérifié locale-ment, et le membre de droite est non nul (élastodynamique, voir section 2.3.1 page 93).

Appliquons le théorème de Cauchy (éq (1.2) page 12) pour trouvery

V

~f dV `

S

¯σ~ndS “ ~0.

Appliquons le théorème de la divergence (aussi appelé théorème de Green-Ostrogradsky) :

S

¯σ~ndS “y

V

Ñdiv ¯σdV,

11. Voir F. Herrmann, op. cit., sections 5.4 à 5.9.

20

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1.2. Contraintes (stress)

d’où y

V

~f dV `y

V

Ñdiv ¯σdV “ 0.

Ce qui donne en écriture indicielle les équations attendues dans un repère cartésien 14 :

Bσik

Bxk` fi “ 0.

Un exemple de champ extérieur est le champ de pesanteur fi “ ρgi avec ~g “ p0, 0,´gqdans un repère cartésien conventionnel pOxyzq.

En l’absence de champ extérieur ~f “ ~0, on retrouve l’équation 1.4 BσikBxk“ 0..

Remarque : à une surface libre (free surface) les contraintes sont nulles

σiknk “ 0.

Montrons que l’équilibre rotationnel implique l’équation 1.5 13

Le moment ~M des forces surfaciques est :

Mk “ p~r ^ ~σqk “ εi jkxiσ j.

Appliquons le théorème de Cauchy (éq (1.2) page 12)

S

εi jkxiσ jdS “

S

εi jkxiσ jmnmdS .

Appliquons le théorème de Green sur le second membre

S

εi jkxiσ jmnmdS “y

V

B

Bxmpεi jkxiσ jmq dV

puis dérivons en utilisant l’identité de Leibnizy

V

B

Bxmpεi jkxiσ jmq dV “

y

V

ˆ

εi jkxiBσ jm

Bxm` εi jk

Bxi

Bxmσ jm

˙

dV

12. Voir Daniel Royer, op. cit, p.109.11. Voir François Sidoroff, Mécanique des milieux continus, p. 2. Adresse web : cel.archives-ouvertes.fr/cel-00530377/document.

12. Dans les repères cylindrique ou sphérique, la divergence prend une autre forme, plus compliquée.

21

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1. Élasticité dans les milieux continus

avec εi jkBxiBxmσ jm “ εi jkδimσ jm “ εi jkσ ji.

Dans un volume élémentaire, σ est uniforme donc Bσ jm

BxmÑ 0

εi jkσ ji “ 0,

soit finalementσ ji “ σi j.

Cette relation n’est plus valable si le solide est soumis à un couple extérieur, par contreelle est valable au passage d’une onde dans lequel les rotations locales n’interviennent pas(le moment d’inertie étant nul dans un volume infinitésimal). Cette relation se comprendaisément si l’on considère un élément de volume soumis à des contraintes de cisaillement :il faut que σ ji “ σi j pour éviter une rotation d’ensemble (voir Fig. 1.2.6). Donc σ est untenseur d’ordre 2, symétrique, et ne comporte que 6 composantes indépendantes.

Figure 1.8. – Dans la figure de gauche, l’élément du solide, entraîné par deux contraintesσxy et σyx telles que σxy “ σyx, ne tournera pas. À l’inverse dans la figure dedroite, les contraintes telles que σxy , σyx le font inévitablement tourner.

Lois de NewtonLes lois de Newton peuvent être reformulées dans le contexte de la mécanique des milieuxcontinus.

Première loi) : principe d’inertie. Tout solide isolé est soit au repos, soit en translationrectiligne uniforme dans un référentiel galiléen.

13. Voir Daniel Royer, op. cit, pp.110-111.

22

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1.2. Contraintes (stress)

Bσi j

Bx j“ 0,

Deuxième loi) : l’accélération est proportionnelle à la résultante des forces. Seule uneforce peut faire sortir un solide de son état d’équilibre.

#

ργi “Bσi j

Bx j` fi

σi j “ σ ji(1.7)

Troisième loi) : principe des actions réciproques (improprement appelée principed’action-réaction) 14. L’existence d’une force indique une interaction, la force est uneaffaire de paires. Elle suppose une interaction instantanée et simultanée entre deux corps.Autrement dit, lorsqu’on dessine un « vecteur force », c’est un côté d’une interactionunique.

Forme locale de la loi des actions réciproques

~σp´~nq “ ´~σp~nq

"De part et d’autre d’un élément de surface dS , les particules de la région 1 agissant sur larégion 2 développent des actions opposées aux particules de la région 2 agissant sur 1." 15

Figure 1.9. – Cube des contraintes dessiné dans le plan pOx1x2q. Illustration de la formelocale de la troisième loi de Newton. La face supérieure du cube est orientéesuivant la direction Ñe2 , c’est pourquoi la contrainte qui s’exerce sur cette faceest notée ~σ pÑe2q.

23

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.10. – Trois exemples concrets de la loi des actions réciproques (troisième loi deNewton).

1.2.7. Contraintes particulières

Par convention, en traction, les coefficients sont positifs, en compression les coefficientssont négatifs.

Contrainte uniaxiale

Contrainte uniaxiale suivant l’axe pOx3q

σ “

¨

˝

0 0 00 0 00 0 k

˛

15. Voir Sue Stocklmayer et al, The Physics Teacher, 50, 406-409 (2012).15. Voir Jean Coirier, Mécanique des milieux continus, 3e éd., Dunod, 2007, pp.189-190.

24

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1.2. Contraintes (stress)

avec k “ σ33. C’est typiquement le cas d’un essai de traction sur une éprouvette 16, ou uncâble. Si k ą 0, c’est une traction simple ; si k ă 0, c’est une compression simple.

Figure 1.11. – Traction simple (uniaxiale) dans la direction Ox1.

Figure 1.12. – Compression simple (uniaxiale).

16. Ce terme désigne un échantillon en mécanique sous la forme d’un cylindre solide

25

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1. Élasticité dans les milieux continus

Contraintes planes

Contraintes subie par une plaque, par exemple.

σ “

¨

˝

σ11 σ12 0σ12 σ22 00 0 0

˛

‚“

¨

˝

σI 0 00 σII 00 0 0

˛

Les valeurs σI et σII sont les contraintes principales.

Contrainte biaxiale

C’est un cas particulier d’une contrainte plane :

σ “

¨

˝

σ11 0 00 σ22 00 0 0

˛

‚.

Contrainte isotrope (ou hydrostatique)

C’est l’état de contraintes qui existe dans les fluides à l’équilibre, sans considérer les effetsde l’altitude 17

σ “

¨

˝

´p 0 00 ´p 00 0 ´p

˛

‚“ ´pδi j

La contrainte hydrostatique est un cas particulier de contrainte triaxiale.

17. Un fluide à l’équilibre ne doit pas être confondu avec un fluide au repos : la forme du tenseur est la même,mais les variations spatiales du champ de contraintes sont différentes. En effet, dans un fluide quelconque aurepos, la pression augmente linéairement avec la profondeur. Dans un fluide parfait en mouvement, la pressionvarie de manière complexe en fonction des forces appliquées au fluide. Source : guilhem.mollon.free.fr/Telechargements/MMC10.pdf.

26

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1.2. Contraintes (stress)

Figure 1.13. – Contrainte isotrope ou hydrostatique.

Montrons qu’une « force de pression » est toujours normale à une surface.Utilisons la relation 1.2

~σ “ ¯σ~n,

soit en notation indicielle

σi “ σi jn j “ ´Pδi jn j “ ´Pni,

soit finalement~σ “ ´P~n.

Le vecteur contrainte est donc toujours orienté dans le sens opposé au vecteur surface, etcolinéaire à celui-ci. On retrouve le principe de la statique des fluides donné en 1.2.3.

La pression moyenne 18est définie comme l’inverse de la moyenne des 3 termes diago-naux

Pmoy “ ´13pσ11 ` σ22 ` σ33q .

Cette pression dépend de la trace du tenseur qui est un invariant par rotation des axes, maispas du tout des contraintes de cisaillement qui peuvent exister par ailleurs. Les contraintesde cisaillement sont données par le tenseur déviatorique τ (voir Annexe A.1, p. 125).

La pression hydrostatique est caractérisée par σ11 “ σ22 “ σ33 avec τi j “ 0.Cette définition de la pression (qui implique forces et aire) est en fait la même que la

définition thermodynamique (qui implique énergies dans un volume)

P “ ´ˆ

BUBV

˙

S“ ´

ˆ

BFBV

˙

T

27

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1. Élasticité dans les milieux continus

où U est l’énergie interne, et F est l’énergie libre de Helmholtz F “ U ´ TS (voir coursde thermodynamique).

Le terme contrainte quasi-hydrostatique se réfère à une situation où τ est homogène,avec la présence de gradients de σ dans l’échantillon, ou à la présence de contraintesmicroscopiques par exemple aux joints de grains en plus d’une pression moyenne spatia-lement et orientationnellement prédominante.

Pressions négatives : il est tout à fait possible de mesurer des pressions négatives !Il existe des exemples dans la nature, comme par exemple la montée de la sève dans lesarbres, phénomène qui provient de l’existence d’une pression négative. En laboratoire,grâce à un dispostif expérimental particulier (en piégeant du liquide dans des petites cavi-tés), l’eau a été soumise à des pressions de -26 MPa ! 19.

Cisaillement pur (ou simple)

Le cisaillement est une contrainte appliquée parallèlement à une face. On note τ une contrainteen cisaillement pur et on a

σ “

¨

˝

0 τ 0τ 0 00 0 0

˛

‚. (1.8)

Il est toujours possible de trouver une base dans laquelle la matrice est diagonale (voirencadré ci-dessous), et les contraintes deviennent normales aux faces

σ “

¨

˝

´τ 0 00 τ 00 0 0

˛

‚.

Diagonalisation : cas simple.Calculons les valeurs propres (eigenvalues en anglais) et les vecteurs propres (eigenvec-tors) associés à la contrainte 1.8, en écrivant

detˇ

ˇ

ˇ

¯σ´ λ ¯Iˇ

ˇ

ˇ“ 0,

18. D’après Karl Syassen, Ruby under pressure, High Pressure Research, 28 75-126 (2008). DOI : https://doi.org/10.1080/08957950802235640.

19. Frédéric Caupin et coll., Exploring water and other liquids at negative pressure, Journal of Physics :Condensed Matter, 24-28 284110 (2012). https://doi.org/10.1088/0953-8984/24/28/284110.

28

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1.2. Contraintes (stress)

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

¨

˝

´λ τ 0τ ´λ 00 0 ´λ

˛

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

“ 0.

On obtient l’équation caractéristique (un polynôme en λ)

´λ`

λ2´ τ2

˘

“ 0,

et les valeurs propres sont λ “ t´τ, τ, 0u. Les vecteurs propres sont p´1, 1, 0q, p1, 1, 0q etp0, 0, 1q 20. Autrement dit la base propre est tournée de 45o par rapport à la base choisie.

Ce résultat, qui peut paraître étonnant, illustre le fait qu’un cisaillement est aussi définipar la combinaison de deux contraintes normales.

Autres sollicitations simples

Torsion

suivant l’axe 3 :

σ “

¨

˝

0 0 ´kx2

0 0 kx1

´kx2 kx1 0

˛

‚.

Flexion simple

suivant l’axe 3 :

σ “

¨

˝

0 0 00 0 00 0 kx1

˛

‚.

20. Un calculateur en ligne tel que wolframalpha.com permet de déterminer les vecteurs propres, parexemple en écrivant la commande eigenvectorstt0, tau, 0u, ttau, 0, 0u, t0, 0, 0uu.

29

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1. Élasticité dans les milieux continus

Contraintes en coordonnées sphériques

Dans le repère en coordonnées sphériques pÑer ,Ñeθ , Ñeφq

σ “

¨

˝

σrr σrθ σrφ

σθr σθθ σθφ

σφr σφθ σφφ

˛

‚.

Testez vos connaissances

Solutions du QCM page 126.

1. Quelle est l’unité de la contrainte ?a) N b) Pa c) N.m d) N/m e) N.m2

2. Une contrainte est généralement définie para) la force appliquée seulementb) le rapport : force appliquée/surfacec) le produit : force appliquée ˆ surface

3. La condition d’équilibre translationnel d’un solide, sans champ de force extérieur,implique pour le tenseur des contraintes σ :a) σik “ 0 b) σik

xk“ 0 c) σik “ σki

4. De manière générale, combien de composantes possède un tenseur d’ordre 3 ?a) 3 b) 9 c) 18 d) 27

5. Que vaut le produit δi jδi j, où δ est le symbole de Kronecker ?a) 0 b) 1 c) 2 d) 3 e) 6

6. Une contrainte de cisaillement peut être représentée par la matrice (k est uneconstante réelle positive)

a) σ “

¨

˝

0 k 0k 0 00 0 0

˛

‚ b) σ “

¨

˝

k 0 00 0 00 0 0

˛

‚ c) σ “

¨

˝

k 0 00 k 00 0 k

˛

7. Une contrainte hydrostatique peut être représentée par la matrice (k est une constanteréelle positive)

a) σ “

¨

˝

0 k 0k 0 00 0 0

˛

‚ b) σ “

¨

˝

k 0 00 0 00 0 0

˛

‚ c) σ “

¨

˝

k 0 00 k 00 0 k

˛

30

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1.3. Déformations (strain)

1.3. Déformations (strain)

1.3.1. Définitions

Il faut bien différencier : le déplacement u, la déformation ε et la dilatation θ.

— Le déplacement est le mouvement total d’un point par rapport à sa position d’équilibre.On s’intéresse au mouvement d’un point, donc le déplacement est représenté par unvecteur.

— La déformation est le mouvement relatif d’un point par rapport à un autre point. Ladéformation met en jeu des différences, donc nécessite un volume élémentaire (méso-scopique) pour être appliqué : le tenseur est donc l’outil mathématique adapté.

— La dilatation est la variation relative de volume. C’est un nombre (exprimé en %), doncil met en jeu l’opérateur vectoriel divergence.

Exemple : allongement longitudinal d’un fil extensible (cas unidimensionnel)

Cet exemple simple va nous permettre de mieux comprendre ce qu’on entend par déforma-tion 21.

On considère une portion de fil entre le point A (cote x) et le point B (cote x ` dx) (voirfigure 1.14 page 32),

— Avant déformation, sa longueur est ` “ dx.

— Après déformation, la longueur est `1 (dans la figure le fil s’est allongé) : le point A sedéplace en x` upxq et le point B en x` dx` upx` dxq. Sa nouvelle longueur est donc`1 “ rx` dx` upx` dxqs ´ rx` upxqs “ dx` upx` dxq ´ upxq.

La déformation est la variation relative de longueur :

εpxq “∆`

`“`1 ´ `

`“rdx` upx` dxq ´ upxqs ` rdxs

dx“

upx` dxq ´ upxqdx

et finalement

εpxq “dupxq

dx.

Ce résultat signifie que la déformation εpxq, calculée à l’abscisse x, est la dérivéedu déplacement u, où u est considéré comme une fonction continue de x. À noter :la déformation ε est sans unité, elle peut être exprimée en pourcentage, et elle esttrès faible dans les matériaux réels (de l’ordre de 10´5).

21. Voir D. Royer, page 104

31

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.14. – Allongement du fil soumis à une force de traction.

Calcul de l’allongement total ∆LL’allongement ∆L est le déplacement à l’extrémité libre du fil, tel que

∆L “ upx “ Lq.

Cet allongement total est la somme de tous les petits allongements élémen-taires du fil, autrement dit des déformations, de telle manière que

∆L “ż L

0εpxqdx.

Avec εpxq “ dupxqdx (en considérant que upx “ 0q “ 0) on retrouve que

∆L “ż L

0du “ upx “ Lq.

Bien que l’allongement du fil varie de point en point, la déformation estconstante (voir figure 1.15 page 33) !

32

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1.3. Déformations (strain)

Figure 1.15. – Allongement du fil : fonctions déplacement upxq (en haut) et déformation εpxq(en bas).

1.3.2. Propriétés du tenseur des déformations linéarisées.

Pour un champ scalaire f px, y, zq exprimé en coordonnées cartésiennes, le gradientcomporte les 3 dérivées partielles B f

Bx , B fBy , B f

Bz . Il est naturel, par analogie avec le

champ scalaire, de définir le gradient d’un champ vectoriel ~F (qui possède 3 com-posantes Fxpx, y, zq, Fypx, y, zq et Fzpx, y, zq) par les 9 dérivées partielles BFi

Bx j(aussi

appelée matrice jacobienne). Ce « gradient généralisé » rend nécessaire l’utilisa-tion de l’algèbre tensorielle, pour décrire la variation de chacune des 3 compo-santes dans les 3 directions de l’espace. Le milieu se déforme lorsque le gradientdu champ des déplacements ~u n’est pas nul et on peut définir :

ε “ grad~u “ εi j “Bui

Bx j“

¨

˚

˝

BuxBx

BuxBy

BuxBz

Buy

BxBuy

ByBuy

BzBuzBx

BuzBy

BuzBz

˛

‚.

Toutefois ce tenseur contient aussi les rotations (qui conservent les distances). Ondécompose ε en une partie symétrique S et une partie antisymétrique Ω telles que

εi j “ S i j `Ωi j.

33

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.16. – Exemple de représentation d’un champ de déplacement ~up~rq “ xÑex . La défor-mation ε n’est rien d’autre que le gradient généralisé du champ ~u.

où Ωi j est le tenseur des rotations infinitésimales (dont on peut noter la ressem-blance avec l’opérateur rotationnel)

Ωi j “12

ˆ

Bui

Bx j´Bu j

Bxi

˙

,

qui correspond aux rotations. Donc S correspond ici à la définition des déforma-tions que l’on cherche. Dans le cadre de très petites déformations, le tenseur li-néarisé des déformations est donc :

S i j “12

ˆ

Bui

Bx j`Bu j

Bxi

˙

(1.9)

que l’on peut aussi noter

¯S “12

´

grad~u¯

`

´

grad~u¯T

˙

.

et on assimile S i j à εi j. ε est un tenseur de rang 2 avec 9 composantes indépen-dantes. Par définition il est symétrique εi j “ ε ji donc il ne possède que 6 com-posantes indépendantes. C’est cette relation qu’on utilise pour la propagation des

34

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1.3. Déformations (strain)

ondes car les déformations sont très faibles. Chaque terme diagonal représentel’allongement relatif dans la direction du vecteur. Chaque terme non-diagonal re-présente la variation d’angle entre les deux directions concernées.

Pour information, dans le cas général, le tenseur non-linéarisé des déforma-tions (tenseur de Green-Lagrange en composantes cartésiennes orthonormées)est :

εi j “12

ˆ

Bui

Bx j`Bu j

Bxi`Buk

Bxi

Buk

Bx j

˙

.

1.3.3. Dilatation θ

La dilatation est la variation relative de volume

θ “V ´ V0

V0.

On peut montrer que :

θ “ ε11 ` ε22 ` ε33 “ Trp ¯εq “ εii “Bui

Bxi“ div~u.

Un fluide incompressible ne peut pas se dilater ni être comprimé donc θ “ 0 , onretrouve bien le fait que div~u “ 0. Trp ¯εq “ 0 caractérise donc une transformationinfinitésimale localement isochore.

Montrons que la variation relative de volume est égale à la trace du ten-seur εPour simplifier les calculs, on peut se placer dans la base principale propretelle que le tenseur ε soit diagonal

ε “

¨

˝

ε11 0 00 ε22 00 0 ε33

˛

‚.

Par définition

θ “dV 1 ´ dV

dV,

35

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1. Élasticité dans les milieux continus

avecdV “ dx1dx2dx3

dV 1 “ dx11dx12dx13

dx11 “ dx1 `Bu1

Bx1dx1 “ p1` ε11q dx1

dV 1 “ p1` ε11q p1` ε22q p1` ε33q dx1dx2dx3

On retrouve la définition de dV et on peut écrire, en négligeant les termesd’ordre supérieur (ε2 » 0 22)

dV 1 “ p1` ε11 ` ε22 ` ε33q dV

soit

θ “dV 1 ´ dV

dV“ ε11 ` ε22 ` ε33 “ Tr p ¯εq “ εii.

1.3.4. Déformations particulières

Extension simple dans une direction (état uniaxial de déformation)

Dans la direction Ñe1 ,

ε “

¨

˝

λ 0 00 0 00 0 0

˛

‚.

Le champ des déplacements associé est ~u “ λx1Ñe1 (voir Fig. 1.17). La variation

de volume est telle que ∆ “ Trp ¯εq “ ε11 “ λ. État de déformation plan

Dans une base quelconque,

ε “

¨

˝

ε11 ε12 0ε12 ε22 00 0 0

˛

‚.

22. En effet, l’ordre de grandeur de la déformation est ε » 10´5, ce qui est très petit. On conçoit doncfacilement que ε2 » 10´10 soit négligeable.

36

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1.3. Déformations (strain)

Figure 1.17. – Champ de déplacement ~u “ λx1Ñe1 associé à une extension simple.

Dans la base propre, qui est la base constituée par les vecteurs propres,

ε “

¨

˝

εI 0 00 εII 00 0 0

˛

où εI et εII sont les valeurs propres. État de déformation isotrope

Dans cet état de déformation,

ε “

¨

˝

λ 0 00 λ 00 0 λ

˛

‚.

Le champ de déplacement associé est ~u “ λx1Ñe1 ` λx2

Ñe2 ` λx3Ñe3 . La variation

relative de volume ∆ est égale à 3λ. Extension dans une direction sanschangement de volume

ε “

¨

˝

λ 0 00 ´λ2 00 0 ´λ2

˛

37

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1. Élasticité dans les milieux continus

Glissement pur (cisaillement pur, aplatissement)

Dans la base où on effectue un aplatissement 23 on a ~u “ αx1Ñe1 ´ αx2

Ñe2 et

ε “

¨

˝

α 0 00 ´α 00 0 0

˛

‚.

Il s’agit de la base principale du glissement pur. Les déformations principales non-nulles sont opposées, le milieu se dilate dans une direction et se contracte dansla direction orthogonale. Cela correspond aussi à une extension simple dans unedirection, sans changement de volume. Dans la base tournée de 45˚ on a ~u “

αx2Ñe1 ` αx1

Ñe2 et

ε “

¨

˝

0 α 0α 0 00 0 0

˛

‚.

La signification du coefficient α devient plus claire ici : il s’agit de l’angle de dis-torsion, avec tanα « α pour les petites déformations. La trace du tenseur est nulle,donc cette déformation s’effectue à volume constant (transformation isochore).

Figure 1.18. – Champ de déplacement ~u associé à un glissement pur. Bien que les représenta-tions du champ soient différentes (à droite et à gauche), il s’agit bien du mêmechamp.

23. Voir Cyril Langlois, Mini manuel de Géologie - Géophysique, Dunod, 2011, p.100.

38

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1.3. Déformations (strain)

Glissement simple (ou cisaillement simple)

Le champ de déplacement associé est ~u “ γx2Ñe1 . En petites déformations, on

identifie γ à l’angle de distorsion (voir figure 1.30) car tan γ « γ. Le glissementsimple équivaut à un glissement pur suivi d’une rotation rigide.

Figure 1.19. – Cas du glissement simple.

On trouve dans ce cas que

ε “

¨

˝

0 γ2 0γ2 0 00 0 0

˛

et on identifie γ2 à l’angle α pour le glissement pur. On retrouve aussi ici que latransformation est isochore.

Torsion d’un cylindre

Le champ de déplacement en torsion est ~up~rq “ αρzÑeθ . Ce champ est proportionnelà la distance à la face encastrée z, proportionnel à la distance à l’axe du cylindre ρ,et orienté suivant le vecteur Ñeθ (voir figure 1.22).Le tenseur des déformations associé est le suivant dans le repère cartésien

ε “α

2

¨

˝

0 0 ´y0 0 x´y x 0

˛

‚.

39

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.20. – Le cas a représente le glissement pur, le cas b représente le cas du glissementsimple. Les dessins d, e et f illustrent l’aplatissement. L’aplatissement est enfait identique à un glissement pur, comme le montrent les situations a et e,identiques (à une translation près). Le glissement pur et le glissement simplesont identiques avec α “ 2γ, comme le montrent les déformations des cerclesc et f.

Figure 1.21. – Champ de déplacement ~u “ γx2Ñe1 associé au glissement simple.

40

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1.3. Déformations (strain)

Figure 1.22. – Schéma du champ de déformation ~u en torsion (exagéré).

41

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1.3. Déformations (strain)

1.3.5. Tableau comparatif des contraintes et desdéformations

Il existe des similitudes entre les formalismes qui décrivent les contraintes et lesdéformations, récapitulées dans le tableau ci-dessous.

Tenseur des contraintes (stress) des déformations linéarisées(strain)

Notation ¯σ ¯εDimension [σi j]=[F/S]= [εi j]=[δ``]=1

=[pression]=M.L´1.T´2

Unité pression (Pa, pascal) sans unité (%, rad)Ordre de grandeur 10-100 MPa 10´5-10´4

PropriétésTenseurs d’ordre 2, symétriques, à valeurs réelles,

diagonalisables

Représentés par : ellipsoïde, cercles de MohrRelation « de Cauchy » ~σpM, ~nq “ ¯σ~n ~εpM, ~nq “ ¯ε~n

vecteur contrainte ~σ vecteur allongement relatif ~uSignification de ~n orientation de la facette directionNotation indicielle σi “ σi jn j εi “ εi jn j

Termes diagonaux compression allongement relatif dans unedirection

Termes hors diagonale cisaillement τ variations d’angle γTrace (somme des va-leurs propres)

Trp ¯σq “ ´3P, où P est lapression moyenne

Trp ¯εq “ θ, où θ est la varia-tion relative de volume

Partie sphérique du ten-seur

compression uniforme changement de volume àforme constante (gonflementou dégonflement)

Partie déviatorique dutenseur

contraintes en cisaillementpur

changement de forme à vo-lume constant (isochore)

Table 1.1. – Comparaison des tenseurs.

43

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1.3. Déformations (strain)

Testez vos connaissances

Solutions du QCM page 126.

1. On étire un cylindre suivant son axe de révolution (Ox1), sans le fairechanger de volume. Quel est l’état de déformation associé ? (α constanteréelle positive)

a) ε “

¨

˝

α 0 00 0 00 0 0

˛

‚ b) ε “

¨

˝

2α 0 00 α 00 0 α

˛

c) ε “

¨

˝

α 0 00 ´α 00 0 ´α

˛

‚ d) ε “

¨

˝

2α 0 00 ´α 00 0 ´α

˛

2. Un état de déformation est décrit par le tenseur suivant :

ε “

¨

˝

4 2 12 ´1 ´21 ´2 ´2

˛

‚ˆ 10´5.

La variation relative de volume associée à cette déformation est :a) -2ˆ10´5 b) -1ˆ10´5 c) 0d) 1 ˆ10´5 e) 2 ˆ10´5 f) 3 ˆ10´5

3. Le déplacement (noté ~u) s’exprime en :a) degrés (d’angle) b) µm´1 c) % d) µm

4. La déformations (notée ε) s’exprime en :a) degrés (d’angle) b) µm´1 c) % d) µm

5. La dilatation (notée ∆) s’exprime en :a) degrés (d’angle) b) µm´1 c) % d) µm

6. La divergence du champ de déplacement ~u est égale à :a) εi j b) εnn c) σnn d) σi j

45

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1.4. Relation contraintes-déformations

1.4. Relation contraintes-déformations

1.4.1. La loi de Hooke

La loi de Hooke relie l’allongement d’un ressort avec la force à exercer (appeléeforce élastique ou force de rappel et notée

ÑFe) :

ÑFe “ ´KpÑr ´ Ñr0 q

Ñer (1.10)

où Ñr0 est la position du ressort « à vide », Ñr est le vecteur position de l’extrémitélibre du ressort, et K la constante de raideur du ressort, avec rKs “ M.T´2 (unité :kg.s´2 ou N/m).

Remarque : le vecteur unitaire Ñer est orienté par convention dans le sensd’élongation du ressort, d’où le signe moins qui apparaît dans la formule 1.10.Cette force est essentiellement d’origine électrostatique.

En général, la loi de Hooke est illustrée avec l’allongement d’un ressort. Les res-sorts sont des objets manufacturés, macroscopiques, qui sont fabriqués pour obéirà la loi de Hooke dans un très large domaine de variation. Tous les matériaux sontélastiques ! Le caoutchouc évidemment, mais aussi le verre, le diamant ou l’acier,tant que la déformation reste très faible.Cette relation peut se réécrire plus simplement

Fe “ K∆`,

où ∆` est l’élongation, elle exprime le fait que la contrainte est proportionnelle àla déformation. Faisons apparaître la contrainte et la déformation dans le cas d’uncylindre de section S et de longueur ` :

FS“

K`S

∆`

`

σ “ K1ε

On trouve une relation de proportionnalité entre σ et ε. Nous verrons plus basque K1 s’identifie avec le module de Young E. L’avantage de K1 est que c’est unegrandeur intrinsèque à l’échantillon, alors que K, appelé raideur 24 dépend de lagéométrie de l’échantillon.

24. Ce coefficient est utilisé en analyse mécanique dynamique (AMD).

47

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1. Élasticité dans les milieux continus

Sur la linéaritéUne telle relation linéaire est « universelle » car elle résulte d’un développe-ment limité à l’ordre 1 de la relation entre contrainte et déformation (voir Eq.1.1) . Autrement dit, toute relation entre deux grandeurs est linéaire si elle nes’éloigne pas trop de son point de départ (sous réserve que la relation soit stric-tement croissante ou décroissante, c’est-à-dire que la dérivée première ne soitpas nulle)

f pxq “ f px0q ` px´ x0qB fBx x0

.

Le corollaire de cette universalité est qu’une relation de linéarité entre deuxgrandeurs est une relation très courante en physique (voir par exemple la loid’Ohm en électricité, il en existe beaucoup d’autres !) 25.

Figure 1.23. – Relation contrainte-déformation dans le cas général.

25. Voir F. Herrmann, op. cit., section 1.5 relations linéaires.

48

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1.4. Relation contraintes-déformations

1.4.2. Le tenseur des constantes élastiques (stiffnesstensor)

Dans le cas général (cas d’un matériau anisotrope), la relation entre le tenseur descontraintes σ et le tenseur des déformations ε s’écrit (en notation contractée) :

σi j “ Ci jklεkl (1.11)

Au sens large, il s’agit d’une loi de comportement, appelée aussi équation rhéolo-gique (constitutive equation en anglais), de nature empirique. Contrairement auxéquations de conservation (aussi appelées équations de bilan), qui sont univer-selles, les lois de comportement dépendent du matériau et ne sont donc pas univer-selles.Tout le bénéfice de la notation contractée apparaît lorsqu’on veut écrire σ11 :

σ11 “ C1111ε11 `C1112ε12 `C1113ε13`

C1121ε21 `C1122ε22 `C1123ε23`

C1131ε31 `C1132ε32 `C1133ε33.

La relation entre σ et ε fait apparaître un tenseur C de rang 4, qui possède à priori81 composantes (81=34). Ce tenseur est appelé tenseur des constantes élastiques,ou tenseur des rigidités élastiques (en anglais stiffness tensor, material stiffnessmatrix).Or σ et ε sont symétriques, donc C se réduit à seulement 36 composantes. On peutplacer ces composantes dans un tableau de 6 ˆ 6, et passer de Ci jkl à Cαβ grâce àla notation de Voigt (du nom du physicien allemand Woldemar Voigt)

p11q Ñ 1

p22q Ñ 2,

p33q Ñ 3,

p32q “ p23q Ñ 4,

p13q “ p31q Ñ 5,

p21q “ p12q Ñ 6.

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1. Élasticité dans les milieux continus

Cette notation peut être appliquée aux tenseurs contrainte et déformation pour don-ner des vecteurs à 6 composantes :

σ “

¨

˚

˚

˚

˚

˚

˚

˝

σ11

σ22

σ33

σ23

σ13

σ12

˛

¨

˚

˚

˚

˚

˚

˚

˝

σ1

σ2

σ3

σ4

σ5

σ6

˛

(1.12)

Attention : le tenseur des déformations doit être défini différemment, avec l’appa-rition de facteurs 2

ε “

¨

˚

˚

˚

˚

˚

˚

˝

ε1

ε2

ε3

ε4

ε5

ε6

˛

¨

˚

˚

˚

˚

˚

˚

˝

ε11

ε22

ε33

2ε23

2ε13

2ε12

˛

.

Or Cαβ est symétrique (pour des raisons énergétiques - cf la relation de Maxwell),donc il possède 21 composantes indépendantes. C’est le cas des cristaux dans lesystème de classe cristalline triclinique, ce qui signifie que les propriétés élastiquesd’un tel cristal sont caractérisées par 21 constantes ! 26.Donc l’équation 1.11 peut s’écrire plus simplement, où i, j “ 1..6 :

σi “ Ci jε j.

Pour chaque classe de symétrie, il existe une forme de tenseur C associée, voirFigures (1.25) et (1.26).Par exemple, le silicium est un cristal anisotrope, dont le système cristallin estcubique et le groupe ponctuel m3m. Dans la Figure (1.26) on constate que le ten-seur des constantes élastiques associé (exprimé dans le repère conventionnel de lamaille cristalline) est :

C “

¨

˚

˚

˚

˚

˚

˚

˝

C11 C12 C12 0 0 0C12 C11 C12 0 0 0C12 C12 C11 0 0 00 0 0 C44 0 00 0 0 0 C44 00 0 0 0 0 C44

˛

.

26. Voir par exemple l’article de J.M. Brown, E. H. Abramson, et R. J. Angel, Triclinic elastic constants forlow albite, Physics and Chemistry of Minerals 33-4 256-265 (2006).

50

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1.4. Relation contraintes-déformations

Le silicium est donc caractérisé par 3 constantes élastiques C11, C12 et C44 qui sontindépendantes (elles ne se déduisent pas les unes des autres).Remarque 1 : il est possible d’avoir des constantes élastiques négatives. C’est lecas du quartz où C14 “ ´17.9 GPa.Remarque 2 : les constantes élastiques sont des propriétés intrinsèques du maté-riau, et ne dépendent pas du repère choisi. Cependant elles dépendent du repère dela maille.

Le tenseur des compliances élastiques

La relation inverse de (1.11) est :

εi j “ S i jklσkl. (1.13)

Le tenseur S est aussi appelé tenseur des compliances élastiques, tenseur des flexi-bilités, ou tenseur des souplesses.Attention : contrairement à ce que l’équation (1.13) peut laisser croire, le tenseurS αβ n’est pas égal à C´1

αβ . Les relations sont plus compliquées 27.Ce tenseur apparaît dans une formule importante qui donne la relation entre lacompressibilité et les constantes de compliance :

χ “ S iikk “ S 11 ` S 22 ` S 33 ` 2pS 12 ` S 23 ` S 31q (1.14)

Cette formule permet de déterminer la variation de densité pour n’importe quelsolide (isotrope ou anisotrope) connaissant toutes les constantes élastiques.

La relation 1.11 n’est valable que dans le cas d’un comportement parfaite-ment élastique. Un solide qui obéit à cette loi est appelé hookéen. Pour rendrecompte d’un comportement visco-élastique, la relation 1.11 doit être générali-sée en ajoutant des termes proportionnels aux dérivées temporelles de σ ou ε(voir Fig. 1.24).

Le tenseur des constantes élastiques du troisième ordre

Le développement de Taylor de la relation σi j en fonction de εi j :

27. Voir par exemple Royer p.149, exercice 3.5.

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.24. – Différents modèles rhéologiques, obtenus en combinant en série ou en parallèledes ressorts et des amortisseurs.

σi jpεklq “ σi jp0q `ˆ

BTi j

Bεkl

˙

εkl“0εkl `

12

ˆ

B2Ti j

BεklBεmn

˙

εkl“0,εmn“0εklεmn ` ...

Dans l’hypothèse des petites déformations (approximation harmonique), seul ledeuxième terme n’est pas négligeable. Les termes d’ordre supérieur donnent lesconstantes élastiques du troisième ordre (en anglais, third order elastic constants,TOEC) Ci jklmn ou Cαβγ. Ces tenseurs reflètent l’anharmonicité dans les cristaux.

Stabilité mécanique d’un cristal

La stabilité mécanique d’un cristal est donnée par les critères de stabilité de Born.

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1.4. Relation contraintes-déformations

Figure 1.25. – Système de symétries cristallines.

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.26. – Formes du tenseur des constantes élastiques C en fonction de la symétrie cris-talline. Le cas isotrope est en bas à droite.

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1.4. Relation contraintes-déformations

1.4.3. Matériaux isotropes et anisotropes

Un milieu isotrope est un milieu identique quelque soit la direction considérée.Un solide peut être anisotrope à une certaine échelle de longueur, et isotrope àune autre. Exemple avec un matériau polycristallin, anisotrope localement dansles grains, et isotrope globalement à une échelle macroscopique.Exemple de matériaux élastiquement isotropes (voir figure 1.27) :

— les verres : verre à vitres, silice, Remarque : le cristal est un verre riche enplomb.

— les amorphes : couches minces obtenues par évaporation, matériaux irradiés,etc

— les polymères (plastiques)

— polycristaux (voir figure 1.28) : assemblage désordonné de monocristaux detaille variée et séparés par des joints de grains, Remarque : la plupart desmétaux sont polycristallins

— quasicristaux— les liquides

Exemple de matériaux élastiquement anisotropes :

— les cristaux : diamant, quartz, silicium, fer, alumine, etc. Remarque : un mo-nocristal est l’inverse d’un polycristal

— le bois (assemblage de fibres qui possède une direction préférentielle) sontdit orthotropes. Les matériaux transversalement isotropes sont une classeparticulière de matériaux orthotropes (polymères renforcés par fibres de verre,membrane biologique, os, etc).

— les différents grains d’un polycristal

En général, l’anisotropie élastique entraîne l’anisotropie optique (phénomènes debiréfringeance, cristaux biaxes ou uniaxes). Un matériau isotrope soumis à unecompression uniaxiale devient anisotrope.

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1. Élasticité dans les milieux continus

Figure 1.27. – Différentes catégories de matériaux isotropes. Les verres peuvent être rangésdans la catégorie des matériaux amorphes, c’est-à-dire des solides qui ne pos-sèdent pas d’ordre à courte portée (les atomes ne sont pas arrangés périodique-ment comme dans les cristaux).

Figure 1.28. – Schéma d’un polycristal. Les monocristaux anisotropes possèdent une orienta-tion aléatoire indiquée par les flèches rouges. Source image : Wikipédia.

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1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

1.5.1. Constantes de Lamé λ et µ

Les propriétés élastiques d’un solide isotrope sont souvent représentées par deuxconstantes indépendantes λ et µ telles que (pour des raisons d’invariance et desymétrie 28)

Ci jkl “ λδi jδkl ` µ`

δikδ jl ` δilδ jk˘

. (1.15)

On trouve :C11 “ C22 “ C33 “ λ` 2µ,

C12 “ C23 “ C13 “ C12 “ C21 “ C32 “ C31 “ λ,

C44 “ C55 “ C66 “ µ.

Ce qui signifie que seules deux constantes élastiques indépendantes caractérisentles propriétés d’un solide isotrope : tC11,C44u ou tC11,C12u ou tC44,C12u.Exprimons λ et µ en fonction des constantes élastiques :

λ “ C12 “ C11 ´ 2C44,

µ “ C44.

Par exemple, dans le cas de l’acier, λ “ 97 GPa et µ “ 76 GPa (rappelons que1 GPa correspond à 10 000 atmosphères).On peut montrer que µ correspond à une résistance à un cisaillement pur (voirsection 1.5.4).On en déduit la loi de comportement pour un solide isotrope, appelée relation deLamé :

σi j “ λθδi j ` 2µεi j . (1.16)

La relation inverse est :

εi j “´λ

2µp3λ` 2µqδi jσnn `

12µσi j. (1.17)

28. Voir Daniel Royer, op. cit, p. 120.

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1. Élasticité dans les milieux continus

1.5.2. Module d’Young E (Young modulus) et cofficient dePoisson ν (Poisson’s ratio)

Effectuons un essai de traction unixiale sur une éprouvette (cylindre) constituéed’un matériau isotrope. Le cylindre a un diamètre d, une longueur initiale l, unesection droite S . Comme nous le montre l’expérience quotidienne effectuée sur uncylindre de pâte à crêpe, l’éprouvette s’allonge, le diamètre diminue et la force detraction augmente.La loi de Hooke (relation contrainte-déformation) se réécrit de la manière sui-vante :

FS“ E

∆ll

(1.18)

Cette formule signifie que le module d’Young est une constante qui relie l’allon-gement relatif de l’éprouvette avec la contrainte exercée. Exemple, pour l’acierE=200 GPa. La relation (1.18) peut se réécrire σ11 “ Eε11. Comme nous sommesen traction uniaxiale, σ22 “ 0 et σ33 “ 0. Le module d’Young est positif, ce quicorrespond à un allongement du matériau lorsqu’un effort de traction est appliqué.La valeur du module d’Young représente la contrainte (donc 200 GPa pour l’acier)qu’il faudrait appliquer pour obtenir une déformation unité, c’est-à-dire doubler lalongueur initiale. Aucun matériau ne répond linéairement à une telle contrainte, laplupart ont cédé bien avant. 29

Lorsque l’éprouvette s’allonge, il y a aussi une variation du diamètre d :

∆dd“ ´ν

∆ll

(1.19)

La relation (1.19) peut se réécrire ε22 “ ´νε11 et ε33 “ ´νε11. Une conséquencede l’ « effet Poisson » est qu’on peut avoir des déformations dans les directions oùil n’y a pas de contrainte.ν est un coefficient adimensionné, qui vaut environ 0.3 pour l’acier. Dans le régimelinéaire ´1 ă ν ă 0.5, comme on peut le constater dans la Figure 1.29. Malgréla très grande différence entre les matériaux, les limites de variation de ν sont trèsétroites 30. Parmi les verres, la silice vitreuse a-SiO2 a un ν particulièrement bas,à cause d’une structure microscopique formant un réseau très peu dense. Plus lastructure est dense, et plus ν est élevé. Pour certains matériaux (mousses, foams),ν ă 0. Ce comportement très particulier est appelé auxétisme (il a été mis en

29. Jean-Claude Charmet, Mécanique du solide et des matériaux, Elasticité-Plasticité-Rupture, page 43.30. G.N.Greaves et al, Nature Materials, 2011

58

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1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

évidence par Roderic Lakes en 1987). Pour les gaz, ν “ 0, et pour les fluidescritiques (fluide se trouvant au-delà du point critique dans le diagramme de phase)ν “ ´1. Pour les liquides ν “ 0.5 ; cela signifie qu’une fusion d’un métal se traduitpar le passage de ν » 0.3 à 0.5.

Figure 1.29. – Coefficient de Poisson ν de matériaux isotropes. Réf. : Limits to Poisson’s ratioin isotropic materials, P. H. Mott and C. M. Roland, Phys.Rev.B 80, 1321042009

Exercice : donnons la constante de raideur K en fonction de E

F “ k∆l et σ “ Eε soit FS “ E∆llOn trouve K “ E

S l .

59

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1. Élasticité dans les milieux continus

1.5.3. Module d’incompressibilité K (ou B) (bulk modulus),et coefficient de compressibilité χ

Le module d’incompressibilité (parfois appelé module de rigidité à la compres-sion) 31 K :

KT “ ´Vˆ

BPBV

˙

T“ ρ

ˆ

BPBρ

˙

T(1.20)

Le coefficient de compressibilité χ :

χT “1

KT“ ´

1V

ˆ

BVBP

˙

T“

ˆ

BP

˙

T(1.21)

Ces deux grandeurs sont des grandeurs thermodynamiques, définies à partir de va-riables d’état P,T,V, etc. L’indice T indique que ce sont des grandeurs isothermes ;elles peuvent être adiabatiques (isentropiques réversibles) ou isothermes.Par des considérations thermodynamiques, on peut montrer que K est toujourspositif.K est un paramètre qui contrôle la diminution de volume lorsqu’on comprime unéchantillon.On remarque qu’elles sont liées à l’équation d’état VpPq (en anglais equation ofstate, EOS). L’équation d’état d’un gaz parfait est simplement PV “ nRT . Parcontre, dans les solides il existe une grande quantité d’équations d’état différentes.On peut citer Murnaghan, Birch-Murnaghan, Vinet (Rydberg), Holzapfel, Kumari-Dass, Gilvarry, etc. En général, on obtient K après avoir mesuré l’équation d’étatd’un solide puis ajusté les points avec une formule adaptée, qui contient K commeparamètre libre.

Exercice : calculons K en fonction des autres coefficients élastiques

On peut réécricre K de la manière suivante :

KT “ ´Vˆ

∆P∆V

˙

T

31. La compressibilité d’un matériau se mesure par 1K.

60

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1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

On reconnait la variation relative de volume ∆VV “ ε11` ε22` ε33, la pression Pest égale à la partie sphérique du tenseur des contraintes, d’où :

K “13Trp ¯σqTrp ¯ε

où Tr note la trace du tenseur, qui est un invariant.

K “ λ`23µ

K “E

3p1´ 2νq

K “ C11 ´43

C44

On verra aussi plus loin que K peut se calculer à travers les vitesses du son lon-gitudinales et transverses (mais il s’agit alors du K adiabatique car les vitesses duson sont des quantités adiabatiques) :

KS “ ρ

ˆ

V2L ´

43

V2T

˙

Des équations d’état simples

Une équation d’état est une équation qui relie des variables d’état telles que P, Vou T. Par exemple, on mesure une diminution du volume avec l’augmentation dela pression, donc ρpPq est une fonction croissante.En supposant B constante, on trouve que V “ V0e´PP0 . Cette expression n’est passatisfaisante car un solide ne peut être comprimé indéfiniment, le volume devientnul quand P devient grand, et on peut supposer que B varie avec la P.En supposant la linarité de BpPq avec P, B “ B0 ` kP, avec k “ B10, on obtient

V “ V0

1` B10

B0Pı´1B0

. C’est l’équation d’état de Murnaghan 32. Cette équation

présente l’avantage d’être inversible : P “ B0B1

0

`V0V

˘B10 ´ 1

ı

.

32. Publications de référence : F.D. Murnaghan, Proc. Symp. Appl. Math.,1 167 (1949) ; F.D. Murnaghan,The foundations of the theory of elasticity, (1947) ; F.D. Murnaghan, The compressibility of media under extremepressures, Proceedings of the national academy of sciences of the United States of America, 30(9) 244 (1944).

61

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1. Élasticité dans les milieux continus

1.5.4. Module de rigidité G (shear modulus)

Le module de rigidité G est aussi appelé module de cisaillement, de glissement, deCoulomb ou de Lamé. On peut montrer que :

G “ µ “ C44 “E

2p1` νq. (1.22)

G est aussi le module de torsion. On constate donc que G est simplement égal aucoefficient de Lamé µ et à la constante élastique C44. Cela signifie aussi que µ etC44 sont liés à du cisaillement pur. Un liquide ne résiste pas au cisaillement, doncG “ 0 dans ce cas. Remarque : cela est faux à certaine échelles et fréquences(voir ci-dessous). Pour les liquides visco-élastiques, on définit un G complexe,G “ G1 ` iG2 “ G1 cospωtq `G2 sinpωtq (domaine de la rhéologie).

Montrons que G “ µ

Voir figure (1.30). Le champ de déplacement u pour un glissement est u1 “ γx2.On se situe dans l’hypothèse des petits glissements avec tan γ “ γ. On en déduitque S 12 “ γ2 et T12 “ 2µS 12. On sait que F

S “ G ∆xl donc par identification

G “ µ.

Figure 1.30. – Cas du glissement simple pour le calcul de G.

62

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1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

Un liquide peut-il subir du cisaillement ?Un liquide (ou un fluide) ne peut pas subir de cisaillement car il n’y a pas deforce de rappel ; dans ce cas G “ 0, C44 “ 0, µ “ 0 et vT “ 0 car aucune ondetransverse de ne peut se propager dans un liquide.Or du cisaillement (et donc la propagation d’ondes transverses) peut être ob-servé dans les liquides à haute fréquence 33. En effet à hautes fréquences onpasse d’un régime hydrodynamique (type liquide ou visqueux) à un régimeélastique (type solide). Du cisaillement peut être observé lorsque la fréquencede l’onde acoustique dépasse le temps de relaxation des effets visqueux (mo-dèle rhéologique de Maxwell pour la relaxation structurale)

fshear ěG82πη

où G8 est le module de cisaillement à fréquence infinie et η la viscosité. Pourl’eau le calcul donne f » 160 GHz.

1.5.5. Bilan : couples de constantes caractérisant un solideisotrope

Synthétisons ce que nous avons appris jusqu’à maintenant. Il existe essentiellementquatre couples principaux de constantes indépendantes déterminant les propriétésélastiques d’un solide isotrope :

tC11,C44u ou tC11,C12u ou tC12,C44u ,

tλ, µu ,

tE, νu ,

tK,Gu .

Toutes ces constantes sont reliées entre elles (voir tableau 1.2). Insistons sur lepoint suivant : les constantes λ et µ ne sont définies que pour un solide isotrope,de même que pour E, ν et G, en général.

33. Voir par exemple : M.E. Msall, O.B. Wright, O. Matsuda, Seeking shear waves in liquids with picosecondultrasonics, Journal of Physics : Conference Series, 92(1) 012026 (2007). Cette propriété a été prédite par Frenkeldans les années 1940, et vérifiée 30 ans plus tard (voir J.R.D. Copley, Physical Review Letters, 32 49-52 (1974)).

63

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1. Élasticité dans les milieux continus

Au montage expérimental utilisé correspond un couple « naturel »de constantes.Par exemple, un essai de traction permet de déterminer facilement E et ν. Un es-sai de torsion permet d’obtenir G. La mesure de vitesses du son (par méthodeultrasons, diffusion Brillouin de la lumière, etc) permet d’obtenir VL et VT et d’endéduire C11 et C44 connaissant la masse volumique ρ.La propagation du son n’est rien d’autre qu’une sollicitation faible, alternée et ré-gulière d’un matériau. C’est pour cela que des expériences aussi différentes que latraction d’un barreau et la propagation du son permettent de remonter aux mêmesconstantes élastiques.Toutes ces constantes sont en fait des variables d’état, qui définissent l’état d’unsystème thermodynamique à l’équilibre. Elles dépendent de la température T et dela pression P, et elles peuvent être isothermes ou adiabatiques. Les expériences depropagation du son donnent des constantes adiabatiques, tandis que les essais detraction donnent des constantes isothermes.

(Fonctionde)

pC11,C44q pE, νq pλ, µq pK,Gq pVL,VT q

pC11,C44q - C11 “Ep1´νq

p1`νqp1´2νq C11 “ λ` 2µ C11 “ K ` 43G C11 “ ρV2

L

- C44 “E

2p1`νq C44 “ µ C44 “ G C44 “ ρV2T

pE, νq E “ C44p3C11´4C44q

C11´C44- E “ µ3λ`2µ

λ`µE “ 9KG

3K`G E “ ρV2T

3V2L´4V2

TV2

L´V2T

ν “ C11´2C442pC11´C44q

- ν “ λ2pλ`µq ν “ 3K´2G

2p3K`Gq ν “V2

L´2V2T

2pV2L´2V2

T q

pλ, µq λ “ C11 ´ 2C44 λ “ Eνp1`νqp1´2νq - λ “ K ´ 2

3 G -µ “ C44 µ “ E

2p1`νq - µ “ G µ “ ρV2T

pK,Gq K “ C11 ´43C44 K “ E

3p1´2νq K “ λ` 23µ - K “ ρpV2

L´43V2

T q

G “ C44 G “ E2p1`νq G “ µ - G “ ρV2

T

pVL,VT q VL “

b

C11ρ

- VL “

b

λ`2µρ

VL “

b

K` 43 Gρ

-

VT “

b

C44ρ

- VT “

b

µ

ρVT “

b

-

Table 1.2. – Relations entre les coefficients élastiques (adiabatiques ou isothermes) d’un ma-tériau isotrope.

64

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1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

Complément : calculer le lien entre les constantes adiabatiques etisothermes

En général, la différence entre les constantes adiabatiques (indicées S ) et iso-thermes (indicées T ) est faible.

1KS

“1

KT´ TV

α2

CP

µT “ µS

ES “ ET `E2TVα2

9CP

νS “ νT ` p1` νT qETVα2

9CP

Le coefficient adiabatique γ est le suivant :

γ “CP

CV“χT

χS“

KS

KT“

v2S

v2T

Dans les gaz γ » 1.5 et dans les solides γ » 1.

1.5.6. Relation structure-propriétés

En physique des matériaux, et plus généralement en physique de la matièrecondensée, on cherche à expliquer les propriétés macroscopiques d’un objet pardes propriétés microscopiques (arrangement des atomes, nature de la liaison ato-mique, etc).

D’où la question suivante : quelle propriété microscopique explique un moduled’Young de l’ordre de 100 GPa ?

L’ordre de grandeur des constantes élastiques (le GPa) dérive de l’énergie de liai-son. Faisons le raisonnement simple suivantCe calcul est tiré du livre d’E. Hecht,Physique, p. 383.. L’énergie de liaison entre atomes, séparés de ` “ 0.1 nm, est del’ordre de U0 “ 1.6ˆ10´19 J. On suppose que doubler la distance entre atomes re-vient à les dissocier complètement. La force s’écrit F “ ∆W

∆r “U02` “ 1.6ˆ10´10 N.

Or la surface s occupée par un atome est s “ `2 d’où la contrainte σ “ Fs “

U02`3 “

40 GPa. On retrouve bien l’ordre de grandeur observé.

65

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1. Élasticité dans les milieux continus

Il existe différents types de liaison (voir figure 1.31), qui influent sur les propriétésdes matériaux. Par exemple, les solides covalents ont une liaison forte (grandeénergie de liaison), donc ils possèdent le module d’Young le plus élevé.

Figure 1.31. – Relation module d’Young E-densité ρ (tiré de Ashby, Materials Selection inMechanical Design).

66

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1.5. Constantes élastiques d’un matériau isotrope

Testez vos connaissances

Solutions du QCM page 126.

1. Pour des raisons de symétrie, le tenseur des constantes élastiques Ci jkl

pour un matériau isotrope s’écrit Ci jkl “ λδi jδkl`µpδikδ jl` δilδ jkq, où λ etµ sont les coefficients de Lamé. Que vaut C1313 (C55 en notation de Voigt) ?

a) λ b) µ c) λ` µ d) λ` 2µ e) λ´ µ f) µ

2. Par des arguments de symétrie et des lois physiques, le tenseur des cons-tantes élastiques Ci jkl peut être exprimé avec combien de composantes auminimum ? (c’est aussi le nombre de constantes nécessaires pour décrireun cristal triclinique).

a) 9 b) 13 c) 15 d) 21 e) 36

3. On trouve dans un livre une représentation du tenseur Ci jkl pour le sys-tème de symétrie cristallin trigonal (voir Fig. 1.32). Quel est le nombre decomposantes indépendantes et non nulles de ce tenseur ?a) 6 b) 7 c) 8 b) 9 c) 10 d) 12 e) 21

Figure 1.32. – .

4. Combien de composantes indépendantes et non nulles comporte le ten-seur Cαβ d’un matériau isotrope ?a) 1 b) 2 c) 3 d) 4

5. En général, la propagation du son est un processus :a) isotherme b) isobare c) adiabatique d) isochore

6. Quel est l’ordre de grandeur du coefficient de Poisson ν pour un solideisotrope ?a) 0.1 b) 0.3 c) 0.5 d) 0.7 e) 1

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1. Élasticité dans les milieux continus

7. Un matériau « auxétique » possède un coefficient de Poisson ν :a) négatif b) nul c) stricte-

ment égal à0.5

d) égal à 1 e) supérieurà 1

8. Quelle relation peut servir de définition au module d’Young E, pour uncylindre isotrope en traction selon son axe de révolution pOx2q ?a) σ11 “ Eε22 b) σ22 “ Eε22 c) σ11 “ Eε11 d) σ22 “ Eε11

9. Quelle relation peut servir de définition au coefficient de Poisson ν, pourun cylindre isotrope en traction selon son axe de révolution (Ox1) ?a) ε11 “ νε22 b) ε22 “ νε11 c) ε33 “ ´νε11 d) ε22 “ ´νε33

10. Quel est l’ordre de grandeur de C11 pour un solide élastiquement iso-trope ?a) 100 kPa b) 100 MPa c) 100 GPa d) 100 TPa

11. Quelle est la définition du module d’incompressibilité isotherme (noté KT

ou BT ) ?a) ´T

`

BPBT

˘

V b) ´P`

BVBP

˘

T c) ´V`

BPBV

˘

T d) ´ 1V

`

BVBP

˘

T

12. Le module d’incompressibilité d’un matériau est K=100 GPa. Quelle estla variation relative de volume pV ´ V0qV0 de ce matériau soumis à unepression de 1 kbar ?a) 0.01 % b) 0.1 % c) 1 % d) 10 % e) 100 %

13. Quel type de matériau est élastiquement isotrope ?a) le quartz b) le bois c) le verre à vitre d) le silicium

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2. Propagation des ondes dans lessolides

2.1. Modélisation d’une onde progressive

La question que l’on se pose au début de cette partie est :

Une onde propagative monochromatique est décrite par la formule

~up~r, tq “ Ñu0eipωt´~k¨~r`φq, (2.1)

comment parvient-on à cette formule ? Reppelons que cette formule est vueen électromagnétisme, où le champ électrique (d’une onde électromagnétiquedans le vide) s’écrit

ÑE “

ÑE0eipωt´~k¨~rq.

L’équation fondamentale des ondes est l’équation de propagation à une dimen-sion (ici écrite sous sa forme la plus simple) :

B2upx, tqBx2 ´

1c2

B2upx, tqBt2 “ 0 (2.2)

où u est une quantité physique pertinente (déplacement transverse, pression, vi-tesse, etc) et c est homogène à une vitesse rcs “ L.T´1, c’est la vitesse de propa-gation du phénomène. Cette équation est une équation aux dérivées partielles, dusecond ordre, linéaire.Attention : il ne faut pas confondre la vitesse de propagation et la vitesse particu-laire, qui est la vitesse locale des particules (et qui est la dérivée du déplacement).

Tout phénomène propagatif, se propageant à une certaine vitesse, est régi parcette équation. Ainsi les ondes gravitationnelles 1, qui sont des ondes de gra-

69

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2. Propagation des ondes dans les solides

vité, doivent obéir à cette équation, même si la forme rigoureuse des équationsdoit être compliquée.

L’équation de propagation à trois dimensions, avec introduction de l’opérateur la-placien scalaire ∆, s’écrit :

∆upx, tq ´1c2

B2upx, tqBt2 “ 0

Pour simplifier la notation, nous pouvons introduire l’opérateur D’Alembertien tel que

” ∆´1c2

B2

Bt2

et écrire, de manière concise,u “ 0.

Les solutions générales de l’équation 2.2 (en ondes planes) sont :

upx, tq “ f pt ´xcq ` gpt `

xcq

où f et g sont des fonctions quelconques. Les solutions du type f pt ´ xc q sont des

ondes planes qui se propagent vers les x croissants (ondes progressives), tandisque les solutions du type gpt ` x

c q se propagent vers les x décroissants (ondesrégressives).

Comment retrouver rapidement dans quelle direction se propage uneonde ?Un point de l’onde garde toujours la même valeur au cours du déplacement, carl’onde garde la même forme. Cela signifie qu’en ce point, l’argument x ˘ ctest constant. Or t augmente, donc pour compenser le terme ´ct il faut quex augmente, ou pour s’opposer à l’augmentation du terme `ct il faut que xdiminue.

Pour une onde plane, qui se propage dans une direction quelconque ~n, où ~r est levecteur position, on écrira

1. Benjamin P. Abbott et coll, Observation of gravitational waves from a binary black hole merger, PhysicalReview Letters, 116(6) 061102 (2016).

70

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2.1. Modélisation d’une onde progressive

upx, tq “ f pt ´~n ¨ ~r

cq.

Pour une onde sinusoïdale monochromatique, la fonction f s’identifie à une fonc-tion sinusoïdale (cosinus ou sinus, peu importe - voir encadré page 74)

upx, tq “ A cos”

αpt ´xcq

ı

où α est une constante et A est l’amplitude (L’amplitude efficace est A?

2 etl’amplitude crête-crête est 2A). Ces constantes sont introduites pour des ques-tions d’homogénéité des quantités, telles que pour les dimensions rAs “ rus etrαts “ 1 (l’argument d’une fonction trigonométrique est sans dimension). Bienque cos

`

tT

˘

“ cos p f tq soit homogène, la période du phénomène n’est pas Tmais 2π. En effet la fonction cosinus est 2π-périodique : pour que l’onde soit T -périodique, il faut α “ 2πT “ 2π f “ ω. Avec ω “ ck et k “ 2π

upx, tq “ A cos pωt ´ kxq ,

que l’on peut écrire en notation avec des nombres complexes

upx, tq “ Re“

Aeipωt´kxq‰

.

Et on peut poserupx, tq “ Aeipωt´kxq.

Cette écriture en complexes n’a aucun sens physique, c’est un outil qui facilite lescalculs (l’opération de dérivation s’écrit par exemple B

Bt “ iω).Pour inclure l’atténuation α (l’amortissement), on peut écrire k en complexe

k “ k1 ` ik2 “2πλ´ iα.

L’introduction de l’information sur la polarisation de l’onde entraîne que l’ampli-tude devient vectorielle et on écrira

~upx, tq “ ~u0eipωt´kxq.

Le champ ~u devient un champ vectoriel, et l’onde possède une polarisation recti-ligne. Remarque : on peut aussi introduire des amplitudes vectorielles complexespour avoir des polarisations circulaires ou elliptiques.Au niveau de la polarisation :

71

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2. Propagation des ondes dans les solides

— si Ñu0 est colinéaire avec ~n, l’onde est purement longitudinale.— si Ñu0 est perpendiculaire à ~n, l’onde est purement transversale.

Dans le cas général, les ondes ont un caractère mixte (voir plus bas). Une onde EMest toujours polarisée transverse.

Figure 2.1. – Dans le cas général, dans un solide anisotrope, un paquet d’onde possédant unepolarisation quelconque se sépare en trois paquets d’onde distincts. En effet,les paquets d’ondes voyagent à des vitesses différentes suivant leur polarisa-tion (VL ą VT1 ą VT2) ; ils finissent par se séparer spatialement et possèdentune polarisation rectiligne. En sismologie, la séparation des transverses est ap-pelé shear-wave splitting (analogue au phénomène de biréfringeance optique).Les axes Ox1, Ox2 et Ox3 sont (dans ce schéma) des axes particuliers du cristalanisotrope.

On retrouve finalement l’expression du départ (Eq.2.1 page 69)

~up~r, tq “ Ñu0eipωt´~k¨~r`φq.

Cette expression, écrite sous forme développée, devient

~upx, y, z, tq “ u0,x eipωt´kx¨x´ky¨y´kz¨z`φqÑex`

u0,y eipωt´kx¨x´ky¨y´kz¨z`φqÑey`

u0,z eipωt´kx¨x´ky¨y´kz¨z`φqÑez .

soit en notation indicielle

up “ u0,peipωt´kn xn`φq.

La vitesse de phase est

vφ “ˆ

dzdt

˙

phase=constante“ω

k,

72

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2.1. Modélisation d’une onde progressive

il s’agit de la vitesse de propagation d’une onde monofréquence (ou monochroma-tique). La vitesse de groupe est

vg “

ˆ

dωpkqdk

˙

k“k0

, (2.3)

il s’agit de la vitesse d’un paquet d’ondes, c’est-à-dire d’un ensemble infini d’ondesmonochromatiques superposées, centré sur le nombre d’onde k0. Selon l’expres-sion (2.3), le paquet d’ondes voyage à une vitesse vg, sans se déformer. Lorsque lepaquet d’ondes n’est plus centré sur k0, mais « étalé » sur une large gamme de k,ou qu’il voyage sur de longues distances, le paquet d’onde se déforme au cours dela propagation.

Figure 2.2. – Image des lignes de champ d’une onde acoustique périodique, polarisée sui-vant x et se propageant suivant z. D’après le dessin des lignes de champ dansF.Hermann section 7.6 "Ondes électromagnétiques transverses" (Fig.2).

Lorsque la longueur d’onde devient équivalente à la taille du milieu, les ondesdeviennent stationnaires. Une onde stationnaire s’écrit comme la multiplicationd’une fonction du temps T ptq par une fonction de la position Xpxq

upx, tq “ XpxqT ptq. (2.4)

Pour un mode propre de vibration, la partie spatiale Xpxq est la déformée modale.

73

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2. Propagation des ondes dans les solides

Grandeurs temporelles Grandeurs spatiales(gr. vectorielle) (gr. vectorielle)

temps t fréquence ν(ou f )

position x vecteur position ~r fréquencespatiale ν

vecteur fréquencespatiale ~ν

période T fréquencef “ 1T

longueurd’onde λ

n’existe pas ! 2 nombred’ondeσ “ 1λ

n’existe pas

- pulsationω “ 2π f

- - nombred’ondeangulairek “ 2πλ

vecteur d’onde~k “ k~n 3

Table 2.1. – Grandeurs associées à une onde sinusoïdale propagative.

Intérêt des exponentielles complexesLes quantités observables ne contiennent pas la quantité imaginaire racinecarrée de ´1 ! Décrire les ondes à l’aide des nombre complexes permet unesimplification des calculs.

— La dérivation ou l’intégration est plus simple qu’avec les fonctions trigo-nométriques usuelles.

— L’énergie transportée est donnée par la formule : E “ 12Re puv˚q.

— Les exponentielles peuvent être vues comme les vecteurs propres des sys-tèmes causaux, linéaires et invariants. En effet, la transformée de Fouriern’est rien d’autre que la projection d’une fonction dépendante du tempssur une sinusoïde de fréquence donnée.

Sur les notationsOn écrit indifféremment sinpωt ´ kxq ou cospωt ´ kxq, et aussi e´ipωt´kxq ou

encore eipωt´kxq. Selon Allan D. Pierce, e´iωt est prédominant dans la littéra-ture 4de propagation des ondes, tandis que e`iωt prédomine dans la littérature

2. Voir la discussion Pourquoi le "vecteur longueur d’onde" n’existe-t-il pas ?, chap. 7 du livre Berkeley,cours de physique, tome 3 ondes, p. 334.

3. On utilise parfois la lettre q pour désigner le vecteur d’onde (wavevector), il ne faut pas confondre avec levecteur de diffusion, qui se note ~q “

Ñk f ´

Ñki .

74

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2.1. Modélisation d’une onde progressive

des vibrations. (voir aussi encadré du J.-P. Perez Electromagnétisme, p.356 )

2.1.1. Champ de déplacement et opérateurs vectoriels

~u “ ÑuL `ÑuT

— Il s’agit d’une déformation avec changement de volume et sans rotation : lerotationnel du champ ~u est nul, donc il existe un potentiel scalaire φ tel queÑuL “

´Ñgradφ.

— Il s’agit d’une déformation avec rotation sans changement de volume : la di-vergence du champ ~u est nulle, donc il existe un potentiel vecteur ψ tel queÑuT “

ÑrotÑψ .

~u “´Ñgradφ` Ñrot

Ñψ

4. Littérature : ensemble de la production d’articles scientifiques.

75

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2. Propagation des ondes dans les solides

Figure 2.3. – Champ de déplacement ~up~rq pour une onde mécanique, à un temps t quelconque,pour une onde longitudinale (en haut) et transverse (en bas).

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2.2. Ondes planes dans un cristal

2.2. Ondes planes dans un cristal

Un cristal, qui est un arrangement périodique 3D d’atomes, peut être modélisé (enpremière approche) par une chaîne monoatomique unidimensionnelle constituéepar des masses reliées par des ressorts. On considère uniquement les interactionsentre premier voisins, et les potentiels sont harmoniques (voir Fig. 1.1.2) doncles atomes de masse M séparés d’une distance a sont reliés par des ressorts har-moniques de raideur K 5. Au passage d’une onde plane, le réseau se déforme. Ledéplacement de l’atome noté n est

unpx, tq “ Aeipωt´knaq. (2.5)

La relation de dispersion ωpkq qui en découle (voir section 2.2.1 page 89) est lasuivante

ω “ 2

c

KM

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

sinˆ

ka2

˙ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

. (2.6)

— Lorsque ka ! 1, la longueur d’onde de l’onde acoustique λ est très grandedevant l’espace interparticulaire a (λ " 1), et le solide apparaît continu pour

l’onde. Dans ce cas ω “ ab

KM k. On constate que la relation de dispersion

est linéaire, c’est-à-dire que la propagation des ondes est non-dispersive. Celasignifie qu’un paquet d’ondes qui se propage ne se déforme pas.

— Fréquence de coupure (cut-off frequency) : fc “1π

b

KM “

Vπa . Au-delà de cette

fréquence de coupure, les ondes ne se propagent plus, elles s’atténuent trèsrapidement (elles sont évanescentes - dans ce cas on tracera une relation dedispersion du typeω “ f

`

Imk˘

). On peut estimer que, pour un solide typique,avec a “ 0.5 nm et V=5000 m/s, la fréquence de coupure est fc » 3.2 THz,ce qui signifie que pour des fréquences allant du kHz au GHz (ultrasons, ethypersons de basse fréquence), les ondes sont en centre de zone de Brillouin.Le milieu apparaît continu pour l’onde.

Il existe 3 branches acoustiques (suivant la polarisation de l’onde) :— Une branche acoustique longitudinale (notée LA, par opposition aux modes

optiques LO).

5. L’interaction gravitationnelle étant négligée, cette masse est conceptuellement la masse inertielle, c’est-à-dire la quantité de matière qui résiste au mouvement. Bien que les masses inerte et grave ne doivent pas êtreconfondues, l’expérience montre que les deux sont égales.

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2. Propagation des ondes dans les solides

— Deux branches acoustiques transverses (notées TA). Dans le cas d’un solideisotrope, les deux branches acoustiques sont superposées, on dit qu’elles sontdégénérées. Attention, la dégénérescence n’implique pas forcément le carac-tère transverse des modes ; il est possible d’avoir un longitudinal ayant lamême vitesse qu’un transverse, même si ce cas est très rare.

La relation de dispersion dépend du système étudié, elle caractérise le comporte-ment ondulatoire (dynamique) d’un système (voir des exemples Fig. 2.6, page 81).

Sur la dispersion optiqueEn optique, la dispersion de la lumière est liée au prisme qui disperse la lumièreblanche. Cette dispersion angulaire est liée à la loi de Descartes sin i1 “ n sin i2

et au fait que que l’indice de réfraction n dépend de la longueur d’onde de lalumière λ. Or rappelons que l’indice de réfraction est le rapport entre la vitessede la lumière dans le milieu et la célérité dans le vide c (ou dans l’air), doncles ondes lumineuses se propagent à des vitesses différentes dans un milieuoptiquement dispersif.

Figure 2.4. – Schéma de la première zone de Brillouin, et relation de dispersion. Les k néga-tifs représentent des ondes qui se propagent vers les valeurs décroissantes (ondesrégressives). vg : vitesse de groupe , vφ : vitesse de phase. Au-dessus de la fré-quence de coupure ωc “ 2

a

KM (ou encore νc “ Vpπaq), les ondes ne sepropagent plus, elles sont évanescentes.

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2.2. Ondes planes dans un cristal

Techniques expérimentales

Pour couvrir cette large gamme de fréquences, il est nécessaire d’utiliser plusieurstechniques expérimentales différentes (voir figure 2.13).

— Émission-réception d’ultrasons : On exploite l’effet piézoelectrique pourconvertir les impulsions électriques en mouvements mécaniques et inverse-ment (via un transducteur).

— Diffusion Brillouin de la lumière : Interaction entre un photon incident etun phonon thermique (créé par les fluctuations spontanées de pression, dues àl’agitation thermique). Le photon diffusé perd ou gagne de l’énergie.

— Acoustique picoseconde : Technique optique pompe-sonde. Le laser pompegénère un paquet d’ondes via un transducteur métallique en couche mince.L’onde est détectée par le laser sonde, à travers des variations de la réflectivité.Une ligne à retard mécanique permet de retarder la sonde par rapport à lapompe, et de faire des mesures dans le temps ( 10 ns).

— Diffusion inélastique des rayons X : diffusion Brillouin avec des photons trèsénergétiques (rayons X générés dans les synchrotrons ESRF ou SOLEIL, parexemples).

— Diffusion inélastique de neutrons 8 : la gamme de fréquence couverte parcette technique est 20 GHz - 20 THz (phonons acoustiques et optiques). Lagamme en vecteur d’onde couvre entièrement la zone de Brillouin (même plu-sieurs zones). Cela est donc bien complémentaire avec la diffusion Brillouinqui est aux grandes longueur d’onde. On peut donc mesurer les vitesses du sonmais dans une gamme de q qui est au plus petit 1% de la zone de Brillouin. Lalimite est la résolution expérimentale, sinon on mesure la branche acoustiquecomplète.

6. Wahyu Setyawan, Stefano Curtarolo, Comp. Mat. Sci., 49 (2) 299 (2010).7. Voir Paolo M. Ossi, Disordered Materials : An Introduction, fig. 4.29 p. 148.8. Voir B. Hennion, La diffusion inélastique des neutrons sur monocristal. Le spectromètre 3-axes, Collection

SFN, 10, 357 (2010). DOI : 10.1051/sfn/2010005.

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2. Propagation des ondes dans les solides

Figure 2.5. – Relation de dispersion ωpkq, vitesse de phase Vφ et vitesse de groupe Vg,calculées pour une vitesse V0 “ 5000 m/s et une distance interatomiquea “ 5 ˆ 10´10 m. Le schéma est restreint à 0 ă k ă π

a (première zone deBrillouin et ondes propagatives vers les x croissants). Proche du centre de zoneVg “ Vφ “ V0, et ω “ V0k. Ce cas correspond au milieu élastique continu. Enbord de zone, l’onde est stationnaire donc Vg “ 0, et la fréquence est la fré-quence maximale atteignable (fréquence de coupure νc “ 3.2 THz). Le systèmese comporte comme un filtre passe-bas. Le domaine au-dessus de ωc est appelédomaine réactif supérieur. De plus, toujours en bord de zone, la vitesse de phasea diminué par rapport à V0 : Vφ

`

k “ πa

˘

“ 2πV0. Même si l’onde est stationnaire,

la vitesse de phase n’est pas nulle ! En effet une onde stationnaire est la sommede deux ondes contrapropagatives se propageant à une vitesse Vφ. Lorsque lachaîne est de taille finie, les conditions périodiques de Born-Von Karman s’ap-pliquent, et k devient quantifié (cela provient de la théorie du signal : lorsquel’on périodise une fonction, on la discrétise dans l’espace dual).

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2.2. Ondes planes dans un cristal

Figure 2.6. – Relations de dispersion pour différents systèmes physiques. a) Pour unecorde flexible, homogène, continue (corde de piano idéale), où T0 est la ten-sion et ρ0 est la densité linéique (en kg¨m´3) ; ou des ondes EM dans le vide.b) Pour une chaîne unidimensionnelle, oscillations transverses. c) Pour des pen-dules couplés ; des ondes EM dans un guide d’onde ; ou des ondes relativistesde de Broglie. d) Ondes de Lamb dans une plaque (An : n-ième mode antisymé-triques, S : symétriques).

81

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2. Propagation des ondes dans les solides

Figure 2.7. – n-ièmes zones de Brillouin. La relation de dispersion est périodique. Toute l’in-formation intéressante est contenue dans la première zone de Brillouin.

Figure 2.8. – Quelle est la signification des n-ièmes Zones de Brillouin ? Il existe une infi-nité de fonctions continues de fréquence plus élevée qui décrivent les valeurséchantillonnées (analogie avec le théorème de Shannon).

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2.2. Ondes planes dans un cristal

Figure 2.9. – Entre les branches acoustiques (de basse fréquence) et les branches optiques (dehaute fréquence), il existe un intervalle de fréquences pour lesquelles une ondene peut pas se propager : c’est une bande interdite (band gap en anglais). Il peutexister des ondes dans cette gamme de fréquence, mais elles sont atténuées.

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2. Propagation des ondes dans les solides

Figure 2.10. – Courbes de dispersion d’un cristal anisotrope. Les courbes de dispersionpour les cristaux anisotropes dépendent de la direction de propagation, ellesdoivent donc être représentées suivant plusieurs directions. La figure du hautmontre des courbes de dispersion pour un cristal de α-Fe, où chaque panelmontre une direction particulière repérée par des lettres grecques majuscules(Γ,H, P,N). Celles-ci indiquent aussi les points remarquables de la cellule deWigner-Seitz (voir figure en bas à droite 6), qui est la cellule primitive du réseauréciproque (le réseau direct est ici cubique à faces centrées, body-centered cu-bic = bcc - voir figure en bas à gauche). La lettre grecque Γ représente toujoursle centre de zone.

84

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2.2. Ondes planes dans un cristal

Figure 2.11. – Courbes de dispersion d’un solide amorphe. Un solide amorphe est un ar-rangement tridimensionnel désordonné d’atomes, comme le montre la figuredu haut. Dans un solide amorphe (et dans un liquide), il n’existe pas de zonede Brillouin bien définie car il n’y pas d’ordre à longue portée comme dans uncristal. La courbe de dispersion (figure du bas) perd donc aussi de sa significa-tion. Lorsque k » ∆k, la relation de dispersion devient sans signification : c’estla limite de Ioffe-Regel. 7.

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2. Propagation des ondes dans les solides

Figure 2.12. – Ordres de grandeur des fréquences acoustiques. Gammes de fréquences. Enbas : R.S. Lakes, Figure 4.5 p.128.

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2.2. Ondes planes dans un cristal

Figure 2.13. – Différentes techniques expérimentales.

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2.2. Ondes planes dans un cristal

2.2.1. Détermination de la relation de dispersion

Ce calcul est très classique, voir par exemple Charles Kittel, op.cit, début du cha-pitre 4 intitulé Phonons I, vibrations du réseau. On utilise l’expression de la forceélastique ~F “ ´k∆l~u où ~u est un vecteur unitaire orienté dans le sens de l’élon-gation. Les liaisons atomiques sont modélisées par des ressorts de raideur K carles atomes vibrent proches de leur position d’équilibre, et ~u est le déplacementparticulaire.

´ ´ ´ ÑFpn´1qÑpnq “ ´K pun ´ un´1q

Ñux

´ ´ ´ ÑFpn`1qÑpnq “ K pun`1 ´ unq

Ñux

m~an “ ~Fn´1Ñn ` ~Fn`1Ñn

Avec l’accélération an “d2undt2 , en projection sur l’axe des x :

md2un

dt2 “ ´K pun ´ un´1q ` K pun`1 ´ unq

Le déplacement est celui produit par une onde plane, voir équation 2.5 (page 77)

d2un

dt2 “ ´ω2un

un`1 “ e´ikaun

un´1 “ eikaun

´mω2un “ K`

e´ikaun ´ 2un ` eikaun˘

´mω2“ K

`

e´ika´ 2` eika

˘

mω2“ 2K p1´ cospkaqq

ω2“

4Km

sin2ˆ

ka2

˙

ω “ 2

c

Km

ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

sinˆ

ka2

˙ˇ

ˇ

ˇ

ˇ

,

et on retrouve l’expression 2.6 page 77.

89

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2.2. Ondes planes dans un cristal

Testez vos connaissances

Solutions du QCM page 126.

1. Une onde sinusoïdale monochromatique upx, tq “ u0 sinpωt ` kxq se pro-page dans la direction :a) des x croissants b) des x décroissants

2. Soit l’équation de propagation suivante :

αB2ypx, tqBt2 ´

B2ypx, tqBx2 “ 0.

À quelle vitesse V se propage l’onde ?a) V “ α b) V “ α2 c) V “

?α d) V “ 1?

α

3. Quel est l’ordre de grandeur d’une vitesse du son dans un solide commel’acier ?a) V = 100 m/s b) V = 1 km/s c) V = 5 km/s d) V = 50 km/s

4. Une onde longitudinale se propage dans la direction (Ox3). Quelle est sapolarisation, notée

Ñu1 ?

a)Ñu1 “

p1, 0, 0qb)

Ñu1 “

p0, 1, 0qc)

Ñu1 “

p0, 0, 1qd)

Ñu1 “

p 1?2, 1?

2, 0q

5. Une onde qui se propage à 50 MHz est un :a) infrason b) son audible c) ultrason d) hyperson

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

2.3. Propagation des ondes dans un milieucontinu

2.3.1. Équation de propagation pour un milieu continu

Grâce au modèle simple de « chaîne linéaire de masses reliées par des ressorts »,nous avons vu que pour une onde mécanique ultrasonore, le milieu apparaît continu.On considère un champ de déplacement quelconque ~up~r, tq, dépendant de la posi-tion~r et du temps t. La vitesse particulaire~v (différente de la vitesse de propagationde l’onde notée V) est

vi “Bui

Bt,

et l’accélération ~a est

ai “Bvi

Bt“B2ui

Bt2 .

Le principe fondamental de la dynamique (PFD ou deuxième loi de Newton) est,sous forme locale, équivalent à l’équation du mouvement avec un tenseur descontraintes symétriques 9

#

ρai “Bσi j

Bx j

σi j “ σ ji(2.7)

en négligeant les forces à distance ~f “ ~0, et les couples extérieurs ~G “ ~0. Lemoment d’inertie de la particule ne joue aucun rôle 10.On considère que les déplacements sont petits (l’amplitude des ondes est faible)donc l’équation est linéaire 11.En introduisant le déplacement ~up~r, tq on obtient les trois relations suivantes

ρB2ui

Bt2 “Bσi j

Bx j. (2.8)

9. Voir François Sidoroff, op.cit., p. 7. Pour les équations complètes : Royer Eq. (3.15) et Eq. (3.17) p.110.10. Voir Royer p.111.11. On entre dans le domaine de l’acoustique non-linéaire (ANL) lorsque l’amplitude de l’onde n’est plus

considérée comme infinitésimale, on appelle ces ondes des ondes d’amplitude finie (finite waves en anglais). EnANL, l’onde se déforme au cours de la propagation et il peut y avoir création d’ondes de choc ; de plus le principede superposition n’est plus valable et il peut y avoir interaction entre les ondes.

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2. Propagation des ondes dans les solides

De plus, en tenant compte de la relation contrainte-déformation (Eq. 1.11), et enconsidérant que Ci jkl “ Ci jlk, on a

σi j “ Ci jklBul

Bxk. (2.9)

En combinant les équations 2.8 et 2.9 on obtient finalement

ρB2ui

Bt2 “ Ci jklB2ul

Bx jBxk.

On voit ici que les indices j, k et l sont répétés, donc la sommation se fait sur cesindices. Cette relation cache en fait un système de 3 équations différentielles dudeuxième ordre

B2ui

Bt2 ´Ci jkl

ρ

B2ul

Bx jBxk“ 0 , (2.10)

analogue à une équation de propagation (voir Equation 2.2 page 69, et Ci jklρ esthomogène à une vitesse au carré), mais la détermination des vitesses n’est pasimmédiate.

2.3.2. Équation de Christoffel et détermination des vitesses

On cherche maintenant les solutions de l’équation 2.10 sous la forme d’ondesplanes progressives se propageant dans la direction ~n (ces ondes ne sont pas forcé-ment périodiques ou sinusoïdales). On écrit que le champ de déplacement ~u (en unpoint M repéré par le vecteur position ~r “

´ÑOM ) est :

uip~r, tq “ u1i fˆ

t ´~n ¨ ~r

V

˙

,

soit sous forme développée

uipx1, x2, x3, tq “ u1i f´

t ´n1x1 ` n2x2 ` n3x3

V

¯

,

où F est une fonction quelconque, V est la vitesse de propagation de l’onde, et u1iest le vecteur polarisation de l’onde.

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

En introduisant cette relation dans l’équation (2.10), et en utilisant les propriétésdes dérivées partielles telles que

Bui

Bt“ u1i f 1,

où B fBt “

B fBwBwBt “ f 1 ˆ 1 avec w “ t ´ ~n¨~r

V ,

B2ui

Bt2 “ u1i f 2,

Bul

Bx j“ ´

n j

Vu1l f 1,

B2ul

Bx jBxk“

n jnk

V2 u1l f 2,

on obtient l’équation de Christoffel 12 :

ρu1i “ Ci jkln jnk

V2 u1l , (2.11)

dans laquelle on voit apparaître le tenseur de Christoffel ¯Γ défini comme

Γil “ Ci jkln jnk . (2.12)

Il s’agit d’un tenseur de rang 2, symétrique, avec 6 composantes indépendantes.L’équation de Christoffel se réécrit ρV2u1i “ Γilu1l, qui est analogue à une équationaux valeurs propres Ai ju j “ λui. On reconnaît l’équation séculaire (appelée aussiéquation caractéristique) suivante :

detˇ

ˇΓil ´ ρV2δil

ˇ

ˇ “ 0.

Les trois vitesses de phase sont obtenues grâce aux racines de cette équation, doncdes valeurs propres. Les trois vecteurs propres correspondants définissent la po-larisation de l’onde associée aux valeurs propres (les vecteurs propres sont mu-tuellement orthogonaux). On obtient donc 3 ondes se propageant avec 3 vitessesdifférentes et de polarisations mutuellement orthogonales. Comme les ondes de

12. E. W. Christoffel, Ann. di matematica pura ed applicata (2) 8, 193 (1877).

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2. Propagation des ondes dans les solides

vitesses différentes finissent toujours par se séparer, les ondes sont toujours pola-risées rectilignes.Lorsque la direction de propagation ~n et la polarisation sont confondues, on parled’ondes longitudinales. Dans le cas général, il est possible que la direction depropagation ~n et la polarisation ne soient pas colinéaires, on parle d’ondes quasi-longitudinales.

Vitesse isotherme ou adiabatique ?La vitesse du son est aussi une grandeur thermodynamique définie telle que(dans un gaz ou un liquide)

V2“

ˆ

BPBρ

˙

X

où X est soit l’entropie S (on parle de vitesse adiabatique), soit la températureT (on parle de vitesse isotherme).La propagation du son est en général considérée comme adiabatique, car lachaleur des régions chaudes de l’onde n’a pas le temps de diffuser vers lesrégions froides (voir Fig. 2.14). La fréquence doit être plus basse qu’une fré-quence limite pour la propagation adiabatique 13donnée par

flimite “V2ρCV

2πκ

où CV est la chaleur spécifique à volume constant, κ la conductivité thermique.Avec le paradoxe suivant : ce n’est pas parce que la fréquence de l’onde estplus basse que la température a le temps de s’égaliser.

13. N.H. Fletcher, Adiabatic assumption for wave propagation, American Journal of Physics, 42(6), 487(1974). DOI : doi.org/10.1119/1.10432.

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

Figure 2.14. – Propagation d’une onde dans un gaz. Les régions en surpression ont une tem-pérature plus haute que les régions en dépression.

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

Détermination de la direction de propagation

Rappels sur les notations :— phklq sont les indices d’un plan réticulaire, dans la notation de Miller (voir

Fig. 2.15) ;

— ruvks sont les indices qui définissent une rangée (ou direction réticulaire,voir Fig. 2.16), et donc une direction de propagation (exprimée dans la baseÑa1 ,Ña2 ,Ña3 de la maille primitive).

Un indice négatif est surmonté d’une barre : 1 désigne´1. L’axe Ña1 est noté r100s ;l’axe ´Ña3 est noté r001s.

Figure 2.15. – Exemple de plans cristallographiques et de leurs indices de Miller phklq pourune structure cubique (Source : Wikimedia Commons).

Figure 2.16. – Directions de propagation dans une maille quelconque (Source : Wikipédia).

Cas du réseau à symétrie cubique : un réseau à symétrie cubique se confondavec une base orthonormale. Dans ce cas :

— la direction rhkls est normale au plan phklq,

— deux vecteurs perpendiculaires ~u et ~v obéissent à la relation ~u ¨ ~v “ uxvx `

uyvy ` uzvz “ 0 ;

— le vecteur ~w normal au plan contenant ~u et ~v est obtenu par ~w “ ~uˆ ~v ;

— deux vecteurs ~u et ~v sont colinéaires si ~uˆ ~v “ ~0.

99

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2. Propagation des ondes dans les solides

Au niveau macroscopique : l’expérimentateur doit connaître la manière dontl’échantillon à analyser (un cristal) est orienté : quels sont les indices de Miller dechacune des faces ? La coupe du cristal peut avoir un nom spécifique. Par exemplepour le quartz, on trouve dans les catalogues la mention x´cut, y´cut, z´cut, etc.Certaines coupes ont été créées pour des besoins spécifiques : AT ´ cut, S C´ cut,etc 14.Attention : il ne faut pas confondre la notation de la direction dans une maille etla direction de propagation ~n. Le vecteur ~n est unitaire, sa norme est égale à 1. Parexemple, dans un cristal cubique, l’onde se propageant suivant la direction r110sindique que

~n “1?

2Ñex `

1?

2Ñey .

Importance de la direction de propagation

La vitesse de propagation des ondes planes longitudinales dépend de la directionde propagation, dans un solide anisotrope (voir figure 2.3.2). Cela se comprend sil’on considère que l’écartement des plans atomiques dépend de la direction. Pourun solide isotrope, par contre, toutes les directions sont équivalentes.

Figure 2.17. – À gauche : directions de propagation dans un réseau 2D carré. À droite : ladistance de séparation des plans réticulaires change suivant la direction de pro-pagation, ce qui influe sur la vitesse du son dans cette direction.

14. Voir radio-electronics.com/info/data/crystals/quartz-crystal-cuts-at-sc-ct.php.

100

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

Détermination de Γ dans le cas d’un solide anisotrope pour unedirection de propagation quelconque

À partir de l’expression (2.12), on trouve que

Γ11 “ C11n21 `C66n2

2 `C55n23 ` 2C16n1n2 ` 2C15n1n3 ` 2C56n2n3

Et on calcule de même les autres composantes 15.

2.3.3. Résolution de l’équation de propagation dans le casdu solide isotrope

Détermination de Γ dans le cas d’un solide isotrope pour une directionde propagation quelconque

Voici les 6 composantes indépendantes du tenseur de Christoffel Γ dans le cas d’unsolide isotrope :

Γ11 “ C11n21 `C44n2

2 `C44n23,

Γ22 “ C44n21 `C11n2

2 `C44n23,

Γ33 “ C44n21 `C44n2

2 `C11n23,

Γ12 “ pC11 `C44qn1n2,

Γ13 “ pC12 `C44qn1n3,

Γ23 “ pC12 `C44qn2n3.

Par exemple, pour une direction de propagation suivant l’axe x1 (n1 “ 1, n2 “ 0,n3 “ 0)

Γ “

¨

˝

C11 0 00 C44 00 0 C44

˛

‚.

L’équation séculaire est dans ce cas`

C11 ´ ρV2˘ `

C44 ´ ρV2˘2“ 0,

soit les valeurs propres ρV2 “ C11 et ρV2 “ C44. Les vecteurs propres associés sontp1, 0, 0q, p0, 1, 0q et p0, 1, 0q qui correspondent à des polarisations longitudinale,transverse et transverse, respectivement.

15. Voir D. Royer, op. cit., formule p4.11q, p. 160.

101

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2. Propagation des ondes dans les solides

Vitesses du son dans le cas du solide isotrope

Et on trouve, pour un déplacement u1 (longitudinal, car la direction de propagationest parallèle à la direction du déplacement ~n)

VL “

d

C11

ρ“

d

λ` 2µρ

.

VL est la vitesse des ondes longitudinales, (appelées aussi ondes de compressionou de dilatation), ou ondes P pour primaires (qui vient du mot anglais pressure).Ce sont les ondes les plus rapides. La vitesse du son longitudinale est de l’ordrede 5000 m/s (à comparer avec la vitesse du son dans l’air de 340 m/s). Remarque :une onde longitudinale peut être considérée comme une superposition de dilatationpure et de cisaillement.Et pour un déplacement u2 (transverse, car la direction de propagation est perpen-diculaire à la direction du déplacement ~n)

VT “

d

C44

ρ“

c

µ

ρ.

VT est la vitesse des ondes transversales, ou secondaires, ou ondes S (qui vient dumot anglais shear = cisaillement). Ce sont les ondes les plus lentes, et susceptiblesde faire le plus de dégâts matériels (en situation de séisme).Remarque : comme λ ą 0, l’inégalité VT ă

VL?2

est toujours vérifiée. On peutretenir que la vitesse transverse est de l’ordre de VL2.Les fluides ne possèdent pas de vitesse transverse, car ils ne résistent pas au ci-saillement. Cela signifie aussi que les liquides, bien qu’isotropes, ne sont caractéri-sés que par une seule « constante élastique », en général c’est le module d’élasticitéisostatique (noté K ou B).La vitesse du son renseigne sur les propriétés physiques de l’intérieur de la Terre :en effet, à une certaine profondeur, VT “ 0 ce qui signifie que le milieu est liquide(on appelle cette région de l’intérieur de la Terre le noyau externe).

Exemple concret : propriétés élastiques de la silice amorphe a-SiO2

La silice amorphe (ou vitreuse) est un matériau isotrope constitué par un arrange-ment tridimensionnel désordonné de tétraèdres SiO4. On peut par exemple mesurerles vitesses par diffusion Brillouin et trouver :

102

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

Figure 2.18. – Ondes longitudinales (à gauche) et transverses (à droite).

VL “ 5970 m/s,

VT “ 3780 m/s.

Remarque : ces vitesses du son sont adiabatiques. Les valeurs sont légèrementdifférentes pour des vitesses du son isothermes. De plus, la fréquence des ondesest environ 30 GHz, ce sont des hypersons.Connaissant la masse volumique de la silice

ρ “ 2203 kgm3,

on en déduit les constantes élastiques (adiabatiques) :

C11 “ ρV2L “ 78.52 GPa,

C44 “ ρV2T “ 31.48 GPa,

C12 “ C11 ´ 2C44 “ 15.56 GPa.

Le module de Young et le coefficient de Poisson sont

E “ 73.37 GPa,

ν “V2

L ´ 2V2T

2pV2L ´ V2

T q“ 0.165.

Les constantes de Lamé sont

λ “ C12 “ 15.56 GPa,

µ “ C44 “ G “ 31.48 GPa.

Le module d’incompressibilité est :

K “ λ`23µ “ C11 ´

43

C44 “ ρpV2L ´

43

V2T q “ 36.55 GPa.

103

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2.3. Propagation des ondes dans un milieu continu

Testez vos connaissances

Solutions du QCM page 126.

1. Le tenseur de Christoffel Γ s’exprime par Γil “ Ci jkln jnk. Que représententn j ou nk ?a) La polarisation de l’onde.b) L’orientation de la base.c) La direction de propagation de l’onde.d) Le champ de déformation.e) Le champ de déplacement.

2. Les ondes transverses se propagent dans un milieu élastiquement isotropeà la vitesse :a)

b

b)b

λρ

c)b

C11ρ

d)b

C12ρ

e)b

C44ρ

3. Les ondes longitudinales se propagent dans un milieu isotrope à la vitesse(E est le module dYoung) :a)

b

b)b

λρ

c)b

C11ρ

d)b

C12ρ

e)b

C44ρ

4. Les ondes transverses sont aussi appelées des ondes :a) primaires b) de cisaillement c) de compression d) de dilatation

5. Combien de branches acoustiques distinctes possède un matériau aniso-trope, au maximum (dans une zone de Brillouin dont la direction est quel-conque) ?a) 1 b) 2 c) 3 d) 4 f) 6

6. Quelle est la proposition fausse dans le cas d’un solide élastiquement iso-trope ?a) L’ordre de grandeur de la vitesse du son est entre 1 km/s et 10 km/s.b) Les branches acoustiques transverses sont dégénérées.c) La vitesse des ultrasons dépend de leur fréquence.d) En centre de zone de Brillouin le milieu est non dispersif.

7. Quelle est la proposition fausse dans le cas d’un solide élastiquement iso-trope ?a) La vitesse des ondes transverses est supérieure à la vitesse des ondes longi-tudinales.b) La première zone de Brillouin ne contient que deux branches acoustiques.

105

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2. Propagation des ondes dans les solides

c) La vitesse de phase des ultrasons est égale à leur vitesse de groupe.d) En bord de zone de Brillouin, les ondes ne se propagent pas.

106

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

2.4. Atténuation (damping) d’une ondeacoustique, effets dissipatifs

2.4.1. Phénoménologie de l’atténuation

À retenir : il y a atténuation de l’onde parce que le milieu prend de l’énergie àl’onde mécanique (qui transporte de l’énergie et de la quantité de mouvementd’un point à un autre du milieu 16).

Comment s’opère ce transfert d’énergie ? Quelles en sont les consé-quences ? Rappels de thermodynamique 17

La diminution de l’énergie mécanique de l’onde signifie que l’énergie internedu milieu environnant U augmente. En effet, on applique la loi de conservationde l’énergie sur le système isolé onde mécanique ` milieu environnant. Ona donc dU ą 0.Le transfert d’énergie a lieu par le travail W des diverses forces de frot-tements, et par suite dU “ ´dW ą 0. L’entropie du milieu augmentedS “ dU

T “ ´dWT ą 0, et sa température aussi comme dU “ mCVdT ą 0 et

on a dT “ dUmCV

ą 0. Cette variation de température est très faible. La variationd’entropie est d’origine interne, et ne peut pas être négative (contrairement àune variation d’entropie d’origine externe qui peut avoir un signe quelconque,positif ou négatif). Ici le processus est irréversible, donc il y a forcément créa-tion d’entropie.L’onde évolue vers une énergie mécanique nulle à cause des forces non conser-vatives de frottement (théorème de l’énergie mécanique), et vers une énergiepotentielle mécanique minimale à l’équilibre, tandis que l’entropie S du milieuenvironnant évolue vers son maximum (l’entropie est donc naturellement unefonction « potentielle »).En bref : l’énergie injectée sous la forme d’une onde mécanique finit par uneaugmentation de température du milieu environnant, après diffusion dans toutle milieu. On passe donc d’une énergie "directionnelle" (l’onde) à une énergie"diffuse" (l’augmentation de température dans le milieu), on constate donc bien

16. Dans certains cas, une onde peut aussi transporter du moment angulaire

107

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2. Propagation des ondes dans les solides

ici une "dégradation" de la forme d’énergie qui correspond à une augmentationde l’entropie.Remarque : une onde de compression crée localement une augmentation detempérature, et un possible transfert vers le milieu environnant sous forme dechaleur, sauf dans le cas d’une propagation adiabatique.

La principale cause d’atténuation est due aux frottements. L’énergie interne dumilieu extérieur augmente, son entropie aussi (ce qui signifie que le processus estirréversible), et il y a élévation de la température.Voici des origines microscopiques aux frottements :— propagation (ou conduction) de chaleur (décrite par la loi de Fourier)— diffusion chimique (décrite par la loi de Fick)— réactions chimiques spontanées ou irréversibles— frottements : frottement mécanique ou chimique, hystérésis mécanique, ma-

gnétique ou diélectrique— phénomène visqueux : effet Joule, viscosité— phénomènes dissipatifs en volume : déformation plastique, écoulement vis-

queux en volumeUn solide hookéen, ou purement élastique, ne peut pas expliquer l’atténuation. Eneffet, la force de rappel élastique est une force conservative, donc l’énergie méca-nique se conserve. Il faut rajouter un terme de dissipation, ou de frottement, sous laforme d’une viscosité η. La loi de comportement se complique. Une conséquenceest qu’il va exister un déphasage entre sollicitation et réponse. Cette atténuationest aussi à l’origine du frottement de roulement, ainsi que du rebond d’une balle.Le modèle des masses reliées par des ressorts peut être muni d’un terme d’amor-tissement sous la forme d’un frottement fluide ~F “ ´η~v 18.On introduit un amortissement pour l’onde qui devient :

u “ u0eipωt´kxqe´αx

Soit en notation réelle :

u “ u0 cos pωt ´ kxq e´αx

17. Voir Gérard Lesoult, Thermodynamique des matériaux : de l’élaboration des matériaux à la genèse desmicrostructures, Presses polytechniques et universitaires romandes (2010), pages 69-71.

18. Suivant la vitesse (le nombre de Reynolds pour être exact), l’expression du frottement fluide peut êtredifférente ~F “ ´ηv2~u.

108

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

Pour mesurer l’atténuation dans un matériau, plusieurs types d’essais sont pos-sibles :

— une contrainte constante σ0 (ou une déformation constante ε0) appliquée àt “ 0, sous la forme d’un échelon.

— la réponse à une sollicitation harmonique du type σ “ σ0eiωt et on regarde laréponse ε “ ε0eiωt´φ, avec un déphasage φ.

— la propagation d’une onde plane harmonique dans le matériau.

Les résultats expérimentaux doivent être confrontés à des modèles rhéologiques 19

Analogies avec d’autres champs de la physiqueIl existe de fortes analogies entre les modélisations des essais viscoélastiqueset l’électrocinétique. La théorie du signal peut aussi être invoquée.

— une contrainte constante σ0 (ou une déformation constante ε0) appliquéeà t “ 0 (fluage (creep) ou relaxation). Typiquement, il faut résoudre deséquations différentielles du premier ordre à coefficients constants avec ousans second membre. Ce problème est analogue à la charge du conden-sateur (circuit RC), par exemple. Dans une modélisation structurelle, ondétermine l’équation différentielle à partir des différentes parties du sys-tème, puis on résout cette équation. Dans une modélisation fonctionnelle,le système est une boîte noire, et on calcule la réponse grâce à la réponseimpulsionnelle du système (notée hptq). La sortie se calcule par convolu-tion de hptq avec l’entrée xptq telle que yptq “ xptq ˚ hptq. L’entrée peutêtre une fonction échelon (fonction de Heaviside). Les deux modélisationssont bien sûr équivalentes.

— la réponse à une sollicitation harmoniqueσ “ σ0eiωt (avec déphasage pos-sible de la réponse). Ce problème est analogue aux régimes permanentssinusoïdaux et aux impédances complexes (notées Z), en électrocinétique,

Z “us

ue

avec l’écriture de la fonction de transfert complexe Hptq, qui n’est riend’autre que la transformée de Fourier de la réponse impulsionnelle hptq.

19. Voir par exemple cet article sur le sang : C. Schmitt, A. Hadj Henni, G. Cloutier G., Characterizationof blood clot viscoelasticity by dynamic ultrasound elastography and modeling of the rheological behavior. J.Biomech.,44(4) 622-9 (2011). DOI : 10.1016/j.jbiomech.2010.11.015.

109

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2. Propagation des ondes dans les solides

On peut calculer la fonction de gain Gpωq (équivalente à un coefficientd’atténuation) et aussi le déphasage Φpωq, ce qui permet aussi de déter-miner le type de filtre : passe-bande, passe-bas, etc, et aussi l’ordre dufiltre (premier ou second). En dessinant σ en fonction de ε, on obtient uneellipse appelée courbe de Lissajous. Plus l’atténuation est grande, et plusl’ellipse est "ouverte". Cette courbe traduit aussi une hystérésis élastique.Lorsque le matériau est non-linéaire, la courbe n’est plus une ellipse. Lasusceptibilité χ “ χ1 ` iχ2 est une autre quantité importante, qui est égaleà l’admittance Y “ Z´1.

2.4.2. Mesure de l’atténuation

L’atténuation d’une onde est mesurée via un coefficient d’atténuation α, qui s’ex-prime en m´1. En pratique, les mesures d’atténuation sont difficiles 20, c’est pour-quoi les valeurs peuvent varier d’une source à l’autre.

Matériau α (m´1) α (dBcm) fréquenceQuartz (z-cut) 207 m´1 9 dB/cm 1.96 GHzPolyéthylène 600 m´1 26 dB/cm 9 MHz

Eau pure 23ˆ10´4 m´1 1ˆ10´4 dB/cm 200 kHzDiamant 36 m´1 1.6 dB/cm 100 MHz

Silice (a-SiO2) 3.6ˆ106 m´1 0.15ˆ106 dB/cm 219 GHz

Table 2.2. – Valeurs d’atténuation dans quelques matériaux typiques, pour diverses fré-quences. À noter, l’atténuation varie fortement avec la fréquence : comme onle verra plus bas, il est possible de normaliser les valeurs d’atténuation pour sup-primer l’effet de la fréquence.

Dans des conditions expérimentales idéales, l’atténuation est obtenue par la for-mule

α “ln pAd1Ad2q

d1 ´ d2

en mesurant la variation d’amplitude de l’onde entre les positions repérées par lesdistances d1 et d2.

20. En effet il faut tenir compte de nombreux autres phénomènes : diffraction, conversion de mode, pertes auxinterfaces, etc. Voir Pollard pages 166-168.

110

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

Cette formule provient de la loi de Beer-Lambert (en amplitude), qui s’écrit

AA0“ e´αx

où A0 est l’amplitude en x “ 0 et A l’amplitude en x ; la variation de l’amplitudeest donc une décroissance exponentielle de la position.Ce type de loi est obtenu lorsque la variation de la quantité est proportionnelle àla quantité elle-même (comme dans le phénomène de désintégration radioactive),à un taux constant qui est justement la constante α :

dApxqdx

“ ´αApxq.

Si l’on raisonne avec l’énergie I, l’intensité du champ est proportionnelle à l’am-plitude du champ au carré, donc

II0“ e´2αx.

Le coefficient d’atténuation s’exprime souvent en dB (décibels) :

αdB “ 10log10

ˆ

II0

˙

αdB “ 20log10

ˆ

AA0

˙

À noter : les facteurs 10 ou 20 devant le logarithme décimal, suivant que l’on utilisel’intensité ou l’amplitude.Le coefficient d’atténuation peut aussi être vu comme l’inverse du libre parcoursmoyen `, si on assimile l’onde à un quantum de vibration (qui est une quasi-particule), est qui est la distance moyenne parcourue entre deux collisions avantd’être stoppé. On aura la relation simple suivante :

α “ `´1.

111

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2. Propagation des ondes dans les solides

Montrons que `´1 “ αPar définition,

` “1

z´ 0

ż z

0e´αxdx

` “1z

e´αx

´α

z

0

` “1´αz

e´αz´ 1

` “ limzÑ8

1´αz

e´αz´ 1

“1α

δ “ 1α est aussi une longueur caractéristique de propagation car l’évolution estexponentielle 21.Dans le cas d’un amortissement faible, le spectre de Fourier de l’amortissementlibre est égal à la largeur en fréquence de la courbe de résonance, qui est égale àl’inverse du temps d’amortissement des oscillations libre 22 :

2π p∆ f qdésexcitation libre “ 2π p∆ f qrésonance “1

τdésexcitation libre.

Dans les solides mis en vibration, on définit un facteur de qualité Q (appelé aussifacteur de mérite) dont l’inverse Q´1 est appelé le frottement interne (internalfriction en anglais).

Q “f0

∆ f

où ∆ f est la largeur spectrale (c’est-à-dire la largeur en fréquence du pic de ré-sonance, en anglais full width at half maximum (FWHM)) de la vibration à unefréquence centrale f0 (fréquence au maximum de la courbe).

α “ 2π∆ fv“

2πλ

Q´1

où v est la vitesse du son et λ la longueur d’onde de l’onde acoustique.

21. De manière générale, une dimension caractéristique x0 peut être obtenue en posant que x0 “ | f pxq f 1pxq|.22. Voir cours de Berkeley.

112

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

2.4.3. Détermination de l’atténuation pour un solide isotropeviscoélastique

On se place dans le cadre du modèle de solide viscoélastique de Kelvin-Voigt,qui offre le modèle le plus simple pour décrire la viscoélasticité d’un solide (voirannexe page 121). La loi de comportement est la suivante :

σi j “ Ci jklεkl ` ηi jklBεkl

Bt. (2.13)

Dans cette formule, un nouveau tenseur d’ordre 4 est introduit : η, appelé le tenseurde viscosité (ou elastic loss constants). Il possède le même nombre de composantesindépendantes que le tenseur C, donc 2 pour un solide viscoélastique isotrope.Les coefficients η11 et η44 sont respectivement associés à l’onde longitudinale et àl’onde transverse, tels que en notation de Voigt

η “

¨

˚

˚

˚

˚

˚

˚

˝

η11 η12 η12 0 0 0η12 η11 η12 0 0 0η12 η11 η11 0 0 00 0 0 η44 0 00 0 0 0 η44 00 0 0 0 0 η44

˛

où η12 “ η11 ´ 2η44.On pose que, pour une onde plane harmonique, se propageant dans la direction desx croissants, et polarisée longitudinalement, upx, tq “ u0eipωt´kxq avec k “ k´ iαL.Donc

B2uBt2 “ piωq

2u

B2uBx2 “ p´ikq2u “ ´pk ´ iαLq

2u

B3uBtBx2 “ piωqp´ikq2u “ ´iωpk ´ iαLq

2u

ρB2uBt2 “ C11

B2uBt2 ` η11

B3uBtBx2

´ρω2“ ´C11pk ´ iαLq

2´ iη11ωpk ´ iαLq

2

113

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2. Propagation des ondes dans les solides

Posons C11 “ ρV2L et τ “ η11C11.

´ρω2“ ´C11pk ´ iαLq

2´ iη11ωpk ´ iαLq

2

´ρ

C11ω2“ ´pk ´ iαLq

2´ i

η11

C11ωpk ´ iαLq

2

ω2V2

L “ pk ´ iαLq2` iωτpk ´ iαLq

2

ω2“ V2

Lpk ´ iαLq2p1` iωτq

On identifie la partie réelle

k2´ α2

L “ω2

V2L

11` ω2τ2

et le module

k2` α2

L “ω2

V2L

1?

1` ω2τ2

Et, en combinant ces deux équations, on en tire

k2“

ω2

2V2L

ˆ

1?

1` ω2τ2`

11` ω2τ2

˙

,

α2L “

ω2

2V2L

ˆ

1?

1` ω2τ2´

11` ω2τ2

˙

.

Ce résultat est visualisé dans la Fig. 2.19.Si le temps de relaxation τ du solide viscoélastique est beaucoup plus petit que lapériode T “ 2πω de l’onde, alors ωτ ! 1 (cas des faibles atténuations) et on peutécrire

p1` ω2τ2q´12

“ 1´12ω2τ2,

p1` ω2τ2q´1“ 1´ ω2τ2.

On en déduit que

α2L »

ω4τ2

4V2L

,

αL “τ

2cω2,

αL “η11

2V3L

ω2.

114

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

On trouve finalement que pour l’onde longitudinale 23

αL “2π2η11

ρV3L

f 2, (2.14)

et pour l’onde transverse

αT “2π2η44

ρV3T

f 2. (2.15)

Il faut mesurer à la fois αL et αT pour déterminer entièrement le tenseur de viscositédans le cas d’un matériau isotrope.Les deux formules ci-dessus montrent que l’atténuation dans les solides variecomme le carré de la fréquence

α “ β f 2

où le coefficient β est un coefficient indépendant de la fréquence, qui permet decomparer l’atténuation des solides obtenues à des fréquences différentes.

Figure 2.19. – Parties réelles et imaginaires de k, soit respectivement le nombre d’onde k et lecoefficient d’atténuation α en fonction de ωτ. Lorsque ωτ ! 1, on constate queα 9 ω2τ2.

Courbes d’atténuation, cas du quartz

Ainsi la loi α “ β f 2 apparaît comme une droite de pente 2 dans un graphique log-log (voir Fig. 2.20). En effet une loi de puissance du type y “ xn avec l’exposant

23. Voir D.Royer, op.cit., pp.189-192.

115

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2. Propagation des ondes dans les solides

Figure 2.20. – Atténuation du son dans le quartz cristallin.

n “ 2 apparaît comme une droite dans un graphique log-log. Plus la fréquencede l’onde est grande, et plus elle est atténuée. Les basses fréquences sont doncmoins atténuées que les hautes. Les murs se comportent comme des filtres passe-bas, ce qui correspond à votre expérience quotidienne : lorsque votre voisin met lamusique à fond, vous n’entendez que les basses fréquences (en considérant que leson ne se propage pas l’atmosphère, car sinon le filtre passe-bas doit être attribuéau phénomène de diffraction). Nous donnons dans la Table 2.3 quelques valeurstypiques.

2.4.4. Origines de l’atténuation

Quels sont les mécanismes microscopiques à l’origine de cette atténuation ? 25

Dans les solides, il existe plusieurs mécanismes d’atténuation du son. Leur im-portance dépend grandement de la fréquence de l’onde ou de la température du

24. D’après Patrick Emery et Arnaud Devos, Acoustic attenuation measurements in transparent materials inthe hypersonic range by picosecond ultrasonics, Appl. Phys. Lett., vol. 89, 191904 (2006). DOI : 10.1063/1.2372745.

25. Voir D. Royer, op. cit., p. 33.

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

Matériau β (nm´1.THz´2)Quartz (z-cut) 1.4 ˆ10´3

Polyéthylène 187.6Eau pure 21Diamant 0.09

AlN* 0.17SiN* 0.26 ˆ10´3

Silice (a-SiO2)* 1.3 ˆ10´3

SiOC* 10 ˆ10´3

Table 2.3. – Ordre de grandeur du coefficient β de la loi α “ βω2 pour quelques matériaux(*) 24. Concernant l’unité : 1 m´1¨ Hz´2 = 1015nm´1¨THz´2.

milieu.L’atténuation totale est la somme des différentes contributions :

αtotal “ÿ

i

αi

Sources extrinsèques d’atténuation

— à la traversée d’une interface entre deux milieux différents, en incidence nor-male ou oblique : coefficient de transmission qui met en jeu les impédancesZ “ ρv. On distingue les coefficients de transmission en amplitude et en éner-gie.

– En amplitude En énergie

En réflexion rac “prpi“

Z2´Z1Z2`Z1

R “ IrIi“ |rac|

2“

´

Z2´Z1Z2`Z1

¯2

En transmission tac “ptpi“

2Z2Z2`Z1

T “ ItIi“

Z1Z2|tac|

2“

4Z1Z2

pZ2`Z1q2

Table 2.4. – Coefficients de réflexion et de transmission, pour une onde plane et en incidencenulle, d’un milieu 1 vers un milieu 2. Z note l’impédance Z “ ρv.

— géométrique : une onde sphérique se propage radialement à partir d’une sourceponctuelle (diffraction).

p91r

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2. Propagation des ondes dans les solides

I91r2

— effets non linéaires : lorsque l’amplitude de l’onde est grande, les surpressionsvoyagent plus vite que les dépressions, et l’onde se déforme jusqu’à créer desondes de chocs.

— échantillon de taille finie

Sources intrinsèques d’atténuation

— Interactions

— phonons-phonons : viscosité de réseau, anharmonicité (Akhiezer).

— électrons-phonons : dans les métaux. Les calculs de Pippard 26 utilisant lemodèle des électrons libres donnent

λ` ! 1 “ą α 9 f 2

λ` " 1 “ą α 9 f

où ` est le libre parcours moyen des électrons.

— viscoélasticité. La viscosité du milieu provoque une conversion de l’énergiede l’onde acoustique en chaleur par frottement interne. L’atténuation dans unliquide due à la viscosité (viscosité dynamique µ) a été donnée par Stokes 27

pour ωτ ! 1

α “8π2µ

3ρV3 f 2

— Relaxations internes : couplage entre l’onde et les mouvements des molécules.Pour un mécanisme de relaxation avec un temps caractéristique τ

α9ωτ

1` ω2τ2

δVV9

11` ω2τ2

26. A.B. Pippard, Ultrasonic Attenuation in Metals. Pil. Mag., 46, no. 381, Oct. 1955, pp. 1104-1114.27. G. Stokes, On the theories of the internal friction in fluids in motion, and of the equilibrium and motion of

elastic solids, Transactions of the Cambridge Philosophical Society, vol.8 , 22, pp. 287-342 (1845).

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

— Diffusion (scattering) par les "défauts" : les défauts peuvent être les grains, lesinhomogénéités du milieu (inclusions, impuretés, fissures), les interfaces, lesanisotropies. La dépendance en fréquence suit une loi de Rayleigh en f 4 (ana-logue à la diffusion de Rayleigh en λ4 et qui explique la couleur bleue du ciel).Si la longueur de l’onde est plus large que la taille du défaut d, l’atténuationest donnée par

α “ Ad3 f 4,

où A est une constante qui dépend de l’anisotropie des grains. Si la longueurd’onde de l’onde est plus petite que d, alors

α “ Bd f 2

où B est une constante.

— Thermoélasticité : l’énergie de l’onde acoustique est tranformée en chaleur àcause des variations de température d’une région à l’autre de l’onde.

— transfert thermique entre les régions dilatées et les régions comprimées del’onde. Le processus de transfert est irréversible est entraîne une atténua-tion de l’onde sonore. L’expression de l’atténuation dans un liquide a étédonnée par Kirchhoff 28 pour ωτ ! 1

α “2π2κβ2TJVC2

Pρf 2

— transfert thermique à travers l’échantillon

— transfert thermique de grain à grain dans les matériaux polycristallins

2.4.5. Annexes

Liste de grandeurs liées à l’atténuation

Nous présentons dans la table 2.5 une liste des grandeurs liées à l’atténuation.Cette liste traduit le fait que l’atténuation est exprimée sous de nombreuses formesdifférentes, et donne les différents liens entre quantités.

27. Voir R.S. Lakes, section 8.8.5, p. 317.28. G. Kirchhoff, Ann. Phys., Lpz. 134, 177 (1868).29. D’après R.S. Lakes, Viscoelastic solids, CRC Press, (1998), Table 3.1, p. 94.

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2. Propagation des ondes dans les solides

Propagation d’ondesNotation Nom de la grandeur Formule(s) Unité Dimension

α coefficient d’atténuation en ampli-tude

α “ ´Im`

, α “ω2v tan δ, αpm´1q “

10 ln 10αpdBcmq,

m´1 L´1

αe coefficient d’atténuation en énergie αe “ 2α m´1 L´1

` libre parcours moyen ` “ α´1 m Ld distance caractéristique d “ α´1 m L

RésonanceNotation Nom de la grandeur Formule(s) Unité Dimension

Q coefficient de qualité élastique, fac-teur de qualité (quality factor)

Q “ 1 tan δ, Q “f0

∆ f

% 1

Q´1 frottement interne (internal fric-tion)

Q´1 “ tan δ % 1

∆ f largeur de pic de résonance (fullwidth at half maximum)

∆ f “ | f2 ´ f | Hz T´1

∆ décrément logarithmique ∆ “ πQ´1 % 1η tenseur des viscosités - Pa.s M.L´1.T´1

τ temps caractéristique (decay time) - s TSollicitation harmonique

Notation Nom de la grandeur Formule(s) Unité Dimension

δ angle de perte (loss angle) tan δ “ImpEq

RepEqrad 1

η facteur de perte (loss factor, losstangent)

η “ tan δ % 1

ψ specific damping capacity ψ “ 2π tan δ % 1

Table 2.5. – Tableau de synthèse des grandeurs liées à l’atténuation, et rappel des principalesformules 29.

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2.4. Atténuation (damping) d’une onde acoustique, effets dissipatifs

Modèles d’atténuation

Dans la table 2.6, nous présentons plusieurs modèles simples de milieux viscoélas-tiques. Chaque modèle est une combinaison de ressorts et d’amortisseurs (ligne 1du tableau), qui représentent un cas intermédiaire entre les cas limites d’un mi-lieu parfaitement élastique (solide hookéen, colonne A) ou parfaitement visqueux(fluide newtonien, colonne B). La loi de comportement (constitutive equation enanglais) est exprimée sous la forme d’une équation différentielle (ligne 2). Il ap-paraît que le modèle de Kelvin-Voigt (colonne D) est analogue au circuit RC enélectrocinétique (qui comporte une résistance et un condensateur en série, et quiforme un filtre passe-bas analogique).Une évaluation grossière de l’atténuation (ligne 9) est donnée à travers la for-mule 30

α »ω

2ctan δ. (2.16)

En comparant les différents modèles, nous pouvons voir que la dépendance de l’at-ténuation avec la fréquence dépend fortement du modèle employé. Dans un solideparfaitement élastique, l’atténuation est nulle, comme attendu (case A9). Atten-tion, l’atténuation dépend aussi de la polarisation, de la direction de propagation,de la température, de la pression, etc.Dans le modèle de Maxwell, l’atténuation ne varie pas avec la fréquence (caseC9), ce qui ne correspond pas au comportement réel du quartz par exemple (voirFig. 2.20). Le modèle minimal pour décrire l’atténuation comme une loi en ω2 estle modèle de Kelvin-Voigt : l’expression de α (case D9) est à comparer avec lecalcul complet donné dans la section 2.4.3.Le modèle de Zener, aussi appelé solide linéaire standard (colonne E), combinecertains aspects des modèles de Maxwell et de Kelvin-Voigt : le fluage-recouvrance(creep-recovery) (échelon de contrainte et réponse en déformation, case D4) et larelaxation-effacement (échelon de déformation et réponse en contrainte, case C5).L’atténuation pour le modèle de Zener (case E9) est équivalente à une relaxationde Debye. La relaxation de Debye est la réponse (relaxation diélectrique) d’une po-pulation de dipôles qui ne sont pas en interaction à un champ électrique alternatifexterne. La constante de relaxation τ (ligne 3) définit une fréquence de changementde régime (crossover en anglais) : lorsque ωτ ! 1, on retrouve l’atténuation en ω2

tandis que lorsque ωτ " 1 l’atténuation est constante. MR est le module relaxé,tandis que MU est le module non-relaxé (unrelaxed en anglais).

30. Voir R.S. Lakes, formule 3.7.12, page 92.31. D’après H.F. Pollard, Sound waves in solids, Pion limited (1977), p.208.

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2. Propagation des ondes dans les solides

– – A B C D E– Modèle Hooke Newton Maxwell Kelvin-Voigt Zener (solide li-

néaire standard)

1 Modèlemécaniqueéquivalent(schéma)

2 Loi de com-portement(constitutiveequation)

σ “ Eε σ “ η 9ε 9σE `

ση“ 9ε σ “ Eε ` η 9ε a1σ ` a2 9σ “

b1ε ` b2 9ε

3 τ 0 8η

E τ1 “a2a1

; τ2 “b2b1

4 σ0Hptq; εptq “ σ0E

σ0η

t ` ε0σ0η

t ` ε0σ0E

`

1´ e´tτ˘

σ0MR

` pε0 ´σ0MRqe´tτ2

5 ε0Hptq;σptq “ Eε0 0 σ0e´tτ Eε0 MRε0 ` pσ0 ´

MRε0qe´tτ1

6 E1 E 0 E ω2τ2

1`ω2τ2 E MR1`ω2τ1τ21`ω2τ2

1

7 E2 0 iηω E ωτ1`ω2τ2 ηω MR

ωpτ2´τ1q

1`ω2τ21

8 tan δ 0 8 1ωτ

τω MU´MRMmoyen

ωτ1`ω2τ2

9 α 0 8 12cτ

E2cητ

2ω2 MU´MR?MU MR

E2cη

ω2τ2

1`ω2τ2

Table 2.6. – Modèles visco-élastiques et quantités dérivées 31.

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A. Annexes mathématiques

A.1. Algèbre tensorielle

Un tenseur est une quantité physique intrinsèque qui ne dépend pas de la basechoisie, et dont les composantes s’expriment différemment lors d’un changementde base orthonormée, suivant une règle précise.Dans le cas où la base est orthonormée (c’est le cas en mécanique des milieuxcontinus), on ne distingue pas les indices covariants des indices contravariants.Un tenseur mixte est un tenseur comportant des indices covariants et contrava-riants.Un tenseur d’ordre 2 est représenté par une matrice (3ˆ3), mais n’est pas unematrice. Tous les tenseurs d’ordre 2 ne sont pas représentés par une matrice carrée,par exemple le tenseur piézoélectrique (3 ˆ 6).

Convention de l’indice muet (convention d’Einstein)

Quand un indice apparaît deux fois, on somme sur toutes les valeurs que peutprendre cet indice qui est appelé indice muet (autrement c’est un indice libre, oufranc).

~A “ A1Ñe1 ` A2

Ñe2 ` A3Ñe3 “ Ap

Ñep .

Exemples simples :— pour un vecteur ~v “ v1

Ñe1 ` v2Ñe2 ` v3

Ñe3 “ vpÑep ,

— avec le produit scalaire (dot product) ~A ¨ ~B “ ApBp.Dans le cas où on ne souhaite pas faire la sommation sur un indice répété, onsouligne l’indice 1. Exemple :

δii “ 3 mais δii “ 1.

1. Voir J. Coirier et C. Nadot-Martin, Mécanique des milieux continus, 3e éd., Dunod, Paris, 2007, page405.

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A. Annexes mathématiques

Pseudo-tenseur de Kronecker δ

δi j “ 1 si i “ j, 0 autrement.

Pseudo-tenseur de Levi-Civita ε

Ou tenseur de permutation.

ε123 “ ε231 “ ε312 “ 1

ε132 “ ε321 “ ε213 “ ´1

Et 0 dans tous les autres cas.

Application linéaire

L’application linéaire qui à un T d’ordre p fait correspondre un tenseur d’ordre qest un tenseur d’ordre p ` q. Exemple : Yi “ Ti jX j, T est un tenseur d’ordre 2 quifait correspondre à un tenseur d’ordre 1 un autre tenseur d’ordre 1.

La trace

C’est la somme des éléments diagonaux du tenseur.

TrpAq “ A11 ` A22 ` A33 “ Aii

Invariants d’un tenseur

Il en existe trois, dont la trace et le déterminant.

Tenseur symétrique et antisymétrique

Le tenseur ¯A est symétrique si Ai j “ A ji et on note

¯A “T ¯A.

Le tenseur ¯A est antisymétrique si Ai j “ ´A ji et on note

¯A “ ´T ¯A.

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A.1. Algèbre tensorielle

Dans ce cas, cela n’est possible que si ii “ 0.Un tenseur d’ordre 2 est décomposable de manière unique en la somme d’un ten-seur symétrique et d’un tenseur antisymétrique.

Ai j “12pAi j ` A jiq `

12pAi j ´ A jiq

Sphérique et déviateur

Le tenseur T peut être décomposé en une partie sphérique s et une partie déviato-rique d telles que

Ti j “ si j ` di j

avecsi j “

13

TrpT qδi j

etdi j “ Ti j ´

13

TrpT qδi j.

Par définition, le déviateur d est un tenseur symétrique de trace nulle.

Sommes

Dans une équation, tous les termes doivent être de même nature : scalaire, vecteurou tenseur. Ainsi, on écrira :

a “ b` c,

~x “ ~y`~z,¯A “ ¯B` ¯C.

Rappelons que dans une somme tous les monômes ont la même dimension :

ras “ rbs “ rcs,

r~xs “ r~ys “ r~zs,

r ¯As “ r ¯Bs “ r ¯Cs.

On peut aussi multiplier un tenseur par un scalaire k

¯A “ k ¯B.

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A. Annexes mathématiques

A.2. Algèbe matricielle

A.2.1. Diagonalisation

Soit M une matrice d’ordre n diagonalisable. Une matrice symétrique réelle estdiagonalisable.Les valeurs propres λ sont telles que

detpM ´ λInq “ 0 (A.1)

Ce qui donne un polynôme de degré n en λ, soit n valeurs λ. Les valeurs propressont les éléments diagonaux de la matrice M diagonalisée. Les valeurs propresd’une matrice symétrique réelle sont toutes réelles.Le calcul des n vecteurs propres ~vn s’obtient par :

pM ´ λpnqIq~vn“ ~0 (A.2)

Les vecteurs propres forment une base (une famille de vecteurs libre et généra-trice). Les vecteurs propres d’une matrice réelle symétrique sont orthogonaux.

A.3. Analyse vectorielle

Les opérateurs vectoriels bien connus (divergence, gradient, rotationnel, laplacien)peuvent être appliqués aussi bien à des vecteurs qu’à des tenseurs.On peut montrer que tout champ vectoriel est décomposable en 2

— un champ de translation.

— un champ de rotation.

— un champ de divergence horizontale.

— un champ de déformation

Solutions des QCM

Solutions du QCM page 30 : 1.b), 2.b), 3.b), 4.d), 5.d), 6.a), 7.c).Solutions du QCM page 45 : 1.d), 2.d), 3.d), 4.c), 5.c), 6.b).

2. Robert Picca, Bull. Un. Phys., février 1981, no 631, p. 667-672.

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A.3. Analyse vectorielle

Solutions du QCM page 67 : 1.b), 2.d), 3.b), 4.b), 5.a), 6.b), 7.a), 8.b), 9.c), 10.c),11.c), 12.b), 13.c).Solutions du QCM page 91 : 1.b), 2.d), 3.c), 4.c), 5.c).Solutions du QCM page 105 : 1.c), 2.b), 3.c), 4.b), 5.c), 6.c), 7.a).

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