Fausses Attributions en Hagiographie Copte

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    FAUSSES ATTRIBUTIONS EN HAGIOGRAPHIE COPTE

    Sont regroupés sous ce titre trois brefs articles qui ont ceci de com-mun, qu’ils rétablissent la vraie identité de textes copto-arabes ayant faitl’objet d’identifications erronées.

    A. Du Pseudo-Denys l’Aréopagite

    au Pseudo-Jean Chrysostome

    En éditant, dès 1793, le feuillet copte qui formera plus tard le no 248*du monumental Catalogue du Danois Zoega1, le pionnier dans l’étudedes manuscrits sahidiques que fut le Père augustin Giorgi2 croyait y re-connaître une œuvre de Denys l’Aréopagite, qui n’était pas encore ra-baissé au rang de pseudonyme, l’authenticité de ses écrits n’étant vrai-ment remise en question qu’au siècle suivant:

    Cui auctori totum hoc Fragmentum tribuam, invenire hucusque nonpotui… Quaedam tamen in eo vestigia sunt, quae mihi stilum et ingenium

     Dionysii Areopagitae indicare queant…3

    Zoega lui-même, qui se montrait en général plus circonspect, repre-nait à son compte l’attribution de Giorgi, moins l’authenticité, et parlaitsans ambages de «Fragmentum tractatus Pseudo-Dionysii Areopagitaede sacris canticis».

    Cette attribution, qui ne reposait sur aucune base manuscrite ni sur aucun critère objectif, a été entérinée, en quelque sorte, par un auteur contemporain4. En cataloguant deux fragments coptes de la BritishLibrary, cotés Or.6954(50)(51), que l’écriture très caractéristique ratta-che au codex dont Zoega 248* est un autre représentant, B. Layton attri-

    bue le fragment (1) à une «Homily on the Miracles of St. StephenProtomartyr», sur laquelle nous allons revenir, et le fragment (2) à une«Homily on the Four Bodiless Beasts», non sans avoir prévenu le lec-teur que le manuscrit d’où proviennent ces fragments et dont le

    1  G. ZOEGA, Catalogus codicum Copticorum manu scriptorum qui in Museo BorgianoVelitris adservantur , Romae, 1810, p. 606 (= ZOEGA, Catalogus).

    2  A.A. GEORGIUS  (GIORGI),  De miraculis sancti Coluthi et reliquiis actorum sancti Panesniv martyrum Thebaica fragmenta duo…, Romae, 1793, p. 170-174.

    3  Ibid., p. 174, n. 7.4  B. LAYTON, Catalogue of Coptic Literary Manuscripts in the British Library

     Acquired Since the Year 1906 , Londres, 1980, no 156, p. 183-185 (= LAYTON, Catalogue).

     Le Muséon 119 (3-4), 243-254. doi: 10.2143/MUS.119.3.2017947 - Tous droits réservés© Le Muséon, 2006.

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    catalogueur s’efforce de rassembler les membra disiecta, contenait, entreautres, une homélie «on the Four Bodiless Beasts by Pseudo-DionysiusAreopagiticus [sic] (Z 248*)»5.

    Le fragment de Giorgi appartient certes à une homélie sur les QuatreAnimaux Incorporels, si ce n’est que l’auteur présumé n’est pas Denysl’Aréopagite, mais bien Jean Chrysostome. En effet, le texte de Zoega248* recoupe textuellement un passage d’une homélie sur les QuatreAnimaux ou Quatre Vivants de l’Apocalypse, qu’un codex de la Pier-pont Morgan Library de New York (M 612) attribue expressément àJean Chrysostome.

    Cette homélie était encore inédite au moment de la confection du Ca-

    talogue de B. Layton, ce qui explique peut-être l’aval donné par ce der-nier à une attribution plus que suspecte. Elle a été publiée seulement en1991 par Craig S. Wansink dans un ouvrage collectif sous la direction deLeo Depuydt5.

    5  AA. VV. (L. DEPUYDT, General Editor),  Homiletica from the Pierpont Morgan Library (Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 524-525; Copt. 43-44), Louvain,

    1992 (= WANSINK, Homiletica). L’ Encomium on the Four Bodiless Living Creatures se litp. 27-55, pour le texte, et p. 27-47, pour la traduction. Le parallèle textuel court de lap. 39, l. 18, à la p. 40, l. 27. L’éditeur semble ignorer la (ou les) version(s) arabe(s) decette homélie pseudo-chrysostomienne (à lire le 8 Hatur, jour de la commémoration desQuatre Animaux Incorporels d’après le Synaxaire), dont l’édition — selon une recension

    fortement remaniée — (aux dépens) de MORQOS GUIRGUIS, Kit ab at-ta‘azi  ar-r uÌiyyah f i al-mayamir as-sayydiyyah, Le Caire, 1926, p. 67-81 (à noter que les p. 76 et 77 sont inter-verties), est dûment répertoriée dans la Geschichte der christlichen arabischen Literatur de G. GRAF, t. 1, Cité du Vatican, 1944, p. 545. Une première édition avait vu le jour sousle même titre, mais sous d’autres noms, en 1902 (notre homélie s’y lit p. 48-56).

    Malgré ce que laisse entendre GRAF, Catalogue des manuscrits arabes chrétiensconservés au Caire, Cité du Vatican, 1934,  passim (cf. spéc. p. 9,sub 23/1) — détail quin’a pas été repris dans la Geschichte, mais a été répercuté par C.D.G. MÜLLER,  Die

     Engellehre der koptischen Kirche, Wiesbaden, 1959, nos 185-186, p. 270-271 —, il estpour le moins douteux qu’il ait existé deux homélies sur le même sujet, toutes deux attri-buées au Chrysostome (ce qui n’est pas en soi impossible, puisque par exemple plusd’une homélie sur la Passion est attribuée en copte à Cyrille de Jérusalem). Il doit vrai-semblablement s’agir de recensions indépendantes, remontant en principe au copte. Mal-

    heureusement, il ne nous a pas été donné de procéder à des vérifications, car les manus-crits cités par Graf sont gardés jalousement sous clef par les responsables.Il est intéressant de constater que cette homélie est également attestée en vieux-nubien,

    cf. G.M. BROWNE,  An Old Nubian Version of Ps.-Chrysostom, In quatuor animalia, in Altorientalische Forschungen, 15 (1988), p. 215-219. Si l’on en croit le même Browne,un sermon  In Quattuor Animalia, attribué à Cyrille de Jérusalem, serait aussi attesté envieux-nubien, cf. ID., Old Nubian Texts from QaÒr Ibr i m II , London, 1989, p. 22-25, maissi l’on se reporte au texte arabe parallèle reproduit dans Sudan Texts Bulletin, 7 (l985),p. 14-19, il s’agit sans contredit d’une homélie en l’honneur des XXIV Vieillards del’Apocalypse (voir  Analecta Bollandiana, 117 [1999], p. 289-290); cf., en dernier lieu,ID., Literary Texts in Old Nubian ( Beiträge zur Sudanforschung, Beiheft 5), Wien, 1989,respectivement p. 78-79 et 68-69.

    Pour la tradition éthiopienne de la même homélie en double recension (conformémentaux modèles copto-arabes), voir G. LUSINI,  Appunti sulla patristica greca di tradizione

    etiopica, in Studi classici e orientali, 38 (1988), p. 469-493, ici 487-488.

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    Grace au témoin parallèle new yorkais, on sait maintenant que le frag-ment (2) de Layton, qui a perdu sa pagination, — ainsi qu’un fragmentparisien qui s’y rattache par sa teneur 6, mais pour lequel nous n’avonspas trouvé de parallèle formel dans le  Morganianus, — appartient aussià l’homélie du Ps.-Chrysostome —, quoique pour ce témoin du Monas-tère Blanc nous ayons affaire à une recension passablement divergente,une divergence, celle-ci, qui se reflète jusque dans les versions arabes etethiopiennes, — et conserve le passage, non loin du début, où «Thenarrator, speaking to a congregation of his ‘beloved children’, recounts avoyage to Jerusalem where he obtained forgiveness of sins by prayingbefore the altar of the God of the Four Beasts… Thereafter he returned

    to Antioch and went into solitude (ânaxÉrjsiv)»7. Or, ce narrateur fic-tif était aisément identifiable, indépendamment de tout parallèle textuel,avec Jean Chrysostome, qui, avant sa charge pastorale, mena une vied’anachorète dans les solitudes antiochiennes, encore que Sévère d’An-tioche, à qui toutefois l’on ne connaît aucune homélie sur le sujet, ni encopte ni en arabe, ait eu le même parcours un siècle plus tard.

    Compte tenu du fait que le feuillet de Giorgi, actuellement conservé àla Biblioteca Nazionale de Naples sous le numéro d’inventaire «I.B. 11,fascicolo 424», est paginé 29-30 et qu’il correspond aux pages 30-31 ducodex de New York, qui contenait, semble-t-il, «only one work» recou-

    vrant en tout 23 folios8, il s’ensuit, jusqu’à preuve du contraire, que lecodex représenté par Zoega 248* débutait également par l’homélie sur les Quatre Animaux, revendiquant sans doute la même attribution à JeanChrysostome. Mais là s’arrête l’analogie.

    L’homélie sur les miracles de S. Etienne Protomartyr, attestée par plu-sieurs fragments, outre celui de Londres, et qui était attribuée à un évê-que de Jérusalem, dont le nom en lacune se laisse néanmoins facilementdeviner, suivait probablement dans le codex notre homélie pseudo-chrysostomienne, mais était elle-même précédée d’un Apocryphe ano-

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     Signalons à toutes fins utiles que la même main a copié en pleine page, alors quenotre codex est écrit sur deux colonnes, Le Grand Euchologe du Monastère Blanc (éd. ettrad. E. LANNE, in  PO 28/2, Paris, l958), auquel un fragment inédit (Paris 1323, f. 221)semble devoir se rattacher. On trouvera des spécimens d’écriture apud   GEORGIUM(GIORGI),  Fragmentum Evangelii S. Iohannis, Romae, 1789, tab. III (ad pag. 304), ainsique dans l’ Album de paléographie copte d’HYVERNAT, Paris, 1888, pl. XII/2.

    7  LAYTON, Catalogue, p. 184. Parallèle chez WANSINK, Homiletica, p. 31-32 (texte) et32 (trad.).

    8  Voir L. DEPUYDT, Catalogue of Coptic Manuscripts In the Pierpont Morgan Library(Corpus of Illuminated Manuscripts 4, Oriental Series, 1), Louvain, 1993, no 96, p. 185-187. Les folios 1 à 6 (p. 33-44) de Berlin P. 11965 sont complémentaires des folios 1 à 17(p. 1-32) de M 612, qui se présente donc mutilé de la fin (il semblerait que le codex, com-portant trois quaternions à peine, ait été partagé à la vente). Il s’agissait en somme d’uncodex mince — des cas similaires ne manquent pas —, même si, comme on a pu le sug-

    gérer, il formait à l’origine un tout avec M 611 (= no 171 duCatalogue).

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    nyme sur le même S. Étienne, qui venait s’intercaler entre les deux etdont nous aurons à reparler au point B. Si les deux pièces relatives auProtomartyr sont en parfait accord thématique, le lien entre celles-ci et letexte sur les Quatre Animaux nous échappe totalement, en dehors du faitque la ville de Jérusalem est toujours désignée comme le théâtre desévénements, en tant que celle qui vantait à la fois le Martyrium deS. Étienne et, sur la foi de l’homélie en leur honneur, le Topos des Qua-tre Animaux. Hormis ce trait-d’union géographique, se pourrait-il, sansaller jusqu’à parler de cycle, que dans la vision extatique, racontée dansles Miracles de S. Étienne, et dont fut gratifié un moine (litt. un «frère»)de l’archimandrite Isaïe, la «grande fête d’ajourd’hui», que Jean l’Évan-

    géliste et Étienne l’Archidiacre en personnes commémorent au ciel encélébrant une messe ( prosphora) solennelle, et sur la mention de laquelles’interrompt brusquement l’un des fragments, soit précisément celle desQuatre Animaux? Mais nous glissons dans le champ des hypothèses, etil ne faut pas chercher à tout prix une unité interne entre ces trois piècesdont le côtoiement dans le codex était peut-être fortuit, la Vie et les Mi-racles de S. Étienne tranchant a priori avec les Quatre Vivants.

    En tout état de cause, cette même homélie sur les Quatre Animaux duPs.-Chrysostome, toutes recensions confondues, est attestée (fragmentai-rement s’entend) dans non moins de trois codices issus du Monastère

    Blanc — ce qui prouve sa large diffusion —, représentés respectivementpar Oxford, Clar. Press b. 4, fr. 25 (texte primitif, s’agissant d’un pa-limpseste)9, Musée du Louvre E. 1008910 et Paris 1317, f. 5811, qui estaussi le plus tardif et sur lequel nous aurons l’occasion de revenir dansune étude d’onomastique angélique. Sans oublier les trois fragments enparchemin formant un seul et même folio, qui furent découverts à As-souan et reposent aujourd’hui au Musée Copte du Caire, jadis édités par H. Munier 12 et récemment identifiés et réédités par B.A. Pearson13, non

    9  Cf. Arn. VAN  LANTSCHOOT,  Les textes palimpsestes de B. M., Or. 8802, in  Le

     Muséon, 41 (1928), p. 225-247, ici p. 225, n. 1 (sur une information de W. E. Crum).10  Cf. A. BOUD’HORS,  Le catalogue des textes coptes du Louvre, in  Akten des 6. Internationalen Koptologenkongresses Münster , Bd. 2 (Sprachen und Kulturen deschristlichen Orients, 6/2), Wiesbaden, 1999, p. 257-267, ici 261.

    11 Parallèle chez WANSINK, Homiletica, p. 35 (texte) et 35 (trad.). Au même codex et,éventuellement, à la même pièce, pourraient bien avoir appartenu Paris 1324, 357 et LeCaire (Cat. Crum) 8098 (paginé 17[-18]).

    12  Annales du Service des antiquités de l’Égypte, 23 (1923), p. 212-215.13 The Munier Enoch Fragments, Revisited , in H.-G. BETHGE et al.  (ed.), For the

    Children, Perfect Instruction. Studies in Honor of Hans-Martin Schenke…  ( Nag Hammadi and Manichaean Studies, 54), Leiden-Boston, 2002, p. 375-383. Nous diffé-rons cependant de l’auteur lorsqu’il affirme (p. 376-377), en s’appuyant sur T. Orlandi(cf. n. 10), que «The homily on the four living creatures … was composed in Coptic noearlier than the midsixth century». Si, comme nous pensons, le grec était la langue origi-

    nale, la date de composition, qui obéit à ce critère, sera déterminée en conséquence.

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    plus que les «Two folio parchment pages containing the beginning of ahomily on the Four Living Creatures by St John Chrysostom»14, — maisailleurs on parle de «four pages of a Coptic version of John Chry-sostom’s Homily on the Four Living Beasts»15. Ce dernier fragmentcopte, de même provenance nubienne (Qasr Ibrim) que celui publié par Browne (cf. supra, n. 5), serait lui aussi déposé au Musée Copte16 (nonvidimus, n’étant pas au nombre des privilégiés qui y sont admis). Ilapparaît donc que ces êtres immatériels étaient particulièrement vénérésen Nubie, puisque avec Assouan nous sommes déjà dans l’aire nubienne.

    Ainsi aura finalement été éclaircie une énigme dans l’énigme duPseudo-Denys l’Aréopagite, à savoir une attribution manifestement sans

    fondement, qui, Dieu merci! n’avait pas encore contaminé les répertoi-res bibliographiques et autres Claves.

    B. D’une Vie de moine à un Apocryphesur Étienne le Protomartyr 

    Au no XII des «Fragments divers de Vies de moines» en appendice àses  Monuments, Amélineau publiait et traduisait, avec sa négligencecoutumière, le Paris, BnF, Copte 12913, f° 6817.

    Il est fort probable que si l’éditeur avait rapproché, du point de vuecodicologique, ce fragment de celui (Borgia 122 = Zoega 12218) que I.Guidi avait publié une dizaine d’années auparavant dans ses Frammenticopti19, il ne l’aurait pas attribué à une Vie de moine.

    Car ce fragment parisien relève à n’en pas douter d’un curieux apo-cryphe copte relatif à Étienne le Protomartyr ( BHO 1086), inconnu pasailleurs. Le texte conservé dans le Parisinus, de même que celui du Bor-gia 122, se lit en effet parallèlement dans un manuscrit complet de la

    14  J. M. PLUMLEY, The Christian Period at Qasr Ibrim. Some Notes on the MSS Finds,in  Nubia. Récentes recherches ( Actes du Colloque nubiologique international au Musée

     National de Varsovie 19-22 juin 1972, sous la rédaction de K. MICHA™OWSKI), Varsovie,1975, p. 101-107, ici 103, n. 7.15  W.H.C. FREND – G. DRAGAS – S. KONTOYIANNIS, Some Further Greek Liturgical

     Fragments from Q’asr Ibrim, in Jahrbuch für Antike und Christentum, 35 (1992), p. 119-134, ici 133, n. 40.

    16  Cf. D.V. PROVERBIO, La recensione etiopica dell’omelia pseudocrisostomica de ficuexarata ed il suo tréfondsorientale ( Aethiopistische Forschungen, 50), Wiesbaden, 1998,p. 75, sub 20.

    17  É. AMÉLINEAU,  Monuments pour servir à l’histoire de l’Égypte chrétienne aux  IV e,V e, VI e et VII e siècles, 2e fascicule en pagination continue ( Mémoires publiés par les mem-bres de la Mission archéologique française au Caire, IV/2), Paris, 1895, p. 825-826.

    18  ZOEGA, Catalogus, p. 227-228.19  In Atti della Reale Accademia dei Lincei, IVe  série. Rendiconti, vol. 3, fasc. 2,

    Rome, 1887, p. 47-52. Contrairement à ce qu’affirme G. ARANDA  PÉREZ  (in Coptic

     Encyclopedia, t. 7, p. 2153-2154), il n’existe aucune traduction italienne du même Guidi.

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    Pierpont Morgan Library (M 577)20, ce que, bien entendu, ni Guidi niAmélineau n’étaient en mesure de savoir.

    Le feuillet parisien, qui se rapporte à l’anecdote des trois larrons con-vertis par S. Étienne, a malheureusement perdu sa pagination, toutcomme d’ailleurs les deux folios de Zoega, qu’il précédait à deux pagesd’intervalle. En revanche, la même main (nous parlons par précaution dela même écriture plutôt que du même codex, bien qu’il s’agisse d’apo-cryphes dans les deux cas) a copié le  Protévangile de Jacques, dont unfolio fragmentaire, le Paris 12918, f. 122 (pagination disparue), a été pour la première fois identifié et édité par nos propres soins21.

    Cependant, la méprise d’Amélineau, si elle ne peut avoir d’excuse,

    trouve peut-être son explication dans le fait que dans le même volumeparisien 12913, le fol. 16 (paginé 129-130; inédit)22, relevant égalementde la même main, sinon du même codex, appartient, lui, bel et bien à uneVie de moine, plus exactement à la Vie d’Onuphre (Ouanobre dans letexte), qui, comme on le sait, est liée à l’Histoire de moines racontée par Paphnoute (parallèle textuel dans Morgan 580, f. 16). Au même codexou, en dernier ressort, à la même main que les  Parisini et le Borgianus,paraissent ressortir plusieurs autres fragments, notamment à Paris et àVienne, tous inédits, sur lesquels nous ne manquerons pas de revenir.

    20  Éd. et trad. par YASSA  ‘ABD AL-MASSIÎ,  A Coptic Apocryphon of Stephen the Archdeacon, in  Le Muséon, 70 (1957), p. 329-247 (= no 172 duCatalogue de DEPUYDT[cité supra, n. 5], p. 353-356). Le passage parallèle se lit p. 339-340 de l’édition. Par souci d’équité, il convient de rappeler que l’identification proprement dite du texte publiépar Guidi (= YASSA  ‘ABD AL-MASSIÎ, p. 341-344) revient au Qommos  Jacob Muyser,missionnaire doublé d’un savant (cf. ibid., p. 329). Selon nos calculs, un feuillet à peineséparait dans le codex d’origine les deux folios de Guidi de celui d’Amélineau.

    Le titre copte, qui se présente sous forme anonyme, de M 577, est ainsi libellé: nainenepoliteia mp#agios mmarturos mpeXS stefanos parxydiakonosauw pjorpmmarturos («Voici les Actes [ou Gestes] (gr. polite⁄a) du saint mar-tyr du Christ Étienne l’Archidiacre et le Protomartyr»), ce qui en fait un apocryphe strictosensu.

    En publiant, d’après trois témoins,  An Arabic Apocryphon of Saint Stephen the

     Archdeacon  (avec une traduction anglaise posthume du même Yassa  ‘Abd al-Mass i Ì),dans SOC Collectanea, 13 (1968-1969), p. 161-198, ANTOINE  KHATER  (suivi par laCANT , nos 300-301) laisse accroire, déjà par le choix du titre, qu’il s’agit de la versionarabe du texte copte édité dans  Le Muséon. Or il n’en est rien, et nous sommes bien enprésence de deux textes entièrement différents. Par contre, la collation sur un quatrièmetémoin (qui se distingue par son antiquité et son écriture soignée), appartenant à une col-lection privée à laquelle nous avons librement accès, a fait apparaître la bonne tenue del’édition, malgré quelques broutilles, ainsi que que la stabilité de la tradition.

    21  E. LUCCHESI,  Martyre de Zacharie et Protévangile de Jacques, in Le Muséon, 101(1988), p. 65-76.

    22  Cf. A. BOUD’HORS,  Avatars d’une petite pêche dans les textes coptes, in  ÉtudesCoptes V (Cahiers de la Bibliothèque Copte, 10), Paris – Louvain, 1998, p. 123-128, ici125.

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    Il semblerait donc que cet Apocryphe sur saint Étienne était, dans cenouveau témoin, dissocié de l’Homélie sur les miracles accomplis dansle Topos du saint, que nous évoquions au point A et qui est identique àl’enkomion copte sur Étienne le Protomartyr  ( BHO 1093), qui a déjà faitl’objet d’une note de notre part, parue voici longtemps23, en réaction àune publication de J. Horst.

    Puisqu’il est question de S. Étienne et de son enkomion copte, nousnous faisons un plaisir de renvoyer à une contribution toute récente deFrançois BOVON, The dossier on Stephen, the First Martyr , in  Harvard Theological Review, 96 (2003), p. 279-315, spéc. p. 306-307 pour letexte de l’enkomiom, non sans faire remarquer au passage que ce volu-

    mineux dossier, tout méritoire qu’il est (avouerai-je que sa lecture a«déclenché» la présente mise au point?), n’est pas ce qu’on pourraitsouhaiter de mieux, notamment en ce qui concerne la tradition copto-arabo-éthiopienne, laquelle présuppose comme toujours un substrat grec.Nous avons du mal à comprendre, par exemple, l’argumentation deM. Bovon: «Further research will determinate whether they [i.e.  thefragments] belong to the same text, an encomium  of Philip [sic], or whether they derive from different version of the same story», la sé-quence des fragments étant bien établie. Il est vrai que la description desfragments conservés, ou plutôt connus, eût été moins embrouillée si

    l’auteur (ou son informatrice) s’était aperçu que le premier feuillet deMunier, dont recto et verso ont été indûment inversés, se situe en réalitéaprès le troisième de la série, et surtout s’il avait subodoré l’identité del’évêque de Jérusalem en question. Nous aurons sans doute l’occasion dereprendre ce délicat dossier, auquel nous espérons pouvoir verser denouvelles pièces.

    C. D’un Panégyrique de Sévère d’Antiocheà une Vie de Macrobe de Tkoou

    Dans son Inventaire sommaire des Mss. arabes d’Égypt e24 — manus-crits que Mgr Louis-Théophile Lefort avait acquis au cours d’un voyageen Égypte et dont il avait fait don à la Bibliothèque de l’Université deLouvain —, le chan. Arnold Van Lantschoot décrivait25 comme un «Pa-négyrique de Sévère d’Antioche» le manuscrit fragmentaire «Lefort,arabe no A 10», dix folios en papier (1er  et 5e mutilés), avec 14 lignes à

    23  Analecta Bollandiana, 101 (1983), p. 421-422.24  Le Muséon, 48 (1935), p. 297-310.25  Ibid., p. 306-307

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    la page, qu’il datait du XVe-XVIe siècle et dont il restituait la numérotationcopte: [IY]-KA, [KÅ]-[LA]. Apparemment donc, l’érudit belge n’avaitrelevé aucune solution de continuité.

    Tout en indiquant comme il se devait l’incipit  et ledesinit , il précisaitque «Fol. 8vo, l. ult. — fol. 9vo fin présentent l’épisode de la messe inter-rompue»26. Et en note 14, à propos du desinit , il ajoutait: «Sévères’adresse ici à Macrobe (pK*« s«) qui, d’après le récit, était venu deQaw à Siu† pour lui rendre visite. — Les éléments nous ont manqué pour identifier l’auteur de ce panégyrique. Afin de permettre au lecteur de serenseigner davantage, voici le nom de quelques personnages cités dansces fragments: le duc Dorothée de SaÌa,

    fu U«, évêque de la ville de

    [ ], «œUB« U«, rOËd« U«, vu U« de la montagne d’œu«, l’impératriceThéodora, l’empereur ”uUODu (chaque fois corrigé de”uOUD«).»

    Or, si l’un ou l’autre de ces feuillets, ceux notamment où il est ques-tion du duc Dorothée de SaÌa, de l’impératrice Théodora et de l’empe-reur Justinien27, a fortiori ceux (8e et 9e) qui ont trait à l’épisode de lamesse interrompue28, étaient effectivement susceptibles de se rapporter àune Vie ou à un Panégyrique de Sévère, en revanche les autres apparte-naient — puisqu’on est condamné de parler au passé — indubitablementau tout début de la Vie de Macrobe de Tkoou, le fol. 1 r° portant encore,aux dires de Van Lantschoot, des traces d’encre rouge du titre rubriqué

    sur la page en regard. C’est en tout cas au texte arabe de cette Vie quecorrespondent mot pour mot l’incipit  et ledesinit  tels qu’ils sont donnéspar Van Lantschoot29.

    26  C’est bien à cet épisode qu’il pensait en renvoyant à J. FORGET, Synaxarium Alexandrinum, t. I (CSCO 47,Script.Ar. 18), Beyrouth, 1905, p.¥∏, l. 18 — p. ¥π, l. 10,ainsi qu’à J. MASPERO,  Histoire des Patriarches d’Alexandrie  ( Bibliothèque de l’Écoledes Hautes-Études, 237), Paris, 1923, p. 87.

    27  La même corruption du nom de Justinien (”uUOD) en celui d’Anastase (”uOUD)se rencontre par ex. dans la version éthiopienne de la Vie de Sévère d’Antioche attribuéeà Athanase d’Antioche, cf. YOUHANNA  NESSIM  YOUSSEF,  An Arabic Life of Severus of 

     Antioch Attributed to Athanasius of Antioch, in Patrologia Orientalis, t. 49, fasc. 4, Turn-hout, 2004, introd., p. 378.

    28  Sur cet épisode, voir maintenant H. BRAKMANN,  Hagiographie im Dienst hierar-chischer Ambitionen. Eine ägyptische Wundererzählung im Umfeld der Vita BHO  1062des Severus von Antiochien, in U. ZANETTI  et E. LUCCHESI  (ed.), Aegyptus Christiana.

     Mélanges d’hagiographie égyptienne et orientale dédiés à la mémoire du P. Paul Devos Bollandiste (Cahiers d’Orientalisme, 25), Genève, 2004, p. 279-285.

    29  L’édition princeps de la Vie arabe de Macrobe a paru au Caire en 1978, sous le titreSi rat al-anba Maqr u fiyus ibn malik Qaw, d’après une copie tirée du ms. 268 (mayamir )du Dayr al-Suryan, due au moine Maqr ufiyus al-Suryan i  et préparée pour l’impression(a‘addaha  lil-nas ir ) par le moine ∑amu‘ i l al-Suryan i  (futur évêque deSab i n al-Qanatir,disparu en 2003), qui ne s’arrêtera pas en si beau chemin (cf. OCP, 62 [2001], p. 214-216). L’incipit  (= Ps. 91,2) et ledesinit  de Van Lantschoot se lisent respectivement p. 5, l.2-3 ab imo (sans variantes notables) et à cheval sur les p. 11 et 12 (avec la variante dNDËpour dNEË).

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    FAUSSES ATTRIBUTIONS EN HAGIOGRAPHIE COPTE 251

    Il se trouve que cette Vie de Macrobe est maintenant mieux connuegrâce à une nouvelle édition de la version arabe (d’après trois témoins,dont le no 268 du Dayr al-Suryan) par Clara ten Hacken, qui publie enoutre un fragment copte de Leiden30, dont R.-G. Coquin, qui en projetaitl’édition dans le cadre de ses recherches sur Moïse d’Abydos, possédaitdes clichés dont il nous avait fait bénéficier.

    Le début de cette Vie de Macrobe narre en effet la rencontre de cemoine, disciple de Moïse d’Abydos, avec Sévère d’Antioche, qui, encompagnie de Macrobe, se rend au Monastère d’Apa Moïse à Af ud(= Ebot = Abydos). C’est là que, ayant appris la mort de l’évêque du lieu(AbÒay = Psoï = Ptolémaïs31), anba  Iuanis (Van Lantschoot: Iunis;

    «possibly a corruption of Papianus», then Hacken), Sévère et Macrobelui choisissent comme successeur anba  Ahr uq i m (Van Lantschoot:Ahr uf  i m; «possibly a corruction of Rufinus», ten Hacken), un moine duMonastère de Moïse d’Abydos, qui sera sacré évêque par le patriarcheThéodose dans la ville d’Alexandrie32.

    Si donc certains feuillets de Van Lantschoot, pris entre l’incipit  et ledesinit , ne correspondent pas à la Vie de Macrobe, cela ne signifie paspour autant que ces feuillets étaient dépareillés (sauf un ou deux qui de-vaient se placer après le desinit indiqué par Van Lantschoot), ni qu’ilsappartenaient à deux Vies différentes. En effet, tout porte à croire que le

    texte décrit par Van Lantschoot n’était rien d’autre que la portion initialed’un maymar  sur Sévère d’Antioche, attribué à un obscur évêque d’As-siout ayant vécu au XVe siècle33. Le P. Philippe Luisier, qui prépare pour la  Patrologia Orientalis l’édition de ce texte arabe par les soins de sondécouvreur Youhanna Nessim Youssef, a eu l’obligeance de nous com-

    30  Cf. Clara TEN  HACKEN,  Koptische en arabische teksten over Macrobius eenegyptische monnik uit de zesde eeuw, Amsterdam, 1996 (thèse de doctorat partiellementinédite). Correspondances de l’incipit  et dudesinit  de Van Lantschoot avec l’édition deten Hacken: p. 31, l. 9-10, pour l’incipit , et p. 35, l. 14-15, pour le desinit  (avec la mêmevariante orthographique relevée supra, si tant est qu’il faille parler de variante, la confu-sion

    ◊ pour

    ÿ étant monnaie courante). — Une partie de cette thèse (p. 13-29) a été ren-

    due publique sous le titre Coptic and Arabic Texts on Macrobius, an Egyptian Monk of the Sixth Century, in St. EMMEL et alii  (ed.), Ägypten und Nubien in spätantiker und christlicher Zeit. Akten des 6. Internationalen Koptologenkongresses Münster, 20.-26.

     Juli 1996 , Bd. 2 (Sprachen und Kulturen des christlichen Orients, 6/2), Wiesbaden, 1999,p. 117-126. — Le texte copte a été réédité en diplomatique sous le titre  A Coptic Text on

     Macrobius of Ktoou, Spiritual Son on Moses of Abydos, in Outheidkundige Mededelingenuit het Rijsksmuseum van Oudheden te Leiden, 79 (1999), p. 103-106 (avec 4 planches).

     — Nous remercions vivement l’Auteur d’avoir bien voulu nous offrir un précieux exem-plaire de sa thèse, ainsi que des tirés à part des deux autres publications.

    31  Siège épiscopal qu’avait illustré le martyr Psoté/Absad i .32  Sur ce point, cf. aussi R.-G. COQUIN, Moïse d’Abydos, in Deuxième journée d’étu-

    des coptes (Cahiers de la bibliothèque copte, 3), Louvain, 1986, p. 1-14, ici 4-5.33  Qui est aussi, ne l’oublions pas, l’âge du manuscrit de Louvain.

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    muniquer les pages initiales de ce maymar , où l’auteur compile et entre-mêle, à la gloire de sa ville, des documents d’origine diverse, entreautres la Vie de Macrobe. Tous les éléments retenus par Van Lantschootse retrouvent dans cette homélie composite tardive, qui s’avère être unpot-pourri sans grand intérêt34.

    C’est ce qu’en définitive on ne pourra jamais vérifier dans le détail,materiellement parlant, puisque tous les manuscrits arabes décrits par Van Lantschoot ont péri dans l’incendie qui a ravagé la Bibliothèque del’Université de Louvain un 17 mai 194035.

    * *

    *

    À la lumière de ce qui précède, une conclusion générale s’impose: unfragment (grec ou copte, ou dans tout autre langue) édité sans être iden-tifié est pour ainsi dire «perdu» pour la science, le risque qu’il soit uti-lisé à mauvais escient ne devant pas être sous-estimé. Nous invitonsdonc à la modération les éditeurs de fragments coptes, lesquels porterontd’abord leurs efforts sur l’identification, qui seule compte pour le réelprogrès de la recherche.

    Cahiers d'Orientalisme Enzo LUCCHESI13, rue ChantepouletCH-1201 Genève

     Abstract  — In this article, the author presents some remarks about the identi-fication of various coptic fragments.

    34 Par exemple, dans l’exorde, emprunté à la Vie de Macrobe, le plagiaire remplacesystématiquement le nom de Macrobe par celui de Sévère. S’agissant dès lors d’unesource de seconde main, l’importance historique que semble lui accorder YouhannaNessim Youssef (cf. Oriens Christianus, 88 [2004], p. 112) doit être revue à la baisse.

    35  Perte encore plus grave, un important lot de manuscrits coptes dont Lefort avaitégalement fait l’acquisition, ont subi le même sort. La seule, triste consolation est de de sedire que ces mss avaient été catalogués par Mgr LEFORT, Les manuscrits coptes de l’Uni-versité de Louvain, Louvain, 1940. Sous l’exergue johannique: Colligite quaesuperaverunt fragmenta ne pereant , Lefort était revenu sur ces Fragments coptes, dans Le

     Muséon, 58 (1945), p. 97-120. Les descriptions, accompagnées d’éditions et de traduc-tions, impeccables comme tout ce que Lefort nous a laissé, et, plus rarement, de planches,pour être les seuls témoins, ne pourront jamais remplacer les originaux.

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    APPENDICE

    L’Apocryphe de S. Étienneet le Martyre de Kradjôn et Amoun

    En attribuant le Paris. Copt. 12916, f º 68, dont il est question au pointB, à une Vie de moine, Amélineau (cf.  Actes des Martyrs, Paris, 1890,p. 94s.) s’est peut-être laissé fourvoyer par un autre récit semblable, met-tant effectivement en scène deux (selon le document copte) ou trois (se-lon le Synaxaire arabe au 25 Abîb) voleurs qui, s’étant introduits chez unmoine pour le dévaliser, seront finalement convertis par lui et finiront

    martyrs. Il s’agit de l’histoire de Kradjôn (Abkirgun en arabe) et Amoun,ainsi résumée par Evelyn White, qui en édite neuf fragments bohaïriquessous le nº XX («The Martyrdom of Apa Kradjôn and Apa Amoun») deses  New Coptic Texts from the Monastery of Saint Macarius, au tome Ides Monasteries of the Wadi ’n Natrûn (New York, 1926), p. 105-113:

    Apa Kradjôn of Pineban … was a famous robber and went on one occasionwith two companions [en note: The Coptic (Frag. 2) mentions only onecompanion, Apa Amoun] to rob a monk. They were confronted by their victime, who converted them and caused them to become monks them-selves (p. 105).

    Il se pourrait, par ailleurs, que ces deux récits, sans doute dépendantsl’un de l’autre, trouvent leur source commune dans l’ Évangile arabedel’Enfance (ch. 23) ou, à la rigueur, dans l’ Homélie de Théophilesur leséjour de Sainte Famille au Mont Qusqam, qui atteste une variante de lamême histoire. Selon l’évangile apocryphe, un brigand nommé Titus,pris de pitié pour les trois pauvres voyageurs, réussit à dissuader soncompagnon de brigandage Dumachus de commettre un vol sacrilège audétriment de la Sainte Famille. Ce qui vaudra au «bon larron» Titus(alias Demas ou Dusmas, un Égyptien selon l’homélie de Théophile),qui plus tard sera crucifié à la droite de Jésus, d’être sauvé et d’entrer le

    premier au Paradis, le même traitement n’étant pas réservé au «mauvaislarron», crucifié à gauche, Dumachus (alias Gestas, un Juif selon l’ho-mélie de Théophile). Pour toutes ces traditions, on se reportera à l’excel-lent article de M. GEERARD,  Le bon larron. Un apocryphe inédit , dans

     Philologia sacra. Biblische und patristische Studien für Hermann J. Frede und Walter Thiele, hrsg. von R. GRYSON, Bd. II, Freiburg, 1993,p. 355-363.

    Quoi qu’il en soit, le voleur converti par sa victime est un thème ré-current dans la littérature hagiographique. Une narration analogue se litentre autres dans la Vie de Daniel de Scété (cf. notamment la traduction

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    italienne de la version copte par I. GUIDI, in Revue de l’Orient Chrétien,5 (1900), p. 560-561), où un chef de brigands, se faisant passer pour abba Daniel, parvint à pénétrer dans un monastère de moniales dans l’in-tention d’ouvrir à ses complices et d’y faire main basse, mais à la vue del’accueil chaleureux des religieuses et de la guérison miraculeuse d’unesœur aveugle par l’eau ayant servi à lui laver les pieds, il fondit en lar-mes, se repentit de ses méfaits et, ayant pris le chemin de Scété, em-brassa la vie monastique.

     Post-scriptum

    Cet article était rédigé lorsque nous nous sommes aperçu qu’un autrefragment minuscule (le Paris, Copte 1315, 142) se rattache au même co-dex que Zoega 122, dont il s’avère être la suite à un folio d’intervalle, etpar conséquent à l’Apocryphe de S. Étienne l’Archidiacre, dont il repré-sentait en son intégralité le feuillet contenant l’explicit  de la pièce.

    En effet, le recto du fragment parisien recoupe exactement le texte del’édition de Y. ‘Abd al-Mass i Ì (p. 345, l. 14-16), tandis que le verso, quia toute l’allure d’un épilogue, n’offre pas de parallèle avec le codexMorgan, ce qui n’est pas pour nous troubler, puisqu’on sait que la péro-raison finale peut facilement varier d’un témoin à l’autre. Pour permettre

    la comparaison, nous éditons ci-dessous ce court fragment:

    Recto Verso. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .[é]e au[takooua po] [ t]yr[ou]

    [s]wb mal[lon de] [. . . ]ntnro[eis]

    penéoeisc [IS pe] [ero]n enobe nim

    XS ntov p[et] [m]npeqoou nim

    nakrine nnoi ntepdiabolos

    konomosd éeau éekas erepéoeis

    taketoikono

    e

    IS rouna nmmana éeautako nneuenko auéoorou ebol kakws  ed. — b  om. ed. — 

    c peiwt mpenéoeis  ed. — d mpoikonomos  ed. — e  Supplendum -toiko-nomia: éeautako mpeujmje ed.