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SECOND CONCOURS NATIONAL DAGREGATION

Introduction

Le droit des entreprises en difficult regroupe l'ensemble des dispositions qui rgissent les dfaillances d'entreprises.

Cette dnomination est rcente et se substitue celle plus connue et plus traditionnelle de droit des faillites ou de droit des procdures collectives qui puise, au contraire, ses origines dans le droit romain le plus ancien.

Cette volution de la terminologie rvle, en ralit, un profond bouleversement de cette matire qui primitivement constituait le droit du rglement des dettes d'un commerant et qui, aujourd'hui, est devenu un droit conomique destin rgler les difficults des entreprises en tat de cessation des paiements ou simplement, qui rencontrent des difficults financires.

Le droit des faillites, qui a toujours exist en droit franais, s'est construit par opposition la dconfiture civile. En effet, lorsqu'un commerant ne paie pas ses dettes, est mise en place une procdure judiciaire de rglement collectif et galitaire des cranciers. Au contraire, en droit civil, si un particulier ne paie pas son crancier, celui-ci peut exercer des poursuites en paiement, voire des procdures civiles d'excution, mais le paiement demeure le prix de la course

.A la faillite, procdure organise, s'oppose donc la dconfiture civile, systme de poursuite individuelle laisse la diligence de chaque crancier.

Cette opposition tranche entre les deux systmes a progressivement t dulcore.

- Dune part, le droit des faillites a vu son domaine stendre progressivement des commerants aux artisans, puis aux agriculteurs , aux professionnels indpendants et galement toutes les personnes morales de droit priv, ce qui a pour consquence dy soumettre des personnes non-commerantes.

- D'autre part et l'inverse, le droit civil s'est dot d'une procdure de traitement du surendettement des particuliers qui, certains gards, permet un chelonnement organis des dettes du dbiteur (Loi sur le surendettement des particuliers insre dans la Code de la consommation) . En outre, il a t cr une procdure de faillite civile : le rtablissement personnel qui permetun effacement total des dettes pour les familles les plus endettes.

Le droit contemporain des faillites se caractrise aujourd'hui par la volont de venir en aide aux entreprises qui connaissent des difficults pour assurer le paiement de leurs dettes. C'est donc l'mergence d'un droit de l'entreprise que consacrent les textes les plus rcents et, notamment, les lois du 1er mars 1984 sur la prvention et le rglement amiable des difficults des entrepriseset les lois du 25 janvier 1985 relatives principalement au redressement et la liquidation judiciaires des entreprises. Ce mouvement est confirm par la toute rcente loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises.

Cependant, bien que l'entreprise soit au centre de ce dispositif lgislatif, il n'en est donn aucune dfinition lgale. C'est une notion concrte qui est prise en considration par les textes dont il rsulte que l'entreprise est apprhende comme un ensemble global constitu par des moyens humains et matriels.

Le droit des entreprises en difficult dispose d'une trs grande importance pratique pour des raisons diverses, la fois conomiques et juridiques.

D'un point de vue conomique, le nombre des procdures collectives est extrmement important puisquen 1969, avaient t dnombres 10 632 procdures alors quen 1999, ce chiffre est pass 41 339 procdures. Il a t peu prs le mme en 2002, mais depuis le chiffre a augment et se situe aux alentours de 45000 procdures par an. Il a t de lordre de 50 000 procdures en 2006.

Au-del de ce nombre important de dfaillances constates judiciairement, il faut tenir compte des entreprises qui, sans avoir cess leurs paiements, connaissent des difficults financires.

C'est tout un tissu industriel qui disparat dans certains secteurs conomiques avec son cortge de licenciements et de dpeuplement de certaines rgions. Les exemples ne manquent pas, qu'il s'agisse des faillites dans le secteur de l'industrie houillre, mtallurgique (il suffit d'voquer la liquidation judiciaire de METALEUROP), textile, des chantiers navals ou, plus rcemment, des dfaillances d'entreprises dans le domaine de l'immobilier, de l'aronautique (Airlibert en France, American airlines aux U.S.A.) ou encore de faillites bancaires. Certaines procdures rcentes ont des rpercussions trs considrables:EUROTUNNEL,PARMALAT.

L'importance conomique de la dfaillance des entreprises qui se traduit aussi par la perte de 150 000 emplois par an (Chiffre donn par le Ministre de la Justice en appui un projet de loi rformant le Livre VI du Code de commerce) et par l'immobilisation de sommes trs importantes dans le cadre des procdures, explique l'importance prise par cette matire et le fait que l'Etat cherche rguler le fonctionnement des procdures collectives, comme en tmoignent encore les rformes trs rcentes.

Mais en outre, ce sont des raisons juridiques qui fondent l'intrt de cette matire. En effet, le contentieux des entreprises en difficult est devenu le plus important quantitativement du droit commercial et, qualitativement, c'est l'occasion de l'ouverture d'une procdure que se posent des questions extrmement complexes d'un point de vue juridique qui sont au carrefour d'autres disciplines : droit civil, procdure civile, droit des contrats, de l'environnement, droit pnal... Une procdure donne souvent lieu une rflexion sur des questions relevant normalement du droit commun. Le droit des procdures collectives enrichit le droit commun, mais galement, le dforme, particulirement lorsqu'il s'agit de traiter du droit des garanties.

Raisons de l'importance pratique du droit des entreprises en difficult :Raisons conomiquesRaisons juridiques

Modification du tissu industrielLe plus important quantitativement du droit commercial

Augmentation des pertes d'emploiTouche toutes les disciplines (droit civil, des contrats, pnal...)

Immobilisation de sommes importantes dans le cadre de procduresEnrichit le droit commun

L'importance, tant conomique que juridique, des entreprises en difficult justifie qu' titre introductif soit rappele l'volution historique de cette matire et montr comment le droit positif consacre progressivement un vritable droit de la dfaillance.

Section 1. L'volution historique du droit des faillites

Le droit des faillites a des origines fort anciennes puisqu'elles remontent au droit romain et que le code du commerce lui a consacr des dispositions importantes. Mais jusqu' la loi du 13 juillet 1967, ce droit est demeur essentiellement un droit du paiement. Il s'agissait d'organiser le rglement des dettes d'un commerant. Depuis ce texte, une rupture a t marque avec le pass car, sans le dire expressment, la rforme du 13 juillet 1967 a montr la ncessit d'envisager le droit des faillites non plus seulement comme un droit du paiement, mais comme un vritable droit de l'entreprise. C'est donc ce moment que l'on peut situer une grande tape dans l'volution historique de la matire.

1. L'volution jusqu' la rforme de 1967

Cette priode peut tre divise en trois tapes :-jusqu'au Code de commerce

-Le Code de commerce

- Aprs le Code de commerce.

A. Le droit des faillites jusqu'au Code de commerce

Le droit romain connaissait dj une procdure, appele la venditio bonorum, qui organisait une vente collective des biens du dbiteur pour payer ses cranciers. Cette procdure est l'origine de notre actuelle liquidation judiciaire. Elle a connu une volution car, l'origine dans le droit romain primitif, le crancier pouvait s'emparer de la personne de son dbiteur, voire l'excuter, alors que dans le droit romain classique, la venditio bonorum ne permet une excution que sur les biens.

- Le Moyen Age, le droit de la faillite conserve ce caractre de rglement collectif des dettes, mais il est diversifi selon que la procdure est ouverte dans un pays de coutumes ou dans un pays de droit crit. Dans ces derniers, en effet, pendant longtemps a t maintenue la procdure romaine alors que, dans les pays de coutumes, est organis, surtout dans les foires, un systme de rglement collectif des dettes du dbiteur qui pouvait tre prononc par le tribunal des foires. Ces tribunaux des foires sont les anctres de nos tribunaux de commerce et les ventes collectives que permettait la rigueur des foires sont galement la source d'inspiration de la liquidation des biens. Le Moyen Age connatra des procdures assez rpressives puisque le banqueroutier, celui dont le banc est rompu, pouvait en raison de sa malhonntet, tre expos au pilori ou au carcan, voire la peine capitale.

- C'est l'ordonnance de 1673 adopte par Colbert qui va rglementer d'une manire plus rigoureuse les procdures collectives en distinguant les dfenses et lettres de rpit, les cessions de biens et les faillites et banqueroutes. L'ordonnance de Colbert comportant 12 titres, en avait consacr 3 cette matire, montrant l'intrt que lui portait le pouvoir royal dsireux de rguler les sanctions applicables aux commerants faillis.

A cette poque, le droit des faillites est la fois une procdure de rglement collectif et galitaire des dettes, et un procd de sanction du dbiteur dfaillant, voire malhonnte.

B. Le Code de commerce

Le Code de commerce de 1807 a consacr le livre 3 aux faillites et rglements judiciaires, rhabilitations et banqueroutes et autres infractions en matire de faillite. Ces dispositions sont trs svres l'gard du dbiteur qui n'a pas pay ses dettes et elles sont inspires par la volont de Bonaparte de moraliser les comportements des commerants.

Pour l'essentiel, le Code de commerce rserve la procdure de faillite aux seuls commerants et prvoit qu'elle est de la comptence des tribunaux de commerce. La faillite entrane la vente force des biens du dbiteur et le rglement de ses cranciers au marc le franc, c'est--dire au prorata de leurs crances. La faillite prsente un aspect sanctionnateur trs marqu car l'infraction de banqueroute simple ou frauduleuse s'applique dans des hypothses extrmement nombreuses.

La faillite poursuit donc une double fonction d'limination du commerant qui a trahi la confiance de ses pairs et de sanction de celui-ci.

C. L'volution postrieure au Code de commerce

Aprs l'adoption du Code de commerce, le droit des faillites va connatre une succession de rformes marques tantt par une volont d'assouplissement des rgles rigoureuses, tantt par le dsir de sanctionner le dbiteur ou les dirigeants de socits.

La loi sur la faillite du 28 mai 1838 est empreinte du libralisme du XIX sicle et a t substitue au livre 3 du Code de commerce avec comme fondement de diminuer les sanctions applicables aux commerants et d'acclrer la procdure de rglement des dettes. Bien que plus souple que le Code de commerce, cette loi ne consacre qu'une seule procdure se traduisant par la vente des biens du dbiteur pour payer ses cranciers.Cette loi subsistera assez longtemps puisque, sous rserve de quelques interventions ponctuelles, c'est une loi du 4 mars 1889 qui la modifiera.

La loi du 4 mars 1889 est extrmement importante car elle va crer, ct de la faillite, une procdure plus souple : la liquidation judiciaire. Celle-ci a pour but de ne pas sanctionner le dbiteur lorsqu'il n'est pas fautif. Dsormais, le droit franais connatra deux techniques diffrentes de rglement des dettes : la liquidation judiciaire qui est une mesure de faveur pour les commerants malheureux et de bonne foi, et la faillite qui conduit la vente des biens du dbiteur reprsent par le syndic pour payer les cranciers. Ds lors, c'est en fonction du comportement du dbiteur que se prononcera le tribunal. Il dclare la faillite en cas de faute et la liquidation judiciaire, s'il n'est pas fautif. Dans cette dernire hypothse, le dbiteur peut bnficier d'un concordat.

Remarque :

Qu'il s'agisse de la loi du 28 mai 1838 ou du 4 mars 1889, le souci est d'adoucir les procdures collectives. C'est une proccupation inverse qui animera la priode suivante.

En effet, les dcrets du 8 aot 1935 et l'ordonnance du 23 septembre 1958 sont guids par le double souci de clarifier les procdures et de les moraliser en punissant les dirigeants de socits malhonntes.

Les dcrets-lois du 8 aot 1935 ont t incorpors au code de commerce et ont permis une acclration de la procdure. En outre, ils ont cr un super-privilge au profit des ouvriers et commis du commerant en faillite.

Mais surtout, ces dcrets ont prvu qu'il serait possible de dclarer la faillite d'une socit commune toute personne qui, sous le couvert de cette socit masquant ses agissements, aurait fait des actes de commerce dans son intrt personnel. Ce texte extrmement important permet donc d'ouvrir une procdure collective l'gard des dirigeants de socits alors qu'ils taient, jusqu' cette date, hors d'atteinte en raison du principe de la sparation des patrimoines.

Ce dispositif a t complt par une loi du 16 novembre 1940 qui permit dans les socits anonymes de condamner le prsident du conseil d'administration ou les administrateurs combler tout ou partie du passif social sur leur patrimoine propre.Ces deux actions en ouverture de la procdure et en comblement de l'insuffisance d'actif sont demeures dans notre droit positif o ils sont rgis par les articles 180 et 182 de la loi du 25 janvier 1985. Ils manifestent l'intention de sanctionner les dirigeants de socits qui sont l'origine de la dfaillance de l'entreprise.

Les dcrets du 20 mai 1955 et l'ordonnance du 23 septembre 1958 ont complt le systme. Le premier dcret relatif aux faillites et rglements judiciaires et la rhabilitation a abrog toutes les dispositions antrieures et, notamment, le livre 3 du Code du commerce. Le second est relatif aux professions de syndics et d'administrateurs judiciaires (voir bibliographie) .Ce dcret du 20 mai 1955 constitue une sorte de Code de la faillite et maintient d'une manire trs claire la distinction entre la faillite et le rglement judiciaire. La faillite est, en effet, une mesure d'limination applique aux commerants cessant leurs paiements et qui ne mritent pas d'chapper aux dchances attaches la procdure. Le rglement judiciaire, au contraire, peut se terminer par un concordat qui est de nature permettre au commerant de continuer son activit.

Remarque :

A noter que dans l'esprit du texte, c'est le rglement judiciaire qui est le principe et la faillite l'exception puisqu'elle entrane tout un cortge de dchances et, notamment, la privation de droits civiques et politiques.

-Evolution lgislative postrieure au code de commerceCommentaire sur l'image ci-dessus :

Cependant, un tel systme a t critiqu car il repose sur la faute commise. Si le dbiteur est fautif le tribunal doit prononcer la faillite, s'il n'est pas fautif, il peut ouvrir un rglement judiciaire. Or, ce critre fond sur la faute est anticonomique car, mme si le dbiteur est fautif, son affaire peut tre saine et peut tre redresse alors que, mme s'il n'a pas commis de faute, il peut se trouver la tte d'une entreprise qui doit disparatre.

L'insuffisance du critre de choix entre les deux procdures et le caractre dpass du dcret de 1955 qui ne s'appliquait pas aux personnes morales, va conduire une rforme importante en 1967.

2. Les traits gnraux de la rforme de 1967

La rforme de 1967 a t ralise par l'institution de trois procdures :

- le rglement judiciaire et la liquidation des biens rgis par la loi n67-563 du 13 juillet 1967.- la suspension provisoire des poursuites cre par l'ordonnance 67-820 du 23 septembre 1967.

Ce corpus lgislatif marque une volution trs importante de la matire car, sous l'influence des ides du Doyen Roger Houin, il est bti sur la distinction du sort de l'homme et du sort de l'entreprise.

En d'autres termes, le critre de distinction entre les procdures de rglement judiciaire et de liquidation des biens n'est plus la faute, mais la possibilit de prsenter un concordat srieux.

Quant la suspension provisoire des poursuites, pour la premire fois, elle institue une procdure prventive permettant de sauver l'entreprise qui n'a pas encore cess ses paiements. Il faut rappeler brivement les traits gnraux de chacune de ces procdures car ils expliquent les raisons de la rforme entreprise en 1985.

A. Les procdures de rglement judiciaire et de liquidation des biens

L'ide directrice de la loi du 13 juillet 1967 est d'liminer les entreprises conomiquement condamnes sans cependant frapper d'infamie les dirigeants qui ne l'ont pas mrit.

Ds lors, la loi prvoit des dispositions qui s'appliquent l'entreprise et des dispositions qui concernent les dirigeants.

1) S'agissant de l'entreprise, la loi du 13 juillet 1967 distingue donc le rglement judiciaire et la liquidation des biens, mais le critre de choix entre les deux procdures n'est plus la faute commise mais un critre conomique : la possibilit de prsenter un concordat srieux .Si l'entreprise peut prsenter un tel concordat, le tribunal devra dclarer un rglement judiciaire. Le dbiteur est alors assist par un syndic pour l'administration de ses biens et il peut tablir des propositions de rglement de ses dettes afin que les cranciers votent un concordat. Le concordat est une sorte de contrat entre les cranciers et le dbiteur, un moratoire permettant un apurement progressif du passif et ayant pour but de remettre le dbiteur la tte de son patrimoine.

Si le dbiteur ne peut pas prsenter un concordat srieux, c'est--dire une solution de sauvetage, le tribunal dclare la liquidation des biens et les cranciers groups au sein de la masse sont en tat d'union. En d'autres termes, le dbiteur est reprsent par le syndic. Il est totalement dessaisi de la gestion de son affaire. Ses biens sont vendus par autorit de justice et le rglement des dettes est fait progressivement au prorata des crances en tenant compte de l'ordre des srets.

L'apport de la loi du 13 juillet 1967 s'agissant du choix de la procdure :EntrepriseRglement judiciaireLiquidation des biens

Critre de choix de nature conomiqueConcordat srieuxConcordat non srieux

Assist par un syndic (aide)Reprsent par un syndic (dessaisissement)

2) S'agissant du dirigeant, en principe, qu'il soit dbiteur ou dirigeant de socit, il ne subit pas de sanction particulire du seul fait que l'entreprise est en liquidation ou fait l'objet d'un rglement judiciaire. Mais il est susceptible d'tre frapp de sanctions s'il a commis des fautes.Il peut s'agir de sanctions civiles : la plus grave est la faillite personnelle, c'est--dire une sanction se traduisant la fois par l'interdiction de grer toute entreprise commerciale ou artisanale, mais galement par la privation du droit de vote et l'interdiction d'exercer une fonction lective. Dsormais, le terme de faillite ne dsigne plus le sort du patrimoine, mais le sort du dirigeant. C'est une mesure purement civile et c'est toujours le cas en droit positif. Le tribunal peut aussi se contenter du diminutif de la faillite personnelle et prononcer simplement une interdiction de grer toute entreprise commerciale ou autre.

Mais le dbiteur s'expose aussi des sanctions pnales dans la mesure o la loi a conserv le dlit de banqueroute et la distinction entre la banqueroute simple et la banqueroute frauduleuse.

Cette rglementation du rglement judiciaire et de la liquidation des biens se substitue aux anciennes procdures du dcret de 1955. En outre, est institue une procdure prventive : la suspension provisoire des poursuites.

B. La procdure de suspension provisoire des poursuites

Cette procdure, cre par l'ordonnance du 23 septembre 1967, s'applique des entreprises en situation financire difficile mais non irrmdiablement compromise dont la disparition serait de nature causer un trouble grave l'conomie nationale ou rgionale et qui pourrait tre vite dans des conditions compatibles avec l'intrt des cranciers.

Cette procdure est donc une procdure qui ne s'applique qu' certaines entreprises qui ont une nature conomique et dont le but est de prsenter un plan de redressement.

1. C'est tout d'abord une procdure d'exception

Elle suppose que:

- l'entreprise se trouve dans une situation difficile mais n'ait pas cess ses paiements- l'entreprise est susceptible de se redresser dans des conditions compatibles avec l'intrt des cranciers- l'entreprise est importante puisque sa disparition serait de nature causer un trouble grave l'conomie nationale ou rgionale.

2. C'est ensuite une procdure de nature conomique

En effet, le tribunal qui ouvre une procdure de suspension des poursuites prvoit une priode d'observation destine permettre au dbiteur de prparer un plan de redressement. Le jugement d'ouverture arrte les poursuites de la part des cranciers et cela pendant 3 mois.

A l'issue de la priode d'observation, le dbiteur prsente un plan de redressement.

Ce plan est ensuite arrt par le tribunal si l'entreprise peut tre sauve et il comprend deux parties : le redressement conomique et financier de l'entreprise et le paiement des dettes des cranciers.

Si le tribunal constate que l'entreprise est en cessation des paiements, il rejette le plan et peut, ventuellement, prononcer le rglement judiciaire ou la liquidation des biens. Mais s'il approuve le plan, celui-ci devient opposable tous les cranciers.

Ce dispositif, de toute vidence, a inspir le lgislateur de 1985 puisque le redressement judiciaire est fond aussi sur la prsentation d'un plan de redressement.

3. C'est enfin une procdure peu collective

En effet, alors que dans le rglement judiciaire ou la liquidation des biens les cranciers sont groups en une masse date de la personnalit morale et reprsente par un syndic, lorsqu'une entreprise est soumise une suspension provisoire des poursuites, il n'existe aucune organisation collective des cranciers. En outre, ceux-ci ne votent pas le plan, alors qu'ils votent le concordat dans le rglement judiciaire, et ils ne sont jamais runis en assemble. Enfin, le principe n'est plus celui de l'galit car des cranciers peuvent accorder des dlais de paiement suffisants.

Ce texte porte en germes les ides directrices de la loi du 25 janvier 1985.

Section 2. La conscration d'un droit des entreprises en difficult

La rforme de 1967, bien qu'inspire par le souci de distinguer le sort de l'homme du sort de l'entreprise, n'avait pas encore situ l'entreprise au centre de ses proccupations. Au contraire, les rformes ultrieures vont btir un vritable droit de l'entreprise en difficult.

Cette rforme s'est faite en plusieurs tapes. Tout d'abord, les lois du 1er mars 1984 et du 25 janvier 1985 ont fait table rase du pass.

Mais ensuite, leur tour, elles ont t rformes par la loi du 10 juin 1994.

Lensemble de ces textes a t codifi dans le Code de commerce au livre VI par une ordonnance de lan 2000. Mais depuis toute la matire a t repense par la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises qui est rentre en vigueur le 1er janvier 2006.

1. Les rformes des lois du 1er mars 1984 et du 25 janvier 1985

Ces textes sont d'une importance majeure.

- La loi du 1er mars 1984 introduit dans notre droit un systme de prvention des difficults des entreprises et de rglement non judiciaire de ces difficults. - La loi du 25 janvier 1985 cre une procdure unique de redressement judiciaire destine prsenter un plan de redressement de l'entreprise pour sauvegarder l'activit et maintenir les emplois.

A. La politique de prvention et de rglement amiable des difficults

1) L'objectif de prvention est le fondement de tout le systme mis en place en 1984. Le lgislateur considre qu'il vaut mieux prvenir que gurir et, pour ce faire, viter les dfaillances et la cessation des paiements. Les moyens pour parvenir un tel rsultat, ainsi que cela sera ultrieurement dvelopp, tiennent pour l'essentiel une meilleure information conomique sur l'entreprise par une augmentation des obligations comptables et par de meilleures techniques de renseignements commerciales, mais aussi l'institution de procdures d'alerte dclenches par diffrents organes : commissaire aux comptes, comit d'entreprise, prsident du tribunal de commerce...

2) ct de la prvention est institu un rglement amiable des difficults.Plutt que de recourir l'autorit judiciaire pour ouvrir une procdure collective de paiement, le dbiteur peut se rapprocher de ses principaux cranciers et conclure avec eux un accord amiable, appel rglement amiable, par lequel est organis un rglement collectif des dettes et sont prvues des mesures de redressement de l'entreprise. Cette procdure, bien qu'elle se droule sous l'autorit du prsident du tribunal, n'est pas une procdure judiciaire, elle demeure fondamentalement contractuelle.

- B. Les procdures de redressement et de liquidation judiciaires

Ce sont les deux grandes lois du 25 janvier 1985 qui vont, l'une rgir le redressement et la liquidation judiciaire et, l'autre, le statut des administrateurs judiciaires, mandataires liquidateurs et experts en diagnostic d'entreprise. Ces textes ont t complts par une loi du 31 dcembre 1988 qui a tendu les procdures aux agriculteurs.

Cette rforme globale a pour but de parvenir au redressement de l'entreprise en difficult. Tout son objectif rside dans la volont de sauvegarder l'entreprise et les emplois qui y sont attachs. A partir de ce moment, le droit des faillites devient rellement un droit de l'entreprise et une composante essentielle du droit conomique .

Trois ides directrices animent le texte :

-c'est une loi conomique,

-c'est une loi qui accrot le pouvoir judiciaire,

- c'est une loi qui tente de ddramatiser la procdure collective.

1. L'objectif conomique du redressement

L'article 1er, devenu l'article 620-1 du Code de commerce, nonce clairement qu'il est institu une procdure de redressement judiciaire destine permettre la sauvegarde de l'entreprise, le maintien de l'activit et de l'emploi et l'apurement du passif.

- L'objectif est clair : le redressement judiciaire a pour but de sauver l'entreprise en difficult.- Par quel moyen ? Grce deux outils nouveaux ou du moins inspirs de l'ordonnance de 1967 : la priode d'observation et le plan de redressement.

La priode d'observationElle a pour objet d'analyser la situation de l'entreprise en difficult, de trouver les causes de ses difficults et de btir une solution de redressement. Pendant toute cette priode, l'entreprise est l'abri des poursuites de ses cranciers et ceux-ci doivent dclarer leurs crances la procdure afin qu'elles soient reconnues et portes sur l'tat du passif.

Le plan de redressementC'est une technique permettant la fois de sauvegarder l'entreprise et les emplois qui y sont attachs et de payer les cranciers.

Il peut prendre deux formes principales :

- le plan de continuation par lequel, en principe, le dirigeant ou le dbiteur est la tte de ses affaires mais o les dettes sont payes selon des dlais fixs par le tribunal moyennant des mesures de redressement conomique, - le plan de cession qui est un procd de redressement par transmission de l'entreprise un repreneur.

Si ces deux procds ne peuvent pas tre retenus, la seule issue est de dclarer la liquidation judiciaire de l'entreprise. La procdure revt alors le caractre d'une faillite habituelle. Un liquidateur est charg de vendre les actifs mobiliers et immobiliers de l'entreprise afin de payer les cranciers selon l'ordre existant entre eux en appliquant, pour l'essentiel, les principes du droit civil gouvernant les srets.

2. Le caractre judiciaire de la procdure

Le systme mis en place en 1985 marque un recul sensible du pouvoir des cranciers dans la procdure collective et, au contraire, l'accentuation du pouvoir judiciaire.

Le tribunalIl est omniprsent dans la procdure collective et ses pouvoirs sont remarquables :

-il ouvre la procdure,

-il nomme les organes,

-il autorise les actes graves

- et surtout, il arrte le plan de redressement ou dclare la liquidation judiciaire.

Le juge-commissaireUn juge du tribunal, le juge-commissaire est dot galement de prrogatives importantes dans le redressement judiciaire pour acclrer la procdure ou pour favoriser l'adoption du plan. En outre, dans la liquidation, il autorise les actes les plus graves, et notamment les ventes de gr gr.

Le ministre publicEnfin, le ministre public voit son rle constamment accru puisqu'il peut demander le prononc d'une location-grance, exercer des voies de recours, demander le remplacement des mandataires de justices.

Cette organisation consomme le dclin des cranciers qui ne dfinissent plus la solution applicable l'entreprise dans la mesure o ils ne votent pas de concordat.

3. Ddramatisation de la procdure

Le lgislateur de 1985 a voulu humaniser la procdure collective, c'est pourquoi :

Les salaris sont associs toutes les tapes de la procdure par le biais de leurs institutions reprsentatives ou grce la dsignation du reprsentant des salaris.

Le chef d'entreprise n'est plus systmatiquement dessaisi de la gestion de son entreprise dans le redressement judiciaire, alors qu'il l'est dans la liquidation. Dans le redressement, il peut, en principe, tre simplement assist par l'administrateur judiciaire, voire n'tre pas flanqu d'un mandataire de justice. En outre, les sanctions qui lui sont applicables sont plus souples. Elles n'ont jamais un caractre automatique dans la mesure o le tribunal n'est pas contraint de dclarer la faillite personnelle et car l'action en comblement suppose que soit prouvs la faute du dirigeant et le lien entre la faute commise et l'insuffisance de l'actif de l'entreprise.La loi de 1985 marque donc une volont trs nette de diminuer l'aspect infamant de la faillite car certains dbiteurs ne sont pas malhonntes et ne mritent pas de sanctions particulires.

C'est enfin le repreneur, ce personnage un peu mythique, qui est dsormais insr dans la procdure collective puisque la loi de 1985, pour la premire fois, organise le plan de cession de l'entreprise et impose un certain nombre d'obligations au repreneur. Ce sont d'ailleurs ces obligations qui vont tre accentues par la loi du 10 juin 1994

2. L'adoption de la loi du 10 juin 1994

Malgr sa volont de sauver les entreprises en difficult, la loi du 25 janvier 1985 n'a pas totalement russi puisqu'il s'avre que, comme par le pass, prs de 90 % des entreprises font l'objet d'une liquidation judiciaire. Il n'en demeure pas moins que le texte est un bon moyen pour les entreprises qui disposent d'actifs et de savoir-faire de parvenir une solution de sauvetage. Mais, cet objectif de redressement a souvent entran une rduction excessive des prrogatives des cranciers.

C'est pourquoi le lgislateur a souhait gommer les aspects trop rugueux de la loi de 1985 tout en continuant la politique de prvention entame par la loi du 1er mars 1984. Ceci explique la rforme entreprise le 10 juin 1994.

Cette loi a pour objet d'amliorer le dispositif de prvention car les procdures mises en place en 1984 et, en particulier, le rglement amiable, intervenaient trop tard et comportaient des dispositions insuffisantes et, d'autre part, la loi simplifie et acclre les procdures de redressement et de liquidation judiciaire tout en renforant les droits des cranciers et en moralisant les procdures.

Le dispositif de prventionEn ce qui concerne le dispositif de prvention, la loi du 10 juin 1994 a acclr la procdure d'alerte en rduisant les dlais et a accru les pouvoirs du prsident du tribunal en lui permettant d'ordonner la suspension des poursuites pour favoriser un rglement amiable. En outre, ce rglement a t rendu plus facile car il est dsormais ouvert un plus grand nombre de personnes et d'entreprises.

La procdure de redressement et de liquidation judiciaireS'agissant de la procdure de redressement et de liquidation judiciaire, son architecture gnrale n'a pas t modifie et le lgislateur a dclar ne pas vouloir changer de logique. Cependant, la loi favorise certains cranciers en leur permettant d'tre pays avant les cranciers postrieurs dans la liquidation judiciaire et en permettant aux revendiquants d'exercer plus facilement leur droit de proprit. En d'autres termes, le lgislateur de 1994 a accru les prrogatives des cranciers titulaires de srets ou de droits de proprit. En outre, elle a moralis la procdure collective en augmentant les obligations pesant sur les repreneurs d'entreprise et, notamment, en leur imposant de payer les prts permettant le financement des actifs. Ces textes sont dsormais codifis dans le Code de commerce aux articles L. 611-1 et suivants.

Mais cette rforme, son tour, est apparue insuffisante car, si la balance a trop pench du ct de l'entreprise dans la loi de 1985, elle a trop pench du ct des cranciers dans la loi 1994. C'est pourquoi, une nouvelle rforme a t adopte avec la loi du 26 juillet 2005.

Les apports de la Loi du 10 juin 1994 s'agissant du droit des entreprises en difficults :Modification procduralePoids des acteurs

- Dispositif de prventionProcdure d'alerte acclreAugmentation des pouvoirs du prsident

- Procdure de redressement et de liquidation judiciaireProcdure plus moralisteAugmentation des prrogatives des cranciers titulaires de srets et de droits proprit

3. Le droit postrieur la loi du 10 juin 1994

Postrieurement la loi du 10 juin 1994, les dispositions de la loi du 1 mars 1984 et du 25 janvier 1985 ont t codifies dans le Code de commerce.

En outre des dispositions particulires certaines entreprises ont t adoptes sous l'influence du droit communautaire notamment.

A. La codification (Code de commerce 2000)

L'ordonnance du 18 septembre 2000(lien vers le texte) consacre le livre VI du Code de commerce aux difficults des entreprises. Ce livre a t alors divis en deux titres :

- le titre I intitul: De la prvention et du rglement amiable des difficults des entreprises- le titre II qui traite Du redressement et de la liquidation judiciaire des entreprises.

Dsormais, l'ensemble des dispositions relatives au redressement et la liquidation judiciaire figure dans un seul chapitre. La prsentation de la matire y gagne en cohrence. En revanche, le dcret du 27 dcembre 1985 n'a jamais t codifi.

En principe la codification a t faite droit constant. En ralit, certaines dispositions ont t modifies dans un souci d'harmonisation ou de cohrence des textes (V. Sur cette question, Le numro spcial de droit et patrimoine, aot 2001: la codification du code de commerce et spcialement, l'article de Madame Prochon sur le Livre VI.) .

La deuxime loi du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires et experts en diagnostic d'entreprises a t codifie dans le livre VII intitul De quelques professions rglementes qui a t modifi par une loi du 3 janvier 2003(lien vers le texte) qui a galement port ratification du Code de commerce.

REMARQUE: Cest ce stade de lvolution historique que se situe le droit marocain. Le code de commerce actuel est trs inspir de la loi du 25 janvier 1985 modifie par la loi du 10 juin 1994. Comme le droit franais, il a t codifi.B. L'apparition d'un droit spcial

Depuis 1994, certaines entreprises connaissent un rgime particulier de traitement de leurs difficults. Il s'agit des tablissements de crdit dont la dfaillance est rgie par la loi du 25 juin 1989, insre l'article L. 613-25 du Code montaire et financier.

Ce texte, pour l'essentiel, subordonnent l'ouverture de la procdure un avis de la commission bancaire et retient une notion particulire de cessation des paiements. La procdure est ouverte l'encontre des tablissements de crdit qui ne sont pas en mesure d'assurer leurs paiements immdiatement ou terme rapproch.

Enfin la commission bancaire peut, lorsqu'un administrateur ou un liquidateur a t nomm, saisir le tribunal de grande instance afin que soit ordonne la cession des actions dtenues par un ou plusieurs dirigeants.

Un droit spcial aux entreprises d'assurance devrait galement tre labore lorsque sera transpose une directive du Conseil de l'Union europenne du 19 mars 2000 prvoyant Enfin bien qu'il ne s'agisse pas d'entreprise, les coproprits en difficult connaissent un rgime de traitement particulier trs inspir de la loi de 1985, depuis une loi du 21 juillet 1994, insre dans la loi du 10 juillet 1965 sur la coproprit.

Remarque: le droit marocain comporte aussi des dispositions spciales aux entreprises dassurance et aux banques

4. La loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises

La loi du 26 juillet 2005 va beaucoup plus loin que les projets qui lont prcde et cre une nouvelle technique de sauvetage : la procdure de sauvegarde qui permet lentreprise en difficult, mais qui na pas cess ses paiements de demander au tribunal louverture dune procdure de sauvegarde, trs proche du redressement judiciaire, qui lui permet de ngocier un plan de sauvegarde avec ses cranciers.

.. La loi est entre en vigueur le 1er janvier 2006.

Fondements du texteLa loi n 2005-845 du 26 juillet 2005 sur la sauvegarde des entreprises modifie, de manire sensible, le droit positif sans, toutefois, abandonner, en apparence, la philosophie de la loi du 25 janvier 1985.

Bien au contraire, ds les premires lignes de lexpos des motifs, le projet de loi nonce que la sauvegarde des entreprises est un enjeu majeur pour notre conomie et les hommes qui la dveloppent . Il ne sagit donc pas, du moins officiellement, de revenir une conception purement patrimoniale de la matire en la rduisant des procdures dexcution, telles que les comportait lancien droit des faillites . Ainsi quil est dit immdiatement : lobjectif de la sauvegarde de lentreprise est crucial .

Pourquoi alors une telle rforme ?

Le ministre de la Justice, M. Dominique Perben, sen explique dans lexpos des motifs . Ce droit serait devenu inadapt notre conomie parce que, adopt en 1984 et 1985, il trouvait sa place dans un principe dconomie dirige, caractris par les nationalisations et linterventionnisme de ltat dans la vie des entreprises et se traduisait par un considrable amoindrissement des droits des cranciers, au profit de la recherche tout prix du sauvetage de la plus grande part des entreprises en difficult, et par une attention insuffisante porte aux objectifs et au droulement de la liquidation judiciaire .

Ce sont ces dfauts que le projet se propose de corriger en diversifiant les procdures pour les adapter aux difficults des entreprises et en repensant la place respective du dbiteur et des cranciers dans la procdure, mais aussi celle du tribunal de commerce et du ministre public.

Principes directeursLa loi est prsente par ses auteurs comme tant un texte novateur, libral et pragmatique .

Novateur, dans la mesure o lanticipation est conue comme la condition du redressement puisque lentreprise peut se placer sous la protection du tribunal avant toute cessation des paiements.

Libral, car cest au chef dentreprise de choisir entre la voie prventive, lui offrant le choix entre le mandat ad hoc et la conciliation, ou la voie judiciaire lui permettant dopter pour la sauvegarde sil nest pas en tat de cessation des paiements ou le redressement judiciaire, en cas contraire. Libral, aussi, dans la mesure o les sanctions qui frappent le chef dentreprise sont considrablement allges.

Pragmatique, parce que le projet est anim par une logique conomique : celle de la continuation de lexploitation, soit au travers des solutions amiables (mandat ad hoc et conciliation), soit au travers des solutions judiciaires : plans de sauvegarde et de redressement. Mais, en cas dchec de la continuation, il ny a pas dautre alternative que la liquidation judiciaire. La cession de lentreprise en difficult nest plus considre fondamentalement comme une mesure de redressement.

Lessentiel de la rforme tient lextension du champ dapplication des procdures collectives, la diversification des procdures , ladoucissement des sanctions applicables au chef dentreprise et une redistribution des rles au sein de la procdure.

A. Domaine dapplication

La loi, en premier lieu, tend le domaine du droit des entreprises en difficult qui, concernant jusque-l, les commerants, personnes immatricules au rpertoire des mtiers, agriculteurs et personnes morales de droit priv, sapplique dsormais aussi toute autre personne physique exerant ou ayant exerc une activit professionnelle indpendante, y compris une profession librale soumise un statut lgislatif ou rglementaire ou dont le titre est protg . Les professionnels libraux rentrent ainsi dans le champ dapplication des procdures judiciaires, comme contractuelles .

B. Diversification des procdures

1) La primaut des techniques de sauvetageLobjectif de sauvegarde, nonce lexpos des motifs , doit tre poursuivi par des moyens diversifis, sans porter datteintes excessives aux autres entreprises que sont les cranciers , et il faut tablir une distinction claire fonde sur lobjectif des diffrentes procdures . La premire ligne directrice de la loi est donc de diversifier et de clarifier les procdures de traitement des difficults tout en protgeant les cranciers.

Dans la recherche dune solution de sauvetage permettant la continuation de lexploitation, le lgislateur estime que le dbiteur est le mieux mme dapprcier la procdure la mieux adapte sa situation et quil convient de le responsabiliser . Il lui appartient donc de choisir entre la voie prventive ou la voie judiciaire.

Le dbiteur et lui seul a la facult de demander le bnfice dune procdure de conciliation lorsque lentreprise prouve une difficult juridique, conomique ou financire avre ou prvisible, mais aussi lorsquelle se trouve en tat de cessation des paiements depuis moins de quarante-cinq jours. Il a galement la possibilit de demander louverture dune procdure judiciaire : la sauvegarde, ds lors que, sans tre en cessation des paiements, il justifie de difficults susceptibles de conduire la cessation des paiements (C. com., art. L.). Cette procdure de sauvegarde est, en effet, conue comme un redressement judiciaire prventif puisquelle permet, partir de difficults prvisibles, de prendre des mesures utiles pour lentreprise, avant mme que la trsorerie ne soit affecte. Le rsultat est que le dbiteur peut choisir la conciliation alors quil a cess de payer ses cranciers ou la procdure judiciaire, plus protectrice de lentreprise, et plus contraignante pour les cranciers, alors quil continue les rgler de leurs crances. Cela suppose quil soit en mesure de faire ce choix et quil veuille le faire alors que de nombreux chefs dentreprise cachent ltat des cessation des paiements ! Mais, en toute hypothse, lissue de la procdure est une solution de continuation qui prend la forme dun accord amiable ou dun plan de sauvegarde ou de redressement.

2) Dans le cas o ces procdures ne sont pas envisageables ou chouent, la liquidation judiciaire doit tre ouverte.Elle connat alors une grande diversification. Elle peut tre immdiate ou prononce lissue de la priode dobservation, normale ou simplifie, dans le but dune acclration des oprations de liquidation lorsque lentreprise ne possde pas dactifs immobiliers et emploie peu de salaris. Elle peut se traduire par une cession globale des actifs organise dans le cadre dun plan arrt par le tribunal ou par des ventes de biens isols, le choix seffectuant en fonction de la meilleure rentabilit attendue de la vente, mais aussi du maintien de lactivit et de lemploi.

C. Adoucissement des sanctions

Ce premier choix de la primaut de la sauvegarde en appelle un autre : ds lors que la rforme diversifie les procdures de traitement des difficults que le chef dentreprise peut engager, elle modifie profondment le rgime juridique de sa responsabilit .

La fonction de chef dentreprise est donc revalorise. En toute hypothse, la procdure, dune part, ne peut plus tre ouverte titre de sanction, dautre part, la responsabilit de ceux qui courent le risque de crer une entreprise est allge et enfin la reprise des poursuites est limite.

Exemple : Laction en en responsabilit pour insuffisance dactif ne peut plus tre engage pendant la dure du plan de sauvegarde ou de redressement. Seul lchec du plan, constat par un jugement de rsolution, permet lexercice de laction, ou encore le prononc de la liquidation judiciaire.

En outre, la procdure collective ne peut tre ouverte contre un dirigeant titre de sanction et lobligation aux dettes sociales ne sapplique quaux dirigeants dont la socit fait lobjet dune liquidation judiciaire.

Enfin, le rgime des actions est modifi dans un sens partiellement favorable aux dirigeants car la loi supprime la saisine doffice du tribunal. Le dclenchement des sanctions est de la comptence du mandataire judiciaire, du liquidateur et du ministre public.

La loi du 26 janvier 2005 assouplit aussi la sanction de la faillite personnelle qui, si elle entrane toujours linterdiction de grer, nest plus assortie d interdictions et de dchances , ce qui sinscrit dans la tendance gnrale de ne plus admettre de sanctions automatiques. Le tribunal peut prononcer, mais uniquement sil lestime utile, une incapacit dexercer une fonction publique lective qui prendra effet de plein droit compter de la notification qui est faite lintress par le ministre public.

Le prononc de la sanction est dsormais enferm dans un dlai de prescription de cinq ans dater du jugement douverture.

La dure de la faillite personnelle ou de linterdiction de grer ne pourra plus tre suprieure quinze ans.

Enfin, le jugement de clture pour extinction du passif entrane relev de toutes interdictions, dchances et incapacits dexercer une fonction publique lective, et en cas de clture pour insuffisance dactif, linterdiction de grer ne permet plus la reprise des poursuites individuelles.

D. La modification des rles

La rforme a une approche diffrente de la place que doivent avoir les institutions judiciaires dans la procdure. Elle marque un recul du rle du tribunal de commerce et de linterventionnisme judiciaire alors que, dans le mme temps, elle accrot la prsence du ministre public dans toutes les procdures contractuelles comme judiciaires.

Certes, le tribunal de commerce est consacr comme organe protecteur des entreprises qui peuvent se placer sous main de justice sans tre encore en tat de cessation des paiements. Mais, corrlativement, le texte tant dinspiration librale, il joue un rle moins actif. Cela se traduit par la suppression de nombreux cas de saisine doffice jugs contraires au principe de la neutralit et de limpartialit du juge.

A linverse le ministre public voit ses prrogatives accrues. Le ministre public prsent dans les procdures depuis 1981 na cess de voir son rle augmenter. Il peut toujours mettre en uvre certaines actions : ouverture de la procdure, remplacement des organes, actions en nullit de la priode suspecte, actions contre les dirigeants. Mais, en outre, il devra dsormais tre prsent dans les procdures non contentieuses lorsque est bti un accord amiable, la suite dune procdure de conciliation. Il en sera de mme en cas douverture de la procdure de sauvegarde et lors de larrt du plan de sauvegarde ou de redressement. Il devient, par consquent, le garant de la moralit des oprations. En outre, il peut exercer trs largement des voies de recours : il a dsormais la facult dinterjeter appel des jugements qui statuent sur les sanctions civiles, mme sil est partie jointe. Il peut galement faire appel des jugements ouvrant la procdure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, mais son appel nest plus suspensif.

Au terme de cette volution historique, le droit des difficults des entreprises est contenu, pour lessentiel, dans le livre VI du Code de commerce qui comporte dsormais sept titres, au lieu de deux. Les textes nont pas t rcrits, ni le contenu du livre repens en profondeur, mais des dveloppements ont t dplacs pour faire de la procdure de sauvegarde, la procdure judiciaire de rfrence.

Le critre majeur de ventilation des procdures nest plus la cessation des paiements puisque la conciliation peut tre ouverte que lentreprise nait pas cess de payer ses cranciers ou quelle soit en tat de cessation des paiements depuis moins de quarante-cinq jours . Il nest donc plus possible de distinguer le rglement des difficults avant et aprs la cessation des paiements.

Quest-ce qui distingue alors les modes de traitement des difficults ? Le degr dintervention du juge.Dans le mandat ad hoc et la procdure de conciliation, le prsident du Tribunal na pas de pouvoir de coercition. Ces techniques demeurent consensuelles.En cas douverture dune procdure de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires, la situation des dirigeants et des cranciers est bouleverse. Des contraintes fortes sont imposes aux uns et aux autres.

Le seul critre de rpartition des techniques de traitement de la dfaillance des entreprises a, par consquent, trait, dsormais, au point de savoir si elles ont ou non un caractre fondamentalement judiciaire ou plus exactement si elles sappuient sur la contrainte. Cest pourquoi il convient de distinguer le traitement non judiciaire (1) et le traitement judiciaire des difficults des entreprises (2).

PREMIERE PARTIE: LE TRAITEMENT NON JUDICIAIRE DES DIFFICULTES DES ENTREPRISES

Pour viter la vulnrabilit financire des entreprises, la loi du 1er mars 1984 les a obliges augmenter leurs fonds propres en faisant passer le capital des SARL de 20.000 50.000 F (7500 Euros) et celui des socits anonymes de 100.000 250.000 F (37000 Euros) et 225 000 Euros pour les SA faisant appel public l'pargne. Cette tendance renforcer les fonds propres a, cependant, t contrarie par la possibilit de crer une SARL un euro .

Mais surtout, la loi a voulu accrotre les lments d'information dont disposent les entreprises afin de leur permettre de prvenir les difficults pouvant surgir (TITRE 1). Ces techniques de prvention sont compltes par des moyens de traitement des difficults non contentieux (Titre 2).

TITRE 1: La prvention des difficults des entreprises

Cette prvention des difficults s'est traduite par un accroissement des obligations comptables des entreprises ainsi que par la multiplication dindices de fragilit des entreprises(Chap. I).

En outre, le lgislateur a mis en place des techniques de raction aux difficults afin de susciter une prise de conscience de la direction en crant des procdures d'alerte dont le but est d'attirer l'attention des dirigeants sur des indices de difficults pouvant menacer l'entreprise. Ces clignotants avaient dj t suggrs par le rapport Sudreau en 1975 et ont t lgaliss en 1984 sous la forme de droit d'alerte. En outre, les pouvoirs dinjonction et de convocation du prsident du tribunal ont t accrus toujours pour que les dirigeants prennent rapidement les mesures qui simposent (Chap II).

Tout ce dispositif a t amlior par la loi du 10 juin 1994et a t codifi dans le livre 2 et dans le livre VI du Code de commerce. La loi du 26 juillet 2005 lui a apport quelques retouches.

Chapitre 1. L'identification des difficults

Le Code de commerce a institu un vritable droit conomique de l'information (M. Jeantin, La loi du 1er mars 1984 relative la prvention et au rglement amiable des difficults des entreprises Droit social 1984,p.599 ; P.Le Cannu, L'amlioration de l'information au sein de l'entreprise,rev.jurisp.com.,n sp. I986, p.8) qui doit profiter toutes les composantes de l'entreprise, aux associs, mais aussi aux salaris. Cette information rsulte, tout d'abord, de lexamen de la comptabilit (Sect1) . Indpendamment de la comptabilit, lidentification des difficults peut rsulter dautres sources de renseignements (Sect 2) .

Sect. 1. Lidentification des difficults par linformation comptable

Le lgislateur a amlior linformation dans lentreprise grce l'extension de la comptabilit traditionnelle , mais aussi, l'institution de nouveaux documents comptables . Au-del, c'est l'exploitation de toutes ces donnes comptables qui doit permettre l'entreprise de prendre conscience des indices de dfaillance et de rflchir aux procds permettant d'y remdier . Enfin pour assurer lefficacit du dispositif, le lgislateur renforce lobligation de dpt des comptes .

1. L'accroissement de la comptabilit obligatoire

La comptabilit traditionnelle est rtrospective dans la mesure o elle donne l'tat de la situation de l'entreprise la fin de l'exercice, ou parfois, au cours de l'exercice. Bien que tourne vers le pass, elle donne des lments fondamentaux pour apprcier l'tat de la trsorerie ou de la progression du chiffre d'affaires et de la rentabilit. Ces obligations comptables, dj connues pour les socits commerciales, ont t dveloppes dans ces groupements, mais ont t galement tendues d'autres personnes morales de droit priv.

1. L'accroissement des obligations comptables traditionnelles

a) des socits commerciales

Il s'est traduit, d'une part, par l'obligation de publier les annexes du bilan et, d'autre part, par celle de tenir des comptes consolids:

1 - Doivent tre annexs au bilan :

- un tat des cautionnements, avals et garanties donns par la socit, ainsi qu'un tat des srets consenties par elle (L. 232-1 C. C.com).

En outre, si la socit est cote en bourse, elle doit annexer:

- un inventaire des valeurs mobilires dtenues en portefeuille la clture de l'exercice- un tableau relatif la rpartition et l'affectation des sommes distribuables qui seront proposes la prochaine assemble gnrale (L. 232-7 C. Com). Ces socits cotes doivent galement publier un rapport commentant les donnes relatives au chiffre d'affaires.

2 - S'agissant de la tenue des comptes consolids

Elle est obligatoire pour les socits qui appartiennent un groupe, et elle consiste publier des comptes qui rcapitulent dans un document unique les comptes de toutes les socits du groupe comme si elles constituaient une seule et mme structure.

b) Autres groupements

Alors que les socits commerciales ont toujours d publier le bilan, le compte de rsultat et l'annexe, les autres groupements chappaient ces rgles comptables. Dsormais, un dispositif quivalent est mis en place pour les groupements d'intrt conomique qui emploient plus de 300 salaris et dont le montant du chiffre d'affaires est gal ou suprieur 18 millions d'euros. (D. 1er mars 1985, art.25). Pareillement, les personnes morales de droit priv non-commerantes ayant une activit conomique sont assujetties l'obligation de tenir des comptes annuels, lorsqu'elles atteignent deux des trois seuils suivants :

- 50 salaris: les salaris pris en compte sont ceux qui sont lis la personne morale par un contrat de travail dure indtermine - 3 100 000 euros du montant hors taxes du chiffre d'affaires ou des ressources. Ce montant est celui des ventes de produits et de services lis l'activit courante. Le montant des ressources est gal au montant des cotisations, subventions et produits de toute nature lis l'activit courante.- 1 550 000 euros pour le total du bilan : celui-ci est gal la somme des montants nets des lments d'actif - D 1er mars 1985, art. 22

Bien souvent, les socits ne respectent pas cette obligation de dpt des comptes, d'o la possibilit prvue par la loi NRE(lien vers le texte) d'enjoindre aux entreprises d'y procder sous astreinte.

2. Le dveloppement dune comptabilit prvisionnelle

La tenue d'une comptabilit prvisionnelle est impose aux socits commerciales, mais aussi aux entreprises publiques et certaines personnes morales de droit priv ayant une activit conomique. Ces nouveaux documents prsentent certains un caractre analytique et d'autres, vritablement, un caractre prospectif (art. L.232-2 C.com. et 244-1, D. 23 mars 1967).

a) Les documents analytiques

Ils sont au nombre de deux. Il s'agit :

- de l'tablissement d'une situation de l'actif ralisable et disponible (lien vers le lexique), valeurs d'exploitation exclues, et du passif exigible (lien vers le lexique) (Art.L232-2 C.com.). Ce premier document permet de connatre la trsorerie de l'entreprise et, ventuellement, d'identifier l'tat de cessation des paiements (la dfinition de l'art.L.621-1 C.com. (lien vers http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnArticleDeCode?code=CCOMMERL.rcv&art=L621-1) ). Il doit tre trait semestriellement et dans les quatre mois qui suivent la clture de chacun des semestres de l'exercice.

- d'un tableau de financement, en mme temps que le bilan, qui dcrit comment les ressources de l'entreprise ont permis, au cours de l'exercice pass, de faire face aux dpenses en cours (Il permet donc d'identifier les variations du fonds de roulement) .

b) Les documents prvisionnels

La loi du 1er mars 1984 impose certaines entreprises de tenir des documents comptables qui ont un caractre purement prospectif. Il s'agit du compte de rsultat prvisionnel (lien vers le lexique) et du compte de financement prvisionnel (lien vers le lexique).

Les nouveaux documents comptables disponibles dans les socits commerciales :-Commentaire sur l'image ci-dessus :

Tous ces nouveaux documents donnent des lments d'information complmentaires l'entreprise sur la situation de sa trsorerie, mais galement sur le rsultat et le financement qu'elle peut esprer dans l'avenir.

3. La circulation de linformation comptable

Cette exploitation des informations comptables est faite principalement par l'entreprise elle-mme, mais elle peut galement tre utilise par les tiers.

1. L'analyse des comptes par l'entreprise

Les documents comptables doivent tre analyss dans des rapports crits relatant l'volution de la socit.

L'article 264-2 du dcret du 23 mars 1967 prvoit que ces rapports compltent et commentent l'information donne par ces documents, dcrivent les conventions comptables, les mthodes utilises et les hypothses retenues et en justifient la pertinence et la cohrence.L'analyse est conduite par les organes sociaux, c'est--dire, par le conseil d'administration ou le directoire dans les socits anonymes et, dans les autres socits commerciales, par les grants. Ce sont aussi les administrateurs qui effectuent ces rapports dans les groupements d'intrt conomique et les autres personnes morales de droit priv.

Une fois labors, ces rapports et les informations comptables sont diffuss dans l'entreprise. C'est ainsi que les informations traditionnelles doivent tre communiques aux commissaires aux comptes (bilan, comptes de rsultat et annexes et rapport de gestion) ainsi qu'au comit d'entreprise qui peut se faire assister d'un expert-comptable pour les analyser. Les nouveaux documents comptables sont galement ports la connaissance des commissaires aux comptes du comit d'entreprise et du conseil de surveillance dans la socit anonyme directoire. Il est bien vident que toutes ces informations sont confidentielles et que leurs destinataires ne sauraient les divulguer.

2-Diffusion de ces informations auprs des tiers

Les renseignements recueillis dans les documents comptables sont de prcieuses sources d'informations pour ceux qui veulent contracter avec l'entreprise en difficult.

Ces renseignements sont, en effet, accessibles dans la mesure o les comptes sociaux sont soumis une publicit lgale.

En outre, par des moyens tlmatiques, l'accs aux comptes sociaux est trs ais puisqu'il suffit d'utiliser le procd d'info-greffe sur Minitel ou Internet pour prendre connaissance des documents principaux.

Ajoutons pour conclure que la loi du 1 mars 1984(lien vers le texte) a galement dvelopp lexploitation des informations en crant des groupements de prvention agrs. Ces groupements sont constitus sous toute forme juridique qui leur confre la personnalit morale de droit priv et ont pour mission dassister le chef dentreprise pour lanalyse de sa comptabilit et pour sa gestion. Ds lors quils relvent un indice de difficults, ils doivent en avertir le chef dentreprise car ces groupements, comme dautres organes de lentreprise, sont investis dun droit dalerte.

En savoir plus : Les groupements de prvention agresCes groupements de prvention agres ont eu peu de succs. Il en a t trs peu crs. Cependant, la loi du 26 juillet 2005 a voulu dvelopper leur rle et leurs moyens daction afin damliorer la prvention des difficults. Ils peuvent, notamment, recevoir des aides de la part des collectivits territoriales.

4. Lobligation de dpt des comptes

A. Le principe

Ce dispositif relatif lexploitation des comptes sociaux se heurte souvent au dfaut de dpt des comptes au greffe. En effet, pour camoufler leurs difficults financires, les socits omettent sciemment deffectuer le dpt lgal. Cest pourquoi la loi NRE avait permis de saisir en rfr le prsident du tribunal de commerce pour quil enjoigne la socit de dposer ses comptes sociaux (Art.L. 123-5-1 C.com.). La loi du 26 juillet 2005(lien vers le texte) a parfait le systme en donnant au prsident du tribunal un pouvoir dinjonction afin que les comptes soient dposs par les dirigeants dans un dlai dun mois sous astreinte.

2. Les sanctions

Le contrevenant sexpose une condamnation 1500 euros damende. Si linjonction du prsident du tribunal nest pas suivie deffet dans ce dlai dun mois, le prsident du tribunal fait dresser un constat de carence, liquide lastreinte et peut convoquer les dirigeants devant lui pour leur demander des explications et tout renseignement sur la situation de lentreprise ( Art.4, L.26 juillet 2006 ; L.611-2 C.com.).

Section 2. Lidentification des difficults par le renseignement commercial

Outre la comptabilit qui est un moyen prcieux dinformation des tiers sur la bonne sant de lentreprise, les greffes tiennent des registres permettant didentifier les difficults financires quelles rencontrent et dautres sources dinformation leur sont donnes par des organismes professionnels.

1. Les renseignements dtenus par les greffes

La diversit des registres. Les greffes des tribunaux de commerce tiennent un certain nombre de registres qui fournissent des renseignements prcieux aux entreprises dsireuses de sengager dans un lien contractuel et que le gouvernement souhaiterait voir mieux utiliss par les greffes eux-mmes dans un souci de dtection prcoce des difficults (Avant-projet de loi rformant le livre VI du Code de commerce. Ce texte avait suggr ladoption dun systme de nature inciter les greffes mieux exploiter les renseignements quils dtiennent de faon dtecter les difficults des entreprises de manire plus prcoce). La plupart rsultent du registre du commerce et des socits (1), mais les greffes tiennent galement nombre dautres registres (2).

1. Le registre du commerce et des socits

Multiplicit des renseignements. Le registre du commerce et des socits comporte toute une srie de renseignements sur chaque socit ou sur chaque entreprise individuelle, lesquels sont ceux de la demande dimmatriculation (identit de lentreprise, sige social....). Sont runis galement par entreprise les statuts des socits et les principaux actes effectus par les personnes morales immatricules. Sont publis les comptes sociaux , les rapports des commissaires aux comptes ainsi que les comptes consolids. Peuvent ainsi tre identifies la perte de la moiti du capital social, les prorogations des dlais de tenue de lassemble gnrale qui sont des signes de fragilit. Les dcisions constatant un accord amiable ne sont, en revanche, pas soumises publication. Il en est autrement si laccord est homologu (Art. L. 611-8-I, C.com). Bien videmment, les ouvertures des procdures de sauvegarde, de redressement ou liquidation judiciaires sont galement inscrites, et les grandes tapes de la procdure peuvent tre connues par la consultation du registre du commerce et des socits.

Cette consultation peut tre faite sur place par la demande dun extrait K bis, mais de plus en plus souvent, les entreprises ont recours aux procds informatiss puisque les renseignements ports sur le registre sont accessibles par Minitel code info greffe (Tel. 36291111 ; V. sur la question dans son ensemble Le renseignement commercial, mode demploi, Lettre de lObservatoire consulaire des entreprises en difficult, juin 1996, n6, p.37). Cette consultation tlmatique des registres est dailleurs une source de revenus qui nest pas ngligeable pour les greffes, et dont la lgitimit a t conteste loccasion des rformes les plus rcentes (V. Rapport interministriel denqute sur lorganisation et le fonctionnement des tribunaux de commerce, juillet 1998).

2. Les autres registres

a) Registres spciaux

Chaque greffe tient des registres spciaux donnant des renseignements sur les incidents de paiement des entreprises. Certains sont relatifs des inscriptions de srets, dautres des incidents de paiement.

b) Les registres des srets et des protts

Chaque greffe assure la gestion dun registre des privilges gnraux du Trsor et de la scurit sociale. Depuis la loi du 10 juin 1994, la publicit des crances fiscales et des crances sociales est obligatoire et cette obligation a t renforce par larticle 175 de la loi du 26 juillet 2005. Elle doit tre effectue ds que les sommes dues au titre dun semestre civil par un redevable un mme poste comptable ou service assimil et susceptibles dtre inscrites demeurent impayes . Cette publicit est faite sur un registre public tenu au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance La sanction du dfaut de publicit est svre puisqu, en cas de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du redevable ou dun tiers tenu lgalement au paiement de ces sommes, le Trsor ou son subrog ne peut exercer son privilge pour les crances qui taient soumises titre obligatoire la publicit prvue aux 1 5 et dont linscription na pas t rgulirement requise lencontre du redevable . Cest la perte du privilge. Pareillement, lobligation dinscription des crances de lURSSAF existe, avec la mme sanction, ds que les crances ne sont pas payes dans les six mois suivant leur date limite de paiement ou le cas chant, la date de notification de lavertissement ou de la mise en demeure prvus par larticle L. 244-2 du Code de la scurit sociale lors dun contrle

Cette mesure est destine informer les tiers de laccumulation des inscriptions, tant donn que les entreprises en difficult commencent par ne pas payer les impts et les cotisations. En revanche, les projets dobliger ces organismes dclencher lalerte en cas de difficult nont pas abouti.

Par ailleurs, les greffes tiennent des registres relatifs des srets spciales, savoir, privilges des vendeurs de fonds de commerce, nantissements sur fonds de commerce, nantissements sur matriel et outillage, les contrats de crdit-bail mobiliers et de vente comportant des clauses de rserve de proprit. La consultation de ces registres est extrmement prcieuse pour savoir si lentreprise est propritaire de ses actifs ou si la plupart sont affects en garantie.

En outre, le greffier tient un tat nominatif et par dbiteur des protts, faute de paiement, des lettres de change acceptes, des billets ordre et des chques (L. n 49-1093 du 2 aot 1949 relative la publicit des protts). Nanmoins, ces sources dinformation sont encore insuffisantes parce quelles sont limites au ressort gographique du tribunal de commerce. Cest pourquoi il a t propos par M. De Roux, rapporteur lAssemble nationale dexiger, par dcret, la communication aux greffes, non seulement des impays de crances fiscales et de cotisations sociales, mais encore des loyers commerciaux ou des chances de crdit-bail ainsi que lindication du dpt de plans sociaux la direction dpartementale du travail comptente et des dcisions prudhomales pour non paiement des salaires (Rapport Ass. nat. n2095, p.125). Mais, le dcret na pas repris cette proposition.

c) Le registre national du commerce et des socits

Il faut ajouter que linstitut national de la proprit industrielle assure la gestion du registre national du commerce et des socits qui centralise toutes les donnes des greffes et qui peuvent effectuer des recherches dantriorit sur les marques, les sigles, les licences etc...

La plupart de ces donnes sont informatises et accessibles par minitel (Euridil).

2. Les autres sources d'information

Diversit. Les tiers peuvent connatre la situation de leur cocontractant en ce qui concerne les immeubles en consultant le fichier immobilier la conservation des hypothques, et, dune manire plus gnrale, par des rseaux de renseignements mis en place par diffrents organismes.

1. La conservation des hypothques

Inscription des droits rels et srets. La conservation des hypothques est un moyen dinformation trs prcieux sur la situation des immeubles. En effet, y sont publis toutes les constitutions et transferts de droits rels immobiliers ainsi que toutes les constitutions de srets immobilires. Il est possible de demander la leve dun tat hypothcaire qui renseigne parfaitement sur la situation juridique de limmeuble, et notamment sur le point de savoir sil a dj t affect en garantie.

2. Autres sources de renseignement

a) Les chambres de commerce et dindustrie

Les chambres de commerce et dindustrie, trs souvent, tiennent un fichier par entreprise de faon suivre leur volution conomique. Ces renseignements sont parfois accessibles directement par des systmes tlmatiques, ou tout simplement par renseignements sur place. Les chambres de commerce essaient daider les entreprises en difficult en toute confidentialit et les orientent vers les tribunaux de commerce ou les administrations qui peuvent leur venir en aide. Ainsi, laction de la CCI de Paris est particulirement structure dans laide la dtection et au traitement amiable des difficults (V. Lettre de lobservatoire consulaire des difficults des entreprises, 2004, n 24, p.23 s. et n25, p.21).

b) Les organismes de renseignement

Enfin, il ne faut pas sous-estimer limportance des cabinets de recouvrement qui peuvent galement donner des renseignements trs prcieux sur les dfaillances dentreprises, ou du moins sur leur fragilit. Sur la base de tous ces renseignements, il convient, en cas didentification des difficults de susciter une raction de la direction pour y faire face.

Chapitre 2. Les ractions aux difficults de lentreprise

L'une des innovations essentielles de la loi du 1er mars 1984 est, dans la ligne du rapport Sudreau qui prconisait la mise en place de clignotants, d'avoir institu des procdures d'alerte destines informer le chef d'entreprise et, le cas chant, d'autres organes sociaux de tout fait de nature compromettre la continuit de l'exploitation. Le but de l'alerte est, en effet, de susciter un sursaut de la direction mise au courant des indices de dfaillance( Sect.1) . Plus rcemment, les pouvoir du prsident du tribunal ont t accrus pour quil puisse convoquer les dirigeants afin de leur demander de prendre les mesures qui simposent (Sect.2).

Section 1. La raction de la direction suscite par les procdures dalerte

La loi du 1er mars 1984 reconnat principalement aux commissaires aux comptes la possibilit de dclencher l'alerte. Mais, ce droit est galement attribu aux comits d'entreprise et aux associs des SARL et socits anonymes ainsi quaux groupements de prvention agres lorsquils sont constitus.

1. Le devoir d'alerte des commissaires aux comptes

Les commissaires aux comptes ont l'obligation de dclencher l'alerte dans les socits commerciales alors qu'il s'agit d'une facult dans les autres groupements. Les commissaires doivent dclencher l'alerte ds lors qu'ils dclent, au cours de l'exercice de leurs fonctions, des faits de nature compromettre la continuit de l'exploitation (art. 234-1, C.Com).

1. Causes de l'alerte

La loi ne prcise pas ce qu'il faut entendre par faits de nature compromettre la continuit de l'exploitation. Mais, la doctrine s'accorde considrer que tout signe rvlateur d'un dsquilibre financier ou d'une rupture dans les flux financiers doit tre pris en considration.

En outre, au-del des comptes, le commissaire peut s'appuyer sur tout indice financier, conomique, humain ou commercial lui permettant d'identifier un risque de rupture dans la continuit de l'exploitation.

En savoir plus : Le rle des commissaire aux comptesLe commissaire aux comptes s'attache :

- l'examen des comptes annuels qui permettent de dceler une situation nette ngative, un fonds de roulement dgrad ou la faiblesse de l'excdent brut d'exploitation.- la situation sociale de l'entreprise: sureffectifs; personnel peu qualifi, mauvais climat social dans l'entreprise. Il peut galement s'appuyer sur des critres conomiques: activit en perte de vitesse; concurrence forte, perte de marchs'

Cet indice de difficult est dcouvert par le commissaire lors de l'examen des documents qui lui sont communiqus, c'est--dire dans le cadre de l'exercice de sa fonction. Il ne saurait, en effet, procder des missions d'audit ou d'expert en stratgie (Prochon et Bonhomme n29) car la loi fait toujours dfense au commissaire aux comptes de s'immiscer dans la gestion de la socit.

2. Comment se droule la procdure d'alerte ?

La procdure comporte plusieurs phases. Dans les socits anonymes, elle se droule en quatre tapes. Elle est rduite trois phases dans les autres socits.

a) La procdure d'alerte dans les S.A.

Phase n1

Dans un premier temps, le commissaire aux comptes informe des faits qu'il a relevs le prsident du conseil d'administration ou le directoire de la socit anonyme par lettre recommande avec demande d'avis de rception. Les dirigeants doivent alors rpondre au commissaire aux comptes, par lettre recommande, dans un dlai de quinze jours, dfaut de quoi ils engageraient leur responsabilit. Ils doivent indiquer au commissaire les mesures qu'ils envisagent pour remdier aux difficults qu'il a dcouvertes.

Phase n2

Si le commissaire aux comptes ne reoit pas de rponse dans les quinze jours de la part de la direction ou s'il considre que la rponse donne n'est pas suffisante, il invite alors, par lettre recommande avec demande d'avis de rception dans les huit jours qui suivent la rception de la rponse ou dans le dlai de quinze jours laiss pour rpondre en cas de non-rponse, le prsident du conseil d'administration ou le directoire faire dlibrer le conseil d'administration ou le conseil de surveillance sur les faits relevs. Le commissaire est convoqu cette sance du conseil qui doit avoir lieu dans les quinze jours de la rception de sa lettre. Le but est, videmment, de faire prendre conscience les organes sociaux des difficults rencontres.Alors que la premire phase tait secrte, un extrait du procs verbal des dlibrations du conseil est transmis au comit d'entreprise dans les huit jours qui suivent la runion du conseil.La procdure d'alerte perd donc son caractre confidentiel puisque les reprsentants du personnel en sont informs. En outre,

depuis la loi du 26 juillet 2005 une copie du procs-verbal est adresse au prsident du tribunal de commerce (Commerants et artisans) ou de grande instance.

Phase n3

Si le prsident n'a pas rpondu ou si le conseil d'administration et le conseil de surveillance n'ont pas t convoqus ou si leurs rponses sont insuffisantes, le commissaire aux comptes doit tablir un rapport spcial qui est transmis au prsident du conseil d'administration ou du directoire et qui sera prsent la prochaine assemble des actionnaires. Ce rapport est donc communiqu aux associs, ce qui leur permettra de prendre les dcisions qui s'imposent et, peut-tre, de sanctionner la direction. Depuis la loi du 26 juillet 2005, en cas de carence des organes dadministration pour convoquer lassemble, le commissaire aux comptes y procde lui-mme.

Phase n4

Depuis la loi du 10 juin 1994, la procdure d'alerte n'est plus strictement interne l'entreprise. En effet, si l'issue de la runion de l'assemble gnrale, le commissaire aux comptes constate que les dcisions prises ne permettent pas d'assurer la continuit de l'exploitation, il informe de ses dmarches le prsident du tribunal de commerce et lui en communique les rsultats. Est ainsi tabli un lien entre la procdure d'alerte et le tribunal de commerce, de sorte que le prsident pourra convoquer les dirigeants pour un entretien et leur suggrer de prendre des mesures de redressement s'il y a lieu.

-Procdure d'alerte dans les SACommentaire sur l'image ci-dessus :

b) La procdure d'alerte dans les autres groupements

Dans les autres groupements que les socits anonymes, la procdure d'alerte ne comporte que trois phases puisqu'il n'y a pas de distinction entre le dirigeant et l'organe collgial.

La demande d'explication est adresse au grant et, si le commissaire n'est pas satisfait de la rponse donne ou ne reoit pas de rponse, il doit en informer par un rapport spcial l'assemble gnrale.

Lorsqu' l'issue de l'assemble les rponses ne sont pas satisfaisantes, le tribunal de commerce sera inform par le commissaire aux comptes du droulement de la procdure d'alerte.

En pratique, les cas pour lesquels le commissaire aux comptes dclenche l'alerte sont jugs souvent insuffisants. Il est vrai qu'il est difficile pour le commissaire de dnoncer des faits alors que l'entreprise n'est toujours pas en tat de cessation des paiements. Cependant, il engagerait sa responsabilit civile pour ne pas avoir dclencher l'alerte alors que des faits graves taient de nature compromettre la continuit de l'exploitation.

En savoir plus : La responsabilit des commissaires aux comptesLes commissaires ne peuvent engager leur responsabilit pour les informations ou divulgations de faits auxquelles ils procdent en excution de leur mission (art.L.225-241 C.com).

Pareillement, le commissaire n'engage pas sa responsabilit s'il dclenche tort l'alerte (Com.,3 dc. 1991,Bull.Joly 1992,p.171,n48,obs. J.F.Barbiri ; Dr.socits 1992,n24,obs.Th.Bonneau).

Il en serait autrement, si le commissaire aux comptes avait agi de mauvaise foi ou dans l'intention de nuire ou en commettant une faute lourde quipollente au dol ( TGI Toulouse 29 juin 2000, Bull.nat.Commissaires aux comptes, 2002,p.76,n125,obs.Ph.Merle).

De mme, le commissaire aux comptes peut tre poursuivi sur le fondement de l'article 1382 du code civil s'il n'a pas dclench l'alerte alors que la continuit de l'exploitation tait compromise.

En outre, les commissaires aux comptes ne doivent pas s'immiscer dans la gestion. Le devoir de dclencher l'alerte ne droge pas la dfense d'immixtion.

-Procdure d'alerte dans les autres groupementsCommentaire sur l'image ci-dessus :

2. Le droit d'alerte du comit d'entreprise

La loi du 1er mars 1984 permet galement aux salaris de dclencher l'alerte par l'intermdiaire du comit d'entreprise. Ce droit d'alerte est exerc dans des cas plus souples que celui des commissaires aux comptes, mais selon une procdure trop complexe (L.432-5 C.trav.).

1. Causes

L'alerte peut tre dclenche lorsque le comit a constat des faits de nature affecter de manire proccupante la situation de l'entreprise.

L'expression est volontairement comprhensive, il s'agit de tout fait rvlant une incertitude sur l'avenir de l'entreprise tel que la perte de marchs, la multiplication des impays, un climat social malsain ou un endettement excessif. Cependant, ces faits doivent prsenter une certaine gravit puisqu'il faut qu'ils soient de nature proccupante.

Quoique l'on ait pu dire ces faits n'ont pas ncessairement un impact sur la situation des salaris. Le comit d'entreprise peut s'appuyer sur la comptabilit ou sur les rsultats conomiques.

2. Le mcanisme

Le mcanisme de l'alerte consiste, une fois encore, dans l'institution d'un dialogue avec la direction.L'article L 432-5 du Code du travail prvoit que le comit d'entreprise peut adresser une demande d'explications l'employeur lorsqu'il constate que la situation est proccupante (c'est une facult et non une obligation comme pour le commissaire aux comptes.)

En savoir plus : La notion de "situation proccupante"Le texte voque des faits de nature affecter de manire proccupante la situation conomique de l'entreprise et non des faits de nature compromettre la continuit de l'exploitation .

La doctrine s'est interroge sur le point de savoir si les deux concepts taient diffrents.

- Ainsi pour certains, il faudrait apprcier le caractre proccupant de la situation de l'entreprise par rapport la communaut de travail qui pourrait, par exemple, souffrir d'une restructuration (Provost, Rapport A.N. n1526,.p.167) . - Pour d'autres, cette dfinition permettrait de tenir compte d'une vision long terme des difficults sans que la continuit de l'exploitation soit compromise dans l'immdiat (A.Brunet et M.GermainRev.soc. 1985,p.1 et s.) .

Mais, en gnral, les deux notions sont voisines et supposent une perspective d'arrt d'activit court terme. C'est cette conception que semble se rallier la Cour de Cassation qui refuse le droit d'alerte pour une restructuration qui aurait un impact social sans que des difficults conomiques (Cass.soc. 30 juin 1993,JCP E,pan., p.1118) apparaissent

Cette demande doit tre vote par le comit d'entreprise et matrialise dans le procs verbal de la dlibration. Elle est ensuite inscrite l'ordre du jour de la prochaine sance du comit d'entreprise. Mais, le dirigeant ne pourra pas participer au vote.

- Au cours de la sance du comit d'entreprise, l'employeur peut fournir des explications, mais si elles ne rassurent pas le comit, celui-ci ouvrira la seconde phase de la procdure. Aux termes de l'article L 432-5 du Code du travail, le comit tablira un rapport d'alerte qui sera dress par sa commission conomique si l'entreprise comporte plus de mille salaris. Ce rapport analyse la situation et envisage les suites donner. Il est adress l'employeur. Pour tablir ce rapport, le comit d'entreprise peut entendre le commissaire aux comptes et l'expert-comptable de l'entreprise qui ne peuvent pas se retrancher derrire le secret professionnel pour refuser de rpondre

- C'est alors qu'une troisime phase peut s'ouvrir. La majorit des membres du comit d'entreprise peut dcider de saisir l'organe d'administration ou de surveillance qui sera oblig de rendre une dcision motive dont il devra informer le comit d'entreprise.

Ce droit d'alerte du comit d'entreprise montre que les salaris sont dsormais troitement associs la situation conomique de l'entreprise et peuvent prvenir une dfaillance de celle-ci.

En savoir plus : En pratiqueMais, il ne semble pas qu'en pratique, ce droit d'alerte soit frquemment utilis car la procdure est lente (Deux runions du Comit).

-La procdure d'alerte par les comits d'entrepriseCommentaire sur l'image ci-dessus :

3. Les questions crites des associs

Dans les socits par actions et les SARL, la loi du 1er mars 1984 prvoit galement que les associs ont la facult de poser des questions crites la direction sur tout fait de nature compromettre la continuit de l'exploitation (art. 223-6 et 225-232,C.com)

Ces questions sont poses par crit et adresses au dirigeant.

Le prsident de conseil d'administration ou le directoire dans les SA, le grant dans les SARL doivent alors rpondre aux questions qui leur sont ainsi poses dans un dlai d'un mois et envoyer une copie de la rponse au commissaire aux comptes (art.195-1 dc.23 mars 1967).

Ce droit d'alerte n'existe que dans ces deux types de socits et, dans les SA est rserv aux actionnaires reprsentant au moins un vingtime du capital social ou aux associations d'actionnaires.

Enfin, un mme associ ne peut poser des questions crites que deux fois par exercice.

Ce droit d'alerte demeure donc trs rsiduel et il n'impose pas aux dirigeants d'apporter des rponses prcises aux difficults souleves.

4. L'alerte dclenche par un groupement de prvention agr

Nous avons vu que ces groupements de prvention ont pour but d'assister le chef d'entreprise dans l'analyse de ses comptes et de sa gestion, mais, en outre, ils doivent dclencher l'alerte s'ils constatent un indice de difficult. Leur intervention demeure, cependant, trs discrte.

Le critre de l'alerte est ici l'indice de difficult et le groupement doit en informer le chef d'entreprise.

Le droit dalerte des groupements est donc assez faible dautant que ces groupements sont demeurs trs peu nombreux. La loi du 26 juillet 2005 essaie toutefois de confirmer leurs missions daide au chef dentreprise dans la dtection des difficults.

C'est donc principalement l'intervention du commissaire aux comptes qui est dcisive dans la mise en place de ces procdures d'alerte dont l'importance est certaine pour favoriser une mesure de traitement non judiciaire des difficults ainsi dceles (L. 611-1 C. com.).

Le droit d'alerte :

Caractristique de l'alerteTitulaire du dclenchement de l'alerteType d'alerteCritre de l'alerte

Commissaire aux comptesInterneFait de nature compromettre la continuit de l'exploitation

Comit d'entrepriseInterneFait de nature affecter de manire proccupante la situation de l'entreprise

Associs dans les SA et les SARLInterneFait de nature compromettre la continuit de l'exploitation (par question crite)

Prsident du tribunal de commerce ou de grande instanceExterneFait de nature compromettre la continuit de l'exploitation

Groupement de prvention agrExterneL'indice de difficult

Section 2. La convocation des dirigeants par le prsident du tribunal

Le prsident du tribunal peut convoquer les dirigeants afin de leur demander des explications. Ce pouvoir de convocation existe dans deux hypothses : lorsquil rsulte de tout acte, document ou procdure que lentreprise connat des difficults de nature compromettre la continuit de lexploitation ou lorsque lentreprise na pas dpos ses comptes sociaux (Art.L611-2 I et II). Ce droit de convocation appartient au prsident du tribunal de commerce si l'entreprise est commerciale ou artisanale et au prsident de tribunal de grande instance si l'entreprise est une personne morale de droit priv ayant un objet civil ou s'il s'agit d'agriculteur (art.L.611-2 C.com.). Ce droit d'alerte permet une intervention du pouvoir judiciaire dans la vie des entreprises afin de faciliter leur redressement. Il faut en prciser le domaine et le rsultat.

1. Domaine

Le droit d'alerte du prsident est assez gnral puisqu'il vise toute entreprise quelle qu'elle soit, alors qu' l'origine, il s'agissait uniquement de socits commerciales ou de groupements d'intrt conomique. Dsormais, le droit d'alerte est tendu aux entreprises individuelles, commerciales ou artisanales.

Il faut, cependant, que l'entreprise connaisse des difficults d'une certaine importance puisqu'elles doivent tre de nature compromettre la continuit de l'exploitation. Le critre de l'intervention du prsident du tribunal est donc le mme que pour les commissaires aux comptes.

Le prsident du tribunal est inform de la situation de l'entreprise par diffrents vecteurs : par l'examen des comptes sociaux dposs aux greffes en premier lieu, mais aussi par des rumeurs ou des indications manant des salaris ou des associs inquiets (L. 611-2 C. com). Le greffe qui surveille les inscriptions de srets, le retard dans le dpt des comptes ou dans la tenue des assembles gnrales lui apporte beaucoup dinformations.

2. Efficacit de lintervention

Le rsultat de l'intervention du prsident du tribunal montre que celle-ci demeure trs librale.

Le prsident peut, en effet, simplement convoquer les dirigeants et sentretenir avec eux, mais il ne peut pas leur imposer de mesures coercitives. Larticle 13 du projet de dcret prvoit, en effet, que le prsident convoque les dirigeants par lettre moyen recommande avec demande davis de rception ou par lettre simple envoye au moins un mois lavance et laquelle est jointe une note motivant la demande. Les dirigeants ne sont pas obligs de se rendre cette convocation, mais sils ne le font pas, un procs-verbal de carence sera dress par le prsident et dpos au greffe o il pourra tre communiqu, le cas chant, aux autorits judiciaires. La plupart du temps, les dirigeants se rendent la convocation et elle donnera lieu un entretien entre eux et le prsident.

Cet entretien a pour objet d'indiquer au prsident les mesures que les dirigeants envisagent pour redresser la situation. Cet entretien a pour objet, par consquent, de susciter une raction de la direction qui, sous l'autorit du prsident du tribunal, sera de nature viter la dfaillance et le dpt de bilan.

L'intervention du prsident du tribunal montre que celui-ci exerce une sorte de magistrature morale qui a, notamment, t d'une trs grande utilit pratique pour rsoudre les problmes poss par l'endettement des banques dans le secteur immobilier (Sur cette intervention du prsident : Jazottes, Mascala, Stas et Saint-Alary-Houin, Exercices pratiques, Entreprises en dif