Comportement des radiochronomètres Rb/Sr, Ar/Ar et Sm/Nd au ...

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HAL Id: tel-00440768 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00440768 Submitted on 11 Dec 2009 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Comportement des radiochronomètres Rb/Sr, Ar/Ar et Sm/Nd au cours du métamorphisme. Cas des éclogites de l’arc de Bergen (Suède) Julie Schneider To cite this version: Julie Schneider. Comportement des radiochronomètres Rb/Sr, Ar/Ar et Sm/Nd au cours du métamor- phisme. Cas des éclogites de l’arc de Bergen (Suède). Géochimie. Université Montpellier II-Sciences et Techniques du Languedoc, 2004. Français. <tel-00440768>

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    Submitted on 11 Dec 2009

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    Comportement des radiochronomtres Rb/Sr, Ar/Ar etSm/Nd au cours du mtamorphisme. Cas des clogites

    de larc de Bergen (Sude)Julie Schneider

    To cite this version:Julie Schneider. Comportement des radiochronomtres Rb/Sr, Ar/Ar et Sm/Nd au cours du mtamor-phisme. Cas des clogites de larc de Bergen (Sude). Gochimie. Universit Montpellier II-Scienceset Techniques du Languedoc, 2004. Franais.

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  • ACADEMIE DE MONTPELLIER

    UNIVERSITE MONTPELLIER II SCIENCES ET TECHNIQUES DU LANGUEDOC

    THESE

    pour obtenir le grade de

    DOCTEUR DE LUNIVERSITE MONTPELLIER II

    Discipline : Physique et Chimie de la Terre

    Formation Doctorale : Sciences de la Terre et de lEau Ecole Doctorale : Structure et volution de la lithosphre

    Prsente et soutenue publiquement

    Par

    JULIE SCHNEIDER

    le 17 dcembre 2004

    COMPORTEMENT DES RADIOCHRONOMETRES Rb/Sr, Ar/Ar ET Sm/Nd

    AU COURS DU METAMORPHISME : CAS DES ECLOGITES DE LARC DE BERGEN (NORVEGE)

    JURY

    M. Jean-Louis Bodinier Directeur de Thse Mme Delphine Bosch co-Directeur de Thse M. Patrick Moni co-Directeur de Thse M. Franois Bussy Rapporteur M. Jean-Jacques Peucat Rapporteur Mme Franoise Boudier Prsident du jury M. Stphane Guillot Invit M. Urs Shrer Invit

  • Remerciements

    Merci tous ceux qui ont particip un moment ou un autre llaboration et au bon aboutissement de ce travail.

    Je remercie tout particulirement Delphine Bosch pour tout le soutien et les prcieux conseils

    quelle ma apports durant ce travail de thse, ainsi que pour sa grande disponibilit. Un grand merci galement Patrick Moni pour son encadrement, et en particulier pour son professionnalisme sur le spectromtre argon. Merci galement Jean-louis Bodinier pour avoir accept dassurer la direction de cette thse.

    Je remercie trs sincrement Franois Bussy et Jean-Jacques Peucat pour avoir accept dtre

    rapporteurs de ce travail, et remercie galement tous les membres du Jury qui ont pris le temps de lire ce mmoire de thse.

    Un grand merci Loc Labrousse pour mavoir guid au coeur des clogites de Norvge, et

    permis de dcouvrir cet objet gologique remarquable quest lArc de Bergen. Ce travail naurait pu aboutir sans la participation dun grand nombre de personnes lors de

    lacquisition des donnes analytiques qui constituent le noyau dur de ma thse. Je tiens notamment remercier : Pierre Brunet de lUniversit Paul Sabatier (Toulouse) pour les mesures des rapports isotopiques du strontium ; Pierre Agrinier pour mavoir accueillie durant deux semaines au laboratoire de gochimie des isotopes stables de lIPG (Paris) et initie aux mesures des rapports isotopiques de loxygne ; Philippe Dieudonn du service commun diffraction X (Universit Montpellier II) pour les mesures et le traitement des donnes de diffraction ; Olivier Bruguier et Simone Pourtals pour la supervision des mesures lICP-MS et au LA-ICP-MS du service commun de lISTEEM (Universit Montpellier II) ; Claude Merlet pour son encadrement sur la sonde lectronique du service commun de lISTEEM (Universit Montpellier II) ; Doriane Delmas et Christophe Nevado qui je dois llaboration des lames minces et paisses ; Philippe Monjoie de lUniversit de Lausanne pour les analyses des lments majeurs.

    Merci Alain Baronnet pour les discussions stimulantes que nous avons pu avoir au cours de

    mes deux visites au CRMCN Marseille. Merci Antonio Garcia-Casco pour son aide prcieuse lors de llaboration de mon premier article sur les clogites du massif de lEscambray de Cuba. Merci galement Alexander Khn et Hankon Austrheim que jai eu la chance de rencontrer au cours du congrs de lEGU 2003. Les ides que nous avons changes cette occasion mont permis de faire un bond dans lavancement de ma thse.

    Merci galement Maurice Brunnel, Jacques Malavieille et Jingsui Yang pour mavoir donn

    la chance dexplorer les hauts plateaux Tibtains. Un grand merci tous mes collgues thsards Marianne, Stphanie, Bruno, Benot, Marie,

    Claudio pour avoir fait en sorte que je puisse travailler dans un climat chaleureux. Durant ces quatre annes de thse, jai eu normment de plaisir enseigner la gologie, et je

    suis trs reconnaissante tous les tudiants de premier cycle de lUniversit Montpellier II des annes 2000 2004 pour mavoir permis de cultiver mon got de lenseignement.

    Merci ma mre Martine et mon pre Robert qui mont toujours soutenu tous les niveaux

    dans mes choix ainsi qu mes grand-mres Lucienne et Jacqueline, et mes soeurs Marion, Camille et Fanny pour leurs encouragements constants durant ces longues annes dtudes universitaires. Merci Olivier de contribuer lquilibre de ma vie, et mes amis Sam, Marianne, Stphanie, Anne, Joelle, Antoine et tant dautres pour leur soutien et leur joie de vivre.

    3

  • 4

  • Je ddie cette thse la mmoire de mon grand-pre Victor Seynaeve (1911-1995), naturaliste dans lme, ancien cartographe, et passionn de gologie, qui avait le don de communiquer avec les oiseaux...

    5

  • 6

  • Table des matires

    Introduction 17

    Chapitre 1 :Problmatique : Utilisation et comprhension des radiochronomtres

    I Introduction 23

    II La gochronologie Rb/Sr, Sm/Nd et Lu/Hf 23

    II.1 Introduction 23II.1.a Principes de lisochrone 23II.1.b Application du diagramme isochrone pour un systme roche 24

    II.2 La fermeture dun systme 26II.2.a Introduction 26II.2.b La diffusion dans un solide 26II.2.c Le concept de temprature de fermeture de Dodson (1973) 29 Formulation 29 Application dans le cas dun refroidissement lent 31II.2.d Le calcul des tempratures de fermeture 31 Principe 31 Mesures exprimentales des paramtres de diffusion 32 Expriences de diffusion des terres rares (REEs) 35 La diffusion du Sr 38II.2.e Les limites de la formulation de Dodson 41 Cas des espces diffusant lentement 41 Rservoir infini contre rservoir fini 43 Applications 48

    II.3 Les dsquilibres isotopiques 49II.3.a Dfinition 49II.3.b Le cas du polymtamorphisme 50 Rle de la dformation 52 Rle des fluides 53 Conclusion 55II.3.c Autres cas de dsquilibres isotopiques 55 Hritages de compositions isotopiques prcoces 55 Incorporation dinclusions rfractaires 58

    III. La gochronologie 40Ar/39Ar 63

    III.1 Prsentation 63III.1.a Schma de dsintgration du 40K 63III.1.b Principes de la mthode 40Ar/39Ar 64III.1.c Les intrts de cette mthode 66

    III.2 Le comportement de largon dans les micas blancs 67III.2.a La diffusion de largon dans les muscovites 67III.2.b Effet de la composition sur la rtention de largon 69III.2.c Les pertes dargon, rajeunissement des ges 70III.2.d Synthse 72

    7

  • III.3 Lexcs dargon 72III.3.a Quest ce quun excs dargon ? 72III.3.b Les diffrents types dexcs dargon 74III.3.c Interprtation gochimique des excs dargon 74 La solubilit de largon dans les fluides 75 La solubilit de largon dans les minraux 76 Le rle des fluides 77 Comportement en systme ferm 77

    IV Synthse et stratgie dtude 78

    Chapitre 2 : Contexte gologique : Les Caldonides de Norvge et lArc de Bergen.

    I Les Caldonides de Norvge 85

    I.1 Prsentation gnrale des Caldonides scandinaves 85

    I.2 La formation des Caldonides de Norvge 85I.2.a Lvnement Finnmarkien (520-500 Ma) 87I.2.b Lvnement de Trondheim (490-475 Ma) 87I.2.c Lvnement Taconien (470-450 Ma) 87I.2.d Lvnement Scandien (420-400 Ma) 89I.2.e Lvnement tardif post-Scandien (400-390Ma) 89I.2.f Synthse 91

    I.3 Les diffrentes units tectonostratigraphiques des caldonides de Norvge 91I.3.a Le socle autochtone 91I.3.b Les gneiss de lOuest (WGR) : Parautochtone cristallin 91Lge de la haute pression dans les WGR 94I.3.c Allochtone infrieur 94I.3.d Allochtone mdian 95I.3.e Allochtone suprieur 95I.3.f Allochtone sommital 96I.3.g Les bassins dvoniens 96

    II LArc de Bergen 97

    II.1 Les diffrentes units tectonostratigraphiques de lArc de Bergen 97

    II.2 La Nappe de Linds 99II.2.a Les diffrentes lithologies observes 99II.2.b Les clogites 100 Type I clogites statiques 100 Type II Zones mineures de cisaillement clogitique 100 Type III Brches clogitiques 102 Type IV zones majeures de cisaillement clgitique 102 Type V Pseudotachylites clogitiques 102

    II.3 Assemblages minralogiques et ractions mtamorphiques 103II.3.a Les granulites 103II.3.b Les clogites 104

    8

  • Premier stade dclogitisation ; altration partielle des granulites 104 Deuxime stade dclogitisation : formation des zones de cisaillement 105 Troisime stade dclogitisaton : au cur des zones de cisaillement 106II.3.c Des clogites particulires : les marbres 106II.3.d Les amphibolites 107

    II.4 Conditions P-T des diffrents vnements mtamorphiques dans la nappe de Linds

    107

    II.4.a Formation du protolithe 107II.4.b Mtamorphisme granulitique 108II.4.c Mtamorphisme clogitique 108II.4.d Mtamorphisme amphibolithique 109

    II.5 Gense des clogites 110II.5.a Synthse et interprtation des observations 110II.5.b Modle de formation des clogites 111

    II.6 Les fluides 112II.6.a Contraintes sur la composition des fluides 112II.6.b Modle dvolution du fluide clogitisant 113II.6.c Mobilit des lments 115 De lchelle rgionale lchelle du minral 115 Ce qu implique la prsence de marbres 116

    II.7 Contraintes gochronologiques 116II.7.a Lge des intrusions magmatiques 117II.7.b Lge de la granulitisation 117II.7.c Lge de lclogitisation 120II.7.d Lge de lamphibolitisation 121

    II.8 Evolution godynamique de la nappe de Linds 123

    Chapitre 3 : Apport de ltude ptrologique.

    I Prsentation des chantillons 128

    II Etude ptrologique de lchantillon NOK10a 131

    II.1 Prsentation de lchantillon NOK10a 131

    II.2 Caractrisation des ractions minralogiques associes au mtamorphisme de haute pression

    133

    II.2.a Identification des ractions dclogitisation dans les diffrents sites texturaux 133 Les coronites 133 Bandes de cisaillement pidote 135 Bandes de cisaillement pidote et omphacite 137 Lentilles de quartz 137II.2.b Progression de lamphibolitisation 138

    II.3 Composition des phases minrales 138II.3.a Les pidotes 138II.3.b Les grenats 139

    9

  • II.3.c Les micas 141 Composition gnrale des micas blancs 141 Rappel sur la cristallographie des micas dioctadriques et interprtation des variantes en potassium

    144

    Le baryum 148 Comparaison des phengites en fonction de leur site textural 149II.3.d Les autres phases minrales : clinopyroxne, amphibole, disthne et plagioclase 151

    III Etude ptrologique de lchantillon NOK10d 151

    III.1 Prsentation de lchantillon NOK10d 151

    III.2 Description des assemblages minralogiques en fonction des sites texturaux 153III.2.a Les yeux omphacite et grenat 153III.2.b Bandes de cisaillement riches en phengite 153III.2.c La zonation des grenats 155III.2.d Traces de lamphibolitisation 155

    III.3 Composition des phases minrales 157III.3.a Les pidotes 157III.3.b Les grenats 157III.3.c Les micas 160III.3.d Les autres phases minrales : clinopyroxne, plagioclase et amphibole 161

    IV Synthse des observations 164

    Chapitre 4 : Apports de ltude gochimique : Caractrisation des phases en lments en trace

    I Introduction 169

    I.1 Gnralits 169

    I.2 Comportement des lments en trace dans la roche mtamorphique 169

    I.3 Approche analytique 170

    I.4 Rappel de nomenclature 172

    II Caractrisation des roches totales NOK10a et NOK10d 173

    II.1 Les terres rares 173

    II.2 Les LILEs 175

    III Caractrisation en lments en trace des minraux de lchantillon NOK10a

    177

    III.1 Les grenats 177III.1.a Les terres rares (REE) 177

    10

  • III.1.b Les LILEs 182

    III.2 Les pidotes 184III.2.a Les terres rares 185III.2.b Les LILEs 189

    III.3 Les disthnes 191III.3.a Les terres rares 191III.3.b Les LILEs 193

    III.4 Les pyroxnes 194III.4.a Les terres rares 195III.4.b Les LILEs 195

    III.5 Les phengites 197III.5.a Les terres rares 198III.5.b Les LILEs 205

    IV Caractrisation des lments en trace des minraux de lchantillon NOK10d

    206

    IV.1 Les grenats 206IV.1a Les terres rares 207IV.1b Les LILEs 209

    IV.2 Les pidotes 212IV.2a Les terres rares 214IV.2b Les LILEs 215

    IV.3 Les symplectites 217IV.3a Les terres rares 217IV.3b Les LILEs 221

    IV.4 Les phengites 223IV.4a Les terres rares 223IV.4b Les LILEs 225

    V Bilan des observations 227

    V.1 Le flux des lments durant lclogitisation et laltration amphibolitique 227

    V.2 Localisation du Rb, Sr, Sm et Nd dans les assemblages 231

    V.3 Conclusions sur les expriences de lessivage 233

    Chapitre 5 : Rsultats des tudes gochronologiques Rb/Sr, Ar/Ar et Sm/Nd.

    I Introduction 239

    II Gochronologie Rb/Sr 239

    11

  • II.1 Introduction 239

    II.2 Description des rsultats 241II.2.a NOK10a 241 Validit des rsultats 241 Calcul des ges isochrones 243 Discussion concernant la signification des diffrents groupes de phengites 247II.2.b NOK10d 248 Validit des rsultats 248 Calcul des ges 251 Comparaison avec les rsultats obtenus pour lchantillon NOK10a 251

    II.3 Bilan des observations 252

    III Gochronologie 40Ar/39Ar 253

    III.1 Introduction 253

    III.2 Description des rsultats 253III.2.a NOK10a 253 Description des mesures 253 Ages obtenus 255 Discussion des rsultats 256III.2.b NOK10d 256 Description des mesures 256 Ages obtenus 256 Discussion des rsultats 258

    III.3 Discussion des rsultats 258

    III.4 Bilan des observations 259

    IV Gochronologie Sm/Nd 259

    IV.1 Introduction 259

    IV.2 Description des rsultats 260IV.2.a NOK10a 261IV.2.b NOK10d 263

    IV.3 Bilan des observations 264

    Chapitre 6 : Analyses complmentaires : Isotopes de loxygne et diffraction x sur phengites

    I Introduction 267

    II Analyse la sonde lectronique des fractions de phengite de NOK10a 268

    12

  • II.1 Introduction 268

    II.2 Rsultats 269

    III Analyse par diffraction x des fractions de phengite de lchantillon NOK10a

    271

    III.1 Introduction 271

    III.2 Rsultats et interprtation 274

    IV Analyse des 18O de fractions de phengite des chantillons NOK10a et NOK10d

    276

    IV.1 Introduction 276IV.1.a Principe de la mthode 276IV.1.b Donnes antrieures sur lArc de Bergen 279IV.1.c Application au problme tudi 279

    IV.2 Rsultats et interprtations 281IV.2.a Mesures 281IV.2.b Rsultats 282IV.2.c Discussion des rsultats 283

    V Synthse des observations 287

    Chapitre 7 : Synthse et interprtation des donnes gochronologiques

    I Synthse des chapitres prcdents 291

    I.1 Comportement des systmes isotopiques Rb/Sr, Sm/Nd et Ar/Ar 291I.1.a Evolution dun systme isotopique au cours dun refroidissement 292I.1.b Evolution dun systme isotopique au cours dun rchauffement ou durant une histoire polymtamorphique

    293

    I.2 Etude des clogites de la nappe de Linds (Arc de Bergen, Norvge) 294I.2.a Rappels des donnes de la littrature 294I.2.b Rappels des principaux rsultats obtenus lors de lanalyse de la composition chimique des chantillons tudis

    298

    II Interprtation des donnes gochronologiques Rb/Sr 304

    II.1 Rappel des rsultats 304

    II.2 Hypothse pouvant expliquer le dsquilibre isotopique en Rb/Sr dans les chantillons tudis

    306

    II.2.a Hypothse 1 : fermeture diachrone des diffrentes phases dun systme 306II.2.b Hypothse 2 : perturbation tardive dun systme lquilibre 307II.2.c Hypothse 3 : mlange entre minraux de plusieurs gnrations 309

    13

  • II.2.d Hypothse 4 : hritage des compositions isotopiques des minraux prcurseurs 310

    II.3 Modle de rquilibrage isotopique partiel 311II.1.a t0 : clogitisation -dt 312II.1.b t1 : clogitisation 313II.1.c De t2 : clogitisation +dt, t3 : actuel 317

    II.4 Les facteurs critiques influenant les rquilibrages isotopiques Rb/Sr 318II.4.a t2 : clogitisation +dt, les limites des processus de diffusion 318II.4.b Les limites du processus dhomognisation au moment de la recristallisation 321

    II.5 Conclusion 325

    III Interprtation des donnes gochronologiques Ar/Ar 327

    III.1 Rappel des rsultats 327

    III.2 Discussion des excs dargon 328III.2.a Caractrisation des excs dargon 328III.2.b Origine des excs dargon 329III.2.c Signification des variations de concentration dargon en excs 330III.2.d Evacuation des excs dargon par diffusion volumique 331

    III.3 Conclusion 332III.3.a Le problme des excs dargon dans les roches de haute pression 332III.3.b Comparaison des ges Rb/Sr et Ar/Ar des phengites 333

    IV Discussion des donnes gochronologiques Sm/Nd 334

    IV.1 Avant-propos 334

    IV.2 Le problme des inclusions et les expriences de lessivage 334

    IV.3 La rsistance du systme Sm/Nd dans les grenats au cours du mtamorphisme clogitique 335

    Conclusions et perspectives 337

    Rfrences 345

    Annexe 1 : Techniques analytiques 385

    Annexe 2 : Liste des abrviations utilises pour les minraux 423

    Annexe 3 : Tableaux de donnes du chapitre 3 425

    Annexe 4 : Tableaux de donnes du chapitre 4 447

    Annexe 5 : Tableaux de donnes du chapitre 5 465

    14

  • Annexe 6 : Tableaux de donnes du chapitre 6 473

    Annexe 7 : Articles scientifiques publis 481

    15

  • 16

  • Introduction

    Les mthodes de gochronologie absolue ont bnfici dun dveloppement important

    depuis ltablissement, au sicle dernier, des lois de dsintgration radioactive dcrivant les

    relations entre isotopes pres et isotopes fils au cours du temps. Ces dveloppements ont t

    rendus possible grce lamlioration constante des techniques analytiques qui permettent

    deffectuer des mesures de plus en plus justes, prcises et reproductibles. Ainsi nous

    disposons actuellement dun large ventail d outils gochronologiques bass sur

    lutilisation de diffrents systmes isotopiques permettant de dater, avec toujours plus de

    prcision, des vnements vieux de plusieurs milliards dannes des vnements plus

    rcents de quelques milliers dannes.

    Un des champs dapplication de la gochronologie moderne particulirement

    intressant en gologie concerne la reconstitution des histoires tectonomtamorphiques des

    roches, reconstitutions qui sont essentielles la comprhension des dynamiques orogniques.

    Llaboration de chemins P-T-t enregistrs par des roches mtamorphiques caractristiques

    dun contexte godynamique prcis est possible en associant une tude ptrologique fine

    couplant les mthodes de gothermobaromtrie une tude gochronologique dtaille. Dans

    ce cas, la gochronologie va permettre de placer des repres temporels sur les chemins P-T

    tablis. En effet, chaque mthode gochronologique applique un systme gologique donn

    (pouvant tre reprsent soit par une srie de roches, une roche unique avec les diffrents

    minraux qui la composent ou encore une phase minrale donne) date un instant prcis de

    lhistoire thermique de lvolution dun chantillon gologique (thermochronologie ; Figure

    0-1). La gochronologie va alors permettre dacqurir une vision dynamique des processus

    orogniques en apportant des repres temporels pour des processus lis la subduction, la

    collision ou lextension post-orognique. De plus, lutilisation couple de diffrents

    radiochronomtres datant diffrents instants dans lvolution de lhistoire thermique des

    roches va permettre, lors de llaboration de chemins P-T-t, dextraire des paramtres clefs

    dans les reconstructions godynamiques comme les taux de refroidissement ou encore les

    vitesses dexhumation caractrisant les chemins rtrogrades des roches (Figure 0-1).

    Un des contextes godynamiques ayant suscit le plus dintrt par rapport cette

    approche est lexhumation des roches de haute et ultra-haute pression. En effet, les processus

    lorigine de lexhumation de roches formes des profondeurs pouvant atteindre plus de

    100km, reprsente une nigme de premier choix pour la communaut scientifique. Les

    17

  • implications de ces processus sont considrables ; elles concernent entre autre limportance et

    la nature des changes crote-manteau au cours des temps gologiques. La gochronologie ici

    a permis dapporter des lments de rponse en estimant, par exemple, les vitesses

    dexhumation de ces roches de haute pression (i.e. De Sigoyer et al., 2000 - clogites du Tso

    Morari en Himalaya ; Schrer & Labrousse, 2003 - clogites de la Western Gneiss Region en

    Norvge ; Amato et al. 1999 - clogites de Zermatt-Saas dans les Alpes ; Chavagnac & Jahn

    1996 - clogites du Dabie Shan en Chine).

    Cependant, comme toute discipline, la gochronologie nest pas sans failles. Si relier

    un ge avec un instantan de lhistoire pression/temprature dune roche est une grande

    source dinformation, il nen reste pas moins un vritable challenge dans certains cas. Ainsi,

    le dbat sur linterprtation des ges radiochronologiques reste lorigine de nombreuses

    publications scientifiques. Age de cristallisation, ge de refroidissement, ge de dformation,

    18

  • ge hrit ou encore ge fictif sont autant dinterprtations qui ont t donnes aux ges

    obtenus partir des diffrents chronomtres utiliss en gochronologie comme nous le

    verrons dans le premier chapitre de cette thse. En effet, le comportement des systmes

    isotopiques est complexe et est dict par un grand nombre de facteurs intrinsques et

    extrinsques au systme tudi. Cest cette constatation qui a motiv la ralisation de cette

    thse.

    Sans avoir la prtention de rpondre toutes les questions poses par la

    gochronologie, ce travail se propose dapporter des informations complmentaires sur le

    comportement de certains systmes isotopiques afin den amliorer leur comprhension et

    leur utilisation. Un des buts recherchs tant dutiliser la gochronologie pour contribuer la

    comprhension de la formation et de lvolution des roches de haute pression, ce travail est

    focalis sur certains systmes isotopiques particulirement pertinents pour ltude de ces

    roches. Ainsi, nous avons choisi dtudier le comportement des systmes Rb/Sr, Ar/Ar et

    Sm/Nd. En effet, les mthodes Rb/Sr et Ar/Ar appliques aux phengites, minraux frquents

    dans les paragenses clogitiques, ainsi que la systmatique Sm/Nd applique aux grenats,

    minraux dominants dans les paragenses clogitiques, sont des mthodes frquemment

    utilises pour la datation des roches de haute pression.

    Ltude du comportement de ces systmes a t applique des roches ayant enregistr

    une histoire mtamorphique complexe afin dobserver la rponse des systmes isotopiques

    des processus tels que la recristallisation, la dformation ou encore la circulation de fluides.

    Les roches qui ont t choisies pour cette tude sont les clogites de la nappe de Linds

    affleurant au sein de larc de Bergen en Norvge. Ces roches, issues dune histoire

    polymtamorphique complexe, ont fait lobjet de nombreux travaux visant contraindre leur

    volution. Ainsi nous disposions au dpart de ce travail dun grand nombre de donnes

    disponibles dans la littrature permettant de dfinir avec prcision leur mode de formation

    (ces donnes sont regroupes dans le second chapitre de cette thse). En complment de ces

    donnes, des analyses :

    - ptrologiques (chapitre trois),

    - des lments en trace (chapitre quatre),

    - isotopiques Rb/Sr, Sm/Nd et Ar/Ar (chapitre cinq),

    - par diffraction des rayons X (chapitre six),

    19

  • - de rapports isotopiques de loxygne (chapitre six),

    ont t effectues au cours de cette thse sur les diffrentes phases minrales des chantillons

    tudis pour contraindre par le plus de paramtres possible le comportement des systmes

    isotopiques Rb/Sr, Ar/Ar et Sm/Nd durant lhistoire tectonomtamorphique des roches

    tudies. La synthse des diffrentes observations et rsultats acquis au cours de cette thse et

    linterprtation qui en dcoule pour les donnes gochronologiques des roches tudies sont

    regroups dans le septime chapitre de ce manuscrit, prcdant la conclusion de cette tude.

    20

  • Chapitre 1 : Problmatique

    Utilisation et comprhension des

    radiochronomtres

    21

  • I Introduction ..................................................................................................................... 23 II La gochronologie Rb/Sr, Sm/Nd et Lu/Hf. .................................................................. 23

    II.1 Introduction................................................................................................................. 23 II.1.a Principes de lisochrone................................................................................................... 23 II.1.b Application du diagramme isochrone pour un systme roche......................................... 24

    II.2 La fermeture dun systme .......................................................................................... 26 II.2.a Introduction ..................................................................................................................... 26 II.2.b La diffusion dans un solide.............................................................................................. 26 II.2.c Le concept de temprature de fermeture de Dodson (1973)............................................ 29

    Formulation .............................................................................................................................................. 29 Application dans le cas dun refroidissement lent .................................................................................... 31

    II.2.d Le calcul des tempratures de fermeture ......................................................................... 31 Principe..................................................................................................................................................... 31 Mesures exprimentales des paramtres de diffusion ............................................................................... 32 Expriences de diffusion des terres rares (REEs) ..................................................................................... 35 La diffusion du Sr...................................................................................................................................... 38

    II.2.e Les limites de la formulation de Dodson......................................................................... 41 Cas des espces diffusant lentement.......................................................................................................... 41 Rservoir infini contre rservoir fini......................................................................................................... 43 Applications .............................................................................................................................................. 48

    II.3 Les dsquilibres isotopiques ..................................................................................... 49 II.3.a Dfinition......................................................................................................................... 49 II.3.b Le cas du polymtamorphisme ........................................................................................ 50

    Rle de la dformation .............................................................................................................................. 52 Rle des fluides ......................................................................................................................................... 53 Conclusion ................................................................................................................................................ 55

    II.3.c Autres cas de dsquilibre isotopiques ............................................................................ 55 Hritages de compositions isotopiques prcoces ...................................................................................... 55 Incorporation dinclusions rfractaires .................................................................................................... 58

    III La gochronologie 40Ar/39Ar ........................................................................................... 63 III.1 Prsentation ................................................................................................................ 63

    III.1.a Schma de dsintgration du 40K..................................................................................... 63 III.1.b Principes de la mthode 40Ar/39Ar ................................................................................... 64 III.1.c Les intrts de cette mthode........................................................................................... 66

    III.2 Le comportement de largon dans les micas blancs ................................................... 67 III.2.a La diffusion de largon dans les muscovites.................................................................... 67 III.2.b Effet de la composition sur la rtention de largon.......................................................... 69 III.2.c Les pertes dargon, rajeunissement des ges ................................................................... 70 III.2.d Synthse........................................................................................................................... 72

    III.3 Lexcs dargon .......................................................................................................... 72 III.3.a Quest ce quun excs dargon ?...................................................................................... 72 III.3.b Les diffrents types dexcs dargon ............................................................................... 74 III.3.c Interprtation gochimique des excs dargon ................................................................ 74

    La solubilit de largon dans les fluides ................................................................................................... 75 La solubilit de largon dans les minraux ............................................................................................... 76 Le rle des fluides ..................................................................................................................................... 77 Comportement en systme ferm............................................................................................................... 77

    IV Synthse et stratgie dtude .......................................................................................... 78

    22

  • I Introduction Ce chapitre regroupe diffrentes observations concernant le comportement des systmes

    isotopiques, et les consquences qui en dcoulent pour linterprtation des donnes

    gochronologiques. La premire partie se focalise sur les mthodes gochronologiques pour

    lesquelles le mode de calcul des ges est bas sur lobtention disochrone, avec une attention

    particulire aux systmes Rb/Sr et Sm/Nd qui sont les deux systmes utiliss dans ce travail

    de thse. La gochronologie 40Ar/39Ar est discute dans la seconde partie. Largon tant un

    gaz rare, les principes de la datation 40Ar/39Ar ne sont pas exactement bass sur les mmes

    hypothses que celles mises pour les mthodes isochrones. Cependant un certain nombre de

    processus discuts dans la premire partie sont applicables largon, les spcificits de cette

    mthode seront nonces dans la seconde partie.

    II La gochronologie Rb/Sr, Sm/Nd et Lu/Hf.

    II.1 Introduction II.1.a Principes de lisochrone Afin de discuter de linterprtation des ges obtenus par la mthode isochrone, il faut rappeler

    comment se fait la construction de ces isochrones. Le rappel se fera avec le couple Rb/Sr mais

    les mmes raisonnements sont applicables aux systmes Sm/Nd et Lu/Hf par exemple.

    Llment Rb est constitu de deux isotopes, le 85Rb, et 87Rb. Lisotope 87Rb est radioactif et

    se dsintgre en 87Sr* radiognique par mission dun rayonnement - avec une constante de

    dsintgration 87Rb = 1.42.10-11an-1 (T87Rb = 48.8.109 ans). 87Rb 87Sr* + -

    Aprs la fermeture dun systme au temps to (cette notion sera prcise plus loin) la quantit

    disotope fils radiognique produit (87Sr*) est proportionnelle au temps qui sest coul et la

    quantit disotope pre prsent to suivant la relation:

    (1) (87Sr*)t = (87Sr)to + (87Rb)t(et-1)

    Cette quation correspond lquation dune droite dans un diagramme 87Sr = f (87Rb), o la

    pente de la droite permet de calculer t, le temps coul depuis la fermeture du systme et

    lordonne lorigine correspond la quantit initiale de 87Sr to. Pour des raisons

    23

  • analytiques, cette quation est normalise un isotope naturel stable du Sr, le 86Sr (dans ce

    cas (86Sr)t = (86Sr)to). En effet, il est plus ais de mesurer des rapports isotopiques au

    spectromtre de masse que de mesurer des concentrations absolues dun isotope. Lquation

    (1) scrit alors :

    (2) (87Sr/86Sr)t = (87Sr/86Sr)to + (87Rb/86Sr)t(et-1)

    Le diagramme (87Sr/86Sr) = f (87Rb/86Sr) est nomm diagramme isochrone (Figure I-1).

    (87Sr/86Sr)to

    87Rb/86Sr Minral 1 : Rb/Sr initial faible peu sensible la dsintgration du 87Rb.

    variation du rapport 87Sr/86Sr trs faible.

    Minral 3 : Rb/Sr initial lev trs sensible la dsintgration du 87Rb.

    variation importante du rapport 87Sr/86Sr au cours du temps.

    minral qui permet une bonne dfinition de la pente.

    Minral 3 Minral 2 Minral 1

    87Rb 87Sr + - + + Q = 1,42.10-11 an-1

    87Sr/86Sr

    to

    t

    dsintgration du 87Rb

    production de 87Sr*

    et-1

    Figure I-1 : Principe du diagramme isochrone illustr pour le radiochronomtre Rb/Sr

    II.1.b Application du diagramme isochrone pour un systme roche La prcision de lge calcul par rgression linaire partir de lalignement des points

    analytiques dans un diagramme isochrone dpendra de la qualit de cet alignement. Lors des

    calculs, il existe des tests statistiques permettant de contrler cet alignement. Par exemple, le

    coefficient de probabilit indique la probabilit de faire passer une droite unique entre les

    24

  • diffrents points analytiques, et le MSWD ( Mean Square of Weighted Deviates ) dcrit la

    dispersion des donnes de faon pondre en considrant la marge derreur de chaque point

    analytique. En pratique, la prcision sur un ge dduit de la pente dune droite dans un

    diagramme isochrone sera dautant meilleure si cette droite est dfinie par des points

    suffisamment loigns, cest dire avec des rapports 87Rb/86Sr bien distincts. Dans une roche,

    les diffrents points peuvent tre obtenus en analysant diffrentes phases minrales prsentes

    dans cette roche (Figure I-1). A to, toutes les phases dun systme sont lquilibre

    isotopique, cest dire quelles auront toutes le mme rapport initial (86Sr/87Sr)to. Par contre,

    les diffrents minraux, au moment de leur cristallisation, vont incorporer plus ou moins de Sr

    et Rb en fonction de leur coefficient de partage pour llment considr, et auront, par

    consquent, des rapports 87Rb/86Sr distincts (Figure I-1). Pour dater une roche avec une bonne

    prcision, il est donc primordial dutiliser des phases minrales caractrises par des rapports

    Rb/Sr levs et dautres par des rapports Rb/Sr faibles. Dans les roches, ce sont gnralement

    les micas (Tableau I-1) qui prsentent les rapports Rb/Sr les plus levs (i.e. 87Rb/86Sr entre

    130 et 160 pour des biotites issues dune granodiorite mtamorphise ; Santos Zalduegui et

    al., 1995), ceci est corrl au fait que le Rb+ a un rayon ionique (1.81 dans un site de

    coordination 12 ; tous les rayons ioniques donns sont daprs Whittacker & Munkus, 1970)

    trs proche de celui du K+ (1.68 dans un site de coordination 12 ) et se substitue par

    consquent au K interfoliaire des micas de faon trs stable. Le Sr2+ a, quant lui, des

    proprits physico-chimiques et un rayon ionique (1.21 dans un site de coordination 6)

    proche du Ca2+(1.08 dans un site de coordination 6) et remplace donc facilement le Ca dans

    les minraux calciques, comme les plagioclases (e.g. 87Rb/86Sr = 0.21 pour des plagioclases

    issus dune granodiorite mtamorphise ; Santos Zalduegui et al., 1995). De la mme faon,

    ce sont les grenats qui fractionnent beaucoup le Sm par rapport au Nd ainsi que le Lu par

    rapport au Hf (Tableau I-1), et qui vont donc contribuer la bonne dfinition dune isochrone

    dans des diagrammes 143Nd/144Nd = f(147Sm/144Nd) (e.g. 147Sm/144Nd = 2.1 pour des grenats

    issus dune granulite alors que la roche totale possde un rapport 147Sm/144Nd de 0.1; Mezger

    et al., 1992) et 176Hf/177Hf = f (176Lu/177Hf) (i.e. 176Lu/177Hf = 1.2 pour des grenats issus dune

    granulite mafique alors que la roche totale possde un rapport 176Lu/177Hf de 0.003 ; Scherer

    et al., 2000).

    En pratique, deux points sont suffisants pour dfinir une droite ( bichrone ) et par

    consquent dater une roche, mme si nous verrons par la suite que cette approche a ses

    limites. Mais quoi correspond lge dduit dune isochrone, quest-ce que la fermeture dun

    25

  • systme ? La suite de cette partie regroupe un certain nombre dobservations et de

    raisonnements formuls autour de linterprtation des ges isochrones.

    Systme Isotope pre Isotope filsradiogniqueConstante dedsintgration

    Priode dedsintgration

    Isotope stable utilispour la normalisation

    Minraux permettantune bonne dfinition

    de la pente

    Rb/Sr 87Rb 87Sr 1.42.10-11an-1 48.8.109 ans 86Sr micasSm/Nd 147Sm 143Nd 6.54.10-12an-1 1.06.1011 ans 144Nd grenatsLu/Hf 176Lu 176Hf 1.94.10-11an-1* 35.71.4.109ans 177Hf grenats

    *donne de Tatsumoto et al. (1981) calcule d'aprs la pente d'une isochrone d'une mtorite d'ge connue. Des mthodes de comptage direct suggrent une constante plus basse de 1.86-1.87.10-11an-1 (Scherer et al., 2000). Tableau I-1 : Paramtres dfinissant les systmes gochronologiques Rb/Sr, Sm/Nd et Lu/Hf. II.2 La fermeture dun systme II.2.a Introduction Dans un systme roche, le 87Rb prsent se dsintgre en permanence en 87Sr* radiognique

    suivant un taux qui est donn par sa constante de dsintgration. Cette transformation va donc

    modifier de faon significative la composition isotopique du systme considr. Dans une

    roche, comme cela a t dit prcdemment, les diffrentes phases minrales vont plus ou

    moins enregistrer cette variation. Des minraux riches en Rb par exemple auront leur rapport 87Sr/86Sr qui voluera plus rapidement que des minraux pauvre en Rb ou caractriss par des

    rapports Rb/Sr trs bas (dans ce cas la quantit de 87Sr* produit par la dsintgration du 87Rb

    naura pratiquement pas deffet sur le rapport 87Sr/86Sr). Tant que le systme est ouvert, les

    diffrentes phases vont changer leurs isotopes de faon maintenir lquilibre isotopique

    entre toutes les phases comme cela est prvu par la seconde loi de la thermodynamique. De

    cette faon, au moment de la fermeture du systme, toutes les phases qui auront cristallis lors

    dun mme vnement possderont un mme rapport initial 87Sr/86Sr.

    II.2.b La diffusion dans un solide Un transport chimique implique gnralement deux processus, un processus dadvection et un

    processus de diffusion. Dans le cas des roches uniquement constitues de phases solides, les

    transports advectifs ne rentrent pas en compte pour le rquilibrage isotopique. La diffusion

    implique un flux dlments dirig selon un gradient de concentration. Ce processus est dcrit

    26

  • par la premire loi de Fick qui dit que le flux J dune espce chimique travers un plan est

    proportionnel au gradient de concentration (C/x) normal ce plan (dans le cas dun systme

    une dimension), et peut tre formul de la faon suivante :

    (3) J = -DC/x

    Le signe moins prcise que le flux se fait dans la direction de la plus faible concentration. D

    est le coefficient de diffusion exprim en cm2s-1, et J est exprim en moles cm-2 s-1. Dans le

    cas dun systme trois dimensions, la premire loi de Fick peut scrire :

    (4) J = -D C avec = C/x + C/y + C/z

    Un changement de concentration en un point donn un instant donn est dcrit par la

    deuxime loi de Fick :

    (5) C/t= D2C/x2

    change Diffusion interstitielle

    Via des lacunes Interstitiellement

    Figure I-2 : les diffrents modes de diffusion dans un minral

    Il existe deux contraintes importantes dans le cas de la diffusion :

    1- Il ny a pas de transport net de matire travers les limites considres. Dans ce cas, le

    mouvement dune espce travers le plan doit tre quilibr par le transport dune ou

    plusieurs autres espces dans la direction oppose.

    27

  • 2- La neutralit doit tre respecte. La diffusion dune espce ionique dans une direction

    doit tre quilibre par la diffusion dune quantit gale de charge dans lautre

    direction.

    Ces contraintes impliquent, dans le cas de dsquilibres isotopiques, que les minraux ne

    peuvent pas perdre un isotope radiognique sans quil ny ait un change avec un autre cation

    de mme charge pour respecter lquilibre. Par exemple dans le cas du couple Rb/Sr, les

    isotopes 87Sr et 86Sr vont diffuser dans des directions opposes.

    Dans un minral, il existe quatre modes de diffusion possibles (Figure I-2):

    1- Echange: deux atomes dans des sites adjacents vont sinter-changer.

    2- Diffusion interstitielle : un atome va se dplacer dun site interstitiel un autre.

    3- Interstitiellement : un atome est dplac dun site cristallin vers un site interstitiel.

    4- Lacune du rseau cristallin : un atome se dplace dun site cristallin vers une lacune de

    cristallisation, laissant le site vacant en aval.

    Les mcanismes 1 et 3 impliquent le dplacement de deux atomes, et par consquent auront

    une forte nergie dactivation. De plus les sites interstitiels tant relativement troits, le

    mcanisme 2 ne pourra sappliquer quaux petits atomes comme lH ou He. Par consquent le

    mcanisme 4 apparat comme le mcanisme principal permettant la diffusion dans un solide.

    Gnralement les lacunes dans les rseaux cristallins sont de deux types : permanents ou

    temporaires. Les lacunes permanentes proviennent soit de dfauts dans la matrice ou sont

    lies la prsence dimpurets, par exemple lors de la substitution dun cation univalent par

    un cation divalent. Dans ce cas, un site constitu dun cation univalent sera laiss vacant pour

    respecter lquilibre de charge. Les lacunes temporaires sont fonction de lagitation thermique

    qui augmente lgrement le volume du solide. Ce deuxime cas est donc dpendant de la

    temprature. Le coefficient de diffusion sera donc fonction de la probabilit de crer des sites

    vacants dans la matrice, et par consquent, fonction dune nergie ncessaire la cration de

    sites vacants et de lnergie ncessaire au dplacement dun atome dans ces sites. Ces deux

    types dnergie sont regroups sous un seul terme E qui est nomm nergie dactivation. La

    valeur du coefficient de diffusion D en fonction de la temprature sexprime suivant la

    relation donne par Arrhenius :

    (6) D = Doexp(-E/RT)

    O Do est le facteur frquentiel (D pour une temprature infiniment haute) exprim en cm2s-1,

    R est la constante des gaz parfaits (1.987.10-3 kcalmol-1K-1), T la temprature absolue en

    Kelvin, et E est lnergie dactivation du processus de diffusion exprime en kcalmol-1 (KJ).

    28

  • Do va dpendre de la frquence de vibration et de la distance du saut inter-atomique. Les

    valeurs de E sont relativement similaires pour la plupart des lments (typiquement entre 50

    et 200KJ), mais Do varie normment. Do et E et par consquent D sont spcifiques dun

    minral donn pour une mme espce chimique.

    La dpendance du coefficient de diffusion la pression est dcrit par la relation :

    (7) D = Doexp((-E+(P-1)V)/RT)

    O V est le volume dactivation.

    II.2.c Le concept de temprature de fermeture de Dodson (1973)

    Formulation

    Tem

    pra

    ture

    Tf

    Temps

    isot

    ope

    fils /

    isot

    ope

    pre

    Temps

    to fermeture complte

    dbut de fermeture

    Figure I-3 : Reprsentation schmatique du concept de temprature de fermeture. Tf est la temprature de fermeture et to lge dduit dun diagramme isochrone. Durant un refroidissement lent depuis de hautes tempratures, le rapport isotope fils/isotope pre (F/P) passe dun systme ouvert (F/P = 0), une zone daccumulation partielle jusqu un systme ferm quand la temprature est trop basse pour permettre la diffusion. Dans cette partie de la courbe, le rapport F/P crot de faon constante avec le temps. Daprs Dodson (1973).

    29

  • De la relation dArrhenius, il ressort que la diffusion est fortement fonction de la temprature.

    Plus la temprature dcrot (ce qui peut correspondre, par exemple, au refroidissement dun

    pluton granitique aprs sa mise en place), plus la diffusion diminue et tend exponentiellement

    vers le zro. A haute temprature, la diffusion volumique va permettre un rquilibrage

    isotopique efficace, basse temprature, la diffusion volumique va devenir si lente que

    lisotope fils va saccumuler dans le minral hte et enregistrer le dsquilibre isotopique.

    (Figure I-3). La figure I-3 montre en quoi un ge dduit dun diagramme isochrone est reli

    un intervalle de temps. Lge apparent to est lextrapolation de la partie de la courbe

    daccumulation totale sur laxe des temps, et correspond donc une temprature.

    Dodson (1973) formula le concept de temprature de fermeture, o la temprature de

    fermeture (Tf) est dfinie comme la temprature du systme au temps donn par son ge

    apparent. La solution mathmatique de cette temprature de fermeture (Tf) donne par

    Dodson (1973) repose sur les trois conditions aux limites suivantes :

    1- Le minral tudi est entour dune matrice qui se comporte comme un rservoir infini

    et homogne pour lespce diffusante. Ceci signifie que les changes isotopiques

    soprant entre le minral et ce rservoir infini ne vont pas changer la composition

    isotopique de ce dernier.

    2- Le minral a atteint une concentration homogne de lespce diffusante une

    temprature initiale To au dbut du refroidissement ou durant le refroidissement.

    3- La concentration en surface du minral est suppose varier linairement avec le temps

    entre To et Tf.

    Dans ces conditions, la temprature de fermeture peut tre dduite par itration de lquation

    suivante:

    (8) Tf = E/R/ln ([ARTf2Do/a2]/[EdT/dt])

    O A est un facteur gomtrique reprsentatif du type danisotropie observ pour la diffusion

    (A vaut 55 pour une sphre (diffusion isotrope), 27 pour un cylindre et 8.7 pour un plan) ; a

    est le rayon effectif de diffusion en cm; dT/dt est le taux de refroidissement en Ks-1.

    De cette quation, il apparat que pour un minral de composition chimique donne, donc de

    Do donn, il nexiste pas une temprature de fermeture unique, celle-ci varie en fonction de la

    taille des grains et du contexte de refroidissement. Plus le taux de refroidissement est faible,

    plus la Tf sera basse. Pour un refroidissement extrmement rapide, la temprature de

    fermeture dun systme sera pratiquement quivalente la temprature de cristallisation. Il est

    important de noter galement que a ne correspond pas forcment la taille physique des

    30

  • grains, mais peut tre plus petit en raison de lamelles dexsolution par exemple, ou de dfauts

    dans la structure cristalline.

    Application dans le cas dun refroidissement lent Suivant la formulation de Dodson (1973), un ge isochrone obtenu par analyse isotopique de

    diffrentes phases minrales constitutives dune roche correspond au moment o la roche

    tudie atteint une temprature infrieure la temprature de fermeture du minral qui

    possde la Tf la plus basse pour le systme radiochronologique utilis dans la roche tudie.

    Lnorme intrt, largement exploit de cette formulation, est la capacit de relier un ge

    radiochronologique une temprature dans un diagramme P-T dduit de ltude ptrologique

    de la roche tudie et de mener ainsi des tudes de thermochronologie. En utilisant diffrents

    systmes radiochronologiques caractriss par diffrentes tempratures de fermeture, il est

    thoriquement possible de calculer des taux de refroidissement (par itration) et des vitesses

    dexhumation des roches ceci quand lhistoire P-T de la roche est bien contrainte par ailleurs.

    Ces paramtres sont indispensables aux reconstitutions godynamiques et llaboration de

    modles mcaniques dexhumation des roches. Lutilisation de diffrents systmes

    gochronologiques associs diffrentes tempratures de fermeture pour calculer des vitesses

    dexhumation, est cependant limite par le type de refroidissement enregistr par les roches.

    Lors dun refroidissement rapide, on obtiendra une faible dispersion entre les ges obtenus par

    diffrents systmes thermochronologiques. Dans ce cas, les diffrences entre les ges datant le

    refroidissement de la roche diffrentes tempratures seront souvent infrieures aux

    prcisions analytiques, et il ne sera pas possible de calculer des vitesses dexhumation partir

    de ces donnes. Cest le cas notamment de roches formes dans des conditions de haute

    ultra-haute pression et exhumes rapidement selon un gradient thermique de basse

    temprature (e.g. Philippot et al., 2001 ; Schneider et al., 2004).

    II.2.d Le calcul des tempratures de fermeture

    Principe Les tempratures de fermeture dun systme donn peuvent tre estimes soit

    exprimentalement (e.g. Harrison, 1981 ; Sneeringer et al. 1984 ; Watson et al., 1985 ;

    Giletti ; 1991 ; Cherniak, 1995, 1998, 2000 ; Ganguly et al., 1998 ; Hammouda & Cherniak,

    31

  • 2000 ; Van Orman et al., 2002), soit empiriquement partir de contraintes de gologie

    rgionale (e.g. Purdy & Jger, 1976 ; Wagner et al., 1977 ; Mezger et al., 1992 ; Jagoutz,

    1988 ; Hensen & Zhou, 1995 ; Jenkin et al., 2001). Dans le deuxime cas, les tempratures de

    fermeture peuvent tre apprhendes en corrlant la distribution spatiale des ges obtenus

    avec un systme gochronologique donn avec les zones disomtamorphisme

    (mtamorphisme rgional ou de contact ; e.g. Purdy & Jger, 1976 ; Wagner et al., 1977) ; ou

    encore en observant la variation des ges obtenus en fonction de la profondeur des

    chantillons collects dans des forages (e.g. Turner & Forbes, 1976). Une large gamme de

    temprature de fermeture a t obtenue de cette faon. Par exemple pour le systme Rb/Sr

    dans les biotites, une valeur de 300C50C a t propose (Armstrong et al., 1966 ; Jger et

    al., 1967). Cette valeur, qui est souvent considre comme la temprature de fermeture de la

    biotite pour le systme Rb/Sr, a cependant t fixe en comparant la distribution rgionale des

    ges dans les Alpes Centrales celle des isogrades et des tempratures attribues ces

    isogrades. Une des isogrades, celle correspondant la disparition du stilpnomlane tait

    considre, au moment de ces tudes, comme marquant le franchissement de lisotherme

    300C. Mais cette temprature de disparition du Stilpnomlane a par la suite t rvalue

    460-470C (Nitsch, 1970 ; Korikovskij et al., 1975). Cependant, la temprature de 300C

    continue tre utilise comme valeur de rfrence pour le chronomtre Rb/Sr sur biotites (cf.

    discussion de Villa, 1998). Lestimation des tempratures de fermeture par cette mthode

    empirique est donc sujette caution, mais permet cependant dapporter des limites aux

    donnes de diffusion qui peuvent tre obtenues exprimentalement.

    Mesures exprimentales des paramtres de diffusion

    Conformment lquation de la temprature de fermeture de Dodson, une valeur thorique

    de temprature de fermeture dun systme isotopique donn peut tre calcule pour un taux de

    refroidissement et une taille de grain donns, si on connat le facteur frquentiel Do et

    lnergie dactivation E de llment radiognique dans le systme en question. Ces

    paramtres peuvent tre dduits dexpriences de diffusion (Figure I-4).

    Le principe de ces expriences est de placer un minral soit dans une solution contenant un

    lment donn (expriences de type hydrothermal) soit de dposer dans des conditions

    anhydres une couche dlment en surface dun minral. Llment diffusant tudi est

    gnralement dop isotopiquement pour pouvoir suivre son cheminement dans le minral. Ces

    32

  • expriences sont menes pour des conditions de pression et de temprature donnes. Dans le

    cas o certaines conditions aux limites sont respectes, les profils de diffusion extraits de ces

    expriences vont pouvoir se corrler avec une fonction erreur (erf) de la forme :

    (9) (C(x,t)-Co)/(Ci-Co)=erf(x/(2Dt))

    Avec C, la concentration la profondeur x un temps t ; Co la concentration linterface ; Ci

    la concentration initiale dans le minral ; D le coefficient de diffusion.

    Profondeur

    Surface du minral

    Con

    cent

    ratio

    n de

    l

    lm

    ent d

    iffus

    ant C

    Concentration dans le milieu dchange Co

    Profondeur

    erf-1

    ((C

    o-C

    )/Co)

    2(Dt)

    (a) (b)

    1/T

    -lnD

    E/R

    lnDo

    (c) -lnD = ln Do + E/RT

    Figure I-4 : Cette figure montre comment le coefficient de diffusion D peut tre extrait dexpriences de diffusion. (a) reprsente un profil type de concentration dun lment diffusant dans un minral pour des conditions prcises de pression et de temprature. (b) Inversion du profil de diffusion obtenu exprimentalement par une fonction erreur. Quand les donnes suivent le modle prdit, D est dduit de la pente du diagramme erf-1((C-Co)/Co) Vs. x pour une pression et une temprature donne. t est la dure de lexprience. (c) Diagramme dArrhenius permettant dextraire les paramtres de diffusion Do et E dun lment donn dans un minral donn pour une pression donne.

    33

  • Cette quation dcoule de lquation de diffusion une dimension de Fick (quation 4) pour

    un milieu semi-infini dans le cas o la diffusion est indpendante de la concentration et o la

    concentration dans le rservoir source est maintenue constante (Cherniak & Watson, 1992,

    1994). Le coefficient de diffusion est calcul en reportant linverse de la fonction erreur Erf-

    1((Co-C(x,t))/Co) vs. x (distance depuis la surface de lchantillon). Si les donnes sont en

    accord avec la solution dfinie par le modle, une droite de pente 2Dt est obtenue. Co, la

    concentration en surface du diffusant, est dduite par itration, jusqu ce que lintercept

    lorigine converge vers zro (Figure I-4b). Ces expriences permettent donc de calculer le

    coefficient de diffusion dun lment donn dans un minral donn pour une temprature et

    une pression donnes. Afin de retrouver les paramtres Do et E permettant de prdire D dans

    nimporte quelles conditions de pression et de temprature, ces expriences sont renouveles

    pour diffrentes conditions P,T. Do et E peuvent tre dduis du report des donnes

    exprimentales dans un diagramme dArrhenius. Pour ce faire, lquation dArrhenius est

    passe en mode Log et devient :

    (10) LnD = Ln Do E/RT

    Cette quation correspond lquation dune droite dans un diagramme LnD = f (1/T), o

    lordonne lorigine correspond LnDo et la pente permet de dduire E (Figure I-4c). Les

    paramtres de diffusion sont extraits de ces expriences pour des conditions exprimentales

    de pression et de temprature particulires et peuvent tre extrapols pour dautres conditions

    P-T dans le cas o les donnes tracent une droite dans le diagramme dArrhenius. Cependant

    la diffusion est dpendante des lacunes du rseau cristallin qui sont de deux natures :

    extrinsques quand elles sont gnres thermiquement et intrinsques quand il sagit de

    lacunes permanentes. La limite entre les deux modes de diffusion qui en dcoule varie et

    dpend de la nature du matriau considr et des impurets. Quand le rgime de diffusion

    change, un changement de pente peut tre observ dans un diagramme lnD vs. 1/T (Figure I-

    5). Cest pourquoi lextrapolation de donnes exprimentales doit tre faite avec prcaution

    car il nest pas toujours possible dvaluer quel est le mode de diffusion qui a t modlis

    exprimentalement. De plus, un autre point dont il faut sassurer lors des expriences de

    diffusion est que le minral tudi est bien rest stable tout au long de lexprience (cest

    dire quils na pas subi de modification de sa structure cristalline en rponse aux lvations de

    pression et de temprature), sans quoi les donnes de diffusion obtenues ne sont pas

    reprsentatives du minral tudi. Ce point est particulirement critique pour les minraux

    34

  • hydroxyls qui peuvent se dshydrater au cours des expriences, dans ce cas, les expriences

    doivent tre menes en conditions hydrothermales.

    1/T

    -lnD

    Ei/R

    ln(Doi+Doe)

    (Ei+Ee)/R

    lnDoi

    Figure I-5 : Diagramme dArrhenius montrant comment le changement de mcanisme de diffusion (intrinsque i extrinsque e) rsulte en un changement de pente.

    Expriences de diffusion des terres rares (REEs) Les expriences de diffusion dans les minraux ont montr, dans la plupart des cas, une forte

    corrlation entre la diffusion, les rayons ioniques des lments tudis, la charge cationique et

    la composition chimique (e.g. Van Orman et al., 2001 ; Cherniak, 2003). Cependant, pour les

    grenats, les diffrentes expriences (Harrison & Wood, 1980 ; Coghlan, 1990 ; Ganguly et al.,

    1998 ; Van Orman et al., 2002) ne montrent pas de variation des coefficients de diffusion des

    terres rares en fonction du rayon ionique (entre 0.94 et 1.13 pour les REEs dans un site de

    coordination 6). Dans ce cas, la diffrence entre les diffrents rayons ioniques est trop faible

    pour que des variations soient perues au niveau de la diffusion. Dans le cas de faibles

    diffrences de rayon ionique, les variations du facteur frquentiel Do seront surtout observes

    pour les minraux ayant un grand module lastique, et seront dautant plus perceptibles que

    les lments sont de faible charge cationique (e.g. Cherniak,, 2003). La diffusion des REE3+

    dans les grenats est moins rapide que celle des cations divalents comme le Mg2+, Fe2+ et Mn2+

    (Chakraborty & Ganguly, 1992 ; Chakraborty & Rubie, 1996 ; Freer & Edwards, 1999). Cette

    35

  • constatation corrobore les observations effectues en domaine naturel qui supposaient une

    diffusion plus lente des REEs que des lments majeurs (Cohen et al., 1988 ; Vance &

    ONions, 1990 ; Burton et al., 1995). La figure I-6 regroupe les donnes obtenues par

    diffrentes tudes pour la diffusion des REEs dans les grenats.

    6 7 8 9

    -22

    -20

    -18

    -16

    1/T(104K-1)

    logD

    (m2 s

    -1)

    1400 1200 1000 800

    Temprature (C)

    (a) Prp; Sm; 3GPa

    (b) Prp; Sm, Dy, Yb ; 2.8 GPa

    (c) Alm ; Nd, Er ; 0.1GPa

    (d) Alm ; Sm, Nd ; 1 atm

    Figure I-6: Comparaison des diffrentes donnes de diffusion des REEs dans les grenats compiles dans un diagramme dArrhenius. (a) Harrison & Wood (1980), (b) Van Orman et al. (2002), (c) Coghlan (1990); (d) Ganguly et al. (1998). Prp, pour pyrope et Alm, pour almandin.

    Les expriences de Van Orman et al. (2002) et Harrison et Wood (1980) ont t menes sur

    des grenats de type pyrope. Les diffrences observes entre leurs rsultats sont principalement

    lies au mode exprimental trs diffrent utilis dans les deux cas. Van Orman et al. (2002)

    ont travaill entre 1200 et 1450C et 2.8GPa, dans des conditions o les pyropes sont

    stables. Leur mode opratoire consistait dposer une pellicule de REE en surface des grenats

    dans des conditions anhydres. Dans le cas de ltude dHarrison & Wood (1980), ces auteurs

    ont mesur le temps ncessaire pour arriver lquilibre dans le cas de pyropes placs dans un

    36

  • liquide silicat. Ces conditions exprimentales laissent supposer que la diffusion volumique

    ntait pas le seul processus impliqu dans le rquilibrage, et par consquent les donnes de

    diffusion extraites de ces expriences sont surestimes. Les donnes de Coghlan (1990) et

    Ganguly et al. (1998) ont t obtenues sur des grenats de type almandin. Les donnes de

    Coghlan (1990) dduites dexpriences hydrothermales sont relativement similaires celles

    de Van Orman et al. (2002) quand elles sont extrapoles. Les paramtres de diffusion dduits

    des expriences de Ganguly et al. (1998) pour des grenats de type almandin sont lgrement

    plus levs que ceux obtenus par Van Orman et al. (2002) pour des grenats de type pyrope, ce

    qui peut suggrer une dpendance de la diffusion la composition chimique. Cet effet a t

    observ par Chakraborty & Rubie (1996) pour le Mg qui diffuse plus vite dans les grenats de

    type almandin. Les tempratures de fermeture calcules avec lquation de Dodson (1973)

    partir des donnes de diffusion de Van Orman et al. (2002) pour le couple Sm/Nd sur grenat

    sont de 765 920C pour des grenats de 1mm et pour un taux de refroidissement compris

    entre 1 et 100C par Ma. Ces tempratures de fermeture sont compatibles avec la Tf estime

    de faon empirique par Jagoutz (1988) 850C daprs ltude de xnolites clogitiques de

    Tasmanie ayant subi un refroidissement lent. Elles concident galement avec celles

    proposes par Hensen & Zhou (1995), suprieures 700C , mais sont plus hautes que celles

    estimes par Mezger et al. (1992) sur des granulites et amphibolites de la province suprieure

    de lorogense grenvillienne (Tf 60050C). Lensemble de ces donnes suggre une

    temprature de fermeture relativement haute (>700C) pour le systme Sm/Nd dans les

    grenats.

    Des donnes de diffusion des REEs dans les clinopyroxnes (cpx) existent dans la littrature

    (Sneeringer et al., 1984 ; Van Orman et al., 2001). Il est intressant de connatre les processus

    de diffusion dans les cpx car ce sont les minraux gnralement associs aux grenats dans les

    paragenses clogitiques. La diffusion des REEs dans les diopsides est fortement dpendante

    du rayon ionique (elle sera dautant plus grande que le rayon ionique est faible ; Van Orman

    et al., 2001). A haute temprature (suprieure 1400C) elle est similaire celle des grenats

    pour les terres rares lourdes, et infrieure celle des grenats pour les terres rares lgres. A

    basse temprature, la diffusion dans les diopsides va dcrotre beaucoup plus rapidement que

    dans les grenats. Les donnes de Sneeringer et al. (1984) et Van Orman et al. (2001) sont

    relativement cohrentes et suggrent une temprature de fermeture du couple Sm/Nd dans les

    diopsides trs suprieure celle des grenats.

    37

  • La figure I-7 regroupe les diffrentes donnes de diffusions des REE obtenues pour

    diffrentes espces minrales.

    6 7 8 9

    -22

    -20

    -18

    -16

    1/T(104K-1)

    logD

    (m2 s

    -1)

    1400 1200 1000 800

    Temprature (C)

    Sm-zircon Nd-sphne Nd-apatite

    Nd-labradorite

    Nd-anorthite

    Nd-oligoclase

    REE-grenat

    Nd-grenat

    Nd-diopside

    Yb-diopside

    Nd-calcite

    Figure I-7: Diagramme dArrhenius compilant diffrentes donnes de diffusion des REE obtenues pour diffrents minraux. Toutes ces donnes ont t mesures dans des conditions de pression de 1 atm., except les donnes de diffusion dans les grenats de Van Orman et al. (2002) obtenues 2.8GPa. Les traits pais correspondent aux grenats (REE-grenats, Van Orman et al. (2002); Nd-grenats, Ganguly et al., (1998)); Les traits pleins aux clinopyroxnes (Van Orman et al., 2001); les lignes en pointills aux minraux accessoires (zircon, Cherniak et al. (1997); titanite, Cherniak (1995); apatite, Cherniak (2000)); les lignes en points aux feldspaths (Cherniak , 2003); la ligne tirets-points la calcite (Cherniak, 1998).

    La diffusion du Sr Il nexiste que trs peu de donnes sur la diffusion du Sr dans les micas : une exprience

    hydrothermale mene par Giletti (1991) sur des biotites, et une exprience en conditions

    anhydres mene par Hammouda et Cherniak (2000) sur des fluorophlogopites et aucune

    exprience sur les muscovites. De plus Giletti (1991) et Hammouda et Cherniak (2000) nont

    pas tudi la diffusion du Sr selon les mmes directions cristallographiques (perpendiculaire

    38

  • laxe c et parallle laxe c respectivement) alors quil a t dmontr une forte anisotropie

    de la diffusion dans les micas pour dautres lments comme loxygne (Fortier & Giletti,

    1991). La diffusion dans la direction parallle aux plans de clivage est quatre fois suprieure

    celle dans la direction parallle laxe c. La figure I-8 regroupe des donnes de diffusion

    obtenues pour les micas pour diffrents lments en fonction de la direction de diffusion

    tudie. La plupart des lments dans les micas ont la mme nergie dactivation (entre 100 et

    175KJ).

    6 7 8 9

    -22

    -20

    -18

    -16

    1/T(104K-1)

    logD

    (m2 s

    -1)

    1400 1200 1000 800

    Temprature (C)

    10 11 12 13

    -14 500

    Sr-biotite

    Sr-fluorophlogopite

    normal laxe c

    parallle laxe c

    18O

    18O

    18O

    18O 18O

    muscovite biotite phlogopite

    Figure I-8 : Diagramme dArrhenius montrant la diffusion du Sr et du 18O dans les micas suivant deux directions. Sr-biotite (Giletti, 1991) ; Sr-fluorophlogopite (Hammouda & Cherniak, 2000) ; 18O dans les micas (Fortier & Giletti, 1991).

    La figure I-9 montre une compilation des donnes de diffusion obtenues pour le Sr dans

    diffrents minraux. Il en ressort que les micas ont une nergie dactivation pour le Sr trs

    infrieure celle des autres silicates (autour de 250kJ). Les micas auront donc la temprature

    de fermeture la plus basse pour le systme Rb/Sr (Figure I-10). La temprature de fermeture

    39

  • dduite des donnes de Hammouda & Cherniak (2000) pour une fluorophlogopite de 1mm

    suivant un modle de diffusion cylindrique (modle qui considre une diffusion plus rapide

    dans la direction parallle aux plans de clivage, en accord avec les donnes exprimentales)

    varie de 385 333C pour un taux de refroidissement compris entre 100 et 10C par Ma. Ces

    donnes exprimentales sont en accord avec les observations de terrain qui suggrent une

    temprature de fermeture de lordre de 300 400C pour les micas trioctadriques (e.g.

    Vershure et al., 1980 ; Del Moro et al., 1982 ; Jenkin et al., 2001).

    6 7 8 9

    -22

    -20

    -18

    -16

    1/T(104K-1)

    logD

    (m2 s

    -1)

    1400 1200 1000 800

    Temprature (C)

    10 11 12 13

    -14 500

    biotite c

    fluorophlogopite // c

    calcite

    albite hornblende

    apatite

    feldspath-K

    anorthite

    titanite

    diopside

    Sr

    Figure I-9: Diagramme dArrhenius montrant les diffrents paramtres de diffusion du Sr pour diffrents minraux. Diopside (Sneeringer et al., 1984); titanite (Cherniak, 1995); anorthite et feldspath-K (Cherniak & Watson, 1992); albite (Giletti, 1991); calcite (Cherniak, 1997); apatite (Cherniak & Ryerson, 1993); hornblende (Brabander & Giletti, 1995); fluorophlogopite (Hammouda & Cherniak, 2000); biotite (Giletti, 1991).

    Aucune donne exprimentale ne permet destimer la Tf des muscovites pour le couple Rb/Sr

    mais les observations de terrain suggrent quelle doit tre suprieure denviron 200C celle

    des biotites/phlogopites et doit se situer aux alentours de 600C (Jger, 1967 ; Inger et al.,

    1996 ; Villa, 1998).

    40

  • Figure I-10 : Comparaison des diffrentes tempratures de fermeture pour le radiochronomtre Rb/Sr dans le diopside, la labradorite, loligoclase et la fluorophlogopite en fonction du rayon de diffusion effectif. Les tempratures de fermeture sont calcules daprs la formulation de Dodson (1973), pour un taux de refroidissement de 10C/Ma, selon une gomtrie cylindrique pour la fluorophlogopithe et une gomtrie sphrique pour les autres minraux. Les paramtres de diffusion sont de : Sneeringer et al., 1984; Cherniak & Watson, 1994; Hammouda & Cherniak, 2000.

    II.2.e Les limites de la formulation de Dodson

    Cas des espces diffusant lentement En 1986, Dodson a tendu son concept de temprature de fermeture au problme des espces

    diffusant lentement. Celles-ci doivent dvelopper un profil de Tf car la rquilibration du

    cur avec la matrice environnante doit tre plus lente qu linterface durant le

    refroidissement. (Figure I-11). Dodson (1986) rajoute alors comme condition aux limites que

    le profil en concentration dans un minral ne doit plus ncessairement tre homogne, par

    contre les changes par diffusion entre le minral et le milieu environnant ont d tre

    suffisamment efficaces pour que la concentration initiale ne soit prserve en aucun point du

    minral. Dans ce cas, un ge gochronologique est associ une temprature de fermeture

    pondre sur lensemble du minral. Cette hypothse de dpart qui rend la Tf indpendante de

    To, nest pas satisfaite pour des espces diffusant lentement comme les REEs dans les grenats

    ou les clinopyroxnes (Ganguly & Tirone, 1999). Par exemple on observe souvent des profils

    de zonation des cations divalents dans les grenats exhums de hauts grades mtamorphiques,

    41

  • forms dun cur homogne et dun rquilibrage limit aux bordures. Pour des taux de

    refroidissement raisonnables lchelle gologique, ce type de profil impose la prservation

    des compositions dquilibre du pic mtamorphique au cur des grenats (Lasaga, 1983 ;

    Duchne et al., 1998 ; Duchne & Albarde, 1999).

    Figure I-11: Profils de concentration successifs diffrentes tempratures (1-12) durant un refroidissement (Daprs Dodson, 1973). Linterface du minral est lquilibre chaque instant avec la matrice environnante. Lobtention de profils de concentration de plus en plus convexes est une consquence dune homognisation de la concentration par diffusion volumique plus lente que les variations de la composition du milieu environnant.

    Ganguly et Tirone (1999) ont dvelopp une extension la formulation de Dodson,

    considrant un systme avec un taux de diffusion arbitraire petit. Leur formulation de la Tf est

    fonction de To, temprature du pic mtamorphique, et de M, un facteur gomtrique en

    rapport avec la dimension des grains. Quand la dpendance de Tf To est prise en compte, Tf

    devient plus petite quand To augmente et quand le taux de refroidissement diminue (Ganguly

    et al., 1998 ; Ganguly & Tirone, 1999 ). Pour des grains de petite taille, une temprature

    initiale leve et un taux de refroidissement trs bas, les tempratures de fermeture calcules

    suivant la formulation de Ganguly et Tirone (1999) vont converger vers celles de Dodson

    (1973). Si la temprature initiale laquelle le minral squilibre est plus basse quune

    temprature seuil (qui varie en fonction de la taille des grains et du taux de refroidissement),

    alors la formulation de Dodson (1986) va surestimer la vritable Tf (Ganguly & Tirone,

    1999).

    Cette formulation surtout valable dans le cas des datations Sm/Nd sur grenats et probablement

    Lu/Hf, montre donc que pour un refroidissement rapide, lge calcul correspondra lge du

    42

  • pic mtamorphique de temprature. Par contre pour les micas, la diffusion est beaucoup plus

    rapide, et des zonations dlments majeurs sont rarement enregistrs, dans ce cas les

    hypothses de la formulation de Dodson (1973) semblent satisfaites.

    Il faut noter que le concept de temprature de fermeture trouve galement une application en

    geothermobaromtrie. Ce concept permet de savoir si les tempratures dquilibre calcules

    grce aux gothermomtres correspondent aux tempratures du pic mtamorphique ou des

    tempratures de refroidissement caractristiques du trajet rtrograde (e.g. Duchne et al.,

    1998 ; Duchne & Albarde, 1999). Ce qui peut avoir des applications trs intressantes dans

    la reconstruction de chemins P-T.

    Rservoir infini contre rservoir fini Le concept de temprature de fermeture nonc par Dodson (1973) est valide quand un

    minral peut se rquilibrer en permanence avec un rservoir infini. Pour le systme Rb/Sr

    par exemple, un minral perd du 87Sr* radiognique en permanence et le cde un rservoir

    infini sans en modifier sa composition isotopique, les processus de diffusion ayant lieu tant

    quil existe un gradient chimique ou isotopique dans une roche. Ainsi, dans une roche, les

    minraux riches en Sr vont pouvoir jouer le rle de rservoir infini. Dans dautres

    circonstances, un fluide percolant dans une roche voluant en systme ouvert peut jouer le

    rle de rservoir infini.

    La capacit dun minral agir en tant que rservoir infini va dpendre de sa rsistance une

    perte ou un gain en 87Sr (contrl par son coefficient de diffusion) et de lvolution de son

    rapport 87Sr/86Sr dans le temps (contrl par sa concentration initiale en Rb et Sr). Ces

    paramtres vont dfinir la quantit de Sr disponible pour lchange. Une forte concentration

    en Sr et une forte diffusivit vont tendre converger vers le modle du rservoir infini de

    Dodson. Un bon exemple pour illustrer cet effet est le cas dune roche bi-minrale (Jenkin et

    al., 1995) forme exclusivement de feldspath et de biotite. Les feldspaths, trs riches en Sr et

    dpourvus de Rb, vont pouvoir jouer le rle de rservoir infini par rapport aux biotites ayant

    un rapport Rb/Sr lev lors des changes isotopiques en Sr permettant de maintenir lquilibre

    isotopique entre ces deux minraux jusqu la fermeture complte du systme. Dans ce cas,

    on saperoit tout de suite des limitations de ce modle. Les feldspaths ont une temprature de

    fermeture beaucoup plus haute que la biotite (II.2.d), quand le systme passera sous la Tf des

    feldspaths, ceux-ci ne pourront plus correspondre un rservoir infini et les biotites seront

    43

  • dans lincapacit de se rquilibrer isotopiquement jusqu leur propre temprature de

    fermeture.

    to

    tf1

    tf2

    tf2

    tactueltactuel

    Minral 1 Minral 2 Minral 3 87Rb/86Sr

    87Sr

    /86Sr

    Tf Minral2 >Tf Minral1 >Tf Minral3

    Figure I-12: Diagramme isochrone Rb/Sr schmatisant lvolution de la composition isotopique de trois minraux dune mme roche voluant en systme ferm. to correspond au moment de la formation de la roche, tous les minraux sont lquilibre isotopique. A tf1 le minral 2 passe sous sa temprature de fermeture Tf et commence enregistrer le dsquilibre isotopique. A cet instant toutes les phases du systme sont encore lquilibre isotopique. A tf2, le systme passe sous la temprature de fermeture du minral 1. Le minral 3 ne pourra donc plus se rquilibrer isotopiquement nayant plus de partenaire dchange et commencera enregistrer le dsquilibre isotopique. tactuel reprsente la position des diffrents phases dans le diagramme isochrone lactuel. Les trois minraux ne sont pas aligns sur une mme isochrone car ils se sont ferms diffrents moments. Seule lisochrone reliant les points des minraux 1 et 3 a une signification. Lge dduit de cette isochrone correspond la fermeture du minral 1.

    Ce raisonnement est la base du modle propos par Giletti (1991) qui propose que la

    temprature de fermeture dun systme deux phases ne correspond pas la temprature de

    fermeture de la phase avec la Tf la plus basse, mais celle de la premire phase se fermer,

    dans lexemple ci-dessus, le feldspath. Pour une roche pluriphase, Giletti (1991) prvoit

    donc un fort dsquilibre isotopique entre les diffrentes phases qui ne se ferment pas au

    44

  • mme moment au cours dun refroidissement post cristallisation. Il propose que dans ces

    conditions, seules deux isochrones ont une signification thermique : lisochrone trace partir

    du point de la roche totale, et du point de la phase qui se ferme en premier et lisochrone trac

    entre les deux dernires phases se fermer. En effet, la premire phase se fermer est en

    quilibre cet instant avec le reste du systme. Ensuite chaque phase se ferme enregistrant un

    rapport initial diffrent de celui de la roche totale, correspondant une moyenne pondre des

    rapports isotopiques des dernires phases ouvertes lchange. Finalement, quand lavant

    dernire phase se ferme, elle entranera forcment la fermeture de la dernire (Figure I-12).

    Giletti (1991) montre galement que limportance du dsquilibre enregistr sera fonction du

    taux de refroidissement. En effet, plus le refroidissement sera rapide, moins le dsquilibre

    sera marqu, le cas extrme tant un refroidissement instantan pour lequel toutes les phases

    se ferment en mme temps.

    Jenkin et al. (1995) dveloppent un peu plus le modle du rservoir fini en considrant un

    mode de diffusion supplmentaire dans le modle : la diffusion intergranulaire. Peu de choses

    sont connues propos de la diffusion intergranulaire, mais elle est certainement plus rapide de

    plusieurs ordres de magnitude que la diffusion volumique (Joesten, 1991 ; Eiler et al., 1992 ;

    Farver & Yund, 1996). Les tudes ont montr quelle concernait les premiers nanomtres de

    la surface des minraux (Joesten, 1991 ; Farver et al., 1994). Dans leur modle, Jenkin et al.

    (1995), considrent la diffusion intergranulaire comme instantane impliquant un quilibre

    isotopique permanent au contact entre deux minraux. Ce modle est trs similaire au modle

    de Fast Grain Boundary diffusion (FGB) propos par Eiler et al. (1992) pour dcrire les

    changes isotopiques des isotopes de loxygne. Sur les bases de ce modle, Jenkin et al.

    (1995) modlisent dans le cas de la roche bi-minrale nonc plus haut, les effets de la

    composition modale de cette roche (proportion relative de biotite et de feldspath), de la taille

    relative des grains de ces deux phases, de la concentration en Sr de chacune de ces phases, et

    galement du taux de refroidissement (Figure I-13). Dans le cadre de leur modle, ils

    explicitent le fait que le volume de roche considr volue en systme ferm, ce qui sous

    entend labsence dun fluide circulant dans la roche. De plus, lchelle dhtrognit est

    suprieure la distance de diffusion, ce qui peut correspondre un chantillon prlev dans

    un affleurement relativement homogne en composition. Cette condition aux limites implique

    que le flux de perte ou de gain de Sr est lquilibre. Ils dsignent par Tapp la temprature

    apparente de fermeture du systme (la paire biotite-feldspath) diffrente de la Tf de Dodson

    (1973). Il montre que cette Tapp est fortement dpendante du mode de la roche, elle peut varier

    de plus de 100C suivant la composition modale.

    45

  • La roche voluant en systme ferm est compose de deux minraux : Minral 1 : Rb/Sr petit, [Sr] grande, D faible, Tf1 leve. Minral 2 : Rb/Sr grand, [Sr] faible, D grand, Tf2 basse.

    Cas 1 : Les minraux 1 et 2 sont en gale proportion : V1 = V2

    Cas 2 : la composition modale de la roche est domine par le minral 1 : V1>>V2

    2

    1

    Bordure du minral 1 participant la diffusion intergranulaire (1-3 nm)

    Cas 3 : Les minraux 1 sont trs petits par rapport au minral 2 : a1

  • De plus elle est fonction galement de la concentration en Sr des minraux. Si le minral qui

    enregistre le plus fort dsquilibre isotopique (ici la biotite) est trs riche en Sr par rapport

    lautre, lchange sera limit, le rservoir fini tant puis. Jenkin et al. (1995) montrent

    toutefois que la composition modale a beaucoup plus dimportance sur la Tapp que la

    composition chimique. Par contre la Tapp est indpendante de la composition en Rb. De la

    mme faon, ils dmontrent clairement leffet de la taille des grains : plus les grains sont

    petits, plus le volume intgr de surface de grains est grand, plus la diffusion intergranulaire

    est efficace. A remarquer quici la taille des grains correspond en fait la distance de

    diffusion effective et non la dimension physique des grains. Cette remarque laisse supposer

    une influence de la dformation sur la fermeture mais aussi (particulirement) sur la

    rouverture des systmes.

    Finalement, ces auteurs obtiennent un modle de Tapp intermdiaire entre celui de Dodson

    (1973) et de Giletti (1991), fonction de la composition modale et de la taille des grains

    (Figure I-13). Les diffrences quils observent par rapport au modle de Giletti (1991) sont

    lies au fait quils considrent une diffusion instantane en bordure de grain, lensemble des

    bordures de grains de feldspath (sur une paisseur de quelques nanomtres) restant disponible

    lchange mme aprs larrt de la diffusion volumique au sein des feldspaths. Dans le cas

    o le volume que constitue lensemble des bordures de grains de feldspath est trs important

    (quand les feldspaths sont de trs petite taille, ou quand la proportion de feldspath est trs

    suprieure la proportion de biotite (Figure I-13), la diffusion intergranulaire tant

    extrmement rapide, lensemble des bordures de grain de feldspath peut agir en tant que

    rservoir infini. Dans ce cas, on revient au modle de Dodson (1973).

    Le concept de rservoir fini associ de la diffusion intergranulaire a galement t appliqu

    aux lments majeurs pour une roche compose de clinopyroxnes et de grenats (e.g.

    Duchne et al., 1998 ; Duchne & Albarde, 1999). De la mme faon, leffet de la

    composition modale et de la taille des grains sur les rquilibrages chimiques contrls par la

    temprature est clairement dmontr.

    Il est intressant dutiliser ces observations dans le cas o la roche volue en systme ouvert,

    li la circulation dun fluide. Il a t dit plus haut que ce fluide pouvait agir en tant que

    rservoir infini. Cependant, lchange isotopique entre ce fluide et les minraux va galement

    tre limit par la composition chimique de ce fluide.

    Ce modle peut tre largi aux autres systmes radiochronologiques, et peut servir de base de

    raisonnement au cas des roches multiminrales. Jenkin (1997) tend son modle une roche

    compose de feldspaths, biotite et muscovite, et retrouve les mmes effets critiques de la

    47

  • composition modale et de la composition chimique sur la temprature de fermeture. Ces effets

    sur les Tapp apparaissent nanmoins bien plus complexes car trois phases sont considres.

    Cependant, lauteur montre clairement que ces Tapp, sont trs suprieures aux Tf prvues par

    Dodson (1973) quand les diffrentes phases du systme constituent un rservoir fini. Un

    exemple naturel qui illustre clairement lintrt de la formulation du concept de temprature

    de fermeture apparente pour un rservoir fini est le cas des granulites de larc de Bergen. Pour

    ces granulites, Burton et al. (1995) montrent que les grenats adjacents aux clinopyroxnes ont

    enregistrs des ges plus vieux que des grenats adjacents des plagioclases. Ces observations

    sont en accord avec le modle de rservoir fini sachant que les plagioclases diffusent des

    tempratures plus basses que les clinopyroxnes qui eux mmes diffusent des tempratures

    plus hautes que les grenats (II.2.d).

    Dun point de vue purement qualitatif, on peut essayer de raisonner dans le cas dune clogite

    compose de phengites, omphacites, grenats et pidotes (composition frquente des clogites

    ultrabasiques). Dans un tel systme, les phengites sont les minraux avec le rapport Rb/Sr le

    plus grand, et avec priori la capacit de diffuser aux tempratures les plus basses (II.2.d).

    Dans le cas dun systme ferm, les phases jouant le rle de rservoir fini pour le Sr seront les

    phases avec la concentration la plus leve en Sr, dans le cas prsent, les omphacites et les

    pidotes. Ces phases ayant des Tf trs suprieures celle de la phengite, correspondent aux

    feldspaths du modle de Jenkin et al. (1995), et les phengites aux biotites du mme modle.

    Dans ce cas lge obtenu par une isochrone pidote, omphacite, phengite correspondra une

    Tapp fonction de la composition modale, de la taille des grains et de la composition chimique

    des diffrentes phases.

    Applications Cette discussion permet dj de formuler certaines remarques importantes quant

    linterprtation dges isochrones. Ces diffrents modles prvoient dans le cas dun

    refroidissement relativement lent, un dsquilibre isotopique marqu entre les diffrentes

    phases du systme, en raison de leurs diffrentes tempratures de fermeture. Ce phnomne

    sera illustr par une dispersion des points dans un diagramme isochrone. A loppos, si toutes

    les phases du systme salignent sur une mme droite contenant le point roche totale, il y a de

    forte chance pour que lge dduit de cette isochrone corresponde un ge de cristallisation

    de la roche, situation prdite lors dun refroidissement trs rapide. A ce titre il parat donc

    intressant de tracer des diagrammes isochrones avec le plus de phases possible pour vrifier

    48

  • cette premire situation. De plus, une isochrone deux points semble donc insuffisante pour

    laborer des interprtations sur lge obtenu. Une autre alternative est dessayer de tracer des

    isochrones pour une mme phase minrale (par exemples des micas dans le cas de la mthode

    Rb/Sr). Dans ce cas, lge obtenu correspond lge effectif de fermeture de cette phase (et

    non un ge fictif dans le cas o on aligne deu