AUSCHWITZ - Yad Vashem

A U S C H W I T ZA U S C H W I T ZQuelque part sur la TerreQuelque part sur la Terre

L’album d’Auschwitz

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LA SHOAH

Génocide total, systématique et sans précédent, la Shoah fut perpétrée

par l’Allemagne nazie et ses collaborateurs dans le but de faire disparaître

le peuple juif ainsi que sa culture et ses traditions de la surface de la Terre.

L’idéologie raciste antisémite des nazis en fut le principal moteur.

Entre 1933 et 1941, l’Allemagne nazie mit en œuvre une politique de

persécution croissante consistant à déposséder les Juifs de leurs droits et

de leurs biens puis à stigmatiser et concentrer la population juive dans des

zones réservées et placées sous son contrôle. Fin 1941, cette politique se

transforme en une entreprise systématique et de grande envergure que les

nazis appelleront « la Solution finale de la question juive ». Ces mesures

recueillent un large soutien en Allemagne et à travers la majeure partie du

continent européen.

L’Allemagne nazie voue les Juifs d’Europe, et à terme l’ensemble des Juifs

du monde, à l’extermination définitive. Parallèlement à l’assassinat de

plusieurs millions de Juifs par balles, des millions d’autres, originaires de

toute l’Europe, sont arrêtés et déportés à bord de trains de marchandises

vers des camps d’extermination : des complexes industriels de mise à mort

où les Juifs sont gazés. Tout au long du processus d’enregistrement, de

rafle et de chargement à bord des trains, les Allemands trompent leurs

victimes quant à la finalité réelle du voyage. Lorsque la guerre prend fin en

1945, près de six millions de Juifs ont été assassinés.

Yad Vashem a été créé en 1953 pour être le centre mondial de documentation, de recherche, d’enseignement et de commémoration de la Shoah. En tant que mémorial vivant érigé par le peuple juif en souvenir de la Shoah, Yad Vashem œuvre à préserver la mémoire du passé et à lui donner un sens pour les générations à venir.

Cette exposition a été conçue et produite par le Département des expositions itinérantes de la Division des musées de Yad Vashem.

Conception graphique : Division informatique, Yad Vashem

w w w . y a d v a s h e m . o r g










D’abord établi en 1940 en tant que camp de concentration pour les ennemis du régime nazi, Auschwitz devint le plus grand centre d’extermination des Juifs d’Europe pendant la Seconde Guerre mondiale. Entre 1942 et 1944, les Allemands firent construire à Birkenau (Auschwitz II) quatre complexes de mise à mort, tous dotés de vestiaires, de chambres à gaz et de fours crématoires. Les Juifs furent déportés jusqu’à Birkenau à bord de convois ferroviaires depuis les quatre coins de l’Europe. La plupart y étaient assassinés dès leur arrivée. Seul un petit nombre d’entre eux survivaient à la sélection et restaient momentanément en vie dans le camp en tant que prisonniers et travailleurs forcés.

Auschwitz-Birkenau est devenu le symbole ultime de la Shoah, du mal absolu, de la souffrance humaine, de l’humiliation et de l’extermination systématique. Près de 1 120 000 personnes y furent assassinées. Parmi elles se trouvaient environ un million de Juifs, dont plus de 200 000 enfants.

Fours utilisés pour brûler les corps des victimes, crématorium III, Birkenau, 1943

Portail d’entrée de Birkenau, Pologne, 1945

""[Auschwitz] – Cela ne signifiait rien pour moi. C’était le nom d’une ville polonaise parmi tant d’autres. J’ignorais qu’Auschwitz allait rester gravé au plus profond de mon être, de façon si indélébile qu’il ne pourrait plus jamais être effacé.

AUSCHWITZ-BIRKENAU

Ruth Elias, déportée à Auschwitz depuis le protectorat de Bohême-Moravie en 1943










L’ALBUM D’AUSCHWITZ

L’album d’Auschwitz est le seul document visuel connu illustrant le processus d’absorption et de sélection des Juifs déportés à Birkenau.Les photographies suivent l’arrivée de convois partis de Ruthénie subcarpatique (Hongrie) pour Auschwitz-Birkenau au printemps 1944.

Les Allemands envahissent la Hongrie le 19 mars 1944 alors qu’ils sont confrontés à une série de défaites sur plusieurs fronts. Jusqu’alors, la plupart des Juifs hongrois ont connu une relative sécurité, malgré la législation antisémite adoptée par la Hongrie et l’enrôlement de près de 100 000 hommes juifs dans des bataillons de travaux forcés dans lesquels des dizaines de milliers d’entre eux périront.

Après l’occupation, les Allemands et le régime hongrois, sous la direction de l’amiral Miklos Horthy puis du parti fasciste des Croix fléchées, mettent en œuvre une politique qui va conduire au meurtre de près de 565 000 Juifs. Le point culminant est atteint entre la mi-mai et le début du mois de juillet lorsque 437 000 Juifs sont déportés depuis la Hongrie jusqu’au camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau en l’espace de huit semaines seulement. La plupart d’entre eux y seront assassinés dès leur arrivée.

La majorité, et peut-être la totalité, des photos contenues dans l’album ont été prises par Ernst Hofmann et Bernhard Walter, deux membres de la SS qui étaient chargés de prendre les photos d’identité et les empreintes digitales des prisonniers sélectionnés pour rester temporairement dans le camp. Quelques exemplaires de l’album seront distribués à un petit nombre de fonctionnaires nazis.

Les 56 pages de l’album contiennent 193 photographies retraçant plusieurs des étapes du processus auquel étaient soumis les Juifs lors de leur arrivée à Auschwitz-Birkenau. Aucune néanmoins ne montre la phase de la mise à mort. Les photographies, agencées par les nazis, sont accompagnées de légendes, rédigées par l’un des photographes, décrivant le processus du point de vue nazi.

Traduction d’une légende en allemand : Relocalisation des Juifs de Hongrie Euphémisme utilisé pour désigner la déportation des Juifs vers les camps d’extermination










L’ARRIVÉE

Les convois atteignaient Auschwitz au terme d’un voyage particulièrement long et traumatisant.

À leur arrivée, on forçait les déportés à descendre des wagons en toute hâte en laissant derrière eux tous leurs effets personnels.

Ce processus s’accompagnait souvent d’actes de violence et d’intimidation infligés aux déportés par les nazis.

Ils firent embarquer 70 à 75 personnes à bord d’un petit wagon de marchandises, sous une chaleur torride [et] sans une goutte d’eau. Les fenêtres étaient fermées ; les wagons scellés. Les trains roulaient lentement ; le voyage fut interminable […] les enfants en bas âge pleuraient de faim, de soif et du manque d’air. Cet horrible voyage jusqu’à Auschwitz dura quatre jours.

Livia Lieberman, déportée à Auschwitz depuis la Hongrie en mai 1944

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""Le train s’arrêta et tous se mirent à chercher les membres de leurs familles. Impossible de décrire [cette scène] ; lorsque je me la remémore, j’ai envie de pleurer. La peur étreignait tous ceux qui avaient survécu car plusieurs adultes, ainsi que des bébés, étaient morts au cours du voyage. À l’arrivée, nous étions tellement heureux de quitter enfin cet enfer. En descendant, nous vîmes de jeunes hommes vêtus d’habits rayés.

Leah Feuerstein, déportée à Auschwitz depuis la Hongrie au printemps-été 1944










LA SÉLECTION

Une fois descendus sur le quai, les Juifs sont divisés en deux groupes : les hommes d’un côté, les femmes et les enfants de l’autre. Tous passent ensuite devant des médecins et des gardes SS, qui trient les nouveaux arrivants en fonction de leur âge et de leur condition physique et sélectionnent les rares déportés pouvant être affectés aux travaux forcés. La vaste majorité d’entre eux - personnes âgées, mères, enfants, femmes enceintes, personnes infirmes et handicapées - sont dirigés de l’autre côté en vue de leur extermination immédiate.

Près de 900 000 des 1 100 000 Juifs déportés à Auschwitz seront assassinés dès leur arrivée.

Un homme de la SS me poussa d’un côté et poussa ma mère de l’autre. Ils organisèrent aussitôt la sélection. Et je ne la revis jamais plus.

Regina Widawsaka, déportée à Auschwitz depuis la Pologne en août 1944










""L’une des brutes me demanda à qui était l’enfant debout à côté de moi ; ma sœur, qui se trouvait à deux pas, voulut me sauver et dit que c’était le sien. Lorsque je hurlai que c’était le mien, on me frappa pour avoir menti. Ils emmenèrent alors mon enfant et ma sœur partit elle aussi.

Batya Druckmacher, déportée à Auschwitz depuis la Pologne en août 1944










LA SÉLECTION DES TRAVAILLEURS FORCÉS

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Les Juifs qui avaient passé le processus de sélection et qui avaient été affectés aux travaux forcés étaient soumis à un processus d’absorption en plusieurs étapes avant d’intégrer le camp. Après avoir reçu l’ordre de se déshabiller, ils étaient désinfectés et brutalement rasés de la tête aux pieds. À l’issue de ce processus, un numéro de matricule leur était tatoué sur l’avant-bras.Les prisonniers étaient ensuite affectés aux bataillons de travaux forcés d’Auschwitz ; certains étaient transférés vers d’autres camps de concentration. La majorité des prisonniers juifs sélectionnés pour les travaux forcés ne survivaient pas plus de quelques mois en raison des conditions de vie inhumaines du camp : violence incessante, travail exténuant, famine et maladies.

Alors pour la première fois nous prenons conscience que notre langue manque de mots pour dire cette insulte, la démolition d’un homme… Plus rien ne nous appartient : ils nous ont pris nos vêtements, nos chaussures et même nos cheveux… Ils nous enlèveront jusqu’à notre nom… Mon nom est 174517… nous porterons ce tatouage sur le bras gauche jusqu’à la mort.

Primo Levi, déporté à Auschwitz depuis l’Italie en février 1944










LE PILLAGE DES EFFETS PERSONNELS

""C’était une scène incroyable… une montagne de valises, de boîtes, de sacs à mains, de sacs à dos et de colis, étroitement empilés au milieu de la cour… À cet instant-là, je ne me demandai pas où étaient leurs propriétaires.À ma gauche, je vis des centaines de landaus.

Rudolf Vrba, déporté à Majdanek depuis la Slovaquie en juin 1942 et une semaine plus tard à Auschwitz

Les effets personnels que les Juifs reçoivent l’ordre de laisser dans les

wagons de marchandises ou sur le quai sont rassemblés et triés par

des prisonniers juifs.

Ils sont ensuite expédiés en direction du Reich et réutilisés.










LES CHAMBRES À GAZ

Les Juifs qui n’ont pas été choisis pour les travaux forcés sont dirigés de force vers les chambres à gaz.

Du fait de l’accélération du rythme des convois en provenance de Hongrie, la pression sur les chambres à gaz devient telle que les victimes sont contraintes de patienter dans un petit bosquet situé derrière les crématoriums, souvent pendant de nombreuses heures. Les victimes ne se doutent absolument pas qu’elles sont sur le point d’être assassinées.

Les chambres à gaz ont été conçues de façon à tromper les victimes. On raconte à ces dernières qu’avant de pouvoir aller travailler, elles doivent être soumises à un processus de nettoyage et de désinfection.

Les Juifs sont contraints de se déshabiller puis entassés dans des pièces à l’intérieur desquelles on vide des boîtes de Zyklon B. Au contact de l’air, le produit chimique d’abord solide se transforme en un gaz qui, en l’espace de quelques minutes, conduit à la mort par asphyxie de tous ceux qui se trouvent dans la pièce. En 1943, les travailleurs forcés juifs reçoivent l’ordre de cesser d’enterrer les cadavres des victimes et de les faire brûler dans de vastes fours crématoires.










""Tout le monde était suspicieux… Ils sentaient clairement que quelque chose n’allait pas… mais aucun d’entre eux même dans ses pires cauchemars n’aurait pu imaginer que trois ou quatre heures plus tard, ils seraient transformés en cendres.

Filip Müller, déporté à Auschwitz depuis la Slovaquie en avril 1942










En avril 1945, l’armée américaine libère le camp de concentration de Dora-Mittelbau en Allemagne. Lilly Jacob, une détenue qui y a été transférée quelques semaines seulement avant sa libération, s’avance au-devant des soldats avant de s’effondrer. Elle reprend connaissance dans une baraque abandonnée ayant servi au personnel allemand du camp. En fouillant les placards à la recherche d’une couverture, elle découvre un album de photographies. En ouvrant celui-ci, Lilly reconnaît le rabbin de sa ville natale sur la première page et voit apparaître sur les photos suivantes sa famille, d’autres membres de sa communauté et sa propre silhouette.

Lilly, qui est née dans la ville de Bilke, a 18 ans lorsqu’elle est déportée à Auschwitz avec ses grands-parents, ses parents et les cinq membres de sa fratrie. Ils y arrivent à bord d’un convoi en provenance du ghetto de Berehove. Durant le processus de sélection, elle perd de vue son père et ses frères aînés du fait du chaos ambiant. Rouée de coups, elle est séparée de sa mère et de ses jeunes frères puis entraînée dans un groupe de femmes sélectionnées pour les travaux forcés. Elle sera la seule survivante de la famille.

L’album contient au départ quelque 200 photographies. La nouvelle de sa découverte s’étant répandue parmi les rescapés, un grand nombre d’entre eux viennent voir Lilly afin d’essayer d’identifier des proches parmi les personnes photographiées. Elle donne certains des clichés, en guise de dernier souvenir, aux quelques survivants qui réussissent à reconnaître des êtres chers.

Dans les années 1960, Lilly est invitée à témoigner en Allemagne lors d’un procès de responsables nazis ayant servi à Auschwitz. L’album est présenté à titre de preuve et permet d’identifier l’un des officiers nazis.

En 1980, Lilly fait don de l’album à Yad Vashem pour qu’il y soit conservé à jamais.

Les petits frères de Lilly, Sril (Israel) et Zelig Jacob, après leur descente du wagon

Les grands-parents de Lilly, Avraham et Sheindale Jacob

Lilly Jacob, au terme du processus d’absorption

LA DÉCOUVERTE DE L’ALBUMDO NOT COPY DO NOT COPY DO NOT COPY DO NOT COPY DO NOT COPY DO NOT COPY DO NOT COPY









« TOUTE PERSONNE A UN NOM »

Miki Swartz

Yehezkel Kornfeld

Gerti MermelsteinTauba MermelsteinArmin Riter

Iren KleinLena Egri Ruth Hoffman

Rabbi Leib Weiss Elki Feig Naftali Zvi Weiss

Henchu Falkovics

Istvan Balaszo

Moshe Vogel Sarah RosenreichChava Spiegel

Rivka Gutmannet sa fille

Moshe Leib Pinkas

Certains des hommes, des femmes et des enfants identifiés dans l’album d’Auschwitz










Auschwitz n’est pas seulement le symbole suprême du système de camps de concentration nazi, il est aussi celui de l’abîme dans lequel [l’humanité] sombra durant l’ensemble de la période nazie.

Nous prononçons et écrivons le nom d’ « Auschwitz » pour désigner un lieu de torture et d’atrocités insondables, l’essence du mal et de l’abomination commis par les hommes pendant la Seconde Guerre mondiale.

Dans un monde en proie au conflit, manquant de discernement et de limites, l’évolution et la légitimation du mal est susceptible de conduire à l’autodestruction de la race humaine.

Israel Gutman, historien, rescapé d’Auschwitz










AUSCHWITZ - Yad Vashem

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