Apocrypha 7, 1996
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APOCRYPHA
Fondee en 199
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APOCRYPHA
Revue Internationale des itteratures apocryphes
International Journal of Apocryphal Literatures
Directeur de Publication
S.C. MIMOUNI
Secretaire de Redaction
M.-J. PIERRE
Comite de Redaction
P. GEOLTRAIN,R. GOUNELLE,E. JUNOD
J -C. PICARD, S.J. V OICU
Comite scientifique
B. BOUVIER, F. BOVON, J.-D. DUBOIS, Z. IZYDORCZYK,
S. JONES,A. LE BOULLUEC,J.-N. PERES,M. STAROWIEYSKI
Revue publiee avec Ie concours scientifique
de l Association pour l etude de la litterature apocryphe chretienne
(A.E.LA.C.)
et
de la Societe pour l etude de la litterature apocryphe chretienne
(S.E.LA.C.
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La Societepour l etude de la litterature apocryphe chre-
tienne, voulant assurer au Comite de redaction de la
Revue une pleine liberte scientifique, decline la responsa-
bilite desarticles.
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R POLS
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@ 1996BREPOLS
All rights reserved.
No part of this publication may be reproduced
stored in a retrieval system or transmitted in any form or by any means
electronic mechanical recording or otherwise
without the prior permission of the publisher.
Depot legal: 4e rimestre 1996
D/1996/0095/52
Imprime en Belgique
ISSN 1155-3316
ISBN 2-503-50549-X
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SOMMAIRE
Antiquite tardive
Evangile de Thomas,Actes de Thomas, Livre de Thomas. Une tradition et ses
transformations,
Paul-Hubert POIRIER 9
La lettre sur 1'« Evangile secret» de Marc et Ie Quis dives salvetur ? de Clement
d' Alexandrie,
Alain LE BOULLUEC 27
Divergent Gospel Traditions in Clement of Alexandria and Other Authors of
the Second Century,
Annewies VANDENHOEK , 43
Flavius Clemens et Ie proto-Clement juif du roman pseudo-clementin,
Bernard POUDERON 63
Apocalypsed' Esdras grecque et latine, rapports et rhetorique,
Flavio G. NUVOLONE 81
Traditions apocryphes dans a Theosophiede Tubingen,
Pier Franco BEATRICE 109
Homerocentra et litterature apocryphe chretienne : quels rapports?
Andre-Louis REY 123
Texteset themesapocryphesau moyen age
Nicephorus Callistus' Physical Description of Peter: An Original Component
of the Acts of Peter?
Christopher R. MATrnEWS 135
Simon Magus: The Patristic -Medieval Traditions and Historiography,
Alberto FERREIRO 147
Die Legenda Aurea und ihre dominikanischen Bruderlegendare -Aspekte der
Quellenverhaltnisse apokryphen Gedankenguts,
Barbara FLEITH 167
La legende de saint Jacques Ie Majeur,
Marek STAROWIEYSKI 193
Lo Ps. Marcellus brevior in una traduzione italiana del Trecento,
Edoardo BARBIERI 205
Reflexions theologiques
Apocryphes et canon: leurs rapports et leur statut respectif -Un questionne-
ment theologique,
par Pierre GISEL 225
Kerygme et imaginaire,
Marc FAESSLER 235
Les apocryphes textes concurrentiels du Nouveau Testament,
Walter REBELL 243
L'apocryphe, fable catechetique,
Catherine P AUPERT 249
Iconographie
Litterature apocryphe et art copte,
Marguerite RASSART-DEBERGH 253
L'iconographie capadociennede l'affront fait a Anne d'apres Ie Protevangilede
Jacques,
Nicole THIERRY 261
L' Annonciation de Sainte-Marie-Majeure : image apocryphe ?
Giuseppe DE SPIRITO 273
Figurer l'apocryphe, ou la Verite devoilee par la peinture. Quelques icono-
graphes du XIxe siecle face a 1image chretienne,
Pierre-Alain MARIAUX 293
An Electronic Database of Pictorial ImagesParalleled in Christian Apocrypha,
David R. CARTLIDGE 301
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Liminaire
Le present volume d'APOCRYPHA rassemble a premiere
partie des contributions presenteesau Colloque sur la litterature
apocryphe chretienne qui s'est tenu les 22-25 mars 1995 a
Lausanne et a Geneve. La deuxieme partie paraitra dans Ie
volume 8 (1997) de cette meme revue. Le colloque a ete orga-
nise conjointement par la Faculte de theologie de l'Universite de
Lausanne et par la Faculte autonome de theologie protestante
de l'Universite de Geneve a l'initiative des membres du groupe
suisse de l' Association pour l'etude de la litterature apocryphe
chretienne (AELAC). Son objectif etait de favoriser les echan-
ges entre chercheurs associesa l'entreprise de recherche et d'e-
dition des textes apocryphes et representantsd'autres disciplines
(critiques et historiens de la litterature, medievistes, historiens
de l'art, theologiens, philologues, etc.). Soixante-huit interve-
nants venus de quinze pays ant mis en commun les derniers
resultats de leurs recherches autour de deux grands themes.
(1) Reecriture et image. Ce sujet recouvrait les divers types de
transformations qui caracterisent la production et la reception
des textes apocryphes, eurs metamorphoses et leur survie dans
la litterature medievale, l'iconographie et Ie folklore.
(2) Litterature apocryphe et questionnement heologique. Cette
problematique portait sur es rapports qu'entretiennent les ecrits
apocryphes avec es ecrits canoniques -en soulevant a question
de la delimitation du canon biblique -ainsi que sur la definition
et l'evaluation des caracteristiques heologiques des apocryphes.
11a semble important au comite d'organisation du colloque
-compose de M¥. Jean-Daniel Kaestli, Frederic Amsler,
Bertrand Bouvier, Eric Junod, Remi Gounelle, Enrico Norelli et
Albert Frey -de mettre a la disposition d'un public plus large les
etudes presentees au colloque. Aussi sommes-nousheureux que
Ie comite de redaction d'APOCRYPHA ait accepte de les
accueillir dans sa revue. Deux contributions, celles d' . Backus et
de M. McNamara, ant deja paTtidans e volume 6.
Les articles de ce volume d'APOCRYPHA sont regroupes
aut our de quatre poles: les traditions apocryphes dans
l'Antiquite tardive (P.-H. Poirier, A. Le Boulluec, A. van den
Hoek, B. Pouderon, F. G. Nuvolone, P. F. Beatrice et A.-L. Rey),
l'ecriture et la reecriture de textes apocryphes au moyen age
(Ch. R. Matthews, A. Ferreiro, B. Fleith, M. Starowieyski et E.
Barbieri), la reflexion theologique sur les textes apocryphes (P.
Gisel, M. Faessler,W. Rebell et C. Paupert) et la place des apo-
cryphes dans l'iconographie (M. Rassart-Debergh, N. Thierry,
G. De Spirito, P.-A. Mariaux et D. R. Cartlidge).
En decouvrant la diversite et la richessedes sujets abordes,
Ie lecteur se rendra compte, line fois de plus, de l'importance des
echangesentre specialistes de domaines trap souvent separes.
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Paul-Hubert POIRIER
Universite Laval, Quebec
EVANGILE DE THOMAS, ACTES DE
THO MAS, LWRE DE THOMAS.
UNE TRADITION ET SES
TRANSFORMATIONS *
The purpose of this paper is to examine the relation of the Gospel
According to Thomas (NH II, 2), the Acts of Thomas and the Book of
Thomas (the so-called Book of Thomas the Contender,NH II, 7), to the
ThomasTradition. A special attention s paid to the specificcontribution of
each one of these three literary works to the construction of the Thomas
Tradition.
Cet article considere es trois principaux representantsitteraires de la
tradition thomasienneet etudie la contribution de chacun d eux a la for-
mation de la tradition se reclamantde l apotre Thomas.
L histoire des traditions apocryphes relatives a l apotre
Thomas est assezsinguliere1. En effet, ces traditions ne doivent
apparemment rien a l episode evangelique dont Thomas est ac-
* Cette communication a ete redigee 11.a faveur d un sejour 11.
l Universite de Lausanne (fevrier-avrilI995), 11.itre de professeur nvite
de la faculte de theologie de cette universite. L auteur remercie les pro-
fesseurs Eric Junod et Jean-Daniel Kaestli de l accueil qu ils lui ont
reserve 11.ette occasion.
1. Pour line vue d ensemble de ces traditions et des reuvres dans les-
quelles elle s exprime, on lira R. KUNTZMANN,Le symbolisme des
jumeaux au Proche-Orient ancient. Naissance,onction et evolution d un
symbole (Beauchesne, Religions 12), Paris, 1983, p. 164-182 et S.
MIMOUNI,« 1. Thomas (apotre) », dans Dictionnaire de spiritualite 15,
Paris, 1991,col. 708-718.
Apocrypha 7, 1996, p. 9-26
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P.-H. POIRIER
teur central et qui a Ie plus contribue a camper la figure de
l'apotre dans la memoire chretienne, a savoir sa rencontre avec
Ie Christ ressuscite lui apparaissant pour dissiper son doute et
son obstination a ne pas croire sans avoir vu (In 20, 24-29). C'est
au contraire une simple glose de l'Evangile de Jean sur Ie nom
de l'apotre, en tout trois mots dont un article, qui semble etre a
l'origine de la tres fiche tradition litteraire thomasienne. Cette
glose, ew~a.S () AE'Y6~EVOSl8u~0S ,apparait a trois (eprises de
maniere identique chez Jean, en 11, 16; 20, 24 et 21, 2. Au plan
formel, l'explication que donne Jean du nom «Thomas» releve
de la pratique du« double nom », qui a ete bien decrite par G. H.
R. Horsley2. Cet auteur juge d'ailleurs que l'expression «A ho
legomenos B », «A appele B », n'est pas tres courante comme for-
mule d'un nom double3. D'apres la these generalement rec;ue4,
l'utilisation de cette formule dans l'Evangile de Jean ferait office
de traduction, Ie nom propre ew~a.S n'etant rien d'autre que la
transcription du terme arameen signifiant jumeau, que l'evange-
liste aurait rendu en grec pour Ie benefice de ses lecteurs. Quoi
qu'il en soit de la valeur de cette these, il est sur qu'on se trouve
la au point de depart des traditions thomasiennes apocryphes,
dont la caracteristique la plus frappante, du mains a premiere
vue, est de presenter l'apotre comme Ie double, ou Ie jumeau, du
Christ et d'en faire a ce titre Ie depositaire privilegie et l'inter-
mediaire par excellence de la revelation du sauveur.
Les problemes poses par Ie nom de l'apotre, a savoir (1) la
nature exacte de la relation de ew~a.S et de 8l8u~oS ,et du sub-
strat arameen que suppose Ie rapprochement de ces deux
termes, (2) ses variantes5 : Thomas, Jude/Judas, Judas Thomas,
'lou8aS () Kat 8(8u~oS , '1 ou8aS ew~a.S () Kat 8(8u~oS ,
A1AYMOC °OYAc},C 9WMc},C, (3) l'homonymie de Jude/Judas
(Thomas) avec l'autre Jude/Judas, lui aussi I'un des douze, et
2. Voir G. H. R. HORSLEY, New Documents Illustrating Early
Christianity. A Review of the Greek Inscriptions and Papyri Published n
1976, North Ride (Australie), Macquarie University, 1981,p. 89-96 (§
55), ainsi que ll., «Names, Double », dans The Anchor Bible Dictionary
4, New York, 1992,p.l0ll-l017.
3. G. H. R. HORSLEY,bid., p.l013.
4. Voir, par exemple, H.-Ch. PUECH,En quete de la Gnose, . II: Sur
I' Evangile selon Thomas. Esquisse d'une interpretation systematique,
Paris, 1978,p. 213-214,et B. LAYTON,The Gnostic Scriptures, Garden
City (N. Y.), 1987,p. 359.
5. Voir sur ce point la note tres precise de U. MONNERET E VILLARD,
Le leggende orientali sui magi evangelici (Studi e testi 163), Citta del
Vaticano, 1952,p. 46, n. 1 ; nous nous proposons de revenir plus tard sur
laquestion du nom de l'apotre et de ses ormes.
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VANGILE DE THOMAS, AcrES DE THOMAS, LIVRE DE THOMAS
(4) I affirmation parfois rencontree6 mais aussi contestee?qu il
s agirait d un seul et meme personnage, tOllS ces problemes
meriteraient d etre reexamines a nouveaux frais. Ce n est tou-
tefois pas Ie moment de Ie faire ici8, et l objectif de la presente
communication est beaucoup plus restreint. II s agit pour no us
d examiner les trois textes qui constituent les represent ants
principaux de la tradition thomasienne, non pour eux-memes
et de maniere isolee, mais plutot sous l angle de la relation
qu ils entretiennent les uns avec les autres. En d autres termes
et pour doDDera notre problematique un tour interrogatif : ces
trois textes, so t l Evangile selon Thomas9, les Actes de
ThomasIoet Ie Livre de ThomasII,peuvent-ils etre situes Ie long
6. Entre autres chez B. LAYTON,The Gnostic Scriptures, Garden City
(N. Y.), 1987,p. 359, a la suite d Helmut Koester. Cette opinion peut
toutefois s appuyer sur au moins un temoignage ancien, celui de
Priscillien, qui introduit une citation de Jude 14-15 par leg mots
suivants :« Ait Iuda apostolus clamans lle didymus domini » (Tractatus
III, Liber de fide et de apocryphis,p. 44, 12 Schepss); voir a ce sujet C.
H. TuRNER, Adversaria Patristica. VI. Priscillian and the Acts of Judas
Thomas », Journal of Theological Studies7 (1906),p. 603-605,et H.-Ch.
PUECH, n quetede la Gnose II, Paris, 1978,p. 42. D apres Puech, ap-
pellation « uda didymus » confirmerait que Priscillien puise a une sour-
ce orientale.
7. En particulier par R. BAUCKHAM, ude and the Relatives of Jesus n
the Early Church, Edinburgh, 1990,p. 172-173.
8. Voir a ce sujet A. F. J. KLIJN, «John XIV 22 and the Name Judas
Thomas », dans Studies in John. Presented to Professor VI: J. N.
Sevensteron the Occasion of his SeventiethBirthday (Suppl. to Novum
Testamentum 4), Leiden, 1970,p. 88-96, et H.-Ch. PUECH, n quetede
la Gnose I, Paris, 1978,p. 41-42.
9. Edition de la version corte (NH II, 2) par B. LAYTON,Nag Hammadi
Codex11,2-7 together with XIII, 2*, Brit. Lib. Or. 4926(1), and P. Oxy. 1,
654,655. Volume One (Nag Hammadi Studies 20), Leiden, 1989,p. 50-
93; edition des fragments grecs par H. W. A1TRIDGE, bid., p. 95-128;
traduction fran«;aise ans H.-Ch. PUECH, n quetede la Gnose I, Paris,
1978 p. 11-27.
10. i?:dition de la version syriaque par W. WRIGHT,Apocryphal Acts of
the Apostles. Edited rom Syriac Manuscripts n the British Museum and
others Libraries with English Translationsand Notes,Londres, 1871,vol.
1, p. ~ (172)-~ (333); edition de la version grecque par M.
Bonnet dans R. A. LIPSIUS -M. BONNET, Acta Apostolorum
Apocrypha, Leipzig, 1903, . 11,2, p. 99-288; traduction fran«;aise du
syriaque par P.-H. Poirier et Yves Tissot (a paraitre dans a Bibliotheque
de a Pleiade); traduction fran«;aisedu grec dans A.-J. FESTUGIERE,es
Actes apocryphes de Jean et de Thomas. Traduction franraise et notes
critiques (Cahiers d Orientalisme 6), Geneve, 1983,p.1-117. Dans notre
traduction du syriaque, nous avons introduit dans la numerotation des
chapitres de Bonnet une subdivision en paragraphes,qui est reprise ici.
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P.-H. POIRIER
d une trajectoire qui marquerait un developpement ineaire des
traditions relatives a l apotre Thomas? Ou encore: ces trois
textes presentent-ils une parente suffisante pour qu on considere
qu ils emanent d une «ecole thomasienne» ou d un courant de
pensee homogene se reclamant de Thomas? Ces deux ques-
tions, dont la formulation, comme nous Ie verrons, est imposee
par l histoire de la recherche, definissent, en meme temps que
son objet, les limites de notre enquete : celle-ci ne portera en
effet que sur les trois textes par lesquels a tradition thomasien-
ne est Ie plus massivement epresentee pour la periode all ant du
debut du lie a la fin du IIIe siecle, et encore ne prendra-t-elle en
compte qu un aspect des rapports complexes qu entretiennent
ces rois temoins.
Deja, en 1957-195812t en 195913, enri-Charles Puech avail
pense qu « un rapport etroit [pouvait] etre etabli entre les Actes
et l Evangile de Thomas». II basait son ugement sur l occurren-
ce, de part et d autre, du nom, «a la fois redondant et particu-
lier », de Jude Thomas, ou Thomas Didyme, ainsi que sur un
certain nombre de rapprochements ponctuels entre les deux
reuvres. II concluait de ces rapprochements non seulement que
l Evangile avail dfi etre compose anterieurement aux Actes14,
mais que ceux-ci s averaient etre dependants de l Evangile15.
Quant au Livre de Thomas,que Puech n avait pu analyserd une
11. Edition du texte corte (NH II, 7) par B. LAYTON,Nag Hammadi
Codex II, 2-7 together with XIII, 2*, Brit. Lib. 01: 4926(1),and P. Oxy. I,
654,655. Volume Two (Nag Hammadi Studies21), Leiden, 1989,p. 179-
205 ; traduction fran~aise dans R. KUNTZMANN, e livre de Thomas
(NH II, 7) (Bibliotheque copte de Nag Hammadi, section «Textes » 12),
Quebec, 1986. L intitule Livre de Thomas l Athlete est encore utilise a
l occasion (en particulier dans B. LAYTON, The Gnostic Scriptures,
Garden City [N. Y.], 1987) pour designer ce traite, me-mes il resulte
d une mauvaise traduction du titre final de la p. 145; voir a ce sujet R.
KUNTZMANN,OF. cit., p. 174 et H.-M. SCHENKE, as Thomas-Buch
(Nag-Hammadi-Codex II, 7) (Texte und Untersuchungen138), Berlin,
1989,p.193-194.
12. Dans ses e~ons du College de France, dont Ie compte rendu a ete
repris dans En quetede la Gnose I, Paris, 1978,p. 75-76.
13. H.-Ch. PUECH, « Gnostische Evangelien und verwandte
Dokumente », dans E. HENNECKE W. SCHNEEMELCHER,d.,
NeutestamentlicheApokryphen, I. Band: Evangelien, Tubingen, 1959,
p.205-207.
14. H.-Ch. PuECH,En quetede a Gnose I, Paris, 1978,p. 76.
15. H.-Ch. PUECH, « Gnostische Evangelien und verwandte
Dokumente », dans E. HENNECKE W. SCHNEEMELCHER,d.,
NeutestamentlicheApokryphen, I. Band: Evangelien, Tubingen, 1959,
p.207.
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VANGILE DE THOMAS, AcrES DE THOMAS, LIVRE DE THOMAS
maniere approfondie, il y a neanmoins retrouve, en p. 138, 1-21,
une interpretation et une explication des relations mutuelles
entre Thomas et Jesus,qu il rapproche du.logion 13 de I Evangi-
Ie : Thomas est « veritablement Ie frere (Ie frere jumeau) et Ie
compagnon de Jesusparce qu il a connu celui-ci, c est-a-dire a
eu en lui et par Iui, qui s identifie a elIe, Ia connaissancede la
Verite »16. Et Puech de continuer: «Autant signifier que
Thomas possede Ia gnose , definie ici, au premier chef, et de
fa~n technique et toute classique,comme connaissancede soi,
connaissance onjointe de ce que I on etait originellement, de ce
que l on est ici-bas devenu, de ce que l on sera ou redevien-
dra »17.
Sous Ie titre «Un nouveau chainon dans la tradition syrienne
de Judas Thomas »18, ohn D. Turner, qui avail soutenu deux ans
auparavant une these de doctoral sur Ie Livre de Thomas19,
propose en 1972 une hypothese d ensemble pour rendre compte
de Ia situation de ce traite dans Ia tradition Iitteraire thomasien-
fie, essentiellement, celIe qui etait deja connue par l Evangile
selon Thomaset les Actes de Thomas.D apres Turner, Ie Livre de
Thomas est constitue de la juxtaposition de deux reuvresoriginel-
Iement distinctes; Ia premiere (section A du Livre, p. 138,4 -142,
21), un dialogue de Jesusavec Thomas, aurait porte Ie titre «Le
livre de Thomas I Athlete ecrivant aux parfaits », alors que la
seconde (section B, p. 142,21 -145, 19), constituee par un long
monologue du sauveur dans lequel Thomas n intervient plus, se
serait ntitulee « Les paroles secretes, elles que Ie sauveura dites
et que moi-meme, Mathaias, j ai ecrites »2°.Comme on Ie voit,
Turner tire parti, pour fonder sa theorie redactionnelIe, de la dif-
ference reelle des deux sectionsde l ouvrage qu il a distingueeset
de la disparite que presentent I un par rapport a I autre incipit et
titre final. Comme la premiere section du traite est Ia seule a
16. H.-Ch. PUECH, n quetede la Gnose I, Paris, 1978,p. 237.
17. Ibid.
18.J. D. TuRNER,«A New Link in the Syrian JudasThomas Tradition »,
dans M. KRAUSE, d., Essayson the Nag Hammadi Texts n Honour of
Alexander Bohlig (Nag Hammadi Studies 3), Leiden, 1972,p. 109-119.
19. J. D. TuRNER,The Book of Thomas the Contender rom Codex I of
the Cairo Gnostic Library from Nag Hammadi (CG II, 7). The Coptic
Text with Translation, ntroduction and Commentary (Society f Biblical
Literature. Dissertation Series23), Missoula (Montana), 1975.
20. Pour un expose de cette theorie redactionnelle, voir ibid., p. 215-
225.
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P.-H. POIRIER
faire une place a Thomas, il n y aurait a vrai dire que celle-ci qui
puisse etre imputee a la tradition thomasienne incarnee par
l Evangile et les Actes. Au sein de celie tradition, la section A du
Livre de Thomas occuperait tine place mediane entre ces deux
traites. En effet, la premiere partie du Livre serait a situer entre
l Evangile et les Actes,et ce, a un triple point de vue21.
En ce qui regarde tout d abord la date de composition, celie du
Livre serait anterieure a celie des Actes,mais posterieure a celie
de l Evangile. Deuxiemement, Ie role que joue l apotre Thomas
temoigne d une importance croissante au fur et a mesure qu on
passe de l Evangile au Livre puis aux Actes : alors que, dans
l Evangile, Thomas n est que Ie destinataire des paroles de Jesus
et que, dans es Actes, l fait toujours et partout figure de personna-
ge central, dans Ie Livre, en revanche,s il n occupe plus Ie devant
de la sceneetant donne l importance accordeeau sauveuren tant
que revelateur, l joue neanmoins un role important dans a mesu-
re ou il est l interlocuteur permettant au dialogue d avancer.
Inversement, en passantde l Evangile aux Actes, a place reservee
au sauveurdiminue au benefice de l apotre. On observe enfin, au
plan du genre litteraire des raites, un passage une collection de
dits (Evangile) a un dialogue entre Jesuset Thomas (section A du
Livre), puis a un veritable roman centre autour des exploits mis-
sionnairesde Thomas (Actes). Turner ajoute encore que Ie theme
de l ascetisme sexuel devient de plus en plus dominant en allant
de l Evangile au Livre et enfin aux Actes. Sur a basede cesobser-
vations, Turner conclut que «ces trois textes refletent tine tradi-
tion croissante ( a growing tradition ) centree sur l apotre
Thomas, umeau de Jesuset recipiendaire de sesparoles secretes,
et qui Ie comprend de plus en plus comme un athlete et un mis-
sionnaire pour la cause de l abstinence de tout de ce q\li est du
monde, specialement la sexualite »22.Des loTs, si Ie Livre de
Thomas doit etre situe entre l Evangile seton Thomaset les Actes
21. Cf. J. D. TuRNER,art. cit. (n.18), p.118, et «Thomas the Contender,
Book of », dans TheAnchor Bible Dictionary 6, New York, 1992,p. 529.
22.J. D. TuRNER,art. cit. (n. 18), p. 118.
23. Ibid. Voir aussiJ. D. TuRNER,«Thomas the Contender, Book of»,
dans The Anchor Bible Dictionary 6, New York, 1992, . 529 : «The Book
of Thomas he Contender ..was likely composed n the first half of the 3d
century A.D. Two products of this tradition have been dated with fair cer-
tainty : the Gospel of Thomas,composedc. A.D. 50-125,and the Acts of
Thomas,composedca. A.D. 225»; ainsi que Ie tableau recapitulatif dans
ro., The Book of Thomas the Contender from Codex II of the Cairo
Gnostic Library from Nag Hammadi (CG II, 7). The Coptic Text with
Translation, ntroduction and Commentary Societyof Biblical Literature.
DissertationSeries23), Missoula (Montana), 1975, . 238.
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. BVANGILE DE mOMAS, AcrES DE mOMAS, LIVRE DE THOMAS 15
de Thomas dans Ie developpement de la tradition thomasienne, la
composition de la section A du Livre pourrait dater des environs
de 200, peu de temps avant celIe des Actes23.
Dans son anthologie de la litterature gnostique intitulee The
Gnostic Scriptures, Bentley Layton a regroupe, comme apparte-
nant a une meme «School of St. Thomas », trois textes, l' Hymne
de la perle des Actes de Thomas, l' Evangile selon Thomas et Ie
Livre de Thomas24. D'apres Layton, on y retrouverait deux ele-
ments caracteristiques permettant de les associer dans un meme
courant ideologique. Le premier de ces elements, cristallise
autour de la figure de Judas Thomas, est celui du modele de la
gemellite divine, qui constituerait, pour la tradition thomasien-
ne, un modele theologique exprimant la relation reciproque qui
unit Ie chretien et la lumiere divine interieure ou Ie «Jesus
vivant» : «se connaitre soi-meme, ecrit Layton, etait connaitre
son double divin et, par la, connaitre Dieu ; suivre Ie Jesus
vivant etait connaitre et unifier son propre maio »25Ainsi, la
gemellite de Thomas et de Jesus exprimerait metaphoriquement
un modele general de salut par la connaissance (YVWO LS')e
Dieu, mettant l'accent a la fois sur l'etat de disciple et sur la
connaissance de soi. De plus, la conviction de l'identite de ces
trois entites -Ie moi individuel, la source interieure de l'inspira-
lion divine (Jesus) et Dieu dans son sens Ie plus universel (Ie
peTe) -relie la litterature thomasienne a d'autres corpus de la
litterature gnostique, comme les ecrits de Valentin et de son
ecole26. Le second element constitutif de l'tic°e de saint Thomas
reconstituee par Layton est un my the des origines, dont Ie
meilleur representant serait l' Hymne de la perle, mais que l'on
retrouverait egalement dans Ie Livre de Thomas et dans l' Evan-
gile selon Thomas27. Selon ce mythe, Ie veritable t;rloi individuel,
originaire du royaume de la lumiere, residerait maintenant dans
un royaume ou un etat de sommeil, de tenebres ou de mort,
dont il serait sauve par la volante du peTe et par l'intervention
d'un sauveur, qui lui apprendrait a se reconnaitre lui-meme et a
distinguer la lumiere des tenebres28. Bien qu'il affirme l'impor-
lance de savoir dans quel ordre les trois reuvres qu'il retient -
24. Voir B. LAYTON, The Gnostic Scriptures, Garden City (N. Y.), 1987,
p.357-409.
25. Ibid., p. 359.
26. Ibid.
27. Voir Ie tableau synoptique dans B. LAYTON,The Gnostic Scriptures,
p. 368; plus loin, en p. 376, il parle d'un «Hellenistic myth of the hea-
venly origin, fall, incarnation, awakening, and return of the soul ».
28. B. LAYTON, p. cit., p. 360; on trouve une formulation assezproche
chezH.-Ch. PUECH, n quetede fa Gnose I, Paris, 1978,p. 237.
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P.-H.POIRIER
I Hymne de la perle, I Evangile seton Thomas et Ie Livre de
Thomas -ont ete composees29,Layton n apporte cependant
aucune reponse a cette question. Tout au plus remarque-t-il que,
si la date de composition du Livre de Thomas est inconnue,
celui-ci a dfi en tout cas etre compose avant 350, date approxi-
mative de la fabrication du codex II de Nag Hammadi, et apres
I Evangile de Thomas, au prologue duquel il fait allusion en p.
138, 1-23°. I note aussi que Ie contenu mythique du Livre res-
semble ai Hymne et ai Evangile. Par ailleurs, si Ie Livre fournit
une elaboration explicite du modele de la gemellite divine entre
Ie sauveur et Thomas, Ie my he de I ame represente par I Hymne
de la perle et auquell Evangile seton Thomas fait allusion, tout
en procurant Ie cadre de I enseignementdu sauveur ransmis par
Ie Livre, ne constitue pas pour autant une part importante de
son message31.
Alors que la theorie elaboree par J. D. Turner pour expliquer
les relations qu entretiendraient les trois textes thomasiens qui
DOllSnteressent fait montre d une coherence certaine, il n en va
pas de meme de I explication avancee par Layton. En effet, si Ie
theme de la gemellite divine est bien present dans les trois
reuvres qu il considere -bien qu a des degres divers -, Ie mythe
des origines que Layton isole comme caracteristique de son
ecole thomasienne se trouverait, d apres lui, exprime de la fa\on
la plus claire dans I Hymne de la perle. Or celie piece, tout en
etant incorporee aUKActes de Thomas et attestee uniquement
par ceux-ci32, en Testepasmoins une piece adventice. n est des
lOTSisque de lui attribuer une fonction normative dans a recon-
stitution d une hypothetique ecole thomasienne, d autant que ce
terme d « ecole» evoque d ordinaire quelque chosede plus precis
que ce que Layton semble mettle la-dessous.
La derniere contribution en date sur la tradition de Thomas a
ete presentee par Gregory J. Riley33. Celui-ci considere que la
communaute de Thomas, qui tenait de I apotre son inspiration et
sa legitimite spirituelle, et qui a cree la tradition thomasienne,a
29. B. LAYTON, op. cit., p. 369.
30. B. LAYTON, op. cit., p. 400.
31. Ibid.
32. Voir B. LAYTON, op. cit., p. 359 et 367-369.
33. G. J. RILEY, « Thomas Tradition and the Acts of Thomas », dans E.
H. LOVERING, Jr., ed., Society of Biblical Literature 1991 Seminar
Papers, One Hundred Twenty-Seventh Annual Meeting, November 23-
26, 1991, Kansas City, Missouri (Society of Biblical Literature Seminar
Paper Series 30), Atlanta (Georgia), 1991, p. 533-542. Cet article repose
en partie sur la these de l auteur, soutenue en 1990 et intitulee Doubting
Thomas: Controversies between the Communities of Thomas and John.
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VANGILEDE maMAS, AcrES DE maMAS, LIVRE DE maMAS
fait son apparition dans a periode anterieure aux evangilescano-
niques. D apres Riley, c est cette communaute qui a produit
l Evangile selon Thomaset Ie Livre de Thomas,et a provoque, de
la part de la communaute du disciple bien-aime, a redaction de la
pericope sur Ie doute de Thomas en In 20. Alors que l Evangile
selon Thomas et Ie Livre de Thomas s accordent sur Ie rejet du
corps, a negation de la resurrection, une commune nsistancesur
la YVOOLSt l illumination en lieu et place de la foi, ainsi que sur
l affirmation de l egalite spirituelle de Jesuset de Thomas, Evan-
gile de Jean, de son cOte,par reaction polemique, corrigerait, sur
chacun de ces points, l image de l apotre mise en avant par les
deux traites thomasiens «Thomas touche Ie corps physique res-
suscite de Jesus (confirmant ainsi la resurrection de la chair),
croit et se soumet t Jesuscomme t son Seigneuret it sonDieu. »34
Pour Riley, it ne fait pas de doute que Ie redacteur de Jean con-
naissaitpour l essentiella position de la tradition thomasiennesur
res questions disputees. Quant aux Actes de Thomas, ts se trou-
veraient en continuite voulue avec cette meme tradition. Ils
reprennent en effet des elementspropres t la tradition thomasien-
ne, con~rnant notamment Ie nom de Thomas, sa gemellite avec
Jesus, a polemique contre Ie corps et ses dangers35.Mais, en
meme temps, les Actes trahissent influence de la figure canoni-
que de Thomas telie qu on la trouve chezJean: l apotre s adresse
it Jesuscomme t son Seigneuret it son Dieu, ill appelie son mai-
tre et se reconnait meme son esclave.Pour reprendre l expression
de Riley, Ie Thomas des Actes est un Thomas qui a bien appris sa
le~n johannique36.En ce sellS,es Actes de Thomasse situeraient
it mi-chemin entre Ie point de vue «confessant» de la Grande
Eglise, qui s impose de plus en plus, et la tradition thomasienne,
entendons,celie de l Evangile et du Livre de Thomas.
Apres avoir passe en revue quelques etudes37 ui se sont inte-
resseesd une maniere particuliere it la tradition thomasienne et it
34. G. J. RILEY, art. cit., p. 533; voir aussi p. 536: «The figure of
Thomas in the Gospel of John, however, s made to submit to Jesusas a
superior being and to address Jesus as my Lord and my God (John
20 28). »
35. Ibid., p. 534-535.
36. Ibid., p. 536.
37. Revue qui ne cherche en rien a etre exhaustive; ajoutons seulement
qu on trouvera dans R. KUNTZMANN, e symbolisme des umeaux au
Proche-Orient ancient. Naissance, onction et evolution d un symbole
(Beauchesne,Religions 12), Paris, 1983,p. 164-182,une bonne analyse
de la tradition de Thomas Didyme ; d apres KUNTZMANN, on peut ...
etablir l hypothese que Ie Livre de Thomas se situe entre I Evangile et
les Actes de Thomas» (p. 183).
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P.-H. POIRIER
ses principaux temoins litteraires, DOUg xaminerons main enant
les trois reuvres que DOUg vons retenues, afin, d'une part, de
voir de quelle maniere et dans que Ie mesure elles tirent partie
de 1'« argument thomasien », c'est-a-dire du recours justificatif
au nom de Thomas et a son etymologie traditionnelIe, et, d'autre
part, preciser es liens que, sous ce rapport, ces textes entretien-
Dent es uns avec es autres.
Si I'on accepte a datation habituellement re~ue pour la com-
position de l'Evangile selon Thomas, soit veTS14038,l appert
que cet ecrit est, apres I'evangile de Jean, Ie plus ancien repre-
sentant de la litterature thomasienne.L'appartenance de I' Evan-
gile selon Thomas a celie litterature peut etre etabli, d'un cote,
par I'occurrence du nom de I'apotre dans Ie prologue, Ie logion
13 et Ie titre final, et, d'autre cote, par la reprise de certains de
ses dits par un texte a haute densite thomasienne, es Actes de
Thomas.Toutefois, si DOUgonsiderons e temoignage de I' Evan-
gile en regard du nom de I'apotre, DOUg e trouvons pas a situa-
tion a laquelle on s'attendrait pour un document d'une si haute
antiquite. Examinons en effet les attestations du nom de I'apotre
dans Ie manuscrit du Caire et dans Ie papyrus d'Oxyrhynque.
Ces attestations sont au nombre de six, ainsi reparties :
-dans Ie prologue:
1. NH II, 32, 12-13 21. 21.MOC iOY2I.o.C WMo.C
2. P.Oxy. 654, 2-3 'lou8a ()] Kat E>w~ii
-dans Ie logion 13 :
3. NH II, 35, 2 9WMo.C
4. NH II, 35, 8-9 9WMo.C
5. NH II, 35, 11 9WMo.C
-dans Ie titre final:
6. NH II, 51, 28 9WMo.C.
II ressort de celie enumeration qu'il n'y a que les deux pre-
mieres occurrences a se ranger du cote de la forme reconnue
comme la plus caracteristique de la tradition thomasienne, qui
rejoint I' lsage des versions syriaques anciennes (sinaltique et
curetonienne), ainsi que celui de la legende d'Abgar (d'apres Ie
temoignage d'Eusebe, Histoire ecclesiastique , XIII, 11), de la
Doctrine d'Addai" (§ 7) et d'un ecrivain comme Ephrem39, a
38. Voir a ce sujet F. T. FALLON R. CAMERON The Gospel of
Thomas: A Forschungsbericht and Analysis », dans Aufstieg und
Niedergang der romischen Welt, Teil II : Principat, Band 25.6, Berlin,
1988,p. 4224-4226.
39. Pour les references, voir U. MONNERET E VILLARD, Le leggende
orientali sui magi evangelici (Studi e testi 163), Citta del Vaticano, 1952,
p. 46, l. 1.
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VANGILE DE THOMAS, ACIES DE THOMAS, LIVRE DE THOMAS
savoir la designation de l'apotre par Ie nom de 'lou8aS' ew~aS'
ou r<' C7mJ ~C7 r<d...A vrai dire, seule la seconde des occur-
rences repertoriees, celIe du papyrus d'Oxyrhynque, releve net-
tement de cette tradition. En effet, la forme qu'offre Ie pro-
logue, dans Ie manuscrit du Caire, est une forme hybride, une
sorte de lectio conflata, qui reflete a la fois la tradition syrienne
ancienne (ioy2I.b,c eWMb,c) et la formulation johannique
(8w~aS' 6 AE'Y6~EVOS'(8u~oS' In 11, 16; 20, 24; 21, 2]), mais
dans une sequence (21.0 oe., au lieu de la suite attendue °. eo 21..)
qui constitue a notre connaissance un hapax40.L'ordre normal
apparait dans les Actes de Thomas (chap. 1, 2; p. 100, 4-5
Bonnet), ou on lit 'Iou8aS' ew~aS' 6 Kat 8(8u~oS'.Quant a
l'ordre du corte, il est a vrai dire aberrant dans la mesure ou il
place en premier lieu ce qu'on considere comme Ie surnom de
l'apotre -ou plutot la traduction grecque de son surnom ara-
me en -, comme si Ie corte ne savait plus la fonction de ce 8(8u-
~OS'.Quant au P. Oxy. 654, s'il atteste la forme syrienne du nom
de l'apotre, ille fait a la grecque, en recourant a une suture (6
Kat) usuelle dans es noms doubles grecs41.
Ainsidonc, il n'y a que la version grecque de l' Evangile seton
Thomas a pouvoir etre nettement imputee a la tradition syrien-
ne ancienne, alors que la version corte temoigne tantot d'une
tradition hybride, deja remaniee, tantot d'une tradition proche
de celIe des synoptiques ou de l'usage occidental. En ce qui
concerne Ie theme gemellaire, s'il n'apparait pas comme tel dans
l' Evangile seton Thomas, on y trouve cependant affirmee une
intimite particuliere de Thomas avec Jesus, notamment dans Ie
logion 13. D'ailleurs, Ie simple fait que l'apotre soit presente
comme Ie recipiendaire des paroles secretes et vivifiantes de
Jesus suffirait a consacrer son statut de disciple par excellence.
Passons maintenant aux Actes de Thomas. Si nous discutons
ce texte immediatement apres l' Evangile seton Thomas,c'est en
raison de sa dependance averee par rapport a celui-ci, beaucoup
plus marquee, comme nous Ie verrons, que dans Ie cas du Livre
40. Des lors, on ne peut considerer sans plus que la fomlulation artifi-
cielle Didyme Judas Thomas est, au me-me itre que Ie nom Judas
Thomas « a phenomenon characteristic of and restricted to early Syriac
literature », comme l'ecrit H. J. W. DRIJVERS, Facts and Problems in
Early Syriac-Speaking Christianity», The Second Century 2 (1982), p.
158, article repris dans H. J. W. DRIJVERS, ast of Antioch. Studies n
Early Syriac Christianity, Londres, VI.
41. D'apres G. H. R. HORSLEY <Names, Double », dans The Anchor
Bible Dictionary 4, New York, 1992,p. 1012), «A ho (hos) kai ...is by
far the most common formula used to indicate a byname, nothwithstan-
ding that it occurs only once in the NT (Acts 13:9,Saul/Paul). »
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P.-H.POIRIER
de Thomas. I est en eifel assure, comme Henri-Charles Puech
l'a etabli depuis longtemps42, ue les Actes connaissentde fa<;on
precise l' Evangile, dont ils reprennent de fa<;onplus ou moins
litterale plusieurs logia. D'un autre cote, les Actes font ce que
l' Evangile n avail jamais fait: developper, a partir du nom de
Thomas, une veritable symbolique gemellaire. A ce titre, les
Actes ont joue un role decisif dans la formulation et Ie develop-
pement de la tradition thomasienne ; on peut meme a,ffirmer
que, sans eux, l'identification de cette tradition dans l' Evangile
et dans Ie Livre n'aurait guere ete possible.
Le temoignage des Actes de Thomas sur Ie nom de leur heros
reflete, par sa diversite, les ecarts que presentent es uns par rap-
port aux autres les versions syriaque et grecque des Actes, et les
manuscrits qui les out transmises. En simplifiant, on peut tracer
Ie tableau suivant. Le plus ancien temoin syriaque des Actes de
Thomas, Ie Sinaiticus (palimpseste) 30, des ye- VIe siecles, ne
connalt que Ie seul nom t< I Clm..,Judas, alors que Ie manuscrit Ie
plus complet, Ie British Library Addit. 14645,date de 936,utilise
celui-ci dans 88 des cas (en regard de 8 pour t<.:;,';Il<d..
t<'IClm.., udas Thomas, et 4 pour r(:::7;IClt<d..,homas). II taut
toutefois Doter qu'en quelques endroits, une main tardive a cor-
rige Ie manuscrit de Londres en substituant Thomas a Judas,
sans doute pour en harmoniser Ie texte a l'usage prefere par Ie
correcteur. Les autres manuscrits syriaques (Berlin, Sachau222,
date de 1881 ; Cambridge University Library Addit. 2822, date
de 1883 Harvard College Library, Houghton Library, Syr 38,
Xye- XYle siecles Vatican syriaque 597, XYlIe siecle) out tous
Thomas. Quant aux Actes grecs, ls sont plus partages 47 des
occurrences donnent 'I ov8as-,40 ew~as- et 13 'Iov8as-
ew~as-, avec une seule occurrence (chap. 1, 2) en faveur de
'I ov8as-ew~as- () Kat 8l8u~os-.
La caracteristique a plus frappante des Actes de Thomas,aussi
bien grecs que syriaques,demeure l'omnipresence de l'imagerie
gemellaire, qui constitue Ie veritable fil conducteur du fecit. Cette
imagerie apparait a quelques eprisesde maniere tout a fait expli-
cite. C'est ainsi qu'aux chap. 11-12 (grec et syriaque), Jesus se
manifeste aux eunes epoux que Thomas vient de convertir a l'en-
cratismesous es raits de l'apotre, qu'il appelle« mOll rere» (chap.
12, 1). Aux chap. 31 et 39, mais, celie fois, uniquement dans Ie
grec, Ie syriaque ayant vraisemblablement subi une retouche
42. Voir notamment H.-Ch. PUECH, Gnostische Evangelien und ver-
wandte Dokumente », dans E. HENNECKEW. SCHNEEMELCHER,d.,
NeutestamentlicheApokryphen, I. Band.. Evangelien, Tiibingen, 1959,
p.206-207.
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YANGILE DE maMAS, AcrES DE maMAS, LIVRE DE maMAS
orthodoxisante43, homas est qualifie de «didyme -ou jumeau -
du Christ », dans Ie premier cas, par un serpent noir, suppot du
demon, dans autre, par un anon sur e point de se mettre au servi-
ce de l apotre. Aux chap. 54-57,entin, dans un fecit de resurrec-
tion, la morte revenuea la vie raconte a l apotre savisite desenters
et commentelle a ete livree a l apotre par quelqu un d autre, mani-
festement e Christ, qui ressemblaita Thomas (chap. 57, 3). Par-
dela cesattestationsclaires d une identification de Thomas a Jesus,
c est ensembledes Actesqui, par un jell parfois subtil de citations
et d allusions aux evangiles canoniques44, ultiplie les analogies
entre Jesuset son apotre au point que Ie destinde Thomas devient
un decalquede celli de son seigneuret maitre. Sanscesse ffirmee
et suggeree, identite de Thomas et du Christ est neanmoinsniee
de la maniere la plus explicite. Une premiere fois, au chap. 65, 1
(syriaque seulement), Thomas replique au general Siphur, qui Ie
prenait pour Jesus: «Je ne sills pas Jesus,mais son serviteur et son
apotre.» Mais c est surtout avant sonmartyre, dans ultime exhor-
tation de Thomas aux femmes converties par lui, que la denega-
tion de son identite avec Jesus est Ie plus clairement formulee :
«Ecoutez, mes filles. Je ne suis pas Jesus,mais e sills Ie serviteur
de Jesus; e ne sills pas Ie Christ, mais e suis celui qui sert devant
lui; je ne suis pas Ie Fils de Dieu, mais je prie et supplie d etre
rendu digne de Dieu» (chap. 160,1, d apres e syriaque; Ie grec est
sensiblement dentique). Plutot que de voir dans les propos de
l apotre line attenuation orthodoxe du theme de la gemellite du
Christ et de l apotre, il taut sansdoute y discerner ine intention
theologique visant a marquer la distance en meme temps qu on
affirme l identite, et signifiant par la que la gemellite si habilement
orchestreepar les Actes est avant tout spirituelle.
Veritable corollaire au theme de la gemellite, nous relevons
par ailleurs dans les Actes de Thomasde nombreux cas de poly-
morphie45,de dedoublement ou d ubiquite d un meme person-
nage. Mentionnons tout d abord la polymorphie du sauveur, qui
se fait voir a de nouveaux baptises SOilSa forme d un jeune
43. A res endroits, Ie syriaque lit «abime» au lieu de Didyme ; sur ce
point, voir P.-H. POIRIER,«Une etymologie ancienne du nom de
Thomas l Ap6tre et sa source », Parole de [ Orient 10 (1981-1982),p.
285-290.
44. Cf. R. KUNTZMANN,p. cit. (n. 37), Paris, 1983,p. 176,qui donne des
chiffres.
45. Sur ce theme et sa fonction dans es Actes de Jean et les autres actes
apocryphes, voir D. R. CARTLIDGE, Transfigurations of Metamor-
phosis Traditions in the Acts of John, Thomas, and Peter », Semeia ~8
[The Apocryphal Acts of the Apostles] (1986), p. 53-66, et surtout E.
JUNOD J.-D. KAESTLI,Acta Iohannis (Corpus christiano rum, Series
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22
P.-H. POIRIlf.R
homme (chap. 27, 3), que Thomas lui-meme qualifie de poly-
morphe (chap. 48, 1 grec), dont illoue la polyonymie (chap. 48,
1 syriaque), et qui semble bien se dissimuler sous les traits du
jeune homme qui soutient Manashar aux chap. 154-155.
Semblable polymorphie affecte egalementThomas. En effet, au
chap. 34 (grec seulement), Ie jeune homme ressuscite par
l apotre lui declare: «Tu es un homme sous deux formes, tu te
trouves partout oil tu veux, et tu n es retenu par rien, a ce que je
vois »46.Un peu plus loin dans Ie meme chapitre, Ie theme de la
polymorphie de Thomas est combine a celui de la similitude
entre Ie Christ et l apotre, deja rencontre au chap. 11, alors
qu au chap. 118, c est Ie theme de l ubiquite qui est associe a
celui de la polymorphie, lorsque l apotre apparait a Magdonia et
que celle-ci ne Ie reconnait pas «a causede l abondante lumiere
qui Ie precedait ». Signalons enfin deux cas de polymorphie-
dedoublement demoniaque, au chap. 43, oil Ie demon prend
l apparence d un jeune homme et d un vieillard, puis aux chap.
63-64, oil il emprunte les traits d un homme noir et d un gar<;on,
identiques l un a l autre.
Par leur combinaison d un materiau traditionnel emprunte a
l Evangile selon Thomas,par la maniere dont ils developpent et
systematisent e theme de la gemellite de Thomas et du Christ,
par leur recours au cadre romanesque, es Actes de Thomas ont
veritablement elabore et construit la figure de Thomas Didyme
que vont reprendre les productions apocryphes ulterieures
consacreesa l apotre et meme la tradition chretienne en general.
Ce faisant, les Actes de Thomas n ont rien invente. Ils prenaient
stirement appui sur une tradition deja fermement etablie, dont Ie
temoin Ie plus explicite est l Evangile selon Thomas, mais qui
avait dti s elaborer, anterieurement a l Evangile thomasien, sur
la base de l Evangile de Jean, ou plutot de la tradition doni ce
dernier se fait l echo en qualifiant Thomas de Didyme.
Comme DOllS avons vu plus haut, John D. Turner, dans son
article de 1972, situait Ie Livre de Thomas a mi-chemin entre
l Evangile de Thomas et les Actes de Thomasdans Ie developpe-
apocryphorum 2), Turnhout, 1983, vol. II, p. 466-493 et 698-700 ;
d apres ces auteurs, les Actes de Thomas appartiennent au deuxieme
type d utilisation de la polymorphie, qualifiee de romanesque : «Par
suite de la jalousie ou de la malveillance d un homme, l ap6tre et (ou)
une ou plusieurs femmes sont incarcerees une apparition polymorphe
du Seigneur provoquera leur delivrance. Sons des formes legerement
differentes, ce scenario se retrouve dans les AI, les Actes d Andre, les
Actes de Paul et les Actes de Thomas» (p. 699).
46. Traduction Yves Tissot.
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23
VANGILE DE THOMAS, AcrES DE THOMAS, LIVRE DE THOMAS
ment de la tradition thomasienne. Bien que Turner etaye son
hypothese par des arguments non negligeables, celle-ci apparait
nettement mains solide quand on considere Ie materiau propre-
ment thomasien que comporte Ie Livre et surtout la maniere
dont ille met a contribution. Voici d'ailleurs les passages du
Livre de Thomas qui presupposent la connaissance et l'utilisa-
tion d'elements de la tradition litteraire thomasienne.
1. L'incipit du Livre de Thomas (p. 138, 1-4: «Les paroles
secretes, relIes que Ie Sauveur a dites a Judas Thomas et que moi-
meme, Mathaias, j'ai ecrites. Je marchais et je les ecoutais se par-
ler l'un a l'autre») est clairement inspire de celui de l' Evangile
seton Thomas (p. 32, 10-12: «Voici les paroles secretes que Jesus
Ie vivant a dites et qu'a ecrites Didyme Judas Thomas»).
2. Le prologue du Livre (p. 138,4-21) expose Ie theme thomasien
en recourant a un vocabulaire qui n'est atteste en son entier que
dans les Actes de Thomas: frere, C~N (Actes, chap. 11-12, 1 :
a8EA<j>6s-,< ..<); umeau, COEIW (Actes, chap. 31, 2 et 39, 2 : 8(-
8u~os-,t<:::IJ<r<>d1); mi ou compagnon, WBp MMHE (Actes, chap.
156, 1 : ETaLpos-,< .;].J.J).D'autre part, la maniere dont ce theme
est amene montre qu'il s'agit la d'un theme connu que Ie redac-
teur du Livre utilise pour authentifier Ie dialogue qui va
suivre : «Frere Thomas, tant que tu as du temps dans Ie
monde, ecoute-moi, que je te revele ce sur quai tu as reflechi
dans ton creur. Puisqu'on a dit (EBEl AE ~YXOOC XE) que tu
es man jumeau et man veritable compagnon, examine-toi et
comprends qui tu es et comment tu es ou ce que tu deviendras.
Puisqu'on te nommera (EBEIAH CEN~MOYTE EpOK' XE) man
frere, il ne taut pas que tu sois sans te connaitre toi-meme. ...
C'est pourquoi donc, toi, man frere Thomas (ETBE B~'i (fE
NTOK' B~CON 9WM~C'), tu as vu ce qui est cache aux hommes,
ce a quai ils achoppent par manque de connaissance.» L'emploi
dans ce passage de conjonctions comme EBEl et EBEIAH, et de la
formule ETBE BlJ:.i confere clairement aux elements thomasiens
du Livre de Thomas une valeur justificative.
3. Le corps du texte ne presente pour ainsi dire pas d'elements
thomasiens, si ce n'est la mention, dans la partie dialogique (sec-
tion A chez Turner) du nom 9WM~C, qui, une seule fois (p.
142, 7-8), apparait sous un forme qui Ie rapproche a la fois de
l'incipit du Livre et de la tradition syrienne; 'iOYA~C' B~'i
ETOYMOYTE EpO<J' XE 9WM~C, c'est-a-dire 'lou8as- ()
E:1TlKA1l6ds-ou KAll6Ets-)ew~as-47.
47. Sur cette formule, voir G. H. R. HORSLEY, Names, Double», dal
The Anchor Bible Dictionary 4, New York, 1992,p. 1013.
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P.-H.POIRIER
4. Enfin, on enregistre tine seule allusion a peu pres sure a
l Evangile selon Thomas (p. 140, 41 -141, 2) ; dans ce passage
malheureusement acuneux, on retrouve Ie vocabulaire du logion
2. Turner a signale tine serle de paralleles entre Ie prologue du
Livre et les logia 2-7, mais aucun de ces rapprochementsne s im-
pose.
Sans aller aussi loin que Hans-Martin Schenke48,pour qui
l auteur du Livre de Thomas, out en connaissantbien la tradi-
tion de Judas Thomas, ne se situe cependant pas dans celle-ci,
DOllS erlons d accord avec lui, sur la base des observations que
DOllS enons de taiTe, pour dire que cet auteur utilise d une
maniere toute litteraire tine tradition dont il se reclame nean-
moins pour authentifier Ie dialogue de revelation qu il produit
ou qu il transmet. Cela signifie que Ie Livre de Thomasn appar-
tient que secondairementa la tradition thomasienne. On ne petit
en tout cas pas Ie mettre sur Ie meme pied que l Evangile de
Thomas ou les Actes de Thomas,deux textes, surtout Ie dernier,
qui sont authentiquement thomasiens.
Au terme de cette analyse des trois textes que DOllSavions
retenus, qu est-il permis d affirmer de la nature des relations
qu ils entretiennent les tins avec les autres ? D emblee, il appa-
fait qu ils ne peuvent etre inscrits Ie long d une meme «trajectoi-
re » thomasienne dont Ie developpement ineaire exigerait de les
situer en dependancedirecte les tins des autres. On ne petit non
plus expliquer leur parente par l appartenance a tine «ecole de
Thomas », surtout si cette ecole est definie d une maniere aussi
generale que Ie fait Bentley Layton. A ne considerer que les
reuvres analysees, et bien que celles-ci ne representent qu tine
portion du legs thomasien, on se trouve en face d une tradition
plus ou moins eclatee. Dans Ie cas de l Evangile selon Thomas et
des Actes de Thomas, eur appartenancea un meme courant tho-
masien petit etre etablie, au moins a rebours. En effet, si l Evan-
gile offre au lecteur qui ne connaitrait TieDd autre, qu un maigre
materiau thomasien -l attribution de l ecrit au Didyme, son sta-
tut de recipiendaire des dits secrets du sauveur, l exaltation de
l apotre au logion 13, les Actes, en revanche, reprennent de
l Evangile tine matiere non negligeable qu ils inscrivent dans ine
large orchestration du theme gemellaire thomasien. Cela signifie
que l auteur des Actes avait conscienceque l Evangile apparte-
nait a la tradition a laquelle il puisait et qu il s employait a syste-
matiser.
48. H.-M. SCHENKE, as Thomas-Buch (Nag-Hammadi-Codex II, 7)
(Texteund Untersuchungen138), Berlin, 1989,p. 65.
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EVANGILE DE THOMAS, AcrES DE THOMAS, UVRE DE THOMAS
25
Pour ce qui est du Livre de Thomas, a situation est tout a fait
differente. Nous sommes a en presence d'une reprise litteraire,
secondaire, pour tout dire artificielle, de l'idee gemellaire, aux
fins d'authentifier un discours de revelation qui ne rencontre
l' Evangile et les Actes que sur des themes trop largement diffu-
sespour fournir des indic~s surs d'une dependance du Livre par
rapport aux deux autres ecrits. Si Ie Livre de Thomas emarge a
la tradition thomasienne, il ne Ie fait que d'une maniere laterale,
alors que, pour l' Evangile et les Actes, il y a tine dependance
marquee des seconds par rapport au premier. En termes de
chronologie relative, cela veut dire que, si l' Evangile seton
Thomas est assurementanterieur aux Actes, rien n'empeche que
Ie Livre de Thomas soit posterieur a ceux-ci. C'est en tout cas ce
que suggere Ie fait que Ie Livre presuppose une thematique
gemellaire deja bien developpee et familiere a ses ecteurs ; or,
les Actes sont Ie seul texte connu de nous dans lequel tine telle
thematique est mise en place. C'est ce qu'indique aussi Ie fait
que Ie Livre qualifie Thomas de frere de Jesus,appellation attes-
,tee dans les Actes et pas ailleurs. En conclusion, nous dirions
que Ie Livre de Thomas trahit sa delle a l'endroit de l' Evangile
par son incipit, et des Actes par son prologue, .mais que, pour Ie
reste, il ne peut etre situe sur la meme «trajectoire» que ces
deux ouvrages. Ce que l'on illustrera par Ie schema suivant :
AcThom
Vne telle etude de la tradition thomasienne et de ses ransfor-
mations ne peut etre que somma re et partielle. Seule une
approche globale de l'ensemble de cette tradition permettrait de
corroborer ou d'infirmer les resultats auxquels nous avons abou-
ti. 11conviendrait en particulier de reconstituer, si toutefois cela
est possible, l'histoire des traditions thomasiennes anterieures a
l'Evangile de Jeaif9, traditions dont cet evangile serait dependant
pour son temoignage sur l'apotre Thomas, mais dont, au mains
partiellement, il assurerait aussi e relais. D'autre part, il faudrait
49. C'est dans une certaine mesure ce qu'essaie de faire G. J. RILEY
dans son article cite ci dessus, . 33.
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P.-H.POIRIER
etudier les traditions thomasiennes contemporaines de et exte-
rieures a l Evangile selon Thomas et aux Actes de Thomas chez
Eusebe de Cesaree, dans la Doctrine d Addai , dans les vieilles
syriaques, chez Ephrem et ailleurs dans la litterature syriaque,
pour determiner la provenance de ces elements traditionnels
epars et la maniere doni ils s articulent aux donneesde l Evangi-
Ie et des Actes. Une telle enquete restera cependant oujours tri-
butaire de ce que nous ignorons des deux premiers siecleschre-
tiens dans aire syriaque. Et ce n est pas peu.
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Alain LE BOULLUEC
Ecole Pratique desHautes Etudes,Paris
LA LETTRE SUR L « EVANGILE SECRET»
DE MARC ET LE QUIS DWES SALVETUR ?
DE CLEMENT D ALEXANDRIE
The long fragment of a letter attributed to Clementof Alexandria deal-
ing with a secretgospel of Mark, which was discoveredby Morton Smith
in 1958 and edited by him in 1973, is quite controversial. Since the tur-
moil causedby the oddities of the inventor about the historical Jesushas
abated, he NT exegesis ives more and more importance to the indica-
tions of he letter to rebuild the synoptical story. Yet no one agreeson the
chronological relation between he secretMark and the canonical Mark.
As for the genuineness of the letter, it is not clearly established. Our
inquiry is an attempt to find arguments n the comparison between he
letter and the Quis dives salvetur ? of Clement, where the latter com-
ments upon Mark 10,17-31. This book is almost certainly posterior to the
Stromateis and even o the Hypotyposeis. Moreover it contains a spiritu-
al interpretation of the versesof the gospel. Since the episode by secret
Mark is linked with the narrative of Mark 10, 17-31,we may nfer, if the
letter is Clement s, that the symbolical exegesisof QDS usesparts of
secretMark. The exampleswe have given here make the hypothesis ike-
ly, but not certain.
Le long fragment d une lettre attribuee i Clement d Alexandrie, sur un
«Evangile secret» de Marc, decouvertpar Morton Smith en 1958,et edite
par lui en 1973,pose de nombreuxproblemes. Depuis que l effervescence
creeepar les elucubrations de l inventeur sur Ie Jesus historique, i partir
de ce document, est retombee, es exegetes u Nouveau Testament ren-
nent de plus en plus au serieux es indications de la lettre,pour reconsti-
tuer la genesedes synoptiques. L accord ne s est pas encore fait, cepen-
dant, sur la relation chronologique entre Ie Marc «secret» et Ie Marc
canonique. Quant ii la questionde l authenticite de lalettre, elle n est pas
definitivement tranchee.L enquete presentecherche des arguments dans
la comparaison entre a lettre et Ie Quis dives salvetur ? de Clement,ou
celui-ci commente la pericopede Marc 10, 17-31. Cet ouvrage est tres
probablement posterieur aux Stromates, et meme aux Hypotyposes. II
Apocrypha 7, 1996, . 27-41
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A. LE BOULLUEC
comporte en outre une interpretation spirituelle des versets de Marc.
Btant donne que l'episode rapporte par Marc « secret» est narrativement
et thematiquement ie au recit de Marc 10, 17-31, on peut suppose/;si la
lettre estde Clement,que l'exegese ymbolique du QDS introduit desele-
ments tires de I' « Bvangile secret». Les exemples allegues ci rendent
l'hypothese plausible, mais ne permettentpas de conclusion certaine.
Le long fragment d'une lettre attribuee a Clement
d' Alexandrie, sur un «Evangile secret» de Marc, decouvert par
Morton Smith au monastere de Saint-Sabas,a l'ete 1958, et edite
par lui en 1973, avec un tres ample commentairel, distingue fort
clairement trois formes ecrites de Marc:
1. les «actes du Seigneur», rediges par Marc a Rome, a l'in-
tention des catechumenes.Ce « premier livre » serait notre Marc
canonique;
2. un «evangile plus spirituel », compose par Marc a
Alexandrie, completant Ie premier, a l'intention des «progres-
sants dans la connaissance», au moyen d'elements tires de ses
propres «memoires» et de ceux de Pierre «<memoires» qui
n'etaient pas destines a la publication), un «evangile secret» ;
3. un texte de cet « evangile secret » falsifie par Carpocrate, au
moyend'additions mensongeres.
A ces rois formes ecrites s'ajoutent trois traditions: l'une, l'en-
seignementmystique du Seigneur, est restee cachee; Marc ne l'a
pas divulguee ni livree a l'ecrit; la deuxieme est celIe que l'auteur
de la lettre annonce par la formule sur laquelle Ie fragment
s'acheve brusquement (et pour notre plus grande deception ):
c'est «l'explication (de l'evangile secret) veridique et conforme a
la philosophie veritable»; on peut supposerqu'elle dependait de
la premiere, par voie de transmissionesoterique la troisieme est
l'interpretation carpocratienne de 1'« evangile secret» alsifie.
Voici une traduction de ce fragment, lequel indique aussiavec
precision les points d'insertion, dans Ie «premier livre» de
Marc, de recits propres a 1'« evangile secret» :
1. Clement of Alexandria and a Secret Gospel of Mark, Cambridge
(Mass.) 1973.
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A LETrRE SUR L « BV ANGILE SECRET» DE MARC
Extrait des ettres du tres saint Clement, auteur des Stromates
A Theodore
Tu as bien fait de mettre un baillon sur leg enseignements
innommablesdesCarpocratiens.Ce sooteux eg « astreserrants »
(Jude 13) dont a parle la prophetie (cf. Jude 14), qui errent loin
de la voie etroite (cf. Mt 7, 14) vers abime infini des autes char-
nellesetcorporelles. Enfles de leur pretendueconnaissancecf.l
Co 8, 1) des «profondeurs de Satan» (Apoc 2, 24), ils ne s aper-
<;oiventpas qu ils se jettent eux-memesdans «l epaisseur des
tenebres» (Jude 13) du mensonge alors qu ils se vantent d etre
libres, ls soot devenus egesclaves e desirsabjects.
II taut donc s opposer a eux a toute force et de toute fa<;on.
Car meme s ils disaient quelque chose de vrai, l amant de la
verite ne leur donnerait pas pour aut ant son accord. Tout ce
qui est vrai n est pas la verite, et il ne taut pas preferer ce qui
passe pour verite d apres leg opinions humaines a la verite
veritable conforme a la foi.
Parmi leg rumeurs qui se repandent a propos de I Evangile
selon Marc, (Evangile) inspire, leg unes soot completement
fausses,eg autres, meme si elles comportent quelque chose de
vrai, ne soot pas pour autant ransmises omme Ie veut la verite.
Le vrai, melange aux fictions, est en effet a ce point adultere que
Ie gel perd sa saveur,comme il est dit (cf. Mt 5,13; Jer 28,17).
Marc, assurement,a mis par ecrit leg actes du Seigneurpen-
dant Ie sejour de Pierre a Rome, sans toutefois leg faire
connaitre tOllS ni indiquer ceux qui etaient secrets, mais en
choisissant ceux qu il avait pense leg plus utiles pour faire
grandir la foi des catechumenes.Apres Ie martyre de Pierre,
Marc partit pour Alexandrie ; il emportait a la fois sespropres
memoires et ceux de Pierre; tirant de ceux-ci leg elements
convenant aux progressantsdans a connaissance,lles fit pas-
ser dans son premier livre et composa un evangile plus
spirituel, a l usage de ceux qui se perfectionnent. Cependant l
ne divulgua pas encore leg mysteres eux-memes ni ne livra a
l ecrit la revelation sacree de l enseignement du Seigneur,
mais il ajouta d autres actes a ceux dont il avail deja rendu
compte par ecrit et y joignit encore certaines paroles dont il
savait que l explication initierait les auditeurspour les conduire
au ond du sanctuairede la verite sept ois cachee.
Voila donc leg dispositions qu il prit, sans montrer d envie ni
negliger leg precautions, je Ie crois, et a sa mort illaissa son
ecrit a l eglise d Alexandrie, on il s est conserve encore main-
tenant en toute surete, la lecture en etant reservee exclusive-
ment a cern qui soot nities aux grands mysteres.
Mais comme leg demons abominables ne cessentde machi-
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30
LE BOULLUEC
neT a perte ~es hommes, Carpocrate, pourvu de leur ensei-
gnement et habile a user de ruses trompeuses, Silt faire d'un
pretre de l'eglise d' Alexandrie son oblige et reussit ainsi a se
procurer aupres de lui line copie de l'evangile secret, qu'il
expliqua selon son opinion blasphematoire et charnelle. En
outre il Ie squilla, en melant aux enonces pUTS t saints les
mensonges es plus ignobles. Et c'est a ce melange qu'a pris sa
source a doctrine des Carpocratiens.
II ne faut donc jamais ceder, comme je l'ai deja dit, aces
gens-la et, quand ils presentent leurs faux, on ne do it pas
admettre qUf l'evangile secret soit de Marc, mais il faut Ie
flier, avec sequent a l'appui. Car toutes les verites ne sont pas
a dire a taus. Aussi la Sagesse de Dieu, par la voix de
Salomon, domne-t-elle cet ordre : «Reponds au foil d'apres sa
folie» (Prov 26, 5) ; elle enseigne que la lumiere de la verite
doit etre cacheea ceux dont l'intelligence est aveugle. I est dit
encore: «A elui qui n'a pas il sera retire» (Mt 25,29; Lc 19,
26) et : «Qu Ie foil avancedans es tenebres» (cf. Eccl2, 14).
Mais nailS, n us sommes es fils de la lumiere (cf. 1 Thess5,
5), illumines par Ie lever qui vient d'en-haut de l'Esprit du
Seigneur.« a ou est l'Esprit du Seigneur, est-il dit, la est la
liberte» (2 3, 17). «Tout est pur pour les purs» (Tt 1, 15).
Aux quest ODS ue tu as posees,donc, je n'hesiterai pas a
repondre, en denon~ant e faux au moyen des paroles memes
de l'Evangil. En realite, apres : «lIs etaient en chemin et
montaient a Jerusalem» (Mc 10, 32), et la suite jusqu'a :
«trois jours apres il ressuscitera» (Mc 10, 34), (l'evangile)
ajoute mot a mot: «Et ils arrivent a Bethanie et il y avait la
line femme dont Ie frere etait mort. Etant venue se prosterner
devant Jesus elle lui dit : 'Fils'de David, aie pitie de moi'. Les
disciples a rabrouerent. Et Jesus, rrite, s'eloigna avec elle jus-
qu'au jardin ou etait Ie tombeau, et soudain un grand cri se fit
entendre depuis Ie tombeau. Jesuss'approcha et fit fouler la
pierre de cote a la porte du tombeau. Etant aussitot entre la
ou etait Ie jeune homme, il etendit la main et Ie reveilla, en lui
saisissant a main. Le jeune homme Ie regarda, et il se prit a
l'aimer ; il se mit a Ie supplier de rester avec lui. Etant sortis
du tombeau, ils allerentdans la maison du jeune homme. Car
il etait fiche. Six jours apres, Jesus lui donna un ordre et, Ie
soir venu, Ie jeune homme vient aupres de lui, Ie corps vetil
seulement d'un drap de liD. Et il Testaavec lui cette nuit-la.
Car Jesus ui enseignait e mystere du royaume de Dieu. Puis,
au lever, il se dirigea de la vers l'autre cote du Jourdain.»
Apres cela suivent es mots: «et Jacqueset Jean s'approchent
de lui» (Mc 10, 35) et toute la pericope. Mais «nu contre nu»
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LALElTRE SUR L « EV ANGILE SECRET» DE MARC
et le reste,dont tu m as parle dans ta lettre, ne s y trouve pas.
Et apres : «Et il arrive a Jericho» (Mc 10, 46), (l Evangile)
ajoute seulement : «Et il y avait la la sreur du jeune homme
que Jesus aimait, sa mere et Salome, et Jesus ne les accueillit
pas. » Les autres longs developpements que tu as mentionnes
par ecrit paraissentetre et sont des mensonges.
Quant a l explication veridique et conforme a la philo~ophie
veritable:..
Cette lettre n a pas cesse, depuis la publication du livre de
Morton Smith, de susciter de vifs debats chez les exegetes du
NouveauTestament.One fois retombee effervescence rovoquee
par les elucubrations de l inventeur sur Ie «Jesus magicien» qu il
pretendait decouvrir dans ce texte, et par la disparition du manus~
crit, loin des regards des enqueteurs2, a critique cependant s est
peu a peu partagee entre deux tendances l une incline a faire du
« Marc secret» un apocryphe elabore a partir des evangilescano-
Diques,et datant du lIe siecle3; autre integre 1 « evangile secr~t»
a 1histoire redactionnelle des synoptiques et considere que cette
forme longue de Marc est anterieure au Marc canonique4. La
2. Thomas Talley (voir Studia Liturgica 14, 1982,p. 45) a tente en vain
de voir Ie manuscrit en 1980. II apprit seulement que l Archimandrite
Meliton avait fait deplacer Ie texte de Mar Saba a la bibliotheque du
Patriarcat grec de Jerusalem,apres la parution du livre de M. Smith, et
Ie Pere Kallistos lui dit qu ill avait vu et que lesltrois pages de la copie,
retirees de la fin d un exemplaire de l edition de 1646, par Isaac Voss,
des lettres d Ignace d Antioche, ou M. Smith les avait trouvees, etaient
en cours de restauration (d apres Marvin W. MEYER,«The Youth in the
SecretGospel of Mark », Semeia49, 1990,p. 129).
3. Telle est par exemple la conclusion de H. Merkel (qui donne l etat
bibliographique, arrete a l annee 1982, de la controverse autour de la
decouverte de M. Smith) dans son «Appendix» sur 1 «evangile secret»
de Marc (traduction anglaise de la 6eme dition de E. HENNECKEW.
SCHNEEMELCHER,ew TestamentApocrypha I, 1991, p. 106-109). En
recherchant la fonction litteraire du second fragment cite par la lettre,
R. Bauckham arrive au meme resultat : «Salome the Sister of Jesus,
Salome the Disciple of Jesus,and the Secret Gospel of Mark », Novum
Testamentum 3, 1991,p. 245-275 269-275).
4. Ainsi, selon des reconstructions diverses,H. KOESTER, History and
Development of Mark s Gospel (From Mark to Secret Mark and
Canonical Mark) », dans Colloquy on New TestamentStudies: A Time
for Reappraisal and Fresh Approaches, ed. par B. C. Corley, Macon
1983,p. 35-57, eimprime dans H. KOESTER, ospel Traditions in Early
Christian Literature: Collected Essays,Londres -Philadelphie 1992
(etude dont les implications sont developpeespar Ph. SELLEW, ans The
Future of Early Christianity. Essays n Honor of Helmut Koester,ed. par
B. A. Pearson, Minneapolis 1991,p. 242-257); H. M. SCHENKE,The
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32
LE BOULLUEC
seconde endance est en train de devenir communis opinio, affir-
mee par l article de M. W. Meyer dans The Anchor Bible
Dictionary5. Elle est neanmoins vigoureusement combattue, au
profit de la premiere, par des savants comme John P. Meier6 et
Frans Neirynck7.
La plupart des exegetesdu Nouveau Testament qui utilisent Ie
temoignage de la lettre attribuee a Clement pour etudier la
structure de Marc et son histoire redactionnelle considerent au-
thenticite du document comme allant de soi, ou bien estiment
que la valeur des renseignements ainsi transmis n est en rien
diminuee si la lettre n est pas de Clement, etant entendu qu elle
ne peut etre posterieure au IIIe siecle8. i ne serait pourtant pas
Mystery of the Gospel of Mark », The Second Century 4, 1984,p. 65-82 :
Mc canonique pourrait etre tine version, purifiee et abregee en deux
etapes,de Mc utilise par les Carpocratiens (p. 76) ; J. D. CROSSAN,our
others Gospels: Shadowson the Contours of Canon,Minneapolis 1985
Mc canonique resulte d une censure de 1 «evangile secret », contre les
Carpocratiens, qui a disperse des mem,bres des deux recits rapportes
par la lettre en plusieurs endroits de 1 Evangile (Mc 10, 17-22; 14,51-
52; 16, 1-8).
5. Yolo 4, 1992, p. 558sq. M. W. Meyer resume son etude partie dans
Semeia49,1990, p.129-153.
6. A Marginal Jew. Rethinking the Historical Jesus,Yolo : The Roots of
the Problem and the Person (The Anchor Bible Reference Library),
New York -Londres 1992, p. 120-123. Dans tine etude importante,
toute recente, J.-D. Kaestli donne de nouvelles raisons de penser qu on
est en presence d une «amplification du texte canonique >~ J.-D.
KAESlLl, «L Evangile secret de Marc. One version longue de 1 Evangile
de Marc reservee aux chretiens avancesdans 1 Eglise d Alexandrie ? »,
dans Le mystere apocryphe. Introduction a une litterature meconnue,
sous la direction de J.-D. Kaestli et D. Marguerat, Geneve, Labor et
Fides, 1995,p. 85-106 97-100).
7. «La fuite du jeune homme en Mc 14, 51-52 », Ephemerides
Theologicae Lovanienses 55, 1979, p. 43-66 (etude reprise dans F.
NEIRYNCK, vangelica. Collected Essays,Louvain 1982,p. 215-238). F.
Neirynck recuse Ie temoignage de 1 « evangile secret» «<mixture»
d elements empruntes aux evangiles canoniques) en faveur de 1 inter-
pretation symbolique (baptismale et christologique) de Mc 14,51-52 qui
s est developpee depuis les suggestionsde J. Knox en 1951 (p. 51-52 =
223-224),en relation avec Mc 15,46.11 est surprenant qu il defende 1 in-
terpretation traditionnelle en proposant de supprimer E1Tl yul1vou en
Mc 14, 51, pour pouvoir comprendre yul1vQs-en Mc 14, 52 au sens de
«avec sa tunique seulement» (sans son manteau) (p. 63sq.).
8. Le recours a l autorite de Clement pour mettre en circulation un
evangile apocryphe de Marc (ou pour ressusciter un texte ancien)
n est guere vraisemblable a partir du IY. siecle (Ch.-B. Amphoux ne
dit pas ce qui Ie fait dater la lettre du IY. siecle : La Parole qui devint
Evangile, Paris 1993,p. 124). Par ailleurs, meme si l on petit souhaiter
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LA l.ETTRE SUR L'« EV ANGILE SECRET,. DE MARC
33
indifferent de parvenir a une conclusion sure a ce sujet. Si la
paternite clementine etait prouvee, l'antiquite d'un tel temoi-
gnage donnerait de la force a la tradition associantMarc a l'Egli-
se d' Alexandrie, tout en jetant de vives lumieres sur leg christia-
nismes alexandrins avant Clement et a son epoqut -. Les
patrologues dont Morton Smith avait sollicite leg avis etaient
loin d'etre unanimes, et il pouvait resumer ainsi la situati<;>n ix
aDSapres la parution de son ouvrage : «...most scholars would
attribute the letter to Clement, though a substantial minority are
still in doubt »9. Un an plus tard, Eric Osborn, l'un des meilleurs
connaisseursde l'reuvre et de la pensee de Clement, considerait
que la lettre etait une supercherielo. l y relevait notamment des
idees contraires a celles qui guident Clement dans ses critiques
de la gnose heterodoxe.
La critique d'authenticite est rendue difficile par la qualite lit-
teraire de l'ecrit et par sa fonction. Si c'est un pastiche, a reussi-
te est confondante. La fermete de la composition ne peut etre
invoquee contre l'authenticite. Dire et repeter que Clement est
confus et desordonne, c'est ignorer la subtilite de l'ecrivain et de
sesdesseins c'est negliger aussi ous leg exposes,meme dans eg
Stromates,dont l'agencement est impide. Quant a la fonction de
la lettre, elle est d'interdire au destinataire de divulguer l'exis-
tence de 1'« evangile secret». Aussi affaiblit-elle leg arguments
fondes sur leg differences avec leg renseignements fournis
qu'un examen paleographique du manuscrit puisse etre fait un jour, on
ne petit plus imaginer que M. Smith fit ete Ie faussaire, car 1'ecriture a
trop les traits d'une main du XVllle siecle, et la production d'un tel
faux en Orient au XVllle siecle n'est pas non plus plausible, comme 1'a
remarque notre collegue J. Paramelle lors d'un seminaire que nous
avons tenu a 1'EPHE/SR en avril 1991 avecA. van den Hoek et auquel
participaient aussi A. Desreumaux, P. Geoltrain, M. Tardieu (voir
Annuaire de l'EPHE/SR 99, 1990-1991, . 314sq. tine relation humo-
ristique de cette seance,extraite d'une lettre du Pere Paramelle, non
apocryphe, est parvenue usqu'a Julien Green, qui 1'a publiee, avec une
breve introduction peu conforme au sentiment meme du narrateur,
dans L'avenir n'est Ii personne. Journal 1990-1992,Paris 1993,p. 222).
9. « Clement of Alexandria and Secret Mark: The Score at the End of
the First Decade », Harvard Theological Review 75, 1982,p. 449-461.
10. « Clement of Alexandria: A Review of Research, 1958-1982», The
Second Century 3, 1983, p. 219-244(223-225). L'introduction du texte
grec de la lettre dans la deuxieme edition, revue par U. Treu, du tome
IV; 1 de ClemensAlexandrinus dans les GCS, en 1982,a beaucoup fait
pour conferer de l'autorite au document.
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34
A. LE BOULLUEC
ailleurs par Clement sur la redaction de Marc, a Rome exclusi-
vemenpl, ou meme sur Ie fait que les Hypotyposes opposaient a
Marc, comme «evangile spirituel », celui de Jean12.Certes, Ie
faux serment exige de Theodore, a l'appui de toute denegation,
a de quai surprendre; mais l'etonnement doit etre tempere si
l'on accepte de doDDer sa portee maximale a la formule du
Stromate VI (15, 124, 3) : « ls ne sont pas reellement menteurs,
ceux qui font des accommodements pour respecter Ie plan de
salut. » Le plqs troublant est que Clement ail pu prendre Ie
risque de repondre par ecrit aux questions posees par
«Theodore », si eleve que fill Ie degre d'avancement de ce
disciple, et de Ie faire aussi onguement. La lettre dispense un
enseignementdestine plutot a un cercle d'inities. Et meme si elle
etait privee, la personnalite de son auteur devait assurer la
conservation du document, au mains partielle, comme dans Ie
cas des fragments de lettres de Clement presents dans les Sacra
paral/eta, dont M. Smith a su faire habile usage. On vail cepen-
dant que meme ces arguments peuvent etre retournes.
Pour echapper a ce tourniquet, il faudrait trouver dans les
reuvres de Clement des allusions voilees a 1'«evangile secret».
Son art de pratiquer dans sesecrits Ie « cryptage » autoriserait de
telles allusions sansenfreindre la regIe de l'arcane. Le reperage
d'indices favorables reste cependant affecte d'un fort coefficient
d'incertitude, en raison meme de la prudence esoterique. Les
textes transmis sont trap eloignes de la relation vivante entre
maitre et disciples avertis qui devait en orienter la comprehen-
sion a l'origin,e, pour que taus les signes de reconnaissance
soient correctement interpretes. En outre, DOllSgnorons beau-
coup de traditions et d'ecrits que Clement et ses premiers lec-
leurs avaient en memoire, et qui eclaireraient sans doute mieux
que les references encore connues aujourd'hui les singularites de
tel ou tel de ses textes. Le breI parcours propose ici est donc
aleatoire.
lL D'apres des fragments des Hypotyposes et des Adumbrationes. PaulJ.
Achtmeier, d~ns son article sur Marc (The Anchor Bible Dictionary,
vol. 4, p. 543), signale Ie temoignage de Clement sur la redaction de
1'«evangile secret» a Alexandrie, sans preciser que la seule source est
la fameuse ettre.
12. Extrait du livre VI, cite par Eusebe, Histoire ecclesiastique I 14, 7,
fait deja souligne par E. Osborn, art. cit., p. 224. Notons que ce passage
est omis par M. Smith dans son tableau de la p. 21.
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35A'LETfRE SUR L' « BY ANGILE SECRET» DE MARC
L'ouvrage de Clement qui se prete Ie moins mal au test envi-
sage est en l'occurrence l'ecrit intitule Quel riche sera sauve ?13.
C'est en effet, comme on sait, un commentaire de la pericope
Mc 10, 17-31, de la plus longue citation neotestamentaire pre-
sente dans les reuvres de Clement, faite selon un texte de 'evan-
gile qui differe en de nombreux points du texte courant14.
L'interpretation pretend indiquer, au dela de la lettre, Ie messa-
ge spirituel, Ie «sens cache », «Ie secret de l'intention du
Sauveur»15.Le contenu du messagecorrespond a certains des
themes les plus importants de la «gnose» selon Clement, «l'im-
mortalite veritable », «l'incorruptibilite », l'evangile comme
« don de la vie eternelle »16. a connaissancedu « Dieu unique et
bon » est identifiee a la «vie »17.«Voici, ecrit Clement, Ie princi-
pe et Ie fondement immuables et inebranlables de la vie, la
science de Dieu qui est reellement et qui fait don des realites,
c'est-a-dire des choses eternelles »18. L'epithete aauAEuToS-,
«inebranlable », exprime une qualite inalienable du vrai gnos-
tique19. En outre Ie Quis dives salvetur ? est posterieur aUK
Stromates.Clement renvoie en effet, en QDS 26,8, a un expose
13. Le titre, absent du manuscrit principal, est transmis par Eusebe (HE
11123,5; VI 13,3; ct. Jerome, De vir. ill. 38; Photius, Cod. 111).
14. Voir M. MEES,Die Zitate aus dem Neuen Testament ei Clemensvon
Alexandrien, Bari 1970, , p. 59-62 II, p. 62-64. f"
15. QDS 5, 2. 4 (p. 163,18-19.31Stahlin). Tout Ie developpement 5,1-4
est une reflexion sur la profondeur spirituelle des paroles du Seigneur,
meme de relies qui sont tres simples en apparence, et sur Ie devoir d'al-
ler au dela du sens superficiel (cf. 12, 1). Sur Ie propos de Clement, voir
E. DAL COVOLO, «L'episodio del giovane ricco in Clemente e
Origene », dans Per foramen acus. Il cristianesimo antico di fronte alIa
pericope evangelicadel «giovane ricco », ed. par L. F. Pizzolato, Milan
1986,p. 88-94.
16. QDS 6, 1. 2 (p. 164,4.6). Le terme meme de yvwcrlS' st introduit en
QDS 7, 1.
17. QDS7, 1. 3 (p.l64, 17.21-23).
18. QDS7, 2.
19. C'est meme une auto-designation des gnostiques,comme l'a montre
M. A. WILLIAMS,The Immovable Race. A Gnostic Designation and the
Theme of Stability in Late Antiquity (Nag Hammadi Studies 29), Leyde
1985. Clement revendique aussi cette qualite pour son gnostique : voir
Strom. 1111,51,5-52,4. Passant«de la foi a la foi» (cf. Rm 1, 17), c'est-
a-dire, ici, du respect des commandements a l'evangile (cf. Strom. II 6,
29, 3), «alors qu'il est secoue (craAEuwv) erilleusement au mouillage
peu sur de la Loi, il gagne e havre du Sauveur» (QDS 8, 5). Le riche de
Mc 10, 17-20 est ainsi sur la voie de la connaissance.Mais il est encore
imparfait (QDS 9,1).
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36
LE BOULLUEC
« sur leg principes et sur la theologie » dont la redaction est seu-
lement annoncee au debut du Stromate VZo.L ouvrage est donc
compose a une epoque 011 e grand projet litteraire, devant cul-
miner avec « a physique reellement gnostique »21, st accompli.
Les lecteurs soul meme invites a se reporter, au besoin, aux
livres correspondants. Et Ie traite «sur Ie salut du fiche »,
comme nous Ie verrons, aborde des sujets relevant de l enseigne-
ment Ie plus profund. S il existe quelque part, dans leg reuvres
conservees de Clement, des traces d une interpretation de
1 «evangile secret », c est bien dans ce texte qu on a des chances
de leg retrouver. Les remarques qui suivent la citation de Mc 10,
17-31, sur Ie devoir de porter une attention plus grande encore
aux paroles de Jesus adresseessimplement, en apparence, aux
disciples, qu a celles dont l expression est enigmatique (QDS 5,
3-4), encouragent une telle recherche. On se met a penser que
«l explication veridique et confurme a la philosophie veritable»
promise par la lettre (mais derobee par la hate du copiste) doit
etre en harmonie, si Clement en est l auteur, avec son exegese
de Mc 10, 17-31. On est d autant plus enclin a Ie croire que leg
episodes nseres d apres la lettre par 1 «evangile secret» dans la
trame de Marc composent une sorte d « intrjgue secondaire », a
l interieur de l Evangile, avec l echec du fiche et avec d autres
figures de Marc. Cette notion d « intrigue secondaire» est ntro-
duite par Marvin W. Meyer22,pour completer un motif propose
par H. M. Schenke, qui voit dans Ie «jeune homme» une sorte
de symbole, ou un paradigme du disciple23. 11 suffit ici, sans
reprendre l interpretation de Meyer, d indiquer leg passagesmis
ainsi en relation avec Ie premier fragment de l <~ vangile
secret»: Mc 10, 17-22; Mc 9, 2; Mc 14, 51-52; Mc 15, 46; Mc
16, 1-8. Les apparitions successivesdu VEUVlUKOSuraient pour
function de mettre en demeure de choisir la vie difficile du dis-
ciple. L « intrigue secondaire» trace un itineraire spirituel, qui
passe par une initiation, et qui implique Ie port d un habit rituel,
On doit admettre, avec P. NAUTIN, «La fin des Stromates et leg
Hypotyposes de Clement d Alexandrie », Vigiliae Christianae 30, 1976,
p. 292-293),a la suite de Th. Zahn, que ce passage envoie a des pages
deja ecrites : «Le chameau , qui passeavant Ie riche par la voie etroi-
te et malaisee (cf. Mt 19, 24; 7, 4), peut avoir une signification plus
haute. C est un symbole mysterieux du Sauveur,comme on peut l ap-
prendre dans l exegese sur leg principes et sur la theologie» (QDS 26,
8).
21. Voir Strom. IV 1, 3,1, et P. NAUTIN,art. cit., p. 287-289et 298.22.11
parle de «subplot », art. cit. (voir ci-dessus, otes 2 et 5), p. 78.23.
Art. cit. (voir ci-dessusn. 4), p. 77-79.
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LA LETTRE SUR L'« BVANGILE SECRET DE MARC
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linceul et vetement baptismal «<evangile secret» et Mc 14, 51),
remplace par la «robe blanche» de l'elu (Mc 16, 5). II n'est pas
necessaire d'accepter les conclusions de Schenke et de ses
emules sur les rapports entre Marc et 1'«evangile secret », ni la
legitimite de l'interpretation symbolique appliquee a Marc, pour
admettre que Clement ait pu, s'il a connu les textes cites par la
lettre, mettre en relation Mc 10, 17-31 et Ie fecit de la res:urrec-
tion du jeune homme fiche et de l'enseignement re~u de Jesus.
Certes, Clement ayant choisi de commenter Ie texte de Marc,
il ne designe pas comme un «jeune homme» celui qui vient
interroger Jesus sur Ie moyen de «recevoir la vie eternelle en
partage» (Mc 10, 17). Seul Matthieu (19, 20.22) Ie qualifie de
vEuviaKoS'. ais lorsque Clement explique les mots EK VE6TT]TOS'
(Mc 17,20), il caracterise manifestement son personnagecomme
un jeune homme (QDS 8, 3-5). Notons aussi que l'ouvrage
s'acheve sur l'histoire du «jeune homme» confie par l'apotre
Jean a 1'« episcope» d'une ville voisine d'Ephese, baptise, puis
devenu brigand, pour recevoir enfin, grace a la vigilance de
l'apotre, un secondbapteme, celui des armes de la repentance24.
Ajoutons que l'apotre Jean, Ie «disciple que Jesus aimait» (In
13,23; cf. 19, 26 ; 20, 2 ; 21, 7.20), comme Ie «jeune homme» de
1'« evangile secret» selon 1'« ntrigue secondaire », fait figure, a
la fin du traite, de double de Jesus, en portant a son comble, et
au successalutaire, la sollicitude de l'amour. L'aventure du jeune
homme, telle qu'elle se dessine selon la visee symbolique de
1'«evangile secret» et de Marc, epouse cell¥e Jesus25.
II ne s'agit la que de traits exterieurs26.Si l'on veut progresser,
il faut entrer dans 'exegesespirituelle de Clement. L'explication
de Mc 10, 17-31 se deploie comme tine reflexion sur Ie repentir,
la conversion, la purification. La parole «Vends ce que tu pos-
sedes» (Mc 10, 21) ordonne de quitter les desirs qui s'attachent
aux richesses,«les epines de l'existence qui etouffent la semence
24. QDS 42,14-15. Voir sur cette histoire, recopiee par Eusebe comme
«tres necessairea ceux qui aiment entendre des chosesbelles et profi-
tables» (HE 11123,5-19), 'etude de E. JUNOD,« a virginite de l'apotre
Jean: recherche sur les origines scripturaires et patristiques de cette
tradition », dans Lectures anciennes de la Bible (Cahiers de Biblia
patristica 1), Strasbourg 1987,p.113-135.25.
Voir H. M. SCHENKE,rt. cit., p. 78.
26. Serait-il trop force de rapprocher l'entretien nocturne rapporte par
1'«evangile secret » et, au niveau plus elementaire qui est celui de l'en-
seignement obvie du QDS, ces propos sur «l'homme de Dieu» qu'il
faut choisir comme entraineur et comme guide: «Qu'il passe a veiller
de nombreuses nuits, comme ton ambassadeuraupres de Dieu, pour
emouvoir Ie PeTepar la magie de sessupplications constantes» (41, 5) ?
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A. LE BOULLUEC
de la vie» (Qf)S 11, 1-2), et, plus generalement, es «passions»
de l ame (QDS 12, 1 ; 15, 1 ; 16,2; 25, 3-6) ; «Ie saint appartient
aux ames mpassibles et pures» (QDS 20, 6) ; Ie commerce mer-
veilleux du vrai disciple est d acheter l incorruptibilite avec ses
richesses, par ses dons genereux, et de recevoir une demeure
eternelle dans les cieux (QDS 32, 1) ; Ie pecheur qui se repent
pent esperer de Dieu la remission de ses autes (QDS 38, 4-40,
6) ; en ramenant au saint le brigand, l apotre Jean donne «un
grand exemple de penitence veritable, un grand signe de renais-
sance, un trophee de resurrection visible » (QDS 42, 15) ; «celui
qui ici-bas accueille l ange de la penitence» est conduit par Ie
Sauveur lui-meme «vers Ie sein du Pere, vers la vie eternelle,
vers Ie royaume des cieux » (QDS 42, 18.16).
Ainsi Ie commentaire de Mc 10, 17-31 est-il organise principa-
lement par Ie mouvement de conversion qui passepar l abandon
des passions ou par Ie repentir des fautes. Un tel enseignement
n a rien de secret. 11peut etre dispense en public. Meme a ce
niveau elementaire cependant, on pent reperer des images,
absentesde Mc 10, 17-31, qui ne sont pas sans rapport avec un
detail important de l episode nocturne de 1 « evangile secret» :
« Le soir venn, Ie jeune homme vient aupres de lui, Ie corps vetu
seulement d un drap de lin » ; ou plus litteralement : «enveloppe
d un drap de lin sur (son corps) nu (ETTlYlJI-1VOU). Or la meta-
phore de la nudite sert dans Ie commentaire a suggerer e sens
de l enseignement nouveau du Sauveur, qui «ne recommande
pas la chose visible, que d autres ont taite, mais une autre plus
grande, plus divine et plus parfaite, c est-a-dire de denuder
(YlJI-1VWcrQl)ame elle-meme et son intention des passionssour-
noises...» (QDS 12, 1). Et plus loin: de celie richesse en pas-
sions, «il taut presenter son ame purifiee, c est-a-dire indigente
et nue (YlJl-1v1 ]v),our ecouter alors seulement e Sauveur dire:
Viens, suis-moi (Mc 10,21»> (QDS 16, 1). L ame ainsi «denu-
dee» est ame gnostique, d apres Strom. VII, 67,427.Quant au
motif du vetement, il est present aussi, mais dans un registre
oppose a la valeur symbolique de la ulv8wv portee par Ie «jeune
homme» de 1 « evangile secret» : il est assimile soit a «l enve-
loppe terrestre» que constituent les richesses,et qui n exclut ni
du combat ascetique (QDS 3, 5), ni du saint (QDS 26, 2), soit a
l apparence exterieure charnelle : «C est une forme jetee sur
nons de l exterieur comme vetement, a cause de notre entree
dans Ie monde, pour que nons soyons capablesde prendre place
27. Ct. Strom. IV 25,160,1-2 (exemple de Job); Strom. Villi, 61, 2
(exemple de Joseph).
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LA LETfRE SUR L « EV ANGILE SECRET» DE MARC
39
dans cette ecole universelle; mais cache a l interieur habite Ie
Pere, ainsi que son Fils (cf. In 14,23) qui est mort avec nous et
qui est ressusciteavec nous. Celie forme visible trompe la mort
et Ie diable ; car la richesse et la beaute interieures echappent a
leurs regards; ils font rage autour de ce morceau de chaIr, dont
ils meprisent la faiblesse, et restent aveugles aux possessions
interieures, sans savoir que Ie est la grandeur du tresQr que
nous portons dans un vase d argile (cf. 2 Co 4, 7), entoure
comme d un rempart par la puissance de Dieu Ie Pere, par Ie
sangde Dieu Ie Fils, et par la rosee de l Esprit Saint » (QDS 33,
6 -34, 1). Expose dense et elliptique, de contenu gnostique assu-
rement, mais etranger au sens du vetement rituel. Cette orienta-
tion du theme n est pas cependant incompatible avec une
connaissancede 1 « evangile secret». Rien dans Ie contexte du
traite n appelle Ie motif du vetement, mais l enseignement sur la
purification aurait pu inspirer ces reflexions sur la forme vile,
d argile charnelle, par contraste avec Ie «drap de lin» de l initia-
tion, qui evoquerait plutot la «tunique d incorruptibilite» dont
parle Ie Pedagogue I 9, 84, 3), celIe qui equivaut a la protection
«entourant comme d un rempart» Ie «tresor» interieur men-
tionne ici28.
Le discours sur l affranchissement des passions, puis sur Ie
repentir, est accompagne d un enseignement plus profond, qui
vise la situation des parfaits, et qui serait accorde au message
de 1 « evangile secret ». Comment ant la question inquiete des
disciples: «Mais qui peut etre sauve?» (,Mc 10, 26), Clement
explique qu ils etaient conscients de n avoir pas encore aban-
donne completement les passions -« car ils etaient depuis peu
des disciples et des hommes enroles ( ;V8pOAOYTjfJ.EVOl)out
recemment par Ie Sauveur» (QDS 20, 4-5). Ils doivent donc
etre conduits jusqu a l impassibilite et la stabilite de l homme
adulte, selon Ie sens donne par Clement a la formule de Eph 4,
1329.La metaphore militaire de l enrolement prend une autre
valeur quand elle est referee a la croissance spirituelle. Dans ce
contexte, Ie second fragment de 1 « evangile secret» aurait saplace:
Ie refus de Jesus d « accueillir» les femmes pourrait
alors signifier Ie rejet definitif des passions. Si Clement, en
28. C est Ie verbe TrEpl ElXlCElV ui est employe en QDS 34, 1 (p. 182,
22). La mention de «la rosee de l Esprit Saint» correspond it celIe de
l onction en Ped. I 9, 84, 3, avant a reflexion sur a mort du bon Pasteur
(85, 1-2).
29. Voir Ped. I 5, 18, 4; Strom. V 8, 48, 9; VI 12, 97, 1; 14, 107,3; 15,
114,4;VII2, 10,1 ;3, 18,2;7,46,7; 11,67,2-3. 8;68, 1; 14,84,2.
30. Ped. 14; ct. Strom. IV 8, 59. 1 : 60. 1 : 62. 4.
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A.LEBOULLUEC
effet, considere que « e Logos est egalement Ie pedagogue des
hommes et des femmes »3°, l fait du feminin Ie symbole du
desir31 et se risque it representer la perfection pour la femme
comme Ie fait de devenir male32.Les «hommes enroles », s ils
suivent Ie Sauveur en rejetant «les maladies de l ame », sont
appeles it «etre inscrits dans les cieux »33. attitude de Jesus t
l egard des femmes dans 1 « evangile secret» pourrait figurer Ie
choix definitif du disciple, qui se rend semblable it lui34. Ces
femmes representent aussi les proches, qui risquent de faire
obstacle au progres spirituel veTS«la vie d en-haut »35.
Le symbolisme du feminin est cependant oin d etre univoque
pour Clement. II s eleve jusqu it la representation de la divinite,
grace it la fecondite de l amour : «Considere les mysteres de
l amour, et alors tu contempleras Ie sein du PeTe,que seulle Fils
unique a fait connaitre (cf. In 1, 18). Dieu en lui-meme est
amour, et il s est rendu visible pour nous par amour. Si ce qui de
lui est ndicible est PeTe,ce qui a de la sympathie pour nous s est
fait Mere. En aimant, Ie PeTeest devenu feminin, et une grande
preuve en est celui qu il a engendre, ui, de lui-meme ; et Ie fruit
qui a ete enfante de l amour est amour36.» Cet enseignement,
qui introduit une meditation sur l Incarnation, est de niveau
gnostique. II penetre beaucoup plus avant dans les «mysteres»
que l explication prudente de l epithete orphique ~llTpO1TaTwp
donnee en Strom. V 14, 126,237. I intervient veTSa fin de la par-
tie du traite qui assimile amour et perfection, et qui serait bien
accordee it la situation mise en scene par 1 « evangile secret».
Cette partie commence avec Ie discours prete par Clement au
Sauveur, qui rappelle Ie don de la resurrection, du pain et du
breuvage d immortalite (QDS 23, 2-4) ; elle continue par l ex-
31. Strom. 11113,93, 1. 3.
32. Strom. VI 12, 100, 3 ; cf. 13, 93, 2-3. Clement semble hesiter, dans
son interpretation allegorique de Gal 3, 28, entre la suppressionde la
distinction sexuelle et la metamorphose de la femme en homme (a la
maniere des gnostiques : voir Extraits de Theodote 21, 3). Voir Kari
VOGT,« Devenir male ; aspectd une anthropologie chretienne primiti-
ve », Concilium 202, 1985, p. 94-107; P. BROWN,Le renoncementa la
chair (traduit par P.-E. Dauzat et Ch. Jacob), Paris 1995, p. 150-154
(selon es Valentiniens).
33. QDS 21,6, a propos de Mc 10,28.
34. Voir QDS 21,7.
35. Voir l explication de Mc 10,29 en QDS 22 (surtout 22, 7).
36. QDS 37,1-2.
37. Voir SC n° 278, p. 350sq. La reflexion sur la feminite de Dieu est
cependant plus simple que dans es Odes de Salomon (voir surtout Ode
19, et Ie commentaire de M.-J. Pierre, Turnhout 1994,ad loc.).
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A LETTRE SUR L « BY ANGILE SECRET» DE MARC
hortation a choisir Ie Sauveur, «Ie maitre de la vie infinie» (25,
7), a respecter Ie commandement supreme de l amou~, de Dieu
(27, 3-5) et du prochain (28) ; or Ie prochain par excellence est Ie
Sauveur, qui soigne et guerit ceux qui etaient SOliSempire de la
mort; il taut l aimer aut ant que Dieu (29, 5) ; aimer aussi es
freres du Christ (30-35). Mais « l en est qui sont plus elus que les
elus» (36, 1) ; ils sont «la semence», et ont re~u du PeTe, omme
Ie Fils, line mission dans Ie monde (36, 2). C est ici que Clement
invite son lecteur a considerer «les mysteres de l amour» (37),
avant de Ie guider sur la voie sans egale du salut, indiquee par
Paul en 1 Co 13 (QDS 38). II faudrait suivre de pres l enchaine-
ment des formules composant e messageprofond d un discours
qui persiste en meme temps a developper, a l intention des sim-
ples croyants, Ie sens de la pericope Mc 10, 17-3138. e sont les
propos sur l amour et sur les liens entre les disciples de choix et
Ie Christ, propos inseres dans Ie commentaire de la pericope et
orientes au dela d elle, qui seraient en harmonie avec« l explica-
tion veridique et conforme a la philosophie veritable» de
1 « evangile secret».
Les rapprochements presentes ci ne sont pas des preuves. is
sont incapables de garantir l authenticite de la lettre. lis preten-
dent indiquer seulement que Ie discours « sur Ie salut du fiche »,
loin de s opposer a cette authenticite, comporte line thematique
compatible avec line interpretation symbolique de 1 « evangile
secret» (et de Marc). Une objection forte viendrait cependant
de la nature meme de la question posee en Mc 10, 17 : que faire
«pour recevoir la vie eternelle en partage ? ». On pourrait dire
que la recherche d une reponse devait entrainer Clement a asso-
cier a line explication simple de la pericope un enseignement
mystique. Le mouvement du tourniquet, assurement, n est pas
encore arrete.
38. Voir en particulierQDS26,1-2 27, 1; 31,6;33, 1.
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Annewies VAN DEN HOEK
Harvard University
DIVERGENT GOSPEL TRADITIONS IN
CLEMENT OF ALEXANDRIA AND OTHER
AUTHORlSOFTHESECONDCENTURY
Les lEuvres de Clement contiennent plusieurs logia et d autres mate-
riaux evangeliques harmonises qui ant lite qualifies comme traditions
«extra-canoniques ». Ces textes se rapprochent d autres qu on trouve
chez Justin Martyr. Cettecontribution examine taus les textesdisponibles
et essaiede redefinir les ressemblances t les differences.Les procedesde
transformation reperespeuvent s expliquerpar une longue pratique d en-
seignement catechetiqueet / ou par des traditions homiletiques et litur-
giques.
Clements works contain a varietyof Gospel sayings,often in harmo-
nized form, and other Gospel harmonies that have been identified by
others as «extracanonical» traditions. These exts show similarities with
variant materials in the work of Justin Martyr. The presentpaper ana-
lyzes all available material and attempts to redefine the similarities and
differences. Thesepatterns could be explained in various ways, but it is
most likely that theywere basedon long time catechetical choolpractises
and / or connected 0 homiletical and liturgical traditions.
Introduction.
The surviving works of the Greek author Titus Flavius
Clemens, who spent he later part of the second century and the
early years of the third in Alexandria, encompass, as is well
known, a vast range of borrowings from earlier writers. Some of
his material from Christian sources are decidedly odd or puz-
zling from the point of view of the developing criteria of the
church in later times. In this article the focus will be on bits and
scraps of variant gospel traditions. There have already been
Apocrypha 7, 1996,p. 43-62
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A. V AN DEN HOEK
impressive works of compilation in this area, but relatively little
has been done to assesshe material, particularly in the light of
research n allied fields.
Clement's biblical quotations have been assembledand com-
mented on by various scholars over the past century. In 1899,
Percy Mordaunt Barnard published The Biblical Textof Clement
of Alexandria, a work that lists quotations in Clement from the
four gospels and the book of Acts and that is still a very useful
reference work? In the seventies Michael Mees brought out a
study on the same subject with the title Die Zitate aus dem
Neuen Testamentbei Clemens von Alexandrien.3 Compared to
the booklet of Barnard, he adds more materials including a criti-
cal apparatus to every NT text Clement uses with parallels to
manuscript traditions whether greek, latin, coptic, ethiopian,
arabic, syriac, armenian, and to other patristic evidence. He also
tries to give an assessmentof Clement's biblical text in the
broader context of the manuscript traditions.
Various gospel traditions in early Christian authors, and thus
those of Clement can, of course, be found in the small print of
the critical editions of the New Testament and are usually re-
1. We are greatly indebted to a number of studies: Helmut KOSTER,
Synoptische Oberlieferung bei den Apostolischen Viitern, Berlin, 1957;
IDEM, Septuaginta und Synoptischer Erziihlungsstoff im Schriftbeweis
Justins des Miirtyrers (Habilitationsschrift Theologische Fakultat
Heidelberg), 1956; Helmut KOESTER, The Text of the Synoptic
Gospels in the Second Century", in Gospel Traditions in the Second
Century, William L. PETERSONed.), Notre Dame, 1989; IDEM,Ancient
Christian Gospels,London -Philadelphia, 1990 [=KOESTER,Gospels]
Arthur J. BELLINZONI,The Sayings of Jesus n the Writings of Justin
Martyr, Leiden, 1967 [=BELLINZONI,Sayings] IDEM, The Gospel of
Matthew in the Second Century", The Second Century9 (1992),p. 197-
258. From a different perspective he Belgian scholarEdouard Massaux
published in 1950 a massive study dealing with the influence of the
Gospel of Matthew on writings in the time before Irenaeus. Massaux
almost indiscriminately favors the literary dependence of the individual
authors on the Gospel of Matthew; cf. Edouard MASSAUX,nfluence de
l' Evangile de saint Matthieu sur la litterature chretienne avant saint
Irenee, Louvain, 1950 [=MASSAUX,nfluence]. A similar viewpoint, but
including Jewish-Christian, gnostic and apocryphal sources,appears in
Wolf-Dietrich KOHLER,Die Rezeption des Matthiiusevangeliums n der
Zeit vor Ireniius, Tiibingen, 1987 =KOHLER,Rezeption].
2. P. Mordaunt BARNARD,The Biblical Text of Clement of Alexandria
(Texts and Studies V 5), Cambridge, 1899.
3. Michael MEES,Die Zitate aus dem Neuen Testament ei Clemensvon
Alexandrien, Rom, 1970 [=MEES, Zitate] ; IDEM, AuJ3erkanonische
Parallelstellen zu den Herrenworten und ihre Bedeutung, Bari, 1975
[=MEES,Parallelstellen].
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IVERIPENT GOSPEL TRADIll0NS IN CLEMENT
ferred to as vari~nt readings if they are mentioned at all. Since
some variants never made it to our Nestle-Aland edition, how-
ever, studies like those of Barnard and Mees are necessaryand
complementary tools. Equally important for finding variants are
the various volumes of Biblia Patristica.4
Although a latecomer n the history of the usageof the gospels,
Clement s still a great esource or traditions that were current in
the earlier days of the secondcentury.5His appreciation of these
traditions was not -in contrast o Irenaeus narrowed down to the
four gospelsas a matter of principle, for which a theological ratio-
nale was provided. Clement acknowledges he special position of
the four6, but he makes ample use of other gospels,sayings,and
whatever material he can find to illuminate his quest for the truth.
If this search equired that a gospel ext had to be combined with a
phrase of Plato, then those were the tools to use. If his opponents
referred to a source such as the Gospel of the Egyptians to
reinforce their positions, Clement would not question the logia
they quoted, but only their interpretation; he thought them
guilty of misuse of valid material rather than tainted by contact
with dubious exts
It is informative to see how not only Clement but also Origen
and other authors far into the fourth or fifth centuries preserve
readings that are reminiscent of but not quite identical with the
more establishedgospel edactions, all the more so since many of
their readingsare absent rom the major biblical manuscriptsof the
fourth and fifth centuries. Of course, he main difference between
Oement and someone ike Justin, or earlier authors of the second
century is that Oement clearly knew and used Gospels, whether
synoptic, Johanine or otherwise, as well as the letters of Paul.
Nevertheless, he text of his borrowings show interestingvariants,
which may be employed consistently throughout his works; at
other times two, three or more versionsof one text appearside by
side with no apparentpreferencesshownby the author.
4. Biblia Patristica, Index des citations et allusions bibliques dans la lit-
terature patristique (Centre d'analyse et de documentation patristiques,
CNRS), Paris, 1975ss.
5. See Annewies VAN DEN HOEK, «Clement and Origen as Sources on
'Noncanonical' Scriptural Traditions During the Late Second and Early
Third Centuries »,in Origeniana Sexta. Origene et la Bible -Origen and
the Bible. Actes d~ Colloquium Origenianum Sextum, Chantilly, 30 aout
-3 septembre 1993, Gilles DORIVAL and Alain LE BOULLUEC (eds.)
(Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium 118),
Leuven, 1995, p. 93-113.
6. Str. III 93, 1.
7. See VAN DEN H~EK. art. cit.. 0.104.
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VAN DEN HOEK
One of the problems with such multiple readings within one
author is that in the course of time during the processof copying
changes could have been made. Industrious, clever or not so
clever Byzantine scribes could have corrected familiar biblical
phrases, revising them to their standard version. It is all the
more precious and remarkable to see that somehow hese vari-
ants did survive. If Clement were the only author in whom such
variants survived, it would be very hard to determine what their
significance was. In fact, in the material under investigation,
there are caseswhere Clement seems o be unique, and it thus
becomes difficult to define whether these variants represent ust
Clement himself or traditions shared by others.8
When Clement is not the sole producer of such variants, that
is, when others have similar formulations, we are on more solid
ground and can start speculating about the existenceof common
traditions. It could, of course, still be a coincidence when two
authors have the identical or very similar variations on a biblical
text. The more witnesses here are, however, the less likely it is
that the convergence came about by accident. Michael Mees9
8. Examples of unique variants are:
Mt. 11, 18-19ILk. 7,33-35. «The Son of man came eating and drink-
ing »Clement, Paed. 1132,4; Str. III 52, 4. In St7: II 52, 4 an interest-
ing variant occurs; instead of the Son of man who is perceived as «a
friend of tax collectors and sinners », Clement renders: «the son of
man »... «a friend of tax collectors and a sinner ». This variation is not
found elsewhere. Cf. MEES, Zitate, I, p. 195 ; II, p. 29.
Mt. 7,71 Lk. 9, 11. A widely spread wisdom-saying or sentence of paren-
esis : «ask and it will be given »(not in Justin, but in various gnostic
sources, Irenaeus, and Tertullian). Clement, Str. VI 78, 1 ; 101, 4; VII
73,1; [Paed. 191,3; III 40, 2; Str. 151,4; 11116, 2; III 57,5; IV 5, 3; V
11,1; 16, 6; VIII 1,2]. It is quoted a dozen times completely or partial-
ly by Clement. Three of the quotations show the variant: alT1]aal Kat
TTOlTJaalEVVOTJ81lTl at {jaw (Str. VI 78, 1 ; 101, 4 ; VII 73, 1 reversed
order). Possible influence of In. 14, 13 ? No other parallels for this
reading are known. Cf. Alfred RESCH, Agrapha, auf3ercanonische
Schriftfragmente (TV 30, 3-4), Leipzig 1906, p. 303, logion 14; Jean
RuWET, «Les 'Agrapha' dans les reuvres de Clement d'Alexandrie»,
Biblica 30 (1949), p. 133-160, p. 139; MEES, Zitate, I, p. 195, II, p. 18-19.
Mt. 8, 221 Lk. 9, 60. A saying about the dead burying the dead that Mt.
and Lk. present in different forms. Str. III 25, 3 ; [Paed. III 81, 1 ; St7: IV
155, 5 ; QD 23, 2]. One of the four occurrences in Clement mentions
Philip as the person spoken to. It is clear that Clement follows the order
of Mt. , but neither Mt. nor any other text mentions Philip in this con-
text. In Mt. 8, 21, however, one of the disciples is cited as a speaker.
Could Philip be Clement's interpretation of this? MEES, Zitate, I, p. 195
(extracanonical source), II, p. 22.
9. MEES, Zitate, I, p. 188-203.
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IVE~GENT GOSPEL TRADffiONS IN CLEMENT
assembled over thirty occurrences of variant gospel texts in
Clement that he listed under the heading «AuBerkanonische
Zitate ». This title is not too fortunate, since words like «extra-
canonical» or «apocryphal» reflect a later historical perspec-
tive. They are essentially anachronistic and therefore unhelpful
in dealing with the problems at hand: namely, the variegated
and often confusing text traditions of the first and second cen-
turies. Our attention will not be on all the passages hat Mees
selected, an impli>ssibleask in this time frame, but on those pas-
sages hat show ~ relationship with traditions in Rome a genera-
tion before Clement, as reflected in the writings of Justin
Martyr.
Discussion f the material.
1. Mt. 5, 16. A saying, «Let your light shine so before men, that
they may see your good works... », found only in Matthew. Justin,
Apol. I 16,2. Clement, Str. III 36, 4; IV 171, 2-3; [Exc. 3, 1 *; 41,
3*]. Origen, IoCom. II 1, 5 ; Mart. 18. Tertullian, Cult. II 13,1 ; Idol.
15, 1. Epistula Titi PL Suppl. II 1532, De Bruyne). Eusebius,
PsCom. XXVIII PG 23, 253).
All witnesses have the saying in a compressed form: «Let your
good works shine before men).» In Justin the context involves
humility and being free from anger. Clement and Tertullian offer
the most aphoristic versions. In Clement the saying is ascribed to
the Lord only in Exc. 3,1*; 41, 3* does Clement render the full
text of Mt., but those are the words of Theodotus). The context of
Str. III 36,.4 offers more sayings from the Sermon on the Mount and
a saying on pederasty; the following passage has O. T. precepts.
Since a wide variety of authors have the compressed rendering of
the saying, an inqependent tradition, presumably based on the text
of Mt. can be inferred.
See BELLINZONI,Sayings,p. 94; MEEs, Zitate, I, p. 190; II, p. 6/7 ;
MAssAux, Influence, p. 482-484 ; KOHLER, Rezeption, p. 180-181
his suggestion that Justin is the author of this tradition is unten-
able ).
2. Mt. 5,28. A saying on lust, «whoever ooks at a woman ustful-
ly... », found only in Matthew Mt. 5, 27-28). Justin, Apol. I 15, 1.
Clement,Paed.11133,2; Sir. 1161,3; III 8, 4; 94,3 ; IV 114,2; VII
82,3; [passim].Qrigen,Princ. 1111,6; Cels.11144; oCom. XX 23
EzCat. PC 13,7,85).Cyril of Jerusalem,Catech.XIII 5. Apostolic
Constitutions 1. For a full listing, see MEES,Parallelstellen, . 97-
109).
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A. VAN DEN HOEK
Justin, who starts his section on chastity with this saying, uses the
compound instead of the simple verb [3AElTElVnd inserts a condi-
tional clause: ()so iv Ejl[3>-E /JI:1ersus lTaS- () [3AElTWVn Mt. (see for
the former also: syr. cur, sin, Diat., e/ a, ne, pers., Ps-Clementine
Recognitiones, lat., Origen partim). The cases have been revised;
accusative (YVValKU)changes to dative (YVVULKl) because of the
compound; traces of this also turn up in Clement, Origen, and
Cyril, but Clement and Origen have both versions) and accusative
(UUTllv) s replaced by genitive (uuTfjs-) (the latter may represent
better Greek; again both versions appear in Origen). Origen's
changes are quite comparable to Justin's, but some of them also
appear in Clement. They are versions of the Matthean saying, with
alterations and, at times, improvements of the Greek. Clement
abbreviates severely, almost aphoristically, and treats it as Scripture
(not as a saying of the Lord), connecting it with voluntary and invol-
untary acts; in Str. III 8, 4, he gives it as an example of the Gospel in
connection with the Law (the link with Exodus exists already in Mt.
itself). There is no reason to believe that Clement, Origen, or the
others used Justin. Therefore, these variations reflect an indepen-
dent tradition closely linked to Mt.
See BELLINZONI,Sayings, p. 57ft; MEES, Zitate, II, p. 8/9 (but in
St : IV 114, 2, () [3AEljJUS-s the text of L, () Ejl[3>-EljJUS-s a conjecture
of Sylburg ); MEES, Parallelstellen, p. 97-109; KOESTER,Gospels,
p. 362 (catechetical collection derived from Mt.).
3. Mt. 5, 29-30/Mt. 18, 8-9/ Mk. 9, 43-48. A saying about the
offending eye: «if your right eye gives you offence...» Justin,Apol.
I 15,2. Clement,Paed. II 70,1 ; QD 24, 2 ; in Ps-CaesariusPG 38,
1168,21-24).Theodoret, HistEccl. II 31,12-13.Cf. GTh. 22, I 2, 37,
31-35.
For the context in Justin, seeprevious entry. Justin offers a har-
monizationof the texts of Matthew and Mark. Clement,who identi-
fies the words as a saying,uses t in the context of restraint from
desire. He harmonizes n a way that is similar but not identical to
Justin. QD showsa sequentialcitation from and commentaryon the
Gospelof Mark (Mk. 10,17-31,beginning n QD 4 and continuing
through QD 26). Throughout hese passages, lementaddsharmo-
nizations of Mt. and Lk. from the Sermon on the Mount and
Sermonon the Plain (QD 17-19;22; 24; 26; 33; 36).
See MASSAux, nfluence,p. 467-468; BELLINZONI,ayings, . 87-
88; 96-97 Justin or his sourceharmonizedMt. 5,29 and Mk. 9,47,
and perhapsMt. 18, 9) ; MEES,Zitate, I, p. 191 II, p. 9; KOHLER,
Rezeption, . 180-181 Massauxand Kohler defend Justin'sdepen-
dence on Mt., although Kohler does not exclude he possibility of
anothersource).
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IVE~GENT GOSPEL TRADITIONS IN CLEMENT
4. Mt. 5, 34-37Ias. 5, 12. A saying about swearing: «Let the yes
that you saybe yes...» Justin,Apol. I 16,5. Clement,Sf . V 99,1 ;
VII 50, 5 [Paed.11103,2]. Eusebius,DemEv.1113,103 PsCom.14,
4 (PG 23, 152). Ps-Clementine, Hom. 3, 55; 19, 2. Cyril of
Alexandria, Ador: VI. Gregory of Nyssa,CantHom.13. Epiphanius,
AdvHaer: XIX 6, 21.
Justin has elements rom Mt. and as. combined. Bellinzoni con-
cludes that a paranetic saying about swearing existed that was
based on Mt. 5, 34-37and was harmonized either with las. 5, 12 or
with a parenetic teaching ying behind it. Koester notes that lames
preserved an earlier form of the saying than Mt. Clement, whose
context s about ying and swearing,offers only the shorter formu-
la seen n las. (see also Eusebius) Clement regards t as a saying
of the Lord. He has no direct link to Mt., unlike Justin who has a
Matthean sequence. It is hard to decide whether the saying in
Justin is based on a tradition that precedes Mt. (suggested by
Koester) or on a harmonization of Mt. and a catechetical radition
(Bellinzoni).
See BELLINZONI,Sayings, p. 64-67; KOESTER,Gospels, p.
74/75.363; MEES,Zitate, , p. 191 II, p. 10.
5. Mt. 5, 45/ Lk. 6, 36. A saying about love for one s enemies
and about God c;:ausing he sun to rise over both evil and good
people. Justin, D,ial. 96,3; Apol. I 15, 13. Clement, Protr. 114,3 ;
Paed. 172,2-3; 88, 2; Str. V 18, 7; VI 29, 2; VII 85, 2; [Str. IV
95, 1]. Ps-Athanasius, Quaest. ad Ant. 89 (PC 28, 635). Ps-
Macarius, Horn. 19, 2 (PC XXXIV 644, 836). Ps-Clementine,
Horn. III 57. Epiphanius, AdvHaer. 33,10,5; 66, 22, 4. Hilarius,
Tract in Ps. 118, VIII 18. Augustine, Contra Adam. VII 1. 3*
(Manichaeans).
In Justin the saying presents itself twice in harmonization with
Lc. 6, 36 as it does in the Ps-Clementine homilies, Epiphanius
and the Latin writers. In Clement there is no clear harmoniza-
tion, unless one qonsiders TOV 1TaTEpa~L~OU~EVOS-Protr. 114,4)
a free rendering bf the Lukan phrase Ka6ws-0 1TaTllP u~wv. The
word ~L~llTal is tllso found in the Apost. Canst. II 14 (the words
~L~Eo~aL or ~L~l}TllS-have a Pauline flavor). On five occasions,
Clement replaces avaTEAAELwith E1TLAa~1TEL.ariants involve
over whom the s1iIn ises (Mt. «over evil and good persons » ; oth-
ers follow Mt. ot reverse the order; Justin: «over sinful, good
and evil» ; again on five occasions, Clement renders it as «over
all» (see also Apost. Canst. VI 1) ; on two occasions, «over just
and unjust », thds telescoping the last section of the Matthean
saying.
See BELLINZONI,Sayings, p. 9-14; MEES, Zitate, I, p. 191; II, p.
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A. VAN DEN HOEK
11/12; KOESTER, ospels, . 375 (clusterof sayings n Justin, Apol.
115,10-17with catechetical haracter).
6. Mt. 6,19-21/ Lk 12, 33-34. A saying on treasures in heaven that
appears in different forms in Mt. and Lk. GTh 76b, cf. GTh 21.
Justin, Apol. I 15, 11. Clement, Protl: X 93, 3 ; 105, 3; Paed. III 34,
3; Stl: III 56, 2; 86, 3* ; QD 13, 3; 13, 7 [SrI: IV 33, 4]. Origen,
JerHom. 16, 4. Basil, IsCom. 2, 7 (PG 30, 252B). (For a more com-
plete listing, see MEES, Parallelstellen, p. 133-141)
Justin remains close to the Matthean saying, but with correc-
tions of the Greek; no doubling of 8Tluaupt(TlTE removing iI~lV;
A1JUT1')Snstead of KAErrTTlS ;he plural EV TOlS oupavolS .His con-
text deals with giving to the poor. Clement is related to Mt. but,
except for Stl: IV 33, 4 and QD 13, 3, more loosely than Justin is.
At times he regards it as saying of the Lord, and he uses it in a
variety of contexts. His language is often metaphorical, and at
other times down to earth. He defends wealth, saying it provides
the means to give to the poor (a Republican avant la lettre). Some
of Justin's « improvements» of the Greek can also be found in
Clement, but worked out in a different way. Thus Justin and
Clement seem in some way related, yet do not show interdepen-
dence. An interesting parallel exists between Paed. III 34, 3 and
GTh. 76b. A wide variety of authors share variants of this saying,
see MEES, Parallelstellen, p. 133-141 (a short, medium and long
form of the saying are distinguished).
See BELLINZONI,Sayings, p. 61-62; MEES, Zitate, I, p. 192; II, p.
15; KOESTER,Gospels,p. 145 (lists the saying as part of the synoptic
saying source Q with parallels in the GTh under « rules of the com-
munity » .
7. Mt. 6, 21/ Lk. 12, 34. See also the previous entry. «For where
your treasure is, there your heart will also be. » Justin, Apol. I 15,
16. Clement, Sir. IV 33, 5; VII 77, 6; QD 17, 1. Ps-Macarius, Horn.
43,3 (PG 34, 773A). Gospel of Mary (Pap. Ber. 8502, Till, p. 69, 15).
Justin leaves out the second verb of the saying and uses vovS'
instead of Kap8ia. Various authors including Clement show this vari-
ation. In Clement the order of 9flaaupOS' nd VOlls-s reversed twice
(as in GM and Ps-Macarius). Justin has an extension of VOlls-o VOlls-
TOV av8pwlTou as Clement in QD 17, 1). The dependence of these
authors on a common tradition seems clear. BeUinzoni states that it
is hard to determine whether such a reading existed before Justin or
whether he himself was the author. Because of the diffusion of this
reading and lack of signs of direct dependence on Justin, he is not
likely to have been the originator.
See BELLINZONI,Sayings,p. 92 ; MEES, Zilaie, I, p. 192 ; II, p. 15 ;
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51
IVE~GENT GOSPELTRADmONS IN CLEMENT
KOESTER,Gospel$',p. 375 (maintaining that Justin derived the say-
ing from a catechetical collection) ; in a separate publication, Mees
lists other forms of the saying that stay close to Mt. and Lk., but that
are varied, abbrfviated or extended; see Michael MEES, «Das
Sprichwort Mt. 6, 21/ Lk. 12, 24 (sic) und seine auBerkanonischen
ParalleleD », in Aug. 14 (1974), p. 67-89; Gilles QUISPEL,«Das
Hebraerevangelium im Gnostischen Evangelium nach Maria »,
VigChr. 11 (1957), p. 139-144.
8. Mt. 6, (32-)33/ Lk. 12, (30-)31. A saying on seeking the king-
dom. Justin, Apol. I 15, 15-16. Clement, Paed. II 103, 5 ; 120, 2; Str.
IV 34, 6 ; Ecl. 12,2. Tertullian, Drat. 6, 1.
Justin's context deals with concern for food and clothing. Justin is
related to Mt., but Bellinzoni finds it hard to determine whether
Justin's source was the pre-synoptic sayings tradition Q, Matthew
itself, or a post-synoptic text based on Mt. Both Justin and Clement
(Paed. II, 120, 2; Stl: IV 34, 6) have ~a<JLAEiav WV oupavwvwhich
does not appear in either Mt. or Lk. Clement shows real signs of
eclecticism. His contexts deal with luxurious clothing and true rich-
es. The passage in Paed. II 103, 5 is part of a commentary on the
Lukan text (Lk. 12,22-31). The other passages Paed. 11,120,2; Stl:
IV 34, 6) are loosely related to Matthew. Clement has 1TpWTOV,
which is found in Mt., but missing in Lk. (and Justin). The context
of Stl: IV 34,6 shows harmonizations of Mt. and Lk (Stl: IV 33,7-34,
6; for a harmonization of Mt. 6, 33 and Lk. 12, 31, see also
Tertullian, Drat. 6, 1). Clement fills in TaUTa 1TclVTa TpOTE81l<JETaL
with: Ta Ti'}s- Tpo<j>fjS-1TpOTE81l<JETaLPaed. II 103, 5) and TaUTa
yap ~EYclAaTa $E ~LKpa ...1TpoTE81l<JETaLStl: IV 34,6; cf. Stl: I
158, 2 : this sayin~ occurs in various authors and is identified as an
agraphon; A. RESCH,Agrapha [TV 30, 3-4], Leipzig 1906, p. 111,
no. 86, also in Otigen, Eusebius, and Ambrose). Koester observes
that the saying in Justin is part of a cluster of sayings with catecheti-
cal character.
See BELLINZONI,Sayings, p. 90-92; MEES, Zitate, I, p. 193; II, p.
17 ; KOESTER,Gospels,p. 375.
9. Mt. 11, 27/ Lt. 10,22. A saying about the authority given to the
Son: «nobody knows the Son except the Father...» Justin, Apo/. I
63, 3 ; 63, 13 ; Dial. 100, 1. Clement, Prall: 10, 3 ; Paed. 120, 2 ; 74, 1 ;
88,2; SrI: 1178,2; V 84, 3 ; VII 58, 4; 109,4. Irenaeus, AdvHael: II
14,7; IV 6,1.3. Tertullian, Marc. 1127,4. Ps-Clementine, Horn. 17,
4 ; 18, 4. 13. 20. (For a fuller listing, see RESCH,Au]3ere Para/tete (on
Lk. 10, 22) ; MEES, Zitate, II, p. 29).
Justin refers om three occasions to this saying and shows some
variations that appear in later writers as well. He stays close to the
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52
VAN DEN HOEK
Matthean version, but changes (ElTU'YlVWUKElo E'YVW,everses the
order of Father and Son and leaves out the verb f3oUAllTaloward
the end. The alterations and the reversal also occur in Irenaeus,
Tertullian and the Ps-Clementine Homilies. Clement changes the
verb, but does not have the reversal (contra Mees and Bellinzoni ;
Clement only seems to render the second half of the saying (Mt. 11,
27cd); this was already noticed by Barnard (p. 16 note). Barnard's
conclusion is still valid: «either Clement and many others were
curiously consistent in their 'misquotation' of this verse, or else
there was a type of text fairly widely current from the second to the
fourth century which is not represented in the Mss and versions now
extant.» Fran~ois Bovon points out the polemical context of the
saying in Irenaeus and Tertullian (against Valentinus, Marcion and
other groups) and suggests the possibility of gnostic influence (per-
sonal communication).
See P. M. BARNARD, The Biblical Text of Clement of Alexandria
(Texts and Studies V 5), Cambridge, 1899, p. 16; Leon E. WRIGHT,
Alterations of the Words of Jesus as Quoted in the Literature of the
Second Century, Cambridge (Mass.), 1952, p. 63 (inferring some
kind of documentary authority) ; BELLINZONI, Sayings, p. 26-28;
MEES, Zitate, I, p. 195 ; II, p. 29; KOESTER,Gospels, p. 56 (with bib-
liography and noting that this saying belongs to a group that is dis-
tinctly different from other sayings).
10. Mt. 16, (25-)26/Mc. 8, 36(-37) Lc. 9, (24-)25. A saying about
the conditions of discipleship.« What profit will there be to gain he
(whole) world » Justin, Apol. I 15, 12.2 Clement6, 2. Clement,
Str. IV 34, 4; VI 112,3. Origen, InProv. (PG 17, 209A) ; JoCom.
XIX 15.
Justin s speaking about giving to the poor (seealso under6. and
7.). He harmonizeselements of Mt. and Lk. Clement and Origen
offer similar harmonizations,but none of them are dentical. Origen
comes closest o Justin in this respect. Even the two harmonized
versions within Clement are not the same. In the first passage
Clement's ocus s on poverty and wealth (seeStr. IV 25,1), and the
immediate context providesvarious sayings rom the Sermonon the
Plain alternated with the Sermon on the Mount. In the secondpas-
sage (Str. VI 112, 3), which is closest o Justin's version, Clement
discusseshe Gnostic'sdisposition oward learning (the beginningof
this passage: TL yap TO O<j>EAOSay be an improvement of the
Greek and s identical in 2 Clem.6, 2).
See L. E. Wright, Alterations of the Wordsof Jesusas Quoted n
the Literature of the Second Century,Cambridge (Mass.), 1952,p.
142 (regarding he harmonizationbetweenMt. and Lk. in Origen as
a quotation from memory,an unlikely proposal,since Origen's har-
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53
IVE~GENT GOSPEL TRADITIONS IN CLEMENT
monization is cl~se to Justin's) ; BELLINZONI, Sayings, p. 89-90 ;
MEES, ZilaIe, II, p. 37 ; KOESTER,Gospels,p. 375 (regarding the say-
ing in Justin as part of a cluster of sayings around a particular theme
and with catechetical character).
11. Mt. 19, 17/Mk. 10, 18/Lk. 18,19. Words of Jesus in his
encounter with the rich man. Justin, Apol. I 16, 7; Dial. 101, 2 ;
Clement, Paed. 172,2; 74,1; SrI: II 114,3* ; 114,6* (Valentinus); V
63, 8; VII 58, 5. Ps-Clementine, Horn. 8, 1, 3; 3, 4. Irenaeus,
AdvHael: 120,2* (Marcos); Epiphanius, Pan. 33,7,5* (Epiph. I
456, 23; Naasenes) ; 42* (Epiph. II 144, 13; Ptolemaeus) ; 69, 27*
(Epiph. 111168,12 ; Marcion).
Mt. «One is there, who is good. » Mk./ Lk. : «No one is good
except the one God (God alone).» Justin, Apol. I 16, 7 : «No one is
good except God alone, who has made all things» (Mk./ Lk. ; the
extension can also be found in a number of mss, see MASSAUX,
Influence, p. 486) ; Dial. 101, 2 : «Why do you call me good? One
there is who is g(>od, my father who is in heaven », (thus starting
from Mk./Lk., moving on to Mt. and adding a relative clause); cf.
Clement, Paed. 172, 2 : «No one is good except my father, who is in
the heavens.» Many ancient texts have this addition, or traces of
the addition, and/or harmonizations. The harmonizations can also
be found in a large number of biblical mss.
See BELLINZONJ,Sayings, p. 19-20.119; MEES, Zitate, I, p. 198, II,
p. 42.43 ; for harmonizations in manuscript traditions, BELLINZONI,
Sayings,p. 19, note 3 and MEES Zitate, II, p. 43.
12. Mt. 22, 37-39/Mk. 12, 30-31/Lk. 10,27. Cf. Deut. 6,5. The
great commandment. Justin, Apol. I 16, 6; Dial. 93, 2. Clement,
Paed. III 88, 1 ; Str. IV 149, 8; QD 27 [passim]. Basil, Reg. Brev.
Tract., 158 (PG 23, 1188-1189). Cyprian, Unit. 15; Fort. 2. Hilary,
Trin. IX 24. Orosi,us,Apol. 31, 4. (For a fuller listing of authors and
mss traditions, see MEES,Zitate II, p. 48).
Justin shows a harmonized version with elements from Mt.,
Mk. and Lk. There may be an underlying Jewish tradition for the
extension KUPlOV TOV 6EOV TOV 1TOlllUaVTaUE in Apol. I 16, 6
(see H. KOSTER,Synoptische Uberlieferung bei den Apostolischen
Viitern, Berlin, 1957, p. 133ff and 170ff in connection with Barn.
19,2 and Did. 1,2; cf. also Apol. 116,7: () 6EOS-, ) 1TOlllUas- Q
1TavTa,and previous entry). In the middle section of the great
commandment there is a wide range of variations both in East
and West (in the prepositions EV/E~ and in the words Kap8(a,
~UXll, luxuS [8U\i'al1lS ], lavola). None of the versions coincide
exactly.
See BELLINZONl,Sayings,p. 39-40; MEES, Zitate, II, p. 47-48.
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54
A.VANDENHOEK
13. Lk. 3,22/ Mk. 1, 11/ Mt. 3, 17. The baptism of Christ. Justin,
Dial. 88, 8; 103, 6. Clement, Paed. I 25, 2. (For a listing of manu-
script traditions, see HUCK-LIETZMANNad loco ; of authors, MEEs,
Zitate II, p. 68).
At the end of Jesus baptism (vers 22 end), some mss of Luke
(Cod. D, vet. lat.) insert Ps. 2, 7 : viaS Ilov Et au, EYW mlllEPOV
YEYEVV1)Ka E, while others (Cod. Sin., A, B, W etc.) have a ver-
sion parallel to Mark: au Et 6 viaS IlOV 6 ayalnlTaS , EYW EV
aOl Eu8aK1laa. ustin agrees with Cod. D and vet. lat, and (presum-
ably) attaches this passage to the arrOIlV1)VEullaTa. lement has a
contamination of readings: «You are my beloved son, today I
have begotten you.» Many texts and authors of both East and
West have the quotation of Ps. 2, 7, cf. GHebr., GEb. (through
Epiphanius), Didascalia Apostolorum, Acts of Peter and Paul,
Origen, Methodius, Lactantius, Hilary, Juvencus, Tyconius,
Augustin.
See George ARCHAMBAULT, ustin Dialoque avec Tryphon, 1909,
t. II, p. 78-79 note; MEES, Zitate I, p. 78-79.200; II, p. 68. Fran~ois
BOVON, Das Evangelium nach Lukas (EKK 3,1), Neukirchen-
Zurich, 1989,p. 14 and 181.
14. Lk. 6, 27-28. 32-33/ Mt. 5, 44. 46-47. Love of one s enemies.
Didache 1, 3. Polycarp XII 3. Justin, Apol. I 15, 9. Ps-Clementine,
Horn. 12,32. Clement, Paed. 170,3; III 92, 3 [SrI: II 2, 2; VII 84, 5].
Justin shows a hannonization of Lk. and Mt. and has a rearrange-
ment of materials. Clement and other sources share some hanno-
nizing elements, but they all differ from one another. Belinzoni,
who does not include Clement in his review, does not believe that
all these sources agree in misquoting the gospel text purely by acci-
dent. He prefers the idea that they preserve another reading coming
from a catechetical tradition that could be dependent on the liturgi-
cal praxis of the post-apostolic church.
See H. KOSTER,Synoptische Oberlieferung bei den Apostolischen
Viitern, Berlin, 1957, p. 220ff (in connection with Did. 1, 3);
BELLINZONI,Sayings, p. 71-73.98; MEES, Zitate, I, p. 200-201; II, p.
70.
15. Lk. 6, 29/Mt. 5,40. «To him who strikes you on the cheek,
offer the other also» (see also preceding section). Didache 1, 4.
Justin,Apol. I 16,1. Irenaeus,AdvHaer. IV 13,3. Clement,Protl: X
108,5; Paed. II 92, 3; Stl: IV 61, 2; 77, 3; QD 18,4. Aphraates,
Horn. 9,4. (For a fuller listing, seeMEES,Zitate, I, p. 70).
Justin s passage s about forbearing, serving and being without
anger.He or his sourceare basedon Luke and harmonize elements
from Mt. Clement also harmonizes,and the «corrections» of the
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55
IVERGENT GOSPEL TRADmONS IN CLEMENT
Greek noticed by Bellinzoni all occur in Clement, although in dif-
ferent ways.
See BELLINZONI,Sayings,p. 71-73.98; MEES, Zitate, I, p. 200-201;II,
p. 70.
16. Lk. 6, 36. Cf. Mt. 5, 45. 48. Saying on love for one s enemies:
«Be merciful as your father is merciful. » Justin, Apol. I 15, 13 ;
Dial. 96, 3. Clement, Str. II 100, 4; [Paed. I 72, 2]. Ps-Clementine,
Hom. 11157. Ps-Athanasius, Quaest. ad Ant. 89. Ps-Macarius, Hom.
19,2; Cust. Cord. 13. Epiphanius, AdvHaer. 33, 10,5; 66, 22, 4.
Hilary, Tract. in Ps 118, VIII, 18 (PL 9, 559). Augustine, Contra
Adimantum* VIII. 3 (PL 42, 137.138).
Most authors harmonize Lk. 6,36 with Mt. 5, 45b (see Justin, Ps-
Clementine Homilies, Epiphanius and in the Western tradition,
Hilary and Augustine, but not Clement, Athanasius, and Macarius ;
see also under Mt. 5, 45). In Apol. I 15, 13, Justin deals with giving
to the needy without seeking glory. His most striking divergence
from the Lukan text is the addition to OlKTLp~OVESnamely YLVEu8E
8E XPTlUTOt Kat OlKTLp~OVES cf. Lk. 6, 35, where XPT]uT6Ss
used). In different ways this «doubling» occurs in .many other
authors. Clement, who attributes the saying to the Lord, has:
YLVEU8E~~OVES- Kat OlKTLp~OVES .he Ps-Clementine Homelies :
a Ya60t Kal OlKTLp~OVES ;s-Athanasius : OlKTLp~OVESat a Ya60(;
Ps-Macarius : a Ya60t Kat XP1lC1TO(.ll the authors extend 1Tanlp o
1TaTi]p oupaVlOS (or EV TO1S oupavolS ),pater coelestis (qui est in
coelis) ; this may indicate a harmonization with Mt. 5, 48; it also
occurs in some mss of the Gospel of Luke (see BELLINZONI,
Sayings,p. 9, note 4).
See BELLINZONI,Sayings, p. 9-13.97; MEES, Zitate, I, p. 202; II, p.
71.
17. Lk. 12, 48. The parable of the servant s wages. «Everyone, to
whom much is given... », found only in Luke. Justin, Apol. 117,4.
Irenaeus, AdvHaer. IV 27, 2. Clement, Str. 11147,4. Apostolic
Constitutions 1118. Epiphanius, Ancoratus 26, 8.
Justin deals with this saying in a section on the coming judge-
ment. His version is presumably related to the saying in Luke but is
severely abbreviated. In that respect, Clement is comparable to
Justin, but he stays closer to the text in Lk., with 1:.86611CI.) for
E8wKEV Just., cf. Codex D l8WKQV). For other short versions varying
the quantity, see Irenaeus, Apostolic Constitutions, and Epiphanius
(TTOAU-TTOAUk., TToAu-TTAEOVodex D, TTOAU-TTEPLcrcr6TEpovpostolic
Constitutions, TTEPLcrcr6TEPOV-TTEPLcrcr6TEPOVpiphanius, plurimum-
plurimum Irenaeus, TTMOV Justin, TTAELOVlement).
See BELLINZONI, Sayings, p. 73-75; MEES, Zitate, I, p. 202 ; II, p. 81.
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56
V AN DEN HOEK
18. An eschatological saying not found in the synoptic gospels.
Ct. Ez. 33, 20 ; 18, 30 ; 7, 8. Justin, Dialogue 47, 5. Clement, QD 40,
1-2. Cyprian, Mort. 17. Hippolytus, Univ. (LAGARDE,p. 73, 4. 5). Ps-
Athanasius, Quaest. ad Ant. 36. (For a full listing, see A. RESCH,
Agrapha [TV 30, 3-4], Leipzig 1906,p. 102 ; 322-325).
Resch lists Justin and nineteen other sources with this saying.
Justin renders: «In whatever (l:.v olso av) I catch you (KaTaAa[3<JJ),
in those things (l:.v TOVTOLSO)will also judge you.» Clement has:
«For in whatever (l:.</>'olSOyap dv) I find you (EUpW), n those
things (l:.1TLTOUTOLSO)will also judge you; and on every occasion
He proclaims the end of aU things.» Clement and Hippolytus are
unique in having this extension: Kat 1Tap' EKaO"Ta~o(i TO TEAOSO
1TavTWvmap' EKaO"Tov o(i TO TEAOSO,ippolytus). Justin is unique
in having KaTaAaI1~aVWaU others have EUplO"KW.ustin, Clement,
Hippolytus have the plural l:.v olso (l:.</>' lso) ...l:.v TOVTOLSOl:.1TL
TOUTOLSO),hile aU others have the singular l:.v t\J ...l:.v TOUT ; or
variants). The saying has some resemblance with Ez. 33, 20, and
Justin refers to Ezechiel explicitly in the subsequent part of his text
(Dial. 47, 6). Justin attributes the saying to «our Lord, Jesus
Christ », and he seems to be unique in this respect. AU others have
God as speaker, either 8EOSO r KUpLOSO,hich may have led to
Justin's attribution. Some texts have the saying transmitted through
the prophet, who is specified as Ezechiel in a few cases.The source
may have been a pseudo-epigraphical book of Ezechiel. On another
occasion, in Paed. I 91, Clement explicitly refers to a saying from
such a book, and the saying is also found in 1 Clem. 8, 3.
See A. RESCH,Agrapha (TV 30, 3-4), Leipzig 1906, p. 102.322-
325 ; BELLINZONI,Sayings,p. 131-134; KOESTER,Gospels,p. 362.
ConcludingRemarks.
The studies of Barnard and Mees show how difficult it is to
give a simple and straightforward assessment f Clement's use of
NT texts. The problem is very complex, since Clement used a
rich gamut of sources n a highly eclectic fashion. Although this
investigation covers only a fraction of the NT texts assembledby
Barnard and Mees, the problems are still daunting. There are
simply too many trees in the forest of biblical quotations and
their variety keeps the onlooker from getting a clear view of the
forest as a whole. There are some easily recognizable quota-
tions, which stand out like tall oak and pine trees; there are the
abbreviations, the tree stumps, which are sometimeshard to dis-
cover and slippery when overgrown with lichens and moss, and
then there are the harmonizations and variations, the thorny
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57
IVE~GENT GOSPELTRADmONS IN CLEMENT
bushesand underbrush that keep the visitor tangled in minutiae.
So it is with some trepidation that an attempt is made to search
for common denominators. Tentative observations rather than
definitive conclusions will be offered.
Thirty-plus go$pelquotations in Clement are cited by Mees as
« uncanonical» ; ~nour terms we would prefer to speak of variant
readings. Seventeenof these variants (about half) share one or
more elements with variant gospel quotations in Justin. Yet, as it
turns out, Justin ,and Clement are hardly ever the only players in
this game. Every time that the two authors have something in
common, a third , a fourth, or many more also turn up with some
part of the variant. At times, all differ from each other, and the
only common ground seems o be that they all modify the same
gospel ext. In other words, the ways in which the modifications
were made are different, while the reasons for the changes may
have been the same.
The variants lire (almost) all designated as quotations, and
(almost) all involve sayingsof the Lord. In Justin a large number
of these sayings appear conveniently in one area, namely in his
first Apology, chapters 15 through 17. In his preceding para-
graph, Justin had explained that it would be beneficial to present
the emperor with some of the teachings of Christ himself. He
then sets forth words that exemplify the Christian way of life, an
ethical code wjth words close to Matthew's Sermon on the
Mount, or Luke1sSermon on the Plain, or harmonizations of the
two. He arrang~s hese sayings n groups as Greek anthologists
would arrange ,them, namely according to topiCS.l0Thus he
groups sayings on chastity, on love for one's neighbors, on love
for one's ennemies, on giving to the poor, on being free from
anger, on taking oaths, and so forth.
In Clement as well, most of the variant borrowings are speci-
fied as sayings of the Lord, sometimes simply as words from
scripture. In th~t respect Clement differs from Justin, since for
Justin only the words from the aT were regarded as scripture.
Another difference is that the variants in Clement do not occur
in one section, but are dispersed over almost all his writings. Yet
Clement also clusters sayings on moral behaviour somewhat as
Justin does, and these clusters likewise contain sequences rom
10. See Robert M. GRANT, Greek Apologists of the Second Century,
Philadelphia, 1988,p. 65.
11. There are thr,ee main sections in Clement's work where this hap-
pens: Str: II 26ffi(26; 27; 31 ; 33 ; 36; 46; 47; 54; 56; 57) ; SIr. IV 25ff
(26; 27; 31 ; 33; :116; 6; 47; 54; 56; 57); QD 16ft (16-19; 22; 24; 26;
33 ; 36).
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58
A. VAN DEN HOEK
the Sermon on the Mount or the Sermon on the Plain, or harmo-
nizations of the two.l1 Clement, in fact, displays an inclination to
preserve ogia and shows a certain reverence for them, whatever
their source may be. His borrowings from the letter of Clement
of Rome to the Corinthians contain several suchgroups of logia.
The Gospel of the Egyptians, which is primarily known through
Clement s quotations, contains logia exclusively. Other sources,
such as the Gospel of the Hebrews, Traditions of Matthias, and
some not-further-specified Gospel traditions, are all quoted by
Clement becauseof the sayings they contain,12 t is intriguing to
see that two-thirds of the material that Justin and Clement share
is related to the Sermon on the Mount and (to a lesser degree)
to the Sermon on the Plain. In both authors, this material is var-
ied, abbreviated, or harmonized. The harmonizations usually
involve Matthew and Luke, and less often, Matthew and Mark.
There are, of course, harmonizations in Justin that are not paral-
leled in Clement, and vice versa there are many harmonized
gospel texts in Clement that can not be found in Justin. The
focus here is on passageswhere divergent traditions and harmo-
nizations in both authors coincide.
Scholars of early saying raditions have questioned what rela-
tionship sayings such as in Justin and (especially) in earlier
authors have to the synoptic gospels, n particular to the gospel
of Matthew. In a nutshell and in overly simplified form, the
question is whether the sayings in these authors reflect direct
dependence on but free usage of the synoptic gospels, or
whether instead they reflect pre-synoptic collections, as elabo-
rated in various oral and (ultimately) literary traditions. Such
(hypothetical) collections would thus not only have been used
by the gospel composers hemselvesbut would have also contin-
ued to develop and lead an independent existence.
Arthur Bellinzoni gave a well balanced assessment f the situ-
ation in Justin, relying primarily on the synoptic solution but
occasionally having recourse to the pre-synoptic hypothesis.
Primarily «Justin used written sources which harmonized paral-
lel material from Matthew and Luke (and possibly Mark), and
which conflated related material from different parts of a single
gospel (either Matthew or Luke). »13n order to explain this phe-
nomenon, Bellinzoni postulates the use of a written catechismas
Justin s source, possibly made by Justin or his pupils in the cate-
chetical school in Rome in the mid-secondcentury.
12. See VANDENHOEK,art. cit. (supra note 5), p. 100,104-105.
13. BELLINZONI,Sayings, p. 141-142 A. J. BELLINZONI,«Gospel of
Matthew» (supra note 1), p. 240.
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59
IVERGENT GOSPEL TRADITIONS IN CLEMENT
A review of variant sayings n Clement indicates that the same
mechanisms,namely harmonizations of various gospels and con-
flations of one gospel can be observed, and, as was indicated
before, sayings from the Sermon on the Mount played a promi-
nent role in these materials. The suggestion that this kind of
material would have been used in a catechetical situation is quite
likely because here is other evidence to support such an idea.14
For example, the Didache,15whose title places the work in an
immediate catechetical context, has a section in which guidelines
are given for a Christian way of life and conduct.16This section
contains sayings characterized as «words of the Lord », similar
to some of the sayings n the Sermon on the Mount or the Sermon
on the Plain. Another document with catechetical elements is
the Letter of Clement to the Corinthians, which has a paragraph
containing «words of the Lord Jesus» and similarly has reminis-
cencies of the Sermon on the Mount or the Sermon on the
Plain; in this case, he sayings do not seem o be dependent on
the gospel texts as we know them. Helmut Koester attributes
this section of 1 Clement o a local oral tradition.17
Although material of the late first century obviously differs
from the works of Justin or Clement of Alexandria, it is striking
to see that early materials such as those in 1 Clement continued
to be used in close connection with catechetical instruction. A
similar observation can be made with another teaching: namely,
that of the Two Ways, which was a central issue for some of the
«Apostolic Fathers» and still remained an important issue in
Alexandrian teaching of later times}8
We do not know much about the details of catechetical
14. For the cultic and didactic background of some of the material in
the Sermon on the Mount itself, see Hans Dieter BETZ, Essayson the
Sermon of the Mount, Philadelphia, 1982,p. 51, 57 ; W. D. DAVIES,The
Settings of the Sermon on the Mount, Atlanta, 1989,p. 460-461.
15. The first words of the work, 8LBaxl ]KUPLOU,esemble Justin s notion
of 8L8a Y~aTa OUXPLUTOUsed in Apol. I 14,4 before his exposition of
sayings.
16. Didache I 3 -II 1. H. KOESTER, ynoptische Oberlieferung (supra
note 1), p. 239-241,argues that the sayings were taken from a saying
collection that existed in parallel with the synoptic gospels. Clayton N.
JEFFORD, he Sayings of Jesus in the Teaching of the Twelve Apostles,
(Suppl. to VigChr. 9), Leiden, 1989,p. 38-53, hinks that the section is
dependent upon synoptic texts that are derived from Q.
17. H. KOSTER, ynoptische Oberlieferung (supra note 1), p. 16.
18. Clement, Str. II 68,1 * ; IV 5, 3 ; 43, 1 ; 138,4 ; VI 2, 3 ; VII 93, 3 ; QD
26,8. Origen, CCels. 6, 16 ; ExHom. 5, 3 ; IerHom. 4, 3 ; 14, 16; 20,6. 7 ;
10Com. 6,103; 10,311; Mart. 31; 42; MtCom. 12,2; 14,1 ; 15,20; vari-
ous catenae.
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60
A. VAN DEN HOEK
instruction in the days of Justin or Clement: for example, how it
was done, how long it took, how initial instruction related to
baptism, and other such questions.19 ustin himself is one of the
first to provide some information about rituals in the church. In
the Apology he writes that it was common practice to read the
«Memoirs of the Apostles» (aTToflV1lfloVEUflUTUhat contained
words of the Lord) together with the writings of the prophets
«<prophets» presumably meaning the OT as a whole ).20Some
generations later in Origen (and Hippolytus) the contours of
instruction already become clearer. Origen mentions two stages
in the process, one rather substantial period for ethical instruc-
tion and another for the instruction of faith.21 The first phase
may have taken severalyears, presumably o accomodatea con-
tinuous reading of the Old Testament in daily services. There
are indications that this instruction was not a separate operation
but took place in the presence of the community, primarily dur-
ing daily gatherings without the eucharist. We can only conjec-
ture that in the timespan between Justin and Origen the rituals
became more elaborate and extensive (as rituals tend to do);2
while retaining traditional elements, such as readings of the
words of the Lord together with OT readings. Clement, unfortu-
nately, does not give much direct insight in any of these practical
matters23,but his passagesunder review show that the sayings
are often combined with exhortations from the Pentateuch.
Bellinzoni states that there are striking similarities between
Justin and Clement (and he also includes Origen and the Ps-
Clementine homilies in his comparison), and that these similari-
ties reflect a literary dependence on traditions used by Justin.24
This formulation, however, needs modification. On close exami-
19. Andre ME-HAT, Etude sur les «Stromates» de Cle~ent d Alexandrie,
Paris, 1966, p. 301-305.
20. Apol. I 67, 3 ; A. J. BELLINZONI, « Gospel of Matthew» (supra note
1), p. 241.
21. CCels. 3, 59-60; see Hans J6rg AUF DER MAUER and Joop
WALDRAM, «Illuminatio Verbi Divini-Confessio Fidei-Gratia
Baptismi », in Fides Sacramenti Sacramentum Fidei. Studies in Honour
of Pieter Smulders, Hans J6rg AUF DER MAUER et al. (eds.), Assen,
1981, p. 41-95.
22. See Apol. I 67, 3 ; Justin only speaks of gatherings on Sundays.
Other days of the week (Wednesdays and Fridays) are refered to in
Didache 8, 1 and in Tertullian. See D. B. CAPELLE, «L introduction du
catechumenat a Rome », Recherches de Theologie ancienne et medievale
5 (1933), p.129-154.
23. A. ME-HAT,op. cit., p. 304.
24. BELLINZONI, Sayings, p. 141-142.
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IVERjGENT GOSPEL TRADmONS IN CLEMENT
nation, the rela~ionship between Justin and Clement remains
rather fuzzy and puzzling. The relationship does not seem o be
very direct. Similar things are going on, but not the same. Most
of the common ground consists of harmonizations of the same
sayings, but the harmonizations themselves differ. Justin and
Clement both c(>ndensesayings, and they do it along similar
lines, but again the lines are not identical. In some cases,Justin
stays closer to the Matthean text than Clement, and in others
(but only rarely) Clement moves closer to Matthew or Luke
than Justin. Wh~n the Greek language of a gospel text is so to
speak « improvtd» in Justin, the same words seem to be
« improved» in Clement (or others) but in different ways. They
are curiously consistent in what they change, but strangely
inconsistent n how they change t.
Any effort to project the similarities into the realm of a liter-
ary dependence all short of the requirements normally and ust-
ly required to establish such a relationship. It seems ikely that
the problem has to be solved in a different way. Something sure-
ly lay behind the similarities just discussed,but this « something»
does not seem o have been a single literary work on which these
various authors drew directly. The common element responsible
for the similar variants was evidently rather complex: it was
probably a mode.llying well behind the immediate sources.This
model had branched out, and its diversification and elaboration
moved along paths that were less formal and academic han they
were communal and oral. Since it is likely that the connecting
link between Justin and Clement was the catechetical realm, it
becomes clear th,at he catechetical tradition must have had this
oral, more flexible character. ndeed, it seems ikely that this tra-
dition would have had the non-literary component that would
account for the lack of exact correspondences n the parallel pas-
sages n Justin, Clement, and others.
In other words, church readings or instructional material
based on saying,collections apparently were widely diffused
throughout the Christian world. Similarities among them seem
so great that one can speak of a model behind them, but on the
other hand, the differences in the passages nder discussion ndi-
cate that the model was used with some flexibility.
Harmonizations Of synoptic material must also have been avail-
able for catechetical or liturgical use, and again these harmo-
nizations could be imitated, but also freely used and changed.
The mixture of similarities and differences in the variant materi-
al in Justin and tlement could well reflect differences in local
church traditions, in Rome and Alexandria. The common themes
in the different localities indicate that these traditions were orig-
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62
A. VAN DEN HOEK
inally related but their common source or model is definitively
lost in the mists of time. The appearanceof these variant gospel
traditions in writers centuries apart indicates that the tradition
of liturgy and instruction had great longevity as well as geo-
graphical articulation. Thus some elements of the tradition could
continue to pop up at much later times as well as in unexpected
places}5
25. Many hanksgo to the «StichtingAanpakken» n the Netherlands
for its generous rant and to John Herrmannand Fran~is Bovon or
their constructiveemarksabout his article.
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Bernard POUDERON
Universitede Tours
FLAVIUS CLEMENS ET
LE PROTO-CLEMENT JUIF DU ROMAN
PSEUDO-CLEMENTIN
The person of Clement s the confiation of four -partially historical,
partially literary -figures. According to our hypothesis, he hero either of
a hellenized Jewish novel or of a Jewish apologeticdialogue and Flavius
Clemens, consul with his uncle Domitian in 95 and executed on the
charge of atheism, are one and the same person. The popularity of
Clement seems o be assertedby his presence n the Talmud where he is
found under the name of Keti a bar Shalom; this might explain why he
passed irst to the Jewish hellenisitic literature and then found his way
into the Pseudo-Clementines.
Le personnage de Clementparait resulter de la combinaison de quatre
figures, pour partie historiques,pour partie litteraires .celIe de Clement
Romain; celIe d un des heros d un roman juif hellenise; celIe d un des
protagonistesd une apologie uive en forme de dialogue; celle, enfin, du
consul Flavius Clemens,parent de l empereur Vespasien, xecuteen 95
pour « mlEurs uives ». Notre hypotheseest que e heros du roman uif ou
Ie protagoniste de l apologie juive (celui que nous appelons Ie « proto-
Clement uif») et Ie consul Flavius Clemensne torment qu une seule et
meme personne. La popularite de cet important personnage dans les
milieux juifs sembleen effet attestee ar sa presencedans e Talmud,sous
Ie nom de Keti a bar Shalom; elle expliquerait que sa igure soil d abord
passeedans la litterature juive hellenistique,avant de penetrer Ie roman
pseudo-clementin.
II est tres generalementadmis que Ie roman pseudo-clementin
resulte de la fusion de plusieurs sources itteraires, elles-memes
de differentes origines: juive, palenne et chretienne. Ce constat,
qui s applique au substrat narratif du roman et au contenu doc-
trinal qu il vehicule, doit necessairementetre etendu aux per-
sonDagesqu il supporte. Eux aussi sont susceptiblesde provenir
Apocrypha 7, 1996,p. 63-79
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B. POUDERON
de chacune des differentes sources qu a fondues dans Ie creuset
de la creation litteraire l auteur de l Ecrit prirnitif (Grundschrift)
-l ouvrage suppose qui a donne naissance aux deux versions
que nous avons conservees du roman pseudo-clement n : leg
Homelies (qui sont a la base de notre etude) et leg
Reconnaissances (dont leg textes paralleles ont aussi ete
etudies 1.
Le cas Ie plus remarquable est celui de Clement. Qui ne s est
deja etonne que Ie Clement des Homelies soit a la fois cet
« eveque» de Rome dont nous avons conserve une Epftre, un
proche parent de l empereur regnant, un proselyte juif et un
chretien neo-converti ? Cette inconsequence du redacteur ne
peut pas s expliquer seulement par leg errements de toute crea-
tion litteraire -il faudrait alors supposer notre auteur bien
etourdi, ou dote d une bien faible memoire -, mais elle trouve sa
L J. B. COTELIER,e premier editeur des Homelies (Sspatrum qui in
temporibus apostolicis floruerunt, Paris, 1672,vol. 1, p. 529-746), avait
deja attire l attention sur Ie fait que les deux recensions derivaient d un
meme ouvrage ; a sa suite, H. DODWELL,Dissertationes n Irenaeum,
Oxford, 1689,p. 439-446.Parmi les modemes, citons R. A. LIPSIUS, ie
Quellen der romischen Petrus-Sage,Kiel, 1872 et, apres lui, H. WAlTZ,
Die Pseudoklementinen.Homilien und Rekognitionen.Eine quellenkri-
tische Vntersuchung (TV 10, 4), Leipzig, 1904; W. HEINTZE, Der
Klemensroman und seine griechischen Quellen (TV 40, 2), Leipzig,
1914; C. SCHMIDT,Studien zu den Pseudoklementinen (TV 46, 1),
Leipzig, 1929; O. CULLMANN, e probl~me litteraire et historique du
roman pseudo-clemenin, Paris, 1930; B. REHM, «Zur Entstehung der
pseudoclementinischen Schriften », ZNW 37, 1938, p. 77-184; H. J.
SCHOEPS,heologie und Geschichte des ludenchristentum, Tl1bingen,
1949; G. STRECKER, as ludenchristentum in den Pseudoklementinen
(TV 70), Berlin, 1958 (19812); J. RIUS-CAMPS, «Las
Pseudoclementinas Bases filologicas para una nueva interpretacion »,
Revista Catalana de Teologia 1, 1976, p. 79-158. Seul J. WEHNERT,
«Literarkritik und Sprachanalyse. Kritische Anmerkungen zum
gegenwartigen Stand der Pseudoklementinen-Forschung », ZNW 74,
1983,p. 268-301 et «AbriB der Entstehungsgeschichte es pseudokle-
mentinischen Romans», Apocrypha 3, 1992,p. 211-235,developpe un
point de vue un peu different, preferant parler de «gemeinsame
Grundlage », de «fonds commun» -mais sans avoir totalement
convaincu; cf. W. PRATSCHER, er Herrenbruder lakobus und die
lakobus Tradition, Gottingen, 1987,p. 122-123; F. Stanley JONES, he
Pseudo-Clementines introduced, selected and translated, in New
TestamentApocrypha, a paraitre. Sur les differentes theses en presence,
voir F. Stanley JONES,«The Pseudo-Clementines: A History of
Research », The Second Century 2, 1982, p. 1-33; 63-96 -(avec une
bibliographie quasiment complete).
2. Sur Clement, voir en demier lieu la mise au point de G. ORY, «Qui
etait Clement? », Cahiersdu Centre E. Renan, 1994.
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LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
justification si l on admet que Ie personnage de Clement resulte
de la fusion de plusieurs figures empruntees aux differentes
sources doni est issu e roman.
11 mporte donc de rappeler quelles sont ces sources. Depuis
les travaux de H. Waitz et de W. Heintze, il est generalement
admis qu elles sont au nombre de quatre3 :
-la trame narrative du conflit entre Pierre et Simon aurait ete
empruntee a des Actes de Pierre, aujourd hui perdus pour leur
plus grande partie;
-la substance des differents discours de Pierre (qui forment
l essentiel du « roman») proviendrait d hypothetiques Kerygmes
de Pierre, un ouvrage ebionite aujourd hui perdu, mais doni Ie
titre serait mentionne dans l un des ecrits liminaires4;
-la fiction des reconnaisances aurait ete reprise a un roman
palen, doni l influence atteste la popularite ;
-quant au debat entre Clement et Appion, qui occupe trois
chapitres sur les vingt que comptent les Homelies, l aurait vrai-
semblablement ete emprunte a un ouvrage apologetique juif de
langue grecque, mettant en scene dans un dialogue de type pla-
tonicien quatre personnages : un noble romain converti au
judalsme et trois palens, Ie grammairien alexandrin Appion, l as-
trologue Annubion et un inconnu nomme Athenodore.
Aces quatre sources supposees, il faudrait ajouter pour Ie
mains une cinquieme : la memoire des hommes, qui perpetuait
Ie souvenir de deux personnages appartenant a l histoire :
Clement, quatrieme « eveque» de Rome selon Eusebe, et son
homonyme, Ie consul Flavius Clemens, proche parent de l empe-
reur Domitien.
3. Voir F. Stanley JONES,«A History of Research », p. 14-33 (The
Sourcesof G).
4. Epist. Petroad Jacob. 1 et 3 ; cf. Epist. Clem. ad Jacob. 20. Cette these
a ete exprimee pour la premiere fois par H. DODWELL,Dissertationes n
Irenaeum, p. 440-442. Elle a ete reprise par H. WAlTZ, Die
Pseudoklementinen,qui a meme tente une reconstitution des Kerygmes
de Pierre d apres Recogn. 1-3 et Hom. 2-3 et 16-20 (publiee dans les
NeutestamentlicheApokryphen, ed. E. HENNECKE, ubingen, 1924, p.
151-163,et jugee tres severement par C. Schmidt). Elle est aujourd hui
presque unanimement rejetee apres es travaux de J. RIUS-CAMPS,«as
Pseudoclementinas», p.147-149; J. WEHNERT, Literarkritik», p. 33-
34; F. Stanley JONES,The Pseudo-Clementines ranslated (il paraitre).
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B.POUDERON
A. La confusion esdeuxClement.
11est indeniable que Ie redacteur de l Ecrit primitif a identifie
(ou confondu) Clement de Rome avec un de sescontemporains,
Ie consul Flavius Clemens. Flavius Clemens est surtout connu
par Dion Cassius,qui mentionne dans un meme passagees liens
qui l unissaient a l empereur Domitien et son execution en 95, a
l age de trente-cinq aDS, our crime d «atheisme» :
La meme annee (i. e. 95), Domitien fit executer un grand
nombre de personnes,entre autres Ie consul Flavius Clemens,
quoique celui-ci ffit son cousin et qu il efit epouse une de ses
parentes, Flavia Domitilla. Tous deux furent accusesd atheis-
me, un chef d accusation qui fit condamner egalement beau-
coup d autres personnesconvaincuesde s etre laisse entrainer
aux coutumes des Juifs. Les unes furent mises a mort, les
autres punies de confiscation. Quant a Flavia Domitilla, elle
flit simplement exilee a Pandataria5.
Selon line tradition ancienne dans l Eglise, ce haut personna-
ge et son epouse, condamnes pour «mreurs juives », etaient en
fait des chretiens6. I n est donc aucunement surprenant que Ie
redacteur de l Ecrit primitif ait imagine d identifier l eveque
chretien et Ie consul converti, puisqu ils portaient Ie meme nom
et vivaient a la meme epoque.
Dans leg Homelies,celie identification apparait dans Ie rappel
du double lien de parente (par la naissanceet par l alliance) qui
unit Clement a lafamille imperiale :
-Horn. IV, 7, 2 (dans la bouche d Appion, a propos de
Clement) : «Cet homme, vous disais-je, est de la famille de
Tibere Cesar»7;
-Horn. XII, 8, 2 (dans la bouche de Clement) : «II Teste
(de ma famille) des hommes nombreux et importants, de la
famille de Cesar. Mon peTe avait ete eleve avec Cesar; aussi
5. Dion Cassius Epitome de Xiphilin), 67, 4. Voir aussi Suetone,Dom.
15 : «Entin, il fit mettre a mort tout a coup, sur Ie plus leger soup~onet
presque dans exercice me-medu consulat, son cousin germain, Flavius
Clemens,personnage tout a fait decrie pour son inaction (contemptissi-
mae inertiae.. une allusion au respect du sabbat ?), dont il avait publi-
quement decide que les fils encore tout petits seraient sessuccesseurs...
Ce fut surtout ce crime qui precipita sa mort. »
6. Voir infra et notes 12 a 16 (temoignages d Eusebe, de Jerome, de
Georges e Syncelle).
7. Pour les extraits des Homelies, nous suivons la traduction de. A.
SIOUVILLE, es homelies clemen ines,Paris, 1933 (19912) pas de paral-
lele dans es Recogn.
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LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
celui-ci lui donna-t-il pour epouse ine femme de sa famine, de
laquene naquirent trois fils, deux avant moi »8;
-Horn. XII, 15, 2 (dans la bouche de Mattidie, la mere de
Clement) : «Je suis d une famine des plus nobles. Sur l ordre
d un souverain, epousai un homme de sa parente »9;
-Horn. XIV, 6, 2 (dans la bouche de Faustus, Ie peTe de
Clement, qui raconte sa propre histoire en l attribuant a un
ami): «M etant lie avec un homme de la famine de
C
10
esar...» .
II est vrai que Ie Clement des Homeliesestpresentecomme ie a
Tibere et non a Domitien, ainsi que l etait Ie Flavius Clemenshis-
torique. Mais cette divergence peut s expliquer soit par la source
romanesque utilisee (si l on admet qu elle connaissait e person-
nage de Clement ou son prototype), soit par des necessites or-
dre chronologique (puisque l histoire est censeese derouler peu
de temps apres a mort de Jesus, oTS e la mission supposeede
Pierre en Syro-Phenicie).De meme, Ie peTede Flavius Clemens,
T. Flavius Sabinus,s il etait bien parent de Vespasien son neveu,
pour etre exact), n avait pas epouse une de ses parentes par Ie
sang; c est son ils qui epousaune Flavia Domitilla, petite-fille de
Vespasienet niece de Titus et de Domitienll ; mais cette derniere
confusionest, somme oute, mineure.
B. La confession esdeuxClement.
La tradition chretienne selon laquelle Flavius Clemens etait
un chretien repose sur une selie de temoignages concord ants
concernant non pas Flavius lui-meme, mais son epouse Flavia
Domitilla. Les plus anciens se trouvent chez Eusebe, dans
I Histoire ecclesiastique abord :
Meme leg historiens etrangers a nolle doctrine n hesitent
pas a rapporter dans eurs histoires la persecution et leg temoi-
8. Parall. Recogn.VII, 8,2.
9. Parall. Recogn.VII, 15,2.
10. Parall. Recogn. X, 35,1-2.
11. Sur la gens Flavia, voir G. TOWNEND, Some Flavian Connections »,
The Journal of Roman Studies51, 1961,p. 58-62.T. Flavius Clemens (v.
60-95) est Ie fils de T. Flavius Sabinus III (30- ?), lui-meme neveu de
Vespasien,et (sans doute) d une Arrecina, dont la famille etait alliee a
Titus (qui epousa une Arrecina Tertulla); il est donc Ie cousin de Titus
et de Domitien. Son epouse,Flavia Domitilla III (64- ?) est la petite-
rille de Vespasienpar sa mere, Flavia Domitilla II, et la niece de Titus
et de Vespasien.
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68
B. POUDERON
gnages qui y furent rendus ; ils en ont indique la date tres
exactement, et ils racontent que la quinzieme annee de
Domitien (i. e. 95 AD), Flavia Domitilla, rille d'une sreur (E~
ci8EA<t>1lSEYovu'iuv) e Flavius Clemens, un des consuls de
Rome Ii cette date, rut elle aussi avec un tres grand nombre
d'autres, releguee dans l'ile Ponti a par punition, Ii cause du
temoignage rendu au Christ.12
De meme, dans a Chronique :
Bruttius ecrit que de nombreux chretiens subirent Ie marty-
re sous Domitien. Parmi eux, il y eut aussiFlavia Domitilla, la
niece du consul Flavius Clemens par sa sreur (Flavii Clementis
consulisex sorore neptem),qui rut relegueedans 'ile de Pontia,
parce qu'elle avait temoigne qu'elle etait chretienne}3
Son emoignage est d'ailleurs confirme par Jerome:
Les lies Pontiennes, qu'ont rendues celebres jadis l'exil
sous Domitien d'une femme d'un illustre renom, Flavia
Domitilla, pour sa profession de foi chretienne ; l'on y voit les
cellules dans lesquelles elle avait endure son long martyre...14
Et il semble aussi corrobore par l'archeologie, puisqu'on a
retrouve a Rome la trace d'un «cimetiere de Domitilla }}, vrai-
semblablement un terrain donne par la noble dame pour servir
de lieu de sepulture aux chretiens15,
12. Eusebe, HE. III, 18, 4 (trad. G. BARDY). L'expression EE a&>..<j>flS'
YEyovulav, « nee d'une s~ur », c'est-a-dire niece de Flavius Clemens
(alors que l'on gait que Flavia Domitilla III etait l'epouse de Flavius
Clemens), petit paraitre etrange. Selon Townend (art. cit., p. 58), la
source d'Eusebe devait la presenter comme la niece de Domitien, ou
bien encore camille la cousine (EEa&>..<j>1'])e Flavius Clemens. On petit
difficilement imaginer qu'il faille distinguer deux Flavia Domitilla,
toutes deux victimes de la politi que de repression religieuse de
Domitien, l'une epouse de Flavius Clemens et exilee a Pandataria (l'ac-
tuelle Ventotene) pour crime de judalsme, et l'autre niece de Flavius
Clemens et exilee a Pontia (l'actuelle Ponza) pour crime de christianis-
me ; la probabilite de cette double conversion est assez aible. II vaut
mieux supposer, soit que Flavia Domitilla, proselyte juive, s'etait
convertie au christianisme apres l'execution de son epoux, soit que leg
epoux etaient des judeo-chretiens, que chacun des deux camps pouvait
revendiquer camille etant des siens ces deux hypotheses peuvent etre
combinees, dans la mesure ou Flavia Domitilla, judeo-chretienne du
vivant de son maTi, a pu par la suite renoncer aux pratiques juives,
quand judalsme et christianisme sont devenus difficilement conciliables
(cf. note 16).
13. Eusebe, Chron. ad ann. 96 (HELM p. 192). Le denomme Bruttius
n'est pas autrement connu. Voir par ex. PRE, s. v. «Bruttius 2 ».
14. Jerome, Epist. 108,7.
15. ILCV (ed. E. DIEHL), n° 2150 : in clEmeterioDomit(illae).
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69
LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
Toutefois, il peut sembler etrange que la tradition chretienne
la plus ancienne n ait garde Ie souvenir que de l exil de
Domitilla et non celui de la conversion ou du martyre de Flavius
Clemens, un personnage que ses fonctions, ainsi que Ie role
auquel etaient appeles ses propres enfants, rendaient beaucoup
plus important. Aussi faut-il vraisemblablement prendre a la
lettre Ie temoignage de Dion Cassius aisant de Flavius Clemens
un proselyte juif, ou pour Ie moins un chretien judalsant -assez
judalsant pour etre suspect aux yeux de la grande Eglise, qui
aurait prefere l ignorer, et pour pouvoir etre considere par la
Synagoguecomme l un des siens16.
Or, il est remarquable de constater que Ie Clement du roman
pseudo-clement n apparait tantot comme un chretien, tantot
comme un juif. Voici les deux passagesdans lesquels Clement
est presente sansambigulte comme un proselyte uif :
-Horn. V; 26, 3 : « C est pourquoi, ayant appris d un certain
Juif a penser et a agir comme il convient aDieu... »17
-Horn. V, 28, 2: «Jusqu a present, apres avoir etudie a
fond les systemesd un grand nombre de philosophes, e ne me
suis Tallie a aucun, sinon a celui des Juifs. Car un negociant en
toiles de cette nation, etant venu resider a Rome, m a, par
suite d une heureuse encontre, exposeavec beaucoupde sim-
plicite la doctrine de l unite divine18,
16. C est, estime-t-on generalement, a malediction prononcee contre
les Minim (les heretiques) et les Nazareens les judeo-chretiens) dans a
Douzieme benediction des ShemoneEsre qui marque la rupture entre
Israel et l Eglise chretienne ; cette malediction aurait ete introduite par
Gamaliel II vers la fin du siecle et rendait impossible a double apparte-
nance. II n est donc pas exclu qu en 95 (date de l execution de Flavius
Clemens), a double appartenance fut encore possible. C est Georges Ie
Syncelle, Chronographia (vol. 1, p. 650, ed. Niebuhr) qui Ie premier fit
de Flavius Clemens un chretien. De nos jours, si Flavius Clemens est
range parmi les chretiens par la plupart des historiens proches du chris-
tianisme (par ex. en France P. PETIT, Histoire generale de l Empire
romain, I, Le Haut-Empire, Paris, 1974, p. 288-289: «coupables
d atheisme et de mreurs juives, c est-a-dire chretiens»), il est considere
comme un proselyte juif dans les milieux proches du judalsme : H. J.
LEON,The Jews of Ancient Rome, Philadelphie, 1960,p. 33-35 p. 252
M. STERN,Greek and Latin Authors on Jews and Judaism, Jerusalem,
1974-1984,I, n° 435,p. 379-384; E. SCHURER,he History of theJewish
People in the Age of Jesus-Christ (English version revised by G.
VERMES, . MILLAR,M. GODMAN), II, 1, Edinburgh, 1986,p. 163,note
58; Encyclopedia Judaica, s. v. «Flavius Clemens », vol. 6, Jerusalem,
1971,col. 1338 I. GAFNIet U. RApPAPORT).
17. Pas de parall. dans es Recogn.
18. Pas de parall. dans es Recogn.
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B. POUDERON
L'expressionqui designe e rnissionnaire uif «<un negociant en
toiles »), ainsi que I'indication du lieu de la conversion (Rome),
ne peuvent en aucun cas s'appliquer a la rencontre de Clement
avec Pierre, pecheur de profession, et qui eut lieu a Cesaree, ni
avec celie du missionnaire anonyme dont la predication
publique entraina Ie depart precipite du jeune Clement, mais
non sa conversion immediate19.Ce fecit de conversion est donc
Ie reliquat d'une des sourcesde l'Ecrit primitif, dont Ie protago-
niste etait un proselyte uif.
C. Le proto-Clement juif.
La seule explication possible est donc la suivante : Ie Clement
des Ecrits pseudo-clementinsest un personnagecomplexe, qui a
emprunte ses raits a plusieurs figures differentes, les lines histo-
riques (Clement de Rome, Flavius Clemens), les autres litte-
raires (Ie heros du roman de reconnaissances,'un des nterlocu-
tenTS du Dialogue apologetique juif). Nous qualifierons
desormaisde proto-Clement Ie ou les personnages itteraires qui
ont fourni leurs traits a la figure de Clement. Seul nons interesse
ici Ie proto-Clement juif, dont Ie fecit de conversion a ete integre
dans Ie roman pseudo-clementin.
Le proto-Clement juif provient necessairementde l'une des
deux sources uives de l'Ecrit primitif. La premiere est Ie roman
19. On peut bien sur chercher a identifier Ie marchand de toile juif avec
Ie missionnaire chretien de Horn. 1,7, 1 : «Un jour enfin de cette meme
annee, veTSa fin de l'automne, un homme se presenta en public criant
a haute voix : Romains, ecoutez Le Fils de Dieu est present en
Judee...» Mais leg deux figures ne se recouvrent pas du tout: Ie mis-
sionnaire chretien est presente comme un anonyme, qui fait profession
d'annoncer de lieu en lieu la bonne nouvelle de la venue du Christ, sans
qu'on puisse dire qu'il «expose une doctrine» a qui que ce soit; Ie pro-
pagandiste juif est un marchand, dont l'activite proselytique semble
occasionnelle, voire fortuite «<une heureuse rencontre»), et qui joue
en eifel aupres de Clement Ie role de l'initiateur. Dans leg Recogn. , 7,
1-15, e missionnaire chretien n'est autre que Barnabe, qui ne peut pas
non plus Sire identifie au marchand de toile de Horn. V, 28, 2. Et il
serait bien hasardeux de l'identifier a Paul, l'apotre des Gentils, qui
exer~a e metier de fabricant de tentes, notamment loTsde son sejour a
Corinthe, chez Aquilas et Priscille (Ac 18, 3), meme s'il n'est pas exclu
que Ie redacteur du roman ail eu alors a l'esprit celie activite profes-
sionnelle de Paul et y fasse une allusion pleine d'ironie. Sur Ie prosely-
tisme juif en milieu romain, voir en demier lieu la mise au point d' E.
WILL et C. ORRIEUX,Proselytisme uif ? Histoire d'une erreur, Paris,
1992.
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LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
qui a fourni la trame narrative des Home-lies et des
Reconnaissances. e roman, on ne peut en douter, etait d origine
juive20.En effet, de meme que la double conversion de Clement
traduit l origine juive des discussionsavec Appion, de meme la
double conversion des deux jumeaux traduit l origine juive du
roman de reconnaisances. es jumeaux, rappelons-le, se conver-
tissent deux fois. Une premiere fois au judalsme, a la suite de
leur adoption par la cananeenneJusta:
Une femme de la plus haute distinction, nommee Justa,
proselyte de la religion juive, nons acheta, nons garda comme
ses enfants et nons fit doDDeravec soin toute l education hel-
lenique. Ayant prig de la raison avec l age, nons aimames a
religion [la religion juive] et nons nons livrames avec ardenTa
l etude pour devenir capablesde discuter avec es hommes des
autres nations et de leg convaincre d erreur2l.
Ils se convertissent ensuite au christianisme petrinien, apres
un long passagedans a secte de Simon:
Cette femme [Justa], ayant embrasse e genre de vie pres-
crit par la Loi..., acheta et eleva deux enfants qui lui tinrent lieu
de fils. Ceux-ci, eleves des l en~anceavec Simon Ie magicien,
sont au courant de tout ce qui concerne Ie personnage. ...
Quand Zachee vint se fixer ici, ils Ie rencontrerent et furent ini-
ties par lui a la doctrine de verite [Ie christianismepetrinien]22.
De prime abord, les deux recits ne semblent pas se contredire,
et rien n empeche, en eIfel, que Ie redacteur de l Ecrit primitif
20. Cette hypothese, qui n est pas la plus repandue, a ete emise pour la
premiere fois par W. HEINTZE,op. cit., p. 42-51 (p. 45: «eine judische
Bekehrungsgeschichte »), puis reprise par W. BOUSSET, « Die
Geschichte eines Wiedererkennungsmiirchens », NGWG.PH, 1916, p.
469-551 (p. 533 : «die christianisierte Version eiDer udisch-hellenisti-
schen Novelle»), et plus recemment par J. WERNERT,«AbriB der
Entstehungsgeschichte », p. 214. L hypothese classique est celIe d un
roman palen (E. Rhode, W. Heintze, O. Cullmann, C. Schmidt, H. J.
Schoeps,F. Stanley Jones). Nous admettons qu il y eut un roman palen
a l origine du roman uif.
21. Hom. XIII, 7,3; parall. Recogn. VII, 32, 2 : (Latrones) vendiderunt
nos cuidam Judaeae,honestaeadmodum feminae,Justae nomine; quae
cum emisset, abuit loco filiorum, ita ut etiam Graecisnos litteris liberali-
bus adtentissimeerudiret. Ubi ourem adolevimus, etiam philosophorum
studiis operam dedimus, quo possemus eligionis divinae dogmata philo-
sophicis disputationibus adserentes onfutare gentiles.
22. Hom. 11,20, 1 et 3 ; 21, 1 ; parall. Recogn. VII, 33, 1 : Simoni ourem
cuidam mago qui nobiscum una educatusest. ..Nos interim, cum paene
jam deciperemura Simone,quidam collega domini mei Petri, Zacchaeus
nomine, monuit ne falleremur a mago, sed obtulit nos advenienti Petro...
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B.POUDERON
ail imagine cette succession e conversions.Toutefois, Ie person-
nage meme de Justa defiance l emprunt. En effet, la cananeenne
ne joue aucun role dans les Homelies, ou elle est remplacee
comme hotessede Pierre par sa fille Berenice, qui est une chre-
tienne fervente :
Selon l ordre de Pierre, qui no us avail envoyes, nous
all ames demander l hospitalite a Berenice, fille de la
ChananeenneJusta. Berenice nous accueillit avec un extreme
plaisir, temoignant a l envi un profond respect pour moi et une
grande affection pour Aquila et Nicete.23
II est donc vraisemblableque Ie personnagede Justa (ou plutot
celui de son prototype, la «proto-Justa» )24a ete emprunte au
romanjuif, qui etait lui-meme l adaptation a des ins apologetiques
d un roman palen de reconnaissances.Celie origine juive de la
trame narrative du roman pseudo-clementin e trahit par d autres
indices encore, et en tout premier ieu, par la reaction de Faustusa
la fin du roman, quand il apprend a conversionde sesenfants
«Faustus (...) ne veut plus voir sesenfants, parce qu ils sont
devenus uifs25.»
«Etre devenu uif », voila qui ne s applique guere au Clement
des Home-lies,qui certes s est fait baptiser par Pierre, mais qui
n est pas circoncis et n observe pas Ie sabbaf6.
La seconde source possible est Ie dialogue apologetique qui
fournit l essentiel de la discussion entre Clement et Appion.
23. Hom. IV; 1, 1-2; pas de parall. dans es Recogn.,qui ne connaissent
pas Ie personnage de Berenice, mais seulement celui de Justa (qui n y
apparait d ailleurs que dans un seul passage: VII, 32, 2, cite a la note
21). Pour cette etude, j ai utilise la Konkordanz zu den Pseudo-
klementinen de G. STRECKER,erlin, 1989.
24. Le personnage de Justa la Cananeenne est evidemment emprunte
aUKevangiles; toutefois, la Cananeennede Mt 15,21-28 et Mc 7, 24-30,
ne porte pas de nom. II semble evident que Ie personnagede Justa dans
Ie roman pseudo-clementin resulte de la fusion d une «proto-Justa»
empruntee au roman juif avec a syro-pheniciennedes evangiles.
25. Hom. XX, 22, 2 ; parall. Recogn. X, 64, 2 : ipso Faustiniano [Ie peTe
de Clement] deprecanteeum, pro eo quod nollet filios suos videre, quia
fudaei erant.
26. Les Hometies narrent Ie bapteme de Clement (XI, 35), mais ne font
evidemment aucune allusion a sa circoncision; d ailleurs il n est prati-
quement jamais fait reference dans les Hometies ni a la circoncision
(excepte en Diamart. I, qui represente sansdoute un etat plus ancien du
texte), ni au sabbat -ce qui peut paraitre etrange en milieu judeo-chre-
lien. En revanche,dans es Recogn. , 33 sq., l est fait allusion a la « cir-
concision du creur », line formule qui peut passer pour une condamna-
tion de la circoncision chamelle.
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LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
Nous avons deja remarque que son protagoniste etait presente
comme un proselyte de la religion juive ; il taut ajouter a cela Ie
fait que la haine d Appion (digne heritier de I Apion historique)
est dirigee contre Ie judalsme et les Juifs et non contre Ie chris-
tianisme et la personne de Jesus,doni il n est pas fait mention et
qui semblent exclus du debat. Citons les passageses plus carac-
teristiques :
-Horn. V, 2, 4 : «Je [Clement] n ignorais pas qu Appion
avait les Juifs en horreur au point d avoir compose contre eux
plusieurs opuscules27.
-Horn. V, 27,1: «N ai-je [Appion] pas raison de haIr les
J
.
f 28
UI s... »
-Horn. V, 29, 1 : «Appion, qui bait les Juifs sans motif..}9»
II est bien dificile de dire si Ie proto-Clement juif provient du
roman ou du dialogue. Je serais tente de dire: des deux. Mais
pas de la meme fa~on. En effet, les critiques ant deja fait remar-
quer que Ie roman de reconnaisancesdont derivait l Ecrit primi-
tit ne connaissaitpas Ie personnagede Clement. Cela se cons ate
a plusieurs indices, et plus particulierement au fait qu a plusieurs
reprises Faustus, Ie pete, et Mattidie, la mere, ignorent totale-
ment Clement et ne s interessent qu aux deux jumeaux, comme
s ils etaient leurs seuls enfants :
-Horn. XII, 9 ; XII, 15 et XIV, 6-7 : Mattidie, dans son
depart precipite pour Athenes, emmene avec elle les deux
jumeaux, mais laisse Clement, Ie plus jenne, aux soins de son
epOUX30.
-Horn. XII, 10; XIV, 7 : Faustus, quand il part a son tour
a la recherche de Mattidie et des deux jumeaux, abandonne
son fils, alors age de douze aDS, la garde de tuteurs31.
-Horn. XIV, 10: Faustus, ayant appris que les deux
jumeaux avaient peri, decide de renoncer au monde, alors
27. Pas de parallele exact dans les Reconnaissances,u Ie personnage
d Appion n apparait qu a la fin de l ouvrage : X, 52-64 (parall. Horn.
XX, 11-22; source: la Konkordanz de Strecker). Dans cette version du
roman pseudo-clementin, il n y a pas de deb at entre Clement et
Appion : Clement obtient seulementde Pierre qu il puisse rendre visite
a son ancien ami Appion (Recogn. X, 52, 3). En revanche, dans ce
me-mepassage, Faustinianus, Ie pere de Clement, fait aUusion a un
debat entre Clement et Annubion sur horoscope.
28. Pas de paraU. dans es Recogn.
29. Pas de paraU.dans es Recogn.
30. ParaU. Recogn.VII, 8, 3-4 ; VII, 15,4 ; IX, 33,4-5.
31. ParaU.Recogn. VII, 10,2.
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74
B. POUDERON
qu il devrait savoir qu illui Testeencore un enfant, Clement
abandonne seul a Rome32.
II n est pas jusqu aux jumeaux qui ignorent parfois l existence
de leur frere :
-Horn. XIII, 3 : Nicete et Aquila, comprenant au recit de
Pierre qui ils sont, courent embrasser eur mere, sans se sau-
cier Ie mains du monde de Clement, qui se revele pourtant du
meme coup leur frere 133
Toutefois, s il parait certain que Ie proto-Clement n apparaissait
pas dans e roman palen d origine, il est difficile de dire ce qu il en
etait dans sa version udalsee : les fils de Faustus y etaient peut-
etre deja au nombre de trois. Et meme si Clement ne figurait pas
parmi eux, il n en demeure pas moins que les deux jumeaux du
roman uif sont des prototypes de la figure du Clement des ecrits
clementins, dont ils sont devenuspour ainsi dire les doubles.
En revanche, Ie Clement des scenesavec Appion (Horn. IV a
VI) est l heritier direct de l un des protagonistes de l Apologie
juive. L existence de celie source est rendue manifeste par Ie
caractere propre aces charitIes, qui torment une digression
dans Ie fecit et dont Ie ton est tIes different de celui des autres
discours. Rappelons que Clement y est presente comme un
jeune noble de la famille de Tibere, converti au judalsme, qu il
defend contre les palens avec les arguments de la philosophie ;
or, il taut vraisemblablement imaginer l adversaire des palens
dans l Apologie juive sous ces memes traits. C est donc ce per-
sonnage,plus encore que les deux jumeaux du roman de recon-
naissances ou qu un hypothetigue troisieme frere), qui serait Ie
prototype du Clement uif de l Ecrit primitif34.
32. Pas de parall. exact dans eg Recogn.
33. Parall. Recogn.VII, 28, 5-6.
34. Bien que la controverse avec Appion gait absente des Recogn., qui
ne font apparaitre Ie personnagequ a la fin de l ouvrage (cf. note 27), il
ne fait guere de doute que I Apologie juive «contre Appion» etait
confiDe a la fois de l auteur des Hometies et de celui des
Reconnaissances.es preuves en sont d une part la presence du person-
nage d Appion dans eg Reconnaissances,t d autre part l allusion a tine
controverse avec Annubion sur l horoscope en Recogn. X, 52, 3. Sur
cette Apologie juive en forme de dialogue, voir W. HEINTZE, p. cit., p.
42-51 (p. 50 : «eine judische Disputationsschrift », «eine judische
Bekehrungsschrift »), qui la presente comme one dispute entre un eune
homme eleve dans a culture grecque, et converti au judalsme, et Ie trio
Appion, Annubion, Athenodore; O. CULLMANN, p. cit., p. 117-121 p.
121: «l interlocuteur d Appion, d ~nnubion et d Athenodore etait pri-
mitivement un juif, qui, dans l Ecrit primitif, a ete remplace par
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LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
D. Le proto-Clementuif et FlaviusClemens.
Une fois etabli qu il y eut un proto-Clement juif (et peut-etre
meme plusieurs), il devient tentant de chercher a l identifier
avec Flavius Clemens,qui, comme Ie Clement du roman pseudo-
clementin, etait a la fois un jeune noble romain, un proselyte uif
et un proche parent de l empereur.
Pour que pareille hypothese prenne corps, il taut s assurerque
la figure de Flavius Clemens proselyte a ete assez opulaire dans
les milieux juifs pour pouvoir etre appelee a un destin litteraire.
Or, il est bien possible qu il en ait ete ainsi. II existe en effet dans
la litterature talmudique un personnage, celui de Keti a bar
Shalom, que les exegetes du siecle dernier n ont pas hesite a
identifier a Flavius Clemens35.Celie identification n est plus
guere reprise de nos jours, sans doute faute de preuves suffi-
santes,mais elle offre un interet nouveau si elle est mise en rela-
tion avec Ie personnagede Clement.
Clement et ses deux freres »). W. Bousset>C. Schmidt et H. J. Schoeps
(op. cit., p. 42-43) situent la composition de cet ouvrage vers l an 100 de
notre ere, soit ires peu de temps apres l execution de Flavius Clemens.
O. Cullmann souligne a parente qui unit Flavius Clemens et Ie protago-
niste de l Apologie juive : « apologie juive connait line histoire ana-
logue sur la jeunessede l interlocuteur des trois philosophes.Nous pou-
vans donc admettre que c est de la que noire auteur a tire les details sur
l origine noble de Clement et sa passionde la philosophie» (op. cit., p.
132) « a parente de Clement avec a Camille mperiale parait avoir ete
soutenue pour la premiere fois par l auteur de l Ecrit primitif, ellelui a
peut-etre ete suggeree par l identification entre Ie philosophe juif de
l Apologie et Clement, et aussi par un rapprochement entre l eveque
Clement et Ie consul chretien Flavius Clemens, cousin de Domitien»
(p. 134).
35. Par exemple J. DERENBOURG,ssai sur l histoire et a geographie de
la Palestine, . 1, Paris, 1867,p. 334-340 a qui j ai emprunte la plupart
de mes references au Talmud); H. VOGELSTEINP. RIEGER,Geschichte
der Juden in Rom, Berlin, 1896,p. 74, note 2; et, plus recemment, R.
NEHER-BERNHEIM,e judaisme dans Ie monde romain, Paris, 1959,p.
119-120 (3 qui je suis directement redevable de l identification de
Flavius Clemens avec Keti a bar Shalom). Cette identification n est pas
reprise dans es editions modemes du Talmud (par ex. celles citees 3 la
note suivante), ni chez H. J. LEON, The Jews of Ancient Rome,
Philadelphie, 1960, ni dans l Encyclopedia ludaica de Jerusalem,1971
(art. «Flavius Clemens»; mais ct. s. v. « Keti a bar Shalom »)
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76
B. POUDERON
Le personnagede Keti'a bar Shalom apparait dans Ie Talmud
a propos d'une dispute entre Rabbi Haninah et l'empereur
Antonin, fils d' Asverus (vraisemblablement Caracalla)36.Keti'a
bar Shalom est alors evoque en ces ermes :
En verite, c'est ce qui a ete enseigne : ses lois, mais non
tOllSses rois ; tOllSsesprinces, mais non tOllSses officiers ; ses
lois, mais non tollS ses lois, a l'exclusion d' Antonin Ie fils
d' Asverus ; tOllSsesprinces, mais non tOllSsesofficiers, a l'ex-
clusion de Keti'a bar Shalom.
Que rapporte-t-on a propos de Keti'a bar Shalom? -Il
etait line fois un Cesar qui haissait es Juifs. Un jour il dit aux
grands de son Empire: Si un homme souffle d'un ulcere au
pied, doit-ille couper et vivIe (sans souffrance) ? au doit-ille
garder et avoir mal? lis lui repondirent : li doit Ie couper et
vivIe (sans souffrance) Alors Keti'a bar Shalom prit la paro-
le : D'abord, tu ne pourras lien contre eux tollS, car il est
ecrit : Ie vous ai dispersescomme les quatre vents des cieux
(Zach 2, 10). Que signifie ce verset ? Signifie-t-il qu'(Israel)
doit etre disperse aux quatre coins des cieux ? En ce cas, au
lieu qu'il soit ecrit : comme les quatre vents, l aurait ete ecrit :
aux quatre vents. Voici Ie seul sellSpossible: de meme que Ie
monde ne peut pas exister sans es vents, de meme Ie monde
ne peut pas exister sans Israel. Et qui plus est, votre Empire
sera appele l' Ampute. L'empereur lui repondit : Tu as tIeS
bien parle; cependant, celui qui tient tete au roi doit etre jete
dans a foumaise. Comme on l'emmenait, line matrone romai-
ne lui lan~a : Malheur au navire qui quitte Ie port sans avoir
paye l'octroi Aussitot il pratiqua sur lui sa propre circonci-
sion, puis s'ecria: J'ai paye l'octroi, je peux entrer au
paradis Comme il etait jete dans la foumaise, il dit : Tous
mes biens doivent revenir a R. Akiba et a ses amis. Ces
paroles, Rabbi Akiba les interpreta d'apres Ie verset suivant :
Ce sera a part d'Aaron et de ses enfants (Ex 29, 28) -ce qui
signifie qu'une moitie sera pour Aaron, l'autre moitie pour ses
fils. Alors line voix celeste se fit entendre: Keti'a bar Shalom
est assure de la vie eternelle dans Ie monde Ii venir: La-dessus,
36. Asverus est probablement l'empereur Severe, auquel cas Antonin
est Caracalla (Marcus Aurelius Antoninus Bassianus), e fils de Septime
Severe. D'autres passages du meme traite paTIent d' Asverus fils
d' Antonin (par ex. 10 a) ; on peut alors penser a Marc-Aurele (Annius
Verus), ils adoptif d' Antonin Ie Pieux, ou a Alexandre Severe, e fils de
Caracalla (Antoninus), ou a d'autres encore. Voir par ex. A. MISCHON,
The Babylonian Talmud, . 21, p. 19, note c 3. 11est evident qu'il yeut
fusion (ou confusion) de plusieurs empereurs en un meme personnage.
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77LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
Rabbi pleura et dit : Tel gagne son saInt en une heure, tel
autre apresplusieurs nnees37.
Comment est-il posssible d'identifier Ie grand personnage
doni il est question? Par la mention du don fait a R. Akiba et a
ses amis38.Si cette expressiondesigne eg quatre TannaYtes, lors
l'execution de Keti'a est necessairementsimultanee ou poste-
rieure au voyage des quatre TannaYtesa Rome. Ce voyage est
souvent mentionne dans Ie Talmud -sans que toutefois il y ait
accord sur l'identite des participants, ni meme sur sa date39.
37. Talmud de Babylone, Aboda Zara 10 b, traduit d'apres les versions
allemande (Der babylonische Talmud, ed. L. GOLDSCHMIDT, erlin,
1967, t. 9, p. 465-466) et anglaise (The Babylonian Talmud, trad. A.
MISCHON, ondres, 1988, ol. 21, p. 20).
38. Elle est reprise dans Talmud de Babylone, Nedarim 50 a-b : «R.
Akiba devint riche a la suite de six incidents (...) Sixiemement : de
Keti'a bar Shalom» (Seder Nashim, vol. 3, Nedarim, ed. anglaise de I.
Epstein, Londres, 1936). Voir la note 4 de la p. 157 «Keti'a b. Shalom
was condemned to death by a Roman emperor -probably Hadrian (?)
-for giving counsel against he emperor and in favour of the Jews. He
made R. Akiba his heir. Aboda Zara 10 b. »
39. Les savantsde la fin du siecle demier et du debut de ce siecle n'hesi-
taient guere a sillier Ie voyage des quatre Tanna ites Rome en 95, c'est-
a-dire ala veille de l'execution de Flavius Clemens: voir M. RAPpoPORT,
Litteraturblatt des Orients I, p. 194 sq. (qui rapproche Ie voyage des
TannaYtes Rome du passage e la comete de Halley « dans es demieres
anneesdu regne de Domitien», d'apres Horaiot 10 a); J. DERENBOURG,
op. cit., p. 336-340; H. VOGELSTEINt P. RIEGER,Geschichte erJuden n
Rom, Berlin, 1896,p. 28-29; E. N. ADLER, art. «Akiba hen Joseph»,
Encyclopaedia of Religion and Ethics, 1908 (repr. 1971),vol. 1, p. 274
«He went to Rome in the automn of 95 as one of an ambassyo dissuade
Domitian from a cruel edict, only stopped by the emperor's death. His
companions were Gamaliel, Eliezer hen Asaria, and Joshua (Erubin 84
and Sukka 23). ...At Rome he was n favour at the court of the Emperor
Nerva, where Flavius Clemens (sic) and Flavia Domitilla and Akylas ...
became proselytes.» Les contemporains soot beaucoup plus prudents.
Certes, N. OSWALD ccepte de situer Ie voyage des quatre TannaYtes
durant Ie regne de Domitien (art. «Gamlielll », TRE, vol. 12, Berlin -
New-York, 1984) «Mehrfach wird in rabbinischenQuellen von (mindes-
tens) eiDer Romreise des Gamlieill. berichtet, wobei ihn hauptsachlich
R. Josua b. Chananja, R. Eleasar b. Asarja und R. Akiba begleiteten
(Siillev § 43; bMak Ende u. 0.). Nach DevR 2, 24 solI es ihm dabei
gelungen sein, einem drohenden Planzu weltweiter Judenverfolgung
erfolgreich zu begegnen.Die fur eine solche Reisetatigkeit nfrage kom-
mende Regierungszeit des Domitian liefert dafur allerdings keinen
Anhaltspunkt, wenngleich dieser romische Kaiser dem Judentum zuge-
neigte Mitglieder seiner Familie hinrichten lieB. » En revanche,de nom-
breux autres refusentde dater Ie voyageavec precision, ou meme de faire
figurer R. Akiba parmi les participants; pour DOllS n tenir aux articles
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78
B. POUDERON
Un midrash rapporte Ie meme evenement sous une forme un
peu differente et Ie situe sansambigulte au COUTSu voyage des
Tannaltes a Rome:
Nos maitres R. Eliezer, R. Josue et R. Gamaliel etaient a
Rome lorsque Ie senat de l'empereur decreta qu'au bout de
trente jours, il n'y aurait plus de Juifs dans Ie monde. Mais un
des senateursde l'empereur, un homme pieux, viol aupres de
R. Gamaliel et lui revela la decision, qui affecta douloureuse-
ment nos maitres ; toutefois, cet homme pieux leur dit de se
calmer, car dans les trente jours, Ie Dieu des Juifs viendrait
certainement a leur secours. Apres vingt-cinq jours, Ie sena-
leur en parla a sa femme. Voici deja vingt-cinq jours de passes,
dit-elle. -II en Testeencore cinq, fut la reponse. Plus pieuse
encore que son maTi,elle reprit : N'as-tu pas une bague (pour-
vue de poison) ? Suce-la et meurs : les assembleesdu Senat
seront suspenduespendant trente jours, et Ie decret ne sera
pas applique. Le senateur l'ecouta, su~a (Ie poison de) la
bague et mourut. Quand les Rabbis apprirent la nouvelle, ils
allerent trouver son epouse pour lui faire leurs condoleances.
Puis ils lui dirent : Malheur au bateau qui. quitte Ie port sans
avoir pare l'octroi Elle se precipita alors dans a chambre de
son maTi et en sortit avec une boite dans laquelle elle avail
place Ie prepuce encore sanglant. Les Rabbis appliquerent
alors a son epoux Ie verset suivant : Les princes des peuples
s'unissent,c'est e peuple du Dieu d'Abraham,. aDieu sont les
pavois de a terre, l est exalteau plus haufo
Malgre la forme differente prise par ce second recit, qui parle
de sacrifice volontaire et non d'execution, il semble evident qu'il
rend compte du meme evenementque Ie premier. Toutefois, sur
certains points, il est plus precis: d'une part, l'affaire est situee
lors du voyage des Tannaltes a Rome et a la veille d'un intense
mouvement de persecution; d'autre part, la matrone romaine
est clairement designeecomme etant la femme du senateur. Or,
de diversesencyclc;>pediesecentes, . NEUSNER,rt. «Akiba ben Josef »,
TRE, vol. 2, p. 146-147,ne mentionne pas Ie voyage d'Akiba a Rome,
non plus que G. G. PORTON,rt. «Aqiva' ben Josef», The Encyclopedia
of Religion, . 1, 1987,ou que Particle anomyme «Aqiva ben Yosef» du
Dictionnaire encyclopediquedu juda~me de G. WIGODERadapt. froA.
GOLDBERG,aris,1993).
40. Midrash rabba II, Vaetchanan24, d'apres Pedition de H. FREEDMAN
et M. SIMON, ol. II, Deuteronomy, trad. J. RABBINOWITZ, ondres,
1939 (19613), . 51-52. Vne note precise: «The Romans had a rule that
if the Senate made a decree and before it was carried into effect one of
the senators died, the decree was annulled. »
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79
LAVIUS CLEMENS ET LE PROTO-CLEMENT JUIF
si R. Akiba n est pas mentionne dans ce midrash parmi les rab-
bis, sa presence est mentionnee dans d autres sources, par
exemple dans Makkot 24 a41.Si donc Ie voyage des Tannaites
s est bien deroule sons Domitien, comme l affirment un certain
nombre d historiens, nons disposerions d un faisceau d indices
permettant d identifier Ie noble romain jete dans la fournaise
(Aboda lara) ou Ie senateur qui offre sa vie (Midrash rabba)
avec Flavius Clemens, Ie neveu de Domitien. Ainsi serait prou-
vee la popularite du personnage, qui aurait bien pu en effet
devenir une figure litteraire.
Cette etude, bien sur, ne prouve pas que Keti a bar Shalom
s identifie a Flavius Clemens, ni meme que Ie ou les proto-
Clement juifs que nons avons distingues ont ete inspires par Ie
personnage de Flavius Clemens; mais elle rend quasiment cer-
taine la these que Ie Clement du roman pseudo-clementin avail
un ou plusieurs prototypes dans a litterature juive hellenistique.
Or, il est possible que ce ou ces «proto-Clement juifs» aient ete
inspires par la figure de Flavius Clemens -alias Keti a bar
Shalom. Cette hypothese est en tout cas a seule qui permette de
TeDdIecompte de la fusion de differents personnages,pour par-
tie historiques, pour partie litteraires, dans la personne de
Clement, eveque de Rome et compagnon de Pierre dans Ie
roman pseudo-clementin.
4L Talmud de Babylone,SederNezikin (ed. I. EpSTEIN, ondres, 19351),
vol. 4, p. 174: Makkot 24 a-b : «Long ago, as Rabban Gamaliel, R.
Eleazar b. Azariah, R. Joshua and R. Akiba were walking on the road,
they heard the noise of the crowds at Rome (on travelling) from
Puteoli4 », et la note 4 : «A great sea-port in Italy. (This was on the
occasion of their journey to Rome in the year 95 C. E.»> Comparer
avec Talmud de Jerusalem,Sanh. 7, 19 (11), 25 d 33-53 : voyage de R.
Eleazar, R. Josue et R. Gamaliel a Rome, sans mention de lapresence
de R. Akiba. .
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Flavio G. NUVOLONE
Universitede Fribourg
APOCALYPSE D ESD RAS
GRECQUE ET LA TINE,
RAPPORTS ET RHETORIQUEl
Ezra, the prophet, traveller in Tartarusand guest n Heaven,beseeches
mercy or the sinners,disputes with God, haggles his death over. This is
the content of some strange and misused texts (Greek Apocalypses of
Ezra and of Sedrach, Latin Vision of Ezra). We give here a review of
research,we introduce a key or understanding these exts and propose
solutions on particular problems in the context ofa global view.
Esdras, e prophete, voyageuraux Tartareset invite aux Cieux, mplo-
re misericordepour les pecheurs,dispute avec Dieu, marchande sa mort.
Tel est e contenu de plusieurs textes curieux, multiformes et maltraites
(les Apocalypses grecques d Esdras et de Sedrach, la Vision d Esdras
latine). Cetteetude dresseun etat de la recherche,exposeune clef de lec-
ture et propose des solutions ponctuelles dans le cadre d une vue d en-
semble.
Sous ce titre un peu provocateur, notre but est d introduire -
d une taCsOnncore sommaire -quelques pistes de lecture « croi-
see» de trois textes traditionnellement intitules Apocalypsis
Esdrae (BHG 603, CANT 340), Apocalypsis Sedrach (BHG
1621, CANT 342) et Visio Esdrae (CANT 341). Le lecteur
s apercevra d un changement de perspective relativement
1. Mes remerciements a tous leg amis qui m ont encouragea poursuivre
Ie travail de recherche apres Ie grave accident de sante que j ai connu et
malgre tine situation fortement compromise, ainsi qu a ceux qui m ont
aide a des moments et des titres differents dans des contextes explicite-
ment «esdriens ». Parmi ces demiers, Y. Bourquin, G. De Spirito, A.
Desreumaux, F. Dolbeau, D. Ellul-Durand, A. Frey, F. Morard, E.
Norelli, F. Gbrist, S. Perentidis, J.-C. Picard, P. Piovanelli, G. Poupon,
M. Stone, S. Voicu, et en generalles membres des equipes parisienne et
romande de l AELAC. A J.-D. Kaestli ma reconnaissanceparticuliere
pour son soutien fidele et genereux.
7, 1996,p. 81-108
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 82/295
82 F. G. NUVOLONE
important par *apport a la manierehabituelle d envisager es
ecritset eurs ~lations2.
1. La situationdesecrits.
Nous rappellerons d abord quelques jalons de la recherche
relative a nos textes, puis nous donnerons des indications som-
maires sur leur transmission manuscrite et sur leur etat textuel.
Cela nous amenera a isoler deux hypothesesmajeures -Ie carac-
teTe acephale de la Visio latine et Ie caractere morcele du texte
grec de l Ap. Esdrae -que nous verifierons a partir de la recen-
sion latine longue.
1.1. La recherche.
I
Dans une re~nte publication de Herbert Vorgrimler3, on peut
lire quelques remarques sur l Apocalypse d Esdras grecque et la
Visio latine. La premiere est qualifiee de mixture textuelle d ele-
ments uifs et chretiens ; sa composante uive serait a placer pro-
bablement au lie siecle, tandis que la reelaboration chretienne
daterait du ve siecle. Notre auteur, qui semble confondre cette
reelaboration et la piece latine, releve par ailleurs l absence de
toute discussio~avec Dieu dans l ecrit chretien.
II est regrett~ble que Vorgrimler non seulement soil peu clair,
mais surtout qu il ignore la publication en 1984 du texte latin
long, par les soins de Pierre-Maurice Bogaert; en eifel, ce texte
atteste pour la Ipremiere fois en latin la scene de la discussion
d Esdras avec )ieu.
2. Nous renvoyons Ie lecteur aux editions leg plus recentes : O. WAHL,
Apocalypsis Esdrae, Apocalypsis Sedrach, Visio Esdrae (Pseudepi-
grapha Veteris Testamenti graece 4), Leiden, 1977 notamment p. 25-
33, Ap. Esdrae; p. 37-46, Ap Sedrach p. 49-61, Visio Esdrae.De ce der-
nier texte, Wahl a edite deux recensions, moyenne et courte. On
trouvera une troisieme recension, breuissima, ans G. MERCATI,Note di
Letteratura Biblica e Cristiana Antica (Studi e Testi 5), Roma, 1901,p.
70-73, et une quatrieme recension, ongue, dans P.-M. BOGAERT, Une
version longue inedite de la Visio Beati Esdrae dans Ie Legendier de
Teano (Barberini Lat. 2318) », Revue Benedictine 94 (1984), p. 59-64.
Lorsque nous citons leg recensions atines, nous utilisons leg sigles sui-
vants: Visio B, pour la recension longue du manuscrit Barberinus ;
Visio L, pour la recension moyenne du manuscrit de Linz; Visio Cet.,
pour la recension courte, conservee dans «les autres manuscrits »,
temoins d un legendier autrichien; enfin Visio V, pour la recension
breuissima, onn~e grace a un manuscrit du fonds latin du Vatican.
3. Geschichteder Holle, Mtinchen, 1993,p. 113-114.
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83
POCALYPSE D'ESDRAS GRECQUE ET LATINE
,.
Alors que son but etait de dresser une vaste synthese sur I'en-
fer, Vorgrimler a traite hativement les ecrits qui nous interes-
sent. Pourtant, leur etude n'a cesse de progresser depuis mainte-
nant deux siecles, tant dans Ie domaine des editions que dans
celui des traductions ou des analyses.
Dans un premier temps, la recherche s'etait limitee a quelques
discussions sur la nature du texte manuscrit ; I'interet etait focalise
sur Ie IVe livre d'Esdras, et les autres ecrits attribues a Esdras n'in-
tervenaient que pour illustrer I'influence de ce dernier -comme
cela sera encore Ie cas, a une date plus recente, dans les ouvrages
de James-Bensly et de Violet. Les choses serieuses ont commence
avec C. Tischendorl; en 1851, il n'a pas eu de peine a montrer I'in-
teret du texte de l'Apocalypse grecque d'Esdras, dans sa recension
d'un ouvrage de F. Liicke4; en 1866, il en a fourni I'edition dans Ie
recueil des Apocalypses Apocryphae-'. Mais il faudra attendre plus
de cent ans (1977) pour que de nouvelles editions de ce texte
voient Ie jour, par les soins d'Otto Wahl6 et par ceux de D. EUul-
Durand, dans une these achevee la meme annee7.
Quelques annees apres l'Apocalypse grecque d'Esdras8, en
1871, on a vu paraitre, en appendice a une longue etude sur la
Vision de Tondale, I'editio princeps de la Visio Esdrae latine, sur
la base d'un manuscrit du monastere de Heiligenkr~uz9. Celie
-
4. Versuch einer vollstiindigen Einl(itung in die Offenbarung des
Johannes und die apokalyptische Litter~ iiberhaupt, Bonn, 18482; a
recension de C. TISCHENDORF paru dans Theologische Studien und
Kritiken 24 (1851),p. 419-456.
5. ApocalypsesApocryphae Mosis, Esdrae,Pauli, Iohannis,"item Mariae
dormitio, additis Evangeliorum et actuum Apocryphoruf1l supplementis,
Leipzig, 1866 (reimpression Hildesheim 1966) ; Prolegomena p. XII-
XIV; Apocalypsis Esdraep. 24-33.
6. cr. note 2.
7. L'Apocalypse grecque d'Esdras, Thesepreparee sous la direction de
Francis Schmidt, Ecole Pratique des Hautes Etudes, ve section, Paris,
1977; Ap. Esdrae, exte grec p. 13-39, rad. p. 40-54 Ap. Sedrach, exte
grec p. 304-325, rad. p. 326-338; Visio Esdrae, at. aUKp. 289-297, rad.
aUKp. 298-303. Madame Ellul s'est basee sur deux manuscrits pour
l'edition de l'Ap. Esdrae,contre un seul chez Tischendorf; pour l'Ap.
Sedrach elle a edite completement Ie ms. d'Oxford, dont James avait
omis la premiere partie (homelie d'Ephrem), et a egalement collation-
De, pour cette premiere partie, un manuscrit d' Athenes ; pour la Visio
Esdrae,elle n'a repris que Ie seul temoin de Mercati.
8. Cet ordre de parution ne sera pas sans consequences; l influencera
la chronologie erudite, qui Ie conservera.
9. Adolfo MUSSAFIA, «Sulla visione di Tundalo, appunti », in
Sitzungsberichteder Philosophisch-Historischen Classeder Kaiserlichen
Akademie der Wissenschaften 7 (1871), p. 157-206; Appendice p. 202-
206, avec transcription du manuscrit Heiligenkreuz in 11, f. 272v-273,
due au bibliothecaire G. A. Neumann.
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84 F. G. NUVOLONE
publication, qui est restee ignoree, sera suivie, en 1901, d'une
nouvelle edition diplomatique par leg goingde G. Mercati1°, ra-
vail fort intelligent qui exercera son influence jusque dans leg
annees quatre-vingt. L'ouvrage d'G. Wahl (1977) fera alors
connaitre deux recensions de la Visio latinell et provoquera,
sans e vouloir, la parution d'un inedit de grande importance: la
recension ongue12.
Une vingtaine d'annees apres a premiere edition de la Visio,
l'eminent apocryphologue M. R. James publie l'editio princeps
du troisieme texte qui nous interesse, 'Apocalypse de Sedrach13.
En 1892,Jamesavait deja releve leg parentes entre l'Ap. Esdrae
et Ie Testament 'Abraham, et en 1895, l va revenir sur leg liens
thematiques avec Ie corpus d'Esdras, dans l'introduction a son
edition de W Esdras14.
La voie a ete ainsi progressivementouverte a la traduction des
textes en langues modernes et a diverges etudes, de valeur fort
inegale.
En allemand, il y a eu d'abord leg traductions de Paul RieGler
en 192815,uis, 50 ans plus lard, celIe de Ulrich B. Miiller6. Les
i
i
10. Ct. note 2. J
11. Ct. note 2. Lune des deux recensions est editee sur la base d'un
unique temoin, le,ms. de Linz (Visio L), alors que l'autre est representee
par les deux man~scrits deja edites par Mussafia et Mercati. Une annee
plus lard, Wahl a complete l'apparat en publiant une simple collation
d'autres temoins du texte court (Visio Cet) «Vier neue Textzeugender
'Visio beati Esdrae' », n Salesianum40 (1978),p. 583-589.
12. Ct. note 2. P.-M. Bogaert assortit son edition d'un Lexique des prin-
cipales occurrences dans les trois recensions atines, qui est Ie pendant
de ce qui existait pour les textes grecs d. W. GOMBOCZ,Apocalypsis
Esdrae », in Chr. A. WAHL, Clauis Librorum Veteris Testamenti,
Apocryphorum philologica, lndicem verborum in libri pseudepigraphis
usurpatorum adiecit JohannesBaptista BAUER,Leipzig, 1853 reimpres-
sion : Graz, 1972),p. 799-814et M. KERTSCH,pocalypsis Sedrach,aux
p. 815-828 y rajouter les corrections de O. WAHL, op. fit. [note 2], p. 35
et 47-48).
13. Montague Rhodes JAMES,«On the Apocalypse of Sedrach », in
Apocrypha Anecdota, a Collection of Thirteen Apocryphal Books and
FragmentsNow First Edited rom Manuscripts (Texts and Studies II, 2),
Cambridge, 1893,p.127-137 (introd. p. 127-129; exte p.130-137).
14. Ct. respectivement The Testament f Abraham (Texts and Studies II,
2), Cambridge, 1892 (reimpression : Nendeln 1967), p. 64.68 et The
Fourth Book of Ezra (Texts and Studies III, 2), Cambridge, 1895, p.
LXXXVI-LXXXIX.
15. P. RIESSLER,ltjiidisches Schrifttum auj3erhalbder Bibel, Freiburg -
Heidelberg, 1928, reimpression : Heidelberg, 1966) «Apokalypse des
Esdras »; « Apocalypse des Sedrach»; «Gesicht des Esdras»;
« Erlauterungen », p. 126-137.156-167.350-354.1273-1274.1291.
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85
POCALYPSE D ESDRAS GRECQUE ET LAllNE
traductions anglaisesont ete Ie fait d A. Walker en 187017 t plus
recemment des collaborateurs de l ouvrage collectif dirige par J.
H. Charlesworth en 198318 t de H. F. D. Sparks en 198419. n
fran~ais, eg textes sont traduits dans la these de Mme D. Ellul-
Durand2°-,One traduction espagnoleest annonceedepuis un cer-
tain temps deja21.
Au chapitre des etudes, si l on met a part leg ntroductions des
travaux que nous venons de citer et quelques courtes mentions,
il faut attendre la publication en 1970 du repertoire-manuel des
pseudepigraphesde l Ancien Testament par Ie PeTeDenis pour
avoir un premier regard d ensemble sur la litterature attribuee a
Esdras22.
En 1973 et 1976, Peter Dinzelbacher a etudie Ie theme des
ponts de l au-dela au moyen age, en particulier dans la Visio
Esdrae, ce qui lui a fait decouvrir leg parentes saisissantes ntre
cet ecrit et la Visio Alberici du Mont-Cassin, du debut du Xile
16. U. B. MOLLER, Die griechischeEsra-Apocalypse », n Apocalypsen
(Jtidische Schriften aus hellenistisch-romischerZeit 5), Gtitersloh, 1976,
p. 85-102; Ie traducteur a mis a profit les collations et conjectures que
lui avait communiqueesO. WaW.
17. A. WALKER,Apocryphal Gospels, Acts, and Revelations (Ante-
Nicene Christian Library 16), Edimburgh, 1870,p. 468-476, vec version
anglaisede l Ap. Esdrae.
18. Michael E. STONE, Greek Apocalypse of Ezra (Second to Ninth
Century A.D.). A New Translation and Introduction », in The Old
TestamentPseudepigrapha , London, 1983,p. 561-579;J. R. MUELLER
-G. A. ROBBINS,« ision of Ezra (Fourth to Seventh Century A.D.), A
New Translation and Introduction », ibid., p. 581-590; S. AGOURIDES,
«Apocalypse of Sedrach (Second to Fifth Century A.D.), A New
Translation and Introduction », ibid., p. 605-613.
19. «The Apocalypse of Esdras » ; «The Vision of Esdras» ; «The
Apocalypse of Sedrach », in The Apocryphal Old Testament,Oxford,
1984,p. 927-941,943-951, 53-966.
20. Cf. note 7. Une nouvelle traduction annotee des trois pieces est pre-
vue pour Ie premier volume des «Ecrits apocryphes chretiens» dans a
collection« Pleiade », par les soins de D. Ellul et F. G. Nuvolone.
21. Cf. A. DIEZ MACHO,«Apocalipsis de Esdras (griego), Apocalipsis
de Sedrach, Vision de Esdras », in Introduccion general a los Apocrifos
del Antigno Testamento,Madrid, 1984, p. 281-283; Ie ve tome de la
serie (1987), dernier paru, signalait Ie deces du Directeur.
22. Cf. A.-M. DENIS, «L Apocalypse grecque d Esdras» ;
«L Apocalypse de Sedrach» «Les Fragments grecs de l Apocalypse 4
Esdras », in Introduction aux Pseudepigraphes recs d Ancien Testament
(Studia in Veteris Testamenti Pseudepigrapha 1), Leiden, 1970,p. 91-
99.194-200.On rapprochera de cette publication la plus recente Clavis
Apocryphorum Novi Testamenti, cura et studio Mauritii GEERARD
(Corpus Christianorum), Turnhout, 1992,p. 214-215 nOs 40-342).
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86 F. G. NUVOLONE
siecle ; il a repris sesconclusionsdans une anthologie et une syn-
these publiee en 198923.
La these de Madame Danielle Ellul-Durand (1977) comporte
pour la premiere fois une analyse poussee de l Apocalypse
d Esdras 24. On peut affirmer la meme chose -mais de fa~on
plus nuancee -de la presentation des textes figurant dans Ie
recueil de Charlesworth.
Les etudes de Robert Kraft (1979), Michael Stone (1982) et
Glickler Chazon (1986) offrent des analysesd une valeur sure, a
partir de perspectivesvariees. La premiere porte un regard d en-
semble sur les documents relatifs a Esdras, la deuxieme etudie
l evolution de la figure du prophete, et la troisieme s interessea
un motif particulier, celui du fetus de mourir, de MoIse a
Sedrach, en passantpar Abraham et Esdras25.
II est egalement question des Apocalypsesou de la Visio dans
les publications de Luigi Moraldi (qui s exprime dans des ermes
ires proches de ceux qu utilisera Vorgrimler en 1993), Stavros
Perentidis (1985), Jerome Baschet (1993) et Claude Carozzi
(1994 26.
23. Ct. Die Jenseitsbriicke m Mittelalter, Wien, 1973,p. 27-36; «Die
Vision Alberichs und die Esdras-Apokryphe », in Studien und
Mitteilungen zur Geschichtedes Benediktiner-Ordens87 (1976), p. 435-
442; Mittelalterliche Visionsliteratur: Eine Anthologie, Darmstadt, 1989,
p. 76-81.
24. Ct. op. cit. (note 7), p. 55-288.
25. Ct. Robert A. KRAFT, « Ezra Materials in Judaism and
Christianity», in Aufstieg und Niedergang der romischen Welt II,
Principat 19, 1, Berlin, 1979, p. 119-136; Michael E. STONE, The
Metamorphosis df Ezra: Jewish Apocalypse and Medieval Vision », in
Journal of Theological Studies N. S. 33 (1982), p. 1-18 (voir spec. p.
17s); E. GlicklerCHAzoN, «Moses Struggle for his Soul: A Prototype
for the Testament f Abraham, the Greek Apocalypse of Ezra, and the
Apocalypse of Sedrach», in The Second Century 5 (1985/1986),p. 151-
164.
26. Ct. Luigi MORALDI,L aldila dell uomo nella civilta babilonese,egi-
zia, greca, latina, ebraica, cristiana e musulmana con il testo
dell Apocalisse di Paolo, Milano 1985,p. 162-165; (trad. allemande:
Nach dem Tode. Jenseitsvorstellungen von den Babyloniern his zum
Christentum, Zurich, 1987); Stavros PERENTIDIS, La jonction de
l Apocalypse de Sedrach avec I Homelie sur l amour d Ephrem », in
Journal of Theological Studies N. S. 36 (1985), p. 393-396; Jerome
BASCHET, es justices de l Au-dela. Les representations de l enfer en
France et en Italie (XIIe-xve siecle) Bibliotheque des Ecoles Fran~aises
d Athenes et de Rome 279), Rome, Ecole Fran~aisede Rome, 1993,p.
104-105; Claude CAROZZI, e voyagede l dme dans au-dela d apres la
litterature latine i(ve-XIIIe siecle) (Collection de l Ecole Fran~aise de
Rome 189), Rome, 1994,p. 610.
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87
POCALYPSE D ESDRAS GRECQUE ET LATINE
Manuscrits.
Cet aper<;u sur l etat de la recherche evoque l image d un
chantier encore ouvert. Si I on considere maintenant la base
manuscrite des ecrits qui nous interessent et leur etat de conser-
vation, la situation n est pas tIes encourageante. Pour les deux
textes grecs et Ie texte latin long, les manuscrits sont fort tardifs
(xye et XYIe s.) ; pour les autres recensions atines, les temoins
les plus anciens sont medievaux (entre Ie xe et Ie Xye s.); les
formes textuelles conserveessont fragmentaires, transmisessans
grand soin, corrigees ou refondues. Cet etat de chosesexige que
l on examine l ensemble du dossier avec attention, tant du point
de vue textuel que du point de vue redactionnel.
II est necessairede faire quelques reflexions sur l etat de nos
textes, en lien direct avec certaines des recherches anterieures.
Textemorcele / texteacephale..deux remarquesa exploite7:
Dans son analyse de l Apocalypse grecque d Esdras, Danielle
Ellul-Durand releve qu elle n a pas pu deceler un plan logique,
mais plutot «une succession e fragments dont les themes s en-
trecoupent et s entremelent, ce qui met en relief l une des carac-
teristiques majeures de ce texte qui est e morcellement »27.
D autre part, Ie premier editeur de la Visio latine, Adolfo
Mussafia (1871), confronte a un texte dont Ie debut etait pour-
taut deja retouche, faisait la remarque suivante : «la composi-
tion semble etre acephale28 .
Ce soot la deux observations nteressantes,qui semblent rou-
vel aujourd hui confirmation grace a l analyse du texte latin
long, transmis par Ie manuscrit Barberini et publie par Ie PeTe
Bogaert.
Latin acephale?
De fait, Ie debut du texte latin dans la Visio L (le~on proche
dans la Visio B) a la teneur suivante : «Apres qu Esdras eut
adressesa priere au Seigneur, l dit : ». Cette allusion a une prie-
re d Esdras laisse supposer qu une portion du texte qui prece-
dait a ete omise; or l Apocalypse grecque d Esdras nous a
conserve es preliminaires de la vision d Esdras et de sa discus-
sion avec Dieu. Ces preliminaires soot racontes par Ie prophete
lui-meme a la premiere personne, et ils rattachent Ie fecit a une
27. Gp. fit. (note 7), p. 208.
28. Gp. fit. (note 8), p. 202.
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88
F.G. NUVOLONE
chronologie et a des symboles qui font d Esdras un nouveau
Moise; la vision prend place Ie jour de la fete des Semaines,ou
Ie jour du renolllvellementde l alliance, et est datee de la trentie-
me annee, comtne au debut de W Esdras (III, 1 de la numerota-
tion actuelle), dans un passagequi inaugure la lamentation du
prophete a propos de la situation des Juifs. On notera que, dans
la Visio, a lamentation du prophete concerne tous les humains,
ce qui semble etre aussi l idee sous-jacente du grec, bien que
celui-ci parle des « chretiens ».
II est probable que ce cadre introductif a cessed etre compris
et a alors ete ollis. Les referenceschronologiques qu il contient
ne sont certes pas explicitees, mais elles correspondent bien aux
paralleles traces entre Esdras et Moise dans la partie finale de
l Apocalypse et conservesaussidans e texte latin long.
Relevons encore que la Visio Cet a sans doute per~u Ie carac-
teTe equivoque de la phrase initiale ; elle l a remplacee par l ex-
pression « Esdras pria la Seigneur en disant » et a fait disparaitre
du meme coup toute trace de l amputation.
lndice d un textemorcele
« je » / « il »,
Interessons-nous maintenant a la remarque de D. Ellul-
Durand: Ie morcellement topographique, thematique et narratif
de l Apocalypse grecque.
On peut aujourd hui faire Ie constat suivant : l alternance
recurrente en grec entre la premiere et la troisieme personne
dans les references au personnage d Esdras correspond a une
bipartition dans Ie texte latin long; dans les § 1b a 6929,e fecit
est a la premiere personne, du § 70jusqu a la fin (§ 117), il est a
la troisieme petsonne.
La comparaison de ces deux sections du texte latin long avec
l Apocalypse gtecque permet de faire une seconde observation
interessante.Mis a part les passages sseznombreux oil Ie latin -
ou Ie grec -n a pas d equivalent dans autre langue, on constate
dans la plupartdes portions paralleles une bonne correspondan-
ce entre leur aontenu thematique, la localisation des faits et
On remarquera cependant que la limite n est pas parfaitement
nette. Au § 69, ~s recensions atines ne soot plus representeesque par
la seule recension ongue. Les sections qui precedent et qui suivent res-
tent lacuneuses i; de plus, la conclusion des recensions breves a ete
reamenagee enfin, la recension moyenne, representee par Ie manuscrit
de Linz, ne reprend malheureusementpas toujours avec fidelite Ie dis-
COUTS la premi~re personne, alors que la recension breve, qui derive
de Ie recension i1oyenne,simplifie Ie probleme en introduisant partout
la troisieme personne.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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89
POCALYPSE D ESDRAS GRECQUE ET LATINE
I emploi de la premiere ou de la troisieme personne. Les
quelques exceptions a cette regie s expliquent facilement par les
procedes redactionnels caracterisant un ou I autre texte.
En s appuyant sur cet important constat, il est permis de
considerer Ie texte actuel de I Apocalypse grecque comme Ie
resultat d un exercice de rhetorique sacree: Ie redacteur de ce
texte a voulu composer un ouvrage nouveau a partir d elements
plus anciens, qu il a demembres d une fa~on tIes particuliere. II
s agit certes la d une simple hypothese, mais qui n est pas sans
analogie ailleurs. Par exemple, quelle theorie aurait-on elaboree
pour expliquer la genesede I un des textes du Papyrus Bodmer
XXIX publies par Ie professeur Andre Hurst, si la piece avail
ete copiee et diffusee sans I inscription initiate -« Ce que pour-
fait dire Cain apres avoir tue Abel» -qui la caracterise claire-
ment comme un exercice de rhetorique30 ? Pour reconstituer
aujourd hui la genesede telles pieces, nons n avons pas d autre
moyen, a defaut de tout element extrinseque, que la seule analy-
se interne et comparative. Pour cette analyse, tous les indices
sont dignes d attention.
2. Les rapports entre Ie latin et Ie grec.
Les deux points qui viennent d etre releves coincident avec
des hypotheses emises par nos predecesseurs; a pertinence de
leurs remarques est d autant plus frappante qu ils ne disposaient
pas encore des elements que nous fournit aujourd hui Ie texte
latin long. A partir de la, nous aimerions formuler quelques sug-
gestions concernant es relations entre Ie latin et Ie grec. Compte
tenu du procede redactionnel que nous avons decele grace au
texte latin long, comment faut-il interpreter les autres diver-
gences qui caracterisent les rapports entre Ie grec et Ie latin?
Chacune de ces divergences merite d etre soigneusementeva-
luee. Voici, a titre d exemple, l analyse de quelques cas.
30. II Y a quelques temps, nails avons nous-meme reconstitue la genese
d un texte -certes plus tardif et d un tout autre caractere -, qui avail
d abord ete edite camille line oeuvre authentique et ancienne,mais qui
s est avere etre line compilation tardive, grace a l analyse de manuscrits
et de documents d archives qui a permis d en identifier les sources et
meme d en retrouver line etape intermediaire oul assemblage etait
declare et signe. Voir F. G. NUYOLONE, II Compendiolum Jonae, il
Sermo de Charitate Dei ac proximi, il viaggio di Colombano aRoma e
l aggiogamento dell orso », in Archivum Bobiense 4 (1982), p. 91-165.
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F.G. NUVOLONE
2.1. Meilleur etat du latin?
Il n'est naturellementpas question d'affirmer que Ie grec deri-
ve du latin, ni que l'etat actuel du latin dans son integralite est
chronologiquement anterieur a l'Apocalypse grecque. Mais la
constatation que nous avons faite a propos du caractere « artifi-
ciel » du texte grec confere un a priori favorable au texte latin, et
nous aide a identifier certains cas oil ce dernier est clairement
meilleur que legrec.
2.1.1. Description de ['Antechrist.
Le texte grec et Ie texte latin long offrent deux descriptions de
l' Antechrist. Or C. Tischendorl avait deja releve, en 1866,que la
description de l'Apocalypse grecque correspond de pres a celIe
qui figure dans a IereApocalypseapocryphe deJean31.
La synopse figurant dans la Table permet de comparer trois
textes : l'Ap. Iohannis I, selon l'edition de C. Tischendorl (1866)
basee sur une dizaine de temoins (quelques le~ons soot sujettes
a discussion,mais sansque nous puissionsnous prononcer ici sur
leur valeur) ; l'Ap. Esdrae, selon l'edition de O. Wahl; la Visio,
texte latin longedite par P.-M. Bogaert.
La maniere clont la description de l' Antechrist vient s'inserer
dans l'Ap. Esdtae temoigne d'un travail redactionnel complexe.
Celie description prend place en effet au COUTSu voyage
d'Esdras dans ~s parties inferieures du Tartare (IV; 4 ss), voyage
qui est ui-me~e composea l'aide de materiaux assezproches de
ceux de la Visio. Apres un episode commun32,'Ap. Esdrae pre-
sente une scene originale : Esdras est conduit «au Nord» et y
voit un homme retenu par des barres de fer -dans cet episode,
Ie visionnaire parle a la premiere personne, comme c'est aussi e
cas dans a partie qui precede dans a Visio. La situation du per-
sonnage semblt deja dependre de l'Ap. Iohannis33, t en meme
temps elle s'accorde, par son caractere pre-eschatologique,avec
la perspective «finale » decrite dans a Visio.
31. Ct. op. cit. (note 5), p. 29. L'eminent erudit a edite Ie texte de la [ere
Apocalypse apocryphe de Jeandans ce me-me olume, aux p. 70-94.
32. Ct. Ap. Esdrae IV; 22-24 et Visio B 19-22.
33. Dans ce sen$, voir aussi la teneur de ce passage dans la version
armenienne (selon la traduction communiquee par Jean-Marc
Rosenstiehllor.s du Colloque sur la litterature apocryphe chretienne de
mars 1995) «Eqoute, juste Jean Apres tout cela apparaitra I'Homme
de l'Iniquite, Ie fils de la Perdition, Ie Negateur, 'Intidele emprisonne
dans es tenebres~qui est appele Antichrist. »
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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,
APOCALYPSE D'ESDRAS GRECQUE ET LATINE 91
Table
ApIohannis 6-7 ApEsdrae IV, 25-32 [Wahl] Visio Esdrae B 71.73.75-76
[Tischendorf)
6. Kat lTaALv EIlTov' KiJPlE,
alTO TOTE TL ~EllilS' lTOlEll>
Kat i\Koooa </xI vf)S'XEyolJcrT)S'
~Ol' QKOOOOV, BLKalE
'1I.xivVI]' 25.Kat amlyay6v ~E ElTt
[3oppav,
T6TE </>av1']UETal Kat tBov EKEl Qv6pwlTOV 71. Ante paruum soluitur
b apVl]T1')S' ulB1)po1S' ~oXAolS'
Kat E~oplU~EVQS' v TfI OKoTLlq, KaTEx6~EVOV.
b XEy6~EVOS'aVTLXPlaTOS'Antechristus
cum merore ac temptacione
populi
26. Kat ElTE~TT)Ua'
TLS' EUTlV OOTOS'
Kat EIlTEV ~Ol' et dicet
27. 01rr6S' EaTlV b ).ly(l)v' se predicaTe in nomine meo.
'Eyw Et~l b VlOs- TO\) 6Eo\)
73. ..,De serpente fadt piscem,
Kat TOW >J.80VS'dpTOVS' de petra panem,
lTOlfpaS'
Kat TO f&up OLVOV. de arena aquam...
Kat lTaALV EIlTOV' 28.Kat EtlTEV b lTPO<Pl'jTT)S" 75. Et dixit Exdra :
KilPL C, KUPL C,
a1TOKaA II/I6v J1.DLTOTalT6S' yvwpLu6v J1.°L lTol0V uxil~a. Quam similitudinem
IO'TLv. IO'TLv, habet
ipse Antechristus
Kd'Yw lTapa'Y'YE).ALIJ ut annuntiem
TO 'YEVOS'TWV dv6ptfm(l)V, liIiis hominum ?
7.Kat i\Koooa </>(I)vf)S' Eyou- '(va ~1'llTlUTEUU(I)UlV aUTc'\ .
GT)S' OL' 29. Kat £tlTEv J1.°L' 76. Et dixit Dominus:
TO Cf13os-OU 1TfX)(Jlff1TOUUrou To CT8QS' OU 1TPOUW1TOU Frons illius
«xt>w&S'. al TPLXES'TflS' < alta est multum,
KE</>aAflS' UTO\) Qf.Elal cl)S' caput longum habet,
[3I.A1). Ol IS</>PVES'UTO\) > aliTou supercilia pilosa
£{}O' Ctypou £{}O' Ctypou' habebit in unum,
0 6<f>(JaAJ1.0s0liTou 0 &fLOso 0 0cp8aAJ1.f)5"liTou 0 8IfLOS' oculi eius
£lJSO acm'lp 0 1TplJ)tava- £lJSOcm'lp Tfii 1TplJ)tava- sicut Lucifer,
TE>J.i1JV, TE>J.i1JV,
Kat 0 ET CPOS'IJS'AEOVTOS'. Kat 0 ET CPOS' uciAEVTOS" nasus illius Baratrum erit,
TO 0'T6J1.aaliTou £lJSOTijxvv 30. TO 0'T6J1.a aVTOu 7TijXLS" laber eius desuper
J1.lav, J1.la'
or 686VT CS'aliTou or 686VT CS' aVTOu
U1TL(JaJ1.LaLOL, U1TL(JaJ1.LaLOL' subtilior,
or 8aKTUAOL aliTou £lJSOpt:'- 31. or &IKTUAOL aliTou £lJSO
1Tava, 8pt:'1Tava' genuculum non habebit.
TO lXIIOS' TWV 1To&1V aliTou TO lxvOS' TWV 1To&1V aliTou
U1TL8aJ1.WV00, U1TL8aJ1.WV00'
Kat CiS' TO J1.ETUJ1TOVliTou Kat CiS' TO J1.ETUJ1TOVliTou
ypat/>1'/ avrlXPLO'TOS" ypat/>Jj' aVTlXPLUTOS'.
E'UJS' OU O~vou ~ CTaL 32:'E'UJS'TOU Ovpavou IJI/Il:IO1),
Kat E'UJS'TOU tj8ou KaTa(3Jj- EUJS' Tou(i80u KaTa(3JjU CL.
U CTaL, 33.lloTE ~EV 'YEv1']UETal
lTOlWV tjlEv80</>aVTacrlaS'. lTalBLOV,lTOTE BE YEPWV.
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92
G. NUVOLONE
Apres une premiere explication sur la pretention du person-
nage a etre « Fils de Dieu» (IV; 27), 011on retrouve des parentes
etroites avec a Visio, Ie texte fait brusquement intervenir Esdras
a la troisieme personne : «Et Ie prophete dit» (IV; 28). A cet
endroit, Ap. Esdrae est a nouveau parallele a la Visio, mais dans
sa deuxieme partie, c'est-a-dire dans la discussion du prophete
avec Dieu (Visio B, § 75). Cependant, la description meme de
l'Antechrist est empruntee a l'Ap. de Jean, et la premiere per-
sonne retail son apparition: « Il me dit » (IV, 29-32).
Comme on Ie voit, l'emprunt a l'Apocalypse de Jean permet
de comprendre pourquoi Esdras est mentionne altemativement
a la premiere et a la troisieme personne. De son cOte, e texte
latin offre ici une description aux traits assezoriginaux, qui a
bien des chances d'etre primitive, tant par son contenu que par
la place qu'elle occupe dans Ie fecit.
L'emprunt a l'Ap. Iohannis trouve confirmation dans d'autres
passages.D'une part, l'Ap. Esdrae est seule a mentionner leg
«douze plaies », qui se rencontrent de maniere isolee dans un
manuscrit de cette meme Ap. de Jean34.D'autre part, elle rap-
porte en I, 191a promessede Dieu a Esdras Ie vierge de Ie «gar-
der comme Paul et Jean». Ce demier passage., ui a ete identifie
depuis longtemps comme une addition redactionnelle
chretienne35, evele leg possibles ectures apocalyptiques de l'au-
leur. L'image en question est absente dans Ie texte latin long, qui
formule ainsi la promesse aite a Esdras (§ 88) : «Mais toi, avec
mes prophetes tu auras ete elu », et qui exprime ainsi une pers-
pective clairement prophetique.
Une comparaison du texte grec de l'Apocalypse d'Esdras avec
l'Apocalypse de Paul revele la possibilite d'emprunts analogues.
Nous pensons notamment a la remarque des damnes constatant
qu'ils ont beneficie d'un rafraichissement grace a la seule pre-
sence du juste36.Cette remarque est Ie seul element qui subsiste
dans l' Apocalypse grecque sur Ie theme du «rafraichissement»
ponctuel des reines, bien que Ie texte insiste de maniere repetee
et rhetorique sur la volonte d'Esdras de plaider contre Dieu,
d'entrer en jugement avec lui et de deplorer la naissance de
l'homme. Cet unique element a survecu a une correction syste-
matique et non pas fortuite, qui reflete un souci d'orthodoxie et
qui a influence tOllS eg temoins, sauf Ie texte latin long; l'obten-~
34. Comparer Ap. Esdrae IV, 21 et C. TISCHENDORF,p. cit. (note 5), p.
94.35.
Ct. par ex. P. RIESSLER,p. cit. (note 15), p. 1273; U. B. MULLER,
op. cit. (note 16), p. 88.
36.Ct. Ap. EsdraeV, 10 et Ap. Pauli44.
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POCALYPSE D'ESDRAS GRECQUE ET LATINE
tion d'un decret formel de la part de Dieu, proclamant une sus-
pension periodique des peines pour un laps de temps donne, a
ete ressentiecomme genante et a ete eliminee37.
Revenons au remplacement de la description de l' Antechrist
par un exemple «plus noble » emprunte a la tradition apocalyp-
tique -pour un chretien une description garantie par l'autorite
de Jean vaut plus qu'un fecit emanant d'Esdras Cet emprunt a
l'Apocalypse apocryphe de Jean doit nous rendre attentif au fait
que l'Apocalypse grecque d'Esdras a pu etre enrichie par
d'autres insertions ex novo, ou par d'autres substitutions d'ele-
ments -emprunts qui peuvent etre litteraux ou resumes.
2.1.2. Le fetus de remettreson ime
Un autre exemple va dans Ie meme sens: Ie dialogue entre
Esdras et l'envoye -ou les envoyes -venant reclamer son ame.
La synapse figurant dans la Table II porte sur Ie noyau de ce
recit, constitue par Ie dialogue entre Esdras et l'envoye. Ce dia-
logue est mains developpe dans Ie fecit haggadique de la Petirat
Moshe38,qu'on retrouve sous une forme etonnament proche
dans deux petits textes CallOUSrace Ii Weil39et Ii Faltlovitch4°.
Considerons d'abord l'identite des envoyes dans e latin nous
avons affaire Ii Michel, dans l'Ap. Esdrae probablement aux
neuf anges de l'accomplissement, et dans l'Ap. Sedrach au Fils
unique.
Les neuf anges charges de l'accomplissement (ou de la fin)
soot mentionnes en Ap. Esdrae VI, 1, dans un passageou Dieu
adresse i Esdras une sorte d'« objection-revelation », du meme
style que les precedentes eponsesdivines aux divers plaidoyers
37. La presenced'une structuration rhetorique repetitive ne represente
certes pas line nouveaute dans notre piece et pourrait donc etre primiti-
ve; mais elle relit aussi etre Ie fait d'une nouvelle redaction. Qu'on
nous permette de renvoyer ici a un cas que nous avons etudie prece-
demment : il s'agit de la reprise d'une piece patristique tardive, qui a
ete transformee pour l'occasion en un faux. Cf. F. G. NUVOLONE, II
Sermo pastoralis Pseudoambrosiano e il Sermo Girberti philosophi
papae urbis Romae qui cognominatus est Silvester de informatione
Episcoporum », dans Gerberto scienza, storia e mira, Atti del Gerberti
Symposium,Bobbio, 1985,p. 379-565,en particulier p. 438-439.
38. «La Mort de Moise» dans A. MEYER,Legendes uives apocryphes
sur la Vie de Moise, Paris, 1925,p. 93-113,en particulier p.l08-112.
39. G. WElL, Biblical Legends of the Musulmans, Londres, 1846,p. 140-
143.
40. «Recit arabe de la Mort de Moise» dans J. FAITLOVITCH,Mota
Muse (La Mort de Moise), Paris, 1906,p. 31-35.
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d'Esdras (cf. II, 6 ; II, 32; IV, 2). Le sellSde l'objection est Ie sui-
vant : «Comment toi, Esdras, qui ignores to us ces mysteres -
dans Ie cas de VI, lIes noms des anges de l'accomplissement-
oses-tu me poser de telles questions?» Ces repliques ont un
role specifique dans l'Ap. Esdrae et sont totalement absentesen
latin. Sur es neuf noms angeliques qui sont ici reveles, es quatre
premiers sont bien connus et reviennent ailleurs dans les recen-
sions latines de la Visio. Quatre des cinq autres noms -ceux qui
ont une terminaison grecque -n'ont pas de parallele connu. Seul
« Aker» fait exception. Le nom apparait a plusieurs titres dans
la mythologie egyptienne; dans l'au-dela, il designe celui qui
s'oppose aux divinites nefastes qui veulent faire obstacle au
voyage du defunt41.Ap. EsdraeVI, 1 semble bien avoir recupere
cette «divinite» benefique et l'avoir «angelisee» en raison de
ses fonctions. Que les neuf anges enumeres ici aient pour mis-
sion de ramener l'ame d'Esdras trouve confirmation dans la
suite du fecit, oil Esdras a effectivement pour interlocuteurs une
pluralite d'anges (Ap. EsdraeVI, 5.7.9.etc.).
L'Ap. Sedrach,en faisant intervenir Ie Fils, anticipe sur a suite
des evenements(tels qu'ils sont racontes dans Ap. EsdraeVI, 16
ss.), puis elle en resume d'autres et offre pour finir des develop-
pements rhetoriques qui lui sont propres.
A la place de Michel (Visio B, § 93-94),Ap. EsdraeVI, 3 rap-
porte l'intervention d'« une voix» qui adressea Esdras l'invita-
lion a mourir : «Alors une voix vint veTSmoi : 'Meurs mainte-
nant, Esdras mOll bien-aime Donne Ie depot ' ». Ce
changement inattendu d'interlocuteur est sans do ute l'indice
d'une intervention redactionnelle. L'indice est confirme par
l'utilisation de la premiere personne en VI, 3, immediatement
suivie d'un retour a la troisieme personne dans la reponse (VI,
4). Cette maniere d'introduire les interventions divines se
retrouve dans l'Apocalpyse de Paul (§ 4; 5; 6 [leT] ; 8; 9; etc.).
Elle a aussiun parallele dans outes les reponsesdivines de la [ere
Apocalypse aPt?cryphede Jean, oil Ie visionnaire est reguliere-
ment mentionne a la premiere personne.
Enfin, en Ap. Esdrae VI, 16-17,plusieurs indices vont dans Ie
sellSd'une transformation secondaire: l'ordre donne au «Fils
unique» (que I.'Ap. Sedrach semble avoir anticipe), contrastant
avec l'emploi ambigu du terme «Seigneur» au v. 17 (voir aussi a
mention de « Dieu » au v. 19). De me-me,a mention de la « nom-
breuse armee d'anges» sect a rappeler (de maniere emphatique)
41.Ct. E. Ho~G, «Aker », n Lexikonder Agyptologie,Wiesbaden,
1975,, c.114-11$.
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l intervention des neuf anges charges de l accomplissement et
leur echec. Tout cela indique que Ie «Fils unique », absent en
latin, a ete insere apres coup dans e grec.
II est donc tres probable que Ie latin conserve ci Ie texte origi-
nal. II attribue a Michel line fonction qui est par ailleurs bien
attestee, en particulier dans les traditions relatives a la mort de
MoIse, dont notre redacteur s est nspire. II en va de meme dans
la partie finale, ou Dieu lui-meme descend pour recueillir l ame
du prophete -MoIse ou Esdras.
La synopse permet de faire line deuxieme observation. Dans
son dialogue avec Esdras, l envoye divin enumere successive-
ment les parties du corps par lesquelles il pourrait faire sortir
l ame du prophete. L ordre de l enumeration et Ie contenu des
reponsesd Esdras sont differents dans Ie grec et dans e latin. La
successiondes trois premieres parties est «bouche -narines -
yeux» dans l Ap. Esdrae, au lieu de «bouche -reil -narines»
dans la Visio. Sur la base d une comparaison avec Ex 33, 11-22,
Ie texte de l Ap. Esdrae semble a premiere vue etre original.
L ordre des elements et Ie contenu du dialogue direct avec Dieu
correspondent en effet a trois motifs du fecit de l Exode : la
conversation ace a face avec Ie Seigneur, e passagede la gloire,
la vue du « dos » de Dieu. II faudrait alors admettre que Ie latin a
change l ordre des elements et remplace Ie «Je parlais avec
Dieu bouche a bouche » par line motivation apparemmentbana-
Ie «<ma bouche a proclame la louange du Seigneur»). Si Ie grec
etait original, cela impliquerait que Ie redacteur a non seulement
voulu rapprocher etroitement Esdras de MoIse, mais qu ill a mis
en rapport avec Ie MoIse du texte biblique. II y a cependant de
bonnes raisons de penser, sur la base des deux textes edites par
Weil et par Faltlovitch (voir Table II), ainsi que d un bref fecit
armenien pub ie par M. Stone42, ue c est Ie latin qui a conserve
I ordre primitif et que I Ap. Esdrae est secondaire.
D une part, Ie texte de l Ap. Esdrae est lacuneux. En VI, 13-
14, line omission explique sans doute Ie passaged une affirma-
tion concernant les «ongles» (c est-a-dire les mains) a line
reponse qui parle des pieds. II est vraisemblable que l ordre des
trois premieres parties du corps resulte d un changementprovo-
42. Cf. Armenian Apocrypha relating to the Patriarchs and Prophets,
edited with Introductions, Translationsand Commentary by Michael E.
STONE, erusalem, 1982,p. 155 : «The prophet said, My mouth spoke
with God and my eyes saw the light of the Godhead and my nostrils
smelt the fragrance of sweetnessand my ears heard the word of the
redeemer and the voice of the Holy Spirit, and how do you take my
ul
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que par line omission analogue, a. aquelle Ie scribe aura remedie
par la suite.
D autre part, Ie texte de l Ap. Esdrae porte les traces d un
reamenagement. L affirmation du v. 12, «apres MoIse j ai aussi
marche sur la montagne », parait correspondre a. ine reponse
concernant les «pieds ». Cette incoherence a pousse Michael
Stone43 a. completer Ie texte en ajoutant line requete ou les
anges proposent de reprendre l ame «par les pieds» -requete
qui existe effectivement en atin, mais tout a. a fin du dialogue (§
104). Par ailleurs, la reponse d Esdras a. a requete concernant e
«sommet de la tete » existe aussi en latin, ou elle est tout-a.-fait
appropriee (§ 102). En Esdras 7, 5, Aaron Ie grand-pIetTe est
l aleul de toute line genealogie qui aboutit a.Esdras. Ce passage
de la Visio semble vouloir authentifier Ie caractere sacerdotal
d Esdras en rappelant la lignee du sacerdoceaaronide. nest dif-
ficile de savoirs il vent signifier davantage et suggererqu Esdras
a ete oint par Aaron lui-meme. Quoi qu il en soil, la reference a.
MoIse en Ap. EsdraeVI, 12 a toutes les chancesd etre secondai-
re, alors que la presenced Esdras sur la montagne pourrait bien
provenir d une information ancienne44.
En conclusion, nos textes temoignent d un emprunt aUK radi-
tions sur la mort de MoIse qui permet de presenter Esdras sons
les traits d un nouveauMoIse. Mais on constate ine relative inde-
pendance dans la maniere dont l Ap. Esdrae et la Visio latine
longue ont traite res materiaux traditionnels. De plus, il faut tenir
compte du fait que Ie texte de l Ap. Esdrae est corrompu et sans
doute partiellement reamenage.Les traces de ce reamenagement
sont perceptibles sur plusieurs points: dans l introduction de la
scene avec la mention des anges et de leur nom, qui entraine la
pluralite des nterlocuteurs «< es anges») dans ordre d enume-
ration des elements du corps, ou line ou plusieurs omissions (par
saul du meme au meme) ont rendu necessaire ajout de comple-
ments; enfin dans l attenuation de l autonomie d Esdras, peut-
etre deja. mplicite dans introduction du terme « depot ».
Reste un probleme : Ie grec rapproche explicitement l image
d Esdras de celIe de MoIse, alors que Ie latin semble plutot
l orienter veTSine identification avec l Esdras scribe et pIetTe
d Esdras-Nehemieet de IV Esdras45.
43. Ct. op. cit. (note 18), p. 577.
44. Ct. V Esdrai5 33, latin, recension «tran~aise» : «Moi Esdras, j ai
re~u sur Ie Mont Horeb un commandementpour Israel, mais celui-ci l a
repousse».
45. Voir par ex. Visio 102 et Esdras 7, 5 ; Visio 103 et Esdras 12, 28-36
Visio 104 et IV Esdras V; 22-VI, 17.
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POCALYPSE D ESDRAS GRECQUE ET LATINE
2.2. Meilleur etat du grec?
Venons.,enmain enant a deux exemples qui illustrent Ie fait
que Ie grec peut aussi avoir conserve un meilleur etat du texte
que Ie Iatm. L analyse doit etre menee cas par cas. Etendue a
d autres passages, lle aboutira sans doute a un bilan plus fiche
que celui que nous presentons ci.
2.2.1.Christologie.
Un premier exemple conceme ce qu on pent appeler Ie patri-
passianisme de notre texte. Dans Ap. Esdrae II, 24, Dieu «se
souvient» des creatures dont il est nvite a avoir pitie et rappelle
que ce sont elles qui lui ont fait boire du vinaigre et du fiel -pas-
sage sans parallele formel en latin (Ap. Esdrae II, 24, doublet
secondaire de VII, 1 ?). La mention du vinaigre et du fiel se
retrouve dans Ie dialogue final entre Dieu et Ie prophete (voir
Table III, Ap. Esdrae VII, 1-2). II s agit ici d une reponse divine
a la penTqu Esdras ressent ace a la mort: Dieu lui-meme cite
en exemple des faits relatifs a sa passion. Ce qui est etonnant,
c est qu il ne mentionne ni sa resurrection Ie troisieme jour, ni
meme sa mort de maniere explicite. Ce silence est-il
intentionnel ? En tout cas, ons les faits evoquesse rapportent a
la passion: c est loTSde la passionque des saints nombreux ont
ete ressusciteset qu a pris place la visite dans les regions infe-
rieures de la terre pour en «ramener» Adam (voir Ev. de
Nicodeme 5 [21] 1 sS.,qui se referent explicitement a la libera-
tion d Adam; dans Ie Nouveau Testament, voir Ep 4, 8s et 1 P 3,
19).
Examinons main enant Ie texte de la Visio latine, qui semble
bien avoir ete retouche, du moins en partie.
On a en effet l impression que Ie latin s est inspire ici d un
«Credo» orthodoxe (§ 110) et qu il a introduit ainsi une refe-
rence a la personne du Fils. Ce faisant, il a procede d une autre
maniere que Ie grec, qui parle de l envoi du Fils apres l echec
des anges (Ap. Esdrae VI, 16 ss.). A cet endroit (§ 106), Ie latin
mentionne la decision du «Seigneur », auquel Michel vient de
faire son rapport, de descendre ui-meme pour ramener ame du
prophete ; il est clair que si Ie latin avail dispose d un texte men-
tionnant l envoi du Fils, il ne l aurait certainement pas corrige,
puisque un tel envoi allait clairement dans Ie sellSde sa christo-
logie. Notons d ailleurs que l accent est mis sur la christologie
des Ie debut de la Visio B, dans la transition redactionnelle du
§ la, qui s ecarte sur ce point de tons les autres temoins latins :
la priere d Esdras n est pas adressee «au Seigneur», mais «au
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Table II
Visio Esdrae B 109-112 ApEsdras VI, 21-VII, 3 [Wahl] ApSedrach IX, 4-Xll, 1 [Wahl]
l09EtdixitDominus: VI,21.Kat El1TEV b 6E6s-. IX, 4. AfYEl aVTov b lJl~'C...)
Ego omnia concedo ut petisti,
set tantum da animam tuam. b.bs- EWS'1')V TapaKaTaef)KTlv. 80s- ~Ol T1')V1To6ElVOTaTTjV
b UTE<f>av6s-JOl JTol~aUTal' \Jxf]v <JOlJ. ...)
22.BEDpo TEAE1JTa,
lva E1TlTUX\1S-1JToD.
110 t dixit 23. T6TE i\Pl:aTo AEYElV X, 5. TaDTa 1TaVTaaKoooas-
Exdra : b 1TPO<PllTTjS- b u8pQX Kat Evev~T)6Ets-
~ETa OOKpixllv' TOU6avaTOlJT1')V~v1'j~T)V,
ECE<JTTjav Kat n1TEV
~E8pQXTOV 6E6v.
Domine, '0 8EarroTa, (.,,) b.as ~Ol KUplE C...)
timeo 24. O'(~~Ol, O'(~~Ol, OTl XI, 1. Kat i\ptaTO KAalwv
mortem. 25. (.,,) Kat 6avaT(jI 1Tapa- C...)
8l86~EVOV. * C...)
Et respondit Dominus: YD, 1. Kat El1TEV llT~ b XII, 1. AEYEl allTov b
6E6'};. XPlUT6'};.
.AKOOOOV,E<J8p<i1L,yaTTT]- llaooov, ~E8p<iX. EWS' T6TE
Tf ~OlJ. OOKPU(ElS-Kat <JTEva(ElS-
Ego mortuus fui EYWaMvaTos- wv
et crucifixus <JTalJpOv aTEBEca~T)V,
<>CasKat XOA1'lV 'YEooa~T)V,
EV Ta<P<l> aTETE6T)V, .
2. Kat TOllS'EKAEKTOUs-OlJ
et resurrexi aVfO'TT)<Ja,OV A&l~ EK
ToD lj80u aVEKaAE<Ja~T)V,
et modo sedeo ad dexteram,
lva TO TWV av6pW1TwvYfVas
et mortem non timeo. ~1'l ow <I>o~T)6fIOV edvaTov.
111Respondit Exdra : Si tu
mortem non timuysti, quare
dissisti tristis est anima mea
usque ad mortem?
112Respondit Dominus:
lam multum loqueris,
da animam [f. 110r] tuam
quia non morieris. b 1Tap<iBEl<J6'};JOl1'1'YolYT)
3. To 'Yap EC E~oD,
i\'YOW fJ ljIuxf], '
a1TEPXETal EtS- TOV oupav6v.
TO 8E EK Tils- 'YfIs-,
Corpus i\'YOW TO <Jw~a,
uadit a1TEpXETalls- T1')V ¥fIV, Kat a1To6avwv
unde uenit, EC 1')S- All<P6T1.
anima
reddijt ad Patrem (ll<JElS-.
qui earn dedit.
.Kat 6a~T(jI 1Tapa8L86ILEVOVom. WAHL, sed erl:
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APOCALYPSE D ESDRAS GRECQUE ET LATINE
Seigneur Jesus-Christ ». La Visio B explicitera dans Ie meme
sens a priere finale d Esdras au § 114.
Revenons au sommaire christologique du § 110 de la Visio B.
Comme Ie grec, il se refere a la mort et a la crucifixion, mais Ie
sens est radicalement different. Alors que Ie grec introduit la
declaration par «Moi, qui suis immortel, j ai subi la croix », Ie
latin dit «Moi, je fus mort et (mort) crucifie ». Le fait que Ie
latin inverse la sequencechronologique habituelle (crucifixion -
mort), indique probablement qu il a opere une transformation a
partir du texte grec, meme si l on ne peut pas exclure une
influence de Ph 2, 8.
L affirmation «je n ai pas peur de la mort», au present et en
fin de phrase, est curieuse apres la proclamation christologique
qui precede. Dans Ie texte actuel, elle donne l impression d etre
une reprise inversee du «j ai peur de la mort» d Esdras, et de
servir de transition pour introduire l objection suivante (§ 111).
Cependant, a la lumiere du passagequi suit, il y a lieu de penser
qu elle faisait partie du texte originel.
En effet, la citation de Mt 26, 38 / / Mc 14, 34 pourrait bien
etre un reste du texte primitif, puisqu elle a un lien avec es faits
de la passion. Elle se refere non seulement au meme contexte
narratif, mais elle est aussi utilisee dans les recits de descente
aux enters (liberation d Adam) comme argument dans a bouche
de Satan pour demontrer la vulnerabilite humaine du Christ.
Dans les emplois patristiques, cette citation sert a souligner Ie
fait de la peur de la mort -comme dans l objection haggadique
de notre texte -et a alimenter la discussion sur la nature du
Christ. Dans notre texte, ou elle prend place a l interieur d une
question «effrontee » d Esdras, sa presence a pu faire difficulte
et conduire a son omission, ainsi qu a certaines corrections. Le
grec, qui conserve par ailleurs des elements tIes utiles, efface
toute trace de la peur «divine » et se contente de renvoyer a la
peur d Esdras (VII, 2) ; illaisse ensuite de cote la troublante
promesse aite au prophete (§ 112 : «car tu ne mourras pas»), et
rejoint finalement Ie latin dans la declaration divine sur Ie sort
respectifdu corps et de l ame (en latin, Visio B 112,ces elements
sont particulierement proches de W EsdrasVII, 78).
S agissant du sort d Esdras apres sa mort, il est difficile de
savoir ce que Ie texte contenait a l origine. D apres l~ latin, on a
l impression qu Esdras recevait une promesse d immortalite en
depit de sa mort apparente (§ 112: «remets[-moi] ton arne, car
tu ne mourras pas »)46.Mais Ie latin a ici une formulation qui, en
46. Le lecteur se souvient que nous avons deja cite (supra, p. 92) a pro-
messe que Dieu fait a Esdras de partager Ie sort de Jean et Paul
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102
F. G. NUVOLONE
tout cas pour ce qui est du style, n existait certainement pas en
grec.
De son cote, Ie grec, qui rapporte des lamentations du pro-
phete confronte a la mort (Ap. EsdraeVI, 23 et VII, 4), evoque
l action destructricedes veTS t la coupe de I Hades (VI, 23), ce qui
contraste avec Ie theme de la restitution de l ame. I1 n est ques-
tion ni d un etat intermediaire de l ame dans l attente de la
resurrection et du jugement, ni de l immortalite promise au pro-
phete. Esdras est purement et simplement confronte a la dure
condition mortelle des humains.
Terminons par une remarque d ensemble sur la perspective
doctrinale de notre texte. I1 conserve es Testesde certaines tra-
ditions anciennes. Parmi celles-ci, es affirmations apparentees
au patripassianisme -encore depourvues des argumentations
qui seront developpeesplus tardivement -ont de fortes chances
d etre primitives -cela d autant plus que Ie passageque nous
avons etudie aete «pudiquement» retouche dans Ie texte latin.
2.2.2. Prome~sesour les devots.
L attitude face au livre et au saint (cf. Table V) va nous four-
niT un deuxieme exemple illustrant la superiorite occasionnelle
du texte grec.
Le texte latin revient a deux reprises sur ce probleme (§ 95-96 et
108-109), e qui fait penser a un doublet. Le livre -«mon livre »
dans e premier passage devient « e livre de ma passion» dans e
second.De plus, en contrepartie des depensesencourues pour la
transcription et l achat du livre, Ie devot se voit promettre une
pharamineuse ecompensematerielle : pour chaque denier verse,
Ie gain sera d une livre d or (§ 95). On ne trouve pas trace d une
telle promesseen grec, qui parle en revanche d une benediction,
tres concrete elle aussi (VII, 10) : «benis toute sa vie comme la
nouvelle condition de Joseph ms. A) / de Job (ms. B) ».
A premiere vue, il est difficile de choisir entre les deux
variantes grecques.O. Wahl (cf. Table V), qui connait les deux
manuscrits,ne fait que reprendre la le~onde C. Tischendorf. Les
(Ap. Esdras I, 19) ou, probablement plus original, de partager celui de
ses prophetes (Visio B 88) ; cela est confirme un peu plus loin (Visio B
92) dans ce qui pourrait sembler etre une premiere conclusion:
«Esdras, va en paix et fais route avec roes prophetes. La oil sont les
justes, toi aussi u seras». Voir egalement, en Visio B 60, es «prophetes
des Eglises» qui accueillent Esdras loTSde son ascensiondans un ciel
superieur a celui des anges, et qui sont invites par lui a s incliner et a
prier pour les pecheurs,comme loTS une liturgie communautaire.
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104
F. G. NUVOLONE
traductions de H. F. D. Sparks et de U. B. Miiller, qui ont pour-
tant dispose a l'avance d'un choix de variantes du deuxieme
manuscrit utilise par O. Wahl, font de meme. Miiller propose
tine traduction plutot laborieuse : «und segne <ihn> in allem,
wie auch die letzten Worte Josephs (oder: fiber Joseph) <lau-
ten> »; a l'appui de cette traduction, il renvoie au Testament de
Joseph 18 ss. e;t a Dt 33, 13 ss. Ce rapprochement petit certes
avoir inspire la le~on du scribe de A, qui puisait probablement
surtout a des lectures patristiques. A notre avis cependant, il
faut doDDer la preference a la le~on du manuscrit B, en suivant
l'hypothese de R. Kraft rapportee par M. Stone, qui la considere
comme possible tout en la pla~ant en note «<' Joseph' is the
results of a scribe's misreading of 'Job' as an abbreviation
for Joseph ») et en rejoignant aussi Ie choix judicieux de
D. Ellul-Durand47. Le passage s'accorde ainsi remarquablement
avec Jb 42, 12 : «() BE KUPlOS" VAOYT1crEVa lcrxaTa I(1)j3 Tl Tcl
EI.I.TTPOcr8EV».
La tournure du grec a donc toutes les chances d'etre originale.
Elle a dft paraitre trop allusive, ce qui a amene Ie latin a la rem-
placer par tine promesse refletant Ie point de vue d'un «investis-
seur» occidental.
2.3. Rapports entre es recensionsatines.
La situation des pieces latines et leurs rapports respectifs
constituent un autre chapitre de l'histoire de notre Apocalypse.
Nous ne pouvons que l'effleurer dans Ie cadre limite de cet
article.
2.3.1. Un texteoriginal peu chretien?
L'edition du manuscrit de la Bibliotheque Vaticane, Vat. Lat.
3838, par les soins du Cardinal Mercati, en 1901,a cree l'illusion
qu'on avait retrouve la un etat textuel proche de l'ouvrage pri-
mitif. Comparant Ie texte latin aUK deux pieces grecques,
Mercati lui-meme ecrivait : « ora si puo aggiungere una terza,
latina, finora sconosciuta, a quale nella tradizione dell'apocrifo
sembra destinata ad accuraTe un posta molto pill cospicuo delle
altre due » ; il relevait que dans ce texte « sopratutto mancano Ie
tante citazioni od allusioni a passi del Nuovo Testamento, onde
47. Ct. dans l'ordre des mentions: O. WAHL, op. cit. (note 2), p. 34; C.
TISCHENDORF, p.. cit. (note 5), p. 32 ; H. F. D. SPARKS, p. cit. (note 19),
p. 940; U. B. MOLLER, op. cif.. (note 16), p.100; M. STONE,op. cit. (note
18), p. 578, note d ; D. ELLUL-DuRAND, op. cit. (note 7), p. 186.
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105
POCALYPSE D ESDRAS GRECQUE ET LATINE
son pieni gli altri apocrifi accennati », et que «sembra potersi
asserire, che il tipo e la stessa Visio Esdrae debbono essere pin
antiche della Visio Pauli, la quale e certo pin antica
dell Apocalisse della Vergine »48.Ce jugement a ete renforce par
une analyse plus recente, qui identifiait dans les autres manus-
crits de la forme moyenne et courte une serie d interpolations et
de doublets -dont la fameuse scene du ponr9. Cela a amene es
traducteurs anglais des recueils de 1983 et de 1984a privilegier
Ie texte edite par Mercati et a releguer dans l apparat les autres
temoins des recensionsmoyenne et courte. L. Moraldi, en 1985,
a procede de la meme maniere, en detaillant Ie contenu de notre
apocryphe d apres cette meme edition5O e me demande si J. R.
Mueller, qui prepare un volume reunissant ensemble des textes
relatifs a Esdras, soutient encore a meme position quand il affir-
me : « I have worked with the Bogaert material from RBen, but
I am not convinced that it is earlier than the existing Latin texts
used by Wahl »51.
Une analyse seTTee ontre que Ie manuscrit du Vatican edite
par Mercati, bien qu utile, est loin d etre exceptionnel. La main
du scribe revele un manque d assurance ; la transcription est
influencee par un certain arbitraire et une relative meconnais-
sance des abreviations, ainsi que par des omissions. Ces omis-
sions soot nombreuses et de taille. Elles ne soot pas toutes for-
tuites, mais resultent parfois d une volonte simplificatrice. Elles
soot en contradiction avec Ie texte atteste par les autres recen-
sions et, dans des cas importants, s opposent au grec lui-meme.
Plutot que d identifier une sorte de Ur-Text,qui serait a l origine
de l ensemble des recensions atines, il convient d opter aujour-
d hui pour une vision d ensemble des pieces atines et grecques.
Cette maniere de faire permettra de relativiser et de nuancer des
solutions fondees sur une vision trop antinomique.
2.3.2. La censuredes Legendaires.
Un fait majeur, qui caracterise ensemble des emoins latins, a
la seule exception du texte long, est a disparition des § 67 a 117
48. Op. cit.. (note 2), p. 64.65.66.
49. Cf. P. DINZELBACHER,p. cit. (note 23).
50. Cf. op. cit. (note 26).
51. Courtier electronique qu il m a adresse e 20.04.93,en reponse a
mes questions du 23.03.93. A propos du volume mentionne, M.
MUELLERdisait ceci : « It is my hope to have the Ezra volume to the
editor of the series in camera-ready form by the end of June.
Publication would then be sometime in mid-1994».
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F. G. NUVOLONE
transmis par ce demier. Cette disparition correspond ii environ
40 du texte QOnserve.On ne peut pas s'empecherde voir dans
ce fait Ie resultat d'une operation de reduction, guidee par plu-
sieurs motifs:
-reduction de la vision ii l'essentiel, c'est-ii-dire aux chati-
ments infemaux, comme c'est Ie cas dans l' Apocalypse la plus
repandue et la plus fameuse, 'Ap. Pauli,.
-reduction c1 ne sequence topographiquement homogene
«Enfer -para~is -Ciel », incompatible avec la contigulte expli-
cite qu'etablit Ie texte long entre les chatiments et Ie paradis
dans es Tartares ;
-reduction i't une logique theologique qui n'acceptait ni la
contestation frdntale de la justice divine, ni Ie decret divin sus-
pendant tempotairement les reines, ni Ie marchandage du pro-
phete sur sa prdpre mort;
-enfin, accommodation au caractere edifiant d'une lecture
liturgique monastique.
Des elements escapes?
Ce qui vient d'etre dit montre que des elements anciens peu-
vent subsister dans l'un ou l'autre de nos textes. 11conviendrait
d'etendre l'investigation aux diverses ecensions atines, qui sont
a lire attentivement comme un tout. Un seul exemple nous per-
mettra d'illustrer ce principe.
Au § 37, a V~io L presente de fa~on progressive e personna-
ge Herode, doRt l'identification ne sera donnee explicitement
que par la reponse de l'ange ; mais elle Ie qualifie d'emblee de
uirum bonum. Cette epithete est solee, et elle ne peut que sem-
bIer deroutante a une lecture superficielle, ce qui explique son
absencedans es autres recensions atines.
Mais regardons la situation textuelle dans sa globalite. Dans
l'Apocalypse d'Esdras grecque, a scene occupe une autre place
qu'en latin et inaugure la visite d'Esdras dans les parties infe-
rieures du Tar~are. Celie position dans Ie recit renvoie a un
milieu chretien precis, ou les destinees individuelles ont plus
d'importance que Ie jugement collectif separant globalement es
bons et les meclilants,et ou Ie monarque est considere comme Ie
«premier» des damnesparce qu'il a commis un crime lie a la vie
du Christ (on notera cependant l'absence de Judas dans l'en-
semble de nos textes I). En revanche, es pieces atines revelent,
des leur entree en matiere, une autre perspective; preuve en est
la double scene du debut (Visio 3-11), qui fait aussisuite a une
requete d'Esdras et a sa descentedans l'enfer ou il est emmene
par sept anges tartarouchoi (Visio 1-2; ct. Ap. Esdrae IV; 5-7).
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POCALYPSE D'ESDRAS GRECQUE ET LATINE
Les justes y sont presentes des Ie depart comme justifies en rai-
son de trois elements: les aumones, interpretees comme offran-
de d'un sacrifice; l'reuvre de misericorde, «vetir ceux qui sont
nus », qui correspond a la premiere reuvre misericordieuse, inau-
gurant la Torah et enseignee par Dieu lui-meme ; enfin Ie desir
ardent du bien, qui recapitule les commandements de l~ Loi. Les
pecheurs y sont fondamentalement qualifies par leur refus de
reconnaitre Dieu, par leur rejet d'une relation preexistante qui
conduit al'infidelite.
En latin, la scene concernant Herode precise qu 'Esdras voit
un homme « siegeant sur un trone de feu. Les anges de Satan lui
administraient du feu de tous les cotes. Ses conseillers aussi se
tenaient debout autour de lui» (Visio B, § 37). Le grec donne
une description synthetique : Kat '(8ov 1TUPLVOV povov, Kat E1T'
aUTOV Ka8E'O~EVOV 'YEpOVTa Kat clVLAEU>S UTOV 1] KpLULS Ap.
Esdrae IV, 9). On notera qu'Herode est ici presente comme un
vieillard (mais Ie terme comporte vraisemblablement une nuan-
ce de dignite) et qu'il est question du caractere impitoyable de
son jugement. Madame Ellul-Durand a probablement raison de
souligner l'ambigulte de la formule : «soit Ie jugement qu'il ren-
dait, soit Ie jugement auquel il etait soumis »52
Si nous revenons au latin, nous y retrouvons une meme nuan-
ce de dignite, exprimee par Ie terme uir bonus, qui designe l'as-
sesseur dans un tribunal medieval et qui signifie ici tIes proba-
blement «un homme de qualite, investi d'autorite ». Le
personnage est entoure de consiliarii, c'est a dire de juges asses-
seurs, appeles a deliberer avec Ie juge principal. La scene est bel
et bien celIe d'un jugement, telle qu'elle apparait dans l'icono-
graphie ancienne du massacre des Innocents. On comprend
alors Ie caractere «impitoyable» de la sentence d'Herode, qui
est executee directement devant son trone, et surtout la logique
d'un chatiment qui frappe Ie monarque-magistrat et son conseil
par ou its out peche.
Conclusion.
Ce qui vaut pour Ie latin, vaut aussipour Ie grec : chaque exte
doit etre etudie avec attention pour etre interprete dans sa cohe-
rence; mais pour en saisir a portee et bien Ie comprendre, il doit
aussi etre place en parallele avec les autres -en respectant Ie
caractere specifique de chacun.
52. Gp. cit. (note 7), p. 122.
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108
F. G. NUVOLONE
Le texte latin long en est Ie meilleur exemple. Nous devons sa
conservation aux hasards d un recueilliturgico-penitentiel tran-
ciscain. Mais sa lecture suscite des impressions melees, car il
souffre de diverses imperfections: il remonte a une traduction
deja approximative; il a ete transcrit et retranscrit rapidement, a
des epoques de latinite recente, par des scribes qui n ont pas
toujours su interpreter correctement leur modele. 11 aut donc
avoir recours au grec pour reconstituer les liens logiques entre
les elements qui Ie composent, et Ie comparer aux autres recen-
sions latines pour deceler es evolutions d un texte qui est long-
temps Testeun texte vivant.
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Pier Franco BEATRICE
Universitede Padoue
TRADITIONS APOCRYPHES DANS LA
THEOSOPHIE DE TUBINGEN
In this paper two passages of the so-called Ttibingen Theosophy are
taken into consideration. This work was written at the beginning of the
sixth century by an,anonymous theologian well informed on Greek reli-
gious and philosophical traditions. The Byzantine compiler of the eighth
century tells us that the author of the Theosophy had also used some
apocryphal works: an attempt s made here to identify them. In the sec-
ond passage, reserved n an original fragment, the author speaksabout
the provisional immortality of Elijah and Enoch. The analysis of these
textsprovides good arguments n favour of the monophysite origin of the
Theosophy and confirms its attribution to Severus f Antioch.
Cette contribution examine deux passages de la Theosophie de
Tiibingen, ouvrage compose au commencement du VIe sieGlepar un
theologien anonymepetri de culture grecque.Au VIIIe sieGle,e compila-
leur byzantin d un epitome de l original perdu dit que l auteur de la
Theosophie avail fait usagede livres apocryphes,et il en donne la lisle.
Nous tenterons ci d identifier ces ouvrages.Dans Ie deuxieme passage,
contenu dans un fragment original, l auteur soutient l immortalite provi-
soire d Elie et Henoch. L analyse de ces textesconduit a placer l auteur
de la Theosophie dans un milieu monophysite et afire des arguments
pour confirmer son attribution a Severed Antioche.
1. Un temoignage peu connu sur es Apocryphes.
La Theosophic constituait l appendice en quatre livres d un
traite en sept livres Sur fa vraie toi compose dans les premieres
annees du VIe siecle. L auteur, un theologien chretien anonyme
possedant de profondes connaissancesdans Ie domaine de la
m~hologie palenne et de la philosophie grecque, se proposait de
demontrer l harmonie substantielle entre la revelation biblique
7, 1996,p. 109-122
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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110
P.F. BEATRICE
sur la Trinite et l'Incarnation et leg verites religieuses transmises
dans leg oracles des dieux grecs, dans leg theologies des sages
grecs et egyptiens et dans leg oracles des Sibylles1. Le scribe
byzantin anonyme qui composa au VIIIe siecle un epitome de la
Theosophie, parvenu jusqu'a DOUg dans un manuscrit du XVIe
siecle conserve a la Bibliotheque universitaire de Tiibingen,
DOUg nforme que, dans cet ouvrage, l'auteur faisait usage, a cote
d'autres sources chretiennes et palennes, de certains ecrits apo-
cryphes:
MEIlVTlTal 8E Ka6E~f}S' Kat [3l[3Ai.WVTlVWV iTapE'Y'YpaiTTWVlTOl
8laef]KTlS' TlvC>s-TO\) KUplOU Kat 8laT~EWV TWV a'YlWV uiTOOT6Xwv
Kat 'YEVv1'Jo"EWS'at UVaAl'1 jJEWS'flS' UXpUVTOU &O"iTOlVTlS' illwv
6EOTOKOU Ensuite l'auteur fait aussi mention de quelques
livres «apocryphes », a savoir d'un Testament du Seigneur
et d'Ordonnances des Saints Apotres et de la Naissance et
de l' Assomption de Notre Dame immaculee Mere de
Dieu)2.
Depuis longtemps deja, leg chercheurs ant tente d'identifier
ces ecrits. K. Neumann par exemple, qui Ie premier decouvrit
l'epitome byzantin dans Ie manuscrit de Tlibingen, s'exprimait
ainsi a ce sujet dans line lettre adressee a Buresch :
...ich beschranke mich darauf, festzustellen, daB der
Excerptor die apostolischen Konstitutionen als apokryph
bezeichnet, worur dieselben im Jahre 692 auf der trullanischen
Synode erklart wurden. Gemeint sind ohne Zweifel at TWV
UYltUV alTOO"TOAtUV laTa~ElS", die mir in der Ausgabe de
Lagarde's vom Jahre 1862 zur Hand sind; wenn der
Tubingensis [§ 4] BlaTa~E/JJS"WVUYltUV alTOOTo>.£IJvietet, so
wird darur BlaTa~EtUVKTA. zu schreiben sein. Die vom
Theosophen [ebenda] erwahnte Blae1'jK1lTOUKVPlOVst 1856 in
den Reliquiae iuris ecclesiastici antiquissimae. Graece ed. de
Lagarde gedruckt worden. Uber die YEVVT)O"lS"llS" axpaVTOV
BEO"lTOlVT)S"'JI1WV EOTOKOV§ 4] vgl. Thilo's Codex apocryphus
novi testamenti, I, 1832, p. 319 sqq.; p. XCI sqq. ; sowie
Tischendorfs Evangelia apocrypha, 1853, p. 106-114; p. XXV-
XXXIV: Uber die Himmelfahrt, die aVaATlljJlS"er Maria [§ 4]
1. Pour une premiere presentation de cet ouvrage je renvoie a mon
article «Pagan Wisdom and Christian Theology according to the
Tiibingen Theosophy», Journal of Early Christian Studies3 (1995), p.
403-418.
2. Theos. §4. Le texte grec est cite d'apres I'edition critique de H.
ERBSE,Theosophorum Graecorum Fragmenta, Stuttgart -Leipzig 1995,
p.2-3.
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A 1HEOSOPHIE DE TUBINGEN
s. Bonnet, Zeitschrift ftir wissenschaftlicheTheologie 23, 1880,
S. 222-247undbesonders S. 236 f3.
Quelques annees apres, P. Batiffol ecrivait :
L'auteur de la 8Eouo</>la mentionnait aussi certains livres
subreptices (lTapEyypalTToL), a savoir une ~La(1f]KTl TOU KUplOU,
des ~LaTa~ELS' TWV aYlWV alTOUTOX£uV,ne rEVVflULS' Kat avaAT) jJLS'
TflS' axpaVTOU 8EUlTOlVT)S' lf1WV EOTOKOU.Par rEVVT)ULS' l faut
entendre Ie Protevangile de Jacques. Par' AVaAT) jJLS', Ie
Transitus Mariae. Par ~LaellKTl T. K., Ie Testamentum Domini
que Rahmani a retrouve et pub lie en syriaque. Par ~LaTa~ELS'
les Constitutions apostoliques. Ces identifications ne font pas
difficulte4.
Nous pensons qu'une nouvelle enquete sur ce texte se justi-
fie -bien qu'il soit brei -pour au moins deux raisons. En pre-
mier lieu, il s'agit d'analyser l'information fournie par son
auteur a la lumiere des tout derniers resultats de la critique his-
torique autour de ces ouvrages qui sont appeles ci et definis de
maniere generale comme «apocryphes », c'est-a-dire non
authentiques et, en definitive, heretiques. D'autre part, cette
analyse doit permettre de souligner l'importance de la
Theosophie pour l'etude de la litterature apocryphe et des tra-
ditions particulieres qui y sont vehiculees. La chose est d'au-
tant plus importante si l'on pense que la Theosophie est gene-
ralement ignoree dans leg etudes sur leg apocryphes et qu'on
n'a donc pas suffisamment mis en valeur, jusqu'a present, leg
apports import ants qu'elle est en mesure d'offrir, comme no us
entendons Ie demontrer.
2. Le Testamentdu Seigneuret les Ordonnances es Saints
Apotres.
On designe par ces titres deux ouvrages issus probablement
de milieux syriaques, dont la tradition apparait extremement
complexe. On petit trouver rapidement des renseignementssur
l'etat actuel de ,nos connaissancesa ce sujet dans les travaux
recents de Bradshaw5 et de Steimer6. 11 aut cependant remar-
3. Voir K. BURESCH,laros. Untersuchungen um Orakelwesendesspii-
teren Altertums, Leipzig 1889,p. 89.
4. P. BATIFFOL, Oracula hellenica », Revue biblique 13 (1916), p. 177-
199. 180.
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P. F. BEATRICE
quer que Ie temoignage de la Theosophie a ete ignore par tOllS
les chercheurs qui se sont occupes de ces textes. Or, que nous
apprend la Theosophie a leur sujet ?
La premiere observation a faire est que l'auteur de la
Theosophie utilisait ces reuvres en grec ; par consequent, a cote
du texte grec des Ordonnances des Saints Apotres, l'original grec
du Testamentum Domini syriaque devait exister au ye siecle ega-
lement. Consequence encore plus importante : Ie fait que dans
nolle texte res deux titles soient cites ensemble offre une preuve
supplementaire et, dans un certain sens, decisive de l'existence,
veTS 'an 500, de la recension grecque primitive de l'Octateuque
de Clement. Cette collection, ainsi designee par P. De Lagarde
pour la distinguer des Constitutions apostoliques, etait compo-
see d'un premier livre intitule J:lLUeflKTl aU KVptOV']j.lWVI TlUOU
XPLUTOUt de sept autres livres de J:lLUTclCELS'.lle est mention-
nee, quelques annees apres la Theosophie,par Severe
d' Antioche dans une lettre a une certaine Thecle comitissa, sous
la double appellation de Ordonnances des Apotres et de
Testament du Seigneur:
Au sujet de cette question et de sa liceite il est ecrit dans les
8LUTclCELS'es Apotres, que l'on a appelees J:lLUeflKTl du
Seigneur, que Ie diacre peut proceder a la renovation baptis-
male d'un enfant quand on ne trouve pas de pIetTe et qu'on
est pre sse par la menace d'une issue mortelle. Le Testament
proclame cette observance licite par ces paroles: En cas de
necessite, en l'absence du pIetTe, Ie diacre baptisera7.
On pent ainsi se rendre compte de }'apport documentaire de
5. P. F. BRADSHAW, «Kirchenordnungen, I. Altkirchliche »,
TheologischeRealenzyklopiidieXVIII (1988),p. 662-670.
6. B. STEIMER,Vertex Traditionis. Die Gattung der altchristlichen
Kirchenordnungen (Beihefte zur Zeitschrift fur die neutestamentliche
Wissenschaft63), Berlin -New York 1992.
7. E. W. BROOKS,The Sixth Book of the Select Letters of Severus,
Patriarch of Antioch, London -Oxford 1902-1904; exte syr.1/2, p. 482;
trad. anglo11/2,p. 426. La traduction fran aise citee est de F. NAU, «La
version syriaque de l'Octateuque de Clement. Introduction », Le cano-
niste contemporain 30 (1907), p. 452-467,459,reproduite dans IDEM,La
version syriaquede l'Octateuquede Clement Ancienne litterature cano-
nique syriaque, asc. IV), Paris 1913,p. 8-11. Voir aussi es travaux de J.-
M. HANSSENS,a liturgie d'Hippolyte. Ses documents,son titulaire, ses
origines et son caractere (Orientalia Christiana Analecta 155), Roma
19652, . 58-60, et B. STEIMER, ertex Traditionis, p. 95-105 et 141-148.
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A THEOSOPillE DE TUBINGEN
la Theosophiea l'etude de la tradition de ces extes apocryphes
elle offre en eifel Ie plus ancien temoignage connu a ce jour,
anterieur a ce1.ui de Severe lui-meme, sur l'existence de
l'Octateuque de Clement en grec. Mais d'autre part, la citation
d'un texte comme l'Octateuque de Clement, qui flit largement
utilise dans leg eglises monophysites, constitue un argument de
poids pour attribuer l'origine de la Theosophie a des milieux
caracterisespar line claire tendance monophysite. Le temoignage
examine est toutaussi important pour l'etude des textes du cycle
de la naissanceet de l'assomption de Marie.
3. Naissance t Assomption e Marie.
Le papyrus Bodmer V; datant du debut du lye siecle, donne
sons Ie titre rtVEO"LS' apLaS' Ie texte couramment appele
Protevangile de Jacques8.Nous pouvons tenir pour assure qu'en
utilisant Ie terme rEVV1lO"LS''auteur de la Theosophie voulait
indiquer precisement celie reuvre. Sur ce point, nons ne
devrions pas rencontrer d'obstacle. Mais il semble plus difficile
d'identifier l'reuvre intitulee 'AVclATl jJLS'.
Dans la bibliographie desormais iche dont nons disposons sur
Ie TransitusMariae, a commencer par l'etude classiquede Jugie9
et les editions fondamentales de WengerD et d' Arras11 usqu'aux
publications recentes de van Esbroeck12,Gribomonr3, Manns14
et Mimouni15, e temoignage de la Theosophieest systematique-
8. E. DE STRYCKER, a forme la plus ancienne du Protevangile de
Jacques.Recherches ur Ie papyrus Bodmer 5 avec une edition critique
du texte grec et ulle traduction annotee (Subsidia Hagiographica 33),
Bruxelles 1961,p. 211-212.
9. M. JUGE, La mort et l'Assomption de la sainte Vierge. Etude histori-
co-doctrinale (Studi e Testi 114),Citta del Vaticano 1944.
10. A. WENGER, 'Assomption de la I: S. Vierge dans a tradition byzan-
tine du VIe au xe siecle Archives de 1'Orient chretien 5), Paris 1955.
11. V. ARRAS,De TransituMariae Apocrypha Aethiopice I (CSCO 343),
Louvain 1973.
12. M. VANESBROECK,Les textes litteraires sur l' Assomptiori avant Ie
xe siecle », dans F. BOVONet alii, Les Actes apocryphes des Apotres.
Christianisme et m()nde palen (Publications de la Faculte de Theologie
de 1'Universite de Geneve 4), Geneve 1981,p. 265-285, eimprime dans
IDEM,Aux origines de la Dormition de la Vierge. Etudes historiques sur
les traditions orientales,London 1995,n. I.
13. J. GRIBOMONT,Le plus ancien Transitus' marial et l'encratisme»,
Augustinianum 23 (1983),p. 237-247.
14. F. MANNS,Le recit de la dormition de Marie (Vatican grec 1982).
Contribution a l'etude des origines de l'exegese chretienne (Studium
Biblicum Franciscanum.Collectio Maior 33), Jerusalem1989.
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P. F. BEATRICE
ment ignore -pour autant qu'il nous a ete possible de Ie verifier.
Toutefois, meme si la Theosophie n'offre aucun element pour
definir avec precision Ie contenu de ce texte marial, nous
sommes en me sure d'affirmer qu'il existait veTS 500 une
Assomption en langue grecque et que celle-ci rut jugee, deux
siecles plus tard, comme «apocryphe» par Ie pieux auteur
byzantin de l'epitome. Ce dernier avait ete precede par l'auteur
latin anonyme du soi-disant Decretum Gelasianumqui avait ecrit
au debut du VIe siecle : Liber qui appellatur Transitus dans cer-
tains manuscrits on a ajoute id est Adsumptio) sanctaeMariae
apocryphus16.
11 est un probleme encore plus delicat: L'auteur de la
Theosophie considerait-illa rEVVTlULS"t l' ,Ava;\,, /JLS"omme
deux ouvrages distincts ou comme une seule et meme reuvre
contenant tout Ie cycle de l'histoire de Marie, de la naissancea
l'assomption ? Le Protevangile de Jacquesa eu, des sesorigines,
une large diffusiow7. 11est facile d'imaginer qu'au lendemain du
concile de Chalcedoine, surtout dans les milieux syriaques
monophysites, on ait rapidement entrepris d'ajouter au fecit tra-
ditionnel et eprouve de la naissancede Marie et de Jesus e fecit
plus recent de la mort-assomption de Marie.. Cette operation a
eu pour result at la production de compilations comme celIe
qu'on trouve dans Ie palimpseste publie par Agnes Smith Lewis
et qui remonte a l'epoque de la Theosophie Ve-VIe siecles)ls,ou
comme celIe qu'on lit dans la Vie syriaque de la Bienheureuse
Vierge Marie editee par Wallis Budge19.11y a donc lieu de pen-
seTque l'auteur de la Theosophiea utilise une narration compo-
site comprenant Ie Protevangile de Jacqueset quelque forme du
Transitus qui, etant donne l'epoque tres reculee, devait etre
assezproche de la forme originale. On peut legitimement suppo-
seTqu'elle ne differait guere du texte qui nous est parvenu dans
15. S. MIMOUNI,Dormition et assomption de Marie. Histoire des tradi-
tions anciennes Theologie historique 98), Paris 1995.
16. E. VONDOBSCHUTZ,as Decretum Gelasianum de libris recipiendis
et non recipiendis in kritischem Text herausgegeben und untersucht
(Texte und Untersuchungen 38/4), Leipzig 1912,p. 53 et 303-304.Voir
en demier lieu S. MIMOUNI,«Les Transitus Mariae sont-ils vraiment
des apocryphes? », dans E. A. LIVINGSTONEed.), Studia Patristica
XXV, Leuven 1993,p. 122-128.
17. E. DE STRYCKER,a forme la plus ancienne,donne toutes les refe-
rences.
18. A. SMITHLEWIS, pocrypha Syriaca: the ProtevangeliumJacobi and
TransitusMariae (Studia Sinaitica XI), London 1902.
19. E. A. WALLISBUDGE,The History of the BlessedVirgin Mary and
the History of the Likeness of Christ, London 1899, , p. 3-146.
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A THEOSOPHIE DE TUBINGEN
leg fragments des Obsequiae syriaques et dans Ie Liber requiei
ethiopien20, c'est-a-dire du texte qui fut rejete par la suite, a par-
tir des VII'- VIII' siecles, comme apocryphe et heretique par des
auteurs tels que Ie Ps.-Meliton et Jean de Thessalonique. Les
mots r~VVTlUlS" Kat 'AVaAll< JlS" e designent donc pas deux
ouvrages distincts mais bien un seul texte pourvu d'un titre com-
pose, semblable au titre L1la81']KTl aU KUPlOU at 8laTa~ElS"TWV
clYlWV TTooToAwvquidesigne l'Octateuque de Clement.
4. L'immortaliteprovisoired'Elie et d'Henoch.
L'information qui nous est fournie par I'auteur de I'epitome
sur I'utilisation de traditions apocryphes dans la Theosophie est
confirmee par la presence imposante d'Oracles sibyllins dans Ie
seul fragment original de I'ouvrage qui nous soil connu jusqu'a
present. Ce fragment flit edite par K. Mras qui I'identifia dans Ie
codex Ottobonianus gr. 378, f. 18r-2Sv,du XVIe siecle21 mais Ie
me me texte se trouve deja dans Ie codex Mutinensis gr. 126
(olim III D 7), f. 288v-294v, des XIIIe-XIVe siecles22. Nous ne
pouvons aborder ici les problemes poses par la presence de ces
oracles dans la Theosophie; its meriteraient d'etre traites a part.
II convient toutefois de signaler que I'auteur de la Theosophie,
en commentant Ie vers d'une Sibylle, affirme :
8l E'YKpaTElav 'Yap 'HAlas- clVEATj<j>~ Kat 8la 1TlUTEWs-EvWX
~ETETE~ ElS-TOVclEl8aAfl1Tapa8Eluov (pour sa chastete, en effet,
Elie flit eleve auciel et pour sa foi Henoch flit transfere dans Ie
paradis toujours fleuri) ;
aussitot apres on
~it :
Kat 8lU TOt) ul anilaal TOV TOt) 8Eot) AOyov '1 wavVTlS' () Evay-
YEMaTf]S' lEVEL' Ot iTpoAEXeEVTES' WS' f]S' &:UTEpaS'TOt) Kuptou
iTapouataS' 8avaTou U[lOlpOS' (et du fait qu'il aima Ie Logos de
Dieu, Jean l'evangeliste Teste exempt de mort comme les per-
sonDages susdits jusqu'a la seconde venue du Seigneur)23.
L'idee qu'Elie et Henoch n'ont pas connu I'epreuve de la mort
20. Arras a eu Ie merite de signaler que Ie texte ethiopien reproduit des
fragments syriaque;s eja publies par Wright.
21. K. MRAS, «Eine neuentdeckte Sibyll en-Theosophie », Wiener
Studien28 (1906),p. 43-83.
22. Voir O. STAHLIN,ClemensAlexandrinus (GCS 123),Berlin 1972,p.
XXV-XXVII.
23. ERBSE, . 86-87.
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A THEOSOPHJE DE TOBINGEN
Bibliotheque de Photius :
Comme temoins de ces paroles, il y a Henoch, Elie et Jean
Ie Fils du Tonnerre, qui survivent avec leur corps... Que Jean,
Ie disciple vierge, survive lui aussi, comme tu as cherche a Ie
savoir, tout comme Henoch et Elie, la tradition l'atteste et les
paroles de l'Evangile nous conduisent dans Ie meme sens...
Cette opinion a aussi 'appui des Actes de Jean e Bien-aime et
sa vie que beaucoup mettent en avant31.
A la meme epoque, Andre de Cesareeaccepte cette croyance
dans son Commentaire de l'ApocalYPse32. r, si l'on admet que
Ie texte transcrit dans les manuscrits Mutinensis et Ottobonianus
est authentique et original, il taut admettre que l'auteur de la
Theosophie appartient au groupe de ceux qui, camille Ephrem
et And~e, affirmaient l'assomption de Jean au meme titre que
celIe d'Elie et de Henoch. Il serait par consequent e plus ancien
temoin connu de cette tradition. On ne peut toutefois pas exclu-
re que la phrase concernant Jean ait ete ajoutee apres coup par
un copiste qui entendait combler ainsi ce qui devait passera ses
yeux pour une lacune irrespectueuse; la Theosophie n'aurait
alors affirme que l'immortalite provisoire d'Elie et d'Henoch.
Quoi qu'il en soit, l'introduction des deux figures d'Elie et
Henoch, avec ou sansJean, nous invite a considerer de plus pres
les conceptions eschatologiquessous-jacentesa notre texte.
Une chroniquemillenariste.
'ElTL TEAEl BE TOU TEUXOUS' XPOVlKOV UVVTOI1WTaTOV TE6ElKEV
alTO 'Aool1 EWS' TWV Zi]vwvQS' XpOvwv, EV c/J KaL 8llUxvpl(ETal
I1ETU TJ'jv UVl1lTAi]pwalV TOU E~aKlUXlALaaTOU 'ETOUS' YEvi]UEaful
Tl'}V uuVTEAElav. 'ElTEL yap YEypalTTal, <I>TlUl, ()Tl XlALa 'ET'l lTapa
Tl J KUplcp cly:; 1'lI1Epa I1la, EV E~ 8E 1'lI1EpalS' b 8EOs- TOV KOOl10V
lTOlTpQr; Tfj Ef3&JI11JKQTElTQOOE, lTclVTWS' XM ~ETa Tl'}V lTQpEAEOOlV
TWV E~QKlUXlMwv ETWV, alTEr aVTL E~ 1'l~Ept'j)V AOYl(ETQl, Ta lTclVTQ
KQTQlTQOOQl. 8l0 KaL b XplaTOs- EV Tl J lTEVTQKlUXlALOOTl J lTEVTQ-
KOOlOOTl J 'ETEl EVQvepw1Ti]UQr;, ELT' oW EV Tl J I1EUcp ~ 1'l~EpaS',
'EAEYEV OTl EUXUTll wpa EUTlV.
31. Photius, Bib/. 229 (ed. R. HENRY, . IV, Paris 1965,p. 139-141).Voir
a ce propos E. JUNODet J.-D. KAESTLI,L'histoire desActes Apocryphes
des Apotres du IIIe au Ixe siec/e.. e cas desActes deJean (Cahiers de la
Revue de Theologie et de Philosophie 7), Geneve -Lausanne -Co
Neuchatel1982, p. 115-116.
32. Andre de Cesaree,Com. Apoc. 29 (PG 106, 309B-C).
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P. F. BEATRICE
Voici ma traduction:
A la fin de l ouvrage, l auteur de la Theosophiea place une
chronique tres concise qui allait d Adam jusqu aux temps de
Zenon (t 491), chronique dans laqiielle il soutient que la fin
du monde adviendra apres l achevement de la six millieme
annee. « Camille il est ecrit, dit-il, que mille aDs pour Ie
Seigneur sont camille un seul jour (2 P 3, 8) et que Dieu,
ayant fait Ie monde en six jours, se reposa Ie septieme, il est
absolument necessaireque, passessix mille aDS,qui sont cal-
cules au lieu des six jours, Ie monde finisse. C est pour cela
aussi que Ie Christ, qui s incarna dans l annee 5500, c est-a-
dire au milieu du jour, dit que c est Ie dernier jour (1 In 2,
18)33. »
L importance historique de cette information tIes interessante
ne semble pas avoir ete saisie dans toute son amp eur. L auteur
de la Theosophieraftage evidemment, comme beaucoup
d autres chroniqueurs des lye et ye siecles, la conception de
l histoire fondee sur la typologie hexameronale de la semaine
cosmique, qui place l incarnation du Christ dans l annee 5500 a
partir d Adam et Ie second avenement du Christ en l an 6000,
c est-a-dire veTS 00 ap. J.-C. Cette conception, comme nous Ie
savons grace aux etudes fondamentales de Gelzer34 et de
Grumel35,a ete elaboree au debut du lIIe siecle par Hippolyte36
et par Jules Africain37, et elle s est imposee comme canonique
dans la tradition chronographique protobyzantine. En particu-
lief, on peut noter que si Ie Theosophiste suivait, comme c est
probable, la chronologie alexandrine de Panodore et Annianus,
ERBSE, . 2.
34. H. GELZER, Sextus Julius Africanus und die byzantinische
Chronographie, Leipzig 1885, , en particulier p. 24-26.
35. v: GRUMEL,Traite d etudes byzantines, . La chronologie, Paris 1958.
D autres travaux utiles sur cette matiere tres compliquee sont : K.-H.
SCHWARTE,Die Vorgeschichte der augustinischen Weltalterlehre
(Antiquitas, Reihe 1 : Abhandlungen zur alten Geschichte, Band 12),
Bonn 1966, p. 119-176, et A. STROBEL,Ursprung und Geschichte des
fruhchristlichen Osterkalenders (Texte und Untersuchungen 121),
Berlin 1977,p. 397-412.Pour la diffusion de cette idee dans a litteratu-
re syriaque voir en dernier lieu W. WITAKOWSKY, The Idea of
Septimana Mundi and the Millenarian Typology of the Creation in
Syriac Tradition», dans R. LAVENANT ed.), V Symposium Syriacum
(Orientalia Christiana Analecta 236), Roma 1990,p. 93-109.
36. Hippolyte, Com. Dan. IV, 23, 2-5 (GCS 1/1, p. 240 suiv.).
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LA 1HEOSOPHIE E TUBINGEN 119
il devait attendre la fin du monde pour l an 507/838.Ce n est
qu au VIe siecle qu Hesychius de Milet et Jean Malalas ant prig
leurs distances avec cette chronologie pour placer l incarna-
tion en l an 5967 et la crucifixion en l an 6000, demontrant
ainsi que Ie dernier millenaire etait deja amorce depuis de nom-
breux siecles sans que la fin du monde si redoutee ne se
produise39.
Dans ce contexte, DOUg evons considerer plus attentivement
l information sur la breve chronique qui concluait la Theosophie.
Partant d Adam, elle s etendait jusqu a l epoque de l empereur
Zenon. Cela signifie qu elle fut composee aux temps d Anastase,
plus precisement, entre 491 et 507/8, date presumee de la fin du
monde. Nos connaissances ur la chronographie des deux siecles
qui vont d Eusebe a Malalas sont malheureusement tres limi-
tees, a cause du silence des sources.Celie situation documentai-
re difficile ne DOUg mpeche outefois pas de relever que la chro-
nique qui concluait la Theosophie presente des similitudes
impressionnantes que perganDe,a ma connaissance,n a encore
signalees -avec leg Excerpta latina Barbari, c est-a-dire la tra-
duction latine, composee a l epoque merovingienne, d une chro-
nique grecque universelle aujourd hui perdue. Celie traduction
est connue egalement SallS e titre de Barbarus Scaligeri, du nom
de son premier editeur. Des opinions divergentes ant ete expri-
mees au sujet de la provenance et de la structure de sa source
grecque40.A man avis, il existe au mains trois bonnes raisons de
la mettre en rapport avec la chronique finale de la Theosophie.
En premier lieu, s il est vrai que la chronographie du Barbarus
s interrompt en l an 387, il faut admettre que sa source grecque
directe, qui developpe et met a jour une chronographie alexan-
drine datable du debut du Ve siecle, a ete composee SallS
37. Jules Africain, Exc. 10 (ed. M. J. ROUTH,Rei. sacr. II, Oxonii 18462,
repro Hildesheim-New York 1974,p. 246) ; Exc. 50 et 51 (p. 297-306).
38. Sur Panodore voir en dernier lieu W. ADLER, Time Immemorial:
Archaic History and its Sources n Christian Chronography from Julius
Africanus to George Syncellus (Dumbarton Oaks Studies 26),
Washington D. C. 1989,p. 72-105.
39. Malalas, Chronogr. X (ed. DINDORF, . 228-229). Bonne discussion
dans es Studies n John Malalas,ed. by E. JEFFREYSith B. CROKE nd
R. SCOTT Byzantina Australiensia 6), Sydney 1990, en particulier p.
116-121.
40. Voir l introduction a l edition de C. FRICK, Chronica Minora,
Lipsiae 1892, , p. LXXXIIl-CCIX.
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Anastase (491-518), exactement comme la Theosophie,puisque
Ie laterculum mperatorum inclut cet empereur41, euxiemement,
il faut souligner -outre celie coincidence chronologique impor-
tante concernant a date de composition des deux textes -que la
source grecque du Barbarus, tout comme Ie Theosophiste, date
l incarnation en l an 550042, n reprenant la chronologie de Jules
Africain, un auteur explicitement mentionne avec approbation
dans deux autres passages e la chronique43.Troisiemement -et
il s agit 1ftsans doute de I. element e plus important pour notre
theme -, la source grecque du Barbarus utilise quelques extraits
du Protevangile de Jacques44 our l histoire de la naissancede
Jesuset de saint Jean Baptiste; ce texte apocryphe n est genera-
lement pas employe dans la tradition chronographique mais il
etait, comme nous l avons vu, bien connu de l auteur de la
Theosophie.
La tentation est donc forte d identifier la source grecque du
Barbarus avec la chronique qui concluait la Theosophie. Dans
tOllS es cas, a comparaison entre ces deux textes est eclairante,
comme l est aussi a comparaison avec certains textes de Severe
de Sozopolis, devenu patriarche monophysiste d Antioche (512-
518).
6. La Theosophie t Severe Antioche.
On a vu que l auteur de la Theosophieutilisait, entre autres,
un texte « apocryphe» de tendance clairement monophysite,
l Octateuque de Clement,et cela quelques annees avant qu il ne
soil cite par Severe d Antioche. II s agit d une coIncidence qui
confirme l existence de profondes affinites culturelles et theolo-
giques entre les deux ecrivains, sur lesquelles ai deja attire l at-
tention ailleurs45. Un element supplementaire, qui va dans Ie
meme sells, est foumi par la conception de l histoire et de l es-
chatologie. Severe, si l on en uge par la documentation qui nous
est parvenue, ne s est amais attarde longuement aux problemes
41. C. FRICK, . 330.
42. C. FRICK, . 338.
43. C. FRICK, . 264 et 266.
44. C. FRICK, . 338-343.Voir H. GELZER,Sextus ulius Africanus, II, p.
316-329.
45. J ai developpe cet argument dans la communication presentee au
Third Meeting of the International Society for the Classical Tradition,
Boston University, 8-12 March 1995 «Monophysite Christology in an
Oracle of Apollo ».
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121
A THEOSOPHIE DE TUBINGEN
touchant aux realites ultimes46.Toutefois, il revele son point de
vue dans deux textes, que je cite dans la traduction anglaise de
E. W. Brooks:
In six days, as the writings of the blessed Moses mystically
teach us, God made this visible world, and on the seventh he
rested. This same period therefore during which we men live
in this world, like a wheel, turns and revolves round itself in
the spaceof sevendays...47
If Jews and heathens accepted the words of the apostles,
we should have said what Peter says in the second epistle:
« One day with the Lord is as a thousand years, and a thou-
sand years as one day...» John the Evangelist also when he
said in his epistle, «Children, it is the last season hour) », did
not speak falst:ly... And, to put it in another way, since 5000
years and more had passedsince he world came nto being, as
the writings of Moses have handed down to us, and from
Christ's coming there has not yet been completed as much as
600 or 700 or 1000 years (let us concede this), how can it
appear unreasonable to apply the term «last» to the days of
the 600 years or may be 1000, when compared with those of
the 500048?
On ne manquera pas de remarquer la coincidence impres-
sionnante constituee par la presencedans la citation de la lettre
81 des de~ versets bibliques -2 P 3, 8 et 1 In 2, 18 -que nons
retrouvons dans a Theosophie, ans un contexte analogue.Dans
la lettre 93, Severecritique ouvertement, sur a base de In 21, 23,
l'ignorance et Ie manque d'information de ceux qui soutiennent
que Jean l'evang~liste ne partage pas Ie destin mortel commun
aux hommes, mais continue a vivre comme Henoch et Elie49. I
se range ainsi du cote des critiques de cette theorie, comme l'au-
teur des Dialogues du Ps.-cesaire50, t rejette la position defen-
due par l'antimo1 lophysisteEphrem, son successeur ur Ie siege
episcopald' Antioche, et par Andre de Cesaree. I est donc diffi-
cile de penser que Severe, s'il est vraiment l'auteur de la
Theosophie, ait pu ecrire que Jean partageait Ie sort d'Elie et
d'Henoch. Nous avons peut-etre ici un element renfor<r'ant otre
46. Des textes sont recueillis par W. DE VRIES,«Die Eschatologie des
Severus van Antiochien », Orientalia Christiana Periodica 23 (1957),p.
354-380.
47. Severe,Epist. 79 (PO XIV, p. 125).
48. Severe, Epist. 81 (PO XIV, p.128-131).
49. Severe,Epist. 93 (PO XIV, p. 170-177).
50. Ps.-Cesaire,Dial. 198 (GCS, p.173-175).
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122
P.F. BEATRICE
hypothese: la phrase de la Theosophie elative a l immortalite
provisoire de Jean ne serait pas originale et devrait etre conside-
fee comme une interpolation posterieure, emanant de milieux
oil la croyance en l assomption de Jean etait consideree comme
absolument necessairea l orthodoxie.
Ce que nous venons d exposer demontre a notre avis la neces-
site de considerer la Theosophiesous un nouveau our. Si dans
ce demier siecle ce sont surtout leg historiens des religions et des
philosophies de l Antiquite palenne qui ont exploite sa richesse,
Ie moment semble venu de l introduire dans Ie circuit non moins
prometteur des recherches sur la litterature chretienne, patris-
tiQue et apocryphe, des premiers siecles.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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LouisREY
Universitede Geneve
HOMER 0 CENTRA ET LITTERATURE
APOCRYPHE CHRETIENNE : QUELS
RAPPORTS?
This paper begins with an introduction about the cento genre, an
extreme orm of paraphrasis,and summarizes he information on the two
main collections of Homerocentra, i. e. homeric centones on the
Incarnation, life and Passionof Christ. Although the canonical Gospels
are their main source,an influence of apocryphal traditions can be estab-
lished in some cases.On the other hand, the centonists reatedsome top-
ics for which no direct model was available, and their text can achieve
there a certain apocryphal status.Examplesare given from the collection
of Homerocentra of which the author will shortly publish the first com-
plete and critical edition in the SourcesChretiennes series.
Apres une introduction sur Ie genre du centon, orme extremede para-
phrase, et l etat des connaissances ur les deux principales collections de
centons homeriques chretiens (les Homerocentra), cette communication
traite des sources de ces derniers. Bien que les Evangiles canoniques
soient la principale d entre elles, l influence de traditions apocryphes
connuespeut parfois etre decelee; d autre part, en l absencede modeles
directs pour certains episodes raitespar les auteurs des centons,on peut
y voir des developpements paralleles a certains apocryphes. Des
exemplessont donnes,a partir de la collection de Homerocentra dont
l auteur a etabli la premiere edition complete et critique, a paraure pro-
chainementdans a collection SourcesChretiennes.
Pour pouvoir repondre de maniere sure et exhaustive a la
question que pose ce titre, il faudrait disposer d editions cri-
tiques fiables tant des diverses collections de centons home-
riques chretiens que de I ensemble de la litterature apocryphe
qui pourrait avoir existe en grec dans I Antiquite tardive. Or, si
Ie travail est en COUTSt progressedans es deux:domaines, l est
loin d etre acheve. Ce sont donc plutot des pistes de recherche,
Apocrypha 7, 1996,p. 123-134
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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124
A.-L. REY
etablies sur des bases partielles, que je vais tenter d esquisser.
Malgre Ie caractere foisonnant de la litterature apocryphe chre-
tienne, je puis supposer ici qu elle est familiere au lecteur, et il
ne revient certainement pas a un philologue venu de l etude de
la litterature grecque classiquea celIe de la civilisation byzantine
de completer son information sur ce point. Peut-etre en
revanche Ie genre litteraire du centon et ses manifestations
grecques chretiennes meritent-ils quelques mots d introduction.
centons et Homerocentra.
Le renton, piece composee sur un theme donne avec des ele-
ments empruntes a un ou plusieurs ouvrages preexistants, peut
etre considere comme une forme extreme de paraphrase. En
effet, la paraphrase varie la forme d un texte, en substituant par
exemple la prose a la poesie ou un niveau stylistique a un autre:
dans Ie renton, c est la totalite des mots et des toumures qui est
empruntee a un auteur et mise au service de l expression d un
nouveau contenu. Un exemple celebre est, dans Ie domaine latin,
Ie centon nuptial d Ausone1 : des veTsde Virgile sont agencesde
maniere a evoquer les diversesphasesd une noce ; dans la lettre
qui encadre ce texte, Ausone donne les regles de la composition
d un centon de qualite, et sa definition est regulierement citee
dans les etudes consacreesa ce genre. Les centons conserves,en
particulier en angue grecque, sont cependantsouvent d un niveau
d exigence technique inferieur a celui que preconise Ausone, et
leurs auteurs se satisfont notamment de la juxtaposition de veTS
entiers la ou Ie lettre bordelais recommandait de combiner deux
hemistiches pour former un veTS u un veTset demi et un hemis-
tiche pour en former deux. La mention de ces regles nous permet
d evoquer ici la lourdeur des contraintes formelles qui resent sur
la redaction d un renton, et ce meme dans Ie cas d un centon mal-
habile : il faudrait en principe reprendre leis quels, ou a defaut
alterer Ie mains possible les veTS mpruntes au texte qui sert de
1. Compose dans la deuxieme moitie du lye siecle, peut-etre en 368-
369, alors qu Ausone etait en service contre les Alamans, ct. A.
PASTORINO, pere di Decimo Magno AUSONIO, urin 1971,p. 93, ou
veTS374, a l occasion des noces de Gratien, selon l opinion du demier
editeur, R. P. H. GREEN,The Works of AUSONIUS, xford 1991,p. 518.
Sur le genre du centon en general, ct. G. SALANITRO Centoni », dans
Lo Spazio letterario della Grecia antica, dir. G. Cambiano, L. Canfora,
D. Lanza, vol. 1 : Produzione e la circolazione del testa, . 3 : I greci e
Roma, Rome 1994,p. 757-774.
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125
OMEROCENTRA ET LITrERATURE APOCRYPHE
materiau et de modele stylistique, epopee homerique dans e cas
qui DOUgnteresse, out en parvenant a une syntaxeacceptablede
l ensemble et a une expression uffisante du gensde chaqueepiso-
de traite. Sur ce dernier point, leg decalagesde vocabulaire et
d univers ideologique et culturel qui separent epopee classique
du fecit chretien dressentde serieuxobstaclessur Ie parcours des
centonistes qui ont entrepris de doDDer un habit virgilien ou
homerique a Jesusde Nazareth.
Nous laisseronsde cote leg centons virgiliens et la tradition de
paraphrases epiques latines de textes scripturaires, a laquelle
d ailleurs ont ete consacreesplusieurs etudes2,pour DOUg tta-
chef aux collections de centons homeriques chretiens qui DOUg
ont ete conserveespar la tradition manuscrite directe du Moyen
Age byzantin. II existe en effet plusieurs collections de longueur
et de composition differentes, meme si leur ordonnance genera-
Ie est toujours analogue. J ai pu repertorier pour l instant pres
de trente manuscrits, parmi lesquels eg uns se rattachent a une
tradition e:ditee a la Renaissance, dont Ie texte, avec ses 2343
vers repartis en 53 chapitres, est Ie plus long, tandis que la plu-
part des autres donnent des versions succinctes, longues de
quelques centaines de vers seulement3. Un manuscrit du xe
siecle, Ie Parisinus suppl. gr. 3884 est enfin Ie seul -a part leg
restes de deux folios relies au debut d un recueil de la
Bibliotheque Vaticane, Vaticanusg7: 9155 -a DOUgransmettre
2. Notamment les monographies de R. HERZOG,Die Bibelepik der latei-
nischen Spiitantike (Theorie und Geschichte der Literatur und der scho-
nen Ktinste, 37), Munich 1975 D. KARTSCHoKE, ibeldichtung, Studien
zur Geschichteder epischenBibelparaphrase van Juvencus his Otfrid
van Weij3enburg, Munich 1975; M. ROBERTS,Biblical Epic and
Rhetorical Paraphrase n Late Antiquity (ARCA, 16), Liverpool 1985,
ainsi que l edition du centon de Faltonia Betitia PROBA ar E. CLARKet
D. HATCH,The Golden Bough, the Oaken Cross, he Virgilian Cento of
F. B. P. (American Academy of Religion), s.l. 1981.
3. Sur ces differentes traditions des Homerocentra,cf. P. MORAUX, La
Redemption racontee en vers homeriques », dans Actes du xe congres
(Toulouse,8-12 avril 1978), Association Guillaume Bude, Paris 1980,p.
132-133; A.-L. REY, «Un manuscrit de la Renaissance con enant les
Homerocentra : Ie Palat. gr. 326 complete par des sections du recueil
factice Vallic. F 16 », dans Scritture, Libri e Testinelle aree provinciali di
Bisanzio, Atti del seminario di Erice (18-25 settembre1988),a cura di G.
Cavallo, G. de Gregorio e M. Maniaci, Spoleto 1992,p. 603-616; et R.
SCHEMBRA,La quarta redazione degli Homerocentones», Sileno 19
(1993),p. 277-293.
4. Les deux epigrammes-prefacesdont il va etre question et Ie texte des
Homerocentra occupent es fol. 2 a 44.
5. Les fol. 1 aet 2.
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126
A.-L. REY
un choix de centons de divers auteurs, si l'on en croit son titre6;
ce choix est legerement plus court que la collection editee a la
Renaissance puisqu'il comporte 1950 veTSenviron, en 50 cha-
pitres. La disparite des niveaux de qualite de ces chapitres, ou
centons, chaque chapitre formant un tout, est considerable et
concorde avec la pluralite d'auteurs mention nee dans Ie titre,
sans qu'on puisse malheureusementpour l'instant atlribuer indi-
viduellement les centons a tel ou tel d'entre eux.
Les donnees que l'on peut lifer des titres des manuscrits soot
completees par deux epigrammes, transmises par une partie
d'entre eux. La premiere presente en outre une tradition inde-
pendante, car elle figure dans l'Anthologie Palatine I, 119, sous
Ie titre de 'liTo6EULS WV O~llPOKEVTpWV.lle mentionne tout
d'abord, aux veTS1 a 4, l'auteur, la methode et Ie but de son
ouvrage :
BL[3AOSaTpLKLoLOEou8EOSPllTflP°S ,
oS E'YaEP'YOVpE~EV,O~llPELllS iTO3L[3AOU
Ku8aAL~wviTEWVEu~aS PLL~OVUOL81'1v,
iTP1'I~LaS U'Y'YEAAouuav UVLK1lTOLO 8EO1o7.
Ensuite, dans une longue enumeration qui,n'est malheureuse-
ment pas toujours aussidetaillee qu'on Ie voudrait pour pouvoir
identifier leg centons qui se rattachent a ce programme, l'epi-
gramme donne l'argument d'une collection de centons qui va de
l'incarnation a la resurrection.
La seconde epigramme est donnee dans leg manuscrits qui la
transmettent comme etant l'reuvre d' Aelia Eudocia8,epouse de
Theodose II, imperatrice dont la biographie est fiche en evene-
ments romanesques,et romances des eg chroniqueurs byzantins.
Ceci explique qu'on ait parfois eu tendance a ne preter attention
qu'a ce personnage certes important, et qui etait aussi l'auteur
de paraphrases epiques commentees par Photius dans sa
Bibliotheque, cod. 183 et 1849.Le nom d'Eudocie ne figure pas
6.' O~TlpoKEVTpwV laTplKloU ETTlcrK6TrOUat 'OrrTl~OU </>lAOO6<j>oUat Ei.&KlaS'
AiJyolxm]S' Kat Koo~a 'IEpooOAUI1lTOU TWV TTclVTWVElS' EV(y;; cruvef]~aTOS'
EKAOy1']V.
7. «Livre de Patrikios, pretre qui a la crainte de Dieu, et qui executa un
grand ouvrage, pour avail bati, des vers illustres tires du livre home-
rique, un tres precieux poeme, annonciateur des actes de Dieu, l'invin-
cible ».
8. PLRE II (AD 395-527) s. n. «Eudocia 2» ; ct. A.- M. ALFIERI,
«Eudocia Augusta», Rose di Pieria (ouvr. colI.), Bari 1991, p. 315-336.
9. II s'agit d'une paraphrase de l'Octateuque (cod. 183) et de la para-
phrase des livres prophetiques de Zacharie et de Daniel, accompagnee
dans Ie meme volume (TEUXOS-) par celIe du roman hagiographique de
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127
OMEROCENTRA ET LITrERATURE APOCRYPHE
dans 'epigramme, mais son auteur est bien une femme (v. 34-35)
et pretend avoir acheve et corrige l'ouvrage de Patrikios :
"H8E ~E:V L<JTopt11 8EOTEplTEOC; E<JTlV aol8fJC;.
llaTptKloC; 8', ()soT1'JV8E <Jo<j>wc; vEypatJ;aTo (3t(3AOV,
E<JTl ~E:V aEvaolo 8la~lTEpE:C; a~lOS" d(vov,
owEKa 8T1lTa~lTpWTOC; E~1']<JaTo Ku8l~OV EPYOV.
5 aAA E~TrT1C;u lTay~v ET1'JTV~aTaVT'ayopEvEV'
a).J..'E .lTTllS' uvoS' .lEVE<PU TOVOS' .l<poTEpOLUL
35 llaTpLKLcp Ka .lOL, KaL 1flAUTEPlJ TEP OVU1]IO.
Un troisieme auteur, Ie «philosophe Optimus» est mentionne
par Ie titre du Parisinus suppl. gr. 388, et en quatrieme et dernier
lieu COmede Jerusalem, 'hymnographe dont la tradition fait Ie
frere adoptif de Jean Damascene, et qui vivait au VIIIe siecle11.
Cyprien d'Antioche, en trois livres ou chants (cod. 184). Le resume que
fait Photius de ce demier texte a permis d'en identifier des Ie XVllle
siecle des fragments etendus dans un manuscrit de Florence (Laur. VII,
10), dont un folio, arrache au XVII" siecle, se trouve a Leyde (Leid.
BPG 95). Cf. l'edition dans la Bibliotheca Teubneriana par A.
LUDWICH, EUDOCIAE AUGUSTAE,PROCLI LYCII, CLAUDIANI carminum
graecorum reliquiae, accedunt Blemyomachiae fragmenta, Leipzig 1897,
que l'on peut completer par E. SALVANESCHI,«Un Faust redento» et
«Eudocia, De S. Cypriano », <TVy/(ptc1tS", Testi e studi di storia e filoso-
fia dellinguaggio religioso, Genes 1982, p.1-10 et 11-99, et, pour Ie folio
de Leyde, C. BEVEGNI, «Eudociae Augustae Martyrium S. Cypriani I,
1-99 », Prometheus 8 (1982), p. 249-262. Sur l'activite poetique d' Aelia
Eudocia ell; general, on consultera A. LUDWICH, «Eudokia, die Gattin
des Kaisers Theodosios II, als Dichterin », Rheinisches Museum fur
Philologie, N. F. 37 (1882), p. 206-225 ; E. SALVANESCHI, E:E AAAOY
AAAO, Antico e tardo-antico nelle opere di Eudocia Augusta », L1E<TJ10S"
/(otVlIJv{aS",Scritti di filologia e filosofia per Gianfranco Bartolini nel
secondo anniversario della scomparsa, a cura di Gianfranco Fabiano e
di Enrica Salvaneschi, Genova 1981, p. 125-188; et AI. CAMERON,«The
Empress and the Poet: Paganism and Politics at the court of
Theodosius II », Yale Classical Studies 27 (1982), p. 217-289.
10. V. 1-5 : «Voici l'histoire d'un chant agreable aDieu: Patrikios, qui
ingenieusement ecrivit ce livre, est certes digne d'un eloge continuelle-
meat intarissable, parce qu'assurement il imagina, Ie tout premier, un
glorieux ouvrage. Mais cependant il n'enon~a pas tout d'une maniere
absolument vraie : ...» ; v. 34-35 : «Mais quoi qu'il en soit, un travail
s'est developpe, commun a tous deux, a Patrikios et moi, bien que je
sois femme; ...».
11. Cf. A. KAZHDAN -S. GERO, « Kosmas of Jerusalem: a more critical
approach to his biography», Byzantinische Zeitschrift 82 (1989) p. 122-
132.
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A.-L.
REY
Bien que cette serie d auteurs nommes dans Ie titre du manus-
crit de Paris offre une palette assez arge de contextes d origine
possibles pour la redaction des divers centons, la finalite origi-
Delle probable de ces textes est vraisemblablement celie qui est
attestee pour nous par Ie caractere scolaire du manuscrit12,et
qui est confirmee par celui de plusieurs manuscrits, recueils poe-
tiques ou mixtes, qui transmettent les autres collections de
Homerocentra. Ces derniers permettaient l apprentissage de la
langue epique sans exposer es jeunes eleves a l influence perni-
cieuse de l ideologie palenne du veritable Homere : nous avons
la Ie reflet des debats sur l enseignement chretien que nous pou-
vans suivre aux quatrieme et cinquieme siecles. Heureusement
pour la transmission des textes classiques, a solution qui preva-
lut rut la generalisation d une attitude de respect a l egard des
modeles stylistiques authentiques, dont la lecture rut jugee pos-
sible, pour peu qu elle flit assortie des gardes-fous que consti-
tuent la selection des passagesa lire et l interpretation morale,
souvent allegorique, de ceux-ci.
Les editions modernes, depuis la Renaissance usqu au XIxe
siecle, vont perpetuer cette perspective, comme en temoigne
l epitre dedicatoire de l edition Aldine, datant de 1502, dans
laquelle les Homerocentra soot integres a un choix de poesie
chretienne ancienne, grecque et latine. Parmi les editions ulte-
rieures, je ne mentionnerai que l edition genevoise d Henri
Estienne, en 1578, a un format de «livre de poche» qui laisse
supposer une large diffusion, puis celie du libraire Claude
Chapelet (Paris 1609), a l usage des colleges jesuites, et enfin
celie de Ludwig Heinrich Teucher (Leipzig 1793) derniere edi-
tion de cette tradition du texte. On notera par ailleurs que la tra-
duction latine seule (reprise de l Aldine) rut accueillie dans les
editions successives de la Magna Bibliotheca Patrum de
Marguerin de la Bigne, des a premiere edition de 157513.
12. Tel qu il ressort de la presence de nombreuses gloses nterlineaires
dans certaines sections du manuscrit, ainsi que du choix des textes
didactiques, gnomiques et epiques qui Ie composent.
13. Le texte grec apparait dans Appendix qua Christiani Poetae Graeci
et Latini continentul; Paris 1624. Sur les collections patristiques
anciennes, on consultera P. PETITMENGIN, Les patrologies avant
Migne », Migne et Ie renouveaudes etudespatristiques,Actes du colloque
de Saint-Floul; 7-8 uillet 1975,edites par A. Mandouze et J. Fouilheron,
Paris 1985 (Theologie historique, 66), p. 15-38; cette etude se termine
par un precieux appendice bibliographique decrivant ces Bibliothecae
Patrum. L edition de 1575 est Ie n° 1 de cette liste, l Appendix de 1624
Ie n° 11.
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129
OMEROCENTRA ET LITrERATURE APOCRYPHE
En revanche, la tradition representee par Ie Paris. suppl. gr.
388, n'avait fait l'objet jusqu'a present que d'une edition partiel-
Ie par A. Ludwich14; l'edition commentee que j'en ai realisee
paraitra prochainement dans la collection Sources Chretiennes.
En reference a Ludwich, je designe es chapitres de la tradition
qu'il a partiellement editee par la lettre L suivie du numero
d'ordre du centon.
En ce qui conceme enfin les etudes recentes consacreesaux
Homerocentra, diverses recherches italiennes sur les centons
sont tIes marquees par ce qu'on pourrait appeler la theorie
ausonienne du centon d'une part, et par la recherche des rap-
ports entre les contextes de depart et d'arrivee des veTSutilises
d'autre part15. Parmi ces lectures intertextuelles qui font une
large place a la theorie litteraire, il y a lieu de citer un travail de
litterature comparee dil a un savant hongrois, Attila Faj, et qui
porte sur les sources d'inspiration d'ouvrages de James Joyce16.
Thematique des Homerocentra et apocryphes.
Examinons maintenant Ie theme general des Homerocentra et
donc Ie type d'ecrits apocryphes avec lesquels des points de
contact peuvent etre attendus.
Les Homerocentra ont pour theme centrall'economie du saint
de l'humanite et sa realisation par l'incarnation du Christ, dont
la vie et la passion sont narrees usqu'a l'ascension, moment de
son retour dans les cieux ou II se trouvait, aupres du PeTe, oTS
du dialogue initial de l'ouvrage, dont nons verrons tine partie
plus en detail. C'est donc a priori essentiellement e theme des
Evangiles (Ie Protevangile de Jacques etant compris dans cette
categorie), et non celui d' Actes, d'Epitres ou d' Apocalypses, qui
14. Elle est ncluse dans Ie volume mentionne ci-dessus, ote 9, au sujet
de la paraphrasehagiographique sur Cyprien d' Antioche.
15. L'utilisation des centons camille elements de la tradition indirecte
des textes de depart, Homere et Virgile essentiellement,est egalement
un theme de ces etudes. Cf. A.- M. ALFIERI, «Eudocia e il testo di
Omero », Sileno 13 (1987), p. 197-219; EAD.,«La tecnica compositiva
nel centone di Eudocia Augusta », Sileno 14 (1988), p. 137-156; A.
PIGNANI, II modello america e la fonte biblica nel centone di Eudocia
imperatrice », Koinonia (KOLVwvta) (1985), p. 33-41 ; R. SCHEMBRA,
«L'Omero 'cristiano'. Varianti di cristianizzazione e 8ola s- nella 'quar-
ta' redazione degli Homerocentones », Sileno 20 (1994),p. 317-332.
16. A. F AI, « Probable Byzantine and Hungarian Models of Ulysses and
FinnegansWake »,Arcadia 3 (1968),p. 48-72.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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130
A.-L. REY
est traite dans ce texte. Des rapports peuvent neanmoins etre
envisagesavec d'autres textes apocryphes, notamment relatifs a
la descente du Christ aux enters. On connait en effet l'importan-
ce du theme de la passion et de la resurrection dans la memoire
chretienne ancienne et les developpements pris dans certaines
traditions par la periode separant la crucifixion de la resurrec-
tion. C'est ainsi que des recits la concernant se retrouvent dans
divers textes apocryphes, alors que cette periode, qui dans Ie
corpus canonique releve des Evangiles, n'est guere developpee
dans ceux-ci17. Des apocryphes prophetiques tels que
l'Ascension d'Isai e peuvent d'autre part fournir des paralleles
occasionnels, en l'occurrence pour Ie dialogue initial du PeTe et
du Fils dans les cieux. Enfin, des motifs isoles peuvent avoir ete
empruntes, que ce soit directement ou bien par des ntermediaires
litteraires ou iconographiques, a des sources apocryphesvariees,
que seuls les specialistes de ce domaine seront en mesure de
reconnaitre. Comme on peut Ie supposer a la vue du sommaire
des centons de Patrikios que donne l'epigramme AP I 119, les
Evangiles canoniques sont certainement Ie fondement de la
majeure partie des diverses collections de Homerocentra, de
meme que Ie corpus homerique fournit la quasi-totalite de leur
substance epique, avec de ires fares veTs d' Apollonios de
Rhodes et quelques veTS apparemment fabriques de to utes
pieces dans Ie style epique. Pour des raisons tenant largement a
la disponibilite du materiau narratif homerique, la part des recits
de miracles est ires importante dans l'ensemble des episodes
traites par les centonistes.
Sourcesapocryphesdes Homerocentra et caracteristiques
apocryphes e ceux-ci.
Jusqu'ici, j'ai evoque des influences eventuelles des apo-
cryphes sur les Homerocentra, nfluences dont nous examinerons
plus loin les modalites ; mais il y a lieu egalement d'envisager un
autre type de rapport: des elements plus ou moins etendus des
Homerocentra peuvent en effet presenter pour des raisons
diverses un caractere apocryphe original- j'utilise bien entendu
Ie terme «apocryphe », sans Ie jugement de valeur depreciatif
traditionnel, pour faire reference aux multiples ecrits non cano-
17. Ct. J.-C. PICARD, Memoire des origines chretiennes », Introduction
a H. KOESTER t F. BOYaN, Genesede ['ecriture chretienne, Turnhout
1991, . 12.
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-, HOMEROCENTRAET LnTERATURE APOCRyPHE 131
niques qui sont au centre du colloque de Lausanne-Geneveet de
la presente publication. 11ne faut bien entendu pas etiqueter '
comme apocryphe tout discours chretien des qu'il s'eloigne, ne
serait-ce que pour les expliquer et les completer, des elements
transmis par la tradition canonique : dans ce cas, une g'rande
partie de la predication chretienne devrait etre consideree
comme apocryphe Toutefois, dans Ie cas des Homerocentra, en
consideration de leur caractere de paraphrase evangelique'syste-
matique, il me semble legitime de rapprocher certaines donnees
du texte de ce que no us pourrions appeler 1a mouvance apo-
cryphe. Le caractere d'intertextualite present dans de tres nom-
breux ecrits apocryphes est par ailleurs inevitable du fait de la
nature meme du genre du centon : une double reference, a la
tradition epique et a la tradition evangelique, est constante,
meme si elle est diversement significative.
Examinons maintenant, dans un ordre de generalite croissante
et d'originalite croissante des Homerocentra, quelques cas ou,
dans l'etat actuel des recherches, l est possible de deceler une
influence d'un texte apocryphe, d'etablir un parallele entre cen-
tons et apocryphes, ou enfin de considerer qu'un centon presen-
te un apport original, distinct des traditions canoniques.
-Le cas Ie plus simple est celui ou un element du texte des
centons n'a pas de source canonique, mais correspond a une
donnee aisement identifiable dans un apocryphe : ainsi la que-
nouille que tient Marie dans Ie centon L3, v. 17 correspond a son
activite de fileuse pour Ie voile du temple daps Ie Protevangilede
Jacques ch. 10-11) et Ie trone sur lequel elle siege (L3, v. 7) yest
egalement mentionne18.Faut-il conclure a une influence directe
du texte du Protevangile sur Ie centon ? La prudence commande
d'envisager au moins deux autres explications: la reprise de ces
elements de maniere non intentionnelle dans Ie modele home-
rique, au gre de l'utilisation de vers susceptiblesde decrire une
jeune fille dans sa demeure, ou bien, ce qui est plus probable du
fait de la presence de deux elements communs, la quenouille et
Ie trone, l'utilisation d'une source iconographique, dependante
elle-meme du Protevangile,et dont Ie centon representerait une
sorte d'ekphrasis19; e centon presente toutefois, outre ces ele-
ments visuels, des points de contact thematiques, analyses par
18. Cf. K. SMOLAK,«Beobachtungen zur Darstellungsweise in den
Homerzentonen », lahrbuch der Osterreichischen Byzantinistik 28
(1978),p. 29-49,39 s.
19. Cf. par ex. la representation de cette scene sur un tissu de soie du
Museo Sacra du Vatican, reproduite dans A. GRABAR, Christian
Iconography, A Studyof its Origins, Londres 1969, ig. 249.
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132
A.-L. REY
Kurt Smolak dans l'etude citee en note, avec Ie Protevangile de
Jacques.Ce qui est certain, c'est que la sobriete du fecit de Luc
se perd dans leg tastes homeriques de la description de la scene.
-Apres ce cas ou une source apocryphe possible etait identi-
fiable, voyons-en un ou un element non canonique et peu com-
prehensible des centons pourrait s'expliquer par l'influence de
l'iconographie, refletant peut-etre aussi quelque tradition apo-
cryphe. Au centon L34, consacre a un miracle de multiplication
de pains et de poissons,se lit un veTS omerique transforme qui
met en scene Ie Christ prenant Pierre par une main et Paul par
l'autre; il est tentant de voir ici Ie centon comme une ekphrasis
reinterpretant une representation du type de celIe qui figure sur
Ie trone de l'eveque Maximien de Ravenne, il est vrai d'epoque
justinienne20. D'autres representations de la paire apostolique
formee par Pierre et Paul sont frequentes, sous des formes tou-
tefois plus eloignees de l'iconographie impliquee par Ie centon21.
-L'utilisation de sources preexistantes non canoniques ou Ie
recours a des innovations eventuelles du centoniste etaient inevi-
tables lorsque l'episode traite ne possedait pas de modele dans
leg evangilescanoniques. C'est notamment Ie cas du centon L222,
qui est une partie d'un dialogue entre Ie PeTe et Ie Fils, situe
dans leg cieux avant l'incarnation. L'Ascension d'Isai e, 10, 7,
comporte bien un discours du PeTe au Christ, mais Ie ton et leg
preoccupations de ce discours, parallele au premier centon de la
collection que DOUg tudions ici, sont bien differents, et il n'y a
pas de reponse du Christ. L' Evangile apocryphe arabe de Jean
(CANT 44) presente certes dans son premier chapitre (II, 1,
apres l' Introduction) des reflexions sur Ie statui des personnes
de la Trinite, qui sont un echo de In. 1,1-5, mais sansechangede
repliques entre PeTeet Fils. Un parallele plus etroit est constitue
par la doctrine de Marcion, au temoignage d'Eznik de Kolb : si
20. Ibid., fig. 257.
21. Cf. M. RASSART-DEBERGH,Representation d'apotres aux Kellia »,
Journal of Coptic Studies2 (1992),p. 29-42,35s.
22. Ce texte a ete reproduit a la p. 77 du volume des pre-actes du
Colloque, dans tine version allegee de l'edition a paraitre dans S. C.,
mais il fait partie de la section des Homerocentra publiee par Ludwich ;
apres un veTSormulaire d'introduction, il comporte (v. 2-148)a repon-
se du Fils, par laquelle il accepte e plan du PeTepour Ie saint, a savoir
l'incamation (L1, v. 26-63), et se conclut par trois veTS xprimant l'iden-
tite de leurs vues sur Ie saint. Cf. A. PIGNANI, Eu/)oKladel Padre, U1TOO-
TO).. ed u1TaKo del Figlio nel Homerocento di Eudocia
imperatrice »,Ta).ap[aKOS ,tudia graeca Antonio Garzya sexagenario a
discipulis oblata, Naples 1987,p. 209-223.
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HO:MEROCENTRAET uTrERATURE APOCRYPHE
133
l'expose que ce peTe armenien du ye siecle en fait est exact,
Marcion aurait mis dans a bouche de Dieu (Ie Dieu etranger au
monde) une injonction au Fils a aller sur terre, a accomplir des
miracles, usqu'a etre en butte a l'hostilite du Dieu des creatures,
a etre crucifie, puis a aller en liberateur dans leg enfers23.
L'absence de toute mention de reponse du Fils pourrait s'expli-
quer par Ie caractere de resume de l'expose, mais l'enchaine-
ment des injonctions du PeTe et du fecit de la resurrection
semble ires coherent et pourrait remonter a la source d'Eznik.
Des elaborations paralleles mais independantes me paraissent
ici pouvoir rendre compte des ressemblances ntre leg centons et
Ie texte heretique perdu, plutot qu'une derivation directe. Je
gerais donc tente de conclure ici a une elab~ration originale du
centoniste, construite logiquement, a la
cr nier~ de certains
exercices rhetoriques, a partir des donnees de la tradition, et
pour combler un vide de celle-ci. Je rattache ai a la mention de
ce discours la question des paroles mises aDS a bouche du
Christ dans eg centons, paroles conditionnee par ce qui se trou-
vait disponible dans leg materiaux homeriq~s. C'est ainsi que
leg paraboles manquent completement, et au'un discours du
Christ aux disciples qu'il vient de choisir, L 1~, constitue l'essen-
tiel de sa predication doctrinale. \
-La descente du Christ aux enfers est Ur1autre episode oil
l'influence des apocryphes est inevitable.IUn rapport avec
I' Evangile de Nicodeme (Acta Pilati) est en p rticulier plausible,
mais leg contraintes imposeesa la compositioq par la reprise des
materiaux homeriques soot telles qu'il est ~i~icile de conclure.
Quant a l'architecture generale des HomerJcentra, l'etude de
l'ordre des episodes decrits dans leg diverges ~raditions des cen-
tons et dans leg apocryphes pertinents n'est pas achevee, du fait
notamment qu'au moins l'une des collections :de centons est un
choix. II faudrait pouvoir reconstituer l'ordre originel de chaque
tradition, ce qui est d'autant plus difficile qu'ily a un risque que
leg collections aient connu des accroissementssuccessifs.Parmi
leg sources possibles de la sequence des miracles, il semblerait
en tOllScas que l'ordre du Diatessaronn'ait pasete suivi.
Si un certain caractere apocryphe semble b~.en insi etre pre-
sent dans une partie des Homerocentra et pou'jait preter Ie flanc
a des critiques de la part d'une orthodoxie nor~[lative, e fait que
leg centons pouvaient etre caracterises, pour majeure partie
23. Ct. EZNIK DE KOLB, De Deo, traduction tran~aise, notes et tables
par L. Maries et Ch. Mercier (Patrologia Orientali~ 28, tasc. 4), Paris
1959,§ 358,p. 663 s. .I
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A.-L.
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de leur texte, comme tine forme extreme de paraphrase, a but
scolaire, des Evangiles canoniques me semble expliquer la tole-
rance dont ils ant beneficie durant Ie Moyen Age byzantin. De
meme, la modestie relative de leurs pretentions theologiques et
leur caractere ouvertement secondaire en garantissaient 'inno-
cuite : on ne vail guere un groupe heretique s'appuyer pour sa
predication sur des centons homeriques Photius, qui avail
condamne leg Actes apocryphes24, 'avait rien trouve a redire
aux paraphrases (~ETa<t>paaElS'ans sa terminologie) d' Aelia
Eudocia dont il a ete question tout a l'heure ; il est dommage
que Ie savant patriarche ne nous ail pas laisse de notice sur les
Homerocentra.
]'annon'1'aisau debut de cet article des pistes de recherche. Le
dialogue, loTs du Colloque et, pour Ie lecteur, entre leg pagesdes
volumes des Actes, avec leg specialistes du domaine
apocryphe25, a permis et permettra de mieux identifier leg
influences des apocryphes et de caracteriser leg initiatives des
centonistes. 'espere que celles que je viens de mentionner don-
neront quelque envie de jeter un coup d'reil aces curieux
hybrides que sont leg Homerocentra. La prise en compte de ces
textes n'est sansdoute pas appelee a revolutionner leg etudes sur
leg apocryphes, pas plus d'ailleurs que leg etudes neotestamen-
taires ou homeriques; mais ils illustrent tres bien la fluidite de
l'espace culture 1 dans lequelleurs auteurs travaillaient, entre
Antiquite tardive et Moyen Age byzantin, entre textes et
images, a la croisee de domaines culturels et religieux qui
n'etaient pas rigoureusement cloisonnes.
24. Cod. 114; cf. E. JUNOD, Actes Apocryphes et heresie : Ie jugement
de Photius », in F. Bovon & alii, Les Actes apocryphes des apotres.
Christianisme et monde pai'en (Publications de la Faculte de Theologie
de l'Universite de Geneve 4), Geneve 1981,p. 11-24.
25. J'aimerais en particulier remercier ici MmesM. Rassart-Debergh et
N. Thierry pour les informations et confirmations que je leur dois dans
Ie domaine des rapports avec 'iconographie.
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Christopher R. MATTHEWS
WestonJesuit School of Theology
Cambridge, MA, USA
NI CEPH 0 RUS CALLISTUS' PHYSICAL
DESCRIPTION OF PETER: AN ORIGINAL
COMPONENT OF THE ACTS OF PETER ?
La description que Nicephore donne de Paul a souventete rapprochee
du portrait que les Actes de Paul donnent de I'apotre. La description de
Pierre, par contre, n'a gu e ete etudiee. Le portrait litteraire que
Nicephore brosse de Pierre a probablement ete extrait des Actes de
Pierre et en reflete ainsi un aspect nconnu. Les deux descriptionssem-
blent provenir des Actes apocryphes qui, a leur foul; refletent I'utilisation
litteraire de theories physiognomoniques tres populaires aux premier et
deuxiemesieclesde I'ere chretienne.Ces raditions apocryphessont peut-
etre au depart de la differenciation des representations e Pierre et Paul
dans 'art chretien.
Although Nicephorus' description of Paul has often been elated to the
portrait found in the Acts of Paul, little attention has been paid to the
description of Peter that precedes t. It is possible that Nicephorus' liter-
ary portrait of Peter was drawn from and preservesan otherwise unat-
testedeature of the Acts of Peter. Both descriptionsappear to stem rom
the Apocryphal Acts, which in turn reflect the literary employment of
physiognomical theory so popular in the irst and second centuriesof the
common era. Such apocryphal traditions may haveprovided a basis or
the eventual artistic differentiation betweenPeter and Paul in Christian
art.
1. Introduction.
In Book II, chapter 37, of the Historia Ecclesiastica of
Nicephorus Callistus «Xanthopoulos », at the conclusion of his
accounts of the lives and martyrdoms of Peter and Paul,
Nicephorus provides physical descriptions of both apostles.The
introduction to these descriptions is simple and somewhat
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.
,
.J
136 c. R. MA1THEWS
abrupt: «The constitution of the form and bodies of the divine
apostles may be outlined as follows. »1 What is the origin of these
descriptions, and why has Nicephorus included them here?
2. A Physical Description of Peter.
The description of Peter reads as follows:
The divine Peter was of moderate stature and he stood
quite erect. His face was pale yellow and very fair. The hair of
his head and beard was woolly and thick, but not flowing. He
presented eyes that were bloodshot and dark, and his eye-
brows were raised. His nose was long but did not end in a
point; he was flat-nosed as it were.
This description is striking in several respects. Following on
the narrative of Peter s activities and martyrdom in Rome in the
preceding chapters of Book II, it initially has the character of an
afterthought. What is Nicephorus source for this information?
Does he simply reflect standard Byzantine artistic representa-
tions of Peter? Does he reproduce a description from a contem-
porary written source, such as a painter s handbook? An exami-
nation of Nicephorus handling of sources, particularly his
valuation of apocryphal materials, raises the possibility that his
description of Peter may derive from an early Christian literary
source, indeed, perhaps from the Acts of Peter itself.
3. Nicephorus and the Apocryphal Acts.
Nicephorus lived approximately from 1256 to 1335 and proba-
bly spent much of his life as a priest at Hagia Sophia in
Constantinople.2 It is significant for our considerations to bear in
mind that Nicephorus was a prolific author. Although he is best
known for his Ecclesiastical History, he wrote numerous other
L The text (PG 145,col. 853c-d) may be found in the appendix. English
translations of Nicephorus are my own, with thanks to Brian E. Daley
for his counsel.
2. For details of Nicephorus biography and literary output, see Hans-
Georg BECK,Kirche und theologischeLiteratur im byzantinischenReich
(Byzantinisches Handbuch 2,1), Munich: C. H. Beck sche Verlagsbuch-
handlung, 1959, p. 705-707. Also see M. JUGIE, « Nicephore Calliste
Xanthopoulos », in Dictionnaire de theologie catholique, Paris:
Letouzey et Ane, 1931,11,col. 446-452.
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137
ICEPHORUS CALLISTUS DESCRIPTION OF PETER
historical, liturgical, exegetical, oratorical, and hagiographical
works. It is equally important to bear in mind that Nicephorus
had access o a great repository of documents n the library asso-
ciated with Hagia Sophia. Analysis of the Ecclesiastical History
demonstrates he wide array of sources at his disposal, and these
materials included the Apocryphal Acts.
This latter point may be suitably reinforced by reading the
text of chapter 37 following the description of Peter, for here
one finds a description of Paul familiar to all devoteesof the ear-
liest Apocryphal Acts:
The divine Paul was small and compact of body, having it
crooked as it were, and slightly hunchbacked.His face was fair
and gave the impression that he was older than he was. His
head was bare, his eyeswere bright, and he had eyebrows that
inclined downward. He possessed handsomely curved nose,
which dominated his entire face. His beard was thick and
flowed down fully. Both his beard and the hair of his head
were sprinkled with gray.
This description of Paul immediately brings to mind its likely
source n Acts of Paul and Thecla3. There we read that Paul was:
a man small of stature, with a bald head and crooked legs,
in a good state of body, with eyebrows meeting and nose
somewhat hooked, full of friendliness; for now he appeared
like a man, and now he had the face of an angel.3
Stylistic variations in Nicephorus description from what we
read in extant versions of the Acts of Paul appear to fall within
the ordinary range of Nicephorus revision of his sources.4
3. Translation from Wilhelm SCHNEEMELCHER,d., New Testament
Apocrypha, rev. ed., English trans. ed. R. McL. WILSON,Cambridge:
JamesClarke; Louisville (KY): Westminster/John Knox, 1991-92,2, p.
239. On the description of Paul, see Giuseppe RICCIOTTI,Paul the
Apostle, trans. A. I. ZIZZAMIA,Milwaukee (WI) : Bruce, 1953,p. 151-
159; Robert M. GRANT,«The Description of Paul in the Acts of Paul
and Thecla », Vigiliae Christianae 36 (1982), p. 1-4; Abraham J.
MALHERBE,« A Physical Description of Paul », Harvard Theological
Review 79 (1986),p.170-175.
4. On this point, see below. Variation may also be located at the level of
the production of copies of the Acts of Paul. As Harry Y. GAMBLE om-
ments (Books and Readers in the Early Church: A History of Early
C;hristian Texts,New Haven: Yale University Press, 1995,p. 85) with
respect to the publication and circulation of Greco-Roman literature:
« Since every copy was made by hand, each was unique, and every
owner of sucha copy was free to do with it as he or she chose.»
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"
C. R. MATTHEWS
Several observations support the supposition that Nicephorus
drew his description of Paul directly from the Acts of Paul: (1)
his use of the Acts of Paul elsewhere in Book II of the
EcclesiasticalHistory; (2) his customary method of dealing with
literary sources in that work; and (3) his employment of other
Apocryphal Acts.
(1) In chapter 25 of Book II of the Ecclesiastical History,
Nicephorus explicitly indicates his dependence on « hose who
compiled the travels of Paul ».5 t is reasonable o assume hat this
designation refers to a copy of the Acts of Paul that Nicephorus
read in the library at Hagia Sophia.6 A particularly instructive
example of Nicephorus' dependence on the Acts of Paul is his
account of Paul's 8llplo~ax(a in Ephesus in the same chapter
Prior to Carl Schmidt's publication of the Hamburg Papyrus in
1936, this incident was known almost exclusively through
Nicephorus.8An allusion to this story in Hippolytus' Commentary
on Daniel 3, 29 attested he tale's early pedigree, and M. R. James
was convinced that it belonged somewhere n the Acts of Paul and
so printed Nicephorus' version in his translation.9The Hamburg
Papyrus both confirmed the good judgment of James and the
worth of Nicephorus' EcclesiasticalHistory in .the search or apoc-
ryphal traditions. In fact Nicephorus was not the first author to
employ the apocryphalresourcesof Hagia Sophia in the serviceof
his ecclesiastical ompositions. Some centuries earlier Nicetas of
Paphlagonia utilized the Acts of Paul, including the Ephesus
account, n his encomium o Paul.1O
5. On the distinction between 1TEpt08olnd 1Tp<i~ElS',ee Leon VOUAUX,
Les Actes de Paul et ses ettres apocryphes. Introduction, textes, raduc-
tion et commentaire, Paris: Letouzey et Ane, 1913, p. 25; Carl
SCHMIDT, d., lTPAZEILJ lTAYAOr: Acta Pauli. Nach dem Papyrus der
Hamburger Staats- und Universitiits-Bibliothek, Gluckstadt and
Hamburg: Augustin, 1936,p. 94, n. 2.
6. As Vouaux (Actes de Paul, p. 25) suggested.
7. PG 145,col. 831.
8. For Schmidt's discussionof the relation between Nicephorus' account
of the Ephesus incident and the Hamburg Papyrus, see Acta Pauli, p.
85-98. An unpublished fourth-century Coptic text containing an almost
complete version of the Ephesus narrative is described by Rodolphe
KASSER, «Acta Pauli 1959 », Revue d'histoire et de philosophie
religieuses 40 (1960), p. 45-57; see SCHNEEMELCHER,ew Testament
Apocrypha, 2, p. 263-65.
9. M. R. JAMES, he Apocryphal New Testament.Being the Apocryphal
Gospels, Acts, Epistles, and Apocalypses with Other Narratives and
Fragments Newly Translated,1924 (reprint, Oxford: Clarendon, 1960),
p.291-292.
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ICEPHORUS CALLISTUS DESCRIPTION OF PETER
(2) Recognition of the fact that the Hamburg Papyrusprovides
a much fuller version of Paul s encounter with the wild beasts at
Ephesus than the one offered by Nicephorus raises he question
of the nature of Nicephorus utilization of sources.We must ask
whether Nicephorus has summarized this story himself, from a
firsthand examination of the Acts of Paul, or whether he is depen-
dent on some intermediate source which has already made the
abbreviation? If we may extrapolate from Nicephorus treatment
of his other sources, it appears that his preferred method is to
work from «original» sources himself.12 t is important to note,
however, that his adaptation of sources s characterized by a ten-
dency toward abbreviation and a pronounced preference for
10. SeeA. VOGT, «Deux discours inedits de Nicetas de Paphlagonie»,
Orientalia Christiana 23 (1931),p. 5-97. The two panegyrics are of Peter
and Paul. Vogt points out «<Deux discours», p. 12-16) that Nicetas, in
addition to his extensive usage of earlier historians, had a decided pref-
erence for apocryphal sources,notably the Acts of Paul, notwithstand-
ing their condemnation in orthodox circles and despite his status as a
disciple of Photius. Similarities between Nicephorus narrative of the
Ephesus account and the version of this incident in Nicetas (see VOGT,
«Deux discours», p. 15-16.81-83)might suggest hat both authors had
access o a copy of the Acts of Paul with a truncated version of the
Ephesus incident. But an abridged version of the story is readily
explained in Nicetas caseby the genre of the work in which we find his
account, and in Nicephorus case by his penchant for abbreviation. In
any event, one might imagine, as Willy Rordorf suggested o me in con-
versasion after this paper was presented in Geneva, that Nicephorus
utilized the same copy of the Acts of Paul at Hagia Sophia earlier
handled by Nicetas.
11. Richard Adelbert LIPSIUSDie apokryphen Apostelgeschichtenund
Apostellegenden : Ein Beitrag zur altchristlichen Literaturgeschichte,
Braunschweig: Schwetschke, 1887, 1, p. 188-89; 2/1, p. 214-17) and
other nineteenth-century scholars proposed that Nicephorus more or
less plagiarized some earlier work(s) (variously identified as a Catholic
compilation of the acts of the apostles or an anonymous full-scale
church history). Subsequent investigation has demonstrated that
Nicephorus alleged dependence upon an anonymous tenth-century
church history is without foundation, and that the arrangement and
execution of the Ecclesiastical History represents his own work. See
GUnter GENTZand Kurt ALAND, «Die Quellen der Kirchengeschichte
des Nicephorus und ihre Bedeutung fur die Konstituierung des Textes
der alteren Kirchenhistoriker », Zeitschrift fur die neutestamentliche
Wissenschaft 42 (1949), p. 104-141, especially p. 110-117; GUnter
GENTZ,Die Kirchengeschichte des Nicephorus Callistus Xanthopulus
und ihre Quellen (Texte und Untersuchungen 98), Berlin: Akademie-
Verlag, 1966.
12. GENTZ nd ALAND, « Quellen », p. 117.
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c. R. MA1THEWS
recasting he vocabulary of the appropriated materiaV3 Thus we
may not rely on Nicephorus to provide a literal, continuous text
for his citations from source documents, ncluding the Apocryphal
Acts. Nevertheless, his work provides us with an opportunity to
supplement our knowledge with respect o the subject matter and
generalnarrative content of the various acts.
(3) In addition to the Acts of Paul, chapters 27 and 35 of Book
II of the Ecclesiastical History also betray the influence of the
Acts of Pete1:Nicephorus has clearly consulted these apocryphal
texts in the process of extending the narration of the lives of the
two most prominent apostles beyond the limits of the canonical
Acts. One may also presume that the notices beginning with
chapter 38 concerning the activities and fates of James,Andrew,
Philip, Bartholomew, Thomas, and so on, also rely on diverse
apocryphal sources e. g., the Acts of Philip14).
If Nicephorus description of Paul is firmly anchored to the
early model in the Acts of Paul, is it not conceivable that the
description of Peter admits of a similar origin? Richard
Bauckham has recently echoed the often-made observation that
the physical description of Paul in the Acts of Paul reflects a
standard feature of Greco-Roman biography, and he speculates
that «since we do not have the earliest sections of the Acts of
Peter, he Acts of Andrew or the AcLYof John, we cannot be sure
that such descriptions did not occur in them ».15Has Nicephorus
preserved one of these conjectured missingdescriptions?
Ernst von Dobschillz advanced the thesis that Nicephorus
drew his apostle descriptions from the ninth-century painter s
13. Ibid., p. 138.
14. On Nicephorus witness to the Acts of Philip, see Franc;:oisBOVON,
«Les Actes de Philippe », in Wolfgang HAASE, ed., Aufstieg und
Niedergang der romischen Welt: Geschichte und Kultur Roms im
Spiegel der neueren Forschung, II: Principat, Band 25/6, Berlin: de
Gruyter, 1988,p. 4455-4456.
15. Richard BAUCKHAM, The Acts of Paul as a Sequel o Acts », in The
Book of Acts in Its Ancient Literary Setting,ed. Bruce W. WINTERand
Andrew D. CLARKE (The Book of Acts in Its First Century Setting 1),
Grand Rapids (MI) : Eerdmans; Carlisle: Paternoster, 1993,p. 138,n.
93. Geneva MISENER«< conistic Portraits », Classical Philology 19
[1924], p. 115) notes that in biography, as well as other genres, «the
iconismus may serve two widely different purposes: that of vigorous,
incisive, usually satiric, portraiture or the dry transcription of features ».
See also Ludwig BIELER, BEl OJ; ANHP. Das Bild des « gottlichen
Menschen» in Spiitantike und Frilhchristentum, Vienna: Oskar Hofels,
1935, 1, p. 49-56. Elizabeth C. EVANS «<Roman Descriptions of
Personal Appearance in History and Biography», Harvard Studies in
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NICEPHORUS CALLISruS DESCRIPTION OF PETER
handbook of Elpios of Rome.I6 GUnter Gentz, in an appendix to
his detailed investigation of the Ecclesiastical History of
Nicephorus and its sources, disagreed with von Dobschtitz s
identification of Elpios, preferring to attribute the descriptions
to some unknown painter s handbook. I? But if Nicephorus
description of Paul reflects knowledge of the description found
in the Acts of Paul, as has often been assumed, hen there is no
need to postulate recourse to a painter s handbook to explain
the presence of Paul s description in Nicephorus. Further clarity
on this issue may be gained by approaching the question in
terms of the relation between literary descriptions and artistic
depictions.
4. Developmentsn Early Christian conography.
The description of Paul found in the Acts of Paul, if we place
this work in the latter part of the second century, s apparently
predates any fixed Pauline iconography in the early Christian
figurative repertoire by some 150 years.19 imilarly, the physiog-
nomical definition of Peter in the figurative arts does not appear
Classical Philology 46 [1935], p. 43-84) ndicates in detail how physiog-
nomical theory influenced Suetonius descriptions of the Roman
emperors, a regular feature of {hose biographies. She observes that
« handbooks on physiognomy enjoyed in reality a far greater popularity
with the writers of the Roman Empire than has been granted to them »
(p. 74). Greek literature of the same period also reveals the popularity
of physiognomical theory. Of course the most influential treatises on
the art of physiognomy were in Greek, those of pseudo-Aristotle and
Polemon of Laodicea.
16. Ernst VONDOBSCHOTZ,er Apostel Paulus, Halle, 1928,2/2, p. 46,
n. 8 ; cited in GENTZ,Kirchengeschichte, . 209, n. 1.
17. GENTZ,Kirchengeschichte, . 209-210.
18. SCHNEEMELCHER,ew Testament Apocrypha 2, p. 235; J. K.
ELLIOTT, The Apocryphal New Testament.A Collection of Apocryphal
Christian Literature in an English Translation, Oxford: Clarendon,
1993,p. 357.
19. Danilo MAZZOLENI,«Paul, Iconography», in Encyclopedia of the
Early Church, ed. Angelo DI BERARDINO,rans. Adrian WALFORD,
New York: Oxford University Press, 1992, 2, p. 659 ; Ruth Wilkins
SULLIVAN, Saints Peter and Paul: Some ironic aspects of their imag-
ing », Art History 17 (1994), p. 67-68. On the status of early Christian art
in general, see Ernst KITZINGER,Byzantine Art in the Making. Main
lines of stylistic development in Mediterranean Art, 3rd- 7th Century,
Cambridge: Harvard University Press,1977,p. 19-21.
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142
c. R. MATrnEWS
before the mid-fourth century}OThus in relation to the differen-
tiation in iconography for Peter and Paul that is established by
ca. 360, the description of Paul in the Acts of Paul is quite early.
If Nicephorus' description of Peter were also to be accepted as
early, perhaps even a component of the missing first section of
the Acts of Peter, one might conjecture that the contrasting
images of Peter and Paul, so prominent in later Christian art-
work, began as an intertextual development connected with
these apostles' respective Apocryphal Acts} Although it is dif-
ficult to establish precisely, he Acts of Paul and the Acts of Peter
do share a relationship of some kind}2
Whether or not apocryphal descriptions of Peter and Paul
influenced subsequent developments in Christian art,23 the
descriptions that Nicephorus provides seem clearly to possessa
literary rather than an artistic ancestry. Already by the time of
Chrysostom (ca. 347-407) iconographical developments had
become quite complex,24n comparison with which the descrip-
tions Nicephorus provides appear rather restrained. Although
Nicephorus refers to paintings of Christ, Mary, and the chief
apostles in chapter 43 of Book II, he gives no indication that he
relies on information connected with artwork for his descrip-
tions in chapter 37. Further, several elements of the descriptions,
20. Umberto BROCCOLI, Peter, Iconography», in Encyclopedia of the
Early Church 2, p. 677; SULLIVAN, Saints Peter and Paul », p. 65-67.
See also Manuel SOTOMAYOR,. Pedro en la iconografia paleocristiana
(Biblioteca Teol6gica Granadina 5), Granada: Facultad de Teologfa,
1962,p. 163-164; on the influence of the PetTine apocrypha, see p. 25-
31.
21. One may allow that such interplay between the images described
also had roots in the oral tradition.
22. On the issue of dependence with respect to these two works, see
SCHNEEMELCHER,ew TestamentApocrypha 2, p. 215.275 Dennis R.
MACDoNALD, « The Acts of Paul and The Acts of Peter.. Which Came
First?» in Society of Biblical Literature 1992 Seminar Papers, ed.
Eugene H. LOVERING SBL Seminar Papers 31), Atlanta: Scholars
Press, 1992,p. 214-224; Robert F. STOOPS,Peter, Paul, and Priority in
the Apocryphal Acts », in 1992 Seminar Papers,p. 225-233.
23. That the Acts of Peter otherwise inspired early Christian art is indi-
cated by the inclusion of Simon Magus' fall from the sky in the frescoes
of Old Saint Peter's. See Thomas F. MATHEWS, he Clash of Gods. A
Reinterpretation of Early Christian Art, Princeton (NJ) : Princeton
University Press,1993,p. 86.
24. Margaret M. MITCHELL, « The Archetypal Image: John
Chrysostom's Portraits of Paul », Journal of Religion 75 (1995), p. 15-43,
especiallyp. 28.34-38.
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143
ICEPHORUS CALLISTUS DESCRI~ON OF PETER
such as Peter s bloodshot eyes or the short and crooked Paul, are
absent or extremely uncommon in both early and medieval artis-
tic renderings of Peter and Paul. As has been shown by others,
the description of Paul in the Acts of Paul is comparable to
Archilochus depiction of a general or Suetonius physical
description of Augustus.25 Such rhetorical pieces were devel-
oped in connection with physiognomic manuals, which included
methods for the «photographic description of the entire
body ».26Physiognomical theory, which « attached definite moral
attitudes to specific bodily features ...had captured the imagina-
tion of a broad spectrum of the Graeco-Roman literati ».27 t is
precisely in this arena that we should look for the meaning of
Peter s «bloodshot» eyes, a characteristic that signals a « spirit-
ed, fiery glance ».28
25. GRANT,« Description » ; MALHERBE, Physical Description ».
26. Patricia Cox, Biography in Late Antiquity. A Quest or the Holy
Man (Transformation of the Classical Heritage 5), Berkeley and Los
Angeles: University of California Press, 1983,p. 14. See Evans s survey
«( Roman Descriptions », especially p. 45) of physical descriptions in
the writings of Roman historians and biographers. As Misener observes
«( Iconistic Portraits », p. 117) : « From the time of Suetonius he photo-
graphic iconismos becomes the accepted mode of description in Latin
biography. »
27. Cox, Biography, p. 15. Evans demonstrates (Elizabeth C. EVANS,
« The Study of Physiognomy in the Second Century A.D. »,
Transactionsand Proceedingsof the American Philological Association
72 [1941], p. 96-108) he widespread interest iff the subject of physiog-
nomy among writers of the second century C.E. As Daniel MARGUERAT
and Walter REBELL emark «( Les Actes de Paul. Un portrait inhabituel
de l apotre », in Le mystere apocryphe. Introduction ii une litterature
meconnue,ed. Jean-Daniel KAESTLIand Daniel MARGUERATEssais
bibliques 26], Geneva: Labor et Fides, 1995,p. 114) : « La description
physique, dans l antiquite, revet en effet une portee beaucoupplus sym-
bolique que documentaire; l effet de la personne est rendu, plutot que
Ie souvenir (s il existe) des temoins oculaires.»
28. Although found in a factitious context, the description of the
favored recruit in Lucian, The Parasite 41, nevertheless clarifies the
meaning of ilcpall10S-« In the first place, s he not generous in his pro-
portions and pleasing in his complexion ...and besides, has he not a
spirited look, with a fiery glance like mine, high and bloodshot (I1Eya
Katv</>alI10V)?The translation is that of A. M. HARMON, ucian (Loeb
Classical Library 130), Cambridge: Harvard University Press, 1921, 3,
p;285.
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.
--
144 c. R. MATTHEWS
5. Conclusion.
It is quite possible that Nicephorus physical descriptions of
Paul and Peter stem from the Apocryphal Acts, which in turn
reflect the literary employment of physiognomical theory so
popular in the first and second centuries of the common era.
Such apocryphal traditions may have provided a basis for the
eventual artistic differentiation between Peter and Paul in
Christian art.
Nicephorus concern, however, is neither with the literary ori-
gins of these descriptions nor the artistic depiction of the apos-
tles. He cites these descriptions not merely to satisfy the curiosi-
ty of his readers but, as his comment indicates, to invoke the
presence of these apostles and the grace that was inevitably con-
nected with their images. He concludes his citations of the
descriptions of Peter and Paul by informing his readers hat:
When they appeared, both disciples of Christ were almost
divine in form, with a full measure of the Holy Spirit and
divine grace. Consequently they dispensed grace invisibly
even to those faithful who only glanced. at them, with the
result that their lives were established according o the rhythm
of faith and led toward the better.
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NICEPHORUS CALLISTUS' DESCRIPTION OF PETER
145
Appendix.
Nicephorus Callistus' descriptions of Peter and Paul. From
Book II, chapter 37, of the Historia Ecclesiastica PG 145, col.
853c-d, slightly emended).
ELX6v YE ~l'Jv TflS' 6EaE(J}S flS' ~OP<j>flS'Kat TOV aw~aTOS' ot
6ElOl OtJTOl aTTOOTOAOl,Ws- EV TUTTtp8laAal3Elv, OUT(J}S .
.0 ~EV 6ElOS' llETpOS' Tl'JV liAlKLav ~ETplOS' ~V, ETTt TO Op6l0V
EXWV auTl'JV ava(3aLvouaav. ITTWXP°S' 8E Tl'JV Ot/JlV Kat ~UAa
AEUKOS OVAOS'TclS' TpLxaS' TflS' KE<j>aAflS'Kat TOV TTWYWVOS' at
8aaUs-. ou ~l'JV Kat Ka6El~EvaS' 'EXWVaUTUS'. ixj>aL~OUS- ;xmEP Kat
otVWTTOUS' TpO(3UAAwV OUS' 6<j>6a~ouS'. aVEaTTaKWS'TclS' 6<j>pvS
Kat plva ~aKpclV ~EV, ou ~l'JV 8E Kat EtS' ~U KaTaATlyoooav, ahA'
ooavEt al~l'JV KEKT1l~EVOS'.
'08E YE 6EaTTEaloS' llavAoS' ~lKpOS' ~V Kat aUVEaTaA~EVOS'
TO TOV aw~aTOS' ~EYE60S', Kat OOTTEp4YKUAOVaUTO KEKT1l~EVOS',
a~lKpov Kat KEKUPWS'.Tl'JV Ot/JlV AEUKOS',Kat TO TTp6aWTTOVTpO-
<j>EPTlS'./JlAOs-Tl'JV KE<j>aATlV' apoTTot 8E aUT~ ~aav ot 6<t>6a~ot
KUTW 8E Kat TclS' 6<j>p'i)so 1XE VEuouaaS'. EUKa~TTfl Kat pETTouaav
o;\(p T~ TTpoaWTTtp TEpl<j>EpWVl'JV plva. Tl'JV iJ1:n'lVTlV8aaElav Kat
Ka6El~EVTlV apKOUVTWS' EXWV. palVO~EVTlV 8E TaUT1lV Kat Tl'JV
KE<j>aAl'JVmO TTOMalS' TalS' 6pl~LV.
.OpW~EVOl 8E Kat d~<j>w ot XplaTOV ~aftJ1Tat 6EOEl8ElS' TlVES'
~aav, llVEu~aT6S' TE UYLOU Kat 6ELaS' XUplTOS' 'E~TTAEtp'WS' Kat
TOlS' OpOOl TTlOTOlS'KaK ~6VTlS' eEaS' aOpclT(J}S VlEval XclplV aUTOlS
waTE pU6~L'ElV TOV ~ETcl TTLaTEWS' 3LOV, Kat TTpOS'TO (3EATlOV
dYEaeal. A>J..cl TTEpt ~EV TWV Kopu<j>aLOU plaTOV ~aftJ1TWV apKEl
ToaaVTa.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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Alberto FERREIRO
SeattlePacific University, WA, USA
SIMON MAGUS:
THE PATRISTIC -MEDIEVAL
TRAD ITI 0 NS AND HISTO RI OG RAPHY
Simon le magicien, connu par les Actes des apotres (8,9-24), es Actes
de Pierre (Actus Petri cum Simone) et la Passio Sanctorum
Apostolorum Petri et Pauli, a ere utilise par l Eglise de maniere meta-
phorique et typologique pour combattre les pratiques immorales, les
heresies doctrinales, a magie et la sorcellerie. Depuis les debuts de l ere
chretienne jusqu iJ la fin du moyen age, on trouve des traditions sur
Simon le magicien qui ant leur source principalement dans des textes
apocryphes et canoniques et d autres qui en sont completement ndepen-
dantes. Cette contribution rente de donner un vue d ensemble des diffe-
rentes traditions, de resumer es acquis de la rechercheet d evaluer e tra-
vail encore iJ ournir sur Simon le magicien.
Simon Magus, who is known from the Acts of the Apostles (8 :9-24),
the Actus Petri cum Simone (Acts of Peter), and the Passio Sanctorum
Apostolorum Petri et Pauli (passio), was used metaphorically and typo-
logically by the Church to censure mmoral behaviol; doctrinal heresy,
and magic and witchcraft. We also witness rom the Early Christian era
to the end of the Middle Ages the emergence of traditions about Simon
Magus that are primarily based upon canonical and apocryphal textsand
those that are wholly independent of hesesources.The intent of this arti-
cle is to provide an overview of the traditions, the researchdone up to
now, and the work that remains to be carried out on Simon Magus.
Of the many villainous personalities of the Old and New
Testaments few captured the attention of patristic and medieval
biblical exegetesas did Simon Magus. The two principal sources
about Simon Magus that perpetuated his memory are found in
the Acts of the Apostles 8 :9-24, n the canonical New Testament;
Apocrypha 7, 1996,p. 147-165
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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148
FERREIRO
the second source is in two apocryphal Christian documents
known as the Actus Petri cum Simone Acts of Peter) and the
Passio Sanctorum Apostolorum Petri et Pauli Passio).l In the
ensuing centuries, however, Simon Magus was transformed by
the Church into the quintessential «bad guy» -who allegedly
embodied and engendered every imaginable form of doctrinal
error and moral depravity. Another fascinating development is
the emergence of parallel Simon Magus tales that had either
minimal or not any dependency whatsoever upon the canonical
or apocryphal traditions.
Almost four years ago I initiated a search o collect in toto ref-
erences to Simon Magus in patristic and medieval sources,
including any relevant modem scholarship. My larger agenda s
to write a booklength monograph, Simon Magus in the Early
Christian and Medieval Tradition, and what I offer here is an
overview of the research that lies ahead. These efforts received
enormous support from the UCLA Center for Medieval and
RenaissanceStudies through a summer 1992 fellowship awarded
to me by the Center, that allowed me to retrieve from the
Princeton Index of Christian Art all of their catalogued conogra-
phy on Simon Magus. Having now completed this preliminary
groundwork it has now become clear that several distinct Simon
Magus legends circulated widely in the post-New Testamentcen-
turies. The intent of this article is to present a brief description
of each radition, a select survey of notable modem research, an
identification of the major sources, and avenuesof investigation
that require further inquiry.
Seven major traditions are clearly identifiable, they are: 1)
Simon Magus as the first Gnostic and founder of that sect; 2)
Simon Magus/Simon Peter confrontations involving Mad Dogs;
1. The text of the Acts of Peter is found in Acta Apostolorum
Apocrypha, R. A. LIPSIUS nd M. BONNET ed.), Ohlms: Hildesheim-
New York, 1972,p. 45-104; in the same volume the text of the Passio s
at p. 119-177.For a translation of the Acts of Peter,see New Testament
Apocrypha, W. SCHNEEMELCHERed.) and R. McL. WILSON trans.),
vol. 2, Philadelphia: Westminster Press, 1965,p. 279-322. A translation
of the Passio may be found in The Ante-Nicene Fathers,vol. 8, Grand
Rapids: Wm. B. Eerdmans, 1951,p. 477-485.Two studies that address
issues surrounding the Acts of Peter and with rich bibliography are by
G. POUPON, Les Actes de Pierre et leur remaniement », Aufstieg und
Niedergang der romischen Welt II, 25, 6 1988), p. 4363-4383and C. M.
THOMAS, «Word and Deed: The Acts of Peter and Orality»,
Apocrypha 3 1992), p. 125-164.A thorough study of the Passioand its
survival in the medieval centuries has never been carried out. In my
book-length monograph I intend to remedy this neglect.
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SIMON MAGUS TRADffiONS
149
(3) Simon Magus in Irish ecclesiastical olklore and in the Celtic-
Irish/ Anglo-Saxon tonsure debates; (4) Simon Magus as
founder of a pseudo-apostolic succession; (5) Simon Magus in
Christian anti-Muslim polemics; (6) Simon Magus as the father
of filthy lucre-simony; and (7) the aerial flight of Simon Magus
made possible by demonic assistance. n every instance, where
applicable, attention will be given to identify artistic depictions
of these distinctive legends.
1. SimonMagnsand Gnosticism.
If there is one single area of research on Simon Magus that
has solicited significant scholarly attention, it has been within
the field of Gnostic studies? Irenaeus in his Against Heresies
2. The literature on Simon Magus and Gnosticism is voluminous, I cite
here a very selective listing. One of the earliest studies is by A.
REDLICH,«Die' A1T6c/>aulSes Simon Magus », Archiv fur Geschichte
der Philosophie 23 (1909-1910), . 374-399.537-548. collection of sem-
inal studies are gathered in L. CERFAUX, ecueil Lucien Cerfaux,vol. 1
(Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium 6-7),
Gembloux : J. Duculot, 1954. An important study on Hippolytus is by J.
FRICKEL,Die« apophasismegale» in Hippolyt's Refutatio, VI 9-18. Eine
Paraphrase zur «Apophasis» Simons (Orientalia Christiana Analecta
182), Roma, 1968. Fundamental still J. M. A. SALLES-DABADIE,
Recherchessur Simon Ie Mage. 1. L'«apophasis megale» (Cahiers de la
Revue Biblique 10), Paris, 1969. An overview with revisionist ideas s in
K. BEYSCHLAG, Zur Simon Magus Frage », Zeitschrift fur Theologie
und Kirche 68 (1971), p. 395-426,and equally valuable B. ALAND, «Die
Apophasis Megale und die simonianische Gnosis », Theologie und
Philosophie 48 (1973), p. 410-418. An extensive investigation is in K.
BEYSCHLAG, Simon Magus und die christliche Gnosis
(Wissenschaftliche Untersuchungen zum Neuen Testament 16),
Ttibingen, 1974. In a broader Gnostic context see A. HILGENFELD,
«Der Gnostizismus», in Gnosis und Gnostizismus, K. Rudolph (ed.)
(Wege der Forschung 262), Darmstadt, 1975, p. 174-230. See also K.
RUDOLPH, Simon Magus oder Gnosticus? », TheologischeRundschau
42 (1977), p. 279-359. On the question of origins see R. McL. WILSON,
«Simon and Gnostic Origins », in Les Actes des Apotres. Traditions,
redaction, theologie, J. KREMER (ed.) (Bibliotheca Ephemeridum
Theologicarurn Lovaniensium 48), Leuven, 1979, p. 485-491. A study
that engages Simonians together with Simon Magus is by J. FOSSUM,
«The Simonian Sophia Myth », Studi e materiali di storia delle religioni
11 (1987), p. 185-197.An essaywhich considers Simonianism in regard
to the Acts of the Apostles is in G. LUDEMANN,«The Acts of the
Apostles and the beginnings of Simonian Gnosis », New Testament
Studies33 (1987). D. 420-426.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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FERREIRO
claimed that Sitnon Magus had not only founded the Gnostic
sect of the Simonians, but was also the spiritual «father» of all
of Gnosticism in general.3 This claim by Irenaeus became the
catalyst that moved modern scholars to embark upon the quest
to confirm the «historical» links between the Simon Magus in
the Acts of the Apostles and the sect of the Simonians who
allegedly continued to perpetuate his teachings. The belief by
patristic writers that Simon Magus had established Gnosticism
became widespread as evidenced by the detailed references in
the writings of ~renaeus,Against Heresies,Hippolytus, Against
all Heresies, the Constitutions of the Apostles, the Pseudo-
Clementines, and the Panarion by Epiphanius of Salamis.4
Wayne Meeks, ijn a recent historiographical essay,has noted that
the efforts by modern scholars to confirm the connections
between the ~anonical Simon Magus and any form of
Gnosticism, and specifically the Simonians has come to a dead
3. Irenaeus, Contra haereses (PG 7, 670-680 ; and the edition by A.
ROUSSEAUand Lt DOUTRELEAU, IRENEE DE LYON, Contre les heresies.
Livre I, tome 2 lSources chretiennes 264], Paris, 1979, p. 312-321).
Studies connectihg Marcion and Simonianism are in F. M. BRAUN,
«Marcion et la gnose simonienne », Byzantion 25-27 (1955-1957), p.
631-648. An extensive well documented study is by G. LUDEMANN,
Untersuchungen zur simonianischen Gnosis, Gottingen, 1975. See also
S. ARAI, «Simon~anische Gnosis und die Exegese fiber die Seele », in
Gnosis and Gnqsticism. Papers read at the Seventh International
Conference on phtristic Studies (Oxford, September 8th_13th1975), M.
KRAUSE (ed.) (Nag Hammadi Studies 8), Leiden, 1977, p. 185-203 and
by the same author, «Zum 'Simonianischen' in Authlog und Bronte », in
Gnosis and Gnosticism. Papers read at the Eighth international
Conference on Patristic Studies (Oxford, September 3m-8th 1979), M.
KRAUSE (ed.) (Nag Hammadi Studies 17) Leiden, 1981, p. 3-15.
4. Irenaeus, Contra haereses (PG 7, 670-680; SC 264, 312-321);
Hippolytus, Refutatio omnium haeresium (ed. P. WENDLAND, Refutatio
omnium haeresium [Hippolytus Werke 3 ; GCS 26], Leipzig, 1916, p.
134-232) ; Constitutions of the Apostles (PG 1, 919-932; and the edition
by M. METZGER, Les constitutions apostoliques. Livres III-VI, tome 2
[Sources chretieI1nes 329], Paris, 1986, p. 310-321) ; Pseudo-Clement,
Recognitiones (ed. B. REHM, Die Pseudoklementinen, II. Rekognitionen
in Rufins Obersetzung, zum Druck besorgt durch F. PASCHKE GCS 51],
Berlin, 1965) ; Epiphanius, Panarion (ed. K. HOLL, Ancoratus und
Panarion haer. 1-33 [Epiphanius 1; GCS 1], Leipzig, 1915, p. 238-267;
trans. F. WILLIAMS, The Panarion of Epiphanius of Salamis. Book 1
(Sects 1-46) [Nag Hammadi Studies 35], Leiden, 1987, p. 55-62). A sur-
vey of Simon Magus in patristic literature is in H. WAlTZ, «Simon
Magus in der altchristlichen Literatur », Zeitschrift fur die neutesta-
mentliche Wissenschaft und die Kunde des Urchristentums 5 (1904), p.
121-143.
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SIMON MAGUS TRADmONS
end: «The use of reports about Simon Magus as evidence for a
pre-Christian gnosticism has been effectively refuted» ...and
«The quest for the historical Simon (and Helena ) is even less
promising than the quest for the historical Jesus».5The labors of
scholars, however, have been fruitful insofar as they have
attained a better understanding about what patristic writers
taught concerning the origins of Gnosticism and the sect of the
Simonians.6Fortunately, not all scholarly inquiry has come to an
end on this topic. There is another area of research regarding
Simon Magus and Gnosticism that is deservingof attention.
As patristic writers attempted to create typological bridges
between the canonical Simon Magus and Gnosticism they did
not all create an identical « type ». To date, there has never been
a study that fully unfolds the various portraits of Simon Magus
and his female companion Helena who also occupies a signifi-
cant place in these sources: Equally instructive is the prolifera-
tion of their images beyond the third century, especially he tan-
talizing portrayal of Helena as heresiarcha and companion of
Simon Magus. Some patristic writers went so far as to suggesta
Wayne A. MEEKS, «Simon Magus in recent research », Religious
StudiesReview 3, 3 (1977), p.137-142, at 141.
6. For the origins of Simonianism in addition to the studies in notes 2, 3,
and 4 above see R. P. RICHARDSON,Paul, alias Simon the Magician »,
Open Court 44 (1930), p. 467-488and H.-J. SCHOEPS,Simon Magus in
der Haggada? », Hebrew Union College Annual 21 (1948), p. 257-274.
A brief survey is in R. GRANT,«The Earliest Christian Gnosticism »,
Church History 22 (1953), p. 81-97. Useful are the little known essays
by G. ORY, «Simon (dit Ie magicien) Dieu sauveur des Samaritains»,
Cahiers du Cercle Emest-Renan 2, 5 (1955), p. 1-16, and «La 'conver-
sion' de Simon Ie Magicien », Cahiers du Cercle Ernest-Renan 3, 9
(1956), p. 1-16. For broader and fascinating studies see R. McL.
WILSON,«Simon, Dositheus and the Dead Sea Scrolls », Zeitschrift Ur
Religions und Geistesgeschichte (1957), p. 21-30; H. J. W. DRUVERS,
«Quq and the Quqites », Numen 14 (1967), p. 104-129; A. F. RAINEY,
«Gath-Padalla », Israel Exploration Journal 18 (1968),p. 1-14; see also
R. BERGMEIER, Zur Fruhdatierung SamaritanischerTheologumena »,
Journal for the Study of Judaism 5 (1974), p. 121-153;J. FOSSUM,The
origin of the Gnostic concept of Demiurge », Ephemerides Theologicae
Lovanienses61 (1985), p.142-152.
7. Studies on Helena are in L.-H. VINCENT,«Le culte d'Helene a
Samarie », Revue Biblique 45 (1936), p. 221-232; G. Quispel, «Simon
en Helena », Nederlands TheologischTijdschrift 5 (1951),p. 339-345 G.
ORY, «Le my he Samaritain d'Helene », Cahiers du Cercle Emest-
Renan 3,12 (1956), p. 1-32; D. FLOSSER, The great goddess of
Samaria », Israel Exploration Journal 25 (1975),p. 13-20. Also, the stud-
ies below in note 8.
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FERREIRO
female line of heretics initiated by Helena that paralleled the
male one established by Simon Magus.8 There are two known
representations of Helena in patristic and medieval art respec-
tively from each era.9 n light of the importance of Gnostic stud-
ies for the study of Early Christianity a survey as described
above will enlighten our understanding as to how patristic
exegetes explained the origins of Gnosticism through their
respective portraits of Simon Magus and Helena.
2. SimonMagusand Mad Dogs.
In the Acts of Peter and the Passio there are two distinct
episodes nvolving dogs. In the first Simon Peter pacifies a guard
dog at the house of Marcellus, gives him the power to speak with
a human voice, and in the end together they confound the
machinations of Simon Magus.1o n the Passio, Peter and Paul
have a confrontation with Simon Magus in the presence of the
Emperor Nero. Simon Magus magically conjures up rabid dogs
to attack and discredit the apostolic authority of Peter, but the
apostle presents the dogs blessedbread whic1.t e had previously
hidden in his sleeves and causes he animals to disappear. The
superior nature of Peter s power and authority is vindicated and
it results in the humiliation of Simon Magus.ll
Both canine encounter stories have been the object of
research by a few modern scholars. What has been accomplished
up to now is of a limited and specialized nature, that is, not one
study has ever carried out a full systematic survey of these leg-
ends for the patristic and medieval centuries. One of the earliest
studies by Geneseo Turcio, although very brief, brought to the
attention of the scholarly community the abiding endurance of
these legends in the art and literature of the Middle Ages.12
A. FERREIRO, Sexual depravity, doctrinal error. and character assas-
sination in the fourth century: Jerome against the Priscillianists »,
Studia Patristica 28 (1993), p. 29-38 and IDEM, «Jerome s polemic
against Priscillian in his Letter to Ctesiphon (133,4) », Revue des Etudes
Augustiniennes39 (1993),p. 309-332.
9. See the studies in note 7, especially he study by L.-H. VINCENT, Le
culte d Helene II.Samarie », which has a plate of a statue of Helena. She
appears also in the archivolt sculpture at SessaAurunca ; see Dorothy
GLASS, The archivolt sculpture at SessaAurunca », The Art Bulletin
52 (1970),p.119-131.
10. Acts of Peter,p. 45-104,especially n chapters 9-12,p. 56-60.
11. Passio,chapters 24-27,p.139-143.
12. G. TuRCIO,«San Pietro e i Cani », Ecclesia 7 (1948),p. 297-299.
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1 ~
154 A. FERREIRO
In medieval sources he canine legends appear in the Blickling
Homilies, Orderic Vitalis, Amatus of Montecassino and in a
twelfth century liturgical hymn dedicated to the feast day of
Peter and PauV6 The single major source to popularize the sto-
ries far and wide is the thirteenth century Golden Legend by
Jacobus of Voragine. A tantalizing element in this source are the
addendums to both legends that Jacobus liberally incorporated
into his own narrative. He also, for example, in addition to the
Acts of Peter and the Passio made use of the Acta S.S. Nerei et
Achillei when describing the dog confrontations. ? What easily
4. G. WILPERT, Sarcofagi Cristiani Antichi. Testo, ol. 2, Rome, 1932,p.
348-351,has both the Mantua and Verona sarcophagi. A discussion s
also in G. TuRCIO,«San Pietro e i Calli », p. 299. A drawing of the now
missing Nimes sarcophagus s in E. LE BLANT, Les sarcophageschre-
tiens de la Gaule (Collection de documents inedits sur l'histoire de
France, serie 3 : archeologie), Paris, 1886,p. 114,no. 136. The Cracow
sarcophagus is analyzed by J. A. OSTRqWSKI,«Apocryphal and
Canonical Scenes. Some Remarks on the Iconography of the
Sarcophagus rom the Collection of the National Museum in Cracow»,
in Etudes consacrees Marie Louise Bernhard par ses amis, collabora-
teurs et eleves,M. MARCINIAK ed.) (Etudes et Tra:vaux13; Travaux du
Centre d'archeologie mediterraneenne de l'academie polonaise des sci-
ences,26), 1978,p. 305-309.This article includes the Verona and Nimes
sarcophagi. The Toldoth Jeshu is translated with commentary in H. J.
SCHONFIELD,ccording to the Hebrews,London, 1937.
16. R. MORRIS (ed.), The Blickling Homilies of the Tenth Century
[EETS 58], London, 1880,p. 170-193; Orderic Vitalis, Historica ecclesi-
astica (PL 188, 128-133) A. LENTINI (ed.), It Poema di Amato su S.
Pietro Apostolo, 2 vols (Miscellanea Cassinese 30-31), Montecassino,
1958; the text is at 1, 132. The hymn which draws from the Passio s in
C. BLUME ed.), Sequentiae neditae. Liturgische Prosen des Mittelalters,
vol. 5 (Analecta Hymnica Medii Aevi 37), Leipzig, 1901, p. 244.
Relevant lines are reproduced and analyzed by J. SZOvERFFY, sallat
Chorus Caelestium. Religious Lyrics of the Middle Ages (Medieval
Classics 15), Berlin, 1983,p. 298-299.There is also an allusion in D. S.
WRANGHAM, he Liturgical Poetry of Adam of St. Victor.. from the text
of Gautier, vol. 2, London, 1881,p. 87.
17. The Latin text is in Th. GRAESSEed.), Jacobi a Voragine Legenda
Aurea, reprint of 1890edition, Osnabrtick, 1969,p. 368-379.See he trans-
lation by W. G. RYAN,The Golden Legend. Readingson the Saints, ol. 1,
Princeton, 1992, p. 340-350. For a study on Jacobus's use of the term
«apocrypha» see, R. GOUNELLE, Sens et usage d'apocryphus dans la
Legende Doree », Apocrypha 5 (1994), p. 189-210.Editions of the Acta
Nerei etAchillei are: the Latin version,Acta SanctorumMaii, vol. 3, Paris,
1866,p. 4-16, he dog story s at 9-10. Greek text editions are by A. WIRTH,
Acta SS.Nerei et Achillei graece,Leipzig, 1890,and H. ACHELIS, cta SS.
Nerei et Achillei (Texte und Untersuchungen11,2), Leipzig, 1893.For tex-
tual questions seealso F. SCHAEFER,Die Acten der Heiligen Nereus und
Achilleus », Romische Quartalschrift 1894),p. 89-119.
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IMON MAGUS TRADmONS
qualifies as the lengthiest and most imaginative re-telling of the
dog legends is found in a 6135 line fifteenth-century Proven<;al
mystery play known as the /storia Petri et Pau[.l8 These and
many other sourceshave yet to be studied as a cohesive estimo-
ny so as to determine what novel alterations were made to the
original stories as they were passed down over time. The
medieval art depicting the dog stories is as diverse in its forms as
it is in its interpretations. The apocryphal dog scene from the
Passio in medieval art is preserved in the archivolt sculpture in
the Cathedral of SessaAurunca (Italy), a lost piece for which we
have a line drawing from San Piero a Grado (near Pisa), an illu-
mination in a Vatican Library Latin Passional, and a fresco in
the cloister church at Mtistair, Switzerland. Lastly, there is a pos-
sible disputed relief on the tomb of Pope Sixtus IV which may
depict some of the Acts of Peter material involving the dog.19A
comparison of the art and the literary narratives likewise reveals
a wide array of creative exegesis and adaptations by medieval
interpreters.
The last area meriting attention is the typological image of the
dog in literature and theological texts external to but including
18. P. GUILLAUME (ed.), Istoria Petri et Pauli. Mystere en langue
provenfale du XV siecle,publie d apres Ie manuscrit original, Geneva:
Slatkine Reprints, 1977 18871).Remarks on this mystery play are in M.
LAZAR, «The Saint and the Devil: Christological and Diabological
Typology in Fifteenth Century Provenl;:alDrama », in Essays n Early
French Literature presented to Barbara M. Craig, N. J. LACY and J. C.
NASH ed.), York South Carolina, 1982,p. 81-92,at p. 84-88.
19. An in-depth study on SessaAurunca is in D. GLASS, The Archivolt
Sculpture at SessaAurunca », The Art Bulletin 52, 2 (1970), p. 119-131,
especially at 125-128, and for the dogs figure 16. Useful also are C.
STORNAJOLO,I rilievi dell arco suI portico della cattedrale di Sessa
Aurunca », Dissertazioni della Pontificia Accademia 6, 2 (1896), p. 163-
180, and A. VENTURI,Storia dell arte Italiana, vol. 3: L arte romanica.
Milano, 1904, p. 570-571, igures 532, 534, 535. An extensive study of
the church S. Piero a Grado is by P. D ACHIARDI,«Gli affreschi di S.
Piero a Grado presso Pisa e quelli gia esistenti nel portico della basilica
vaticana », in Atti del Congresso ntemazionale di scienzestoriche (Roma
1-9 aprile 1903), vol. 7: Atti della Sezione IV. Storia dell arte, Rome,
1905 (Kraus Reprint, 1972), p. 193-285,especially at 212-216and 257-
258. A microfiche copy of the Latin Passional s in the Princeton Index
of Christian Art under the Simon Magus file, 32R76LV+82, OA, Roma
Lib. Bibl. Vaticana, at. 8541,Passional. A thorough study of the fresco
at Mtistair is in B. BRENK,Die romanische Wandmalerei n der Schweiz
(Basler Studien zur Kunstgeschichte 5), Bern, 1963,p. 44-49 and figure
21. A brief description of the Pope Sixtus IV tomb relief is in TURCIO,
«San Pietro e i Cani» (n. 12), p. 299.
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FERREIRO
the apocryphal material in patristic and medieval thought. By
casting he apocryphal dogs in a broader context it makes it pos-
sible to determine its own unique canine typology, its contribu-
tion to the wider typology of dog, and to ascertain specific bor-
rowing from sources contemporaneous to and possibly those
predating the apocryphal writings. A suggestive morsel, for
example, is the similarity between the Greek legend about the
dog Cerberus, the guardian of Hell, in a version of Virgil s
Aeneid and the dog story in the Passio.zoDo we have here a
Virgilian influence on the Passio ? These and many other ques-
tions will fill a void in our present understanding as to how the
apocryphal dog legendswere handed down and entered into the
wider medieval typological dog tradition.
3. SimonMagus n Ireland and England.
The presenceof Simon Magus legends n Ireland and England
is a compelling case study of two traditions which are virtually
independent of both the New Testament nd the apocryphal eg-
ends. And there is a third artistic one that does have direct
dependencies on the apocryphal material, but it is also quite
innovative in its adaptation.
In the first, Simon Magus is associated with a sinister Druid
priest named Mog Ruith and together they plot the horrifying
beheadingof John the Baptist. The account draws from the New
Testament only in so far as it borrows the person of John the
Baptist; it certainly has absolutely no dependencyon the Acts of
the Apostles and is far more removed from the apocryphal
accounts.Even though several textual studies have engaged un-
damental paleographical issues, here are still many questions
regarding he origins and purpose of this intriguing murder story.21
20. R. D. WILLIAMS ed.), The Aeneid of Virgil. Books 1-6, New York-
London, 1972,p. 138 and notes at 484. The Passio,27,8-11, p. 143. For
Cerberus in the Middle Ages see J. J. SAVAGE,«The Medieval
Tradition of Cerberus », Traditio 7 (1949-51),p. 405-410.
21. For sources seeJ. F. KENNEY,The Sources or the Early History of
Ireland, vol. 1 : Ecclesiastical (Records of civilization 11), New York,
1966. Specific studies are by A. M. SCARRE, The Beheading of John
the Baptist by Mog Ruith », Eriu 4 (1910), p. 173-181 D. MACKINNON,
«The executioner of John the Baptist », The Celtic Review 8 (1912-13),
p. 168-170; K. MULLER-LISOWSKI, Texte zur Mog Ruith Sage »,
Zeitschrift fiir celtische Philologie 14 (1923), p. 145-153; EAD. , «La
legende de St. Jean dans la tradition lrlandaise et Ie Druide Mog
Ruith », Etudes celtiques3 (1938),p. 46-70.
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IMON MAGUS TRADITIONS
The second Simon Magus legend originates from the works of
Venerable Bede and Aldhelm of Malmesbury. In the Historia
Ecclesiastica ede invoked Simon Magus within the context of the
tonsure debates between the Celtic-Irish monks and the
Continental Benedictines. According to Bede, the Irish were
guilty of wearing the tonsure of Simon Magus while the
Benedictines claimed that theirs was patterned after that worn by
the Apostle John. Aldhelm recalled these confrontations over
tonsures in one of his works and there are other English and Irish
sources such as the Leabhar Breac and Aelfric and even some
Continental sources that are relevant on these issues.z2 dward
James in a seminal article on haircuts in early medieval culture,
«Bede and the Tonsure Question », touched upon the broader
social and ecclesiastical implications of haircuts. He does cite
briefly the references from Bede on Simon Magus; but once
again, an in-depth study of these sources s desirable and awaits
us? As in our first example, this tradition is independent from
the Acts of the Apostles and the apocryphal accounts on Simon
Magus.
The third legend is found in the not so abundant artistic tradi-
tion and it is not connected with the two previously described
traditions. The art in question is contained in several Irish cross-
es located at Market Place-Kells, Monasterboice, and a possible
disputed third one at Castledermot.z4All three of the crosses
draw their inspiration from the apocryphal accounts describing
the aerial flight of Simon Magus made possible by the aid of
demonic powers.z5The three crossesdo have their peculiar way
22. Texts and editions are in B. THORPE,The Homilies of the Anglo-
Saxon Church. Homilies of Aelfric, vol. 1, London, 1844,p. 364-385 R.
ATKINSON, he Passions and the Homilies from Leabhar Breac (Todd
Lectures Series 2), Dublin, 1887,p. 64-68.304-309.86-95.329-339.or a
brief discussion of the Leabhar Breac see, M. McNAMARA, The
Apocrypha in the Irish Church, Dublin, 1975,p. 11-12; M. LAPIDGE nd
M. HERRENtrans.) Aldhelm. The Prose Works, Cambridge, 1979,p. 51-
58; 108-111 136-143and 155-161.
23. E. JAMES, Bede and the Tonsure Question », Peritia 3 (1984),p. 85-
98.
24. SeeA. K. PORTER, he Crossesand Culture of Ireland, 1931,p. 123
F. HENRY,La sculpture Irlandaise pendant les douze premiers sieclesde
l ere chretienne, vol. 2: Planches, Paris, 1933, plate 2; R. A. S.
MACALISTER, onasterboice Co. Louth, Dundalk, 1946,p. 1-13and 45-
53; H. M. ROE, The High Crosses of Kells, Meath Archaeological and
Historical Society, 1975,p. 10-13.22-29.36-41; DEM,Monasterboiceand
its Monuments. County Louth, 1981,p. 44-49 and 54-55.
25. The flying incident is in the Acts of Peter,chapter 32, p. 82-85. In the
Passio,chapters 54-56,p. 164-167.
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A. FERREIRO
of capturing thIs aerial display by Simon Magus when we com-
pare them to Continental depictions of this scene. The
Continental artistic pieces invariably prominently display the
demons holding up Simon Magus, Peter kneeling on the pave-
ment praying to God to thwart such a prideful display of false
power, and the slamming of Simon Magus on the pavement as
his power (demonic) is removed as a result of Peter s prayers.
The Irish crossesshow Simon Magus falling headfirst and strik-
ing the pavement, with the crosiers of both Peter and Paul either
jammed into his mouth or around his neck. The demons are not
visibly displayed nor Peter kneeling in prayer, although anyone
familiar with the story would have been acquainted with this
basic background. The focus of the crosses s clearly upon the
episcopal authority of the chief apostles, as represented by the
crosiers, and here they are credited in dramatic fashion with
bringing down the false magician Simon Magus.
All of these iterary and artistic traditions require careful nternal
scrutiny and they need to be interpreted in relation to the broader
ecclesiastical evelopmentson the Continent. One thing is surely
apparent n this most cursorypresentation; in Ireland and England
we find two uniquely independent adaptations of the figure of
Simon Magus and in one instance a creative interpretation of the
flight of Simon Magus drawn from apocryphal iterature.
4. SimonMagus he pseudo-Apostle.
Simon Magus as founder of a pseudo-apostolic succession
derives principally from the anti-Gnostic polemic and is once
again another instance of a tradition wholly independent of the
Acts of the Apostles and the apocryphal legends}6 The same
anti-Gnostic writers who created the fascinating portraits of
Simon Magus and Helena likewise engendered the idea of a
false apostolic successionparalleling and in direct opposition to
the legitimate one established by Simon Peter. This concept per-
sisted very strongly in the fourth and fifth centuries and is
expanded in the works of Jerome and Vincent of Lerins. I have
demonstrated in previous studies how both Church Fathers elab-
orated the notion of a Simon Magus pseudo-successionhat con-
tinued well beyond Gnostic successors}? erome, in what is per-
haps his most creative exegesis,suggesteda female pseudo-suc-
26. Seesources n note 4 above.
27. See my articles (n. 8), «Sexual depravity, doctrinal error », p. 29-38,
«Jerome s polemic against Priscillian », p. 309-332and «Simon Magus
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IMON MAGUS TRADffiONS
cession stemming from Helena and paralleling the male line ini-
tiated by Simon Magus. Writers such as Augustine, Filastrius of
Brescia, Isidore of Seville and others mediated various forms of
this concept to the Middle Ages}8 Medieval writers did not
abandon this idea; rather they continued to associatealmost all
ancient and medieval heresies ultimately back to Simon Magus.
The invocation of Simon Magus into the Celtic/Benedictine
tonsure debates described above is evidence of the medieval
adaptation of the pseudo-succession idea in Anglo-Saxon
England.29The single common thread in this tradition is that it
consistently exalts the primacy of Peter over doctrinal and
moral heretics, the successorsof Simon Magus. A study of this
anti-heretical polemical weapon will yield numerous insights
into the use of this specific typology in patristic and medieval
doctrinal controversies and no less important the place of the
Simon Magus type as the spiritual «father» of them all. I have
not discovered any iconography that displays Simon as a pseu-
do-apostle.
5. SimonMagusand Muhammad.
The most formidable challenge to the Christian faith came
from the eastern Mediterranean with the advent of Islam in the
seventh century. It was not until the High Middle Ages, howev-
er, when an intensive Christian anti-Muslim polemical literature
surfaced to challenge the doctrines and morals of Islam.
Medieval attacks of Islam targeted not only doctrine and
morals; they also assailed the character of Muhammad as
founder of a false religion and deviant morality.
and Priscillian in the Commonitorium of Vincent of Lerins », Vigiliae
Christianae49 (1995),p. 180-188.
28. Augustine, De haeresibus1 (Aurelii Augustini opera 13, 2; CCSL
46, p. 290) Filastrius of Brescia, Diversarum hereseon iber (CCSL 9, p.
228-229); Isidore of Seville, Etymologiarum VIII, De haeresibus
Christianorum 8.5.5 (ed. and trans. J. OROZ RETA et ai., SAN SIDORO
DE SEVILLA, Etimologias, vol. 1 : Libros I-X [Biblioteca de Autores
Cristianos 433], Madrid, 1982,p. 692-702).
29. Venerable Bede accused he Irish monks of having been nspired or
seduced by the spirit of Simon Magus into adopting an erroneous ton-
sure in a letter from Abbot Ceolfrid to Nechtan, King of the Picts,
which he reproduced at 5. 21, in B. COLGRAVEnd R. A. B. MYNORS
(ed. and trans.), Bede s Ecclesiastical History of the English People,
Oxford: University Press,1969.
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FERREIRO
Medieval polemicists who sought to establish he illegitimate
origins of Islam associated Muhammad with an enigmatic
Magus. The Magus is especially prominent in the popular
eleventh century medieval Vita Mahumeti written by Embrico of
Mainz and he is not the only one to mention this mysterious
magician.3D he Magus is portrayed as being responsible for ini-
tiating Muhammad into the false teachings that characterize
Islam. The Vita Mahumeti and other Christian anti-Muslim
sources share parallels with the Simon Magus in the Acts of
Peter and the Passio that can hardly be considered coincidental.
Two examples are suggestiveof creative borrowing and reinter-
pretation of the apocryphal Simon Magus into the anti-Islamic
literary campaign. In some accounts Muhammad flies in the air
through the use of magical (demonic) powers and he fails in an
effort to imitate the resurrection of Jesus Christ. Both of these
deceptive feats are reported of Simon Magus in the apocryphal
texts.3 Medieval writers, who had to challenge Islamic morality,
continued their assault by borrowing from Early Christian anti-
Gnostic sources such as Irenaeus. In separate corollary legends
Muhammad is introduced by an ascetic Bahira -later known as
30. On Embrico of Mainz see G. CAMBIER (ed.), EMBRICONDE
MAYENCE,La vie de Mahomet (Collection Latomus 52), Bruxelles,
1961,p. 5-92. For discussionon two anti-Islamic texts in Spain see K. B.
WOLF, «The earliest Latin lives of Muhammad », in Conversion and
Continuity. Indigenous Christian Communities n Islamic Lands. Eighth
to Eighteenth Centuries,M. GERVERSnd R. J. BIKHAZI (ed.) (Papers n
Mediaeval Studies 9), Toronto, 1990, p. 89-101. Also Peter the
Venerable, Adversus nefandam sectam Saracenorum ibri duo (PL 189,
663-720 M. Th. D' ALVERNY,«Pierre Ie Venerable et la legende de
Mahomet », in A Cluny. congres scientifique, fetes et ceremonies
liturgiques en l'honneur des saints Abbes Odon et Odilon, 9-11 juillet
1949, travaux du congres Art, Histoire, Liturgie, Dijon, 1950, p. 161-
170); Eulogius of Cordoba (ed. I. GIL, Corpus Scriptorum
Muzarabicorum 2, Madrid, 1973,p. 483-486).
31. I wish to thank John Tolan for letting me consult the typescript of
his «Anti-Hagiography: Embrico of Mainz's Vita Mahumeti », Journal
of Medieval History (forthcoming). The botched resurrection attempt is
found in various texts (see WOLF,«The earliest Latin lives », p. 97) and
is repeated by Eulogius (Corpus Scriptorum Muzarabicorum, p. 486).
According to the Passio, after Simon Magus died from the aborted
flight, Nero ordered to keep the body for three days, believing the
magician would rise from the dead (57, 13-15,p. 167). For the alleged
flight of Muhammad see G. CAMBIER, «Les sources de la Vita
Mahumeti d'Embricon de Mayence », Latomus 20 (1961),p. 364-380,at
p. 375-377, and A. ECKHARDT, Le cercueil flottant de Mahomet »,
Melanges de philologie romane et de litterature medievale offerts Ii E.
Hoepffner, Paris -Strasbourg, 1949,p. 77-88
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SIMON MAGUS TRADmONS
Sergius -to yet another mysterious character known as Nicolas,
who subsequently is said to have led the Prophet into moral
lapses, specifically polygamy.32According to Irenaeus, the first
« successor»of Simon Magus in the line of Gnostic teachers was
a Nicolas of Antioch, the purported founder of the Gnostic sect
of the Nicolaitans. He was allegedly the same heretical leader of
the Nicolaitans that was censured by the apostle John in the
Book of Revelation (2:14-16). The bishop of Lyon also claimed
that this Nicolas in John s Revelation was also one of seven dea-
cons consecrated by the apostles n the Acts of the Apostles (6 :5-
6). As in the case of Simon Magus, Irenaeus created «typologi-
cal» links between the Nicolas of the New Testamentand the
Gnostic sect of the Nicolaitians which flourished in the begin-
ning of the second century.33Although the eminent Clement of
Alexandria did not concur with Irenaeus on these alleged con-
nections, the tradition perpetrated by Irenaeus prevailed and
proliferated into the Middle Ages.34As Simon Magus was the
« father» of doctrinal error, Nicolas was transformed into the
« father » of moral lapses which are characteristic of all heretics.
Simon and Nicolas also share a common bit of background:
See A. ANCORA, «La Leggenda di Maometto in Occidente »,
Giornale storico della letteratura Italiana 13 (1889), p. 199-281 ; A.
MANCINI, «Per 10 studio della leggenda di Maometto in Occidente »,
Rendiconti della Reale Accademia Nazionale dei Lincei 10 (1934), p.
325-349; M. Th. D ALVERNY, «Pierre Ie Venerable», p. 161-170; G.
CAMBIER, Les sourcesde la Vita Mahumeti d Embricon de Mayence »,
100-115 and 364-380. For Bahira consult A. J. WENSINCK, Bahira »,
Encyclopaedia of Islam, vol. 9, Leiden, 1911,p. 576-577.33.
Irenaeus, Contra haereses ,26,3 (SC 264,p. 348-349).
34. Clement of Alexandria, Strom. 3,4 (ed. O. STAHLIN,Stromata Buch
I-VI [Clemens Alexandrinus 2; GCS 1], Leipzig, 1906,p. 207-208). For
the survival of Irenaeus s nterpretations see Augustine, De haeresibus5
(Aurelii Augustini opera 13, 2; CCSL 46, p. 291-292) Isidore of
Seville, Etymologiarum VIII, De haeresibus Christianorum 8.5.5 (ed.
and trans. J. OROZ RETA et al., SAN S/DORODE SEVILLA,Etimologias,
vol. 1 : Libros I-X [Biblioteca de Autores Cristianos 433], Madrid, 1982,
p. 693-695). Relevant studies on the Nicolaitans are by A. von
HARNACK,«The sect of the Nicolaitans and Nicolaus, T~ deacon in
Jerusalem », Journal of Religion 3 (1923),p. 413-422; M. GO~EL, «Les
NicolaYtes », Revue de l histoire des religions 58 (1937), p. 5-36; N.
BROX,«Nikolaos und Nikolaiten », Vigiliae Christianae19 (1965),p. 23-
30; P. PRIGENT, «L heresie Asiate et l eglise confessante de
I Apocalypse a Ignace », Vigiliae Christianae 31 (1977), p. 1-22; A.
FERREIRO, Jerome s polemic against Priscillian », p. 316-319. For the
heresy of the Nicolaitans in the High Middle Ages see G. B. BORINO, I
decreti di Gregorio VII contro i simoniaci e i nicolaiti sono del sinodo
quaresimale del 1074», Studi gregoriani 6 (1959-61),p. 277-295.
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162
A.FERREIRO
both heretics had lapsed from the apostolic faith. There existed
no doubt in the minds of medieval polemicists that Muhammad
was clearly in line with the doctrinal and moral error of Simon
and Nicolas.
It is rather amazing that most modern researchersat this junc-
ture have not looked seriously at the apocryphal Simon Magus
as the possible principal source that inspired the Magus figure in
medieval anti-Islamic texts. This has not been the case regarding
Nicolas of Antioch. Even so, the typological function of Simon
and Nicolas together in medieval polemics against Islam has not
been appropriately examined or expounded upon. We encounter
again, as in Irish and English sources, creative usagesof Simon
Magus, and this time directly drawing from the apocryphal nar-
ratives of the Acts of Peter, the Passio and even the Church
Fathers. One last example will suffice to demonstrate the «vir-
gin» state of this aspect of Simon Magus research. The exceed-
ingly crucial text known as the Liber Nicholay, of which there is
a copy at the Bibliotheque Nationale in Paris, has never been
edited or adequately treated by scholars. M. Th. D Alverny
promised an edition of the manuscript, but to my knowledge it
never saw he light of day.35 do not have any references o illu-
minations or any other art forms that depict Muhammad with
the Magus or with Nicolas of Antioch, but given the lack of full
accountability of the iconography in this area of research, we
can not rule out the possibility that some might exist.
SimonMagns,Filthy Lucre,and Simony.
The singular image of Simon Magus that dominated the minds
of medieval polemicists is that of « simony» : the buying and
selling of ecclesiasticaloffices, and rooted directly in the Acts of
the Apostles 8 :9-24. In modern medieval scholarship there has
been no shortage of books and articles on this topic.36There is
35. D ALVERNY,«Pierre Ie Venerable», p. 166, note 2. Also ANCORA,
«La leggenda di Maometto », p. 199-281.MANCINI,«Per 10studio », p.
325-349,at 330-349.
36. R. A. RYDER, Simony. An historical synopsis and commentary
(Catholic University of America Canon Law Studies 65), Washington,
1931; J. LECLERCQ, Simoniaca heresis », Studi gregoriani 1 (1947), p.
523-530 H. MEIER-WELCKER, Die Simonie im frtihen Mittelalter »,
Zeitschrift Ur Kirchengeschichte64 (1953-53),p. 61-93; P. DE VOOGHT,
«La simoniaca haeresis selon les auteurs scolastiques», Ephemerides
Theologicae Lovanienses 30 (1954), p. 64-80; J. B. RUSSELL,Dissent
and Reform in the Early Middle Ages (Center for Medieval and
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IMON MAGUS TRADmONS
also no dearth of material from patristic and medieval writers
who consistently across the centuries inveighed against this
activity. With this said, however, the topic is far from exhausted
and there are still some avenues in need of exploration. The
apocryphal material, which has hardly been addressed in this
context, is not silent about Simon Magus s appetite for money
and riches.37How these apocryphal «money hungry» images
compare and supplement that which is found in the Acts of the
Apostles when both are invoked in medieval polemics is an area
requiring attention. Another well known feature of this tradition
is the belief by patristic and medieval writers that in the Old
Testament a prototype of the simoniacal Simon Magus could be
identified. H.-J. Horn in a groundbreaking study focusing mostly
on the Early Christian tradition, yet not wholly ignoring the
medieval era, demonstrated how biblical exegetes found that
Old Testament type of Simon s simony in the person of Gehazi,
the servant of the prophet Elisha, who after hoarding ill-gotten
money was struck by Elisha with leprosy (2 Kings 5 :19-27).38n
medieval literature, the figure of Gehazi occupied a significant
place in anti-simoniacal campaigns as the Church attempted to
eradicate this persistent greedy practice. How the relationship of
Simon Magus in the Acts of the Apostles and in the apocryphal
sources and t,he Old Testament Gehazi changed in the Middle
Ages merits further thought. Equally instructive are additional
« types» of Simon Magus not rooted in the Acts of the Apostles
incident, which circulated in patristic and medieval times that
promote him as a money loving false teacher. The anti-Gnostic
literature comes immediately to mind in this context where
Simon Magus does surface as a gigolo seducing wealthy women.
Finally, we do possessexamples of the sin ~f simony depicted in
art, found primarily in Canon Law texts, a~ we need to estab-
lish what relationship they may have to the various literary tradi-
tions.
RenaissanceStudies [UCLA] 1), Berkeley -Los Angeles, 1965,p. 128-
136 ; J. WEITZEL, Begriff und Erscheinungformen der Simonie bei
Gratian und den Dekretisten (Munchener Theologische Studien 3.
Kanonistische Abteilung 25), Munchen, 1967; J. H. LYNCH,Simoniacal
entry into religious life from 1000 to 1260 A social economic and legal
study, Ohio State University, 1979.
37. See he Acts of Peter 8, 13-16,p. 55 and 17, 1-25,p. 63.
38. H.-J. HORN, «Giezie und Simonie », lahrbuch fur Antike und
Christentum 8/9 (1965-66),p. 189-202.See he instructive essayby T. L.
BRODIE,«Towards unraveling the rhetorical imitation of sources in
Acts: 2 Kgs. 5 as one component of Acts 8, 9-40 », Biblica 67 (1986),p.
41,67.
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FERREIRO
SimonMagus: the Flight and Crashora Magician.
There is no argument that Simon s aerial flight with the aid of
demonic power became overwhelmingly pervasive in medieval
literature and art. The abundance of sources e-telling this apoc-
ryphal tale is testimony of the extent that it captured the imagi-
nation of the Church. The applications, metaphors, and typolog-
ical moral lessonsderived from the flight of Simon Magus are as
diverse as the sources that conserved the story. The flight
became more specifically a medium through which the Church
censured heresy, nsubordination to Church authority, and magic
and witchcraft.39 This specific chapter of Simon Magus adven-
tures in the apocryphal accounts s found in almost every tradi-
tion that I have already outlined above: from Irish folklore to
condemnations against slam. The numerous works of art which
extend well into the sixteenth-century about Simon Magus s
flight forever preserved the legend in capitals, windows, fres-
coes, manuscript illuminations, and sculpture.4oThe material is
so abundant that an exhaustive survey of the art alone would
stand on its own merits. What is more tantalizing, however, s to
arrive at an understanding of the adaptations of the tale in art
and its relationship to the literary traditions that circulated in
parallel fashion at every stage of development.
I am thoroughly convinced of the existence of additional
iconography of this story and others that have not been entered
into the Princeton Index of Christian Art. An example of an art
piece on the Fall of Simon Magus not catalogued in the Index is
one found in the tympanum at Neuilly-en-Donjon reproduced
39. See L. WHITE,Jr., «Eilmer of Malmesbury. An eleventh century avi-
ator», Technologyand Culture 2 (1961), p. 97-111; R. B. HERZMAN nd
W. R. COOK, «Simon the Magician and the medieval tradition »,
Journal of Magic History 2 (1980), p. 29-43; V. I. J. FLINT, The Rise of
Magic in Early Medieval Europe, Princeton, 1991,p. 338-344. A flying
witch is compared to Simon Magus in a document entitled «A mar-
velous incident at Rheims », reproduced in W. L. WAKEFIELD nd A. P.
EVANS trans.), Heresies of the High Middle Ages, Columbia, 1969, p.
251-254.
40. There is not a single volume to date that has exhaustively cata-
logued and studied these images. For now see STUHLFAUTH,ie apoc-
ryphen Petrusgeschichten G. CELl, «Sulle memorie e i monumenti dei
SS. Apostoli Pietro e Paolo aRoma », La civiltii cattolica 86 (1935), p.
247-257 and 587-594; E. MALE, The Gothic Image. Religious Art in
France of the Thirteenth Century, New York, 1958,p. 296-299; L. REAU,
Iconographie de l art chretien, vol. 3, Paris, 1959, p. 1225-1226; R. B.
HERZMAN nd W. R. COOK,« Simon the Magician », p. 29-43.
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IMON MAGUS TRADmONS
with commentary by W. R. COOk.41The archivist at the
Cathedral of Oviedo, Spain, Dr. Agustin Hevia Ballina, has
alerted me to a Simon Magus relief in the altar of the chapel
dedicated to Simon Peter. This icon has never been catalogued,
researched, much less appended to the Princeton Index. In the
summer of 1995 I will be in Oviedo to photograph and research
the relief so as to determine, among many other things, which of
the Simon Magus legends is depicted therein. It is encouraging
that efforts by some members of the Association pour [ etude de
[a [itterature apocryphe chretienne o systematicallycatalogue the
presence of all apocryphal themes preserved in iconography may
also bring to light other unresearched Simon Magus art pieces.42
Conclusion.
It is all too obvious from the preceding brief select survey of
primary and secondary sources on the patristic-medieval Simon
Magus traditions that a gold mine of opportunity awaits explo-
ration. Scholars have long recognized the ubiquitous presenceof
the Simon Magus type in patristic and medieval polemics. What
has been lacking up to now is an interdisciplinary study that
brings all of this Simon Magus material together into a coherent
systematic study of this figure. We have not yet arrived at the
full implications of the convergenceof apocryphal and canonical
sources into what the patristic and medieval Church called
Orthodoxy and the central place the arch-villain Simon Magus
type had in this complicated fascinating process. My efforts in
the next several years will be dedicated to bringing such a study
to fruition.
41. See «A new approach to the tympanum of Neuilly-en-Donjon »,
Journal of Medieval History 4 (1978),p. 333-345.
42. My work and that of ProfessorsDavid Cartlidge and Claude Berard
at this colloquium will help to remedy this deficieny of our understand-
ing of Simon Magus iconography.
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Barbara FLEITH
Universite de Geneve
DIE LEGENDA AUREA UND IHRE
DOMINIKANISCHEN BRUDERLEGENDARE
ASPEKTEDER QUELLENVERHALTNISSE
APOKRYPHENGEDANKENGUTS.
Pour son legendiel; Voragine a aussi utilise des sourcesapocryphes. l
a caracterisehuit de ses ecits explicitement comme « apocryphes», ce qui
a conduit a penser que l auteur etait assez ritique a leur egard. En com-
parant son reuvre avec les legendiers qui lui ont servi de sources, on
constate cependantque Voragine a ajoute ou rehabilite ces recits,ce qui
est indice d un penchant pour Ie spectaculaire,et non d une attitude cri-
tique. Pour mieux apprecier Ie travail « critique» du compilateul; il fau-
dra determiner a l avenir s il y a, dans ses sources, des recits qualifies
explicitementd « apocryphes» et analyser usage que Voragine en a fait.
Voragine benutzte ar seine Legendar auch apokryphe Quellen; acht
Berichte weist er ausdracklich als apokryph aus, was zu der Meinung
fahrte, der Autor sei besonderskritisch gewesen.1m Vergleich zu ande-
Tenvan ihm benutztenLegendaren iigte der Autor dieseBerichte edoch
in Eigeninitiative hinzu oder rehabilitierte sie, was nicht far kritische
Einstellung, sondern ar den Hang zum Spektakuliiren spricht. Um die
« kritische» Arbeit Voragines richtig einzuschiitzen, maftte in Zukunft
gekliirt werden, ob es in seinen Quellen apokryph gewertetesErziihlgut
gibt, und wie er mil so markiertem Material umgegangenst.
I. Drei Quellenlegendare.
Einleitung.
Die folgende Untersuchung ist entstanden auf Anregung
Remi Gounelles, der 1995 eine Studie zum Gebrauch des
B~griffs «apokryph» in der Legenda Aurea (LA) des Jacobus
deYoragine (JdV) ver6ffentlichte.
7, 1996,p. 167-192
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B. FLEITH
UnleT dem Titel« Senset usage d'apocryphus dans a Legende
doree» versucht Gounelle flir acht Erziihlkomplexe aufzu-
deckeD, in welcher Weise JdV die Qualifikation «apokryph»
benutzt, «si, face a des textes non canoniques, Jacques de
Voragine a fait acte de vilipendeur ou de canonisateur ...ou bien
s'il a travaille avec ces textes en critique eclaire, DOUgmontrant
d'une certaine maniere que textes canoniques et apocryphes
peuvent etre compatibles dans la vie des Eglises chretiennes»1.
Gounelle hat den Eindruck, daB JdV den Terminus «apokryph»
dann verwendet, wenD nicht kanonisierte Erziihlabschnitte linter
dem Aspekt ihrer «vraisemblance» und «tenue theologique »2
im Urteil des JdV anzuzweifeln waren. Da man die direkten
Quellen des JdV nicht kenne, sei die Frage allerdings nicht end-
gtiltig beantwortbar3, denn die Hinweise auf den apokryphen
Charakter der benutzten Quelle und die deshalb yon JdV ange-
ratene Vorsicht bei der Wiederverwertung des Materials konn-
ten ja aus seineD Vorlagen iibemommen worden sein. Aber erst
wenD aIle yon JdV benutzten Quellen -auch die yon ihm
benutzten Quellenlegendare -und die LA selbst in kritischen
Ausgaben vorliegen, werden definitive Aussagen zur kritischen
Kompilationsarbeit des JdV moglich sein4.
Bei den Quellenlegendarenhandelt es sich urn die Abbreviatio
in Gestis et Miraculis Sanctorum des Jean de Mailly, den
Epilogus in Gesta Sanctorum des Bartholomiius yon Trient und
das Speculum Historiale des Vincent de Beauvais5.Zwar liegen
immer noch keine kritischen Editionen dieser Legendare vor,
dennoch mochte ich je einen Textzeugendieser drei dominikani-
schen Quellenlegendare auf ihren Umgang mil dem in der LA
als ap°kryph gekennzeichneten Erziihlgut bin untersuchen, urn
damit zu weiteren Fragen anzuregen6.
L R. GOUNELLE, Sens et usaged'apocryphus dans a Legende doree»,
Apocrypha 5 (1995), 189-210,193.
2. Ebd., 208f.
3. Ebd., 210.
4. Auf dieses Problem hat schon Bernard DE GAIFFIER n seinem
Forschungsbericht zum Problem «L historia apocrypha' dans la
Ugende doree », Analecta Bollandiana 91 (1973), 265-272,hingewiesen
und in diesem Zusammenhang nach kritischen Ausgaben der betroffe-
DenWerke verlangt.
5. Zuletzt diskutiert bei Giovanni Paolo MAGGIONI,«Aspetti originali
dell a 'Legenda Aurea' di lacopo da Varazze », Medioevo e
Rinascimento. Annuario del Dipartimento di Studi sui Medioevo e il
Rinascimento dell'Universitd di Firenze IV [D. s. I] (1990), 143-201.
6. 1m Folgenden werde ich diese Textzeugen als reprasentativ fur das
jeweilige Werk und seineD Autor behandeln, obwohl dies natfirlich
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 169
Textgrundlage meiner Untersuchung ist flir die Abbreviatio in
Gestis et Miraculis Sanctorum die Handschrift der Basler
Universitatsbibliothek B. 111,14, tir den Epilogus in Gesta
Sanctorum die Ausgabe dUTCh Gobbi aufgrund der
Klosterneuburger Handschrift 12367 und ftir das Speculum
Historiale die Reprint-Ausgabe van 1964/58.Die LA babe ich in
der Ausgabe van Graesse9 enutzt.
Die Quellenlegendare er LA
Reute kann mil Sicherheit gesagtwerden, daB die Quellen fliT
jeden einzelnen Text der LA nicht ohne den Vergleich mil den
oben genannten zeitgenossischenLegendaren bestimmt werden
konnen. DaB in der ForschungsgeschichtelOrrttimer tibeT die
Quellenlage einzelner Texte der LA aufkommen konnten, liegt
daran, das die genannten Legendare lange nicht bekannt oder
nicht zuganglichwaren.
Reute liegen folgende Erkenntnisse tibeT diese drei
Quellenlegendare vor :
2.1. Abbreviatio in Gestiset Miraculis Sanctorum.
Johannes de Malliaco (Jean de Mailly, OP) veroffentlichte
zwei Fassungen seiner Abbreviatio in Gestis et Miraculis
Sanctorum (Ab) : 1. Fassung, entstanden 1225-1230, ., erweiter-
te Fassung entstanden 124311.Der Text liegt schon seit 1947 in
nicht der Fall ist. Ich bin mir dieses Problems bewuBt, aber ohne diese
Hilfskonstruktion ware die yorliegende Oberlegung, die Y. a. dazu die-
Den solI, weitere Untersuchungen anzuregen, nicht moglich gewesen.
7. Domenico GOBBI Hrsg.), Bartolomeo da Trento domenicano e agio-
grafo medievale. Passionalede sanctis. Textus Index (Bibliotheca ciyis
III), Trento 1990,Teil2, 17-193.
8. VINCENTDE BEAUVAIS, peculum quadruplex, Graz 1964-65,4Bande
(Photogr. Wiedergabe der Ausgabe Douai, 1624), Bd. 4 : Speculum
historiale.
9. Th. GRAESSE, acobi a Voragine Legenda Aurea vulgo Historia
Lombardica dicta ad optimorum librorum fidem recensuit, Erstaufl.,
Dresden, 1846; Nachdruck der 3. Aufl. yon 1890,Osnabrtick, 1969.
10. VgI. dazu den Forschungsbericht yon B. FLEITH, «The Patristic
Sources of the Legenda Aurea: A ResearchReport », in Receptionof the
Church Fathers in the West,hrsg. yon Irena BACKUS in Vorbereitung).
11. Siebe zur Ab : A. DONDAINE,«Le Dominicain fran<;ais Jean de
Mailly et la Legende doree », Archives d histoire dominicaine 1
(1946), 53-102; DERS., ean de Mailly, O. P., Abrege des Gestes et
Miracles des Saints, raduit du latin (Bibliotheque d histoire dominicai-
ne 1), Paris 1947 G. PHILIPPART,Le manuscrit 377 de Berne et Ie sup-
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170
B. FLEITH
der franzosischen Ubersetzung durch Dondaine vor. In der
Einleitung antwortet der Ubersetzer auf die Frage, ob JdV die
Ab gekannt babe : «L etroite parente des deux ouvrages (Ab
und LA), dans leur forme litteraire comme dans leur contenu,
ne permet guere d en douter il parait indubitable qu il (JdV)
s inspire des Gesteset Miracles tout au long de son reuvre »12.
Ein Jahr vorher hatte Dondaine13noch vorsichtiger die Ab zwar
als Hauptquelle der LA deklariert, jedoch mit der
Modifikation: «Principale source, qu on nons entende bien: il
s agit moins du materiel utilise par Jacques de Voragine..., que
de l idee creatrice de la Legende doree». Yon den 177 Kapiteln
der LA fanden sich 136 auch in den Ab, «dans Ie fond, la forme
et la langue, parfois a la lettre. »14DaB die Ab dennoch direkte
Quelle war fur einen Teil der Legenden der LA ist inzwischen
mehrfach herausgearbeitetworden15.
Auch in die Ab sind narrative Elemente, Fabeln und apo-
kryphe Berichte eingeflossen; wie JdV so hat auch Jean de
Mailly in einigen Fallen seine Quellen in Frage gestellt und an
deren Angaben gezweifelp6. «Si nons rapportons ces choses,
sagt Jean de Mailly an eiDer Stelle, c est pour refuter leg ecrits
apocryphes au nom des reuvres qui font autorite17...»
plement au Legendier de Jean de Mailly», Analecta Bollandiana 92
(1974), 63-78; DERS., «Le Legendier de Jean de Mailly it Meillerie sur
Ie Leman en 1447 », Analecta Bollandiana 97 (1979), 128; K.-E. GEITH,
«Die Juliana-Legende in der Abbreviatio in gestis et miraculis sanc-
torum yon Jean de Mailly», Analecta Bollandiana 103 (1985), 95-104;
DERS., «Die Abbreviatio in gestis et miraculis sanctorum yon Jean de
Mailly als Quelle der Legenda Aurea », Analecta Bollandiana 105
(1987),289-302.
12. DONDAINE, Jean de Mailly (wie Anm. 11), 14. «Le texte de base de
la traduction est principalement celui du manuscrit latin 10843 de la
Bibliotheque Nationale, probablement un des plus anciens qui nous
soient parvenus» (S. 21).
13. Dondaine, «Le Dominicain...» (wie Anm.ll), 54.
14. Ebd., 91.
15. Vgl. zuletzt GEITH, «Die Abbreviatio ...» (wie Anm. 11),289-302;
G.-P. MAGGIONI, «II codice novarese di Jean de Mailly e la Legenda
aurea », Novarien 17 (1987), 173-184.
16. DONDAINE, Jean de Mailly (wie Anm. 11), 15 : «En intention Jean
de Mailly voudrait eliminer la fable de son reuvre, mais on ne peut
echapper d un coup it l ambiance de son siecle, il y faudrait du geniearfois, cependant, Jean de Mailly esquisse une critique des faits rap-
portes dans les sources de son legendier. »
17. Ebd., 16.
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LEGENDA AUREAUND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 171
2. 2. Epilogus n GestaSanctorum.
Bartholomeus Tridentinus (Bartholomaus van Trient, OP)
beendete seineD Epilogus in Gesta Sanctorum (Epil) 1245 in
Trient; es liegt noch keine kritische Edition vor, aber der Text
ist durch die Ausgabe van Gobbi nun endlich zuganglich18.
Boureau weist ausdriicklich daraufhin, daB JdV den Epil
gekannt babe : «il (JdV) Ie cite explicitement dans Ie chapitre
sur la nativite du Seigneur; il lui emprunte probablement une
anecdote sur Dominique qu'on ne retrouve Dulle part ailleurs; il
copie (mais sans Ie citer) textuellement son chapitre sur saint
Patrick19.» Boureau kennzeichnet den Epil als ein Legendar, das
sich auch dem nichtkanonisierten und weltlichen Erzahlgut
6ffne : «Barthelemy y contribue lui aussi, mais il donne droit de
cite, egalement, aux Apocryphes, certes bien CallOUS vant lui,
mais marginalises2O.
3. SpeculumHistoriale.
Das Speculum Historiale (SpH) bildet den 3. Teil der
Enzyklopadie mit dem Titel Speculum maiu.s des Vincentius
Bellovacensis (Vincent de Beauvais, OP). « En effet, sur les 3800
chapitres dont se compose son Speculum historiale, pres de 900
relatent de la vie et des miracles des saints... II n'en reste pas
mains vrai que celui-ci est un ouvrage d'histoire generale et non
pas proprement un legendier1... }} Poncelet glaubt, daB das SpH
18. GOBBI wie Anm. 7). In diesem Band finden sich Beitrage verschie-
dener Autoren zu Bartholomaus yon Trient. V gl. auch A. DONDAlNE,
«L Epilogus in Gesta Sanctorum' de Barthelemy de Trente », in Studia
mediaevalia et mariologica P. Carolo Balic, OFM... dicata, Rom 1971,
333-360 ; DERS.,«Barthelemy de Trente, O. P. », Archivum Fratrum
Praedicatorum 45 (1975),79-105; A. BOUREAU, Barthelemy de Trente
et l'invention de la 'Legenda nova' », in Raccoltedi vite di Santi dal XIII
al XVIII secolo, hrsg. yon Sofia BOESCHGAJANO Universita degli
Studi di Roma« La Sapienza» Collana del Dipartimento di Studi storici
dal Medioevo all'eta contemporanea 5), Brindisi 1990,23-39,mit weite-
fen Literaturangaben. Es ist durchaus moglich, daB sich einige der
« Auswahllegendare » oder Handschriften mit dem Titel
«Pronunciamentum» im Katalog der lateinischen LA-Handschriften
bei B. FLEITH, Studien zur Oberlieferungsgeschichte der lateinischen
Legenda Aurea (Subsidia hagiographica 72), Bruxelles 1991, als das
Legendar des Bartholomaus yon Trient entpuppen konnten.
19. Ebd., 24.
20. Ebd., 35.
21. A. PONCELET,Le legendier de Pierre Calo », Analecta Bollandiana
29 (1910), 5-116,20.
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172
B.FLEITH
zum erstenmal 1244 veroffentlicht worden sei, 1250 jedoch -
oder etwas spater -babe Vincent de Beauvais eine zweite
Ausgabe erstellt22. Dondaine beobachtete, daB Vincent de
Beauvais einen groBen Teil der Kapitel der Ab wortlich in sein
SpH iibemommen hat23.
1m ersten Buch, Kapitel 9, seines SpH verteidigt Vincent de
Beauvais den Gebrauch der Apokryphen : «Ich sage das nicht,
weil ich, was zuviel der AnmaBung ware, den Apokryphen
Geltung (Autoritat) verschaffen wollte, sondem weil es, wie ich
meine, erlaubt ist, das zu lesen und auch zu glauben, was nicht
gegen den katholischen Glauben ist, mag es auch nicht die
Sicherheit der Wahrheit haben... So babe ich auch ene wenigen
Dinge aus den Apokryphen diesem Werk eingefUgt in der
Meinung, daB sie weder wahr noch falsch seien, aber daB sie ein-
tach vorzutragen sind und daB sie ohne Schaden fUr den
Glauben geglaubt und gelesenwerden konnen24,
2. 4. Zusammenfassung.
Die Ab, das iilteste der uns bier interessierendenLegendare,
hat das SpH beeinfluBt ; Ab, SpH und Epil haben der LA als
QueUegedient.
22. Weiterfiihrende Ergebnisse lassen sich von dell Forschungsprojekt
der Mitarbeiter des «Atelier Vincent de Beauvais» in Nancy erhoffen,
die den Text der Handschrift Douai 797 (14. Jh.) auf CD-ROM gespei-
chert haben und ihn in dieser Form fur Anfragen der Forschung zur
Verfiigung stellen. Der neueste Beitrag zur Textgeschichtewurde vor-
gelegt von J. B. VOORBIJ,Het Speculum Historiale van Vincent van
Beauvais.Een studie van zijn onstaansgescheidenis,roningen 1991 er
war mir fur diese Studie nicht zuganglich. Zu Vincent de Beauvais als
Kompilator vgl. Alastair J. MINNIS,«Late-medieval discussionsof com-
pilatio and the role of the compilator », Beitriige zur Geschichte der
deutschenSpracheund Literatur 101 (1979),385-421.
23. A. DONDAINE, «Le Dominicain fran~ais Jean de Mailly et .la
Legende doree », Archives d histoires dominicaine 1 (1946),53-102,60.
24. «Nec hoc dico quia velim apocriphis quod nimie presumption s
esset auctoritatem dare, sed quia licet ut opinor ea legere et etiam cre-
dere que non sunt contra catholicam fidem, licet non habeant veritatis
certitudinem... Sicque ego pauca ilIa de apocriphis huic operi inserui,
non vera vel falsa esseasserendo, ed tamen ea que legi simpliciter reci-
tando, que salva fide possunt etiam credi et legi. » Text nach Auskunft
des «Atelier Vincent de Beauvais» in Nancy. Die Buchzahlung ist im
Vergleich zum Druck aus Douai eine Nummer im Ruckstand : Buch I
ist in der Hs ein« Libellus apologeticus». An dieser Stelle mochte ich
Monique PAULMIER-FoUCARTnd Marie-Christine DUCHENNEerzlich
fur ihre prompte Hilfsbereitschaft danken.
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LEGENDA AUREA UND DOMINlKANISCHE BRUDERLEGENDARE 173
Es ist zu beobachten, daB JdV die Martyrer-, Jungfrauen-,
Bekenner- und Wtistenvaterlegenden aus den anderen domini-
kanischen Kurzlegendaren meist ohne groBe Modifikationen
tibernimmt ; die Apostellegenden und die Lebensgeschichten
der groBen Kirchenlehrer erfahren eine groBere Uberarbeitung
unter Zuhilfenahme verschiedenster Quellen, konnen abeT n
ihrem Kern auch aus den Kurzlegendaren stammen. Die im fol-
genden zu diskutierenden Textausschnitte gehoren aIle zu die-
gem etzten Legendentyp.
Erstaunlich war flir mich die Beobachtung verschiedener
Forscher, daB JdV und seine Ordensbrtider zwar die gleichen
Exzerpte aus einem enormen Inventar an Informationen wie-
dergeben, diese jedoch in alIen Legendaren unterschiedlich aus-
flihrlich sind, so daB einige Forscher soweit gehen, an eine
gemeinsameQuelle flir aIle dominikanischen Legendare zu den-
ken25.
Es ist jedoch kaum vorstellbar, daB von einer solchen wichti-
gen Quelle keine Spur auf uns gekommen sein soIl
II. Jacobus e VoraginesHinweiseauf apokryphes
Gedankengut.
lnwieweit waren diese Quellenlegendare Vorlage ftir die
Stellen, an denen sich JdV mil clem apokryphen Charakter sei-
ner Quellen auseinandersetzt,und wie haben die anderen domi-
nikanischen Autoren an diesen Stellen mil clem apokryphen
Gedankengut operiert?
Den Untersuchungen R6mi Gounelles zufolge qualifiziert
JdV acht seiner Erzahlpassagen als «apokryph» ; vier dieser
Passagenseien aus einer «Historia apocrypha» tibernommen,
eine aus einer «Historia apocrypha Graecorum» und drei
Abschnitte aus anderen apokryphen Quellen.
Eine« Historia apocrypha» alsQuelle der LA.
JdV gibt ftir seineBerichte zur JudasherkunftMathiasc. 45),
zum Pilatusleben (Passio Domini c. 53), zur Bestrafung der
Juden(JacobusMin. c. 67) und zu Verbrechen nd Untergang
Neros (PetrusAp. c. 89) eine «Historia apocrypha»als Ouelle
an.
Vgl. FLEITH wie Anm. 10).
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 175
er sich ausdrticklich auf eine « historia apocrypha »31.Dieser
Motivationsbericht findet sich weder im Epi/, im SpH noch in
derAb.
Wie in der LA finden sich jedoch in der Ab am Ende der
Legende -nach dem Motivationsbericht aus der « Historia
apocrypha» in der LA -die Berichte fiber die Hungersnot in
Jerusalem32 nd die Auffindung des eingemauerten Joseph yon
Arimathia, die in beiden Legendaren zum Teil wortw6rtlich
tibereinstimmen, so daB man davon ausgehen kann, daB JdV
bier die Ab als Vorlage benutzt hat.
In der Ab wird dieser Bericht als « nicht wahr »33 bgewertet,
da er eiDer anderen Uberlieferung -genannt wird das
Evange/ium Nicodemi -widerspreche. Dies ist our ein Beispiel
daftir, daB es schon bei Jean de Mailly eine Auseinandersetzung
mit dem Wahrheitscharakter seiner Quellen gibt.
JdV unterlaBt die Bezeichnung « nicht wahr », und versucht
die ursprtinglich konkurrierenden Berichte zu harmonisieren34
diese Tendenz zum Harmonisieren, zum « Retten» eines
Erzahlmotivs findet sich immer wieder in der LA.
31. LA, 299 : «Haec autem fuit causa adventus ipsorum in Jerusalem,
sicut in quadam hystoria invenitur, licet apocrypha.» Diese Episode
wird S. 301,36 abgeschlossenmit der Bemerkung : «Utrum autem haec
hystoria narranda sit, lectoris judicio relinquatur. »
32. LA, 301-302 «Biennio igitur a Tito Jerusalemobsessa nter caetera
mala, quae obsessos graviter perurgebant, tanta fames omnes tenuit,
quod parentes filiis et filii parentibus ; ( ) ViTi uxoribus et uxores viris
cibos non tantum e manibus, sed etiam ex ipsis dentibus rapiebant.» -
Ab, fol. 25ra : «Biennio igitur obsessacivitate inter cetera mala que
obsessos gravissime perurgebant tanta fames omnes pariter invasit
quod parentes filiis et filii parentibus ViTi uxoribus et matTesparvulis
cibum non tantum e manibus sed ex ipsis dentibus rapiebant. »
33. Ab, fol. 25rb : «Legitur autem quod tytus intrans ierusalem vidit
quendam murum densissimum et iussit ilIum perforari et statim facto
foramine invenerunt senem quendam aspectu et facie venerabilem et
quesitus ab imperatore quis esset respondit se esse oseph ab arimathia
civitate iudee ...sed secundumverba nychodemi hoc non est verum qui
scripsit in libello suo de passionedomini. »
34. LA, 302-303 «Legitur quoque quod Titus intrans Jerusalemquen-
dam murum densissimum vidit, ipsumque perforari praecepit, factoque
foramine quendam intus senem adspectu et canitie venerabilem inve-
nerunt, qui requisitus, quis esset, respondit, se esse Joseph ab
Arimathia... In evangelio tamen Nicodemi dicitur, quod cum Judaei
iusum reclusissent...Potest dici... »
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,
' (
178 B. FLEITH
teuflisch Bose und seine Vernichtung dUTCh ie himmlischen
Machte dramatisch in Szenezu setzen.
2. Eine «Historia apocrypha Graecorum» als Teilquelle der
Kreuzesholzlegende Inventio crucisc. 68).
2. I. Legenda Aurea.
JdV eroffnet seine Inventio-Legende mit der Eingliederung
der Kreuzesholzlegende. Diese Kreuzesholzlegende ist dreistu-
fig: Die erste Stufe besteht aus eiDer Rahmenhandlung und
einem eingeschobenen Kern; die Rahmenhandlung -nach
Aussage des JdV dem Evangelium Nicodemi nachgestaltet -
erzahlt die Aussendung Seths an die Paradiesespforte, urn dart
zur Heilung des erkrankten Vaters Adam 01 yom Baum des
Mitleidens zu erhalten. Der ParadieseswachterMichael verwei-
gert ihm dieses 01, gibt ihm jedoch einen Zweig, den er auf dem
Berg Libanon pflanzen soIl. An dieser Stelle weist JdV auf eine
apokryphe Quelle der Griechen bin, deren Bericht er als Kern
in seine Rahmenhandlung einfugt : Der Engel gibt Seth yom
Holze, an dem Adam geslindigt batte, und trostet Seth mit dem
Hinweis, wenD dieser Zweig Frucht briDge, werde sein Vater
gesund. Als Seth nach Hause kommt, ist der Vater tot; so
pflanzt er den Zweig auf des Vaters Grab, woraus ein groBer
Baum erwachst, der bis in Salomons Zeiten besteht. Hier endet
der eingeschobene Bericht, und der Kompilator liberlaBt dem
«lector» das Urteil, ob dieser Bericht, der sich in keiner
bewahrten (authentischen) Historie oder Chronik befinde, wahr
sei oder nicht47.
Danach fuhrt JdV seine Rahmenhandlung weiter : Salomon
sieht den Baum, will ihn fur sein Waldhaus benutzen. Nun folgt
die zweite Stufe : Da sich -nach Johannes Beleth -das Holz
dafur abeTnicht eignet, wird es in ein Wassergeworfen, in dem
es der Konigin yon Saba auffallt, und sie es nach eiDer Vision
anbetet. Flir die dritte Stufe seiner Erzahlung beruft sich JdV
auf die Historia Scholastica, n der erzahlt wird, daB der Konigin
yon Saba das Holz im Waldhaus des Salomon auffallt und sie
daraufhin den Untergang des jlidischen Reiches dUTCh ieses
Holz voraussagt. Deshalb laBt es Salomon in der Erde vergra-
beD.
47. LA, 304 : «Utrum autem haec vera sint, lectoris judicio relinquatur,
cum in nulla chronica vel hystoria authentica haec egantur. »
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1
B.FLEITH
fiber die Ereignisse urn die Konigin yon Saba52, obei die zweite
und dritte Quellenstufe des JdV ineinander verarbeitet wurden.
Wahrend sich dieser Bericht bei JdV am Anfang der Legende
tindel, ist er derjenigen yon Jean de Mailly eher aufgepfropft,
vielleicht sogar nachtraglich angehangt. Auf jeden Fall wird
auch bier der apokryphe Kern nicht erwahnt.
2.
5. Zusammenfassung.
Meiner Meinung nach tibernahm JdV diesen apokryphen
Kern aus eiDer zusiitzlichen Quelle deshalb sehr bereitwillig,
weil er clem Benutzer des Legendars erlaubt, an eiDer kleinen
Erziihlung den Sinn der gesamten Heilsgeschichte zu ent-
wickeln.
3. Zur «bestraften Ohrfeige» (Thomas c. 5) -unkritische Uber-
nahme in den Bruderlegendaren -kritische Auseinandersetzung
bei Jd~
.
1. Legenda urea.
In del Thomaslegende findet sich die Episode, daB del
Apostel in Indien bei einem Hochzeitsbankett die Augen zu
Gott erhebt, urn zu belen. Eine hebraische Sangerin und
Flotenspielerin erkennt daran seine iidische Herkunft und singt
ihm ein Lied aus seiner Heimat, das im Text zitiert wird53.Da
Thomas nichts iBt, schlagt hm der Mundschenk ns Gesicht. Mit
clem Argument, es sei besser,daB dieser Schlagclem Tater in sei-
ner Lebenszeit vergolten und er dadurch im zukiinftigen Leben
verschont werde, sagt daraufhin Thomas voraus, daB er nicht
yom Festtisch aufstehen wird, his ihm die Hand des Taters
gebracht werde54.Gleich darauf wird der Tater auBerhalb des
Hauses yon Tieren umgebracht ein schwarzerHund bringt die
rechte Hand in den Festsaal. JdV fiihrt dazu eine
Augustinusstelle an55, n der der Kirchenvater darauf hinweist,
daB die Stelle aus eiDer apokryphen Schrift stammt ; mil Hilfe
eiDer zweiten Augustinusstelle kann der Kompilator jedoch zei-
52. Ab, Col. 26r : «Legitur autem quod regina saba q. (?) cum venisset
audire sapientiam salomonis vidit in domo saltus et cognovit per spiri-
turn... »
53. LA, 33 : «unus est Deus Hebraeorum, qui creavit omnia et fundavit
maria. »
54. LA, 33 : «melius est, ut in futuro indulgentia tibi tradatur et hic
transitoria plaga reddatur. »
55. Augustinus, Contra Faustum XXII, 79.
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 181
gen, daB diese Erzahlung trotzdem eine theologisch akzeptable
Aussagekraft hat. Thomas babe damit zwar eine grausame
Bestrafung im irdischen Leben des Taters vorausgesagt, aber
gleichzeitig fUr ihn urn Verzeihung im kiinftigen Leben gebeten,
und ihm damit den «ewigen Trost» erwirkt56. Nur die
Flotenspielerin hatte die Worte des Thomas gehort ; als die
Hand gebracht wird, fallt sie Thomas zu FiiBen und erklart den
Anwesenden die Zusammenhange.
2. Abbreviatio in Gestiset Miracu/is Sanctorum.
In der Ab singt die Flotenspielerin zwar ihr Lied, dieses wird
jedoch nicht zitiert. AuBerdem findet sich bier our Thomas
Voraussage der Bestrafung, nicht abeT die damit verbundene
theologische Rechtfertigung und vor allem nicht das
Augustinuszitat, das die Stelle als apokryph wertet. In der
Episode heiBt es auBerdem ediglich, ein Hund briDge die Hand
des Taters57.Zwar lassen sich wortwortliche Ubereinstimmun-
gen58zwischen den beiden Textausschnitten beobachten, den-
noch kann die Ab wegen des in der LA zusatzlichenSonderguts
nicht die einzige Quelle flir die LA gewesen sein. Der
Kompilator der Ab ktimmerte sich jedenfalls nicht urn das
Problem der Quellenwahrheit.
3. 3. Speculum Historiale.
Das SpH tiberliefert sowohl den hebraischen Liedanfang59
sogar etwas ausftihrlicher -als auch die theologische
Rechtfertigung in del Vorausdeutung des Thomas -wiederum
ausftihrlicher60. Hier -wie in del LA -bringt ein schwarzer
Hund die rechte Hand61.Die in del LA und im SpH gemeinsa-
LA, 34 : «et illi post hanc vitam quandoque finiendam in aetemum
consolarentur. »57.
Ab, tot. 5ra : «unus attulit manum eius ad apostolum.»58.
Vgl. z. B. LA, 33 : «non hinc surgam donec manus, quae percussit,
huc a canibus afferatur.» -Ab, tot. 5ra : «non surgam hinc donec canis
afferat mihi manum que me percussit. »59.
SpH, 344 : «Vnus est Deus Hebraeorum, qui creavit omnia, ipse
fecit crelum et terram et fundavit maria. »
60. SpH, 344 : «Melius est vt tibi in futuro saeculo detur indulgentia,
vbi nullus plagae finis occurrit : ista autem tibi reddetur, vt tu ipse inte-
Teas,manus veTo, quae me percussit it.canibus rosa, huc apportetur. »
61. LA, 33 : «unus niger canis manum ejus dextram in medium convi-
vium apportavit.» -SpH, 344 : «unus niger canis dextera manum eius
in ore suo ferens in medio conuiuij apportauit. »
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1 2
B.FLEITH
men Sondergutstellen im Vergleich zu der Ab stimmen meist
wortwortlich uberein, auBer daB JdV leicht kurzt. Der
Kompilator des SpH geht, wie derjenige der Ab, nicht auf die
Augustinische Quellenkritik ein.
Als Quelle fUr diesen Abschnitt kommen damit entweder
beide Legendare zusammen n Frage oder eine Sammlung, aus
der sowohl die Ab als auch das SpH schopf en. Fur diese
Episode ist das SpH nicht abhangig van der Ab wegen des oben
diskutierten Sonderguts.
3.
4. Epilogus in GestaSanctorum.
Der Epil faBt die Episode so kurz zusammen, daB man sie
nicht in ein Abhangigkeitsverhaltnis mit den anderen drei domi-
nikanischen Legendaren bringen kann.
3.
5. Zusammenfassung.
Resultat des Vergleichs der vier dominikanischen Legendare
ist, daB lediglich JdV es ftir notig halt, den apokryphen
Charakter dieser Erzahlung herauszustellen.Gleichzeitig jedoch
schwacht er ihn ab, indem er clem Bericht mil Hilfe der Kritik
und Argumentation des Augustinus eine verborgene theologi-
sche Wahrheit zuschreibt. Gounelle meint dazu : «Nous assi-
stalls ici au sauvetaged une tradition »62, ben auch wieder eiDer
Tradition, die zu Erstaunen und zur Verbltiffung des Horers bei-
tragen soIl.
4. Die Aufforderung zur Luge (Clemensc. 170) Auslassung
der apokryphen Passage in den Bruderlegendaren (?) -
Aufnahme und kritische Auseinandersetzung ei Jd~
4.
1. LegendaAurea.
Ahnlich wie bei den schon angefiihrten Beispielen verhalt es
sich mit der Kritik in der Clemens-Legende In Antiochia hatte
Simon der Magier den Apostel Petrus verleumdet und das Yolk
gegen hn aufgebracht. Bei eiDer Verfolgung zaubert der Magier
dem Faustinianus aus Not sem eigenes Zauberergesicht auf, urn
den Verfolgern zu entkommen. Der Apostel Petrus schlagt nun
dem verzauberten Faustinianus vor, nach Antiochia zu gehen,
sich dort als Simon der Magier auszugebenund dessen riihere
Reden zu widerrufen, urn dadurch den guten Rut des Apostels
204.
2. GOUNELLEwie Anm
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 1.83
wiederherzustellen63. JdV merkt bier an, daB ein solcher
Vorschlag ein Auf trag zur Ltige dUTChden Apostel gewesen
ware und deshalb nicht glaubwtirdig sei ; deshalb auch sei das
Buch, das diese Episode tiberliefert, apokryph. In einem zweiten
Schritt legt JdV diese Stelle jedoch aDders aus64; dUTCh iese
neue Sinngebung wird die Episode weniger unglaubwtirdig und
kann deswegen n seinem Korpus bleiben65.
4.2. Abbreviatio in Gestiset Miraculis Sanctorum.
In der Basler Handschrift der Ab kommt diese Episode nicht
vor.
3. Epilogus n GestaSanctorum.
In der Klosterneuburger Handschrift des Epi fehlt die
Clemens.,Legende.Der Mangel an kritischen Ausgaben macht
sich bier schmerzlichbemerkbar.
4. SpeculumHistoriale.
Ausftihrlich werden die Ereignisse urn Faustinianus dagegen
im SpH behandelt66. Allerdings vermerkt eine Randglosse :
«Transformatio vultus Simonis in Faustinianum in altera editio-
De, quam Rufinus vt meliorem sequitur, non continetur et quae
nec mihi satis probetur sed quia vetustissimuscodex, qui Basilea
in bibliotheca canonicorum id habebat, libuit praemonere lecto-
rem; nec dubium qUiD Vincentius hic secutus sit etiam aliquem
vetustum codicem si non supracitatum qui alliteram habet prout
nos hic correximus67.»Neben dem «unglaubwurdigen» Auftrag
zur « Luge » dUTchden Apostel Petrus steht als Glosse : «Neque
illae habentur in nonnullis codicibuS68.
63. LA, 783 : «Dixit ergo Petrus Faustiniano : quoniam quidem Symon
magus esse videris, perge Antiochiam, coram omni populo me excusa
ac ea, quae de me dixit Symon, ex persona sui retracta. »
64. VgI. dazu ausfiihrlicher GOUNELLEwie Anm. 1),205-206.
65. LA, 783,17-28.
66. SpH, 334-336.
67. SpH, 335.
68. SpH, 335; der Auf trag lautet hier: «Petrus ...ait: Audi
Faustiniane, cum nobis prius aliquid vtilitatis contulerit error isle trans-
formationis, tunc ego veram tibi vultus tui imaginem reddam. Praecede
nos Antiochiam, et in loco publico stans denuncia penitentiam tuam, et
Dic. Ego Simon denuncio vobis, et confiteor me omnia fefellisse de
Petro, neque enim seductor est, neque Magus, neque homicida... »
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184
B. FLEITH
Der Autor des yon mir eingesehenenSpH-Textes hatte diesen
Text unkritisch iibemommen, der Glossator zweifelt nicht -wie
JdV -an clem Aussagegehaltdes Textes, sondem an der Frage,
ob diese Stelle iiberhaupt auf Vincent zuriickgeht. Auch wenn es
keine wortwortlichen Ubereinstimmungen zwischender LA und
dieser SpH- Version gibt, konnte JdV den Erzahlabschnitt unter
starken Kiirzungen aDS ieser Version -oder abeTeiner gemein-
samenVorlage -iibemommen haben.
4.
5. Zusammenfassung.
Rtickblickend ltiBt sich feststellen, daB dieser Abschnitt min-
destens in einem der Vorlagenlegendare fehlt ; er findet sich
lediglich in eiDer SpH-Version, die eventueU nicht identisch ist
mit dem Original. Raben die anderen dominikanischen
Kompilatoren auf die Episode verzichtet, weil sie auf einer apo-
kryphen QueUeberuht?
JdV tibernimmt die Episode, setzt sich kritisch mit der QueUe
auseinander und leitet zu einer eigenen Auslegung tibeT. «La
consequenceest double... : Jacquesde Voragine est couvert a l
egard de l autorite -puisque Ie texte qu il a rapporte est inter-
pretable dans un gensbon grace a des distinctions traditionneUesi
-et a l egard de ses auditeurs -en leur disant... ce qu il faut y
lire -ou des predicateurs dominicains -qui disposent ainsi de la
clef d interpretation leur permettant d utiliser ce texte69.»
5. Die Gurtelspende nach der Himmelfahrt Mariens : Jedes
Legendar berichtet und bewertetdie Episodeauf seineWeise.
5.1. Abbreviatio in Gestis et Miraculis Sanctorum.
In del Basler Ab-Handschrift tragi die Legende den Titel ~
«De assumptione beate Marie apocrifice »7°.Nachdem Jean de
Mailly die Himmelfahrt geschildert hat, die mil del leiblichen
Aufnahme Mariens in den Himmel, bezeugt duTchdie Apostel,
endet, hebt der Autor nochmals an, um auf eine andere
Erzahltradition fiber die Himmelfahrt hinzuweisen, die besagt,
daB die Apostel den Leichnam Mariens im Tale Josaphatbeer-
digt batten und daDo nach Jerusalem zurtickgekehrt seien.
Thomas sei erst spater zum Grabe gekommen und babe beob-
achten kannen, wie die Engel den Karper Mariens in den
Himmel getragen batten. Thomas bittet daraufhin Gott, ihm ein
69. GOUNELLEwie Anm. 1),206.
70. Ab, fol. 43v und im Inhaltsverzeichnis fol.1v.
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 185
Zeichen zu geben, mil dessenHilfe er die Apostel yon der leibli-
chen Aufnahme Mariens liberzeugen konne. Daraufhin faUt
Mariens Glirtel zur Erde. Thomas bringt den Glirtel den
Aposteln, die das Grab offnen und es leer finden71.Der Autor
weist dann abeTdaraufhin, daB es sich hierbei wohl urn den yon
Hieronymus als apokryph verurteilten Bericht «De transitu
Beate Virginis» handele72.
Nun flihrt der Autor die Revelationen der Elisabeth yon
Schonau an, die in eiDer Vision Mariens Himmelfahrt schaut.
Auf die Frage Elisabeths, ob sie darliber schweigen solIe, ant-
wortet Maria: «Ceci ne t'a point ete revele pour que tu l'effa-
ces, mais afin d'exalter mODculte chez ceux qui ont un amour
special pour ma personne et qu'ils me rendent des honneurs
nouveaux de ce chef, desquels ls recevront line recompensespe-
ciale de mOD reur3 »
Jean de Mailly ziehl daraus die Konsequenz : «On petit con-
cluTe de tout ceci que l'ecrit apocryphe de l'assomption de la
Vierge est sans autorite et que la revelation faite a Elisabeth ne
doit pas etre publiee sans reserve. Dans l'ecrit apocryphe, en
effet, si Ie debut parait avoir quelque vraisemblance, la fin est
manifestement nepte. Il convient donc de s'en tenir a l'usage de
l'Eglise et a l'autorite des saints, surtout a celIe de saint
Jerome74...» Jean de Mailly zitiert zwei Schriften des
Hieronymus, in defieD dieser schreibt, daB es keine Beweise in
dieser Angelegenheit gebe ; deshalb mlisse weise und nUTkurz
yon der Himmelfahrt erzahlt werden, anstatt leichtfertige und
apokryphe75Dinge zu erzahlen.
In seiner spateren Redaktion der Ab fligt Jean de MailIy76
71. Ab, fol. 44ra : «Autem alibi scriptum essequod cum apostoli sepe-
lissent corpus beatae Marie in valle iosaphat et rediissent Thomas unus
eorum non fuerat tunc cum eis. Et cum veniret subito vidit et audivit
angelos cantantes et corpus beatae marie in celum deferentes et oravit
dominum ut daret ei signum ad( ) per quod apostoli crederent beatam
mariam in celum ab angelis esse delatam et tunc cecidit zona qua cor-
pus beatae Mariae in volutum erat quod cum apostolis detulisset per-
exerunt ad sepulcrum et corpus eius non invenerunt. »
72. Ab, fol. 44ra-44rb : «sed quia non hoc / est autenticum et quod pre-
dictum est uideretur esse llud (Satzlucke) de quo dicit leronimus ne
forte si venerit in manibus nostris id apocrifum de transitu eiusdem vir-
ginis dubia pro certis recipiatis. »
73. Ab, fol. 44rb ; franzosischer Text zitiert nach DONDAINE, ean de
Mailly (wie Anm. 11),326.
74. Ab, fol. 44rb ; Zitat ebd. 326.
75. Ab, fol. 44va : « friuolum et apocrifum ».
76. DONDAINE, ean de Mailly (wie Anm. 11), 10, geht davon aus, daB
Jean de Mailly bei Erstellung seiner Kompilation noch Weltgeistlicher
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 187
3. LegendaAurea.
In der Ausgabe bei Graesse finden sich zwei Berichtblocke
fiber die Aufnahme Mariens in den Himmel: Zuerst wird die
Beerdigung und spatere leibliche Aufnahme Mariens in den
Himmel nach clem Buch des Johannes erzahlt mit ausdrtickli-
chern Hinweis auf dessen apokryphen Charakter82 im
Einleitungssatz zur Legende. Gounelle weist daraufhin, daB es
sich bei diesem Bericht urn den «Transitus Mariae », der Joseph
von Arimathia zugeschriebenwurde, handelt83.
Den AbschluB dieser ersten Erzahlung bildet die Episode, in
der clem unglaubigen Thomas die leibliche Aufnahme Mariens
in den Himmel dUTChden herabfallenden Gtirtel bewiesen
wird84. Dazu zitiert JdV einen Brief des Hieronymus, der die
Meinung vertritt, obwohl der ganze Bericht apokryph sei, z. B.
auch die mit der Gtirtelspende verbundenen Ereignisse85,an-
den sich doch mehrere Punkte darin, die glaubwtirdig seien86.
Gounelle bemerkt, daB die Tradition diesen Brief zwar von
Hieronymus glaubte, die Forschung ihn abeT inzwischen
Radbert von Corbie zuschreibt. Die Kritik an der Gtirtelspende
fand Gounelle in clem Brief allerdings nicht87
Nun folgt ein erster Mirakelbericht, danach die Revelationen
der Elisabeth von Schonau, in defieD Maria der Elisabeth
erklart, daB das Wunder ihrer leiblichen Aufnahme nUT den
Frommen und Glaubigen kund zu machen sei88.Nach diesem
Zeugnis bekennt sich JdV ausdrticklich zu der leiblichen
Aufnahme Mariens : « Assumta est enim integre in anima et cor-
pore, sicut pie credit ecclesia89.» Und dies wird mit den
82. LA, 504 : «Assurntio beatae virginis Mariae qualiter facta sit, ex quo-
dam libello apocrypha, qui lohanni evangelistae adscribitur, edocetur.»
83. GOUNELLEwie Anm.l), 198,Anm. 22.
84. LA, 509,24-27.
85. LA, 509-510 «Porro alia multa sunt ibi posita potius ad simulatio-
nem, quam ad veritatem, ut, quod Thomas non affuerit et veniens dubi-
taverit, et his similia, quae per se patent, quod sunt relinquenda potius
quam asserenda.»
86. LA, 509: «Hoc autem, quod praedictum est, totum illud
apocryphum (Var. : videtur esse) est, de quo Hieronymus in epistola
sive sermone ad Pallium et Eustochium sic ail : ille sane libellus vere
apocryphus est censendus,nisi quo ad aliqua fide digna, quae videntur a
sanctis approbata, quae sunt novem... »
87. GOUNELLE,995 (wie Anm. 1), 198,Anm. 24.
88. LA, 510 : «nec carnalibus et incredulis revelanda, nec devotis et
fidelibus abscondenda».
89. LA, 510.
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188
B. FLEITH
Zeugnissen des Bernhard, Hieronymus, Augustinus und
Gerardus untermauert. Dieser erste Erzahlblock endet mil
Mirakelberichten.
Der zweite Erzahlblock folgt nach Aussage des JdV einer
Predigt, die aus verschiedenen Reden der «Heiligen » zusam-
mengeftigt sein soI19°.Erzahlt werden wiederum der Tod, die
Aufnahme der Seele Mariens und die Ereignisse bei ihrer
Beerdigung, teilweise wiederholend je nach Darstellung des
jeweiligen Autors; in Details ahnelt del rote Faden diesel
Berichtkompilation demjenigen del Ab. Bei JdV sehen die
Apostel Christus auf die Erde kommen «et corpus virginis cum
gloria tam immensa transferre »91.Ein Apostel ist bei diesel
Szene nicht anwesend und verlangt zum Beweis die
Grabesoffnung : das Grab ist leer; es linden sich nUTdie Kleider
Mariens. Die Gtirtelspende wild bier nicht erwahnt.
Auch diesel Erzahlblock wild abgeschlossen uTcherne Kette
yon Kirchenvaterkommentaren zu dem Ereignis. Dieser zweite
Block ist wohl kaum eine nachtragliche Hinzuftigung, da er sich
schon in frtihen Handschriften del LA findet; wegen del
Redundanz des Berichts kann es sein, daB er grater weggelassen
wurde. Hier lage eventuell die Erklarung daftir, daB diesel zwei-
te Erzahlblock in 11 yon 56 Handschriften del Bibliotheque
Nationale in Paris fehlt. Diese Frage kann jedoch endgtiltig erst
auf del Grundlage einer kritischen Edition gelost werden.
4. Epilogus in GestaSanctorum.
Unter stalkeD Kurzungen im Vergleich zur LA benutzt auch
del Epil den «lohannesbericht» als Quelle. Bartholomaus
rechtfertigt dies folgendermaBen : «In der Tat soIl es bei den
90. LA, 517-527; 517 : «Modus sacratissimaeassumtionisMariae tradi-
tur in quodam germane ex diversis dictis sanctorum compilato, qui in
pluribus ecclesiis solemniter legitur... » ; Philippe VERDIER, Les textes
de Jacques de Voragine et l iconographie du couronnement de la
Vierge », in Legenda Aurea.. Septsieclesde diffusion. Actes du colloque
international sur la Legenda Aurea.. texte atin et branches vernaculaires
a l Universite du Quebec a Montreal 11-12 mai 1983. Ouvrage publie
SOliS a direction de Brenda DUNN-LARDEAU (Cahiers d etudes
medievales. Cahier special 2), Montreal -Paris 1986, 95-99, 97, meint
dazu: «Cette homelie, que l on trouve dans l Augiensis 80, est un cen-
ton en latin d homelies grecques sur l assomption de saint Andre de
Crete, saint Germain de Constantinople, et de quatre homelies de
CosmasVestitor. »
9L LA, 521.
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 189
Griechen ein Buch gegeben haben, das Johannes, ihr (Marias)
Beschtitzer, nach dem Evangelium fiber die Himmelfahrt unse-
ref Jungfrau geschrieben haben solI, aus dem ein in der griechi-
schell Sprachfertigkeit wenig erfahrener lateinischer Autor eini-
ges tibersetzt hat, was nicht zu Unrecht apokryph genannt
werden kann. Das Wahre, das ich in dem genannten Buch des
Johannes erkannt babe und in den Worten des Hieronymus und
den Schriften anderer als bestatigt gefunden babe fiber die ehr-
wtirdige Himmelfahrt dieser Jungfrau, werde ich vorlegen und
auch das, was der katholische Glaube ehrftirchtig davon halt
( pie ...sentit ). Fest steht, daB die Jungfrau, von der zu sprechen
war, dem Johannes anvertraut wurde92...
Bartholomaus von Trient tibernimmt daDo abeToboe weitere
Kritik auch die Gtirtelspende93 n der Version, in der sie spater
auch in der LA gefunden wird, obwohl diese nach dem Zeugnis
der LA gerade von jenem Hieronymus als « apokryph» heraus-
gestellt worden war. Der Kompilator benutzt diese Episode
geradezu als letzten Beweis «ut ultro sic intelligeret Mariam
totaliter assumptam uisse et vere assumptamquia in nulla con-
sumptam »94.
Folgt man den Aussagen der LA zum Urteil. des Hieronymus,
das die Umstande der Gtirtelepisode klar als apokryph kenn-
zeichnet, muB man annehmen, daB sich Bartholomaus von
Trient einfach -gegen seine ursprtingliche Absicht -fiber dieses
Urteil hinwegsetzt. Da abeT Gounelle diese Kritik nicht bei
« Hieronymus» rand, kann es sein, daB die LA bier eine falsche
Quellenangabe macht, octeTdie Kompilatoren verschiedene
Fassungenbenutzt haben.
5. Resultate.
AIle vier Legendare setzen sich mit den gleichen Quellen aus-
einander : mit der Tradition, die auf Johannes den Evangelisten
Epil, fat. 74v-75r: «Vere apud grecos liber esse dicitur, quem
Iohannes eius custos post ewangelium de assumptione nostre Virginis
scripsisse perhibetur, ex quo forte latinus aliquis in greca eloquentia
minus edoctus aliquam transtulit quam non inmerito possent apocrifa
nominari. Verum que ex predicto Iohannes libro intellexi et ex verbi
Ieronimi et aliorum dictorum approbata cognovi de veneranda huius
virginis assumptione prosequar et quod pie super hiis sentit katholica
fides. Constat Iohanni virginem de qua agere fuisse commissam; ...»93.
Epil, fat. 76v : «De quibus dum secundum suam consuetudinem
Thomas forte dubitaret, zonam, qua precinctum corpus fuerat, illesam,
recepit ab aere. »
94. Epil, fat. 76v.
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190.FLEIlli
zuruckgehen soll und yon alIen als apokryph gewertet wird, den
Revelationen der Elisabeth und Stellungnahmen der
Kirchenvater, bier vor allem der Kritik durch Hieronymus. Da
wir aber nicht genau wissen, worin diese Kritik hestand, ist es
schwierig, aus dell Vergleich Konsequenzen fur den U mgang
mil apokryphem Gedankengut zu ziebell.
Wir konnen lediglich festhalten, daB das alteste Legendar, die
Ab, in seiner ursprunglichen Version, bei der Behandlung des
Themas in Nachfolge des Hieronymus zu Vorsicht und Kurze
rat. Solche Berichte seien nur fur ein bestimmtes Publikum ver-
stehbar.
Auch das SpH siehl dell Bericht mil relativer Distanz
gegenuber es verzichtet ganz auf die Glirtelspende. Die Kirche
bestatige die leibliche Aufnahme nicht, obwohl es andere
Zeugnisse gibt. Vincent de Beauvais scheint die Frage offen las-
sen zu wollen.
Bartholomaus yon Trient glaubt an den Bericht, der auf
Johannes zurUckgehensoll, sogar an die Glirtelspende, die bei
ihm die Funktion eines Beweisesannimmt.
Die LA scheint nun aus all dell eine Synthese erstellen zu
wollen. 1m BewuBtsein des apokryphen Charakters schildert
JdV die Geschichte nach «Johannes» mil der Glirtelspende,
merkt an, daB bier Wahres und Unglaubwlirdiges miteinander
vereint worden ist. In Nachfolge der Argumentation des
Hieronymus -und vielleicht auch seiner dominikanischen
Vorganger -lehnt JdV die Glirtelspende zwar als unglaubwlir-
dig ab, erzahlt sie aber rotzdem Flir ihnhat sie jedoch nur den
Stellenwert eines Mirakelberichtes.
Diese Episode ist die einzige der acht in der LA als apokryph
bezeichneten Episoden, deren apokrypher Charakter auch in
den Quellenlegendaren diskutiert wird.
6. Zusammenfassung und Ausblick.
WenD Remi Gounelle vermutet : «Somme toute, la plupart
des remarques critiques a l'egard des apocryphes dans la
Legende doree provient soil assurement soil fort probablement
de ses sources »95,gilt dies nicht in Bezug auf seine direkten
Vorlagen, die dominikanischen Kurzlegendare : JdV hat an ftinf
oder sechsder acht Stellen den Stoff der anderen drei Legendare
angereichert mil apokryphem Erzahlgut, an eiDer Stelle als ein-
ziger auf den apokryphen Charakter hingewiesen,die Erzahlung
95. GOUNELLEwie ADm. 1),203.
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LEGENDA AUREA UND DOMINIKANISCHE BRUDERLEGENDARE 191
aber durch Uminterpretation gerettet, und nur an eiDer einzigen
Stelle diskutiert er -wie seine Quellenlegendare -den apo-
kryphen Charakter seiner Geschichte. Die Auseinandersetzung
mit apokryphen Gedankengut ist Frucht seiner Auseinander-
setzung mit zusatzlichenQuellen.
WenD JdV den Ruf hat, vor allem als Abbreviator gearbeitet
zu haben, so tritt er bier als Amplifikator auf: er fligt spekta-
kulares Erzahlgut in sein Legendar ein, liberlaBt jedoch clem
Benutzer die Entscheidung, ob das Material brauchbar ist oder
nicht. In anderen Fallen bietet er Interpretationen an, die inter-
essantes Material, das van den Kirchenvatern als apokryph
bezeichnet wird, gebrauchsfahig machen konnen. Nur im Fall
der Glirtelspende scheiDt er van den Urteilen seiner dominika-
nischen Kollegen beeinfluBt zu sein.
Seine «Amplificatio » scheiDtmir entweder das Resultat eiDer
besseren Quellenkenntnis oder aber eiDer geanderten
Erzahleinstellung zu sein : es geht nicht urn die Vermittlung der
kanonisierten Wahrheit, sondern urn Heilswahrheit schlechthin :
immer da, wo das Gute fiber das Bose siegt, erfilllt sich Gottes
Heilsplan, auch wenD die Fakten van offizieller Seite her nicht
bestatigt werden. .
Meiner Meinung nach mliBte man nun die Ausgangsfragen
umkehren, urn die Kompilatorentatigkeit des JdV und den kriti-
schell Umgang mit seineD Quellen van eiDer anderen Seite her
zu beleuchten : Gibt es in den drei frliheren Legendaren eine
Auseinandersetzung mit apokryphem Erzahlgut an Stellen, an
defieD dies in der LA nicht mehr deutlich wird ? Was hat JdV
mit der Qualifikation «apokryph» in den Quellenlegendaren
gemacht ? Als Beispiel sei auf die Hebammenepisode in der
Geburtsgeschichte Jesu hingewiesen, die in der Ab als
Geschichte aus «gewissen apokryphen Blichern und Marchen
alter Frauen »96 ezeichnetwird.
Eine solche Untersuchung ist dann definitiv moglich, wenD
aIle Daten der zuklinftigen kritischen Ausgaben mit Hilfe des
Computers abrufbar sind. Diese Datenbanken werden kaum
mehr flir unser Jahrhundert sein, und somit bleibt vieles ein
Geheimnis. Daher dlirfen wir bier aus den Revelationen
Mariens zitieren : « II ne taut pas divulguer en public ce mystere
car Ie siecle est pervers, et ceux qui l entendraient se troublerai-
ent et ne sauraient s affranchir de leurs doutes97.»
96. DONDAINE,Jean de Mailly (wie Anm. 11), 50; Hinweis durch
BOUREAU, 990 (wie Anm. 18),35.
97. Ab, in der Obersetzung yon DONDAINE, ean de Mailly (wie Anm.
11),326.
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Marek STAROWIEYSKI
Universitede Varsovie
LA LEGENDE DE
SAINT JACQUES LE MAJEUR
The legendof Saint James s probably one of the most intricate about
an apostle.Although James was an important figure and the only apostle
whosedeath is related n the Bible, traditions about his work, his life and
death went lost verysoon. In Spain venerationof Jamesbegan only in the
9th century and even f we have evidence ofJames' presence n this part
of the world from the 7th century on, no legend about this stay n Spain
dating before the 12th century s known. This article tries to put together
the different traditions about Saint James and to outline some relation-
ships between hem.
La legendede saint Jacques e Majeur est probablement la plus com-
plexe des egendes ieesa un apotre.Jacquesetait en eifel une des igures
apostoliques les plus importantes, et il est Ie seul apotre dont la Bible
raconte la mort. Mais la tradition s'est rapidement perdue,et on n'a plus
parle par la suite ni de son activite, ni de son tombeau; seulesquelques
mincesreliquesde cette radition ant subsiste.Ce n'estqu'au IX' siecleque
Ie culte de saint Jacqueseclatea Cofflpostelle,sans toutefois qu'aucune
legendesur son apostolatn'apparaisseen Espagne.Le but de cettecom-
munication n'est pas d'expliquer la legendede Jacques ce qui me semble,
du mains pour Ie moment, mpossible mais de rassembler es diverses ra-
ditions dont il a fait l'objet, et de tracer au mains quelques iens entreelles.
Le NouveauTestament.
Saint Jacques est mentionne plusieurs fois dans les evangiles1
II apparait aux cotes de Jesus dans les episodes es plus impor-
1. La vocation de Jacques est racontee en Mt 4, 21s par. La mere de
Jacques est Salome (Mt 27, 55s); elle demande des faveurs pour ses ils
(Mt 20, 20-24 cf. Mc 10, 35-41 011 e ont es fils eux-memes qui font la
demande). Jacques et Jean demandent a destruction de la Samarie (Lc
9, 51-55).lls sont qualifies ailleurs de« Boanerges» (Mt 3, 16s).
Apocrypha 7, 1996,p. 193-203
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M. STAROWIEYSKI
tants de la vie de son maitre2. Dans leg listes d'apotres (Mt 10,
21-24; Mc 3, 16-19; Lc 6, 13-16; Ac 1, 13), il est nomme ala
deuxieme ou a la troisieme place. II n'est mentionne que deux
fois dans Ie livre des Actes ; il Y apparait au Cenacle avec leg
aut es apotres, et sa mort est brievement decrite: «A celie
epoque-la, Ie roi Herode entreprit de melire a mal certains
membres de l'Eglise. II supprima par Ie glaive Jacques, rere de
Jean»3.L'auteur des Actesne donne aucundetail supplementaire
on ne gaitpas ou saintJacquesa ete decapite,ni ou il a ete enterre4.
Clementd' Alexandrie.
La plus ancienne description extra-canonique de la mort de
saint Jacques se trouve dans les Hypotyposes de Clement
d' Alexandrie, EKTTapa86aE(uSWV TpOvTov5
2. Jacquesest temoin de la resurrection de la rille de JaYre Mc 5, 37), de
la guerison de la belle-mere de Pierre (Mc 1, 29-31), de la
Transfiguration (Mt 17, s par.). II veut connaitre Ie temps de la destruc-
tion du Temple (Mc 13, 1-4). II est a Gethsemani (Mt 26, 36s; Mc 14,
32s). II rencontre Jesusapres a resurrection (In 21, Is). Ct. J. CATINAT,
«JacquesApotre », Catholicisme6 (1967),p. 252s P.C. BANAK,Slownik
konkordancja os6b Nowego Testamentu, oznan, 1991,p. 139-142.
3. Ac 1, 13 (Cenacle); 12, 1-3 (mort). Dans ce dernier texte, E.
SCHWARTZit non «frere de Jean», mais «et Jean» «<Uber den Tod
der Sohne Zebedaei. Ein Beitrag zur Geschichte des
Johannesevangelium », Abhandlungen der Konigl. Gesellschaft der
Wissenschaftem zu Gottingen, Philologisch-historische Klasse, 7/5
[1904], p. 1-53). II s'appuie pour cela sur Ie fragment 16 de Papias
(numerotation de J. KURZINGER,Papias van Hierapolis und die
Evangelien des Neuen Testaments,Regensburg 1983,p. 116s), ire de
l'epitome de I'Historia Christiana de Philippe de Side (ed. C. DE BORR,
TV 5/2, p. 170) et sur un martyrologe syriaque (ed. H. LIETZMANN, ie
drei iiltestenMartyrologien [KIT 2], Bonn 1911,p. 7-8). Si cette lecture
est correcte, ce texte serait l'accomplissementde la prophetie de Jesus
sur a coupe que leg deux freres doivent boire (Mt 20,33 ; 10,39).
4. Quelques lignes apres Ie fecit de la mort de Jacques,on lit celui de la
mort d'Herode (Ac 12, 20-25). Ce motif est ferris par leg Actes de
Jacques 13 (ed. J. EBERSOLT, aris 1902, p. 9s), a partir de Flavius
Josephe (Antiquites 19, 343-351), et d'Eusebe de Cesaree (Histoire
Ecclesiastique 2, 10, SC 31, p. 62-64) ; ct. Liber Sancti Jacobi. Codex
Calixtinus, ed. W. M. WHITEHILL,Santiago de Compostela 1944, 1,4 (p.
36-38,passio modica) et 1,21 (p.25).
5. Hypotyposes VII, frag.14 (ed. O. STAEHLIN, CS 17/2, p. 200,4-11).
Ce texte est connu grace a Eusebe de Cesaree (Histoire Ecclesiastique
2,9, SC 31, p. 61s). Le me-me ragment se retrouve chez Suidas (ed. A.
ADLER,vol. 2, Stuttgart 1967,p. 589s)et chez Georges Syncelle (Ecloga
chronographica,Bonn 1829,vol. 1, p. 633).
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M. STAROWIEYSKI
Philetus1°contre saint Jacques, eur defaite et leur conversion;
2) l arrestation de Jacques et son long plaidoyer devant les
Juifs pour montrer, en recourant a l Ecriture, que Jesus est Ie
Messie -ce qui correspond assezbien a la notice sur Jacques
transmise par les Reconnaissancesll
3) la mort de Jacques, en un recit qui paraphrase Ie texte de
Clement deja cite.
La Passio magna est reprise sous une forme remaniee dans es
VirtutesApostolorum du Pseudo-Abdias12,ans Ie Leabhar Breac
irlandais13, ans e Liber Calixtinus14 t dans Histoire armenienne
de l apotre Jacques15,t dans es Actesde SaintJacques.
II est donc possible de parler d une tradition latine -encore
qu assezmaigre -sur saint Jacques e Majeur.
Absence e egendes nmondegrec.
Dans Ie monde grec, on ne trouve que quelques traces de
legende sur cet apotre. Comme nous l avons vu, les Actes des
Apotres mentionnent a decapitationde Jacques,mais ne precisent
pas oil il a ete enterre. Aucune tradition n a existe sur Ie lieu de
sepulture de saint Jacquesavant Ie IXe siecle, soit avant a decou-
verte de son tombeau a SaintJacquesde Compostelle.A partir du
XIIe siecle ont circuitSdes legendes sur Ie sanctuaire abritant sa
tete a Jerusalem16.
Ainsi, au VIIIe fIXe siecle, orsque Hippolyte de Thebes et Epi-
phane Ie moine parlent de la richessede zebedee, ls ne mention-
DentJacquesqu en passant17.es Actes de saintJacques18 ui ont
10. Ces deux personnages sont mentionnes en Col 4, 14; 2 Tm 4, 9;
Phlm 24 (Demas); 2 Tm 1, 15 (Hermogene).
11. Rec. I, 57. Dans ce plaidoyer, Jacquesparle particulierement de la
resurrection universelle. Les objections que lui opposent es Samaritains
correspondenta cette defense.Ct. R. A. LIPSIUS,p. cit.,p. 205-207.
12. a. Lib. IV (ed. J. A. FABRICIUS,ambourg 1703,p. 516-531).
13. Ed. R. ATKINSON, ublin 1887,p. 346-351.Ct. R. M. M~AMARA,
The Apocrypha in the Irish Church, Dublin, 1975,p. 94s.
14. Ed. cit.
15. CCSA 3, p. 274-284.
16. Ct. plus bas note 43. Ct. R. PLOTZL, «Der Apostel Jacobus in
Spanien bis zum 9. Jahrhundert », Gesammelte Aufsiitze zur
Kulturgeschichte Spaniens, 0 (1982),p. 50-54.
17. Hippolyte de Thebes,ed. F. DIEKAMP, ippolytos yon Theben,Munster
1898,p. 113-118.Epiphane Ie Moine, Vita Deiparae,20, PG 120,col. 209;
ct. les importantes notes dans la traduction espagnole de G. PONS,
Madrid 1990. Selon Epiphane, Jacquesa demande a Jesus a permission
d ensevelir son peTe (cf. Mt 8. 21s: Lc 8. 59): Jesus a commence uar
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197
A LEGENDE DE SAINT JACQUES LE MAJEUR
ete composes probablement au VIIIe ou au Ixe siecle, ne sont
quant a eux qu une compilation des donnees du Nouveau
Testament,d Hippolyte de Thebes, de la Passiomagna, du texte
de Clement deja mentionne et des recits de Flavius Josephe et
d Eusebe de Cesaree. Ces Actes confondent en outre, comme
d autres legendes,deux Jacques: Ie frere du Seigneuret Ie fils de
Zebedee. Le caractere confus de cet ouvrage confirme l absence
de tradition sur Jacquesdans e monde grec avant e Ixe siecle.
Les ViesdesApotres ou Listes d Apotres transmettentegalement
des informations non seulementdesordonneesmais aussicontra-
dictoires19.On y trouve par exempledes nformations concurrentes
sur Ie lieu de sepulture de l apotre, par exemple Marmarique -
nom que es historiens n ont pu identifier -et Cesaree.
Les autres sources sur saint Jacques (menologes, panegy-
riques) n apportent eUesnon plus rien de nouveau2O.
Du cote de l Egypte : Les Actes et Ie Martyre de Jacques.
Si il est difficile de parler d une tradition grecque, on constate
cependant qu existe, a cote de la tradition latine de la Passio
magna, une autre tradition assez mportante, qu on pourrait
refuser, puis a accepte; les deux freres I ont donc enseveli, et ant
conduit leur mere devant Jesus (Vita Deiparae, 18, ibid., col. 208). cr.
M. GLYCAS, nnales, a mundi exordia usquead obitum Alexii Comneni
imper.,vol. 3, Venise 1729,p. 165,qui polemique contre Epiphane.
18. Ed. cit. (n. 4)
19. Ed. Th. SCHERMANN,rophetarum vitae abulosae, ndices apostolo-
rum discipulorumque domini, Dorotheo, Epiphanio, Hippolyto aliisque
vindicata, Leipzig 1907,particulierement p. 109, 154, 162, 165, 171, 177,
185s.,195, 198, 201, 203, 205, 208, 212. cr. aussid autres listes publiees
par la suite. Cela n aurait aucun sens d enumerer ici toutes les informa-
tions contradictoires transmises par cette litterature, sur laquelle l opi-
nion de Louis DUSCHESNEeste alable : «One critique sage et pruden-
te a ainsi pour premier devoir de ne tenir aucun compte de ces
catalogues et de leurs diverses recensions ...). Tout ce qu ils ant de par-
ticulier peut et doit meme etre considere comme Ie produit de l imagi-
nation de personnes inconnues, ncapables de temoigner, meme en fait
de tradition populaire» «<Les anciens recueils de legendes aposto-
liques» [no9], p. 74-78).
20. cr. F. HALKIN, «One notice byzantine de I:Apotre saint Jacques,
CreTe e Jean », Biblica 64 (1983), p. 565-570 Ed. de l Encomio di S.
Giacomo Maggiore par G. LUNGO ans Annali della Facoltii di Lettere e
di Filosofia dell Universitii di Napoli, 26 (n. S. 14) (1983-1984),p. 147-
165; cr. aussi es textes de Nicetas Ie Paphlagonien PG 105,80-100), e
Menologe de ~asile a la date du 16 novembre (PG 117, 469) et Ie
synaxaire de l Eglise de Constantinople (ed. H. DELEHAYE, ruxelles,
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M. STAROWIEYSKI
appeler egyptienne. Les temoins les plus anciens en sont les
Actes et la Passion de Jacques, conserves avec des lacunes en
corte (ye-Yle siecle), mais integralement en arabe (traduction
du corte, Xlie siecle) et en ethiopien (traduction de l'arabe,
XIIIe siecle )21. Cette tradition n' a rien en commun avec les
autres. Ainsi Ie fragment de Clement n'y est meme pas cite. On
peut donc supposer que Ie texte corte n'est pas traduit du grec,
mais qu'il constitue la source originale de cette tradition.
Dans les Actes deJacquesethiopiens, nollS voyons Pierre et Jacques
precher ensemble, faire des miracles et fonder une Eglise. Le Martyre
ne conceme que Jacques, qui enseigne aux douze tribus dans la dia-
spora -nouvelle confusion entre Jacques Ie Majeur et Jacques Ie
Mineur Jacques invite les convertis a donner les premices au
Seigneur, ce qui provoque la fureur d'Herode, qui Ie fait decapiter.
On peut deduire de ces deux pieces que leurs auteurs ne pos-
sedaient pas beaucoup d'informations sur saint Jacques.
Le casde 'Espagne
Les traditions les plus difficiles et les plus compliquees a expli-
quer sont celles qui ont circule en Espagne sur Ie sejour de saint
Jacques en terre hispanique et sur la translation de son corps et
son ombeau22.
1902,p. 225s,639-642, 80). Ct. aussi eg divergessourcescitees par Th.
SCHERMANN,p. cit.
21. Version copte des Actes : edition I. GUIDI, «Frammenti corti », dans
Atti dell'Accademia dei Lincei, Series 4 : Rendiconti 3 (1887), p. 54-59
traduction IDEM, « Gli Atti apocriti degli Apostoli nei testi corti, arabi
ed etiopici », Giornale della Societa Asiatica ltaliana 2 (1888), p. 15-18.
Version corte de la Passion: ed. cit., p. 59-60; trad. cit., p. 19s. Version
arabe des Actes: edition A. SMITH LEWIS, Acta mythologica
Apostolorum (Horre Semiticre 3), Londres, 1903,p. 26-28; traduction
EAD., The Mythological Acts of the Apostles (Horre Semiticre 4),
Londres, 1904,p. 30-34. Version arabe de la Passion: edition ibid., p.
30s; traduction ibid., p. 35s. Version ethiopienne : edition E. A. WALLIS
BUDGE,The Contendings of the Apostles, Londres, 19352, ol. 1, p. 247-
253; traduction ibid., vol. 2, p. 246-252; version ethiopienne de la
Passion: ibid., vol.), p. 254-257 traduction ibid., vol. 2, p. 253-256.Les
Actes et la Passion ont ete traduits aussipar S. C. MALAN The Conflict
of the Holy Apostle, Londres 1971,p. 172-181).Selon R. A. LIPSIUSop.
cit., p. 214), cette version date du ve siecle; la datation avancee par I.
GUIDI «<Gli Atti... », op. cit., p. 1-15) nailSsemble plus probable.
22. La question du sejour de saint Jacques en Espagne reste ouverte,
malgre une multitude de travaux. Ct. en particulier L. DUCHESNE,
«Saint Jacques en Galice», Annales du Midi, 12 (1900),p.145-179. On
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199
A LEGENDE DE SAINT JACQUES LE MAJEUR
La tradition de l apostolat et du sejour de saint Jacques en
Espagne reste en effet inconnue dans Ie pays jusqu a la fin du
VIIIe siecle. Elle apparait pour la premiere fois dans Ie
Breviarium Apostolorum, compose probablement en Gaule au
milieu du VIle siecle23. lle est egalementconnue en Angleterre
au Vllle siecle comme l atteste Aldhelm de Malmesbury24,En
Espagne meme, elle n apparait cependant qu a la fin du Vllle
siecle dans Ie Commentaire de l Apocalypse de Beatus de
Liebana25 et dans deux hymnes liturgiques anonymes26 mais
elle n est pas encore fermement etablie au XlIe siecle27.
Au debut du Ixe siecle a lieu la decouverte du corps de saint
Jacques a Compostelle. Compostelle devient un important
centre de pelerinage des Ie milieu du Ixe siecle, comme en
temoignent les Martyrologes de Florus de Vienne et d Adon de
Lyon28.Si on en croit Ie Liber Cali.xtinus, lusieurs legendes sur
la presence de saint Jacques a Compostelle existaient
egalement29.Nous ne posse ons cependant que des textes qui
trouvera un bon etat de la recherche avec tine bibliographie dans R.
GARCIA-VILLOSLADA,dir., Historia de la Iglesia en Espana, vol. 1,
Madrid 1979,p. 149-156.Ct. aussiR. PLOTZL, rt. cit. (n. 16), qui donne
tine fiche documentation.
23. Sur es manuscrits et les editions 011 on petit trouver ce texte, ct. B.
DE GAIFFIER, «Le Breviarium Apostolorum BHL 692. Tradition
manuscrite et reuvres apparentees», Analecta Bollandiana 81 (1963),p.
92-101; Th. SCHERMANN,F. cit. (n. 19), p. 207-211(particulierement p.
208 sur saint Jacques).
24. PL 89, 293. Ct. aussi Monumenta Germanire Historica, Auctores
antiquissimi 15, 1919,p. 23.
25. Commentarius n Apocalypsin, 2, prol. 3, 17 (rec. E. ROMERO-POSE,
Rome 1985, ol. 1, p. 191 : «Petrus Roma, Andreas Acia, Thomas India,
Iacobus Spania, Iohannes Asia, etc.»). Sur Beatus de Liebana, ct. M.
DfAZ Y DfAZ, Diccionario de Historia Ecclesiasticade Espana, vol. 1,
Madrid, 1972, . 201set Acteasdel Simposiopara el studiode los codices el
«Comentarioal Apacalipsis» de Beatode Liebana,1-2,Madrid 1978-1980.
26. M. DfAZ Y DfAz, «Los himnos en honor de Santiago de la liturgia
hispanica», dans IDEM,De Isidoro al Siglo IX, Barcelone 1976, . 235-272.
27. Ct. R. PLOTZL, rt. cit. (n. 16), p. 21.
28. Ct. Libellus de festivitatibus sanctorum apostolorum en date du VIII
des calendes d aout : Huius beatissimi Apostoli sacraossaad Hispaniam
translata, et in ultimis earum finibus, videlicet contra mare Britanicum
condita, celeberrima illarum gentium veneratione excoluntur.» (PL 123,
183; ct. aussi edition de J. DUBOIS G. RENAND, aris 1984,p. 5).
29. Liber Calixtinus, 1, 17, 144s,qui recenseplusieurs legendes, hacune
etant introduite par «Alii ». On petit egalement se demander si
nous ne trouvons pas chez Aldhelm tine information au sujet des
legendes perdues de saint Jacques (cf. plus haut, n. 24) : «[Iacobus]
Primitus hispanias convertit dogmate gentes, Qure priscos dudum Titus
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200
M. STAROWIEYSKI
traitent de la translation du corps de saint Jacques a
Compostelle. Les plus anciens temoins de cette tradition -la
celebre lettre du pape Leon, contemporain de saint Jacques( ),
conserveeen quatre versions -datent du XIe siecle3°.
Selon cette lettIe, les sept disciples de saint Jacques out porte
Ie corps de leur defunt maitre de Jerusalem au bold de la mer,
d'oil un navire l'a emporte miraculeusement a Iria, puis douze
lieues a l'interieur du pays chez une palenne, nommee Luparia.
Celle-ci envoya es disciples chez e roi palen qui se mit en colere
et les chassa. Un pont s'ecroula et ecrasa es persecuteurs qui
suivaient les disciples. Ceux-ci retoumerent chez Luparia qui les
mit a l'epreuve. Mais il surent calmer un dragon grace au signe
de la croix et apprivoiser les taureaux sauvages de Luparia.
Luparia se convertit. On construit Ie tombeau de l'apotre qui
deviendra plus tard un lieu de pelerinage. Tous les disciples par-
tirent evangeliser es autres regions de l'Espagne, sauf deux qui
resterent aupres du tombeau oil, apres leur mort, ils out ete
enterres au cote de l'apotre.
Cette legende, qui se trouve dans es differentes versions de la
lettIe, est un remaniement de la legende des sept eveques
apotres en Espagne «< os siete varones apost6licos»), qui est
apparue apres a naissanceet Ie developpement du culte de saint
Jacquesa Compostelle31.
La Historia Compostellana, quant a elle, explique l'oubli du
culte de saint Jacquesa Compostelle32.
Cet etat de fait est etrange : Ie sejour de saint Jacques en
Espagne est atteste des Ie Vile siecle, mais DOllS e possedons
aucune legende qui en rende compte avant Ie Xlle siecle. Et
encore ne disposons-nousa cette date que d'une pale adaptation
de la Passio magna et de l'histoire des sept evangelisateursde
l'Espagne, oil Hermogene devient eveque et Philetus diacre33.
et lurida fana / Dremonis horrendi decepta fraude colebant. / Plurima
hic prresul patravit signa stupendus, / QuO nunc in carris scribuntur rite
quadratis. »
30. On trouvera Ie texte de ces quatre versions dans R. PLOTZL, art. cit.
(n. 16), p. 125-139. II taut y ajouter la translation en vers qui se trouve
dans Ie Liber Calixtinus (ed. cit., p. 409-411). Ct. P. DAVID, «La lettre du
Pseudo-Leon sur la translation de saint Jacques », Bulletin d'etudes
Portugaises, n. s. 15 (1951), p. 180-188; B. DE GAIFFIER, «Notes sur
quelques documents relatifs a la translation de saint Jacques en
Espagne », Analecta Bollandiana, 89 (1971), p. 47-66.
3L Sur cette legende, ct. M. SOTOMAYOR ans R. GARCIA VILLOSLADA,
op. cit., p. 156-159. La legende date du VIIIe -voire du Vile -siecle.
32. Historia Compostellana I, 2 (CCL 70, p. 9).
33. Liber Calix tin us 3, ed. cit., p. 289.
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201
A LEGENDE DE SAINT JACQUES LE MAJEUR
Le developpement de cette legende est lie au sanctuaire marial
de Saragosse, et date du XIII/Xlye siecle. Elle contient des
traits etranges, par exemple l apparition de Marie it.Jacques sur
une colonne, qui n est pas sans rappeler la legende armenienne
que nous presentonsplus bas34.
L absence de legende espagnole sur Ie sejour de saint Jacques
en Espagne est peut-etre un reflet des hesitations qui ant eu
COUTSur Ie sejour de l apotre dans ce pays, mais ausside l utili-
sation polemique de ce sejour par les Eglises de Narbonne et de
Catalogne dans leur lutte d influence contre celIe de
Compostelle35.
Do cotede I Armenie
La derniere etape de la formation de la legende de saint
Jacquesest a legende armenienne, connue generalement au tra-
vers de la traduction qu en a donnee Ie regrette dom Louis
Leloir. Cette legende est probablement nee pres du sanctuaire
armenien de la Tete de saint Jacquesa Jerusalem,mais sous in-
fluence des legendes espagnoles.Elle apparait dans deux apo-
cryphes : L Histoire de l apotre Jacques36 t les trois premiers
chapitres de l Histoire de Jacqueset Jean les ils du tonnerre, des
apotresdu Chrisf7.
Le premier apocryphe parle de l apostolat de Jacques en
Espagne, oil il n a pas eu un grand succes.Jacques etourne en
Palestine accompagne d une femme riche qui desirait voir les
lieux oil Ie Christ et sa sainte Mere avaient vecu. Jacquescom-
mence alors en Palestine une mission apostolique, et on retrouve
ici un resume de la Passio magna. Apres la mort de l apotre, sa
tete est emportee par un ange et deposee devant saint Jacques
(il s agit de Jacques, rere du Seigneur) dans son palais episco-
34. Texte dans Espana Sagrada 30, appendix, p. 426-428.Ct. Z. GARCIA
VILLADA, Historia ecclesiasticade Espana.,vol. 1/1, Madrid, 1929,p.
67-79. Ce miracle se trouve dans un manuscrit des Moralia in Hiob de
Gregoire de Grand, que certains ont attribue a Talon de Saragosse. es
informations leg plus anciennesconcernant e sanctuaire de S. Maria del
Pilar datent du 27 mai 1299.
35. Ct. par ex. la lettre de Cresarius, bbe de Montserrat, au pape Jean
XXII, citee dans R. PLOTZL, rt. cit. (n. 16), p. 21 : «Istum apostolatum
quod est nominatum Spania et Occidentalia loca (...) non est apostola-
tUg sci. Iacobi, quia ille Apostolus interfectus hic venit nullo modo
autem vivus ».
36. CCSA 3, p. 268-288.
37. CCSA 3, p. 408-412.
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202
M. STAROWIEYSKI
pal. La femme veut retourner en Espagne avec Ie corps de
l'apotre pour Ie ramener dans Ie pays qu'il avail re~u comme lot
-motif recurrent dans cet apocryphe. Elle Ie porte jusqu'a
Joppe avec la colonne ( ), mais de la Ie corps est transporte
miraculeusement en Espagne et depose sur la rive d'un fleuve.
Un aveugle qui etait en train de descendre Ie long du fleuve
touche Ie corps et est gueri. Des rumeurs se repandent et des
follies de malades viennent se faire guerir par «Ie Dieu sans
tete ». Arrive saint Paul qui explique qu'il ne s'agit pas d'un
Dieu, mais de saint Jacques e Majeur.
II faut souligner deux elements dans cette legende. En pre-
mier lieu, la mysterieuse colonne. N'est-ce pas une influence de
la legende de Saragosse38?Deuxiemement, a la fin de l'apo-
cryphe, on trouve une allusion aux pelerinages saint Jacquesa
demande au Christ que les pechesde ceux qui se rendront a son
tombeau soient pardonnes39. e plus, je pense que ce qui est dit
des miracles du «Dieu sans tete» est une allusion aux miracles
accomplis a Compostelle et est lie a la veneration de saint
Jacquesdeja mentionnee dans les Martyrologes40.Comment les
Armeniens de Jerusalem ont-ils su tout cela? Le Liber
Calixtinus mentionne que des pelerins armeniens viennent a
Compostelle41.Mais on peut aussi supposer que des pelerins
espagnols aient apporte avec eux ces legendes a Jerusalem. De
plus, on connait bien les contacts, un peu plus tardifs, des pro-
vinces d' Aragon et de Catalogne avec I' Armenie42.
Dans l'autre apocryphe -qui mele elements bibliques et apo-
cryphes -on trouve un element etrange : Ie «Dieu sans ete » a
ete amene en Espagne avec sa tete (a la difference de l'apo-
cryphe precedent), mais un ange a reprit et la porta a Jerusalem
ou un sanctuaire fut construit pour l'abriter. Cette information
sur Ie sanctuaire armenien de Jerusalem est confirmee par un
pelerin allemand, Jean de Wurtzbourg, en 116543.
38. La colonne est mentionnee deux fois dans I'Histoire de l'apotre
Jacques: § 25 (ibid., p. 285) et § 27 (ibid., p. 286). Ce motif apparait
aussi dans la legende de N. D. du Pilar: ct. Z. GARCIAVILLADA, op.
cit., p. 75.
39. a. § 30 (ibid., p. 288).
40. Ct. plus haut n. 28.
41. Codex Calixtius, 1,22, ed. cit., p. 193; 1, 17, ibid., p. 148: «Armeni,
Greci, Apuli, / Angli, Galli, Daci, Frisii, / Cuncte gentes, ingue, tribus.
/ Illuc pergunt muneribus ».
42. Sur les contacts entre l' Armenie et la Catalogne, ct. AASS, 6 sep-
tembre, p. 563-565.
43. Le Liber Calixtinus souligne 1'integrite du corps de saint Jacques:
«Noscat fraternitas vestra (...) qualiter in Yspania integrum corpus bea-
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203
A LEGENDE DE SAINT JACQUES LE MAJEUR
Pour finir, il convient d ajouter une etrange coIncidence. Le
sanctuaire de la Tete de saint Jacquesetait situe sur Ie lieu 011 e
trouvait anciennement Ie sanctuaire de saint Menas. Or, selon
une legende sur Ie martyre de saint Menas attribuee a saint
Athanase et datant probablement du xe siecle, Menas prechait
Ie Christ avec un zele particulier, comme Saint Jacques; accusa-
teur de saint Menas s appelait Hermogene, comme un des per-
sonDagesde la Passio magna et, comme dans la Passio, il se
convertit. Le corps de saint Menas arrive en outre miraculeuse-
ment par la mer en Chalcedoine comme Ie corps de saint
Jacques en Espagne44.Aux specialistes de l hagiographie de
determiner si ces elements montrent ou non une dependancede
la legende de saint Jacquesa l egard de celIe de saint Menas.
Conclnsion
A la fin de celie etude, plusieurs questions restent ouvertes.
Pourquoi Jacques n a-t-il pas beneficie d une legende plus
consequente alors qu il fait partie des apotres les plus impor-
tants? Pourquoi, alors que la mort de Jacques est decrite dans
les Actes des Apotres, n avons-nous pas de tradition sur Ie tom-
beau de saint Jacques autres qu obscures et hesitantes, comme
celIe du tombeau a Marmarique? Pourquoi les notices mention-
nant Ie sejour de saint Jacquesen Espagnen ont-elles pas provo-
que la naissanced une legende espagnole? Comment expliquer
la tradition du tombeau de l apotre a CompostelIe? Comment
expliquer la naissanced une tradition independante en Egypte,
comme je Ie suppose? Comment expliquer les ressemblances
entre les traditions armenienneset espagnoles?
Ma presentation synthetique des divers elements de la legen-
de de saint Jacques e Majeur a plutot pose des questions que
resolu des problemes45,
tissimi Jacobi apostoli territorio Galecie translatum est» (3,2, ed. cit., p.
294). Y aurait-il ici la trace d une polemique avec ce que la version
armenienne dit de la tete de saint Jacques? Sur Ie probleme de la tete
de Jacques, t. R. PLOTZL, rt. cit. (n. 16), p. 55, n. 22.
44. Ct. H. VINCENTF. M. ABEL, Jerusalem,vol. 3, Paris 1922,p. 516-
528. Ct. H. DELEHAYE,An Boll 29 (1910),p.115-11?
45. Un article plus developpe paraltra, en polonais, dans les
WarszawskieStudia Teologiszne.
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Edoardo BARBIERI
Universitii Cattolica, Milano
LO PS. MARCELLUS BREVIOR IN UNA
TRADUZIONE ITALIANA DEL TRECENTO
En Italie, la forme breve de la Passiode Pierre et Paul, dire egalement
du Ps-Marcellus, a joui d une tres grande popularite; dans la premiere
moitie du xwe siecle,elle a aussiere traduite en langue vemaculaire. Ce
texte, esteusqu d present inedit, est originaire de la Toscane ccidentale.
Dans a production vemaculaire talienne de la in du moyen age, a diffu-
sion du recit de la confrontation avecSimon le magicienet du martyre de
Pierre et de Paul a ere assuree galement ar un petit corpus d autresecrits
hagiographiquesen prose et en vers (tout particulierement a Ugende des
SS Pierre et Paul); l etude de leurs relations nouspermet d identifier Pise
comme l un des centres possibles pour la diffusion de ces textes. En
annexe,nous donnons a transcription de la Devotissima storia de Ii bea-
tissimi sancto Pietro e sancto Paulo d apres e plus ancien temoin connu.
In Italia ebbe largo fortuna la versione atina brevior della Passio dei
ss. Pietro e Paolo detta dello ps. Marcello; sullatino fu anche condotto,
nella prima meta del Trecento,un volgarizzamento. Questo estae rimas-
to sinora inedito e appartieneall area Toscanaoccidentale.La diffusione
della narrazione dello scontro con Simon mago e quindi del martirio di
Pietro e Paolo e affidata, nella produzione volgare italiana del fordo
Medioevo,anchea un piccolo corpus di altri racconti agiografici in prosa
0 in versi (in particolare la Leggenda dei ss.Pietro e Paolo), dei quali si
indagano i reciproci rapporti, giungendo a indicaTe n Pisa una dellepro-
babili zone di irradiazione di questi testi. In appendicesi fornisce anche
una trascrizione della Devotissima istoria de Ii beatissimi sancto Pietro e
sancto Paulo, basatasui piu antico testimonenota.
AUe origini deUa radizione volgare.
Come e noto, 10ps. Marcellus breviar (CANT 193.1) e per-
venuto nel testo originale greco, tramandato da un unico mano-
scritto, il Marciano Gr. VII 37, e in una versione latina del VI
7, 1996, . 205-224
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BARBIERI
secolo, che ebbe invece larghissima diffusione ; entrambi i testi
furono pubblicati dal Lipsiusl. La versione longior dello ps.
Marcello, che qui non interessa direttamente, e opera di un
monaco greco dell Italia meridionale attivo Del IX secolo
(CANT 193.2).
Lo ps. Marcello si pone al centro della ricca ramificazione
degli apocrifi neotestamentari riguardanti l attivita apostolica e
il martirio di s. Pietro, e spicca sia per concinnitas espositiva e
coerenza interna, sia per essere la pill antica azione narrativa a
uniTe il martirio di Pietro e quello di Paolo. Ma cosa racconta 10
ps. Marcello?
II testa prende Ie masse dalla predicazione di Pietro e Paolo a
Roma, dove giunge anche Simon mago, legandosi strettamente a
Nerone. Davanti all imperatore, che e convinto dai prodigi
procurati da Simone con Ie sue arti magiche e 10 crede un clio, si
svolge una lunga disputa tra Simone da un lata e Pietro e Paolo
dall altro, disputa che culmina con la pretesa di Simone (vero
alter Christus 0 meglio antichristus) di ascendere al cielo. Pietro
e Paolo, che con Ie lara orazioni 10 fanno precipitaTe a terra2,
vengono poi martirizzati per ordine di Nerone. La narrazione
termina con un aggiunta nella quale Marcello si dichiara testi-
mane e autore del racconto.
Nella prima meta del XIV secolo 10 ps. Marcello brevior fu
volgarizzato in lingua italiana col titolo di Martirio dei santi
Pietro e Paolo. Si sta lavorando alIa pubblicazione di questo
testa sinora inedito. La traduzione venne condotta, come e nor-
male in questi casi, sulla base del testa latino, diffusissimo in
area toscana3 ; di cio rendono testimonianza alcuni errori del
traduttore, spiegabili solo con una incomprensione paleografica
dellatino :
§ 46 T1)v EUIJ.EVELaVclementiam > dementiam > pa~ia
§ 54 1TETQa8aLper 1TOTQa8aL) volare > vocare > chiamare.
Sulla base di una sia pur incompleta recensio dei testimoni
1. Acta apostolorum apocrypha, ed. R. A. LIPSIUS M. BONNET, ,
Lipsiae 1891 (= Hildesheim 1959) d ora in poi citato AAA), p.118-177.
Pill sopra con la sigla CANT si e fatto riferimento a Clavis
Apocryphorum Novi Testamenti, ur. M. GEERARD, urnhout 1992.
2. Secondo a splendida raffigurazione iconografica, presa come simbo-
10 dall AELAC, presente Dei mosaici di Monreale presso Palermo (si
veda a esempio S. GIORDANO, o splendoredi Monreale,Palermo 1982,
p.80).
3. AAA, I, p. LXXV-LXXXIII (in particolare LXXX).
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207
O PS. MARCELLUS BREVIOR
manoscritti4, si puo indicaTe che una consistente parte di tali
codici unisce il Martirio a un altro volgarizzamento, questa volta
hen noto, quello degli Atti degli apostoli del domenicano pisano
Domenico Cavalca, da datare probabilmente tra il 1320 e il
13305. I Martirio si inserisce come un appendice allibro neotes-
tamentario, fomendo la narrazione degli eventi finali della vita
terrena degli apostoli Pietro e Paolo6.Tale stretto legame viene
hen esplicitato da un testimone, che aggiunge, al termine dell e-
4. Sono stati identificati e collazionati una decina di mss. per un primo
orientamento si veda A. CORNAGLIOTTI, I volgarizzamenti italiani
degli apocrifi neotestamentari », in Actes du XIIIe Congres nternational
de linguistique et de philologie romanes. Laval (Quebec, Canada), 29
aout -5 septembre1971, I, cur. M. BOUDREAULTF. M6HREN,Quebec
1976,p. 681-682,dove perIJ autrice mescola tra loro testi sicuramente
diversi.
5. C. DELCORNO,Cavalca Domenico », in Dizionario biografico degli
italiani, XXII, Roma 1979,p. 577-586con gli aggiornamenti bibliografi-
ci proposti in D. CAVALCA,Cinque vile di eremiti dalle «Vite dei santi
padri», a c. di C. DELCORNOEsperia), Venezia 1992,p. 11-71.Sempre
utile anche Th. KAPPELI, criptores Ordinis Praedicatorum Medii Aevi,
I, Romae 1970,p. 304-314e IV (con E. PANELLA), oma 1993,p. 67-69.
La migliore edizione disponibile resta quell a curata da F. NESTI,
Firenze 1837,sulla quale si veda F. ZAMBRINI S. MORPURGO,e opere
volgari a stampa dei secoli XIII e XIV, I, Bologna 1884,col. 44. Ho in
progetto, a Dio piacendo, di portare a termine una nuova edizione criti-
ca del volgarizzamento cavalchiano. Per il momento si vedano S.
BERGER, La Bible italienne au Moyen Age », Romania 23 (1894), p.
390-395e G. DE POERCKR. VAN DEYCK,«La Bible et l activite tra-
ductrice dans les pays romans avant 1300 », in Grundrij3 der romani-
schen Literaturen des Mittelalters, VI/1, Heidelberg 1968, p. 21-48 e
VI/2, Heidelberg 1970,p. 54-80. Per una panoramica generale si veda-
no, ma con qualche cautela, saggi raccolti per cura di JacquesDelarun
sotto il titolo di «Bibles italiennes », Melanges de I Ecole frant;aise de
Rome. Moyen Age 105 (1993),p. 825-886.
6. Tale esigenza di completare la narrazione offerta dagli Atti con altro
materiale, riguardante la fine degli apostoli Pietro e Paolo, si esplicita
anche altrimenti nella tradizione del volgarizzamento di Cavalca. Nel
ms. Firenze, Biblioteca Nazionale Centrale, II. IV. 115 agli Atti segue a
traduzione italiana della Epistula ps. Dionysii Areopagitae ad
Timotheum de passionePetri et Pauli (CANT 197; per la versione latina
H. FROS,Bibliotheca hagiographica latina antiquae et mediae aetatis.
Novum supplementum, Bruxelles 1986 [Subsidia hagiographica 70]
[=BHL.S], 6671-6672). Invece Del ms. Firenze, Biblioteca Nazionale
Centrale, Palatino Capponi 109 si trova inserita, sempre in appendice
agli Atti, la predica del domenicano Benedetto da Orvieto, tenuta a
Firenze il 25 gennaio 1366, esta della Conversione di s. Paolo (L. FuMI,
«Saggi di volgare orvietano del buon tempo », It Propugnatore 14
[1881],p. 110-120: tale omelia, ma in diversa successione, pure in uno
dei mss. che tramandano anche il Martirio). Ancora il ms. Firenze,
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E. BARBIERI
lenco delle rubriche dei capitoli in cui sono suddivisi gli Atti, una
rubrica dedicata per l appunto al Martirio, considerato come il
capitolo finale degli Attf. Gli Atti del Cavalca, che ebbero
all inizio vita autonoma, vennero hen presto introdotti come
parte integrante di un Nuovo Testamentovolgare. L inserimento
del Martirio a fianco degli Atti cleveprobabilmente risalire a uno
stadio pill alto della tradizione, quando gli Atti volgarizzati cir-
colavano ancora indipendenti da altro materiale biblico. Anche
gli altri mss. identificati del Martirio, dove non compaiano gli
Atti del Cavalca, comprendono pero altri libri del Nuovo
Testamentovolgare.
Per quanto concerne l interesse dell ignoto volgarizzatore per
il Martirio, ollIe alIa sua capacita di concludere in modo co-
erente it racconto degli Atti, avra senzadubbio giocato a spettaco-
larita della narrazione. A cio si aggiunge l fatto che il volgariz-
zamento degli Atti veniva di fatto a proporre a livello popolare
una esatta conoscenza ipologica del predicatore apostolico, con-
tro la possibile infiltrazione di modelli alternativi non ortodossi8.
Proprio 10 ps. Marcello, a prescindere dall evidente suggerimen-
to circa la fondazione apostolica della chiesa di Roma, mette in
bocca a Pietro la condanna di «pseudochristi... pseudoapostoli...
et pseudoprophetae» (§ 39). Anche l accostamento al Martirio
della leggenda di s. Silvestro papa, attestato Dei manoscritti che
non tramandano gli Atti, pare svolgere una funzione di «se-
gnale» antiereticale. Uno dei topoi dell eterodossia tardomedio-
evale di area italiana e infatti quello secondo il quale la Chiesa
cattolica, dopo la donazione di Costantino a papa Silvestro,
sarebbe degenerata in ecclesiamalignantium9. La leggenda sil-
vestrina ha un suo particolare sviluppo in epoca medioevalelo,
Biblioteca Riccardiana 1762 tramanda, unito agli Atti, un compendio
volgare di diverse narrazioni agiografiche (tra Ie quali 10ps. Marcello e
10ps. Dionigi Areopagita) sulla morte di Pietro e Paolo.
7. Sembra che il primo a segnalare a presenza del Martirio a fianco del
volgarizzamento degli Atti degli apostoli nei tre manoscritti della
Biblioteca Riccardiana di Firenze a lui noti sia stato J. LAMI, De erudi-
tione apostolorum, Florentiae 1738,p. 186,311 e 323, ripreso poi da J.
C. THILO,Acta ss.Apostolorum Petri et Pauli, I, Halis Saxonum 1837,p.
28, dal quale dipende Lipsius (AAA, I, p. XC), fonte a sua volta di Gli
Apocrifi del Nuovo Testamento, c. di M. ERBETTA,I: Atti e leggende,
CasaleMonferrato 1966,p. 179.
8. R. RUSCONI, Forma apostolorum : l immagine del predicatore nei
movimenti religiosi francesi e italiani », Cristianesimo nella storia 6
(1985),p. 513-542.
9. A. MOLNAR, Storia dei Valdesi, I : Dalle origini all adesione alla
Riforma (1176-1532) Studi storici), Torino 1974,p. 309-313e la biblio-
gratia segnalata da G. G. MERLO,Eretici e inauisitori nella societa Die-
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209
O PS. MARCELLUS BREVIOR
ma in particolare quella scritta da Iacopo da Varazze, che si
ritrova appunto volgarizzata Dei testimoni di cui si sta parlando,
pare non ignorare una problematica di tale genere, se conclude
un elenco delle virtu di Silvestro dicendolo caritate diffusus, cioe
dispensatore dei belli ricevutill. .
La narrazione offerta dallo ps. Marcello era sufficientemente
nota proprio nella Toscana del primo Trecento, se risulta. incor-
porata, ma in forma assai breve, Dei due volgarizzamenti del
Chronicon Pontificum et Imperatorum di Martin Polono, l uno
inedito e l altro, noto in numerose edizioni a stampa, detto dello
ps. Petrarca12.
Il racconto era anche bell conosciuto proprio negli ambienti
domenicani, come testimoniano gli scritti di Vincenzo di
Beauvais e Iacopo da Varazze. Con cio non si intende evidente-
mente sostenereche l Ordo praedicatorum detenesseun qualche
diritto esclusivo sulla leggenda. Pure Bonaventura da
Bagnoregio scrive, Delle Collationes in Hexaemeron,che Simone
«in altum ascendit ut postea cecidit, qui daemones nvocavit »13.
La narrazione agiografica di Iacopo da Varazze ebbe larghissima
fortuna in ambiente italiano, oltre che Dei numerosissimi mano-
scritti del testo latino, splendidamente studiati da Barbara
montesedel Trecento (Studi storici), Torino 1977,p. 23, n. 22 e p. 38, n.
46. Tale posizione e del tutto differente da quella di chi, come Dante,
considerava a Donazione illecita sui piano legate e dannosa dal punta
di vista ecclesiale (P. G. RICCI, «Donazione di Costantino », in
Enciclopedia dantesca, II, Roma 1970, p. 569-570 e A. PENNA,
«Silvestro I», ivi, V, p. 251-252).
10. E. AMANN, «Silvester Ier (saint) », in Dictionnaire de theologie
catholique, XIV /2, Paris 1941, col. 2068-2075; A. AMORE,«Silvestro
I », in Bibliotheca sanctorum, XI, Roma 1968, col. 1077-1079; P. DE
LEO, Ricerche sui falsi medioevali, I : Il «Constitutum Constantini»
(Univ. della Calabria. Dip. di storia. Studi e documenti 1), Reggio di
Calabria 1974 e R. J. LONERTZ, Constitutum Constantini : destina-
tion, destinataires, auteur, date », Aevum 48 (1974), p. 199-245; BHL.S
7725-7743.
11. JACOBIA VORAGINE egenda aurea vulgo historia lombardica dicta,
rec. Th. GRAESSE, ratislaviae 18903 = Osnabruck 1969), p. 70-79, in
particolare 71.
12. Per il testa adespota si veda il manoscritto Firenze, Biblioteca
Nazionale Centrale, E. 5. 8. 12, . 6r e per il testa dello ps. Petrarca l edi-
zione di Firenze 1625,p. 24. Devo queste informazioni sui volgarizza-
meDii di Martin Polono a Antonella Lurati, che ringrazio. Stille cro-
nache citate si veda A. DEL MONTE,«La storiografia fiorentina dei
secoli XII e XIII», Bullettino dell /stituto storico italiano per il Medio
Evo 62 (1950),p. 174-282.
13. S. BONAVENTURAE,pera omnia, V; Ad Claras Aquas 1891,p. 399b.
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E. BARBIERI
Fleith14, Dei diversi volgarizzamenti sia dell'intera Legenda
aurea, sia, soprattutto, di sue parti15, n Vincenzo di Beauvais
invece la narrazione, come si addice a una summa della sapienza
clericale quale e 10 Speculum,viene ridotta agli elementi essen-
ziali16.Quanto all'influenza dell'opera di Vincenzo di Beauvais
sulla letteratura italiana del Due e Trecento, essa e stata certo
vastissima,anche se in gran parte ancora da studiare17,
E in effetti Domenico Cavalca conosceva bene il contenuto
della leggenda, perche 10 ricorda almeno due volle Delle sue
opere, nella Specchiode' peccati al cap. X e Del Pungilingua al
cap, xxx. Nonostante il convergere della scuola domenicana da
un lata, e della tradizione volgare toscana (e, come si vedra, in
particolare pisana) dall'altro verso la leggenda petrina, il
Martirio non andra certo attribuito al Cavalca18, ib e dimostra-
to sia dalla diversita di stile tra i due volgarizzatori (assai et-
terale quello del Martirio, pill libero quello di Cavalca19) ia dal-
14. Si vedano Ie schede allestite da B. FLEITH, Studien zur Oberliefe-
rungsgeschichte der lateinischen Legenda Aurea (Subsidia hagiographica
72), Bruxelles 1991, p. 55-331, 349-351 e 367-373.
15. Si vedano V. MARUCCI, «Manoscritti e stampe antiche della
'Legenda aurea' di Jacopo da Varazze volgarizzata », Filologia e critica
5 (1980), p. 30-60; E. BARBIERI, recensione a «Legenda aurea ». Sept
siecles de diffusion. Actes du colloque international, Universite du
Quebec a Montreal, 11-12 mai 1983, cur. B. DUNN-LARDEAU (Cahiers
d'etudes medievales. Cahier special 2), Montreal -Paris 1986, in
Aevum 62(1988), p. 393-396 e C. DELCORNO, «Nuovi studi sull exem-
plum'. Rassegna », Lettere italiane 46 (1994), p. 473-478.
16. VINCENTII BELLOVACENSIS,Bibliotheca mundi seu speculum maius,
IV: Speculum historiale, Duaci 1624 (=Graz 1965), p. 326-327 (libro IX,
§ 12-15).
17. Si veda il polittico G. BILLANOVICH -M. PRANDI -C. SCARPATI,
«Lo 'Speculum' di Vincenzo di Beauvais e la letteratura italian a
dell'eta g6tica», [talia Medioevale e Umanistica 19 (1976), p. 89-170
nonche Vincent de Beauvais: intentions et receptions d'une oeuvre ency-
clopedique au Moyen Age. Actes du XW. Colloque de l'lnstitut d'etudes
medievales, 27-30 avril 1988, cur. M. PAULMIER FOUCART S. LUSIGNAN
-A. NADEAU, Saint Laurent -Paris 1990.
18. SuI problema della patemita cavalchiana delle opere a lui tradizio-
nalmente attribuite si vedano DELCORNO, «Cavalca, Domenico », p.
578-579 e R. LOTTI, «Prime annotazioni sui 'Frutti dell a lingua' del
Cavalca », Atti e memorie dell'Accademia di scienze e lettere «La
Colombaria» 37 (1986), p. 105-206 ora in ID., Contributi su Domenico
Cavalca, Amsterdam 1987, in particolare p. 25-40. Si veda anche, ma
con qualche riserva, M. CICCUTO,«Tradizione delle opere di Domenico
Cavalca. Gli esempi dei trattati morali », [talianistica 19 (1990), p. 39-67
e 20 (1991), p. 281-310.
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LO PS. MARCELLUS BREVIOR
l assenza di un qualsiasi cenno nel prologo che Cavalca premise
alIa sua traduzione degli Atti. Rimane per il Martirio la sugge-
stione di un testa COSt mogeneo al volgarizzamento degli Atti
degli apostoli e per tradizione COStrossimo alIa lara forma orig-
inale, tanto da far pensare allavoro di un traduttore molto vici-
no a Cavalca stesso.
compilazioni giografichen prosa.
In realta e noto che nell Italia del tardo Medioevo circolavano
in lingua volgare altre leggende derivanti dallo ps. Marcello e
riguardanti l ultimo periodo della vita dei santi Pietro e Paolo.
Una di queste, pill estesa, u pubblicata da Luigi Razzolini sulla
base di un manoscritto quattrocentesco ora perduto2O. La
Leggenda de ss. Pietro e Paolo e suddivisa in due paTti. Nella
prima, dopo alcuni dati introduttivi, si giunge al nucleo del rac-
conto, la predicazione degli apostoli in Antiochia e, in partico-
laTe, apostasia della comunita antiocena. Pietro e Giovanni,
recatisi a predicare21, engono beD presto denunciati all autorita
locale e interrogati circa la vita di GeSll; il «re duca
d Antiochia» ordina contro i due apostoli tutta una serie di tor-
menti e supplizi dai quali i due si liberano ripetutamente per
intervento divino22.
A questo punto giunge ad Antiochia, accompagnato da
19. Sullo stile di Cavalca volgarizzatore si veda almeno R. SALSANO,I
volgarizzamento cavalchiano della « Vita Beati Antonii Abbatis» (Saggi
di letteratura italiana 34), Firenze 1972.20.
Si vedano Leggendade ss. apostoli Pietro e Paolo. Testoantico to-
scano ora per la prima volta stampato [a c. di L. RAZZOLINI],Reggio
1852 (si e consultato l esemplare Citta del Vaticano, Biblioteca
Apostolica Vatican a, Ferraioli IV. 6121, con dedica del curatore a
Francesco Zambrini) e Leggende del secolo XIV a c. di I. DEL LUNGO,
II, Firenze 1863,p. 34-160. Lipsius, per una parzialmente errata segna-
lazione di Francesco Rodiger, credette di identificare la Leggenda pub-
blicata da Razzolini con il volgarizzamento dello ps. Marcello (AAA, I,
p.XC).
21. In Galati 2,11 si accennaall arrivo di Pietro a Antiochia, ma ancora
durante la presenza di Paolo e in un momenta connesso alIa disputa
stille usanze giudaiche, cioe prima del concilio di Gerusalemme.
22. Tali dettagliati elenchi di torture ricordano una certa sadica antasia
hen nota sia agli acta martyrum (H. DELEHAYE, es passions des mar-
tyrs et les genres litteraires, Bruxelles 19662 Subsidia hagiographica
13/B], p. 197-207),sia agli apocrifi apostolici (F. MoRARD,«Souffrance
et martyre dans les actes apocryphes des apotres », in Les actes
apocryphes des Apotres. Christianisme et monde pai en, Geneve 1981
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E. BARBIERI
Barnaba, Paolo, che si presenta come un pagano. In una fittizia
gara tra Paolo e Pietro, il primo mostra l impotenza degli dei
gentili a compiere miracoli pari a que Ii dei discepoli di Gesu, e
suggerisce al signore di Antiochia di aderire alIa nuova reli-
gione, cosa che il signore fa di huon grado assiemea tutto il suo
popolo. La conclusione dell episodio vede la consacrazione di
numerose chiese nella citta e soprattutto l insediamento di
Pietro a Patriarca di Antiochia23,notizia questa abbastanzadif-
fusa nel Medioevo occidentale, dal Liber pontificalis sino alIa
Legenda aurea, che dipende in questo caso da Isidoro di
Siviglia24.
Esiste pero in volgare italiano anche una Storia di s. Pietro
nella cittii d Antiochia, pubblicata, sulla base di un manoscritto
bolognese del XV secolo, da Di Mauro Di Polvica25. ale Storia
corrisponde nella sua sostanza a tutta la prima parte della
Leggenda,dove il testa appare pero qui e la ampliato. La Storia
dipende a sua volta da una narrazione latina assaisimile ai Gesta
Petri et Iohannis Antiochiae, noti in redazioni leggermente dif-
ferenti in due manoscritti dei secoli XII-XIII, entrambi di area
italiana centro-meridionale26,
La Storia e dotata di un prologo, ignoto alIa tradizione latina,
e suI quale e utile soffermarsi un istante. Gia la rubrica della
Storia indica l autore del testa in Gregorio Magno, il quale, pro-
[Publications de la Faculte de Theologie 4], p. 95-108), sia alia produzio-
ne agiografica medioevale, come la Legenda aurea (per una ricca analisi
della «morfologia» del martirio si veda A. BOUREAU, La Legende
doree. Le systeme narratif de Jacques de Voragine (t 1298), Paris 1984,
p.116-135).
23. Da ricordare anche che Pietro aveva gia subito, per derisione, il
tagiio dei capelli, il che gli aveva data l occasione di proclamare l uso
della chierica come tipico della Chiesa roman a (H. LECLERCQ,
«Tonsure », in Dictionnaire d archeologie chretienne et de liturgie,
XV /2, Paris 1951, col. 2430-2443).
24. Liber Pontificalis, I, ed. Th. MOMMSEN, Berolini 1898 (Monumenta
Germaniae historica. Gestorum Pontificum Romanorum 1), p. 2-4;
JACOBUSA VORAGINE, Legenda aurea, rec. GRAESSE, . 375 e ISIDORUS
HISPALENSIS,De ortu et obitu patrum, § LXVIII n° 116 (Patrologia lati-
na 83, col. 149-150 = BHL.S 6670d). Si veda pure F. H. CHASE, «Peter
(Simon) », in A Dictionary of the Bible, cur. J. HASTINGS, II, Edinburgh
1900, p. 768.
25. Per l edizione del testa si veda «Storia di s. Piela apostolo nella
citta d Antiochia ora per la prima volta pubblicata », a c. di F. DI
MAURO DI POLVICA, I Propugnatore 5 (1872), II, p. 194-239. Dopo l in-
troduzione (p. 194-203), il curatore pubblica la StaTio (p. 204-229),
seguita da un testo sulla testa di s. Pietro in vincula (p. 229-239).
26. BHL.S 6678b e 6678d.
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O PS. MARCELLUS BREVIOR
prio Del prologo, parI ando in prima persona, narra come un
giorno avesse ncontrato l amico Pietro, e come questi, dopo
aver narrato a Gregorio alcuni fatti circa l apostolato di s. Pietro
a Antiochia, da lui ascoltati per bocca di un monaco siriano,
Abramo, l avessepregato di volere mettere per iscritto in latino
tali racconti. Gregorio acconsente e, con l aiuto dell interprete
Eudelgrimo, stende operetta27.
Tornando alIa Leggenda, a seconda parte, dopo l avventura
antiocena, vede il ritorno degli apostoli a Gerusalemme e l in-
contro tra Pietro e Simon mago, secondo l racconto di Atti 8, 9-
24. Dopo un successivo incontro-scontro con Simone, questi
decide di lasciare la Palestina. Pietro pero viene a sapere da un
ex-discepolo di Simone che questi aveva gettato i propri libri di
magia in mare e annunziato di volersi recare a Roma, dove
Pietro decide di raggiungerlo. Segue quindi un racconto molto
simile, ma ampliato (a esempio con l episodio della storia di s.
Clemente), allo ps. Marcello.
Un certo interesse suscita il tredicesimo capitolo di questa se-
conda parte della Leggenda,dove si narra dello sbarco di Pietro
nella cilia di Pisa. La notizia non e di per se nuova, se a si ritro-
va in alcune antiche cronache pisane28.Collegando pero la pre-
senza di tale notizia alIa formazione dei racconti circa il sog-
giorno di Pietro in altre cilia dell Italia centrale e meridionale29
se ne ricava l ipotesi che la Leggendasia connessacon Pisa, Del
senso che in tale cilia sia stato scritto il suo originale latino, se
gia conteneva l episodio, 0 che piuttosto l estensore del testo
volgare lavorasseper l appunto fi.
La notizia dell arrivo di Pietro a Pisa, legata all origine della
chiesa ocale, ha destato un continuo interesse n chi si e occupa-
to delle antichita pisane3O.n particolare tale leggenda si con-
Delle con la fondazione della chiesa di S. Piero a Grado, presso
27. Per gli autentici testi gregoriani di argomento petrino si veda L.
SERENTHA,La figura di san Pietro rievocata da s. Gregorio Magno », La
Scuola Cattolica95 (1967),p. 529-568.Un informato orientamento biblio-
grafico viene fomito da R. GODDING, ibliografia di Gregorio Magno
(1890-1989) Opere di Gregorio Magno. Complementi 1), Roma 1990.
28. Rerum italicarum scriptores, cur. L. A. MURATORI,VI, Mediolani
1725,col. 165-167.Si veda anche BHL.S 6679b. Utili Ie osservazioni di
O. BANTI, « Studio sulla genesi dei testi cronistici pisani del sec. XIV»,
Bullettino dell lstituto italiano per il Medio Evo 75 (1963),p. 259-319, n
particolare 267-279.
29. F. LANZONI,Le diocesi d ltalia dalle origini al principio del secolo
VII (a. 604),2 vol., (Studi e testi 35), Faenza 1927.
30. R. GREGOIRE, La prima cristianizzazione delia regione di Pisa »,
Bullettino storico pisano 59 (1990),p. 3-5.
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E. BARBIERI
l antica zona portuale della citta, dove si conserva un altare che
sarebbe stato edificato da s. Pietro e consacrato poi da s.
Clemente. E comunque probabile che tale culto petrino a Pisa
abbia avuto un suo momenta di rilancio nella secondameta del
Duecento per opera dell arcivescovo Federico Visconti, il quale
nel suo omiliario naIra appunto di tale devozione, conferman-
done in qualche modo la storicita31. n tal modo la chiesapisana
guadagnava un particolare prestigio con l asserzione della sua
fondazione per opera di Pietr032.Coerente a tale progetto pare
anche la diffusione delle leggende circa la cattedra di Pietro a
Antiochia, prova che l origine petrina non era certo una carat-
teristica solo della chiesa di Roma.
PliO confermare in qualche modo questa interpretazione un
altro testa che si pliO in fine citare : e una Leggenda di s. Pietro,
tramandata da un manoscritto tardotrecentesco e pubblicata a
meta dell Ottocento da Francesco Zambrini33. L inizio della
leggenda prende Ie mosse dal ministero di s. Pietro a Antiochia,
per passare poi al suo arrivo aRoma, allo scontro con Simone
mago e al martirio di Pietro e Paol034.Da evidenziare anche qui
l inserzione della sosta pisana di Pietro durante il suo viaggio
verso l Urbe : «E poi venne a Pisa e fece fare la bell a chiesa di
SanPiero in Grado ».
31. Firenze, Biblioteca Medicea Laurenziana, XXXIII sin. 1 (A. M.
BANDINl, Catalogus codicum latinorum Bibliothecae Mediceae
Laurentianae, V, Florentiae 1777,col. 273-283).L omelia che qui inte-
Tessa la XXXVI, intitolata In Ascensione Domini, quem idem domi-
nus ecit in vulgari apud SanctumPetrum ad Gradus.
32. Studi fondamentali sono quelli di C. PlANA, «I sermoni di Federico
Visconti, arcivescovo di Pisa (t 1277)», Rivista di storia delta Chiesa n
Italia 6 (1952), p. 231-248e J. B. SCHNEYER,Das Predigtwirken des
Erzbischofs Friedrich Visconti yon Pisa (1254-1277) auf Grund del
Rubriken des Cod. Florenz, Laur. Pluto 33. sin. 1 », Recherches de
Theologie ancienneet medievale32 (1965),p. 307-332.
33. Per l edizione del testo si veda Collezione di leggende nedite scritte
net huon secolo,a c. di F. ZAMBRlNl, , Bologna 1855,p.1-17 (aIle p. 18-
22 alcune osservazioni del curatore). Sulla Leggenda di s. Pietro un
breve cenno in CORNAGLlOTfl, I volgarizzamenti taliani », p. 682.
34. La Leggendadi s. Pietro meriterebbe forse un analisi pill dettagliata,
anche per gli episodi curiosi in essa riferiti. SuI velo macchiato del
sangue di Paolo, si veda qui nell Appendice ; sull errata notizia circa
l erezione in Roma di una statua dedicata a Simon mago, proposta da
Giustino e divulgata da Eusebio, si veda EUSEBE E CESARE-E,istoire
ecclesiastique. ivres I-IV, cur. G. BARDY (Sources chretiennes 31),
Paris 1952,p. 67,n. 3.
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O PS. MARCELLUS BREVIOR
Un tardo racconto n versi.
Andra probabilmente attribuito alIa prima meta del XVI se-
cola l ultimo testa che si vuole ricordare, la Devotissima istoria
de Ii beatissimis. Pietro e Paulo, un poemetto di 29 altaye (per
un totale di 232 endecasillabi), tipico prodotto della letteratura
popolare a stampa ; di esso si conoscono6 edizioni distribuite tra
la meta del Cinquecento e la meta del Seicent035. Questo
cantare, probabilmente diffuso (parallelamente alIa sua trasmis-
sione a stampa) anche attraverso la recitazione orale di cantim-
banchi e cantastorie, segnala n modo evidente i « tempi lunghi »
della sopravvivenza dei testi apocrifi, in questo caso saldamente
incorporati entro un complesso testuale che puo hen essere
riportato a quel tipo di produzione definita come Trivialliteratur.
Dopo la narrazione dello scontro di Simone mago con Pietro e
Paolo e della maTte degli apostoli, viene aggiunto un curiosa
racconto di derivazione folclorica : un contadino, testimone del
martirio, si addormenta risvegliandosi dopa 500 anni per indi-
care illuogo (un pozzo) dove erano stati occultati (0 semplice-
mente deposti?) i carpi degli apostoli. La Devotissima istoria,
dal punta di vista agiografico, mostra quasi una saturazione dei
dati, tale da ridurre la leggenda a pura esposizionedel gia nota e
insieme da indurre a sottolineare altri elementi del meraviglioso,
i miracoli connessicol culto delle reliquie e l episodio del risve-
glio del villano.
Nonostante il tragitto fin qui percorso, Testaevidentemente
ancora molto da fare per chiarire la formazione e la diffusione
delle leggende petTine di derivazione pseudomarcellina
nell ltalia del tardo Medioevo e della prima Eta moderna. Con
cia, una migliore conoscenzaproprio del volgarizzamento dello
ps. Marcello, che spero di vedere presto pubblicato, pub con-
tribuire a meglio intendere almeno un tratto di questa vivace
tradizione36.
35. La Devotissima istoria (riprodotta in Appendice), e segnalata da
Bibliografia della poesia popolare dei secoli XIII a XVI, I, La poesia
religiosa. I cantari agiografici e Ie rime di argomento sacra, a c. di A.
CIONI Biblioteca bibliografica italica 30), Firenze 1963,p. 215-216.
36. I dati qui offerti, e sinora inediti, fanno parte di una pili ampia ricer-
ca in parte svolta nel1993 grazie a una borsa di studio della Katholieke
Universiteit di Leuven. Ringrazio chi nel corso di questo lavoro mi ha
offerto suggerimenti e correzioni, Giuseppe Frasso, Aldo Menichetti,
Gianni A. Papini e Gerard Poupon.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 212/295
216
E. BARBIERI
Appendice : Devotissima istoria de Ii beatissimi sancto
Pietro e sancto Paulo.
Vista l'interesse che il reperimento della Devotissima istoria
de li beatissimisancto Pietro e sancto Paulo ha suscitato in diver-
si partecipanti al convegno di Losanna-Ginevra, si e pensato
bene di offrirne una trascrizione, basata suI pill antico testimone
nota, un'edizione a stampa attribuita, ma assaidubitativamente,
a Venezia post 155037.n generale i tratti della narrazione, che
anche si discostano dal racconto fornito dallo ps. Marcello, sana
sufficientemente evidenti, 0 almeno chiaribili : l'episodio del
vela macchiato dal gangue di Paolo (ottave XIII-XVI) dipende
dal Martyrium s. Pauli apostoli dello ps. Lin038 quello del mar-
tirio di Paolo aIle Aquae Salviae (Tre Fontane), presso Ie quali
fu poi edificata la chiesa di S. Anastasio, trova riscontro in
antiche tradizioni ancor oggi vive39.Alcuni passaggi del breve
cantare risultano invece oscuri : il modello del sanna di 500 anni
del villano (ott. XVIII) ; l'episodio della «moneta di corame [di
rame?]» (ott. XX-XXI); il significato del ritrovamento in un
pozzo dei carpi dei due martiri (ott. XXII-XXIII). Altri, che
meglio conosce e antichita cristiane, sara ceria in grado di spie-
garli, anche n riferimento alIa leggenda dei Sette dormienti.
Il testa, scritto Del metro dell'ottava toscana ipica dei cantari
di argomento epico e politico, ma anche agiografico, presenta
serie di endecasillabi non sempre regolari, ma secondo un mo-
dello di tollerabilita hen nota in questo genere di produzione
popolareggiante. Da questo tipo di narrazioni deriva il frequente
ricorso a un'auctoritas scritta (XII, 4; XV, 2; XVI, 4; XXVIII,
1) che, anzich6 essere un vera rimando a una route letteraria, e
37. Nel testimone seguito, l titolo dell'opera e veTO eggermente diver-
so : «HISTORIA DE / I SANTI DEVOTISSIMI, / Pietro, e Paolo
Apostoli di Chri- / sto, con illaTa Martirio, / Morte./ E come
fuTon trouati Ii lara beatissimi / carpi in vn pozzo. » Edizione in 80 di cc.
[4] in caratteri romani; alIa c. A1r due piccoli legni assaiconsunti raffi-
guranti rispettivamente Pietro e Paolo. La lingua impiegata Del testa e
sostanzialmente iorentina.
38. CANT 212; AAA, I, p. 38-42 § 14-17. Sulla diffusione di tale leg-
genda,che puo esserecollegata a quella dell'immagine di Gesu ricevuta
da Abgar (Histoire du roi Abgar et de Jesus, ur. A. DESREUMAUX,. I.,
Brepols, 1993) nonch6 aile questioni riguardanti la Veronica e la
Sindone,siveda Gli Apocrifi, a c. di ERBETTA,I, p. 295,n. 4.
39. Si vedano almeno A. NIBBY,Analisi storico-topografico-antiquarie
della carta de' dintorni di Roma, III, Roma 18492,p. 268-279; H.
LECLERCQ, Paul (saint) », in Dictionnaire d'archeologie chretienne et
de liturgie, XIII/2, Paris 1938, col. 2658-2664; D. BALBONI,«Paolo
apostolo. Culto », in Bibliotheca sanctorum, X, Roma 1968,p. 194-195.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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217
O PS. MARCELLUS BREVIOR
semplicemente un tapas atto a conferire veridicita al dettato.
Con cio si noti comunque a non banalita dell'ottava XXVII, che
tenta di giustificare teologicamente il concerto stesso di
miracolo40.
Si trascrive dall'unico esemplare conservato di questa edi-
zione, ora a Lucca, Biblioteca Statale, B.ta 368-841.
EI nome42 ia di Dio glorificato.
0 buona gente, piacciavi d'udire
di santo Pietro, apostolo beato,
e di sanPaolo; ancor vi vogiio dire
si come fu ciascunmartirizzato
e che per Dio ebber tanto martire ;
al tempo di Nerone imperadore
sostennermorte con grave dolore.
Quando sanPietro in Roma predicava
la f6 di Gesu Cristo omnipotente,
una gran turba si 10seguitava
per Ie parole sue tanto possente,
per Ie qual molta gente battezzava,
gl'idoli disprezzandoapertamente.
Come l'imperador l'ebbe spiat043,
per Simon mago presto ebbe mandato.
II
40. In alcune delle ristampe pin tarde il raccontto viene pero ridotto a
27 ottave, essendostate eliminate proprio la XXVI e la XXVII, dedica-
te ai miracoli operati dalle reliquie degli apostoli.
41. L. MA1TEUCCI, Descrizione ragionata delle stampe popolari della
Govemativa di Lucca»,lllibro elastampa, n. s. 5 (1911),p. 74-75 n° 37.
Nella trascrizione ci si avvale di criteri conservativi, dividendo pero Ie
parole, inserendo i segni d'interpunzione e quelli diacritici, distinguen-
do u da v e maiuscole da minuscole secondo Ie abitudini invalse. Si e
inoltre normalizzata la presenza di h e quella di i indicante palatalizza-
zione, riducendole all'uso modemo; si e anche reso sempre 0 et con
e. Si sana scritte semplicemente con caratteri corsivi quelle lettere la cui
espunzione permette di rendere regolari versi altrimenti ipermetri ; tra
parentesi uncinate si sana proposte alcune rare integrazioni a correzio-
ne di versi ipometri. In altri casi, nei quill la correzione sarebbe stata
pin complessa, i si e limitati a segnalare e irregolarita metriche. Nelle
brevi note esplicative si citano in forma compendiosa l Grande diziona-
ria delta lingua italiana, XVII volumi pubblicati, Torino 1961ss.,
(=GDLI) e G. ROHLFS,Grammatica storica delta lingua italiana e dei
suoi dialetti, 3 vol., Torino 1966 =ROHLFS).
42. Nella stampa Nel nome che non da sensa.
43. Dopo che Nerone ebbe minutamente investigato l'operato di Pietro.
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218
E. BARBIERI
III
IV
Per essergran maestro pur dell'arte44,
fe' Simon mago a se presto chiamare,
qual con ngegno, astutia e false carte
agli demon sapevacomandare.
E presto il fe' veniT n quelle parte
per voler con sanPietro contrastare,
sendo 'imperatore ivi al presente,
per veder chi di loro e pill potente.
E Simon mago fe' fare un castello
tutto di legno e su vi fu montato.
Chiamo45 ciascundemonio, iniquo e fello,
quel Simon mago presto ebbe pigliato,
portandolo nell' aria come uccello,
onde che 1 popol fu maravigliato.
L'imperatore, stando Delpalazzo,
facea del mago festa e gran sollazzo.
Stando ciascun apostol 11 l presente,
Pietro e Paulo, attoniti come un sasso,
ciascunsi volse a Cristo omnipotente
per far lui col castelcadere al basso;
e in presenza di tutta la genie
ecco sentir per l'aria un gran fracasso,
che Simon mago, abbandonato e solo,
per l'ariacon rovina viene a yolo.
Era bell alto pill di cento brazza46
quando i demonii 10 ascior cadere
col capo in giuso in mezzo della piazza,
presente il popol che stava a vedere,
e si distrussecome al fuoco giazza47.
Non valse 10suo ngegno ne sapere,
v
VI
44. Per arte nel sensospecifico di «magia» si veda GDLI arte 17.
45. La sintassi del passo non e chiarissima. Si e interpretato riferendosi
al ricordato errore di lettura dello ps. Marcello volare > vocare > chia-
mare; si veda anche qui III, 4. Si potrebbe interpungere, in modo meno
chiaro ma forse pin coerente rispetto alIa sintassi popolare, Chiamo
ciascun demonio iniquo e fello ,. / quel Simon mago presto ebbepigliato,
avvertendo che il soggetto del secondoverbo e ciascundemonio.
46. Vale «braccia », si veda qui VIII, 2 e XXIX, 3.
47. Giazza e forma etimologica (da glacies,ROHLFS 355) di «giazzo »,
forma arcaica per «ghiaccio» (GDLI ghiacciol). In Dante e presente
ghiaccia (in rima con braccia e confaccia In XXXIV, 29 : 31 : 33, non
a caso il canto di Lucifero) nel significato di «ghiaccio ». 11suffisso
-azzo dell'Italia settentrionale e meridionale e parallelo al toscano
-accio : ROHLFS 1037.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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219
O PS. MARCELLUS BREVIOR
VII
VTTT
che tutto si disfece mmantinente48
l'anima sua n'ando al fuoco ardente.
L'imperatore fu forte crucciato,
vedendo per costui la mala testa
qual era tutto in terra fracassato
con gli occhi e col cervel fuor della testa;
e con gran furia presto ha comandato,
con voce a tutto il papal manifesta,
che Pietro e Paolo sien presi e legati
e in un fondo di torTe ncarcerati.
Eran tante catene e ferramenti
che braccia e gambe aveano ncatenato ;
gl'apostoli pativan pelle e tormenti
(mangiar ne bere a lor non era data),
pur ringraziavan Dio de' buon talenti49.
Stando ciascunocas incarcerato,
come piacque al Signor, con mente accorta
fur liberati e uscimo della porta.
Messer sanPietro, apostolo beato,
usa della prigion molto veloce ;
in Gesu Cristo si fu riscontrato5O,
ch'in spalla aveva llegno della croce.
L'apostol Pietro gli ebbe domandato
« Maestro, dove vai? », con umil voce;
Cristo si valse a quello e prese a dire:
«Un'altra volta in croce vo <a>morire51».
Allora Pietro con umil sermone
a Gesu Cristo chieseperdonanza52
e prestamente ritomo in prigione,
dandosi n colpa d'ogni sua fallanza.
II terzo giomo quel falso Nerone
mando per sanPietro, con disianza,
IX
x
48. Si vedano anche XI, 8 e XIV, 2 : francesismo di antica penetrazione
in Italia, vale «subito» (GDLI immantinente).
49.« Di buona voglia », «volentieri ».
50. Qui riscontrareyarra «incontrare », ma si veda anche XXVI, 1.
51. Nella stampa vo morire che potrebbe anche valere va' morire =
«vogiio morire ». Ma 10ps. Marcello § 611egge Sequereme, quia vado
Romam iterum crucifigi ; si preferisce percio interpretare e correggere
per vo = «vado ». Forse potrebbe non essereneppure necessaria 'inte-
grazione di a.
52. Le rime in -anza di questa ottava usano il suffisso di derivazione
francese, comune nell'italiano antico (ROHLFS 1106) perdonanza e
«perdono» (GDLI perdonanza 3), aLLanza«fallo» 0 «errore» (GDLI
faLLanza), isianza «desiderio» (GDLI desianza).
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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220
E. BARBIERI
XI
XII
e per sanPaolo, ch'era suo compagno,
per dare ai santi morte con gran agno.
L'imperatore gli fece sententiare53
che tutti dua dovessino moTile,
la testa a lor si dovessetagliare.
Misser sanPietro alloT gli plese a dire:
« 0 imperadore, io ti voglio pregare
ch'in su a croce mi vogli far moTile
coi piedi in su e col capo pendente ».
« COSt ia fatto -disse -inmantinente ».
L'apostol Paulo, essendosententiato
della sentenzadel crudel Nerone
che fuor di Roma fusse dicollato,
e sanPietro (come illibro pone )54
SOrIa a croce fusse conficcato
e lassatomoTif con passlone,
vedendo il popol tal comandamento,
SOrIa di lor facean gran amento.
Menati alIa giustizia55n quella dia56
e57egal lor Ie man con un capresto58.
E una sua discepola dicia :
« Dove menate questo mio maestro? »
Un dei famigli a lei rispondia59
«A tagliargli la testa, molto destro60 .
E sanPaolo pallo con voce onesta :
« Prestami, donna, il velo ch hai in testa »
Quella donna il velo ebbe pigliato61
e presto glielo poIse inmantinente.
Essendo giunti alluogo deputato,
53. 11 verba sentenziare qui significa «emettere una sentenza »,
« condannare con una sentenza» si veda anche XII, 1-2.
54. Verso ipometro, regolarizzabile con dialefe dopa come.
55. La giustizia e una« esecuzionecapitale» (GDLI giustizia 8) : si veda
XVIII, 2.
56. La forma dia femminile e attestata in antico per il maschile die, di =
«giorno» (GDLI di).
57. Congiunzione para-ipotattica (C. SEGRE, La sintassi del periodo
nei primi prosatori italiani », in Lingua, stile e societa,Milano 1976,p.
79-270,ad indicem).
58. Per « capestro », come sarebbe richiesto dalla rima (con metatesi di
r : ROHLFS 322e qui n. 26), a tune con cui si egano gli animali (GDLI
capestro).
59. Verso ipometro regolarizzabile con dialefe dopa famigli.
60. Avverbio di attestazione tardoquattrocentesca,vale «velocemente»
(GDLI destrol 15).
61. Verso ipometro, regolarizzabile ponendo dialefe dopa donna.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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221
O PS. MARCELLUS BREVIOR
xv
XVI
XVII
XVIII
la testa gli taglio subitamente
venne l angel di Dio, dal ciel mandato,
e quel velo sl plese veramente
e dentro il ganguedell apostollego62
e a quella donna poi l appresento.
E ire gran salti fece quella testa
di sanPaolo (come illibro spiana).
Odite che maraviglia fu questa:
che ad ogni saIto nacque una fontana,
acqua preciosa, che mai posa 0 Testa
per tutto l anno, giorno e settimana.
Chi va a Santo Anastasio il pub vedere
e di quell acqua ognuno ne pub here.
Quel velo che da l angelo fu dato
col ganguea quella donna santa e pula
ebbe tanti miracoli mostrato,
secondoche dichiara la scrittura ;
chi era zoppo, cieco e chi storpiato
quel santo ganguea tutti dava cura,
e per gli molti segniche fu visto
dimolta genie si conversea Cristo.
Messer sanPietro, apostolo beato,
per la fede di Cristo omnipotente
sopra una croce grand e conficcato.
Coi piedi in su e col capo pendente
ire giorni stelle che non gli uscl l fiato ;
alloT si convertl dimolta genie.
II terzo giorno quel santo svenia
e I anima dal corpo si partia.
E un villan che vidde il giorno fare
quella giustizia, che vendea al mercato
una vitella, poi plese a camminare63
per esseral casalsuo ritornato
e in un orto s ebbe a ddormentare.
Per miracol che Dio64ebbe mostrato,
cinquecento anni 10 ece dormire ;
da poi quegli anni si ebbe a risentire.
Levato in piedi, si pose per via
per voler a sua casa ar ritorno
XIX
62. Raccolsecioe nel vela il sangue di Paolo. Verso ipermetro.
63. Verso ipermetro.
64. Nella stampa Per miracolo di Dio che non da sensa al verso succes-
siva fece con Dio soggetto sottinteso (anacoluto).
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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222
E. BARBIERI
e camminando giunse all'osteria
ch'era di gia passatomezzogiorno.
Questo huon uomo fame e sete avia,
a chiamar 'oste non fece soggiorn065,
del qual si fe' da mangiar portar tosto ;
mangiato ch'ebbe valse pagar 'osto.
Moneta di corame66 i trovo allat067,
ch'avea toccata della sua vitella68;
valse pagar di quel ch'avea mangiato.
L'oste gli die' con man su a mascella,
dicendo : « Falso, adro, svergognato
questa moneta e trista, iniqua e fella »
Pigliar 10 ece a grida e gran romore
e fe'l menar davanti al Senatore.
El Senatorprese quella moneta
e aIle lettere l'ebbe conosciuta.
Con quell'uomo paTIoalIa secreta69
«Questa moneta, donde l'hai tu avuta ?
E lui rispose con la mente quieta:
« D'una vitella che ieri ho venduta,
quando che Pietro e Paulo fu mort07O
e io m'addormentaidrent071 d'un octo ».
65. Non indugio, non aspetto.
66. Semplice sembra la correzione rame (anche in generale un metallo
di scarsovalore : GDLI rame) per corame(che sara del cuoio decorato :
GDLI corame), che eliminerebbe l'ipermetria del verso. Si conserva
pero la lectio difficilior la quale potrebbe 0 trovare conferma nell'uso di
monete in cuoio in periodo d'assedio (E. MARTINORI,La moneta.
Vocabolario generale,Roma 1915,p. 358 s. v. Osstdiali), 0 addirittura
nascondere a corruzione della voce *« dicorsiva» 0 *« decorsiva» (.41
~ame ~ tro~) nel sensa di «fuori corso» (per «moneta corsiva» nel
sensa di «moneta corrente» : GDLI corsivo 4). Aggiustamenti alIa lun-
ghezza del verso potrebbero essere ottenute con correzioni del tipo
Moneta di corame trovo allato (accenti di 6", 9", 10") 0, ancora meglio,
Moneta di corame trova allato (accenti di 6", 8", 10") con un presente
storico.
67. «AI fianco », «con se» (GDLI allato 3).
68. Vale «che gli era toccata per la sua vitella », «che aveva avuto in
cambia della sua vitella ».
69.« In segreto », «segretamente».
70. Verbo singolare con soggetto plurale (ROHLFS§ 642), motivato
anche dalla rima in -orto. Fu marta eoorma passiva del verba morire =
«uccidere ».
71. Forma arcaica e dialettale per dentro (con metatesi di r : ROHLFS
322): si vedano anche XXIII, 5 e XXIV; 1 (GDLI dentro), ma dentro in
XIV; 7.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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224
E. BARBIERI
(corpi vessatida spiriti maligni,
muti, lebbrosi, sordi, ciechi, attratti76
che in un momento ognun fu fatto sano)
saria tenuto il dir bugiardo e vano.
XXVII Ma pur, perche la fede dar si vuole
senzaveder miracoli ammirandi,
dico che Quel che fece il mondo e il sole
e ch'e Signor sopra Ii signor grandi,
dell'aspro peccator gl'incresce e duole
quando e sepolto negli error nefandi :
gli mostra per correggerlo alcun segno
accio si emendi e sia poi del ciel degno.
XXVIII E come dice il veTo n molte carte,
come piacque a Colui che mai non erra77
dei corpi a pes078ur fatte due parte:
una parte in SanPietro si sotterra,
l'altro dal primo il Papa 10disparte
a Santo Paolo, ch'e fuor della terra79;
e Ie lor teste a San Giovanni Laterano
Ie pose con sua propria manoso.
XXIX Prego questi duoi santi con fervore,
sanPietro e Paulo apostoli beati,
che con Ie braccia aperte al Creatore
preghin che al fine in ciel siamo salvati
e che non guardi al nostro grande errore,
E la Madre del ciel ancor pregate,
che preghi il Figlio che ne dia vittoria
e 'n l'altro mondo la sua santa gloria.
76.« Storpi », «paralitici» (GDLI attratto 5).
77. 11verso ricalca il dantesco come Livio scrive, che non erra (Inf.
XXVIII, 12, in rima con terra e guerra), ma si tratta di una espressione
formulaTe hen attestata anche altrimenti (A. MARTINA,«Livio », in
Enciclopedia dantesca,II, Roma 1971,p. 674).
78. «Con grande cura e attenzione» (GDLI peso 31).
79. « Che e fuori citta» : S. Paolo fuori Ie Mura.
80.11verso 7 e ipermetro di 2 sillabe, il verso 8 invece ipometro, sempre
di 2 sil1abe ma si potrebbe forse correggere <egli>e pose...)..
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 221/295
PierreGISEL
Universitede Lausanne
APOCRYPHESETCANON:
LEURS RAPPORTS ET
LEUR STATUT RESPECTIF
UN QUESTIONNEMENT THEOLOGIQUE
The differencesbetween he biblical canon and the apocryphal writings
need to be analysed.Otherwisewe risk to reduce he biblical texts eceived
by the church to a simple collection of historically developed exts a col-
lection to which the canonical and extra-canonicalwritings belong, f we
take into consideration he samecriteria. In this case,we will deprive our-
selvesof the possibility of understanding Christianity in its true nature,
both from a theologicalperspective s well as rom a point of view of the
religious studies. n analysing the differences between he biblical canon
and the apocryphal writings we are ed on the one hand to reflectingon the
institutional reality of Christianity, and on the other hand on the meaning
of this institutional reality in history. For those reasonsa seriesof argu-
mentshave been proposed,seeking o lay down a platform for a debate.
La dualite canon/apocryphesdoit etrepensee.Sansquai on s exposea
resorber es textesbibliques ecclesialement efus a la pure diversite d une
production historique multiforme et a laquelle effectivement les textes
canoniques et extra-canoniques ressortissent selon des donnees iden-
tiques. On se prive alors de la possibilite de comprendre Ie christianisme
comme tel, rant en perspectiverigoureusement heologique quesous un
angle de sciences religieuses. Penser la dualite canon / apocryphes
conduit a reflechir au fait institutionnel qu estproprement Ie christianis-
me et a ce qui s y indique d une forme d insertion dans histoire. Une
serie de thesessont ici proposees,visant a baliser et a susciter un debar.
Introduction.
Uneserie de constats.
De nombreux textes -retrospectivement dits «apocryphes »,
avec es connotations de repulsion ou de seduction qui vont s at-
Apocrypha 7, 1996,p. 225-234
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 222/295
226
P.GISEL
tacher a cette expression..:. circulent aux premiers siecles du
christianisme :
-ils sont contemporains des textes qui vont se trouver « cano-
nises » par l Eglise, au lye siecle (ou au llle deja pour les quatre
evangiles), canonisesde fait sinon par decision conciliaire (celle-
ci ne tombera qu a Trente, face et en riposte ala Reforme pro-
testante) ;
-ils peuvent meme, pour certains d entre eux, etre plus
anciens;
-ils sont expressions et vecteurs de la foi des communautes
« chretiennes » ; ils ont, au lIe siecle par exemple, un statut et des
fonctions analogues a ceux des textes qui seront ulterieurement
reconnus comme « canoniques» ;
-ils sont asseznombreux (par exemple, au lIe siecle, ine dou-
zaine d evangilesl a cote de Matthieu, Marc, Luc et Jean) ; ils
apparaissent bien repandus, aussi connus que les futurs textes
canoniques et utilises par les memes auteurs2
-ils peuvent etre independants des textes qui deviendront
« canoniques», voile fondes sur une tradition plus ancienne3
-s ils sont l objet d entreprises de reecriture constante ou de
modifications repetees, c est egalement Ie cas, et de la meme
maniere, des extes appelesa devenir « canoniques».
Au total, on pent des oTsconclure, avec Helmut Koester, qu il
taut aller «a l encontre de theories qui veulent que seuls les
textes canoniques aient eu autorite a enregistrer l histoire des
tout debuts du christianisme. Celie histoire est beaucoup plus
fiche que ne Ie suggerent es textes canoniques beaucoup plus
interessante aussi parce que plus diversifiee dans ses options
theologiques »4.
On pent lire egalement, dans Ie meme sens, d Eric Junod:
«Le principe selon lequel notre connaissancede la foi des pre-
miers chretiens et des traditions anciennessur Jesus doit exclusi-
1. Ct. Eric JUNOD, Les ecrits apocryphes une concurrence heretique
aux ecrits bibliques ? », in : Sciences.. aison et deraisons cours general
public de I Vniversite de Lausanne), Lausanne, Payot, 1994, p. 18 et
Helmut KOESTER, Evangiles apocryphes et evangiles canoniques »,
in: Helmut KOESTER t Franl;ois BOVON,Genesede [ Ecriture chretien-
ne, Turnhout, Brepols, 1991,p. 59-106,p. 66.
2. Ct. Helmut KOESTER,bid., p. 66.
3. Helmut KOESTER,bid., p. 89.
4. «Vne production de la communaute chretienne : leg paroles du
Seigneur», in: Helmut KOESTER t Franl;ois BOVON,Genesede [ Ecri-
lure chretienne, Turnhout, Brepols, 1991, p. 23-58, p. 56 (postface de
1986) ct. aussi«Evangiles apocryphes», p. 98.
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APOCRYPHESETCANON:
LEURS RAPPORTS ET LEUR STATUT RESPECflF
227
vement s appuyer sur les ecritures canoniques est un a priori
insoutenable du point de vue historique »5.
Au total toujours, il taut donc abandonner es jugements qui,
des Ie lye siecle surtout, dans l Eglise et non sansanalogies,des
Ie XYIIIe, dans la critique historico-philologique, ont tendu a
deprecier les textes dits apocryphes (ceux des premiers siecles
j entends, et pour leur majorite) comme reuvres de
«faussaires »6, comme textes «inauthentiques» et «menson-
geTs», marques d « influences religieuses etrangeres» au chris-
tianisme, de «qualite mediocre» ou faisant abusivement place
au «merveilleux », qui «inflechiraient »7entin, negativement, Ie
message riginaire.
Au total encore et entin, il taut se departir de la vision -ana-
chronique -partant d un ensemble de textes canoniques et d un
ensemble postule d apocryphes -les «Apocryphes du Nouveau
Testament »8 , comme s ils pouvaient delimiter deux champs
differents et separes.
Positivement, on dira donc que se tient au depart une plurali-
te, irreductible, et qu elle est a inscrire dans un grand jell de
«recomposition religieuse », sur Ie fond d une mutation du
judalsme, d une rencontre avec I Antiquite dite tardive et d une
reference a une figure nommee Jesus.
Questionnement.
De cette serie de cons ats sourd un questionnement. II est
sous-jacent,et irrepressible a mOll sellS, haque fois qu on s inte-
resse,a a litterature apocryphe dans l orbite de la theologie ou
de l Eglise, mais hors de l Eglise aussi: dire «apocryphe» sup-
5. Art. cit., p. 24. Ct. egalement«Le mystere apocryphe ou leg richesses
cacheesd une litterature meconnue », in : Le mystere apocryphe, Jean-
Daniel KAESTLIet Daniel MARGUERATed.), Geneve, Labor et Fides,
1995,p. 9-25,p. 25.
6. Ct. Eric JUNOD, Les ecrits apocryphes tine concurrence heretique
aux ecrits bibliques ? », p. 9 (et ct. p. 13). Ct. egalement Helmut
KOESTER,Evangiles apocryphes », p. 61.
7. Ainsi France QUERE,dans l introduction a Evangiles apocryphes
(Points-sagesse),Paris, Seuil, 1983, critique par Jean-Daniel KAESTLI,
«Les ecrits apocryphes chretiens. Pour tine approche qui valorise leur
diversite et leurs attaches bibliques », in : Le mystereapocryphe,p. 27-
42, p. 28.
8. Ct. Eric JUNOD, Les ecrits apocryphes tine concurrence heretique
aux ecrits bibliques ? », p. 12; p. 13, n. 12 (avec indications bibliogra-
phiques); p.16.
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228
P. GISEL
pose un rapport a «canonique », favorable ou defavorable, cri-
tique, ouvertement ou secretement egitimant, etc.
Ce questionnement peut s enoncer ainsi : la canonisation de
nos textes des loTs bibliques est-elle arbitraire ? La question se
renforce encore de ce que l on sail de son caractere tardif, hesi-
tant parfois (cf. par exemple l Apocalypse de Jean ou Ie Pasteur
d Hermas9), et de ce que l on soup~onne d interets institution-
nels (donc de pouvoirs). Ne faut-il pas des loTs, pour Ie moins,
etargir un champ abusivement reduit et marque d une dichoto-
mie relevant de procedures deologisantes ?
Poursuivons interrogation. Mais non ici pour enumerer; plu-
tot pour approfondir.
Que faut-il elargir ? Le champ de nos sources? Assurement ;
mais sources de quoi ? d un evenement «originaire », place au
depart du christianisme, Jesus par hypothese, ou selon les
auteurs, un « kerygme» ?
Ou faut-il plutot dire que no us devons elargir nos sources
quant a la connaissancedes debuts du christianisme : des temps
et des conditions de sa constitution? mais, dans ce cas, quellien
suppose-i-on alors a Jesus? plus precisement quel statui res-
pectif attribuons-nous -de fait ou par decision reflechie -a la
figure de Jesusd une part, a ce qui est proprement Ie christianis-
me de l autre ?10
C est exactement sur ce carrefour de questions que doit a moo
sens prendre corps la reflexion touch ant les rapports entre
« apocryphe » et « canonique ».
Sur la base de la mise en place proposee ici en introduction -
reprise d une selie de constats et ouverture ou esquisse d un
questionnement -, je vais proposer a la discussionune selie de
theses.Ce soot des theses heologiques, mais e pense qu on n y
echappe ustement pas, des loTs qu on a affaire au couple apo-
cryphe-<:anonique; et on y a affaire, qu on soil croyant ou non,
theologien ou non, des oTs qu on veut aborder et comprendre Ie
christianisme comme phenomene religieux : hOTS e cela, on a,
au plus, une «litterature chretienne primitive », non des «apo-
cryphes» et des textes «canoniques », mais du coup Ie christia-
nisme comme tel n existe plus (il est dissout, entends : au titre
de fait historique meme).
9. Ct. par exemple Ie texte d introduction a la collection de poche
« Apocryphes » des editions Brepols, p. 6.
10. Pour un debat et une mise en perspective a ce sujet, e me permets
de renvoyer a mon dossier «Jesus (images de»> (redige en collabora-
tion avec Serge MOLLA), in Encyclopedie du protestantisme, Paris -
Geneve, Cerf -Labor et Fides, 1995.
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APOCRYPHESETCANON:
LEURS RAPPORTS ET LEUR STATUT RESPECfIF
229
Theses.
These .
II nons taut ratifier, sons un certain aspect out au moins, qu il
n y a effectivement pas de «difference intrinseque »11entre
textes apocryphes et textes canoniques. II n y a pas de criteres
prealables, de type historique, qui puissent egitimer, quasiment
de l exterieur, la repartition en «canoniques» et «hors-canon» :
ni la proximite d un evenement originaire (variante : que Ie
texte soit temoin « authentique » ou non, au gensde ce mot chez
leg historiens), ni l usage dans Ie deploiement de la foi, ni Ie sta-
tut litteraire (son integrite, etc.) ou historique (son auteur, etc.).
These.
La difference entre ces textes tient centralement a leur inser-
tion dans e canon. Dans ce statut, des lors lies a cette collection
-cette dispositiow2 et cette cloture -, ils ne soot plus Ius de la
meme maniere. La critique historico-philologique a d ailleurs pu
dire -a raison a son niveau -que ces textes risquaient des lors
de ne plus etre compris (ainsi Franz Oberbeck par exemple13).
Personnellement, je pense que la lecture de tel ou tel apo-
cryphe -meme la lecture historico-critique nee avec Ie XVI lIe
siecle et epanouie au XIXe -serait differente si Ie texte en cause
avait prig place dans Ie canon, comme e pense, reciproquement,
que la lecture de notre evangile johannique par exemple serait
egalement autre si Ie texte etait partie intrinseque d un canon
gnostique.
These3.
La canonicite est line decision d Eglise. Elle ressortit comme
telle it l institutionnel, avec ses eux propres et dans ine fonction
donnee.
lL Ct.l introduction deja citee a la collection de poche «Apocryphes »,
p.6. ,
12. Y compris leurs titres, ct. Fran~ois BOYaN,«Evangiles synoptiques
et Actes apocryphes des Apotres », in : Helmut KOESTER t Fran~ois
BOYaN, Genese de [ Ecriture chretienne, Turnhout, Brepols, 1991, p.
107-138, p.113.
13. Ct. ibid., p. 109.
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230
P.GISEL
En tant que canonique -fait d Eglise ou d institution -, l Ecri-
ture occupe e lieu de l origine, tout en etant un phenomene his-
toriquement second.
These 4.
Que Ie lieu ou doit etre reconnue la verite, Ie lieu ou elle est
dite et re<;ue,gait une Ecriture canonique est un element cardi-
nal de l economie proprement chretienne.
Se trouve en effet notamment sanctionne ici et ainsi -par
l etablissement d une collection de texteset de textes canonises
au gre d une cloture -qu en christianisme justement, la verite
passe intrinsequement par un temoignage qui se noue au gre
d une reception active et productrice (Ie temoignage est texte,
avec eg eux de l expression, des projections imaginatives ou des
subversions symboliques qui s y cristallisent, comme avec leg
figures qui s y mettent en scene)et un temoignage nscrit dans a
difference temporelle que marque Ie fait Eglise (I institution est
insertion dans Ie temps, appelee par Ie deploiement temporel et
regulant sesdifferenciations).
A ce double titre -Ie texte comme temoignage productif et
figuratif, Ie recueil comme donnee institutionnelle -, la verite
proposee par Ie christianisme est irreductiblement et intrinseque-
ment historique : elle renvoie a une origine autre ou differente
(en «amont»), et elle est en appel de reprises autres ou diffe-
rentes (en « aval »)14.
These 5.
Le christianisme a proprement parler -la forme et Ie type
religieux qui sont leg siens -se cristallise, du lie siecle au lye
environ, dans Ie champ de 1 «Antiquite tardive». II en propose
une synthesepropre15.
14. Sur certains de ces points, je me permets de renvoyer a mes deux
ouvrages, Croyance incarnee. Tradition, Ecriture, canon, dogme,
Geneve, Labor et Fides, 1986 (chap. 2 a 4) et L Exces du croire.
Experience du monde et accesa soi, Paris, Desclee de Brouwer, 1990,p.
40-47.
15. Je renoue ici avec la vision de Ernst Troeltsch, cf. ma contribution
«Troeltsch : un theologien pour aujourd hui ? », in : Histoire et theolo-
gie chez Ernst Troeltsch,P. GISEL ed.), Geneve, Labor et Fides, 1992,p.
383-414.Pour une reference plus recente,cf. notamment les travaux de
Peter R. L. BROWN, par ex. Genese de l Antiquite tardive, Paris,
Gallimard, 1983.
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APOCRYPHESTCANON:
LEURS RAPPORTS ET LEUR STATUT RESPECrIF
231
Le christianisme it proprement parler n est donc pasJande (ni,
it proprement parler toujours, initie) par Jesus. I ne l est ni de
fait (tout Ie monde Ie sait, au mains chez es ferns d histoire...),
ni de droit (se tiennent lit peut-etre des ambivalences qu il
importe justement, it man sellS,de clarifier).
Concretement : dans et selon la forme et Ie type religieux
qu est Ie christianisme, c est l Ecriture qui est canonisee,non les
faits et dits de Jesus. On, autrement exprime : tine parole apo-
cryphe mais historiquement «authentifiee» comme parole de
Jesus est, en christianisme, sans aucune valeur canonique (elle
pent etre de grand interet, mais lateral, ce qui ne vent pas dire
sans effet ni sans mportance, j y reviendrai, notamment en these
9) ; reciproquement, tine parole mise dans la bouche de Jesus
par les textes de l Ecriture biblique mais reconnue historique-
ment « nauthentique » a -et doit avoir, en christianisme-pleine
et entiere valeur canonique.
These 6.
Le fait canonique suppose une pluralite. II tranche sur cette
pluralite, mais pour en permettre une regulation. Du meme
coup, il reclamecette pluralite ; il en a besoin pour etre compris
et pour fonctionner seton ce qui lui est imparti : selon ce qui Ie
legitime et Ie limite.
Concretement, les textes canoniques et les textes apocryphes
sont habites des memes questionnements et ressortissent aux
memes champs de references: comment comprendre et mettre
en scene a croix, la resurrection et la glorification de l Envoye
ou du Sauveur ? Quelle est a verite de Jesuset qu entendre par
revelation? Qu en est-il d un rapport au passe et au nouveau,
d une reception, d une memoire et d une recreation? Ou qu en
est-ilIa du corps et du temps, et qu en est-iI, la toujours, de
Dieu ? etc.
These .
Oublier Ie statut du Canon -un fait institutionnel a visee regu-
lative -comme oublier la pluralite, initiale et toujours a nouveau
aussi bien donnee que requise dans l histoire, conduit a une
ideologisation.
Sur une face, c est Ie temoin qui se trouvera en effet deposse-
de de son lieu et de sa force propres (historiques et singuliers),
l espace d une difference d avec l origine se trouvant obture (ou
tout au moins non valide) au risque d une fixation idolatre sur ce
qui devrait autoriser directement et fonder im-mediatement Ie
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232
P. GISEL
texte re tu (Ie texte est rapporte ou replie sur un moment tout a
la fois historiquement inaugural et verite originaire et finale).
Sur l autre face, c est Ie fait canonique qui se trouve empeche de
faire valoir sa proposition propre (dirimante et ouvranteI6), la
problematique me-me ont il repond s etant evanouie au profit du
seul enonce textuel et de sa polarisation croyante (qu elle se
reprenne au titre d un fondement supranaturaliste, en regime
catholique ou fondamentaliste, ou d un «kerygme» originaire
ou d une «essencedu christianisme », en regime neo-protestant,
«theologie dialectique» heritee de Karl Barth et Rudolf
Bultmann comprise).
These .
Un canon ou une absencede canon ne va pas indifferemment
de pair avec tel ou tel type, telle ou telle forme religieuse, mais
affecte au contraire la verite meme qui est en ell.
Concretement, metlre sur Ie meme plan textes canoniques et
textes apocryphes, c est s empecher de pouvoir cerner et com-
prendre ce qu est Ie christianisme -son identite, son statut et ses
modes de fonctionnement, etc. -, meme en perspectivede strictes
sciences religieuses et non necessairement de theologie.
Concretement toujours, c est en effet l aveu soil que seule une
enquete quant aux circonstanceset autres donneeshistoriques est
ici pertinente (releguant du coup a l ideologique ou au prive ce
qui se tient au creur du religieux comme tel: Ie croire, ses ormes
et ses regulations), soil que tel evenement ou donnee historique
serait comrne tel de valeur religieuse (antecedence,ou commen-
cement historique, et origine radicale faisant alors nombre sous
pretexte d incarnation...17).A moins, tierce possibilite, que l on
sanctionne -sans forcement Ie savoir ni l assumer -Ie religieux
que peut vehiculer apocryphe laissea lui-meme, hOTSnstitution,
et qui, comme tel, peut avoir une grande valeur religieuse, mais
selon un autre type -et donc une autre verite -que Ie type -et la
verite -strictement et simplement chretiens une verite qui n est
pas dans un rapport a l histoire du meme mode que l est la verite
liee au christianisme comme tel (avec, ci, sa donne irreductible-
ment institutionnelle) : Ie rapport au cosmos, e statut de l etre
croyant et son rapport au vrai ou a l origine different.
16. Un canon comme cloture tranche et met it distance.
17. Comprise de fac;on supra-naturaliste.
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APOCRYPHESETCANON:
LEURS RAPPORTS ET LEUR STATUT RESPEcrIF
233
These .
Faire voir la specificite d'un canon, c'est Ie restituer a une plu-
ralite, potentielle ou effective, des types qui donnent forme et
consistanceau religieux : un canon chretien n'est pas un canon
gnostique, manicheen, etc.18. ire sa proposition -ses enonces ,
ce sera du coup faire resonner es questions, es references et les
registres communs dont il repond a sa maniere. Et ce sera, du
meme coup, aller au-dela de ses seuls enonces19 t dire -sur
l'axe de donnees que d'aucuns appelleront largement anthropo-
logiques2OIe rapport a l'absolu, au temps et au corps, qui s'y
nOlle. Ici, la lecture des apocryphes est requise, aut pour cerner
ce qu'est Ie christianisme comme tel que pour la rectitude de
l'exercice theologique.
Concretement, lire les apocryphes ne peut que relancer la
reflexion -salutaire -sur ce qu'il faut entendre par revelation,
contre toute consideration de l'enonce canonique dans son auto-
suffisance (son idolatrie possible), dramatiquement hOTS mys-
teTe»21et en fin de compte deconnecteedes realites anthropolo-
giques -culturelles et cosmiques de touS22.
18. Ni quant a la selection, ni quant a l'organisation (cf. par exemple : la
structure tripartite du Canon juif : Torah -Prophetes -Ecrits ; ou la
dualite du Canon chretien, avec son jeu d'opposition et de renvois :
Ancien et Nouveau Testament; pour leg Manicheens ou leg gnostiques,
ct. d'autres contributions du present congres).
19. En l'occurrence : culturellement syncretistes.
20. Que cette anthropologie gait de type philosophique ou religieux,
vis ant leg structures permanentes de l'homo religiosus (cf. par ex.
Michel MESLIN, L'experience humaine du divino Fondement d'une
anthropologie religieuse,Paris, Cerf, 1988ou leg travaux de Julien RIES)
ou qu'elle gait dite «culturelle », attentive aux transformations et accul-
turations historiques (cf. par ex. Melville J. HERSKOVITZ,es basesde
l'anthropologie culturelle, Paris, Payot, 1952, Roger BASTIDE,
Anthropologie appliquee,Paris Payot, 1971 ou Mondher KILANI, par ex.
La construction de la memoire, Geneve, Labor et Fides, 1992), ou enco-
re tine anthropologie qui vise a dire leg registres et leg fonctionnements
mis a jour par leg scienceshumaines.
21. On touche la Ie service que petit de fait rendre au christianisme la
lecture des apocryphes aujourd'hui : nous reouvrir a tine dimension
proprement spirituelle.
22. La aussi, a lecture proposee des textes «apocryphes» petit rendre
aujourd'hui un service au christianisme Ie premunir contre des entations
de replis sectarisants ur sesdonneespropres souspretexte d'identite.
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234
P. GISEL
These10.
Deux precisions heologiques finales:
(a) En christianisme a proprement parler, Jesus a Ie statut
d une reference, a partir d un present des Ie depart et irreducti-
blement different, et des Ie depart et irreductiblement a distance
(c est Ie present de l aujourd hui croyant). Jesus essortit des oTs
foncierement ala « mise en scene»23.I est igure (proprement, il
n est donc ni fondateur ni commencement)24: il est investi
comme image, renvoyant a une dramatique du monde25.
(b) Le christianisme vit foncierement d un jell de memoire, et
d une memoire prise dans la matrice d une ecriture et d une
reecriture (Midrash; corrections, imitations; etc.z6) s y donne
l intrigue d un passage,passaged un ancien a un nouveau qui,
loin de disqualifier ou de remplacer ancien, Ie suppose et y ren-
voie a jamais. C est la Ie secret de la dualite d une tradition et
d une Ecriture. La tradition dit une condition historique donnee,
dans laquelle on est pris, de toujours et a jamais (c est Ie lieu 011
nait l homme27) mais la tradition chretienne est d un type tel
qu elle requiert une Ecriture -un canon -qui tranche et permet
que sa pluralite ou son histoire d une naissance oujours repri-
se28 e soit pas dissemination ou pure prolongation, comprise
sur Ie mode d une vie naturelle, mais bien Ie lieu d une naissance
singuliere (on peut, a cet effet, parler de la tradition comme
genealogie .
23. Ct. Eric JUNOD, Le mystere apocryphe », p. 19.
24. Theologiquement, on redecouvrira que Ie christianisme parle du
Christ en termes de mediation (et non de « nature » propre).
25. Theologiquement toujours, rappelons que Ie christianismea pense e
salut comme recapitulation, reprise interne ou subversion,de la creation.
26. Franyois BOVON, rt. cit., p. 127ss.
27. Originairement donc.
28. Pour chacun des croyants d abord, mais egalement, mutatis mutan-
dis, pour Ie deploiement me-me e la realite ecclesiale.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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Marc FAESSLER
Universite de Geneve
KERYGME ET IMAGINAIRE
There is an essential difference between canonical and apocryphal
texts. The comparison of John 20,11-18 with a short passage rom the
«Book of the Resurrectionof JesusChrist by Bartholomew the Apostle»
(8.1-11.3) shows that the apocryphal text (in its hermeneutical status)
loses he power of revelation constitutional of the canonical text (keryg-
matic status).
Une difference essentielleoppose un texte canonique et un texte apo-
cryphe. Le premier se donne dans un statut kerygmatique qui utilise Ie
langage dans sa capacited ouverture symbolique a l Autre. Le secondse
presentedans un statut hermeneutiquequi referme e langagesur un ima-
ginaire du Meme. Le texteapocrypheperd ainsi Ie pouvoir revelantprop-
re au texte canonique. Demonstration en est aite dans une comparaison
entre Jean20,11-18 et un passagedu «Livre de la resurrection de Jesus-
Christ par l apotre Barthelemy» (8.1-11.3).
Les apocryphes out, a l evidence, nourri la piete de nom-
breusescommunautesdans es premiers siecles du christianisme,
malgre l opposition et la progressive marginalisation dont its out
fait l objet de la part des autorites ecclesiastiques.Aujourd hui,
notre interet scientifique tend a rehabiliter ces textes trop long-
temps enfouis dans les oublis de la memoire officielle.
L intention est louable. Mais doit-elle nous conduire a affirmer
qu en definitive «il n y a aucune difference intrinseque entre
canoniques et apocryphes»1 ? Intrinseque voudrait dire ici que
1. Liminaire de la «Collection de poche Apocryphes », in L evangile de
Barthelemy (traduction, introduction et notes par Jean-Daniel Kaestli
et Pierre Cherix), Brepols, Tumhout, 1993,p. 8. Nous soulignons.
Apocrypha 7. 1996.p. 235-241
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 232/295
236
M.FAESSLER
TieD ne differencie dans son essenceun texte retenu dans Ie
canon d un texte considere comme apocryphe. Seulesdes carac-
teristiques secondaires liees aux genres litteraires ou aux cir-
constances historiques constitueraient des marques reperables
d elements distinctifs. Nous pensons devoir nous ecarter d un tel
point de vue, en avan~antque1ques eflexions sur la signifiance
symbolique du langage mis en jeu dans ces deux types d ecrits.
L ecrit biblique se donne dans un statut kerygmatique. Cela
signifie qu en son noyau originaire, l instance enonciatrice qui
traverse les enoncesne se confund pas avec eux, mais rouvre en
eux la question de l Autre. Le texte devient index de ce qu il ne
peut contenir. Il se fait temoin. Ses mots, liberes de leur seule
function d usage dans l imaginaire de la langue, revetent une
function symbolique : au travers des traces qu ils laissent, ils
referent ce qui est dit, a l Autre qui s y entredit, et au sujet
lecteur pris a paTti. Dans l ordre des significations dont releve
toute mise en reuvre d une ecriture, Ie statut kerygmatique du
texte articule une function de signifiance qui ouvre au sujet Ie
chemin de son rapport a l Autre. Kerygme et imaginaire demeu-
rent donc en tension creatrice. Le kerygme, pour s exprimer, ne
peut se passer de l axe imaginaire du langage oil les significa-
tions lient les mots a l objet et aux representations du discours.
Mais il doit en meme temps Ie subvertir par l axe symbolique de
la signifiance pour restituer au langage l ordre tout autre des
sujets qui y paTIent. C est ainsi qu il maintient son pouvoir reve-
lant. Le risque subsiste outefuis que la signifiance s estompe et
se perde dans Ie jeu des significations, notamment si la logique
du discours tend a se clore sur elle-meme en substituant un ima-
ginaire du Meme la oil Ie langage s ouvrait kerygmatiquement
au symbolique de son rapport a l Autre. Les apocryphesencou-
rent largement ce risque.
L ecrit apocryphe se presente en effet dans un statut herme-
neutique. Il prolonge et reinterprete Ie deploiement biblique du
kerygme par une suite de developpements egendaires et vision-
naires. Cela signifie que l instance enonciatrice qui traverse les
enonces tend a se confundre avec eux, dans l elaboration d un
langage qui cherche a faire se recouvrir imaginaire et symbo-
lique. Le texte ne devient plus l index que de son propre conte-
flU. Il ne se fait plus temoin, mais auto-manifestation de lui-
meme. Ses mots reintegrent leur seule function d usage dans
l imaginaire de la langue et se substituent a toute function sym-
bolique. Au travers des traces qu ils laissent, plus rien ne refere
ce qui est dit a l ordre irrepresentable de l Autre et du sujet lec-
teur pris a paTti, sans immediatement Ie rabattre dans l ordre
identificatoire des representations. La subversion des significa-
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237
ERYGME ET IMAGINAIRE
tions par l'axe symbolique de la signifiance echoue. Le texte
perd son pouvoir revelant.
Ce diagnostic relativement severe sur la derive apocryphe
nons fait obligation d'apporter la demonstration d'un exemple.
Nous choisirons un bref passagedu «Livre de la resurrection de
Jesus-Christpar l'apotre Barthelemy}} (8.1 -11.3)2 compare a In
20,11-18 dont il est une large amplification imaginaire. L'interet
de la comparaison vient de ce que la tradition johannique de
l'apparition du ressuscite a Marie-Madeleine se presente deja
comme un double commentaire narratif du kerygme. Ce demier
pent en effet etre mis en evidence par une analyse litteraire
fine3. Voici une disposition graphique du resultat :
3
14
15
Or Marie se tenaitpres du sepulcre,dehors, leurant.
Comme donc elle pleurait, elle se pencha vers Ie
sepulcre
et elle voit deux anges,en blanc, assis,un 1:1a tete et
un aux pieds, 11:1il gisait Ie corps de Jesus.
Et ceux-ci ui disent : -Femme, pourquoi pleures-tu ?
Elle leur dit : -lIs out enleve mOll Seigneuret e ne
sais oil ils l'ont mis.
Ayant dit cela
Elle se touma en arriere et elle voir Jesus,debout.
Et elle ne savaitpas que c'etait Jesus.
Jesus ui dit : -Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui
cherches-tu ?
Elle, pensantque c'etait Ie jardinier, lui dit :
-Seigneur, si tu l'as emporte, dis-moi oil tu l'as mis,
et moi je Ie prendrai.
Jesus ui dit : -Mariam
Retournee, celle-ci lui dit en hebreu : -Rabbouni (ce
qui se dit «Maitre»)
2. Ibidem, p. 143-241.Texte commente : p. 194-204.
3. Nous laissonsde cote la question du lien eventuel, dans In 20, du ver-
set1 avec es versets 11-18.Dans ces demiers, on petit isoler un premier
bloc (1Ib-14a) delimite par les deux chevilles redactionnelles visibles :
« Comme donc elle pleurait... », «Ayant dit cela...». Un second bloc se
detache (14c-16+17) construit autour de «Et elle ne savait pas...» et
dans lequel on constate Ie redoublement de la question «Femme, pour-
quai pleures-tu ?» (15a/13a). En detachant ces deux blocs (et en recon-
naissant en 18c un ajout redactionnel maladroitement accole), on laisse
emerger en lla+14b+18ab une tradition de forme kerygmatique qui est
Ie noyau primitif de l'ensemble. Nous considerons ce qui l'entoure
comme un deploiement narratif du sellSdu kerygme, amplification qui
a pu connaitre tine histoire redactionnelle assez omplexe.
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238 M.FAESSLER
7
Jesus ui dit : -Ne me touche pas Car je ne suis pas
encore monte vers Ie Pere. Va chezmes reres et dis-'
leur «Je monte vers mon Pere et votre Pere, mon
Dieu et votre Dieu ».
Mariam la Magdaleennevient, annonr;antaux disciples:
-J'ai vu Ie Seigneur
£t qu'illui a dit cela.
18
Si les mots en italique ont quelque chance de circonscrire
effectivement Ie premier etat narratif du kerygme, on constatera
d'emblee combien leur signification paradoxale ouvre ala signi-
fiance symbolique de I' Autre. Marie-Madeleine voit Jesus,c'est-
a-dire Ie crucifie. Mais elle Ie voit « debout », indice d'un releve-
ment qui lui echappe4. L' Alterite qui s'entredit ainsi est alors
enoncee kerygmatiquement au suspensde son enigme : « J'ai vu
Ie SEIGNEUR, allusion a la Transcendance rrepresentable du
Nom impronon~able. Avoir vu ce qui demeure soustrait a la vue,
tel est Ie paradoxe. II ouvre l'humain a une position symbolique
nouvelle. Son commencement dans les choses,dans la mise en
lumiere de l'apparaitre, dans Ie langage qui l'ordonne, n'est pas
l'origine sour~ante de sa presence au monde. Celle-ci releve de
l'insaisissable,de ce Don immerite qui se donne de se derober.
De meme que Dieu, s'il s'incarne, n'a son origine ni dans nos
violences mortiferes ni dans nos projections emotionnelles, mais
dans a Parole qui s'en absout en nous rendant temoins. Dans Ie
kerygme biblique de la resurrection, c'est Ie sujet varIant dans sa
relation a l' Autre qui est nstitue, a la brisure de l'imaginaire 011
s'atteste l'insu de l'origine.
La signifiance symbolique ouverte par ce non-savoir para-
doxal va creuserde son echappee e jell des significations dans Ie
deploiement narratif que Ie kerygme suscite (v. 14b-17.18b et
Ilb-14a)5. Elle y parvient avec une economie de moyens remar-
quable. Interrogation sur l'alterite : « Qui cherches-tu ?» (v.
4. Le participe parfait EcrTWTa debout» a comme afTiere-fond semi-
tique en hebreu, arameen et syriaque, la racine qwm utilisee dans Ie
sellSde « relever, ressusciter» cf. Ap 5, 6 : «Je vis ...un agneau,debout
(E<JTI1K6s-),omme egorge... », et Ac 7, 55 : Stephane « vit la gloire de
Dieu et Jesus,debout (EaTWTa),la droite de Dieu ».
5.11 est probable que Ie fecit d'apparition des anges (11b-14a)est poste-
rieur au fecit de reconnaissance 14c-16+17),car il semble forme d'ele-
ments proches du fecit synoptique des femmes au tombeau. 11viserait
un souci d'harmonisation de la tradition et s'appuierait sur un redouble-
ment de la question: « Femme, pourquoi pleures-tu ?» empruntee au
verset 15a.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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239
ERYGME ET IMAGINAIRE
15a)oEquivoque du malentendu relayee par de constantsdouble
sells des mots: Seigneur / celui que j'ai suivi (vo13b), Seigneur /
Monsieur (vo15b), Rabbouni / Seigneur enseignant (vo16b) , ne
me touche pas / ne me retiens pas (vo17a)oSubtile entrelacs de
designations du corps: corps gisant de la depouille du crucifie
«< a ou gisait Ie corps de Jesus» v. 12), corps manquant de la vie
dans a disparition «< is ont enleve moo Seigneur» v. 13b, « si tu
l'as emporte» Vo15b), et finalement corps parlant du crucifie
«< esus ui dit» v. 15a. 16ao 7a)oEnfin, denouement du motif de
la reconnaissance par Ie truchement de la Voix nominatrice
engageant la parole en verite dans Ie pur signifiant du nom
propre, en appelant a la vie du sujet : «Mariam » (v. 16a). En
moins de six versets a signifiance du renversement paradoxal de
la foi au crucifie-Ressusciteest articulee. L'instance enonciatrice
qui parle dans ce texte s'y specifie et specifie celui qui ecoute
comme etant «autre» que tout ce qui est representable, donc
origine dans l'arcane sans representation d'ou la parole vient a
l'humain dans un don qui suscite et re-suscite sanscessesa pre-
sencevivanteoLa narration parvient a indiquer obliquement que
Ie lieu illocalisable du sujet vivant toujours a naitre n'est pas
notre commencementdans es pleurs et leur possible compensa-
tion imaginaire, mais la grotte originaire que Ie Tout Autre creu-
se en nons par Ie manque qui nons rend a la vie dans l'epreuve
de la mort.
Or, si nons nons tournons vers Ie developpement apocryphe
que Ie Livre de la resurrection de Jesus-Christ par l'apotre
Barthelemygreffe sur Jn 20, 11-18,que constatons-nous ? Pour
l'essentiel, une prolixite visionnaire s'exprimant dans Ie genre
litteraire du discours et procedant, comme dans Ie travail du
reve, par deplacements, condensations et figurations. Bien
qu'ancre sur es tenons de la tradition biblique, l'imaginaire tend
a conquerir toute la place au detriment de toute signifiance sym-
bolique qui Ie deprendrait de lui-meme. Tout se passecomme si
une tendance incoercible poussait Ie lissage des significations a
effacer ce qui relie a l' Autre pour lui substituer inconsciemment
un attachement au Meme. La mise en evidence de ce qui est en
jell dans e travail du deplacement,ci, pent eclairerce phenomene.
La substitution de Marie mere de Jesusa Marie-Madeleine est
evidemment un deplacementdecisif. li s'appuie d'ailleurs sur un
leger flottement de la tradition manuscrite du texte canonique6.
6. Outre l'hesitation entre Mapta et la transcription semitique MapLUj.l,
on remarque que In 20 donne successivement : Mapta 1']May8aATlvl'] (v.
1), Mapta (v. 11), MapLUj.l v. 16), MapLclj.l1']MayooATlvl'] (v. 18). La tradi-
tion apocryphe s'est engouffree dans cette mince faille
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240
M.FAESSLER
Mais ill amplifie. En enumerant une liste completee et detaillee
de toutes les femmes qui se rendent au tombeau (Marie de
Magdala etant la premiere nommee, sans specification), l apo-
cryphe met en scene Marie mere de Jesus comme figure de
toutes les femmes (8.1). Cette condensationsubstitue une image
conceptuelle (Marie va devenir « Ie» ventre maternel) a ce qui,
d un actant de la narration (Marie-Madeleine), renvoyait a
l ordre du sujet vivant. Des lars, ce qui dans Ie texte biblique
relevait, SallS e motif symbolique des anges,de l annonce voca-
tionnelle, se trans forme en entretien descriptif entre Marie
(dont l instance du nom propre est iee a une specification esote-
rique) et Ie vrai jardinier Philogene qui vient prendre, en l occul-
tant, la place du non-savoir paradoxal qu occupait Jesus (8.2).
Ce nouveau deplacement permet a Philogene de decrire dans Ie
registre de la representation visionnaire, ce qui, dans la narra-
tion johannique n avait lieu que de se soustraire a la prise de
Marie-Madeleine. La resurrection devient image de la resurrec-
tion. Elle s « idolatrise» pour entrer dans la logique d un dis-
COUTSmaginaire. «Le PeTesortit des hauteurs et de sa tente de
lumiere. 11vint au tombeau du (Sauveur) et Ie ressuscitad entre
les morts» (8.5). Le temoignage se confond avec objectivation.
Mais ce retour au Meme de l imaginable cache une nostalgie
plus profonde, celIe sansdoute de notre propre commencement.
C est pourquoi la mise en scene, par notre apocryphe, du dia-
logue entre Ie Sauveur et Marie va deployer ses arborescences
autour de ce qu il taut bien nommer Ie fantasme d une nostalgie
matricielle.
A nouveau la voix nominatrice qui devrait en appeler a
l ordre du sujet est estompeesous a comprehensionde formules
cryptees (9.1). Mais surtout, Ie rapport Fils / mere devient -a
l egal de la Transcendancedu PeTe la condition de possibilite
de l annonce de la resurrection. La paix est promise «a qui-
conque croira en man nom, et a Marie ma mere, vierge veri-
table, moo ventre spirituel, man tresor de perles, l arche des fils
d Adam...» (9.3). Le corps matriciel de notre commencement
figure tend a recouvrir Ie corps parlant de notre origine infigu-
fable. Et la benediction du ventre de Marie -demandee par elle
(10.1), authentifiee par Barthelemy (10.3), effectuee par Ie
Seigneurpuis par la Trinite elle-meme (10.4) et qui se prolonge-
ra au-dela du trepas (10.6) -vient tres exactement combler la
rupture signifiee dans Ie paradoxe ohannique du « ne me touche
pas / ne me retiens pas »... La au, au creur de la parole qui ren-
voie a l origine insue, on ne se laisse pas toucher par la
Transcendancede l Autre, Ie besoin de saisir, comprendre, tou-
cher la verite no us ramene a notre commencement, ou nous
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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KERYGME ET IMAGINAIRE
241
benissonsce que DOllSmaginons La logique imaginaire qui en
decoule efface Ie reel de la Transcendancesalls une continuite
que notre apocryphe transcrit dans Ie my he d'une conception
virgin ale ou Ie Christ est un etre angelique qui a etabli sa
demeure dans Ie ventre de Marie et qui prolonge sa presence
corporelle de fa~on sacramentelle 11.2 et 11.1).
Cette comparaison d'un texte canonique articule au kerygme
pour en epouser la signifiance symbolique, et d'un texte apo-
cryphe prolongeant Ie donne biblique dans un retour aux seules
ressources maginaires de l'esprit et du langage,pose a question
de fond. N'avons-nous pas affaire dans Ie secondcas a un recou-
vrement de la force revelante novatrice qui, dans Ie premier cas,
s'est elle-meme imposee au choix canonique ? Camille si la
resistance en DOllS 1'« in-ouI» de la revelation christique pui-
sait sanscesse,de fa~on refoulee, dans les ressourcesmemes du
langage qui a servi a la communiquer. Le paganismenature de
notre etre-au-monde, la nostalgie archalque d'etre tout pour la
mere et en elle, nos echouementsa vivre Ie manque comme un
appel a quitter la terre natale pour advenir dans a parole, toutes
ces dimensions secretesen DOllSet d'autres encore -peuvent
a tout moment investir notre langage et Ie transformer pour sub-
tilement refuser l'heritage revelant. L'apocryphe temoignerait
de cette resistance,malgre et en depit de son apparence eligieu-
se. Notre tache serait alors d'en user a contrario, pour faire res-
sortir l'originalite du kerygme et de son premier deploiement
dans es ecrits canoniques.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 238/295
Walter REBELL
Universitede Lausanne
LESAPOCRYPHES-TEXTES
CONCURRENTIELS DU
NOUVEAU TESTAMENT
Every text acts in a particular way on its reader; comparing the
Apocryphon of John, the Epistle of Barnabas and the Gospel of the
Hebrews with New Testament exts, he author analyses his impact and
concludes that a certain number of apocryphal texts functioned -or
might have unctioned -in the same wayas canonical texts.
En s interrogeant sur les effets de l ecrit sur le lecteur -La pragmatique
du texte , cette contribution compare,a titre d exemples, Apocryphon
de Jean, la Lettre de Barnab6 et l Evangile des H6breux avec es textes
du Nouveau Testament our arriver a la conclusion qu un certain nom-
bre de textesapocryphesont eu -ou auraientpu avoir -les memes onc-
tions que les ecrits canoniques.
En qualifiant les apocryphes -ou plutot : un certain nombre
d ecrits apocryphes -de «textes concurrentiels du Nouveau
Testament», e ne pense pas a la definition classique mais faus-
se) que voici : Les apocryphes essaientde remplacer ou de sur-
passer es ecrits du Nouveau Testament.Telle n est pas man opi-
nion, car a l epoque de la redaction des apocryphes es ecrits qui
composeront plus tard Ie Nouveau Testament n avaient pas
encore accede au statut normatif qu ils ant aujourd hui pour
nous. On pouvait librement ecrire des textes, sans prendre en
compte un canon de textes saints et intouchables.
Le point de depart de ma reflexion est a fonction theologique
et sociologique d un texte -que ce soit un texte neotestamentai-
re ou un texte apocryphe. Un texte a des effets, il agit ; un texte
est formateur et exerce une influence sur la communaute qui Ie
lit. En part ant de ces effets, on peut comparer les textes apo-
Apocrypha 7, 1996,p. 243-247
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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244
W. REBELl
cryphes et ceux du Nouveau Testament pour decouvrir qu il y a
des ressemblances. Les apocryphes -ou plutot : un certain
nombre d entre eux -ont les memes fonctions theologiques et
sociologiquesque les ecrits neotestamentaires.
Pour mieux comprendre comment un texte agit sur nons, ses
lecteurs, j aimerais inserer ici quelques reflexions hermeneu-
tiques en me basant sur l reuvre de Paul Ricreur. Ricreur parle
souvent du «monde du texte ». Pour Ricreur un texte est une
proposition de monde, d un monde que e peux habiter en y pro-
jetant une de mes possibilites es plus profondes.
M inspirant de cette idee, j ai fait -il Y a quelques anneesdeja
-des recherches sur l Evangile de Jean, et j ai decouvert que cet
ouvrage cree vraiment un monde, un monde sui generis.Dans
l Evangile deJean on pent vivre.
Un texte qui est une «proposition de monde» -pour
reprendre la formule de Ricreur -construit une realite et nons
invite a l habiter. Ce texte a une force enorme. Il nons attire, et il
structure par son potentiel semiotique notre fa~on de percevoir
Ie monde et de nons regarder nons-memes.Pour finir, nons ne
pouvons plus no us passer de ce texte. Nous devons y revenir
encore et encore pour nons confirmer dans nos convictions.
C est Ie signe que Ie texte nons a vaincus. Il definit maintenant
qui nons sommes, il etablit notre identite ; il determine egale-
ment de quelle maniere se compose notre realite, Ie monde spi-
rituel que nons habitons.
Pour ma part, je dois confesserque je me trouve -de la fa~on
que je viens de decrire -sons l influence des ettres de Paul et de
l Evangile de Jean. Sansces ecrits, je serais perdu, je serais sans
orientation. Je depends completement de ces textes. C est mOll
destin de vivre pour toujours avec eux -ainsi que de leur consa-
crer mOll potentiel de travail.
Voila comment un texte pent agir sur nons. Et cela ne vaut pas
seulement pour les textes du Nouveau Testament. C est egale-
ment Ie cas pour un certain nombre d ecrits apocryphes. Eux
aussi peuvent developper une force enorme et orienter notre
perception du monde et de nous-memes.Aussi sont-ils de veri-
tables textes concurrentiels du Nouveau Testament. C est ma
these principale.
Un texte pent donc construire un univers semantique et nons
inviter, voire nons forcer, a y vivre. N importe quel texte n a pas
cette capacite. Le texte qui construit un monde pour qu on y
vive doit avoir une consistance itteraire telle qu elle nons force
a quitter notre propre conception du monde et a suivre celIe du
texte. Ce texte s impose par l interaction de sesstructures semio-
tiques avec nos structures psychiques.SenIle texte qui arrive a
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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TEXTES CONCURRENnELS I1IU NOUVEAU TESTAMENT
245
etablir cette interaction peut gagner de l influence sur DOllS.En
lui, DOllSDOllS etrouvons Dolls-memes.Et lui, de son cote peut
DOllSmontrer Ie chemin et no\ils y accompagner. li en va de
meme pour les relations humaines : ce ne sont que certaines per-
sonDesqui DOllS ttirent et que I1lous ommespreis a suivre. Au
fond, leur attirance, l influence qu ils exercent sur DOllS, e peut
s expliquer ; elle Testeun mystere.
Quittons maintenant ces reflexions hermeneutiques pour par-
courir quelques textes apocryphes. J aurais aime vous montrer
egalement comment un texte du Nouveau Testament -par
exemple l Evangile de Jean -fonctionne, comment il s impose et
DOllS ttire. Mais Ie temps a ma disposition ne suffirait pas; je
me limiterai donc aux «textes concurrentiels du Nouveau
Testament », aux apocryphes, et commencerai par l Apocryphon
de Jean.
L Apocryphon de Jean DOllSest transmis par la bibliotheque
de Nag Hammadi. On y a trouve trois versions differentes de ce
texte. Une quatrieme DOllSest donnee par Ie Papyrus de Berlin
8502. Avec l Apocryphon de Jean, la gnose a cree un ouvrage
capital qui exprime bien ses pensees et sa theologie. Plusieurs
generations de gnostiques ont vecu avec ce texte ; ils y ont trou-
ve leur propre definition et celie de leur perception de Dieu et
du monde. lis sont egalement ntervenus sur Ie texte -ce qui est
un signe de l importance que l on lui accorde : on s occupe de
lui.
Pour une certaine communaute (ou plutot : pour un cercle de
communautes), l Apocryphon de Jean a joue Ie me-me ole que
l Evangile de Jean pour sa communaute : toute la vie se basait
sur ce texte. Et l Evangile de Jean, lui aussi, a ete souvent retra-
vaille, complete, change. Du point de vue de la fonction qu ils
ont dans la communaute, l Evangile de Jean et l Apocryphon de
Jean sont des textes concurrentiels. Grace a ces deux textes, des
gens ont trouve leur cadre de vie.
Je Ie repete : n importe quel texte ne peut doDDerun cadre a
to ute la vie; l Evangile de Jean Ie peut ; ou l Apocryphon de
Jean Ie pouvait. Mais -pour prendre un exemple -Ie commen-
taire d Origene sur la lettre aux Romains n a pas cette capacite.
L Apocryphon de Jean raite presque tOllS es sujets de la theo-
logie, de la creation jusqu a la redemption. Tout ce que Ie
croyant doit savoir, ille trouve ici, il n a pas besoin de chercher
ailleurs, de consulter d autres textes. Ce n est cependant ni
l etendue du texte ni la variete des sujets traites qui font que Ie
texte s impose avec autant de vigueur. Cela tient plutot a sa psy-
chagogie.
L Apocryphon de Jean presente un systememythologique qui
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246
W. REBELL
est a la fois fascinant et absurde. J ai essayede classer e texte,
d y trouver un ordre, d en decrire Ie fil conducteur. Cela m a pris
plusieurs jours et je ne suis pas content du resultat de man tra-
vail. J ai eu l impression que Ie texte vent etre confus et que c est
par son desordre qu il no us captive. Petit a petit, il nons
encercle. Par beaucoup d allusions de toutes sortes -qui avaient
bien evidemment plus de sens pour les lecteurs de l epoque qui
partageaient l environnement socio-religieux de l auteur que
pour nons aujourd hui -Ie texte nons force a nons enfoncer tou-
jours davantage dans Ie monde qu il construit. Parce qu il a cette
capacite, il est un texte concurrentiel du Nouveau Testament.
Autrement dit : l Apocryphon de Jean savait doDDerune base de
foi et de vie a sa communaute.
En cherchant dans l Apocryphon de Jean Ie mythe gnostique,
tel qu il a ete reconstruit par Bultmann et Jonas, la recherche
moderne s ecarte du texte et se fourvoie. Ce mythe n a jamais
existe. Pour comprendre un texte comme l Apocryphon de Jean,
il taut lui appliquer une analyse pragmatique qui cherche a iden-
tifier Ie jell que Ie texte joue avec Ie lecteur afin de Ie captiver et
de l encercler. C est seulement lorsqu on approche Ie texte de
cette maniere qu on comprend sa structure «chaotique ».
J en veux pour preuve un autre exemple d un texte concurren-
tiel du Nouveau Testament: la Lettre de Barnabe. Cet ecrit n a
TieDde gnostique, ce qui montre que man approche de la littera-
ture non-canonique ne se limite pas aux documents gnostiques.
La Lettre de Barnabe n est pas vraiment une lettre, mais plu-
tot un traite religieux provenant d une ecole theologique, ecrit
par un auteur sans grande envergure, par un petit savant poin-
tilleux. Cependant, elle presente une conception de la foi qui
aurait pu devenir dangereuse pour l eglise. Pendant un certain
temps, la Lettre de Barnabe a occupe Ie meme rang que les ecrits
du Nouveau Testament et a beaucoup nfluence les communau-
tes chretiennes.
La specificite de la Lettre de Barnabe est son explication alle-
gorique et typologique tres poussee de l Ancien Testament.
Celui-ci se dissout completement et devient un deuxieme
Nouveau Testament. Il ne Testepas un seul fait dans l Ancien
Testament qui ne soit lu christologiquement. L Ancien
Testament porte en lui deja toutes les affirmations christolo-
glques.
L auteur de la Lettre de Barnabe dit par exemple qu il n y a
jamais eu d alliance entre Dieu et Israel. L ancienne alliance
etait en fait deja la nouvelle, l alliance chretienne. Qui pretend
que l alliance de MoIse etait pour Israel et non pour les chre-
tiens commet un peche. Ainsi, la Lettre de Barnabe derobe aux
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247
EXTESCONCURRENTIELSdu NOUVEAU TESTAMENT
Juifs toute leur histoire du salut et la revendique pour les chre-
tiens. Pour l auteur, si les Juifs et les chretiens avaient une partie
de l histoire du salut en commun, l exclusivite de la foi chretien-
ne serait aneantie.
A man avis, la Lettre de Barnabe foumit un exemple typique
d un texte concurrentiel du Nouveau Testament, et cela du point
de vue hermeneutique. Tout en prolongeant des tendances qui
existaientdeja, cette lettre offrait au christianismeprimitif un che-
min seduisant.Elle vehiculait toute une hermeneutique chretien-
ne concurrentielle au sujet de l utilisation de I Ancien Testament.
Mais cette hermeneutique aurait detruit la conception d une his-
to ire du salut et coupe les chretiens de leurs racines. L eglise
ancienne a donc pris une bonne decision en refusant finalement
d accepter a Lettre de Barnabedans e canon.
J ai choisi un troisieme et demier texte concurrentiel du
Nouveau Testament, un evangile judeo-chretien, I Evangile
seton es Hebreux.
L Evangile seton les Hebreux est proche des evangiles synop-
tiques sans pour autant dependre d eux. C est un melange extre-
mement interessant il reprend la matiere synoptique, des pen-
seesmythologico-gnostiques et des reflexions de la sagesseuive.
II pourrait confirmer la these de Dieter Georgi selon aquelle la
gnose est nee dans Ie judalsme, plus exactement dans Ie cou-
rant sapiential du judalsme. L Evangile seton les Hebreux est un
ecrit qui exprime la foi d un judeo-christianisme de la diaspora -
probablement egyptienne. L Evangile seton les Hebreux a joue
pour ce christianisme Ie meme role que I Evangile de Matthieu
pour sa communaute (judeo-chretienne, elle aussi).
Conclusion: Les apocryphes -ou plutot : un certain nombre
d ecrits apocryphes -ont eu ou auraient pu avoir les memes
fonctions que les ecrits du Nouveau Testament. Le point de
depart de ma comparaison entre les ecrits neotestamentaires et
les ecrits apocryphes n est pas Ie caractere ni Ie genre litteraires,
mais plutot la pragmatique du texte, la question des effets de
l ecrit sur Ie lecteur.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-7-1996 243/295
CatherinePAUPERT
Paris
L'APOCRYPHE, FABLE CATECHETIQUE
Story-telling is an important means or transmitting cultural and reli-
gious traditions. In a Christian context apocryphal talesmight haveplay-
ed this educational and catechizing ole.
La fable joue un role essentieldans a transmission des traditions cul-
turelles et religieuses.Les apocryphespourraient bien avoir rempli cette
fonction pedagogique et catechetique ans a tradition chretienne.
Avant d'entrer dans Ie vif du sujet, il serait bon d'en delimiter
les contours, de dessiner es frontieres du territoire a explorer:
-Par fable, on entendra toute histoire racontee.
-Par catechese ou catechisme, on designera essentiellement
Ie symbole des Apotres et l'Ecriture canonique.
-Enfin, l'apocryphe sera considere dans les limites etroites
des textes qui ont vecu et prospere dans la tradition chretienne
occidentale. Presents dans toutes les formes d'expression, litte-
rature, devotions, theatre, liturgie, iconographie, ils ont forme
comme une quasi Vulgate: Vie de Marie, Enfance du Christ,
Passions,Vie des Apotres.
Il y a grand nombre de fa<;onsd'apprehender la realite : fa
philosophie, la theologie, l'histoire, les arts, et enfin Ie langage
de la fable.
De tout temps, la fable a ete un Dutil pedagogique (6 ~ueoS'
8TlAOlOTletc...), que ce soit la Genese, es paraboles, es midra-
shim, l'Iliade ou l'Eneide. C'est un Dutil efficace : on dira ainsi
«c'est un bon samaritain» ou encore «il a vendu la peau de
l'ours»; plus encore, il pourra meme provoquer des comporte-
ments extremes, et on se suicidera apres avoir lu Werther ou Ie
Disciple de Paul Bourget
Apocrypha 7, 1996, p. 249-251
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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250
C. PAUPERT
Mais la fable est un langage symbolique qu'on a cessed'en-
tendre clairement depuis Ie XVlIIe siecle jusqu'a une bonne
moitie du XXe. L'esprit scientifique et rationnel, ou scientiste et
rationaliste, l'ont pen a pen occulte et ridiculise. Dans Ie domai-
ne religieux, un Duchesne ou un Dom Leclercq sont de bans
exemplesde celie surdite.
Depuis quelques decennies, a fable commence a regagner un
statut positif. On prendra quelques exemples dans la litterature
enfantine, particulierement significative. Les remarquables
intuitions d'un Bethelheim ant coIncide avec les phenomenes
qu'on pent observer dans Ie domaine de l'edition. Apres l'echec
des livres «realistes» d'inspiration suedoise, apres les «regle-
ments de comptes» d'un Frederic Dard ou d'un Fran<;ois
Caradec avec a Comtessede Segur, on voit aujourd'hui reeditee
in extenso a meme Comtessede Segur, ediffusee sansdisconti-
filler «La petit maison dans la prairie» ou encore «Les contes
d' Andersen» et bien d'autres enfin qui n'ont pas la pretention
de photocopier Ie « reel » quotidien.
Et l'interet porte aux apocryphes n'est sansdoute pas un phe-
nomene d'une autre nature.
Si, comme on est en droit de Ie penser, un certain nombre de
textes apocryphes remontent a la plus haute antiquite chretien-
De, ls soot donc, dans leur noyau primitif, contemporains des
premiers peres apostoliques. Si on prend en compte la rapide
expansion du christianisme (en effet, meme s'il est exagerement
optimiste, on ne peut negliger l'affirmation d' renee selon
laquelle l'Evangile est diffuse par toute la terre), Ie messagene
s'adressaitpas uniquement a ceux qui etaient capables de rece-
voir l'enseignement d'un Paul ou d'un Justin.
Est-il temeraire de penser qu'une evangelisationmoins elitiste
pouvait utiliser les moyens pedagogiques d'un usage courant et
tout naturellement en forger les outils ?
Si on se souvient de la destruction quasi tot ale des biblio-
theques chretiennes, deja fort importantes, sous la persecution
de Diocletien (303-313), on peut s'etonner que ces textes aient
survecu : ils devaient avoir une valeur et une fonction. A consi-
defer la fa~on dont ils out ete transmis -homelies, «recueils»
destines a former les clercs ou les moines, en general d'origine
monastique plus qu'universitaire -il ne parait pas outrecuidant
de leur attribuer une fonction pedagogique ou catechetique.
On en prendra comme exemple Ie manuscrit Iatin 11867de Ia
Bibliotheque nation ale de Paris (Marmoutier -Saint-Germain
des Pres) qui comprend, entre autres textes apocryphes, 'J ;van-
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L' APOCRYPHE, FABLE CATECHETIQUE
gile du Pseudo-Matthieuaugmente de quelques textes de l' Evan-
gile du Pseudo-Thomas et d'evangiles armeniens de l'enfance.
Quel enseignementse degage-t-il de ses differentes parties?
L'ouvrage commence par une Vie de Marie. On situe sa famil-
Ie, doni l'origine est davidique tant du cote paternel que'mater-
Del. Son peTe est un pasteur noble et juste, comme bon nombre
de personnagesde l' Ancienne Alliance. Elle est nee de parents
ages, comme Isaac, Samuel, Samson. Comme eux, elle a ete
offerte a Dieu des son eune age. Elle s'enracine doncbien dans
l' Ancienne Alliance.
Mais elle annonce deja la Nouvelle Alliance par sa virginite
consacree aDieu, insolite dans Ie judaisme. Pourtant Ie grand-
pretre non seulementaccepte son vreu, mais aide a sa realisation
en la pla~ant sous a garde d'un maTi age -tout au long du fecit
Ie pauvre Joseph est presente de fa~on si defavorable qu'il ne
peut en aucun casetre Ie vrai peTede Jesus.
Voila qui donne un premier gage de la virginite de Marie, qui
sera confirmee ensuite par l'ordalie et Ie temoignage des sages-
femmes.
La virginite de Marie est ordonnee a la divinite de Jesus qui,
loTs de sa naissance, avant meme que ne viennent les bergers,
sera manifeste comme la lumiere qui eclaire les tenebres.
Quand survient la illite en Egypte, par une serie de miracles,
Jesus-enfant affirme sa royaute sur toute la creation, les dra-
gons, es betes sauvages,es plantes, les eaux, Ie temps, l'espace,
et pour finir, sur les demons que soot les idoles. Jesus est donc
bien Dieu, fils de Dieu, ne de la Vierge Mirie.
Avec Ie retour de la sainte famille a Nazareth, on quitte Ie
domaine du dogme pour entrer dans celui de la morale, des devoirs
enversDieu, du comportementnormatif envers e prochain.
Si on se moque de Dieu, si on ne Ie reconnait pas, si on detruit
ses reuvres, si on veut lui en remontrer, Ie chatiment est imme-
diat; mais il peut etre aboli par la mediation de Joseph et de
Marie, par la confession de foi. Enfin, l'enfant Jesus donne
l'exemple de la bonne conduite a tenir envers sesproches : tou-
jours pret a rendre service, a prendre sa part des taches fami-
liales, a soulager es miseresdes uns ou des autres.
Devoirs envers Dieu, devoirs envers Ie prochain, c'est donc
l'essentiel de la morale chretienne qui est esquisse ci.
La fable a donc bien rempli sa fonction, grace a des images
simples et frappantes (0 combien ), elle a fait passer 'essentiel
du message: a Nouvelle Alliance est bien l'accomplissement de
l' Ancienne ; Jesus est bien Dieu, fils de Dieu, ne de la Vierge
Marie; il doit etre reconnu et revere comme tel. Et elle DOllS
invite a suivre l'exemple.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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MargueriteRASSART-DEBERGH
F.N.R.S.Bruxelles
LITTERA TURE APOCRYPHE
ET ART COPTEI
On the basis of a few examples aken rom iconographic representa-
tions of Christian Egypt, the author concludes hat the artists-although
they knew the apocryphal texts quite well -did not illustrate them too
accurately.
Sous ce titre trap vaste,e me suis bornee i presenter quelquesexem-
pies de l'iconographie d'Egypte chretienne; au terme de ce brei aper(:u, l
appert que les artistes out en ignorant nullement les textesapocryphesne
les ant guere llustres avec unegrande rigueur.
Dans la rubrique «apocryphes» du DACL, publiee il y a
soixante-dix aDs, Dom Leclercq constatait : « . Le role que
jouent les apocryphes dans la piete ' est considerable... Les
parents de la Vierge doivent aux apocryphes eur etat civil... Ce
qui fait l'interet considerable des apocryphes, c'est l'influence
qu'ils ont exercee sur l'iconographie chretienne »2, L'opinion de
Reau est identique : «La legende a toujours ete pour l'art reli-
gieux aussi econde que Ie dogme et les artistes, qui partageaient
la credulite du peuple, ne tenaient aucun compte de la differen-
ce etablie entre les ecrits canoniques et apocryphes qu'ils met-
1. Mes recherchesse imitent a la periode anterieure au xe siecle.Apres
cette date -comme l'a fort bien montre l'abbe Leroy pour les manus-
crits (1. LEROY, Les manuscrits caples et coptes-arabes illustres
[Bibliotheque archeologique et historique 96], Paris, 1974) -, l'art chre-
tien d'Egypte s'ouvre davantage aUK nfluences exterieures; en s'enri-
chissant, l perd ausside son originalite.
2. H. LECLERCQ, Apocryphes », DACL I, 2 (Paris, 1924), col. 2555-
2579 en part. col. 2555.
4pocrypha 7, 1996,p. 253-259
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M. RASSART-DEBERGH
taient naivement sur Ie meme plan »3. Et, dans ce domaine de
l art, plusieurs monographies centrees sur l Ancien et Ie
Nouveau Testament ant prouve l interet et la justesse de ces
remarques; je m en tiendrai a l une d entre elles. Dans la vaste
etude qu elle a consacree aux representations de l enfance de
Marie, Jacqueline Lafontaine-Dosogne met en lumiere de nom-
breusesnouveautes citons, parmi ces elements: la pourpre que
file Marie au moment de l Annonciation, l episode de Salome
dont la main se dessechepour avail mis en doute la virginite, la
grotte ou nail l Enfant, les mages representescomme des rois4.
L auteur note que les textes apocryphes n influencerent pas la
liturgie avant Ie VIe siecle ; elle cite Jean d Edesse qui se declare
oppose aces «histoires etrangetes et superflues, qui sont alle-
guees par beaucoup et sont ...lues, mais ne font pas partie des
livres saints »5; elle rappelle encore que c est en vain que saint
Jerome s est battu cantle les deliramenta apocryphorum et que,
des la premiere moitie du me s., Ie fecit de l enfance de la
Vierge est bien connu.
Un detail m avait frappe a la lecture de celie etude: l influen-
ce qu exer~a l Egypte dans la constitution du dossier
apocryphe6. Or, roes propres recherches dans Ie domaine de la
peinture caple? m avaient conduite a constater que les represen-
tations testamentaires demeuraient rares; celie caracteristique
se verifie dans les autres formes artistiques8. Partout dominent
3. L. REAU, Iconographie de l art chretien. I. Introduction generale,
Paris, 1955,p. 34-35.
4. J. LAFONTAINE-DoSOGNE,conographie de l enfance de a Vierge dans
I Empire byzantin et en Occident (Academie royale de Belgique.
Memoires de la Classedes beaux-arts,2esene 11, 3), Bruxelles, 1964
reed. augmentee 1994.
5. Ibid., p. 14 et n. 2 pour la citation.
6. Ibid., p. 18. Pour une vue d ensemble, voir M. v: MARINI-CLARELLI,
«Apocnfi », Enciclopedia dell Arte Medievale 2 (Rome, 1991), p. 167-
175.
7. M. RASSART-DEBERGH,La peinture corte avant Ie XlIe siecle. Une
approche », dans Coptica (Institutum Romanum Norvegiae. Acta ad
Archaeologiam et Artium Historiam Pertinentia 9), Rome, 1981,p. 221-
285 ; Ie tableau que j avais alors dresse a ete reproduit, en annexe de
mon texte, dans les pre-actes du colloque; on Ie completera par
«Representation d Apotres aux Kellia», Journal of Coptic Stu~ies 2
(1992), p. 29-42, et par «Alexandrie et la peinture chretienne d Egyp-
te », Graeco-Arabica 5 (1993),p. 321-328.
8. Vue generale dans The Coptic Encyclopedia, ed. A. S. ATIYA, 8 vol.,
New York -Toronto -Oxford, 1991 (=CE) ; cf. P. DU BoURGUETM.
RASSART-DEBERGHt al., «Biblical Subjects in Coptic Art », CE 2, p.
382-390,et « Christian Subjects in Coptic Art », CE 2, p. 526-544; pour
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LITrERATURE APOCRYPHE ET ART COPTE
255
les figures du Christ et de la Vierge, les archanges Michel et
Gabriel, les moines, les saints locaux, les cavaliers. Dans les
rares exemples nspires par I Ancien Testament, es artistes ont
privilegie Ie sacrifice d Abraham, les trois Hebreux dans a four-
naise9,Daniel dans la fosse aux lions, des episodes de la vie de
David, de Joseph et plus rarement de Jonas. Dans Ie Nouveau
Testamenro, ils ont surtout ete attires par I Annonciation, la
Nativite et les sujets s y rapportant, Ie Bapteme du Christ, l en-
tree a Jerusalem. On note certes quelques variantesl1, mais Ie
choix demeure assezsemblable jusqu au xe siecle. Toutefois,
meme au sein de l iconographie chretienne du VIe siecle, subsis-
tent une forme de paganisme et un gout pour les scenesde genre
qui amenent artiste a meler la vie quotidienne aux representa-
tions sacrees12.
II y a quelques annees, e professeur Gerard Roquet presen-
tait dans cette revue une communication metlant en evidence a
maniere doni les chretiens d Egypte avaient re~u et interprete
leg tissus, ct. P. DU BOURGUET, « Iconography of WaveD Textiles », CE 7,
p. 221-2230.
9. M. RASSART-DEBERGH, «Les trois Hebreux dans la fournaise en
Egypte et en Nubie chretiennes », Rivista degli Studi Orientali 58 [Studi
in onore di Ugo Monneret de Villard] (1987), p.141-151.
10. En peinture, leg themes inspires de la Bible se trouvent avant tout
dans leg chapelles funeraires d EI-Bagawat, dans l oasis de Khargeh
(reuvres du Ive au Vile s.) oil ils voisinent avec leg bateaux, leg
pampres, leg phenix et leg croix ankh, ainsi que dans un des edifices de
la region d Antinoe (pour la bibliographie, ct. n. 7). Quelques-uns figu-
rent sur des tissus isoles, mais ils soul surtout regroupes sur de grandes
tentures partiellement conservees : leg morceaux de l une d elles se
trouvaient autrefois it Berlin, d autres it Londres au Victoria and Albert
Museum; Ie morceau Ie mieux conserve est it Cleveland et un autre est
en restauration it la Fondation Abegg.
11. Le tableau que j avais dresse pour leg peintures (cf. n. 7) s applique
aux textiles, gaUr en ce qui concerne leg trois Hebreux, qui en paraissent
exclus, et it l exception de Joseph, credite d un cycle bien plus complet
que dans leg autres formes artistiques : Ie gouge, la trahison de ses freres
qui Ie jettent dans Ie puits, l enlevement par leg marchands et la vente it
Putiphar y sont representes ; par contre, Ie Teste de la legende est passe
sous silence.
12. C est ainsi qu on constate que l artiste n hesitera pas it remplacer,
autour de la croix, leg animaux symboliques par ceux qui l entourent :
des perdrix, des perroquets et meme des canards. Ces motifs apparais-
sent sur des peintures kelliotes reproduites dans P. MIQUEL -A.
GUILLAUMONT -M. RASSART-DEBERGHPh. BRIDEL -A. DE VOGUE,
Deserts chretiens d Egypte. Les Kellia, Nice, 1993, fig. 61, 149, 70-72.
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M. RASSART-DEBERGH
les apocryphes13. pres s etre longuement nteresse aux textes, il
mentionne un «choix de figurations integrant des motifs d apo-
cryphes »14.Ce choix pertinent n a rien perdu de son actualiteo
J aimerais simplement mentionner en complement des travaux
d ensemble ou des trouvailles survenus apres cette publication,
et proposer au jugement des specialistesquelques commentaires
personnels15. e suivrai l ordre adopte par Gerard Roquet dans
son enumeration: 1. Anne, mere de la Theotokos; 2.
l Annonciation et 3. l index de la Vierge indiquant son oreille ; 4.
Ie bain du Nouveau-Ne; 5. la Nativite; 6. la fuite en Egypte; 7.
l extraction des clous a la descente de croix; 80 e martyre d E-
sale; 9. la figure de Thecle ; 10. « notre Mere Ama Sibylle ».
En ce qui conceme Annonciation, Gerard Roquet mentionne
la celebre sculpture en bois conserveeau Louvre, une peinture de
Baomt, un bijou en or et trois evangeliaires.Une secondepeinture,
contemporaine de celIe de Baouit, fut decouverte au debut du
siecle en Basse-Egypte, Abou Girgeh; on y voit Marie assisesur
un trone et l archangeGabriel, qui s approcheen recitant a saluta-
tion16 mais c est surtout sur es tissusque Ie motif connut un grand
succes17. a representation particuliere de la «conception par
l oreille» a fait l objet d un travail de fin d etudesuniversitairesqui
constitue une mise au point excellenteet bien documentee18.
Outre les deux sculptures mentionnees par Gerard Roquet, Ie
bain de l Enfant est present sur quelques tissus19 t ressemble
13. G. ROQUET, «La reception de l image et du texte a motif d apo-
cryphes dans les chretientes d Egypte et de Nubie. Quelques aperCt us ,
Apocrypha 2 (1991), p.181-225.
14. Ibid., p. 204-212. ,
15. Dans Ie present article, je m en tiendrai a l Egypte.
16. E. BRECCIA, Rapport sur la marche du Service du Musee en 1912,
Alexandrie, 1912, p. 3-14; ferris dans M. RAsSART-DEBERGH,
«Peintures cortes de la regiion mareotique : Abou Girgeh et Alam
Shaltout », Annales de l Institut de Philologie et d Histoire Orientale et
Slave 26 (1982), p. 91-107.
17. Cf. notes 10 et 11.
18. K. URBANIK-W ALCAK, Die « Conceptio per Aurem ». Untersuchungen
zum Marienbild in Agypten unter besonderer Berucksichtigung der
Malereien in EI-Bagawat, Altenberge, 1922. L Annonciation est Ie theme
Ie plus souvent represente sur les tissus coptes; de l etude que j ai consa-
cree Ii. ce sujet «<La Vierge aux Kellia », Ii. paraitre dans les Actes de la
VIle Joumee d F;tudes coptes, Neuchatel, 18-19 mai 1995), il appert qu il
n existe aucun canon; les details varient d un objet Ii. autre.
19. Specialement sur les vastes tentures mentionnees Ii. a note 10; ega-
lement sur un tissu d Akhmin conserve au Metropolitan Museum Ii.
New York. Bon apercu ~lobal du theme par V. JUHEL. «Le bain de
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LITrERATURE APOCRYPHE ET ART COPTE
257
curieusement a celui de Dionysos tel qu'il figure sur une autre
grande tenture2o.
A la Nativite de Faras21, n ajouterales representations sur
les textiles et sur quelques sculptures22 on y note toujours une
construction on repose 'enfant, la presencede Joseph, ainsi que
celIe de l'ane et du breuf23.
La fuite en Egypte a peu retenu les artisans avant Ie xe siecle ;
on mentionnera outre la peinture du Deir Abou Hennis24,un
tissu du Musee Benaki a Athenes25.11en va de meme pour Ie
supplice du Christ, doni on note toutefois l'existence des Ie lIIe
siecle26.
Je m'attarderai un moment aux deux derniers exemples cites
par Gerard Roquet. La serie des Vertus de l'Esprit mentionnees
comme compagnesde Sibylle sur une peinture de Baouit (cha-
pelle III) figure a plusieurs reprises dans les monasteres de
l'Enfant Jesus. Des origines a la fin du 12e siecle »,. Cahiers
Archeologiques 39 (1991), p.111-132,
20. A. GRUBER, La tenture de Dionysos de la Fondation Abegg,
Riggisberg, 1987.
21. CelIe peinte dans a cathedrale est seule prise en compte; elle est la
plus complete, mais d'autres exemplaires furent decouverts dans
d'autres egiises, ainsi a Paras «<Rivergate Church»), a Abdallah Nirqi
et a Sonqi fino.
22. M. RASSART-DEBERGH,Nativity», CE 2, p. 534-536.
23. Le role de Joseph a ete souligne par P. 1ESTINI, «AIle origini
dell'iconografia di Giuseppe di Nazareth », Rivista di Archeologia
Cristiana 48 [Miscellanea in onore di Luciano de Bruyne e Antonio
Ferrua I] (1972),p. 271-274.
24. H. LECLERCQ,Antinoe », DACL I, 2 (Paris, 1907),col. 2326-2359,
en. part. col. 2344-2350; ct. egalement M. RASSART-DEBERGH,La
peinture corte avant Ie XlIe siecle » (n. 7), p. 236-240.
25. L. DE CHAVES,«'La Illite en Egypte et Ie retour des Mages'.
Medaillon corte de la collection du Musee Benaki », Bulletin de la
Societed'Archeologie Caple 23 (1994),p. 57-62.
26. M. RASSART-DEBERGH,Le Christ et la Croix dans l'art corte »,
dans Coprology. Past, Present, and Future. Studies in honour of
Rodolphe Kasser,ed. S. GIVERSENM. KRAUSE P. NAGEL Orientalia
Lovaniensia Analecta 61), Leuven, 1994, p. 45-69. On lui prefere la
representation de la croix glorieuse, ct. M. RASSART-DEBERGH,
« Quelques croix kelliotes » dans Nubia et Oriens Christianus. Festschrift
fur C. Detlef G. Muller zum 60. Geburtstag, ed. P. O. SCHOLZet R.
STEMPEL Bibliotheca Nubica 1), Cologne 1987, p. 373-385, et M.
RASSART-DEBERGH,Le theme de la croix sur les peintures murales
des Kellia, entre l'Egypte et la Nubie chretiennes », dans Nubische
Studien. Tagungsakten der 5. internationalen Konferenz der
International Society or Nubian Studies. Heidelberg,22.-25. September
l ,1iB,2,d. M. KRAUSE,Mayence, 1986,p. 363-366.
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258
M. RASSART-DEBERGH
Baouit et de Saqqara27, t leur nombre varie d'une peinture a
l'autre28.
Quant a Thecle29, elle semble avoir joui d'une certaine
faveur3°; on peut ajouter aux deux peintures d'EI-Bagawat (cha-
pelle 30 et 80), a l'ampoule en terre cuite et au relief du Caire
mentionnees, un second relief (conserve au Brooklyn Museum,
inv. 40.299) et plusieurs ampoules: au moins deux au Louvre
(inv. AF 7035 et MNC 1926), une a Londres (BM, inv. EA
69839) et une autre a Kansas City (Nelson Fund 48.10) l'icono-
graphie de la sainte et des fauves auxquels elle fut livree vane
d'un objet a l'autre. Les figurations de Thecle a EI-Bagawat sont
sans doute plus nombreuses Fakhry interprete leg personnages
de la chapelle 25 comme etant Thecle et Paul conversant31,et
dans la chapelle 30, ce sont deux episodes du martyre de Thecle
qui sont representes32. n outre, il n'est peut-etre pas ininteres-
sant de rappeler deux remarques faites par H. Stern et J.
Schwartz33a propos des peintures d'EI-Bagawat; ce dernier
constate que «Aux motifs typologiques du choix de Thecle
comme image de salut ...s'ajoute peut-etre Ie fait, dans un mau-
solee, que selon leg 'Acta Pauli et Theclae' c'est la priere de
Thecle qui a sauve l'ame de la defunte... » .34.De son cote, H.
Stern avail fait remarquer que leg rraepEVOLont au nombre de
sept au lieu de cinq ; au lieu des Vierges sages, l propose35 oil
de lief Ie cortege a l'image de Thecle, l'interpretant alors comme
27. M. RASSART-DEBERGHJ. DEBERGH,«A propos de trois peintures
de Saqqara », dans Coptica (Institutum Romanum Norvegiae. Acta ad
Archaeologiam et Artium Historiam Pertinentia 9), Rome, 1981,p. 187-
205, en part. «Des murs et des Vertus », p. 193-201.
28. R.-G. Coquin leur a consacre ine,penetrante etude: R.-G. COQUIN,
«Les vertus (aretai) de l'Esprit en Egypte », dans Melanges d'Histoire
des Religions offerts i Henri-Charles Puech, Paris, 1974,p. 447-457.
29. L. HAYNE,«Thecla and the Church Fathers », Vigiliae Christianae48
(1994), p. 209-218.
30. R. DU BOURGUET,« hecla, Saint », CE 2, p. 540-541.
31. A. FAKHRY,The Necropolis ofel-Bagawat in Khargeh Oasis (SAE,
The Egyptian Deserts), Le Caire, 1951, fig. 74; l'ensemble est repris
dans M. RASSART-DEBERGH,La peinture corte avant Ie XII siecle»
(n. 7), p. 232-235,en part. fig. 4.
32. H. STERN, «Les peintures du Mausolee de 1 Exode' a El-
Bagaouat », Cahiers Archeologiques 11 (1960),p. 93-229,en part. p. 100
et 105.
33. J. SCHWARTZ,Nouvelles etudes sur les fresques d'EI-Bagawat »,
CahiersArcheologiques 11 (1960),p.1-11.
34. Ibid., p. 6 et notes 1 a 3.
35. H. STERN, rt. cit., p. 106.
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259ITrERATURE APOCRYPHE ET ART COPTE
«une procession de religieuses servant dans une des basiliques
de la martyre », soit d y voir les vierges saintes, Piste, Helpis,
Agape et Sophia, les «Vertus de l Esprit» jouissant, en eifel,
d un culte particulier en Egypte36.
Je voudrais, pour terminer, mentionner un theme qui connut
un grand succes dans l art chretien: la Descente aux Enters.
L art byzantin, comme l art ethiopien ant aime montrer Ie Christ
qui ramene des Enters Adam et Eve. Ce sujet est absent,
semble-t-il, de la premiere iconographie copte, ce qui me parait
d autant plus etonnant qu il existe une filiation de «la Descente
aux Enters» entre les textes coptes et egyptiens37.I me parrot,
au terme de ce brei aper~u de l iconographie copte, que les
artistes n ont certes pas ignore les textes apocryphes,mais qu ils
ne les ant pas suivi avec une grande rigueur lorsqu il s agissaitde
les illustrer.
36. Ct. notes 27 et 28. J ai en cours une etude sur l iconographie de
Thecle au depart de peintures encore inedites decouvertes aux Kellia.
37. A. PIANKOFF, La descente aux enters dans les textes egyptiens et
dans es apocryphes coptes », Bulletin de la Societed Archeologie Copte
7 (1941),p. 33-46.
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Nicole THIERRY
Ecole Pratique desHautes Etudes,Paris
L ICONOGRAPHIE C
L AFFRONT FAIT A
PROTEVANGIL
In the ProtevangeliumJacobi we ind a scenewhere a servant s offen-
ding her mistress.Whereas he insult to Anne has beenpreserved in the
Greek text, it was altered in the versions and soon misunderstood and
forgotten in Byzantine world. Illustrations of the episodeare very rare.
The one preservedat K,ZU C;ukur revealsGraeco-Oriental characteristics
and stands or the sameHellenistic background as the text itself
Dans l histoire de la conception de Marie d apres Ie Protevangile de
Jacques, episode de l affront fait a Anne par sa servantese trouve dans
la plus ancienne redaction (Papyrus Bodmer 5). Le sujet a ere conserve
dans Ie texte grec, mais altere dans d autres versions. Dans Ie monde
byzantin lui-meme, il a ere vite incompris et oublie. Les illustrations en
sont exceptionnelles.Celie conservee Klzll C;ukur; en Cappadoce, ele-
ve d une iconographie greco-orientalequi ref/ere e meme trefonds helle-
nistique que Ie texte.
Il s agit de l episode qui objective la honte attachee ala sterilite
premiere d Anne et, par constraste, la gloire de sa future matemi-
te. Sa servante Judith lui offre « un bandeau royal» qu Anne refu-
se, s en trouvant indigne. Cette peripetie repond a l affront fait a
Joachim dont les offrandes au Temple sont refusees.
Judith dit a Anne: « ...Voici qu est arrive Ie grand jour du
Seigneur et il ne t est point permis de te lamenter. Prends plutot
ce bandeau (KE<j>a>.o8EUfJ.LOV)ue m a donne la maitresse du servi-
ce et qu il ne m est pas permis de ceindre, parce que je suis une
servante et qu il a une marque [au : une allure] royale (xapaKTi }pa
EXEL 3auL)..LKOV).t Anne dit : Va-t -en loin de moi ; et je ne Ie ferai
pas, et Ie Seigneur m a humiliee a l exces...» (Protev. 11,2-3).
Avocrvvha7. 1996. .261-272
APPADOCIENNE DE
ANNE D APRES LE
E DE JACQUES
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N. THIERRY
A proposdo texte.
Nous utili sons deux editions en raison de leur presentation
critique differente, celles des R. P. Emile Amann et Emile de
Strycker. L episode et Ie vocabulaire ont donne lieu a des inter-
pretations, mais Ie texte est Ie meme. A propos du bandeau, E.
Amann a traduit xapaKT1 )pa EXEl f3aalAlKov par «il a une allure
royale » et E. de Strycker par « il porte une marque royale ».
E. Amann considerait qu il s agissait en fait d un diademe
(8la8Tl~a) «au sens etymologique du terme, c est-a-dire Ie ban-
deau plus ou moins orne qui sert a retenir les cheveux, et qui,
fixe au bas de la tiare perse, devient un ornement royal »2. Le
bandeau etait aussi un «embleme de consecration dans les cir-
constances les plus diverses »3.
D un autre cote, E. de Strycker a retrouve Ie mot KE<j>aAo6Eal,J.lOV
dans les dictionnaires de Sophocles et de Stephanus et dans Ie
Lexicon de Miiller. Enfin, dans l Edit du maximum de
Diocletien (fin du lIIe s.), ce bandeau figure dans la lisle des
objets tarifes, trois categories de qualite y etant distinguees4. Le
sens d « estampille », «marque », pour xapaKTf Jpn est pas connu
pour un tissu, mais de Strycker pense qu il convenait ici, Ie ban-
deau pouvant provenir d un atelier de lissage royal5. Cependant,
ce bandeau qu il dit «objet usuel de la toilette feminine »6 reste
une rarete du vocabulaire et ne correspond pas a ce que DOllS
connaissons de la velure des femmes des premiers siecles, dont
la tete etait Due ou couverte d un voile leger ou d un pan du
1. E. AMANN, Le Protevangile de Jacques et ses remaniements latins,
Paris 1910 [=AMANN], p. 184-187. E. de STRYCKER,La forme la plus
ancienne du Protevangile de Jacques (Subsidia hagiographica 33),
Bruxelles 1961 [=STRYCKER],p. 68-71, 305-306, 406-407.
2. AMANN, p. 186.
3. DAREMBERG-SAGLIO, Dictionnaire des Antiquites grecques et
romaines, II, 1892, p. 119-121. Dans un courrier tres documente, dont
nailS Ie remercions vivement, M. E. Will nailS a precise qu Alexandre
l emprunta aux Perses «mais Ie diademe royal hellenistique est un ban-
deau blanc orne sur les bards, porte nOlle autour de la tete nile, ses
extremites a franges dorees tombant dans Ie dos» (d apres Ie Kleine
Pauly, s. v. «diadema») ; ce diademe macedonien a ete largement diffu-
se par les successeurs d Alexandre et legue a une serie de souverains
orientaux, dont les rois parthes (lettre du 16-3-1994). Pour la symbo-
lique royale du diademe dans Ie monde hellenistique, voir plus bas.
4. STRYCKER, . 305-306.
5. STRYCKER, . 308 et p. 71, n. 7.
6. STRYCKER, . 407.
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L ICONOGRAPHIE CAPADOCIENNE DE L AFFRONT FArr A ANNE 263
maphorion, exceptions faites des personnifications allegoriques
ou des mperatrices7.
E. Amann datait l histoire de Marie de la fin du lie siecle et
attribuait l reuvre a un chretien hellenisant d Egypte, l ensemble
du Protevangile etant place au debut du lye siecle8.
E. de Strycker datait l reuvre de la secondemoitie du lie s., Ie
plus ancien manuscrit, Ie Papyrus Bodmer 5, deja cQmplet,etant
situe entre 200 et 400 il hesitait a dater d avant l an 300 Ie fecit
de la Nativite de Marie9. II fixait l origine du Protevangile en
Egypte, par elimination des autres contrees possibleslo.
D apres ces etudes, Ie passage qui nous interesse est donc
place a l epoque 0\1 hellenisme etait encore florissant, aussi
bien en Egypte que dans Ie Testedu bassin mediterraneen orien-
tal.
Le bandeau comme la scene elle-meme out embarrasse les
traducteurs anciens. Les versions syriaques, es plus anciennes,
tantot sont fideles au texte gredl, tantot Ie modifienP2. La ver-
sion georgienne parle d un accessoiredoni on se couvre la tete13,
les armeniennes antot n identifient pas l objet offert, tantot sup-
priment l episode14 l ethiopienne, de date plus tardive, parle
d un omement royal offert par une voisine15.
Nous ne donnons la que des indications, l enquete etant evi-
demment a completer. II apparait cependant clairement que Ie
sujet a rapidement paru obscur.
Temoignagesrcheologiqnes.
C estce qui ressortegalement e l imagerie qui nous estpar-
venue. L illustration de la scenen est connueque par un tres
7. R. BIANCHIBANDINELLI, ome. La fin de [ art antique,Paris 1970, ig.
263,264,285,318,327,328 (allegories, fig. 228, 304); A. GRABAR,Le
premier art chretien, 200-395,Paris 1966, ig. 58, 68, 69, 114-120, 146,
231-232,etc.
8. AMANN,p. 77-100.
9. STRYCKER,. 14,22,195-197.
10. STRYCKER,. 419-423.
lL AMANN,p. 186,n. 2.
12. STRYCKER,. 305,n. 1.
13. G. GARITfE, «Le Protevangile de Jacques en georgien », Le
Museon 70 (1957), p. 243. Nous remercions ici B. Guttier de sa traduc-
tion du texte.
14. Dans les versions traduites par H. QUECKE, ans STRYCKER,. 448,
460.
15. AMANN,p. 187.
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N. THIERRY
petit nombre d exemples et a vile donne lieu a confusion avec a
scene res signifiante de la Visitation, visite de Marie enceinte de
Jesusa Elisabeth enceinte de Jean-Baptiste.
Comme illustration ancienne, on peut citer un episode du
cycle de la Vierge sculpte sur une des colonnes du ciborium de
Saint-Marc de Venise16, ne plaquette d ivoire d un cycle aujour-
d hui incompleP7 et la scene d un cycle peint a KIZll (:ukur, en
Cappadoce18.
Apres des siecles d oubli, la scene reapparait sur deux aers
brodes fusses doni l encadrement est constitue par Ie cycle
mariap9.
L exemple venitien est particulier : la servante vient veTS nne
en tenant a bout de bras une sorte de large bandeau duquel pen-
dent deux rubans (fig. 5). Les scenesdes broderies fusses fig. 3)
proviennent d une imagerie ancienne disparue ou sont Ie fruit
d une relecture de l apocryphe grec; l illustration est realiste ;
Judith presente sur sa main un mince bandeaudeplie. Les jalons
iconographiques sont fares, l un peint peut-etre a la Peribleptos
de Mistra, un autre altere dans eglise de Pelendri de Chypre oil
l une des deux servantes qui assistenta I Annonce a Anne tient
deux rubans; ailleurs la servante n est qu un temoin20.
16. CEuvre du Ve-VIe siecle rapportee de Constantinople ou pastiche
venitien du Xllle ; Ie cycle tres developpe comprend 18 scenes; ct.
Jacqueline LAFONTAINE-DoSOGNE,conographie de l Enfance de la
Vierge dans [ Empire byzantin et en Occident, , Bruxelles 1964,p. 62,pl.
1, p. 68-70.
17. Ivoire de Leningrad, du VIe siecle, dont ne Testequ une seconde
scene, I Annonce Ii Anne de sa maternite; W. F. VOLBACH,
Elfenbeinarbeitender Spiitantike und des riihen Mittelalters, Mainz 1952
, n° 129; H. L. KESSLER, ans Age of spirituality. Late Antiquity and
Early Christian Art, Third to Seventh Century,ed. K. WEITZMANN,New
York 1979, n° 459-460,p. 510-512. La scene de I affront etait decrite
camille une Visitation, jusqu li son identification par H. L. Kessler et
nous-meme «< dentification de deux ivoires paleochretiens », Journal
des Savants 1978],p.185-188).
18. Cycle de treize scene que nailS attribuons au Vile siecle ; ct. N.
THIERRY,Haut Moyen Age en Cappadoce. Les eglisesde la region de
<;avu~in, I, Paris 1994,p. 215-232
19. Aers de Souzdal et Riazan, xve siecle; J. LAFoNTAINE-DoSOGNE,
op. cit.,p. 72, ig. 24, 25 (notrefig. 3), 26.
20. J. LAFONTAINE-DoSOGNE,p. cit., p. 72-73, ig. 27; elle a pu exister
aussi en Georgie ou les cycles mariaux etaient nombreux et developpes,
avec des episodes rarement representes,camille Joachim lisant Ie Livre
des Douze tribus Ii Axt ala; ct. A. LIDOY, The murals Paintings of
Akhtala, Moscou 1991,p. 43-44, ig. 27.
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ICONOGRAPHIE CAPADOCIENNE DE L AFFRONT FAIT A ANNE
L ivoire de Leningrad est incontestablement ancien, faisant
partie de cette production d epoque protobyzantine attribuee
tantot a l Egypte tantot a la Syrie. II mantle Judith et Anne
debout et conversant, Judith brandissant sur Ie cote Ie bandeau
plie en deux (fig. 1). Celie image des deux femmes face a face a
longtemps ete decrite comme une Visitation.
II est curieux de voir que celie confusion des historiens de
l art avait deja ete faite par les imagiers contemporains eux-
memes, puisque la scene a ete utilisee comme Visitation des Ie
VIe-VIle siecle sur une reliure d ivoire, Ie plat posterieur de l E-
vangeliaire de Saint Lupicin21 ou l attitude des deux femmes est
a peu pres celIe qui est la leur sur l ivoire de Leningrad (fig. 2).
Si l on ne remarque pas Ie linge tenu par une des nterlocutrices
de celie scene de conversation, la confusion est facile en effet.
Elle etait renforcee par la proximite, dans les deux cas, d une
scene d apparition de l ange, soit qu elle suive la scene de l af-
front a Anne, soit qu elle precede la visite de Marie a Elisabeth.
Celie confusion caracterise une petite selie d encensoirs syro-
palestiniens, dont Ie meilleur exemple est celui de Florence (fig.
4)22. Autre devoyement, Ie nom de la servante Judith,
H Or8AN, fut donne ala servante de Marie dans les scenesde
Visitation d un petit groupe d eglises cappadociennesdes Ixe-Xe
siecles23.
On peut conclure que Ie schema conographique de l ivoire de
Leningrad correspond a un prototype rapidement abandonne en
tant qu affront fait a Anne, l episode de l apocryphe etant deve-
nu incomprehensible. Cependant, e schemaen tant qu image de
la Visitation ne lui survecut guere, et la selie des encensoirs
« mesopotamiens» testa sanssuite.
L ivoire de Leningrad a aussi l interet d offrir des ressem-
blances avec leg peintures cappadociennes de la chapelle de
Joachim et Anne dans Ie vallon de KtZll (:ukur, tant par Ie style
que par la typologie de la scenesuivante -I Annonce a Anne de
sa maternite par un ange est semblable dans eg deux cas24.
21. W. F. VOLBACH, Op. cit. (n.17), n° 145.
22. lIs sont dits du type 6 a A et 6 d ; cf. IIse RICHTER-SIEBELS, Die
paliistinensischen Weihrauchgefiij3e mil Reliefszenen aus dem Leben
Christi, Berlin 1990, p. 22, 27,57,288-289.
23. Trois eglises des environs d Ihlara, STRYCKER,po 69, 313-315; N. et
M. THIERRY, Nouvelles eglises rupestres de Cappadoce, Region du
Hasan dagI, Paris 1963, p. 49, 118, 144,248 (add. corr.), fig. 144, pl. 30 b.
24. N. THIERRY, op. cit. (n. 18), pl. 111 et 118. C est it partir de la suite
cappadocienne qu a pu etre identifie Ie sujet de l ivoire (cf. n.17).
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N. llllERRY
Le cycle cappadocien de la conception et de l enfance de la
Vierge, que DOllS atons du VIle siecle25, pporte de nouvelles
donnees. L originalite de la scenede l affront vient de ce qu elle
est representee comme une scene d investiture (fig. 6). La ser-
vante debout devant Anne, Ie bras leve, lui tend Ie bandeauplie
comme un diademe ou une couronne. La raideur du bras tendu
et les formes sans epaisseurdes personnages appellent l art du
temple de la Triade palmyrenienne it Doura Europos; en
revanche, Anne est figuree dans l attitude greco-romaine de la
conversation assise26,e style de la peinture correspond it un art
byzantin orientalise, qui associe es survivances de l hellenisme
et la schematiquedes regions syro-mesopotarniennes27.
Cet heritage explique les analogies que DOllS onstatons avec
la gestuelle de l iconographie royale parthe, malheureusement
peu representee, et de l iconographie royale sassanidequi suivit.
La premiere a conserve une sobriete proche des sources
grecques, alors que la seconde, abondamment llustree, est tres
sophistiquee, caracterisee par Ie volume et les plis des pans des
diademes qu on tend aUKvainqueurs ou aUK ois (fig. 8, 10), et
qui contraste avec Ie rub an assezmince sur les tetes des suces-
seursd Alexandre28.
Le schema cappadocien de celie pseudo-scened investiture
provient sans doute d un repertoire de scenes profanes dans
lequelle peintre aura puise -repertoire ayant conserve e theme
connu d inspiration hellenistique. En Iran, sur les monuments
sassanides, n multiplia les representations dites «dynastiques »,
derniers temoins de la tradition29.
25. Sur un faisceaud elements concordants; cf. N. THIERRY, p. cit. (n.
18), p. 229-236.
26. R. GHIRSHMAN, arthes et Sassanides, aris 1962, ig. 59 et 60 (plus
lard chez es Sassanides fig. 242, 244-254,259). Encyclopediephotogra-
phique de l art, III, Paris 1938 , p. 313 c; A. GRABAR,L Age d or de
fustinien, Paris 1966, ig. 110; W. F. VOLBACH,op. cit., ivoires no 129
(celui de Leningrad), 161, 169,174.
27. Cf. l analyse de cet art de la fin du VIe siecle et du Vile dans V.
LAZAREV,Storia dellapittura bizantina, Turin 1967,p. 73-75,85-88; N.
THIERRY, p. cit. (n.18), p. 229-232 etude du style).
28. R. GHIRSHMAN,p. cit., fig. 157, 211, etc. ; IDEM,«Les scenesd in-
vestitures royales dans l art rupestre des Sassanideset leur origine »,
Syria 52 (1975),p. 119-129 souvent, es pans flottent au vent). Pour les
rois seleucides, f. J. CHARBONNEAUXR. MARTIN F. VILLARD,Grece
hellenistique.330-50 avant f.-C., Paris, 1970, ig. 369, 378, 379, 384; W.
WROTH, Catalogue of the Greek Coins of Galatia, Cappadocia and
Syria,Londres 1899,pl. VI, XIV, XXV
29. Tradition assureepar les textes ; ct. E. WILL, « L art sassanideet ses
predecesseurs», Syria 39 (1962), p. 47-49, pl. I et II; H. VON GALL,
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L ICONOGRAPHIE CAPADOCIENNE DE L AFFRONT FAff A ANNE 267
Le type de ce bandeau est encore mis en question par l image
cappadocienne d Anne expectante (fig. 7), sujet unique a notre
connaissance3o.nne ne porte plus Ie maphorion qui couvrait sa
tete, mais un bandeau assez arge qui retient ses cheveux repan-
dug sur leg epaules. La scene fait suite au baiser qu echangent
Joachim et. Anne lorsqu ils se rencontrent a la porte de la ville
(Prote-v. V, 2-3), scene conventionnelle de la conception d un
enfant, suivie par consequent de celIe de sa naissance31. nne
est deb out entre deux petites servantes qui appuient sur son
ventre. Contrairement a diverges scenes d accouchement, l en-
taut ne parait pas entre leg pieds de la parturiente, Ie peintre
ayant sans doute hesite a etre trop realiste32. On remarque
d ailleurs la pose hieratique d Anne, composition de type triom-
phal dont la frontalite peut etre definie comme caracteristique
de l Orient hellenise33.
Cette creation iconographique ne correspond pas au texte. II
est vraisemblable que l artiste a voulu repondre a la scene de
l affront, et qu il a represente comme une reine Anne mettant la
Vierge au monde. Anne est alors coiffee du «bandeau royai »,
ici brode et orne de franges, dont leg pans encadrent sa tete au-
dessusdes epaules. La fa~on dont Ie bandeau est dispose sur Ie
front et nolle en arriere, leg pans tomb ant lateralement, evoque
Ie port du diademe suivant la mode parthe (fig. 9)34.D autre
«Beobachtungen zum arsakadischen DiadefJ und zur partischen
Bildkunst », Istanbuler Mitteilungen 19-20 (1969-1970), . 315.
30. N. THIERRY, p. cit. (n. 18), p. 221-224.31.
Etude faite par J. LASSUS, illustration byzantine du Livre des Rois,
Vaticanusgraecus333, Paris 1973,p. 32, ig. 3.32.
Meme ainsi, Ie sujet ne semble pas avoir ete reproduit, alors qu il
Testad usage pour illustrer certaines scenesd enfantement de l Ancien
Testament ou de recits profanes (mais de fa~on realiste : ct. n. 31, et
dans A. GRABAR, Christian Iconography. A study of Its Origins,
Princeton 1968, ig. 308-310; ce demier, p. 129, presentait la scene de
KIZII C;ukur comme une immaculee conception de Marie, second stade
d une iconographie connue par une peinture des environs de l an 1300,
a Ohrid; il suivait en cela J. Lafontaine-Dosogne et Gordana Babic; la
demonstration de J. Lassus a infirme cette hypothese aux bases erro-
nees).33.
Telle que l ont definie E. WILL, «Art parthe et art grec », dans
Etudes d archeologie classique 2 (=Annales de l Est publiees par
l Universite de Nancy 22), Paris 1959,p. 133-135; IDEM,«Les elements
greco-romains dans l art sassanide», dans Iconographie classique et
identites nationales (Bull. de Correspondance hellenique, Supplement
14), Paris 1986,p. 440-444 theme du souverain tronant de face) ; IDEM,
op. cit. (n. 29) et H. yon GALL, op. cit. (n. 29), p. 315-317.34.
H. VONGALL, op. cit. (n. 29), p. 299-318 (303), pl. 59-62; fig. 4 (notre
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N. TmERRY
part, leg longues boucles de cheveux etalees sur leg epaules
appartiennent it une tradition hellenistique repandue dans Ie
monde romain et oriental et qui disparait au COUTSe l epoque
protobyzantine35.
En bref, la figure d Anne expectante (fig. 7) est unique dans
l imagerie byzantine, comme la typologie particuliere de l af-
front (fig. 6).
Aussi, no us pensons que leg deux representations qui se
repondent -l affront et Ie portrait triomphal d Anne -refletent
Ie trefonds hellenistique du texte, sans doute par Ie hasard de
survivances conographiques relevant du meme milieu d origine.
La revendication de la descendancedavidique d Anne corres-
pond aux traditions qui voulaient que leg souverains aient
d illustres ancetres, leIs leg Lagides qui se disaient descendre
d Heracles et leg Seleucidesd Heracles et surtout d ApolIon36. A
la notion de dignite d origine dynastique s ajoutait celIe de la
bienveillance et de l intervention divines37 ui, en ce cas, allaient
faire d Anne, femme agee, a mere de Marie.
n est remarquable que la peinture cappadocienne reproduise,
d une part, Ie schemad une investiture et, d autre part, une pre-
sentation frontale evoquant celIe d un souv~rain encadre par sa
figure) ; D. HOMES-FREDERIca, atra et ses sculptures parthes. Etude
stylistique et iconographique, Istanbul 1963,p.17-18.
35. Boucles souples et ondulees a l epoque hellenistique; cf. J.
CHARBONNEAUXR. MARTIN F. VILLARD, Grece hellenistique.330-50
avant J.-C., Paris 1970, ig. 91, 296, 332, 336-338; boucles souvent plus
raides et serreesa l epoque romaine, pour Isis par exemple (F. CuMONT,
Les religions orientales dans le paganisme romain, Paris 1929,pl. V; n°
1) ou Diane (L. PIRZIOBIROLI STEFANELLIB. PETTINAU, L argento
dei Romani », Dossier Archeo VIII, n° 12 [dec. 1992], fig. p. 79). A
l epoque protobyzantine, cette coiffure (plutot a boucles epaisses) se
limite aux personnifications : la Terre sur tine tapisserie d Egypte (A.
GRABAR, Age d or de Justinien de a mort de Theodosea l Islam, Paris
1966, ig. 380), menades ou Tyche (K. WEITZMANN, ge of Spirituality.
Late Antique and Early Christian Art, Third to Seventh Century, New
York 1979,n° 122, 156, 160). En Cappadoce,nous ne l avons rencontre
que pour tine representation de l Egypte, (N. THIERRY, Haut Moyen
Age en Cappadoce. L Eglise n° 3 de Mavrucan », Journal des Savants
[1972], fig. 12). Chez es Sassannides,a deesseAnahita a la fin du lIIe
siecle et la reine Boran (vers 630) sont coiffees de quelques boucles
raides assez comparables a celles a Anne a KIZII <:;ukur; cf. A.
GODARD,L art de l Iran, Paris 1962, ig. 100; J. de MORGAN,Monnaies
orientales,Numismatique de la Perse antique, I, 3e asc., Dynastie sassa-
nide, Paris 1933,pl. 76-77.
36. F. CHAMOUX, a civilisation hellenistique,2e ed., Paris 1985,p. 235.
37. F. CHAMOUX, p. cit., p. 233-234.
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ICONOGRAPIllE CAPADOCIENNE DE L AFFRONT PArr A ANNE
garde (bien qu Anne soil debout, assistee de servantes-sages-
femmes, conformement a la comprehension du fecit )38. es deux
images complementaires, compte tenu du texte, font partie, en
eifel, de l iconographie royale, dont les nombreuses igurations
sassanides raduisent la persistance dans Ie domaine de la sym-
bolique du pouvoir issue du monde hellenistique.
E. de Strycker, contredisant E. Amann sur la nature de ce
bandeau, dont il faisait un accessoirecourant du costume femi-
Din, citait l image cappadocienne de l affront mais ignorait son
complement, celIe d Anne portant Ie bandeau decore. Les obs-
curites qu il constatait ainsi a propos de l episode s expliquent
aisement si l on pense qu il s agit d une mise en evidence de la
figure privilegiee d Anne, issue du roi David et choisie par Dieu
pour engendrer a Mere du Sauveur39.
Pour Amann, Ie Protevangile etait «une doctrine que l auteur
veut faire passersous Ie couvert de son histoire », Ie but etant la
glorification de Marie; Ie bandeau «d allure royale» lui parais-
sail une claire allusion a l origine davidique d Anne40.Et, dans e
monde romain hellenise oil fut con~u e Protevangilede Jacques,
Ie diademe etait Ie signe de la royaute41.
Quant a la peinture, si l on se souvient que la Cappadoce ne
s est detachee du patriarcat d Antioche qu au debut du IVe
siecle42, n peut supposer une origine syrienne a son iconogra-
phie. On peut preferer cependant voir la une creation cappado-
cienne ; la province, en eifel, etait une veritable terre de religion
et, au IVe siecle, oute empreinte encore de l hellenisme romain,
comme Ie Proche-Orient. On connait l histoire commune de ces
territoires durant les trois sieclesde l ere seleucide 311-63 avo .-
C.) et les sept siecles qui suivirent sous les empires romain et
byzantin, jusqu a ce que les invasions arabes y mettent fin au
COuTSu VIle siecle43.Ainsi s expliquent les difficultes que les
38. Les representations sassanides du souverain tronant ant surtout en
commun cette frontalite et leg pans lateraux du diademe, mais flottants
SOliSa couronne; cr. GHIRSHMAN, op. cit. (n. 26), fig. 214, 244-246
39. STRYCKER, . 305-306 et 407.
40. AMANN, p. 10, 52, 186. Que Ie bandeau ait porte l ~stampille d un
atelier royal ne change rien a la symbolique supposee, au contraire.
4L F. CHAMOUX, op. cit., p. 233-234.
42. Avant Nicee, 325, pour devenir Ie siege du diocese du Pont, cr. Mgr
LAGIER, L Orient chretien, I, Paris 1935, p. 224.
43. F. CHAMOUX, op. cit., p. 83-88. D autre part, la civilisation seleucide
cohabitait avec l iranienne en Anatolie, dans leg royamnes du Pont, de
Cappadoce, de Commagene et d Armenie. L empire romail} recouvrit
ensuite l ensemble de ces provinces, de I Asie Mineure a l Egypte, ses
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N. nIIERRY
historiens de l art eprouvent pour dater avec precision et pour
localiser l origine de certaines sculptures hellenistiques comme
de certains ivoires protobyzantins44.Au debut dl} christianisme,
cet hellenisme perpetue regnait egalement en Egypte, lieu ou
l on s accorde pour situer l elaboration du Protevangile de
Jacques45.
On voit ainsi que l episode de l affront, tel qu il est peint 1:1
KIZll <::ukur, emoigne encore de l entendement de sa significa-
tion profonde, comme dans Ie texte grec d origine. Decrit ou
peint, il nous semble dans les deux cas issu du meme trefonds,
l Orient hellenise. L ivoire de Leningrad, qui banalisait Ie face 1:1
face d Anne et de Judith, fut un premier pas dans l abandon de
la specificite du sujet et dans l incomprehension de la scene, qui
finalement se devoya et disparut.
institutions y perpetuant «Ia vie de l heIIenisme au service de Rome»
(ibid., p. 107-173).
44. F. CHAMOUX, f. cir., p. 405-408; W. F. V°I;BACH, of. cir. (n. 17), p.
17: ivoires attribues a l Asie Mineure ou a l Egypte ou a Ia Syrie, n°
125-131,140,142,145
45. Voir n. 8 et 10. Sur Ie passe de I epoque des Lagides, ct. F.
CHAMOUX, . 75-83,141-147.
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L ICONOGRAPHIE CAPADOCIENNE DE L AFFRONT FAIT A ANNE 271
Fig. 1. Ivoire de Leningrad.
Affront fait a Anne (d apres la Fig. 2. Reliure de Saint Lupicin.
photo du Musee de l Ermitage) Visitation (d apres la photo de la
bibliotheque Nationale de Paris)
Fig. 3. Detail de l aer de brode de Fig. 4. Detail de l encensoir de
Riazan. Affront a Anne (dans J. Florence. Annonciation a Marie.
Lafontaine-Dosogne, ig. 25) Visite de Marie a Elisabeth (dessin
de Cahier et Martin dans I.
Richter-Siebels,p.27)
Fig. 5. Detaildu
ciborium de
Saint-Marc de
Venise. Affront
fait a Anne
(ph. N. Thierry)
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\
272 N. THIERRY
-
,~
Fig. 6. Kizil ~ukur. Affront fait a Fig. 7. Kizil ~ukur. Anne
Anne (schemaN. Thierry) expectante coiffee du ban-
deau (schema N. Thierry).
Fig. 8. Coupe de Baltimore. Roi Fig. 9. Buste d'un prince arsacide
sassanideoffrant tine couronne de provenant d'Hatra. Musee de
banquet a la reine, Yle- Ylle s. Mossoul, ler-ller s. (schema H. von
(dans Ghirshman 1962, fig. 259) Gall, fig. 4).
Fig. 10. Taq-i-
Bostan. Detail
de l'investiture
d' Ardeshir II,
lye s. (dans
Ghirshman
1962, ig. 233)
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GiuseppeDE SPIRITO
Universitede Geneve
L' ANNONCIATION DE
SAINTE-MARIE-MAJEURE :
IMAGE APOCRYPHE ?
E. M. Steinbydicatum
This study re-examines he first representation of the Arch mosaics at
S. Maria Maggiore in Rome, interpreted as the Annunciation. Contrary
to the common opinion which related this image to apocryphal texts,
think it has to be connected with the textual tradition of the induere
carnem. The theological message of the mosaic is an attempt to refute
Pelagian propositions, asserting hat the virginal flesh of Christ has not
be injured by sin.
Dans cette etude, nous essayons d'interpreter la scene de
[,Annonciation desmosai ques e ['arc absidal de Sainte-Marie-Majeure i
Rome. Contrairement Ii ['opinion communement admise, qui met cette
representationen rapport avec es textes apocryphes,nous montrons les
liens etroits avec Ie theme de [,induere carnem. La mosai que ente de
refuter la doctrinepelagienne en affirmant que e corps virginal du Christ
n'a subi aucuneatteintepar Ie peche.
1.Avant-propos.
Ces pages se veulent une approche de I'interpretation des
mosalquesde I'arc absidal de Sainte-Marie-Majeure de Sixte III
(432-440)a Rome1,en se fixant sur la premiere scene, en haul a
gauche du premier rang. Pour I'ensemble de nos opinions sur ce
1. Sur tons les problemes lies a cette fondation : R. KRAUTHEIMERW.
FRANKL S. CORBETf,Corpus Basilicarum Christianarum Romae. Le
basiliche paleocristiane di Roma (sec. IV-IX) (Monumenti di Antichita
Cristiana, II Selie 2), vol. III, Citta del Vaticano 1971,p. 1-60; Santa
ADocrVDha 7. 1996. D. 273-292
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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274
G. DE SPIRrrO
sujet DOUgDOUg emlettons de renvoyer a la monographic que
DOUg ommes en train de rediger. D autre part, pour rester dans
leg limites de la presente contribution, on a essayede reduire
l apparat bibliographique en s appuyant sur Ie resume des
etudes foumies par F. W. Deichmann2 et M. Andaloro3.
Toutefois, DOUgenons a souligner que toutes leg opinions que
DOUg van~onspourraient peut-etre etre reviseesala lumiere de
l etude de V Belli sur leg restaurations des mosalques4.Cette
recherche, conduite sous a direction de M. Andaloro, a ete pre-
sentee comme these a la Faculte des Lettres de l Universite de
Maria Maggiore a Roma, a cura di C. PIETRANGELI,resentazione i G.
ANDREOTTIChiese Monumentali d ltalia), Firenze 1988; M. RIGHETTI
TOSTI-CROCE,L Architettura tra il 1254 e il 1308», dans Roma nel
Duecento. L arte nella citta dei papi da Innocenzo III a Bonifacio VIII,
coordinatore dell opera A. M. ROMANINI, orino -Moncalieri (Torino)
1991,p. 108-169, . 113-115;S. DE BLAAUW,Cultus et Decor. Liturgia e
architettura nella Roma tardoantica e medievale. Basilica Salvatoris.
SanctaeMariae. Sancti Petri I (Studi e Testi 355), Roma 1994,p. 333-
447 mais cf. aussiB. M. ApOLLONJGHETTI,Nuove considerazioni sulla
basilicadi SantaMaria Maggiore in Roma,Roma 1988.
2. F. W. DEICHMANN, Einfiihrung in die christliche Archiiologie,
Darmstadt 1983,p. 229-230. Pour les mosalques de l abside de Nicolas
IV (1288-1292), f. M. R. MENNA,«Niccolo IV, i mosaici absidali di S.
Maria Maggiore e l Oriente », Rivista dell Istituto Nazionale
d Archeologia e Storia dell Arte s. III, 10 (1987), p. 201-224; G.
MATTHIAE, Pittura romana del Medioevo, vol. II : Secoli. XI-XI~
Aggiomamento scientifico e bibliografia di F. GANDOLFO, oma 1988,p.
343 ; A. TOMEI,Torriti pictol: Una vicenda igurativa del tardo Duecento
romano, Roma 1990,p. 107-114; M. R. MENNA,«I mosaici torritiani,
Franz Wickhoffe Ie immagini di Filostrato », Studi Romani 39 (1991),
p.236-251.
3. G. MATTHIAE,Pittura romana del Medioevo, vol. I : Secoli. IV-X,
Aggiomamento scientifico e bibliografia di M. ANDALORO, oma 1987,
p. 228-230.
4. S. SPAIN,The Programm of he Fifth-Century Mosaicsof Santa Maria
Maggiore. A dissertation in the Department of Fine Arts submitted to
the Faculty of the Graduate School of Arts and Science n partial fulfill-
ment of the requirements for the degree of Doctor of Philosophy at
New York University. October 1968,Ann Arbor (Michigan) 1969,prin-
ted in 1991, p. 112-122.264-276; B. BRENK, Die friihchristlichen
Mosaiken in Santa Maria Maggiore zu Rom, Wiesbaden 1975,p. 5-7; S.
SPAIN, Carolingian Restorations of the Mosaics of S. Maria Maggiore
in Rome », Gesta 16 (1977), p. 12-22; S. SPAIN, The Restorations of
Sta. Maria Maggiore Mosaics », The Art Bulletin 65 (1983),p. 325-328
contre P.J. NORDHAGEN,The Archaeology of Wall Mosaics: A Note
on the Mosaics in Sta. Maria Maggiore in Rome », The Art Bulletin 65
(1983),p. 323-324 M. ANDALORO, p. cit. (n. 3), p. 229.~
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275
ANNONCIAll0N DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
Chieti pendant l annee academique 1993-94; no us esperons
qu elle sera bientot publiee.
2.
3
scene.
La representation (fig. 1) montre line femme assise sur un
trone, revetue d un costume d or et paree de bijoux; SOliS on
bras droit, elle tient line quenouille et dans ses mains un tissu
aux memescouleurs que Ie fond de la mosaique : blanc, rouge et
azur. La femme est entouree de trois figures angeliques vetues
de pallia. A gauche, deux d entre elles sont placees entre la
femme et un edifice dont l entree est fermee ; leurs pallia portent
Ie sigma lunaire C. Sur celui de la figure qui se trouve a droite,
on lit la lettre L. Les autres personnagesplaces a cote de« l an-
ge », a droite, semblent plutot faire partie de la scene suivante.
La scene a longtemps ete consideree comme representant ap-
parition de l ange a Joseph5ou la promesse aite a Abraham6; il
semble cependant qu elle illustre la rencontre des «deux anges»
avec Jacob de Gn 32, 4 et 7, selon un modele que l on retouvre
de maniere similaire dans line miniature de la Genesede Vienne
5. Protevangile de Jacques 14, 1-2: E. AMANN, Le Protevangile de
Jacques et ses remaniements latins (Les apocryphes du Nouveau
Testament),Paris 1910,p. 232-235 E. DESTRYCKER.a forme la plus an-
cienne du Protevangile de Jacques.Recherchessur Ie Papyrus Bodmer 5
avec une edition critique du texte grec et une traduction annotee
(Subsidia Hag,iographica 33), Bruxelles 1961, p. 126-131; Pseudo-
Matthieu 11: E. AMANN, op. cit., p. 316-317. Sur l identification: Ch.
PIETRI,«Les premieres images de Marie en Occident », dans Quaeritur
Inventus Colitur. Miscellanea in onaTedi padre U. Fasola II (Studi di
Antichita Cristiana 40), Cilia del Vaticano 1989,p. 587-603,p. 600-601
J. E. BARCLEY LOYD,«Das goldene Gewand der Muttergottes in der
Bildersprache mittelalterlicher und fruhchristlicher Mosaiken in Rom »,
Romische Quartalschrift fur christliche Altertumskunde und Kirchen-
geschichte 85 (1990), p. 66-85, p. 73; E. JASTRZEBOWSKA,ild und
Wort: das Marienleben und die Kindheit Jesu in der christlichen Kunst
vom 4. bis 8. Jh. und ihre apokryphen Quellen (Vorabdruck der
Habilitationsschrift), Warszawa 1992,p. 31; M. R. MILES,«Santa Maria
Maggiore s Fifth-Century Mosaics: Triumphal Christianity and the
Jews », The Harvard Theological Review 86 (1993), p. 155-175,p. 159.
6. N. A. BRODSKY, L iconographie oubliee de I Arc Ephesien de
Sainte Marie Majeure a Rome », Byzantion 31 (1961), p. 413-503,p.
437-439.446-448;S. SPAIN, p. cit., p. 136-139; S. SPAIN, The Promised
Blessing: The Iconography of the Mosaics of S. Maria Maggiore », The
Art Bulletin 61 (1979),p. 518-540, . 534-537.
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276
G. DE SPIRITO
datant du VIe siecle7.Enfin, dans Ie ciel, une colombe descend
sur la femme, tandis qu'un autre «ange» vole vers elle.
Interpretations des savants.
Selon certains savants, 'image represente ' Annonciation telle
que la relatent Ie Protevangile de Jacques 11, 1-3 (datant proba-
blement du milieu ou de la seconde moitie du lIe siecle pour sa
partie plus ancienne, remanie par la suite au lye siecle)8 et l' E-
vangile du Pseudo-Matthieu 9, 1-2 (ou Nativite de Marie; entre la
premiere moitie du ye siecle et l'annee 690)9: reprenant un
theme classique1O,es textes representent Marie occupee a tis-
7. Nationalbibliothek in Wien. Die Wiener Genesis. Farbenlichtdruck-
faksimile der griechischen Bilderbibel aus dem 6. Jahrhundert n. ChI:,
Cod. Vindob. Theol. Graec. 31. Herausgegeben und Erlautert yon H.
GERSnNGER,Wien 1931,p. 92-93. 169,pl. XIV fig. 72; H. SCHRECKEN-
BERG K. SCHUBERT,ewish Historiography and Iconography in Early
and Medieval Christianity (Compendia Rerum Iudaicarum ad Novum
Testamentum, Section III: Jewish Traditions in Early Christian
Lit erature 2), Assen/Maastricht 1~92,p. 220,pl. 51.
8. E. AMANN, op. cit., p. 220-227; E. DE STRYCKER,p. cit., p. 112-115;
H. J. FREDE,Kirchenschriftstellel: Verzeichnis und Siegel (Vetus latina.
Die Reste der altlateinischen Bibel Ill), Freiburg (Br.) 1981
(Aktualisierungsheft 1984 und 1988], p. 112-113 (VIe-VIle siecle); R.
McLachlan WILSON, « Apokryphen des Neuen Testaments.
Protoevangelium des Jakobus », Theologische Realenzyklopiidie IV
(1978), p. 333-334 M. ERBETTA,Gli apocrifi del Nuovo Testamento.
Vangeli, vol. 1/2 : Infanzia e passione di Cristo. Assunzione di Maria,
Casale Monferrato -Torino 1981,p. 7-20 (200 environ) ; o. CULLMANN,
« Kindheitsevangelien », dans NeutestamentlicheApokryphen in deut-
scher Obersetzung herausgegeben yon W. SCHNEEMELCHER,. Band:
Evangelien, Tiibingen 1987,p. 330-372,p. 334-338; A. QUACQUARELLI,
«Sull'iconografia apocrifa della Nativita », Vetera Christianorum 25
(1988), p. 199-215,p. 206 (vers le lIIe siecle); M. v: MARINI-CLARELLI,
«Apocrifi », dans Enciclopedia dell'Arte Medievale II (1991), p. 167-
175) .171 (200 environ).
9. E. AMANN, op. cit., p. 313; sur la datation : M. BERTHOLD, Zur
Datierung des Pseudo-Matthaus-Evangeliums », Wiener Studien 102
(1989), p. 247-248. Le texte etait auparavant date soit de la premiere
moitie du ve siecle ou du VIIe-Vllle siecle environ: H. J. FREDE,op.
cit., p. 113; M. ERBETTA, p. cit., p. 44-46; O. CULLMANN, rt. cit., p.
364-365; M. V. MARINI-CLARELLI,art. cit., p. 171-172. Par contre, L.
MORALDI,Apocrifi del Nuovo Testamento, ol. I, Torino 19752 1971),
p. 197,pense qu'une partie etait connue au ve siecle, mais que la com-
position actuelle remonte au VIe-VIle siecle.
10. A. W ASOWICZ, «Traditions antiques dans les scenes de
l'Annonciation», Dialogues d'Histoire Ancienne 16 (1990), p. 163-177.
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277
' ANNONCIATION DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
serlo La scene serait a rapprocher de la theologie de la
Theotokosl2, du theme de l'Incarnationl3 tel qu'il apparait chez
lL F. GANDOLFO,« La basilica sistina : i mosaici della navata e dell'arco
trionfale », dans Santa Maria Maggiore a Roma, a cura di C.
PIETRANGELI, Presentazione di G. Andreotti (Chiese Monumentali
d'ltalia), Firenze 1988, p. 84-123; Ch. PIETRI,« Le Origini », dans Imago
Mariae : Tesori delta civilta cristiana. Roma, Palazzo Venezia, 20 giugno
-2 ottobre 1988, Roma 1988, p. 5 ; P. AMATO, «Introduzione », dans De
vera effigie Mariae. Antiche icone mariane. Roma, Basilica di S. Maria
Maggiore, 18 giugno -3 luglio 1988, Roma 1988, p. 14; A.
QUACQUARELLI, art. cit., p. 205; A. QUACQUARELLI -F. BISCONTI,
«L'iconografia mariana antenicena e i suoi presupposti », dans La
mariologia nella catechesi dei Padri (Eta prenicena). Convegno di studio
e aggiornamento. Facolta di Lettere cristiane e classiche (Pontificium
Institutum Altioris Latinitatis). Roma, 18-19 marzo 1988, a cura di S.
FELICI (Biblioteca di Scienze Religiose 88), Roma -Citta di Castello
(PG) 1989, p. 241-256, p. 256; Ch. PIETRI, art. cit. (n. 5), p. 600-603; J.
E. BARCLEY LLOYD, art. cit. (n. 5), p. 73 ; E. JASTRZEBOWSKA, F. cit. (n.
5), p. 30.74-75; S. DE BLAAUW, of. cit. (n.1), p. 355.
12. E. STAUFFER, «Antike Madonnenreligion », dans Aufstieg und
Niedergang der romischen Welt 11,17/3 (1984), p.1425-1499, p.1426.1487-
1488; R. L. FREYTAG, Die autonome Theotokosdarstellung der friihen
lahrhunderte. Teil I : Textband. Teil II : Katalog- und Abbildungsband
(Beitrage zur Kunstwissenschaft 5), Miinchen 1985, I, p.100-102.188-202;
A. EFFENBERGER, ruhchristliche Kunst und Kultur: Van den Anfiingen
his zum 7. lahrhundert, Miinchen -Leipzig 1986, p. 229-232; P. J.
NoRDHAGEN, «Le monde chretien », dans C. BERTELLI, Les mosai ques,
avec la participation de X. Barral i Altet, M. G. Branchetti, P. J.
Nordhagen et A. Pica. Edition franc;:aise SOliS a direction de J. Fayt.
Traduit par R. de Merleymont, Paris 1989 (ed. orig. Milano 1988), p. 45-
100, p. 48; J. SNYDER,Medieval Art. Painting -Sculpture -Architecture,
4th-14th Century, New York 1989, p. 47; G. HELLEMO, Adventus Domini.
Eschatological Thought in 4th-Century Apses and Catecheses, Leiden
1989, p. 35.61.86-87.96.106-107.109.115; J. E. BARCLEY LLOYD, art. cit. (n.
5), p. 71-74.77; E. JASTRZEBOWSKA, F. cit. (n. 5), p. 31-121; J. PuSTKA,
Santa Maria Maggiore (Guide d'oro. Arte e Spiritualita), Roma 1992, p.
20-22.39.68-74.80-86 ; S. BENKO, The Virgin Goddess. Studies in the Pagan
and Christian Roots of Mariology (Studies in the History of Religions
LIX), Leiden -New York -K6ln 1993, p. 97.194.216; L. CASTELFRANCHI
VEGAS, L'arte del Medioevo. Con un contributo di A. CONTI (Storia
dell'arte europea), Milano 1994 (19931), p. 24; Chr. BELTING-IHM, «Zum
Verhiiltnis yon Bildprogrammen und lltuli in der Apsisdekoration friiher
westlicher Kirchenbauten », dans Testo e lmmagine nell'Alto Medioevo,
15-21 aprile 1993 (Settimane di Studio del Centro Italiano di Studi
still' Alto Medioevo 41), Spoleto 1994, p. 839-884 p. 859-862; M. v:
MARINI CLARELLI, «La controversa nestoriana e i mosaici dell'arco trion-
fale di S. Maria Maggiore », dans Bisanzio e rOccidente : arte, archeolo-
gia, storia. Studi in onore di F. de' Maffei, Roma 1996, p. 323-344.
13. B. BRENK, OF. cit. (n. 4), p. 35-52; R. KRAUTHEIMER,Rome. Profile of
a City, 312-1308, Princeton (New Jersey) -Oxford 1980, p. 46.51; R.
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278
G. DE SPIRITO
Augustin14, chez Ambroise15 et chez Leon16 au, enfin, d'une
polemique contre Ie judalsme combinee avec Ia doctrine de Ia
Theotokos17.
Quant aux vetements de Ia Vierge, ils representeraient mains
I'image de Maria regina18que celIe de Marie virgo virginum et
regina virginum selon es paroles du Psaume45, 1-1819.
Cependant, line minorite des critiques, tenant compte de cer-
taines reticences des Peres de I'Eglise face aux ouvrages apo-
cryphes2O, t surtout de I' Epistula ad Exuperium d'lnnocent leT
(401-417) de 405 qui Ies condamne21,est d'avis qu'il s'agit de
I' Annonciation a Sarah, emme d' Abraham22.
KRAlTrHElMER, Roma. Profilo di una citta, 312-1308, Roma 1983, p. 61.63 ;
Ch. PlETRI art. cit. (n. 5); S. DE BLAAUW, op. cit. (n.1), p. 333-365.
14. N. A. BRODSKY, art. cit. (n. 6); S. SPAIN,op. cit. (n. 4), p.108-109; B.
BRENK, op. cit. (n. 4), p. 9; E. KITZINGER, The Byzantine Art in the
Making. Main Lines of Stilistic Development in Mediterranean Art 3rd-
7th Century, London 1977, p. 66-68 ; W. TRONZO, «I grandi cicli pittorici
romani e la loro influenza », dans La pittura in 1talia. L'Altomedioevo, a
cura di C. BERTELLI, Milano 1994, p. 355-368, p. 357.
15. Sur la figure de Marie chez cet auteur, voir R. SPATARO,« Uterum
mysterii. La tigura di Maria in Ambrogio », Salesianum 55 (1993), p.
641-656, p. 641-653.
16. Diacre pendant l'episcopat de Sixte III, puis eveque de Rome apres
la mort de ce dernier (440-464); ct. B. STUDER, «Una persona in
Christo. Ein augustinisches Thema bei Leo dem Grossen », dans
Augustinianum 25 [Miscellanea di studi agustiniani in onore di P. A.
Trape] (1985), p. 453-487; ct. J. D. SIEGER, «Visual Metaphor as
Theology: Leo the Great's Sermons on the Incarnation and the Arch
Mosaics at S. Maria Maggiore », Gesta 26 (1987), p. 83-91.
17. M. R. MILES, art. cit. (n. 5).
18. Ch. PIETRI, , art. cit. (n. 5), p. 601-602; M. R. MILES, art. cit. (n. 5), p.
159; d. aussi: S. SPAIN,op. cit. (n. 4), p. 122-136; S. SPAIN, art. cit. (n.
7), p. 5.
19. J. E. BARCLEY LLOYD, art. cit. (n. 5), p. 74-77.
20. N. A. BRODSKY, art. cit. (n. 6), p. 413-415; M. STAROWIEYSKI,
« Problem apokryt6w u pisarzy IVw [De apocryphis Christianis a scrip-
toribus saec. IV vituperatis] », Meander 46 (1991), p. 495-501 (=
Miscellanea Historiae Ecclesiasticae 6 [1983], p. 132-141); sur Ie canon
biblique : O. WERMELINGER, «Le canon des Latins au temps de Jerome
et d' Augustin. Annexe. Dossier des principales sources latines », dans
Le canon de l'Ancien Testament. Sa formation et son histoire, ed. J.-D.
KAESTLI -O. WERMELINGER(Le Monde de la Bible), Geneve 1984, p.
152-210; W. KuNNETH, «Kanon », dans Theologische Realenzyklopiidie
XVII (1988), p. 562-570.
21. Chap. [6] 7: Caetera autem quae vel sub nomine Matthiae sive Jacobi
minoris ...vel sub nomine Thomae, et si qua sunt alia non solum repu-
dianda verum etiam noveris esse damnanda (PL 20, 502). Pour tine ten-
tative d'attenuer l'importance de ce passage, voir E. JASTRZEBOWSKA,
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279
'ANNONCIAllON DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
Enfin, la critique concorde sur Ie fait que la pourpre de l'eche-
veau de laine qui s'echappe de la corbeille est a mettle en rela-
tion soit avec Ie theme du Christ-Empereur soit avec l'exegese,
rabbinique aussi bien que patristique, du voile violet du
Tabernacle (Ex 26) et du drap de la meme couleur qui envelop-
pait l' Arche de l' Alliance (Nb 4)23,
4. Essaid'interpretation.
La these du programme iconographique qui exalterait Marie
Theotokos ne tient pas compte de deux faits: d'une part Ie
concile d'Ephese fut un synode christologique et non pas
mariologique24; d'autre part la dedicace de la basilique n'utilise
pas Ie mot clef Genetrix Dei mais virgo Maria et Genetrix gnara
virl 25.
«Archetyp ewangelii Pseudo-Mateusza », Studia Zr6dtoznawcze 30
(1987),p. 151-157; sur toute la question, voir O. CULLMANN, rt. cit. (n.
8), p. 330-334.
22. S. SPAIN, p. cit. (n. 4), p. 100-207; S. SPAIN, rt. cit. (n. 7).
23. H. PAPASTRAVOU,Le voile, symbole de l'Incamation. Contribution
a tine etude semantique », Cahiers archeologiques 1 (1993),p. 141-168,
p.141-144. Sur a typologie comme instrument d'exegeseet sur ces iens
avec l'iconographie, cr. I.-N. GUINOT,«La typologie comme technique
hermeneutique », dans Figures de l'Ancien Testamentchez les Peres
(Cahiers de Biblia Patristica 2), Stasbourg 1989,p.1-34.
24. B. STUDER, La recezione del Concilio di Efeso del 431 », dans La
Tradizione: forme e modi. XVIII Incontro di studiosi dell'antichita cris-
tiana. Roma 7-9 maggio 1989 (Studia Ephemeridis «Augustinianum»
31), Roma 1990, p. 427-442; B. STUDER, 11 Concilio di Efeso (431)
nella luce della dottrina mariana di Cirillo di Alessandria », dans La
mariologia nella catechesidei Padri (Eta postnicena). Convegnodi stu-
dio e aggiomamento. Facolta di Lettere cristiane e classiche Pontificium
Institutum Altioris Latinitatis). Roma 10-11 maTZO1989, a cura di S.
FELICI Biblioteca di ScienzeReligiose 95), Roma 1991,p. 49-67.
25. cr. Inscriptiones Christianae Urbis Romae Septima Saeculo
Antiquiores, ed. I. B. DE ROSSI, ol. II, Romae 1888,p. 60, n° 6; p. 71,
n° 42; p. 98, n° 6 ; p. 139, nO28; C. CECCHELLI, mosaici della basilica
di S. Maria Maggiore, Torino 1956, p. 64; E. DIEHL, Inscriptiones
Latinae Christianae Veteres I-IV, Berolini 1925-1967,n° 976; G. A.
WELLEN, Theotokos. Eine ikonographische Abhandlung abeT das
Gottesmutterbild in frahchristlicher Zeit, Utrecht -Antwerpen 1961,p.
120 ; R. KRAUTHEIMERW. FRANKLS. CORBETT, orpus Basilicarum
Christianarum Romae. Le basiliche paleocristianedi Roma (sec. IV-IX)
(Monumenti di Antichita Cristiana, II Serie 2), vol. III, Citta del
Vaticano 1971, p. 5-6; Th. KLAUSER, «Rom und der Kult des
Gottesmutter Maria », ahrbuch flir Antike und Christentum 15 (1972),
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280
G. DE SPIRffO
Plus generalement, Ie theme de l'induere carnem est si large-
ment repandu dans la litterature patristique26 qu'il est difficile
de relief cette image a la seule doctrine de l'Incamation de Leon
Ier. De plus, sur Ie plan artistique, il semble bien que l'evolution
des mosalquesde l'epoque de Sixte III soit differente de celIe du
temps de son successeur27.
Entin, la these anti-juive qui se tonde sur leg lois du Codex
Theodosianus XVI, 8, 1-29 de Iudaeis28et sur leg home ies de
Jean Chrysostome (entre l'automne et l'hiver de 386 et l'autom-
p. 120-135; B. BRENK,op. cit. (n. 4), p. 1-2; R. L. FREYTAG, p. cit. (n.
12), fl, p. 24, E 1; F. GANDOLFO, rt. cit. (n. 11), p. 87; J. E. BARCLEY
LLOYD,art. cit. (n. 5), p. 71-72,n. 19; E. WIRBELAUER, wei Piipste in
Rom.. Der Konflikt zwischen Laurentius und Symmachus (498-514).
Studien und Texte (Quellen und Forschungen zur antiken Welt 16),
Munchen 1993,p. 263,n. 126; Chr. BELTING-IHM, rt. cit. (n. 12), p. 860
(avec traduction en langue allemande); S. DE BLAAUW,op. cit. (n. 1), p.
356 et n. 93. Ce n'est pas ici Ie lieu de discuter de l'emplacement de la
dedicace aujourd'hui perdue; il nous parait cependant difficile de la
situer sur la fa"ade interieure de la basilique.
26. Ct. par exemple pour la premiere moitie du ye siecle Pierre
Chrysologue, eveque de Ravenne, Sermo 29.4 Velatur in humano cor-
pore, qui homini uoluit essecommunis; ...maiestatem texit, qui fragilem
studuit parentis amore complecti (CCSL 24, p.l71).
27. M. ANDALORO, Pittura romana e pittura aRoma da Leone Magno
a Giovanni YII », dans Committenti e produzione artistico-letteraria
nell'Alto Medioevo occidentale,4-10 aprile 1991 (Settimane di Studio
del Centro Italiano di Studi still' Alto Medioevo 39), Spoleto 1992, p.
569-609, . 569-578.
28. XYI, 8, 1 du 18 octobre 315 : ...Si quis vera ex populo ad eorum
nefariam sectam accesseritet conciliabulis eorum se adplicaverit, cum
ipsis poenas meritas sustinebit; 8, 2 du 29 novembre 330; 8, 3 du 11
decembre 321 ; 8, 4 du 1 erdecembre 331 ; 8, 5 du 22 octobre 335 : ...
Eum, qui ex /udaeo Christianus actus est, nquietare /udaeos non liceat
...; 8, 6 du 13 aout 339 : Quod ad mulieres pertinet, quas /udaei in turpi-
tudinis suae duxere consortium in gynaeceo nostro ante versatas, lacet
easdem restitui gynaeceo idque in reliquum observari, ne Christianas
mulieres suis iungant flagitiis vel, si hoc fecerint, capitali periculo subiu-
gentur; 8, 7 du 3 juillet 357 [ou 352]; 8, 8 du 17 avril 392: ...Quam
omnino submoveri ubemus iniuriam nec eorum in ea superstitionesedu-
Ius coeptus aut per vim iudicum aut rescribti subreptione nvitis primati-
bus suis, ..; 8, 9 du 29 septembre 393 : ...Sublimis igitur magnitudo tua
hac iussione susceptanimietatem eorum, qui sub Christianae religionis
nomine inlicita quaequepraesumunt et destruere ynagogasadque expo-
liare conantul; congrua severitatecohibebit; 8, 10 de fevrier 396; 8, 11
du 24 avril 396 ; 8, 12 du 17 uin 397 ; 8, 13 du 1 er uillet 397 : /udaei sint
obstricti caerimoniis suis 8, 14 du 11 avril 399 : Superstitionis ndignae
est, ut archisynagogi sive presbyteri /udaeorum vel quos ipsi apostolos
vacant,qui ad exigendum aurum adqueargentum a patriarcha cerra tem-
pore diri~untur, a sin~ulis svnaJ o~is xactamsummam adaue susceDtam
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281
ANNONCIATION DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
ne 387)29a Ie tort de ne pas voir qu il s agit plutot d une pole-
mique visant a empecher des contaminations entre la nouvelle
religion d etat et la tradition juive3O.
ad eundem reportent; 8,15 de fevrier 404; 8,16 du 22 avriI404; 8,17 du
25 juillet 404 8, 19 du 29 mai 408 : Iudaeos quodam estivitatis suaesol-
lemni Aman ad poenae quondam recordation em incendere et sanctae
crucis adsimulatam speciem in contemptum Christianae idei sacrilega
mente exurere provinciarum rectores prohibeant, ne iocis suis idei nos-
trae signum inmisceant,sed itus SUDSitra contemptum Christianae egis
retineant,amissuri sine dubio permissa hactenus, isi ab inlicitis tempera-
verint; 8, 19 du 1er avril 409: ...Certum est enim, quidquid a fide
Christianorum discrepat, egi Christianae essecontrarium ...Et quamvis
qui haec admiserint,priscorum principum legibus jure damnati sint, non
ramen paenitet saepiusadmonere,ne mysteriis Christianis inbuti perver-
sitatem Iudaicam et alienam Romano imperio post Christianitatem
cogantur arripere. Ac si quisquam id crediderit esse emptandum, auc-
tores facti cum consciis ad poenam praeteritis legibus cautam praecipi-
mus constringi, quippe cum gravius morte sit et inmitius caede, i quis ex
Christiana ide incredulitate Iudaica polluatur ; 8, 20 du 26 uillet 412 ; 8,
21 du 6 aout 412 [ou 418] : ...Sed ut hoc Iudaeorum personis volumus
esse ro visum, ta illud quoque monendum esse ensemus, e Iudaei for-
sitan insolescantelatique sui securitatequicquam praeceps n Christianae
reverentiam cultionis admittant; 8, 22 du 20 octobre 415: ...Si
Christianum vel cuiuslibet sectaehominem ingenuum servumve Iudaica
nota oedare temptaverit vel ipse vel quisquam Iudaeorum, legum severi-
tati subdatur; 8, 23 du 24 septembre 416 : ...has, quos neque constantia
religiosae confessionis n hoc eadem cultu inhaerere perspexerint neque
venerabilis baptismatis ide et mysteriis inbutos esse, d legem propriam,
quia magis Christianitati consulitu1; liceat remeare; 8, 24 du 10 mars
418; 8, 25 du 15 fevrier 423 ; 8, 26 du 9 avril 423 ; 8, 27 du 8 jilin 423 ; 8,
28 du 8 avril 426 : Si Iudaei vel Samaritanaeilius filiave seu nepos,unus
aut plures, ad Christianae religionis lucem de tenebrispropriae supersti-
tionis consilio meliore migraverint, non liceat eorum parentibus, d est
patri vel matri, avo vel aviae,exheredarevel in testamento ilentio praete-
rire vel minus aliquid eis relinquere, quam poterant, si ad intestato voca-
rentu1; adipisci; 8, 29 du 30 mill 429 (Theodosiani ibri XVI cum consti-
tutionibus Sirmondianis, ed. Th. MOMMSEN, dsumpto apparatu P.
KRUEGERI, .2,Berolini 1905,p. 887-895).
29. Adv. Iud. 1, 1,5; 1, 2, 3; 1, 3,1; 1, 6, 2-3; 1,7,1-2; 1,8,1; 7,1,2
(PG 48, 844-847.852-855.915). Ct. W. KINZIG, « Non-Separation :
Closenessand Co-operation between Jews and Christians in the Fourth
Century », Vigiliae Christianae45 (1991),p. 27-53,p. 36; L. V. RUTGERS,
«Archaeological Evidence for the Interaction of Jews and Non-Jews in
Late Antiquity», American Journal of Archaeology 96 (1992), p. 101-
118.
30. W. KINZIG, art. cit. ; ct. aussiJ. DOIGNON,«Occisus Christus. La
meditation d Augustin sur la relation de cet evenement t la conquete
romaine et it la defaite juive », dans Figures du Nouveau Testament hez
les Peres Cahiers de Biblia Patristica 3), Strasbourg 1991,p. 43-52; E.
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282
G. DE SPIRITO
En fait, la scenemontre Marie vetue d'or et de bijoux symbo-
lisant Ie vetement chaste qu'elle a donne au Logos. De plus, il
faut rattacher les mots d' Es 7, 14, de Ps 18, 6, et de Mt 22, 2, soit
l'embleme de l' ncarnation du Verbe31.
Par ailleurs, la laine qu'elle tisse n'est pas de couleur pourpre
mais plutot de la couleur de l'aube, qui est aussi a couleur utili-
see pour Ie fond de toutes les scenesde la mosalque de l'arc.
Elle exprime, selon Prudence, la venue du Messie, aube de la
nouvelle epoque qui delivre du peche32 t soleil qui reveille des
tenebreS33. e tissu, qui se rattache directement a l'idee de la
nature humaine du Fils de Dieu dans la litterature patristique,
semble etre prepare pour la colombe, symbole du Saint-Esprit,
et pour «l'ange» qui pourrait bien representer a nature divine
du Christ34. I est l' Ange du Testament et de l' Alliance (Es 3, 1)
BAMMEL,«Heidentum und Judentum in Rom nach einer christlichen
Darstellung des fiinften Jahrhunderts », Augustinianum 34 (1994), p.
437-446.
31. A. DE NICOLA,«Metafore e figurazioni sulla divina maternita di
Maria nei Padri postniceni », dans La mariologia nella catechesi dei
Padri (Eta postnicena). Convegnodi studio e aggiornamento.Facolta di
Lettere cristiane e classiche(Pontificium Institutum Altioris Latinitatis).
Roma 10-11 marzo 1989, a cura di S. FELICI (Biblioteca di Scienze
Religiose 95), Roma 1991,p.159-199,p. 196-197.
32. Cathemerinon 11.57-64 0 quanta rerum gaudia I aluus pudica conti-
net, ex qua nouellum saeculum procedit et lux aurea I vagitus lle exor-
dium I uernantis orbis prodidit; I nam tunc renatus sordidum I mundus
ueternum depulit (ed. M. LAVARENNE, rudence, ome I: Cathemerinon
Liber [Livre d'heures) [Collection des Universites de France], Paris
1943, p. 64; ed. M. P. CUNNINGHAM,Aurelii Prudentii Clementis
Carmina [CCSL 126], Turnholti 1966,p. 62) ; Ambroise (?), Hymnes
2.1-4: Splendor paternae gloriae, I de luce lucem proferens, I lux lucis et
fans luminis, I dies dierum illuminans ; et 29-32 : Aurora cursusproue-
hit; I aurora tofus prodeat I in Patre tofus Filius, I et tofus in Verba Pater
(ed. M. SIMONETTI, MBROGIO,nni (Biblioteca Patristica 13), Firenze
1988,p. 27-29; ed. J. FONTAINE, MBROISE E MILAN, Hymnes, Paris
1992,p. 184-187). Sur ce texte et leg deux passages, t. M. SIMONETTI,
op. cit., p.161-162; J. FONTAINE,p. cit.,p.177-183.188-191.201-204.
33. Cathemerinon 2, 1-4 : nox et tenebraeet nubila, I confusa mundi et
turbida, I lux intrat, albescit polus, I Christus venit, discedite; 9-12 : Sic
nostra mox obscuritas I fraudisque pectus conscium I ruptis retectum
nubibus, I regnantepallescet Deo ; 25-28 : Sol eccesurgit igneus; I piget,
pudescit paenitet, nec testequisquam lumine I peccareconstanterpotest
(ed. LAVARENNE,. 8; ed. CUNNINGHAMCCSL 126],p. 7; comrnentai-
re: M. M. VAN ASSENDELFf, ol eccesurgit igneus. A Commentary on
the Morning and Evening Hymns of Prudentius [Cathemerinon 1,2,5
and 6), Groningen -Assen 1976,p. 42.92-94.100-101).
34. Justin, Apol. 1.33.7-8 (PG 6, 381); A. WARTELLE,Saint Justin.
Apologies (Etudes Augustiniennes),Paris 1987,p. 142-145 mais il s'agit
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283
' ANNONCIATION DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
et l'ales diei nuntius qui reveille de la nuit et du sommeil, sym-
boles du peche, oujours selon eg paroles de Prudence35,
Finalement, ce vetement s'echappe d'une corbeille, qui est
tres probablement line image de Marie (JTci~voS"36,t il presente
leg couleurs de l'aube qui symbolisent Ie corps du Christ, pur et
different de celui des autres hommes qui, eux, sont marques par
Ie peche d' Adam. La scene explique donc leg mysteres de
l'Incarnation et de la Trinite selon line exegese qu'on retrouve
par exemple chezHippolyte, L' Antechrist 437,
Dans ce texte d'Hippolyte, la quenouille avec la «laine-corps
d'une seule apologie : Ch. MUNIER, L' apologie de Saint Justin philosophe
et martyr [Paradosis 38], Fribourg 1994) ; ct. aussi M. FRIEDMAN, «The
Angelic Creation of Man », Cahiers archeologiques 39 (1991), p. 79-94.
35. Cathemerinon 1, 1-4: Ales diei nuntius Ilucem propinquam praeci-
nit; I nos excitator mentium I iam Christus ad uitam uocat; et 97-100:
Tu, Christe, somnum dissice, I tu rumpe noctis uincula, I tu solue pecca-
turn uetus I nouumque lumen ingere (ed. LAVA RENNE, p. 4.7; ed.
CUNNINGHAM [CCSL 126], p. 3.6; commentaire: M. M. VAN
ASSENDELFT, of. cit., p. 39.41.59-61.90-91). Sur ces metaphores de
Prudence, ct. M. M. VAN ASSENDELFf, of. cit., p.13-35.
36. A. DE NICOLA, art. cit. (n. 31), p.168.
37.4, 1.' ETTEL8l'Jap <>A6yos <>TOU 8EOUaaapKos WV EvE8uaaTo T1']V
aylav a<lPKa EK Tfjs aylas TTap8EVOU WS vu~<I>los L~aTLov, E~u<lxivas
EaUT i\ EV T i\ UTaupLK i\ TTa8El, OTrWS cruYKEpaaas TO 8VT]TOV 1']~WV
aw~a Ttj EaUTOU 8uva~El, Kal ~l~as TO <l>8apTov T i\ a<l>8apT i\ Kal TO
aa8EvEs T i\ Laxup i\ a Ij(JlJ TOV aTTo)J..u~EVOVv8pwTrov. 2. "EaTl ~Ev
ow <>LUTOSTOU Kuplou Ws TO TTa8osTO ETrl T i\ aTaup i\ YEYEVT]~E-
vov, aT1')~V BE EV auT i\ 1'] TOU aylou TTVEu~aTos uva~ls, Kp6KTl 8E
WS 1'] ayla aap.a; Evu<l>alvO~EVT]V T i\ TrVEU~aTl, ~l TO$" 8E 1'] 8l'
aya1TT]sXplaTou xapls a<l>lyouaa Kal Evouaa Ta a~</>6TEpaELS EV,
KEpKls BE 0 A6yos, Ol 8E Epya'6~Evol TraTplapxal TE Kal TTpo<l>ftTaL
Ol TOV KaAov Tro81']Pll Kal TEAElOV XlTwva ixpalvoVTEs XPlUTOU, 8l' &v
0 A6yos 8llKVOU~EVOS KEpKl80s 8lKTlv E~u<j>alvEl 8l' aUTwu TaW' aTTEp
~OUAETal <> TTaT1']pE. NORELLI, IpPOLITO, L 'Anticristo (Biblioteca
Patristica 10), Firenze 1987, p. 70-73). Voici ma traduction de ce texte :
«4,1. C'est pourquoi Ie Logos de Dieu, qui n'avait pas de chair, areve-
tu la sainte chair de la Sainte Vierge tell'epoux Ie vetement. Il n'a ter-
mine de Ie tisser qu'au moment du sacrifice sur la croix afin de sauver
l'homme qui s'etait perdu, en melant notre corps mortel avec sa puis-
sance et en melangeant l'incorruptible avec Ie corruptible et Ie faible
avec Ie fort. 2. Le metier it tisser du Seigneur c'est donc la passion
accomplie sur la croix, sa chaine c'est la puissance du Saint-Esprit, la
trame c'est la sainte chair tissee dans l'Esprit, Ie filla grace qui les lie et
les unit it travers l'amour du Christ de fac;:on t les rendre tine seule
chose, la quenouille c'est Ie Logos et les ouvriers ce sont les patriarches
et les prophetes qui tissent la belle soutane, la parfaite tunique du
Christ, Ie Logos passant it travers eux camille la quenouille tisse parfai-
tement, grace it eux, ce que Ie Pere veut. » Ct. aussi Novatien, Trinite 21
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284
G. DE SPIRITO
du Sauveur »38 epresente Ie Logos. Le «tissu-corps du Christ»
ne sera termine qu au moment du sacrifice sur la croix, quand
s accomplira son reuvre redemptrice. C est pourquoi, dans la
scene du «trone vide» qui apparait au sommet de l arc absidal39,
un tissu de couleur azur, symbole de lumiere et donc de Dieu40,
est pose sur Ie traDe et au-dessous e la croix (fig. 2).
Selon la critique, il s agirait d une pourpre royale, mais les
lettres C qui l oment, identiques it celles des habits des «anges»
it gauche de la Vierge, semblent demontrer qu il s agit d un pal-
lium. Ce vetement blanc comme la purete et l integrite du
Seigneur41,epresente donc la nature humaine du Christ et l ac-
complissementde l reuvre redemptrice du Sauveur42. ailleurs,
pour Tertullien Ie pallium grec symbolise Ie vetement du chre-
tien face it la loge romaine, embleme du paganisme,et represen-
te Ie corps du Fils de Dieu43 venti sur la terre afin de purifier
(PL 3, 928-929); 21, 9[124]-16[125] (H. WEYER, Novatianus. De
Trinitate. Obeyden dreifaltigen Gott, Darmstadt 1962,p. 144-147; G. F.
DIERCKS, ouatiani Opera quae supersuntnunc primum in unum collec-
ta ad fidem codicum qui adhuc extant necnon adhibitis editionibus uete-
ribus [CCSL 4], Tumholti 1972,p. 53-55).
38. Cette metaphore se rattacherait ainsi a l idee du travail dans Ie
milieu des moniales : A. QUACQUARELLI, La teologia del lavoro
nell antico monachesimo femminile prebenedettino », Vetera
Christianorum 22 (1985),p. 233-258, . 239.
39. Sur la signification de l image, voir B. BRENK,op. cit. (n. 4), p. 37-
38 ; A. COLLI,dans La Gerusalemmeceleste.«La dimora di Dio con gli
uomini» (Ap. 21,3). Immagini della Gerusalemmecelestedal III al XIV
secolo. Catalogo della mostra. Milano, Universita Cattolica del S.
Cuore, 20 maggio -5 giugno 1983,a cura di M. L. GATTIPERER,Milano
1983, p. 185, nO71; F. DE MAFFEI, «L Unigenito consustanziale al
Padre nel programma trinitario dei perduti mosaici del bema dell a
Dormizione di Nicea e il Cristo trasfigurato del Sinai. I», Storia
dell Arte 45 (1982), p. 91-116; J. E. BARCLEY LOYD,art. cit. (n. 5), p.
73; P. K. KLEIN, «Apocalisse », dans Enciclopedia dell Arte Medievale
II (1991), p. 151-167,p. 151; J.-M. SPIESER,Le programme iconogra-
phique des portes de Sainte-Sabine», Journal des Savants 1991),p. 47-
81, p. 80; E. JASTRZEBOWSKA,p. cit. (n. 5), p. 30 ; M. R. MILES,art. cit.
(n. 5), p. 159; mais ct. surtout Y. CHRISTE, apocalypsede Jean, Paris
1996,p. 66-67.
40. Ct. F. DE MAFFEI,art. cit., p. 107-109.
41. Ambroise (?), Hymnes 5, 17-20: Procedat e thalamo suo, I pudoris
aula regia, I geminaegigas substantiae alacris ut currat uiam (ed. M.
SIMONETTI, p cit. (n.32), p. 38-41 ; ed. J. FONTAINE, p cit. (n. 32), p.
263-271.274-275.284-288)ct. aussi Acta Sanctorum, Mai I (1866), p.
383 : Thronum stratum,super quem iacebatstoia alba et corona.
42. Sur ce theme ct. aussiA. DE NICOLA,art. cit. (n. 31), p. 177-178.
43. Tertullien, De pallia 6 (PL 2, 1104-1106; CSEL 76, 124-125; S.
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285
ANNONCIATION DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
l habit d Adam44. Si au moment de l incarnation, Ie Fils de
Dieu, en tant qu homme parfait (Ph 3, 20-21 ; He 2, 10)45et
saint46,etait vetu d un corps ad similitudinem carnis peccati, il
revet apres sa mission line sarx transfiguree. L Annonciation et
Ie «trone vide » semblent donc representer image du Christ au
moment de l incarnation et apres sa resurrection.
Il est donc possible que les «trois anges», a cote de la Vierge,
vetus de pallia ornes du C qui signifie Sauveur47, t du L, symbole
de la «pierre d angle »48,soient a identifier avec les anges, en
representant la Trinite, qui rencontrerent Abraham a Mambre.
De plus, en harmonie avec exegesed Es 7, 14 commune a la lit-
terature patristique, les «anges» pourraient representer Ie nom
d Emmanuel, «Dieu avec nous» (Mt 1, 20-23), et temoigner que
Jesus Christ etait vraiment Ie Fils de Dieu. D ailleurs, selon Lc 1,
35, il Y a un lien particulier entre Marie et la Trinite. En demeu-
rant en elle, Dieu a accompli sa promesse de son cote, la Vierge
se met au service de l economie du salut49.
Enfin, l image de l edifice avec son entree fermee presente,
dans Ie tympan, un cercle en tons points similaire a celui qui
orne l Arche de l Alliance dans les scenes du siege de Jericho,
COSTANZA,TERTULLIANO, e Pallia [Collana di Studi Classici 3],
Napoli 1968,p. 75-76.139).
44. Irenee, Contre les heresies3,18,7; 5, 14, 2 (PG 7, 937-938.1161-
1162; A. ROUSSEAUL. DOUTRELEAU,RENEEDE LYON,Contre les
heresies.Livre III [Sources chretiennes 211], Paris 1974,p. 364-370 et
Livre V [Sourceschretiennes 153],Paris 1969,p.186-189).
45. Pseudo-Ignace, Lettre aux Smyrniotes 4 (Ph. T. CAMELOT,gnace
d Antioche. Polycarpe de Smyrne. Lettres. Martyre de Polycarpe
[Sourceschretiennes 10], Paris 196~, p. 134-137).
46. Meliton, Sur la Paque 66 (0. PERLER,MELITONDE SARDES, ur la
Paque et fragments [Sources chretiennes 123], Paris 1966,p. 96-97; G.
H. STUART,MELITO OF SARDIS,On Pascha and Fragments [Oxford
Early Christian Texts], Oxford 1979,p. 34).
47. A. QUACQUARELLI,Eucarestia e Ie scene conografiche dei primi
secoli », Civilta Classicae Cristiana 6 [Studi di Letteratura Cristiana in
Ricordo di A. Pastorino] (1985),p. 475-488, . 487.
48. A. QUACQUARELLI, La gammadia pietra angolare : L », Vetera
Christianorum,21 (1984),p. 5-26.
49. M. STAROWIEYSKI,L omeletica mariana palestinese nel secolo V»,
dans La mariologia nella catechesi ei Padri (Eta postnicena). Convegno
di studio e aggiornamento. Facolta di Lettere cristiane e classiche
(Pontificium Institutum Altioris Latinitatis). Roma 10-11 marzo 1989, a
cura di S. FELICI (Biblioteca di Scienze Religiose 95), Roma 1991,p.
117-128, .127-128; A. DE NICOLA,art. cit. (n. 31), p.167-168. Nous ne
traiterons pas ici du theme de la loquela digitorum affiche par les
« anges» ni du sensde leur representation a quatre.
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287
ANNONCIATION DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
occupe l autre extremite de l arc, dans la scene qui est interpre-
tee soil camille Ie songe de Joseph55, oil camille l Annonciation
1:1 arie56,soil encore camille la visio Isaiae57 selon line icono-
graphie comparable 1:1elIe d une miniature de la Topographie
du Casillas Indicopleustes (texte qui nailS est parvenu 1:1ravers
line carie de l original datant du VIe siecle)58 et il symbolise
l Urbs devenue chretienne59.Notre edifice semble donc designer
egalement taus ceux qui n acceptent pas que Ie Christ se soil
revetu d un corps ad similitudinem carnis peccati 1:1ause du
peche d Adam60.C est pourquoi il semble mprobable que l edi-
fice de la scene de l Annonciation soil seulement embleme de
55. Pseudo-Matthieu 11 : E. AMANN, op. cit. (n. 5), p. 336-339. Sur
I identification: Ch. PIETRI, , art. cit. (n. 5), p. 602; J. E. BARCLEY
LLOYD,art. cit. (n. 5), p. 73 ; E. JASTRZEBOWSKA,p. cit. (n. 5), p. 34-35.
56. N. A. BRODSKY,rt. cit. (n. 6), p. 450-451 S. SPAIN, p. cit. (n. 4), p.
146-148; S. SPAIN, rt. cit. (n. 6), p. 535-537.
57. G. DE SPIRITO, rt. cit. (n. 51). A cette occasion,nous tenons a pre-
senter nos excuses aux savants pour les nombreuses erreurs typogra-
phiques presentesdans cette etude, dont il taut attribuer la responsabi-
lite au seul auteur. De meme, on voudra bien no us pardonner la
confusion entre Zacharias et Symeon dans notre intervention loTs du
debat suscite par la communication de M. ANDALORO, rt. cit. (n. 27),
p.616.
58. Topographie 5,166-167 (W. WOLSKA-CONUS,osmas ndicopleustes,
tome II [Livre V] [Sources chretiennes 159], Paris 1970,p. 248-251,p.
249 fig.). Sur ce texte et sur I iconographie des prophetes dans I art
paleochretien en general, cf P. SEVRUGIAN,Prophetendarstellungen n
der fruhchristlichen Kunst », Friihmittelalterliche Studien 26 (1992), p.
65-81,en particulier p. 74-75.
59. C. FRUGONI,«L iconografia del matrimonio e della coppia nel
Medioevo », dans II Matrimonio nella societa altomedievale, 2-28 aprile
1976 (Settimane di Studio del Centro Italiano di Studi sull Alto
Medioevo 24), Spoleto 1977,p. 901-963, . 913-914; Ch. PIETRI, rt. cit.
(n. 5), p. 602; G. DE SPIRITO, rt. cit. (n. 51), p. 569-574.577-578.
60. Ct. Ie traite homonyme d Eutropius datant du debut du ve siecle :
H. S. EYMANN,Eutropius Presbyter und sein Traktat »De similitudine
camis peccati« (Regensburger StudieDzur Theologie 30), Frankfurt am
Main -Bern -New York, p. 113-192; H. S. EYMANN, Eutropius aus
Aquitanien. Ein wiederentdeckter Kirchenschriftsteller des 5.
Jahrhunderts », Kairos 28 (1986), p. 61-74; H. S. EYMANN,«In Christo
enim possidendum est quod cum Christo estpossidendum. Rm VIII als
Verstehenshorizont ftir asketisches Leben in einem Trostbrief des
Eutropius », dans Philologia Sacra. Biblische und patristische Studien
fiir Hermann J. Frede und Walter,ed. R. GRYSONAus der Geschichte
der lateinischen Bibel 24), vol. 2: Apokryphen, Kirchenviiter,
Verschiedenes,Freiburg (Br.) 1993, p. 514-522. Sur I image d Adam
pecheur, cf G.-H. BAUDRY, Le retour d Adam au Paradis,symbole du
~
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G. DE SPIRITO
Marie «porte fermee », selon Ez 44, 1-361, t Temple du Logos62,
theme deja present dans l'hymne 5 d' Ambroise (claustrum
pudoris)63.A notre avis en effet, cette image ne s'est repandue
que plus tardivement dans l'art chretien.
5. Conclusions.
Au terme de cette analyse, on peut tout d'abord affirmer que
celie scene epresente effectivement l' Annonciation a la Yierge,
telle qu'on la retrouve dans Ie sarcophage dit de la fa mille
Pignatta a Ravenne, date de la fin du IY. et du debut du Y'
siecle64.Dans l'un et l'autre exemple, les elements symboliques
l'emportent sur une representation de type narratif.
L'image ne semble pas dependre des textes apocryphes,mais
plutot de l'exegese patristique de Lc 1, 26-39 et d' Es 7, 14 cite
par l'evangile65, exegese iee au theme de l'incarnation et au
schemade l'induere carnem.
De plus, en soulignant a difference entre Ie corps du Christ et
celui des autres hommes, la scene montre qu'il etait necessaire
que Ie Fils de Dieu naisse d'une Yierge et assumeune sarx ad
similitudinem carnis peccati pour sauver l'humanite du peche
d' Adam. II semble donc evident que Ie probleme theologique est
celui de la refutation de la doctrine pelagienne66 e Julien d'E-
salut de l'humanite », Melanges de SciencesReligieuses51 (1994), p.
117-147.
61. A. DE NICOLA,art. cit. (n. 31), p.195-1 .
62. Ibid., p.169-170.
63. Ambroise (?), Hymnes 5,14 (ed. M. SIMONElTI,op cit. (n. 32) p. 38-
39.89; ed. J. FONTAINE, p cit. (n. 32) p. 272-273) ct. aussi Hymne 8, 10
(ed. M. SIMONElTI, . 50-51.91; ed. J. FONTAINE,. 376-377); exegese
du demier texte et des deux passages ansJ. FONTAINE,. 285-286.361-
374.388-389.
64. Pour la scene qui nous interesse, l suffit de renvoyer Ii R. FARIOLI
CAMPANATI,La cultura artistica nelle regioni bizantine d'ltalia dal VI
all'XI secolo », dans I bizantini in Italia (Antica Madre 5), Milano 19862
(1982),p. 137-425, . 146, ig. 48 ; p. 171,n° 4.
65. Ct. Esaias.Pars I : Introductio generalis. Capita 1-39,ed. R. GRYSON
(Vetus Latina. Die Reste del altlateinischen Bibel12), Freiburg (Br.)
1987,p. 9-33.236-250.
66. Fl. G. NUYOLONEA. SOLIGNAC,Pelage et pelagianisme », dans
Dictionnaire de Spiritualite,Ascetique et Mystique,Doctrine et Histoire 12
(Paris 1986),col. 2889-2942;G. BONNER, Pelagianismand Augustine »,
RecherchesAugustiniennes26 (1992),p. 33-51 H. HoPING,«Pelagius»,
dans Biographisch-bibliographischesKirchenlexicon VII (1994), p. 168-
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289
ANNONCIAllON DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
clane, qui affirmait que l homme n avait pas he ite naturelle-
ment de la culpa Adami a travers la concupiscentia carnis67.
Cette hypothese s accorderait d ailleurs bien avec l idee selon
laquelle il taut reconnaitre Adam dans Ie personnagevetil d une
exomis et figurant dans la scene a droite du deuxieme rang de
l arc68,selon une iconographie du protoplaste que l on retrouve
dans des Psautiers69.
La scene signifierait alors que Christ n etait pas seulement un
exemplum de redemption pour les hommes, mais qu il etait
necessaireque son corps flit different de celui d Adam. Il semble
des oTs evident que la scene epresente a position de l eglise de
Rome face a un probleme «christologique» presque exclusive-
ment occidental, et qui ne touche en lien Ie probleme de la
Theotokos. Enfin, sur Ie plan iconographique, la scene semble
relief Ie theme de l incamation du Christ au pallium, c est-a-dire
173; J. TAUER, «Neue Orientierungen zur Paulusexegese des Pelagius »,
Augustinianum 34 (1994), p. 313-358.
67. Ct. Augustin, Contra secundam /uliani responsionem 4, 122: ...vos
ipsam camem sanctam de uirgine procreatam caeterae camis hominum
coequatis, similitudinem camis peccati non distinguentes a carne peccati
(PL 45, 1418). Sur celie polemique, ct. surtout M. LAMBERIGTS,«Julian of
Aeclanum : a Plea for a Good Creator », Augustiniana 38 (1988), p. 5-24;
IDEM, «Augustine, Julian of Aeclanum and E. Pagels Adam, Eve, and
the Serpent », Augustiniana 39 (1989), p. 393-435; IDEM, «Julien d Eclane
et Augustin d Hippone : deux conceptions d Adam », dans Collectanea
Augustiniana. Melanges 7: J. van Bavel, ed. B. BRUNING M. LAMBERIGTS
-J. VAN HOUTEM (Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum
Lovaniensium 92), Leuven 1990, p. 373-410; Ph. L. BARCLIFf, «In
Controversy with Saint Augustin: Julian of Eclanum on the Nature of
Sin », Recherches de Theologie ancienne et medievale 58 (1991), p. 5-20.
68. Pour d autres hypotheses, ct. S. SPAIN, OF. cit. (n. 4), p. 151-161
(Salomon); S. SPAIN,art. cit. (n. 7), p. 524 (Isale); Ch. PIETRI, art. cit. (n.
5), p. 602 (un philosophe selon Ie schema traditionel d interpreter celie
scene); M. R. MILES, art. cit. (n. 5), p. 159-160 (Isale). Sur Adam pro-
phete et sur son role dans l exegese patristique, ct. E. OSBORN,«The
excellence of Adam in second century Christian thought », dans Figures
de l Ancien Testament chez les Peres (Cahiers de Biblia Patristica 2),
Strasbourg 1989, p. 35-59; D. A. BERTRAND, «Adam prophete », dans
Figures de l Ancien Testament chez les Peres (Cahiers de Biblia
Patristica 2), Strasbourg 1989, p. 61-81.
69. M. BERNABO, «Adamo, gli animali, Ie sue vesti e la sfida di satana.
Un complesso rapporto testo-immagine nella illustrazione bizantina dei
Settanta », Miniatura 2 (1988), p. 11-33, p. 23-26; ct. aussi certaines
remarques dans P. PLANK, « Die Wiederaufrichtung des Adam und ihre
Propheten », Ostkirchliche Studien 41 (1992), p. 34-49, p. 45-49. Sur Ie
Psautier chez les Peres, cf.le volume Le Psautier chez les Peres (Cahiers
de Biblia Patristica 4), Strasbourg 1994.
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290 G. DE SPIRITO
a l habit sacerdotaPO, t non pas a la pourpre. Ce vetement se
rattacherait plutot a l image du Christ-consul au, surtout a
l epoque byzantine, du Christ-David71,un personnageque DOllS
pensons pouvoir reconnaitre dans la figure qui se tient a cote de
celui en exomis72.
Finalement, Ie programme iconographique general des
mosalquesse rapprocherait probablement de celui de la pyxis de
Josephde Saint-Petersbourg premiere moitie du ye siecle), qui
semble marque par une polemique cantle Ie pelagianisme73.
C est pourquoi il DOllS emble que ces images refletent aussi
bien l evangile de Luc, Ie livre d Esale et les Psaumesque leur
exegese patristique et leur representation (en particulier les
Psautiers). D autres litteratures, comme les sources rabbi-
niques74 ules apocryphes, qui pourtant affleurent dans certains
textes75et dans l art chretien76n y interviennent guere. Le fait
que no us sayans parvenu a trouver les explications les plus
70. U. SCHUBERT,Christus, Priester und Konig. Eine politisch-theolo-
gische Darstellungsweise in der friihchristlichen Kunst », Kairos 25
(1973),p. 201-238, . 201-215.
71. Sur les deux metaphores, cf. A. DE NICOLA, art. cit. (n. 31), p.
173.177-181.
72. S. SPAIN, p. cit. (n. 4), p. 151-157; S. SPAIN, rt. cit. (n. 7), p. 524-
526; M. R. MILES,art. cit. (n. 5), p. 160. U. SCHUBERT,Der politische
Primatanspruch des Papstes dargestellt am Triumphbogen yon Santa
Maria Maggiore in Rom », Kairos 23 (1971), p. 194-226,p. 212-214,
incline plutot a y reconnaitre l empereur Auguste; G. A. WELLEN,op
cit. (n. 25), p. 115, et B. BRENK,op. cit. (n. 4), p. 30.40, pensent a un
empereur a l identite non precisee; par contre, N. A. BRODSKY,rt. cit.
(n. 6), p. 477-479,Y reconnait Valentinien III. L idee traditionnelle est
que ce personnage representerait Aphrodisius ; cf. Ch. PIETRI,art. cit.
(n. 5), p. 602.
73. B. DRAKEBOEHM, The Program of the Leningrad Joseph Pyxis »,
Gesta26 (1987),p.11-16.
74. K. KOGMAN-ApPEL, Die alttestamentlichen Szenen m Langhaus
yon Santa Maria Maggiore und ihr Verhaltnis zu jiidischen Vorlagen »,
Kairos 32/33 (1990/91), p. 27-51.
75. Cf. par exemple E. PATLAGEAN,Remarques sur a production et la
diffusion des apocryphes dans Ie monde byzantin », Apocrypha 2
(1991), p. 155-163;C. PAUPERT,« resencedes apocryphesdans a litte-
rature monastique occidentale ancienne », Apocrypha 4 (1993), p. 113-
123.
76. G. ROQUET, La reception de l image et du texte a motifs d apo-
cryphes dans leg chretientes d Egypte et de Nubie : quelques aper~us»,
Apocrypha 2 (1991), p. 181-215; N. THIERRY, L illustration des apo-
cryphes dans les eglises de Cappadoce», Apocrypha 2 (1991), p. 217-
247.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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291
ANNONCIATION DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
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Pierre-Alain MARIAUX
FNRS, Bruxelles
FIGURER L APOCRYPHE, OU LA vERITE
DEVOILEE PAR LA PEINTURE.
QUELQUES ICONOGRAPHES DU XIXe
SIECLE FACE A L IMAGE CHRETIENNEI
The study of the renewal of religious art in the XIX h century reveals
an ambiguity inherent to Christian pictures of that period: Having been
politically used at leastsince the French Revolution -and trying to take
up with the primitive Church, he Christian iconography has an apocryp-
hal scent.
A lire les iconographesdu sieclepasse,dans Ie mouvementgeneralde
renouveaude l art religieux au XIX siecle, une ambigultepropre a l ima-
ge chretiennepeut etre mise au our. En etter, celle-ciporte en germeavec
elle un soupfon d « apocryphie », dont l origine doit etre recherchee ans
l emploi a des ins politiques, au mains des la Revolution, d une icono-
graphie essentiellement hretienne. C est a degager cette articulation que
sont consacreeses quelques ignes qui suivent.
Le renouveau de l art religieux au siecle passe s accompagne
d une reflexion fiche et complexe, qui touche a l histoire genera-
Ie de l art -une histoire qui, sous certaines plumes, se confond
volontiers avec l histoire du christianisme -, ou leg penseurs
catholiques du XIxe siecle cherchent a enrayer Ie processusde
decadence (ou de degenerescence morale) telle qu ils la
voyaient refletee dans la proliferation des genres et Ie combat
entre leg divergesecoles artistiques. D autres iconographescher-
cheront au contraire a renover fondamentalement l iconogra-
L Le texte qui suit reprend les articulations de la communication orale.
Je precise que les quelques reflexions que ron va lire sont les premiers
fruits d une recherche consacreeau «my he pictural ».
Apocrypha 7, 1996,p. 293-300
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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294
P.-J.
MARIAUX
phie chretienne : ainsi Charles Rene Forbes de Montalembert
(De [ etat actuel de l art religieux, 1837) et Fran~ois-Alexis Rio,
apotre du preraphaelisme en France (De la poesie chretienne
dans son principe, 1836, premier tome de son Art chretien,ache-
ve en 1867 seulement), qui influenceront de maniere durable
taus les auteurs de manuels. Parcourir les ecrits des icono-
graphes chretiens du siecle passe offre l occasion de mettre au
jour un phenomene relativement peu connu, qui touche de pres
a la definition de l apocryphe, et que je definirai provisoirement
comme «l articulation dialectique de l ancien et du nouveau ».
C est en m arretant a une image traduisant visuellement Ie fecit
apocryphe de la descente du Christ aux limbes que je tacherai de
debusquer cette articulation. L exemple d Hippolyte Flandrin,
baptise par ses contemporains du titre tres envie de Fra
Angelico de son siecle, servira de point de depart a un parcours
de quelques manuels d iconographie chretienne. Grace a ce par-
COUTS,l sera possible d entrevoir comment comprendre la
reception visuelle de l apocryphe au XIxe siecle d une part, mais
surtout de debusquer une ambigulte que je crois fondamentale
et ce, a travers l exemple d une Descente du Christ aux limbes,
realisee par Theophile-Alexandre Steinlen.
On a coutume de dire que la peinture religieuse du XIxe
siecle est un combat d arriere-garde, qui appartient a la petite
histoire de l art en un siecle ou «triomphe la lalcite» -petite
histoire ponctuee d efforts certes, mais d efforts vains et peu
couronnes de succes2.Apres 1830pourtant, un renouveau s est
accompli. II s appuie sur la recherche de modeles antiques que
l on debusque dans les siecles d or du primitivisme et manifeste
la volante d un rigorisme iconographique, reflet des preoccupa-
tions morales contemporaines. Ceci est un point essentiel : la
peinture religieuse doit en effet concilier les exigencesde la tra-
dition et de la modernite.
L art chretien en pleine renaissance,que servaient des artistes
desireux de devenir les Fra Angelico de leur siecle selon un pro-
gramme ambitieux de retour historique, se devait en effet d ac-
corder une attention particuliere aux images et donc de develop-
per une restauration de l iconographie, en tachant d eviter deux
ecueils: d une part l hermetisme, propre a une iconographie
2. Sur ce point, voir Bruno FOUCART, e renouveaude Lapeinture reLi-
gieuse en France (1800-1860),Paris, Arthena, 1987. La presente contri-
bution doit beaucoup au travail pionnier de Bruno Foucart, notamment
pour la comprehension du contexte dans lequel apparait ce renouveau
de l art chretien; mais l ambigulte dont il est question ici semble avoir
echappe a notre auteur.
8/20/2019 Apocrypha 7, 1996
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LA vERITE DEVOILEE PAR LA PEINTURE
295
trap epuree et precise; d autre part la privation de l initiative
personnelle, chere a l artiste.
Si l ideal de l artiste chretien est de traduire Ie vrai, Ie beau et
Ie bien, il va de soi qu il est appele a la perfection, ala saintete,
et qu en lui se retrouvent ces qualites. Le PeTeFelix, qui profes-
sa ses sermons sur l art chretien a Notre-Dame de Paris pour les
faire paraitre ensuite SOilSa forme d un recueil intitule L art
devant Ie christianisme (1867), appelait a line complete renova-
tion morale, qui puisse contredire Ie mouvement general de
decadencede l art chretien amorce, selon lui et d autres, depuis
les compositions de Raphael. Mais comment faire ? A la bete de
l Apocalypse, dont les tetes multiples sont la «negation absolue
du surnaturel », Ie «pantheisme », Ie « materialisme », Ie «positi-
visme », Ie «scepticisme », il taut opposer un ideal serein, pro-
prement chretien, qui s inscrit dans Ie cadre reconfortant de la
tradition. Seulle secours de la religion relit desormais reveiller
de son souffle et ressuscitercet art moribond.
Une partie des vreux du PeTeFelix semblait comblee oTsde la
fondation a Rome, Ie 21 juillet 1839, de la Confrerie de saint
Jean SOilS egide du peintre Henri Lacordaire. Le but de celie
confrerie etait «la regeneration [du monde] par l emploi chre-
tien de l art »3, regeneration que prenaient a leur compte
quelques artistes fran~ais en reaction au mouvement des
Nazareens et des Preraphaelites. L experience tourna court
pourtant, car plusieurs des membres eminents de celie noble
assemblee, las des activites mondaines sans doute, entrerent
dans es ordres.
Mais celie confrerie possedait un saint, un peintre inspire qui
«reposa sa tete avec amour sur la poitrine de Jesus et [qui] la,
dans d ineffables contacts avec Ie creur de son maitre, a puise a
la source la pleine science des miracles suscites dans Ie monde
nouveau par Ie sang du calvaire »4. Ce saint, c est Hippolyte
Flandrin, qui eut maille a partir avec la critique lorsqu il realisa
les fresques de la net de Saint-Germain-des-Presentre 1856 et
18635. Sur les deux paTois de l edifice, Flandrin developpe en
eifel un cycle de vingt grands tableaux, divisant l espace de
3. Cite par B. FOUCART,e renouveau..., . 45.
4. Lettre circulaire de Mgr l eveque de Nfmes invitant Ie clerge de son
diocese i prier pour l lime d Hippolyte Flandrin (Nimes -Paris 1864)
citee par B. FOUCART, e renouveau..., . 50.
5. A propos de ce cycle, voir la notice de Bruno HORAISTdans
Hippolyte, Auguste et Paul Flandrin. Une fraternite picturale au XIX
siecle,Paris, Reunion des museesnationaux, 1984,p.124-153.
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296
P.-J. MARIAUX
chaque travee en deux parties. La scene representee a gauche
renvoie au Nouveau Testament et guide la lecture, tandis que
celIe de droite est choisie dans les episodes de l Ancien
Testament que l on considere comme prefiguration du Nouveau.
L Ancien Testament est donc subordonne au Nouveau
Testament, en accord avec les conceptions qui avaient COUTS
dans l art chretien primitif, et l artiste donne la priorite a l Evan-
gile qu il deroule de l Annonciation a l Ascension. Chacun se
plaisait a retrouver en Saint-Germain-des-Prescomme un echo
du cycle de la basilique superieure d Assise. Flandrin proposait,
aide en cela d un comite dans lequel figurait Ie PeTeCahier, un
programme ambitieux pour l epoque, que les contemporains ne
comprirent pas tout de suite.
L abbe Lecanu, auteur entre autres d une Histoire de Satan,
accusait e peintre de ne yas respecter iconographie tradition-
nellement rec;ue par l Eglise, de ne pas s etre conforme a
1 « archeologisme» strict, et surtout de ne pas avoir suivi la tra-
dition des evangiles, fussent-ils apocryphes. Dans la scene de
l Annonciation en effet, il s etonne que la Vierge porte un vete-
ment a la franc;aiseet condamne Ie meuble de l extreme gauche
qu il juge incomprehensible; il eftt prefere, dit-il, que l artiste se
fiat au fecit du Protevangile de Jacques. Claudius Lavergne,
peintre et membre de la Confrerie de saint Jean, garant de l or-
thodoxie en matiere de peinture religieuse qu il avait contribue
a reformer, mais surtout ardent defenseurd Hippolyte Flandrin,
moque Ie choix de l apocryphe recommande par Lecanu, choix
qu il attribue a une volante de verite anecdotique. L abbe Hurel
resumera, assezbien semble-t-il, Ie sentiment general que devait
susciter a composition: «Ie dogme est ici exprime sans ealisme
mais sansequivoque aussi ...] »6.
Car il s agit bien d un conflit, gentle par la difficulte d articu-
leTde fac;onsatisfaisante a tradition et la modernite, qui s incar-
ne dans Ie realisme. La reaction, severe, de Dom Renon a la
parution en 1858des Institutions de l art chretiende l abbe Pascal
est revelatrice : il condamne chez l abbe la recherche pointilleu-
se de la vraisemblance historique et sa mefiance envers es tradi-
tions iconographiques appuyees par les evangiles apocryphes,
l accusant de sacrifier au «realisme » en foulant aux pieds la tra-
dition. Dom Renon veut s en tenir quant a lui aux peintures
approuvees.N est-ce pas la Ie combat du realisme que l on qua-
6. Abbe HUREL, L art religieux contemporain, Paris, 1868,p. 358; cite
par B. FOUCART,e renouveau..., . 71.
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P.-J. MARIAUX
sells la disparition de certaines scenes qui traduisent les recits
apocryphes. Car nous devons tenir compte de deux faits qui, a
ma connaissance,out ete ignores par les historiens d art.
1. L apocryphe contient en germe quelque chose de revolu-
tionnaire, car il ramene aux sourcesmemes du christianisme ; les
auteurs sont clairs a ce sujet. Renan par exemple dit de l art
chretien qu il s incarne en deux formes: la forme medievale,
austere et sublime, sans reflexion ni culture, qui correspond a la
foi de grandes massesd hommes (qui est en un mot une foi revo-
lutionnaire qu il a contribue a ranimer dans sa Vie de Jesus)
cette forme est surannee et doit etre remplacee par une forme
moderne, plus abstraite, plus epuree, correspondant a un senti-
ment individuel.
2. Dans son apparition forme Ie du moins, l image chretienne
est contaminee par des idees revolutionnaires ; la renovation
d un art qui serait religieux doit donc tenir compte de ce pheno-
melle, au risque de repeter une confusion8.
8. Jonathan P. RIBNER (Broken Tablets. The Cult of the Law in French
Art from David to Delacroix, Berkeley, University of California Press,
1993) a publie quelques exemples frappants, images ambigues mais pre-
cieuses; en voici un echantillon. En tant qu expression de la volonte
generale, la loi revolutionnaire s incarne dans une forme traditionnelle-
ment reservee aux Dix commandements. Ainsi, l assemblee legislative
decrete, Ie 12 juillet 1792, que son insigne, nouvel ostensoir, reproduira
les tables de la Loi sur lesquelles seront inscrits en lettres capitales
«DROITS DE L HOMME» et «CONSTITUTION» (ibidem, pl. 2). Apres disso-
lution de l assemblee legislative et proclamation de la republique en
septembre 1792, la nouvelle constitution de l an 1(24 juin 1793) rempla-
ce la premiere, mais garde son enveloppe materielle; les tables de la loi
presentent ainsi leurs 35 articles sous l reil de la Trinite et Louis-Jean
Allais commemore l evenement par une gravure des plus explicites : la
constitution de 1793, c est la Loi rec;:uepar MoIse au Mont Sinal, oule
Sinal vaut evidemment pour la Montagne, c est-a-dire la section radica-
Ie de la Convention (ibidem, fig. 4). La parente est des plus saisissantes
lorsque l on sait d autre part que l original de la nouvelle constitution
prend place dans une arche de chene. Aces emprunts veterotestamen-
taires, les contre-revolutionnaires repliquent par une iconographie neo-
testamentaire : l une de leur feuille satyrique se nomme les Actes des
apotres par exemple. La destitution du roi s apparente a un nouveau
calvaire, oul on peut reconnaitre Robespierre tendant l eponge imbi-
bee de vinaigre au Christ-Louis XVI crucifie entre ses freres, Ie futur
Louis XVIII et Charles X (gravure de M. Webert, voir ibidem, fig. 12).
Pour James Gillray, caricaturiste anglais, Ie coup d etat du 18 brumaire
de l an VIII (9 novembre 1799) ne souffre d aucune ambigulte : Ie gene-
ral Bonaparte apparait en Christ chassant les marchands du temple (ibi-
dem, fig. 16). Plus tard, en raison de sa reforme legislative, Napoleon
devient, dans quelques compositions presentees aux salons, MoIse tra-
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LAvE-RITE DEVOILEE PAR LA PEINTURE
Certains artistes de la fin du siecle opposent, par un retour
conscient et reflechi aux sources iconographiques du passe, Ie
souhait de retourner a l evangelisme initial. Dans ce contexte, il
est interessant de s attarder sur une Descente du Christ aux
limbes assez inguliere : La Liberatrice de Theophile-AI~xandre
Steinlen (fig. 1), qui presente de fa~on eclatante cette ambigulte
fondamentale.
De la narration apocryphe consignee dans leg Actes de Pilate,
l iconographie ne retient que Ie denouement paroxystique, Ie
moment ou Ie Christ saisit Adam par Ie poignet pour l emporter
au-dela de l enfer. C est Ie theme de l anastasisbyzantine, exem-
plum du salut promis a toute l humanite. 11est plus que probable
que Steinlen se gait inspire du fecit apocryphe, ou tout au mains
d une image l illustrant, pour realiser sa composition. En effet, la
lumiere, marquee ici par Ie flambeau jetant un vif eclat sur leg
ouvriers, leg chaines brisees qu exhibe la foule implorante, mais
surtout Ie groupe central, DOUgont penser a une veritable anas-
tasis revolutionnaire. Ainsi, l ouvrier au torse nu, tenant une
pioche en main droite, evoque Ie premier homme, Adam, chasse
du paradis et condamne par la sentence divine a la peine ter-
restre (Gn 3, 19). Dans ce vibrant appel visuel au changement
social, Steinlen cree un amalgame puissant ou Marianne prend
leg traits du Christ descendantaux limbes ; eUe essusciteAdam-
Ouvrier et Ie transforme dans sa nature meme. Par cet acte, eUe
entraine Ie flat des ressuscitesveTS e paradis, qu ils atteignent
en renversant ordre ancien9. r
QueUe le~on retenir de cette image, consideree ici comme
exemplaire? EUe DOUg ermet de mettre au jour l articulation de
l ancien et du nouveau, dans Ie gensou eUe manifeste un conflit
propre au XIxe siecle, conflit qui tient tout entier me semble-t-il
dans la dichotomie catholique-chretien. L attitude chretienne,
qui vise a retourner a l Eglise primitive, tolere leg epanchements
versant la Mer Rouge, et peut, parfois, se substituer aDieu lui-meme
en tant qu il est Ie sol invictus (voir un tableau circulaire de Anne-
Louis Girodet Trioson, 1804 environ, a la Galerie Wildenstein, New
York) ou qu il remet Ie code civil a MoIse en personne (idem, fig. 24).
Sur Ie plan litteraire, oil se retrouve un phenomene similaire, voir leg
deux ouvragesremarquables de Frank Paul BOWMAN, e Christ roman-
tique, Geneve, Droz, 1973 et Le Christ des barricades. 1789-1848,Paris,
Cerf,1987.
9. Pour une demonstration plus complete, voir, de l auteur de res lignes,
«Detoumements iconographiques chez Theophile-Alexandre Steinlen.
A propos de La Liberatrice », Gazette des Beaux-Arts CXXI, n° 1492-
1493 (1993),p. 231-240.
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P.-J.MARIAUX
apocryphes en ce sells, et en raison surtout de la contamination
presentee plus haul, toute image chretienne qui appuierait ce
retour est consideree a juste titre comme apocryphe (ou non-
canonique). L attitude catholique, quant a elle, cherche a retrou-
ver l idee d une Eglise perenne, telle qu on devait la penser au
moyen age selon les auteurs du siecle passe, unique periode
pour Ernest Renan qui offrit a l homme un contact plus ou
moins etroit avec l infini. Mais l image chretienne est contami-
nee, ou pervertie selon es auteurs, orsqu elle aborde la periode
calme qui s ouvre apres la monarchie de juillet : Ie retour aux
origines est en effet seme d embfiches.
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David R. CARTLIDGE
Maryville College, TN, USA
AN ELECTRONIC DATABASE OF
PICTORIAL IMAGES PARALLELED
IN CHRISTIAN APOCRYPHA
A l'aide d'une iche descriptive, 'auteur presenteson projet d'une ban-
que de donnees (APOCICON) qui met en parallele les expressionsigu-
ratives et litteraires desapocrypheschretiens.
The author's project of an electronically searchable databaseof art
which parallels the literary versions of Christian Apocrypha is presented
here with a sample entry rom the database.
The increasing interest of the academy in Christian
Apocrypha (a. k. a. «New Testament Apocrypha») includes
investigation of the pictorial art which either parallels or shows
the influence of this literature. There can be a fruitful outcome
when one follows the development of the narratives in the
Christian Apocrypha in conjunction with the history of the
iconography of these narratives. Unfortunately, a search for the
art of the Apocrypha is often difficult and always time-consum-
ing, even if one has access o one of the loci of The Index of
Christian Art . The Index is attempting to gain the monies to
create an electronic version of its more than seven million cards
and entries, but, even when funded, this project will not be com-
pleted for some time.
1. The collection is at Princeton University, and there are copies of this
collection at Utrecht, the Vatican, Berkeley, and Dumbarton Oaks
(Washington,DC).
7,1996, p. 301-303
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D. L. CARTLillGE
I have begun a continuing project, namely, an electronically
searchabledatabaseof art which parallels the literary versions of
Christian Apocrypha (the file name is APOCICON). At this
point the database references about 1500 monuments (each
entry in various stages of editing)2, The entry form of the data-
base ollows this example3
APOC [ T ] PHOTO [ 834.00and 834.10]
CYCLE [ John Evangelist, Life Cycle; John Living Wife to Be ; John
on bosom of Christ; St. Alexis Leaving his Wife]
MEDIUM [ ms. ill., narrative]
ARTIST [ ]
PROVENANCE [ Anselmus, Meditationes et Orationes, fol. 56ro.
Originally from the Nunnery of Traunkirchen. ]
LOCATION [ Monastery of Admont, Stiftsbibliothek, lat. 289, fol.
56ro ]
CITY [ Admont] STATE [ Austria] DATE [1160 ca ]
CENTURY [ 12]
TEXT [AJn 113; AJn (from the lost beginning ?) ]
DESCRIPTION [ Two scenes in one frame. Scene 1 : Left. John
leaves his wife (or fiancee). John s wife is far left, facing frontally,
wearing a cap, with her L. hand at her face,head tilted to the right.
She holds a book. John is to her right, nimbed, wearing a philoso-
pher s tunic. John strides to the right, his right leg forward. His
upper body is turned back toward the woman; his right hand half
raised, gestures for her to remain. His left hand is in the tunic s
sling. Also gesturing for the woman to stay. John s garments flow
in a manner depicting motion. The woman is a static figure. Scene
2, Right. John leans on Christ s bosom. Both figures face frontally.
Christ is seated on the right half of a backed bench; he is cross
nimbed, his head tilted left, over John s head. John is left, not nim-
bed, seated on the left half of the bench, reclining, with his head
on Christ s breast. Christ is beardless,with his right hand and arm
draped across John s shoulders. John s right hand is placed on
Christ s abdomen. B. B. John in left sceneand Jesus n right scene
bear the same facial features. Inscription in the top border is from
an hymn attributed to Notger : « Tu leve coniugis / pectus respuisti
/ Messiam secutus / / Ut eius pectoria / sacra meruisses / fluenta
2. The database uSesa program called « askSam», wich can be «down-
loaded » in ASCII or DOS langage.
3. This entry was mported from the databaseand edited in the author s
word processing program. The field PHOTO [ ] refers to the author s
collection of images.
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