Adaptation à la vie extra-utérine...Adaptation respiratoire: liquide pulmonaire Sécrétion...
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Adaptation à la vie extra-utérine: physiologie fœtale et
difficultés néonatales Pr Delphine Mitanchez Service de néonatologie Hôpital Armand Trousseau Paris
La naissance
� Adaptation à la VEU = période de transition: implique des modifications fonctionnelles de l’ensemble de l’organisme.
� Les trois fonctions fondamentales: � Ventilation aérienne assurant des échanges gazeux compatibles
avec la vie et l’établissement d’une circulation de type adulte � Adaptation thermique : sortie de l’environnement utérin thermo-
stable � Adaptation métabolique: l’organisme se substitue au placenta
� La naissance est un test de l’intégrité des fonctions cardio-respiratoire et de l’homéostasie thermique et métabolique.
La naissance : adaptation
� Adaptation cardio-respiratoire � Thermorégulation � Adaptation métabolique
� Métabolisme glucidique � Ictère
Adaptation cardio-respiratoire
Adaptation respiratoire � Développement pulmonaire in utero: 4 stades
�Prolifération alvéolaire et vasculaire jusqu’à l’âge de 2-3 ans
Adaptation respiratoire: liquide pulmonaire � Sécrétion permanente:
formation d’une partie du liquide amniotique par transfert actif de Cl (250 ml/j à terme).
� Détermine la taille des alvéoles et la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF)
Adaptation respiratoire: surfactant
� Surfactant: � Substance phospholipidique complexe. � Propriétés tensio-actives � Synthétisé dans le pneumocyte de type II:
� dès 22 semaines, détecté dans le liquide amniotique 4 à 5 semaines plus tard.
� Maturité fonctionnelle de la cellule de type II à partir de 34-35 semaines
� Stocké sous forme de « corps lamellaires »
Composition du surfactant
� Phospholipides : 85% � Phosphatidylcholines saturées dont DPPC
(dipalmitoylphosphatidylcholine) : 38% � Phosphatidylcholines insaturées : 30% � Phosphatidylglycérol (PG) : 9%
� Lipides neutres et cholestérol : 5% � Protéines : <10%
� Glycoprotéines spécifiques : SP-A 4%, SP-D 1% � Protéines hydrophobes :SP-B 1%, SP-C <1%
Protéines du surfactant
� Rôle essentiel : élaboration des diverses formes fonctionnelles du SF et recyclage
� SP-B et SP-C : stabilité du film phospholipidique
� SP-A : contrôle de la synthèse et de la sécrétion des phospholipides
� SP-D : rôle anti-infectieux
Adaptation respiratoire: naissance
� Évacuation de l’eau pulmonaire: débute avant le travail et se poursuit au cours de celui-ci (catécholamines fœtales,TRH maternelle) � Arrêt de sécrétion � Réabsorption active de Na � Surfactant
� Sécrétion du surfactant: � Interface air/liquide � Expansion alvéolaire
� Établissement de mouvements respiratoires réguliers et efficaces sous le contrôle des centres bulbaires (rôle hormonal, du froid, de l’augmentation de la PO2)
Adaptation circulatoire: circulation fœtale � Oxygénation placentaire � Saturation fœtale basse (max dans l’aorte = 60%)
et PO2 basse < 35 Torr: bien supportée � Fréquence et débit cardiaques élevés
� Débit cardiaque = volume éjecté x fréquence cardiaque � Grande affinité de l’Hb fœtale pour l’O2 � Polyglobulie
Adaptation circulatoire: circulation fœtale � Particularités de la circulation fœtale :
� Trois shunts : ductus venosus, foramen ovale, canal artériel
� Débit pulmonaire faible: 7 à 10% du débit cardiaque � Constriction artériolaire active (PO2 basse) � Média des artérioles très développée
� 40% du flux de la veine ombilicale évite le foie et passe dans le ductus venosus, traverse l’OD en direction du FO et atteint directement l’OD, le VG et l’aorte.
Artères pulmonaires: 10 à 15% du DC droit
Adaptation circulatoire: circulation transitionnelle � Deux évènements:
� Arrêt de la circulation ombilicale (clampage du cordon) � Déclenchement de la respiration
� Adaptation progressive vers la circulation définitive � Augmentation de la pression systémique � Chute des résistances vasculaires pulmonaires et
augmentation du flux vasculaire � Fermeture des shunts
� Foramen ovale � Canal artériel (inhibiteurs des prostaglandines, quelques heures à
quelques jours) � Ductus venosus, passive en 1 à 3 semaines
Mécanismes de la vasodilatation pulmonaire � Ventilation pulmonaire � Augmentation de la PO2
et du pH � Augmentation du flux
dans les vaisseaux pulmonaires et des contraintes de cisaillement: stimulent la voie du NO et des prostacyclines (PGI2)
Pediatr Res 2002
D’après Pr L Storme
Echec de l’adaptation cardio-respiratoire
MMH Inhalation méconiale
Hypoplasie pulmonaire Retard de résorption du
liquide pulmonaire
Hypoxie néonatale Enfant endormi…
Apnée
Hypoventilation alvéolaire
HTAP néonatale ou persistance de la circulation fœtale
� Anomalie dans la chute des résistances artérielles pulmonaires, persistance des shunts droit/gauche (FO, CA)
� Hypoxie, acidose et aggravation de la vasoconstriction pulmonaire
HTAP néonatale
� L’hypoxie néonatale entraîne un déséquilibre entre les systèmes vasoconstricteur et vasodilatateur aux dépens du système vasodilatateur:
� Diminution de l’activité de la NOS-III (relaxation) � Hyper-réactivité du système ET-1 (contraction)
Semin Neonatol 2003, 8:1-8
Situations favorisants l’HTAP
� Toutes les situations d’altération de la ventilation pulmonaire et de l’oxygénation, en particulier: � Inhalation méconiale � MMH sévère
� Vascularisation pulmonaire anormale: � Hernie de coupole
diaphragmatique
Dawson JA, Pediatrics 2010
Dawson JA, Pediatrics 2010
Évolution de la saturation pré-ductale: M 2 : 60 % M 5 : 85 % M 10 : 90 %
La thermorégulation
Thermorégulation
� In utero, le fœtus est dans un environnement thermique stable et adapté � Le fœtus a une température supérieure à celle de
sa mère de 0,5°C
� À la naissance, craindre le refroidissement � Un nouveau-né perd 0,25°C par minute à 24°C
� Facteurs de risques chez le NN :
� Rapport surface corporelle/poids corporel 4 x >
adulte � Grande perméabilité de l’épiderme � Isolation graisseuse réduite � Moindre efficacité des moyens de réchauffement
principaux: sudation et frisson musculaire
Thermorégulation
Thermorégulation
� Le contrôle de la température centrale est un équilibre entre la thermogenèse et les pertes thermiques (thermolyse) � Ce contrôle est sous la dépendance de thermorécepteurs centraux et périphériques qui sont actifs dès 28-30 SA � Vasoconstriction et vasodilatation modulent les
échanges entre le centre et la périphérie � La couche adipeuse sous-cutanée constitue l’isolant
majeur.
� Thermogenèse chimique:
� Rôle particulier de la graisse brune: � Apparaît à 26 SA � Adipocytes très riches en mitochondries � Inhibée par l’hypoxie
� Activité musculaire: � Le muscle a un mauvais rendement énergétique � Le frisson n’existe pas
� Horripilation: � Pas chez le nouveau-né
� Coût énergétique et consommation d’oxygène
Thermogenèse
Thermogenèse : la graisse brune
� 5% du poids du corps du nouveau-né
� Régions cervicales, scapulaires, péri rénales et médiastinales
� Hydrolyse des triglycérides sous l’action de l’adrénaline et de la T3
� L’attitude permet de réguler les
déperditions: � Ì recroquevillé � Ê sur le dos, membres étendus
� La sudation: � Les glandes sudoripares sont présentes mais
capacité de sécrétion initiale faible � Réponse sudorale à partir de 32 SA, d’abord
limitée au visage
Thermolyse
Neutralité thermique
� Température ambiante où l’homéostasie est assurée par des processus thermorégulateurs passifs avec un métabolisme minimal.
� En situation de neutralité thermique: T° = 37 ± 0,4°C
� Les pertes thermiques se font par 4 mécanismes :
� Conduction: partie du corps au contact du matelas (30% de la surface)
� Convection: pertes liées à la circulation de l’air (climatisation)
� Radiation: échanges entre 70% de la surface corporelle et les parois de l’environnement (incubateur).
� Évaporation: 0,56 kcal/ml d’eau évaporé � Source principale de pertes de chaleur cutanée : 1/3 par les voies
aériennes, 2/3 par voie cutanée � Dans la zone de neutralité thermique, les pertes hydriques
évaporatives insensibles sont d’autant plus importantes que l’AG et l’âge postnatal sont faibles.
� Humidité ambiante idéale : 60% ; sauf < 28SA dans la 1ère semaine : 80%.
Pertes thermiques
Thermorégulation en salle de naissance � Pertes par évaporation prépondérantes:
� Séchage � Sac en polyéthylène � Abandon du bain précoce
� Limiter les pertes par conduction: � Langes chauds � Peau à peau
� Attention aux pertes par convection (courants d’air, climatisation)
Adaptation métabolique
L’homéostasie glucidique fœtale
� Le fœtus vit du glucose maternel.
� En situation normale, il ne produit pas de glucose.
� L’insuline secrétée dès la 20ème semaine est l’hormone « dominante ».
� Rôle peu important des hormones dans le contrôle du métabolisme fœtal.
Les réserves
� Au cours du 3ème trimestre, le fœtus constitue des réserves qui lui permettront de faire face à l’interruption du flux de glucose maternel après la naissance. � Le glycogène: début de synthèse au 2ème trimestre, qui
s’accélère après 36 SA. A terme: 50mg/g de tissus.
� Les graisses: stockées sous forme de triglycérides (perméabilité du placenta). Contenu en graisse du nouveau-né: 16%.
L’orage hormonal néonatal
� Catécholamines: taux x 3 à 10
� Glucagon: taux x 3 à 5 et augmentation du nombre de récepteurs
� Augmentations des corticoïdes, de la TSH, de la GH.
� Mais diminution de l’insuline
Activation de plusieurs voies métaboliques à partir des réserves accumulées, sources de substrats
énergétiques.
- Glycogénolyse, néoglucogenèse - Lipolyse, cétogenèse - Protéolyse
Toutes ces réactions contribuent de façon synergique à l’équilibre glucidique du nouveau-né
glucagon
catécholamines corticoïdes GH
thyroxine
lipolyse
glycérol
AGL
protéolyse
alanine lactate
glycogénolyse néoglucogenèse
glucose
corps cétoniques
b oxydation
La glycogénolyse
Glycogène
Glucose 6-P
Glucose
Glycogène synthase Glycogène phosphorylase
Glucose 6-phosphatase
Insuline Insuline Glucagon - - + Glucagon +
Néoglucogenèse � C’est la production de glucose à partir de
précurseurs non glucidiques : � Lactate, pyruvate, glycérol � Acides aminés glucoformateurs :
� Alanine
� Son activation est dépendante de : � La synthèse de novo à la naissance de la
phosphoénolpyruvate carboxykinase (PEPCK) � Site CRE = cAMP response element � Glucagon et catécholamines Q AMPc
glucose
glucose
GLUT2
G-6-P GK
F-6-P
F-1,6-P2 FBPase1 PFK-1
PEP
pyruvate PK-L
PEPCK
sang hépatocyte
acetyl CoA
G L Y C O L Y S E
G L U C O N E O G E N E S E
trioses phosphates
glycérol
galactose
lactate
PC
acides aminés cétoformateurs (LEU, ILE)
corps cétoniques
acides gras
+
alanine
oxaloacétate citrate
G 6Pase
oxaloacétate
Rôle du tissu adipeux
� A la naissance, la lipolyse libère du glycérol et des acides gras libres plasmatiques.
� Le glycérol entre directement dans la néoglucogenèse.
� Les acides gras libres produisent des corps cétoniques (acétoacétate et b-hydroxybutyrate)
� => substrats alternatifs pour différents tissus dont le cerveau (rôle de protecteur cérébral) � => diminution de la demande en glucose tissulaire
lactate
50 mg/g
5 mg/g
12
Équilibre glucidique néonatal
glycémie
Apports exogènes
Consommation tissulaire Production hépatique
cerveau
rein
globule rouge
tissu adipeux
muscle glycogénolyse néoglucogenèse
acides gras libres
+ acides aminés +
Si un déséquilibre apparaît entre la consommation tissulaire de glucose, la production hépatique ou les apports exogènes:
=> hypoglycémie
Quels sont les sujets à risque?
� Les nouveau-nés qui présentent:
� Une insuffisance des réserves énergétiques � Une augmentation de la demande énergétique � Une situation d’hyperinsulinisme
Insuffisance des réserves énergétiques
� Prématuré � Restriction de
croissance fœtale
Peu de corps cétoniques et de substrats alternatifs
Risques cérébraux majeurs
glycémie
Apports exogènes
Consommation Production hépatique
cerveau rein
globule rouge tissu adipeux
muscle glycogénolyse néoglucogenèse
acides gras libres +
Augmentation de la demande énergétique
� Hypoxie � Hypothermie,
infection, détresse respiratoire
� Polyglobulie
glycémie
Apports exogènes
Consommation Production hépatique
cerveau rein
globule rouge tissu adipeux
muscle glycogénolyse néoglucogenèse
acides gras libres +
Hyperinsulinisme secondaire � Nouveau-né de mère
diabétique � Syndrome de Wiedemann-
Beckwith
� Administration excessive de glucose en per partum, prise maternelle de b bloquants ou de diurétiques
glycémie
Apports exogènes
Consommation Production hépatique
cerveau rein
globule rouge tissu adipeux
muscle glycogénolyse néoglucogenèse
acides gras libres
insuline
+ -
+
Les situations plus rares et difficilement prévisibles � Hyperinsulinisme primaire
� Les déficits hormonaux
� Les déficits enzymatiques sur une des voies
métaboliques : tout déficit sur une voie métabolique jusque là assurée par le placenta entraîne un défaut d’adaptation à la VEU.
Ictère et adaptation à la VEU
� Hémolyse néonatale physiologique qui peut être aggravée par certaines situations
� Élimination hépatique de la bilirubine issue de la dégradation de l’hème des GR : les mécanismes peuvent être dépassés
� La conséquence est l’ictère néonatal dont la gravité est liée au risque d’ictère nucléaire
Conséquences
� Accumulation de Bilirubine non conjuguée (BNC) � Accumulation de BNC non liée à l’albumine (BNL) � Passage possible dans SNC (rare mais grave)
� Encéphalopathie bilirubinique = ictère nucléaire : léthargie, difficultés d'alimentation, vomissements, opisthotonos, convulsions, décès. � L'ictère nucléaire peut provoquer, plus tard un retard mental, une choréoathétose, une surdité de perception et une paralysie de la verticalité du regard.
• Production de bilirubine 2-3 fois plus importante • Conjugaison/Épuration hépatique diminuée par immaturité • Recyclage entéro-hépatique accéléré
Facteurs favorisants � Présence d’une bosse sero-sanguine, de
céphalhématome, d’ecchymoses � Polyglobulie � Asphyxie périnatale � Infection materno-foetale � Prématurité ou RCIU:
� La polyglobulie � Les hématomes fréquents chez l’extrême
prématuré � Immaturité hépatique
Coombs direct – -Infection -Déficit enzymatique (G6PD) -Incompatibilité ABO (50% Coombs -)
Ictère
Bilirubine libre Bilirubine conjuguée = cholestase
toujours pathologique Ictère physiologique Début > H24 Examen clinique normal Modéré Durée < 10 jours
Ictère pathologique Début < H24 Examen clinique anormal Intense et/ou prolongé
Hémolyse
Coombs direct + - Incompatibilité rhésique Ig anti D, anti-C, anti-e RAI + - Incompatibilité dans les autres sous-groupes (Kell) - Incompatibilité ABO
Déficit ou inhibition de la glycuro-conjugaison
Ictère au lait de mère Maladie de Gilbert Maladie de Crigler-Najjar
Prise en charge � Photothérapie :
� Principe: Utilise la capacité de la lumière à transformer la BNC liposoluble et toxique en photo-dérivés hydrosolubles et non toxiques éliminés par voie biliaire � Longueur d’onde la plus efficace : 480 nm (lumière bleue ou verte)
� Les réactions photochimiques produisent : � Des isomères instables plus hydrosolubles que la bilirubine, excrétés
dans la bile � Un isomère stable = la lumirubine éliminée dans la bile ou les urines,
surtout formée avec la lumière verte
Conclusions � L’adaptation à la vie extra-utérine met en jeu
plusieurs mécanismes déterminants: � La préparation in utero des organes et des fonctions
(liquide pulmonaire, réserves énergétiques) � Des évènements périnataux:
� Mise en route des systèmes hormonaux (catécholamines) � Actions mécaniques néonatales (ventilation pulmonaire)
� L’intégrité des organes et des fonctions (cardiopathies, erreurs innées du métabolisme…)
� Une parfaite coordination des différentes fonctions (succession temporelle des réactions métaboliques de régulation de la glycémie).
Conclusions
� La période d’adaptation à la vie extra-utérine doit être respectée. Il faut veiller à assurer � L’homéostasie thermique et glycémique en cas de
chirurgie néonatale � Opérer un patient stable sur le plan
hémodynamique et respiratoire � Ne pas oublier de surveiller l’ictère dans les
premiers jours, surtout chez un patient à jeun.