polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA...

40
MAGAZINE polka PRINTEMPS 2010 / DOM 5,80 / ALL 6,50 / BEL 5,80 / CH 10 FS /CDN $ 9,75 / ESP 5,80 / GR 5,80 / ITA 5,80 / JP 2000 ¥ / LUX 5.80 /PORT 5,80 / USA $ 9,75. PHOTO: JODI BIEBER/INSTITUTE (DÉTAIL) #8 BALDIZZONE BIEBER DANZIGER DE LUIGI ERWITT FADEK JOHNSON KEYSER KLEIN KUMALO MADHESHIYA MARCHAND MARK MEFFRE MCDERMOTT NZIMA RIZZO SCHADEBERG SUZMAN TOMASZEWSKI Et aussi… BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo s’amuse sur un trampoline devant l’objectif de Jodi Bieber. Elle habite Jabulani, l’un des quartiers du célèbre township qui se modernise et accueille le Mondial de football en juin. CINEMA DECLICS ET DES CLAPS C’ÉTAIT AU TEMPS DES PHOTOGRAPHES DE PLATEAU…

Transcript of polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA...

Page 1: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

MAGAZINEpolka

PRIN

TEM

PS 2

010

/ DO

M 5

,80

� /

ALL

6,50

� /

BEL

5,8

0 �

/ CH

10

FS /

CDN

$ 9,

75 /

ESP

5,8

0 �

/ GR

5,8

0 �

/ IT

A 5,

80 �

/ J

P 20

00 ¥

/ L

UX �

5.8

0 /P

ORT

5,80

� /

USA

$ 9

,75.

PHO

TO: J

ODI B

IEBE

R/IN

STIT

UTE

(DÉT

AIL)

#8

BALDIZZONE BIEBER

DANZIGERDE LUIGI ERWITT

FADEKJOHNSON

KEYSERKLEIN

KUMALOMADHESHIYA

MARCHANDMARK

MEFFRE MCDERMOTT

NZIMARIZZO

SCHADEBERGSUZMAN

TOMASZEWSKI

Et aussi…BRAUMAN

COSTA-GAVRASDE KLERK

KATHRADASIMON

WELCOME SOWETOLA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO

AYOBAMANDELA!SA VIE EST SON PAYS

24 décembre 2009,Ntzokozo Nxumalos’amuse sur un trampolinedevant l’objectif de JodiBieber. Elle habite Jabulani, l’un des quartiers du célèbre township qui se modernise et accueille le Mondial de football en juin.

CINEMADECLICS ET DES CLAPS C’ÉTAIT AU TEMPS DES PHOTOGRAPHES DE PLATEAU…

Page 2: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Partenaire Offi ciel de la FIFA

Jouez avec la lumière.

* Le

foo

tba

ll a

u c

rép

usc

ule

.

Nouveau refl ex 550

Tout ce que vous imaginez peut devenir réalité avec le nouveau refl ex numérique 550 par Sony. Prenez des photos d’une qualité exceptionnelle dans des conditions de faible luminosité, grâce au nouveau capteur CMOS Exmor et à la sensibilité jusqu’à 12800 ISO. www.sony.fr

— Mode rafale jusqu’à 7 images par seconde

— Capteur 14,2 mégapixels stabilisé

— Visée directe sur écran 3’’ inclinable

Le s

ymb

ole

“”

se p

ron

on

ce

“A

lph

a”.

“So

ny”,

“m

ake

.be

lieve

”, “

” e

t “Ex

mo

r”, s

ont

de

s m

arq

ue

s d

ép

osé

es

de

So

ny C

orp

ora

tion

. So

ny F

ran

ce

SA

20

-26,

Ru

e M

ore

l 921

10 C

lichy

- 71

2 03

4 80

0 R

CS

Na

nte

rre

- C

ap

ital :

122

231

495

€.

Page 3: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

printemps 2010 I 7

polkaMAGAZINE

PRINTEMPS 2010#8

Ont aussi participé à ce numéroChristine Altur, Joël Augros, Jérôme Baboulène, Neeshan Balton, Matthew Baloyi, Kishanthi Bandara, GéraldineBaritussio, Karyn Bauer, Isabelle Champion, Laurent Chmiel, Alexandra de Comarmond, Pierre-Louis Denis,Thibault Dewavrin, Danuta Dubois, Barbara Dubus, Marie Ducasse, Elodie Dufour, Lorène Durret, TimothyFadek, John Fleetwood, Victoire Garnier, Eléonore Gosset, Henri Jobbé-Duval, Gina Kehayoff, Kira Kitsopanidou,Sizwe Kumalo, Eliane Laffont, Heidi Lee, Marion Lemaire, Meredith Lue, Laurent Mannoni, MatthewMcDermott, Elisa Mignot, Manon Moreau, Mio Nakamura, Juda Ngwenya, Pascal Payen-Appenzeller,Bernadette Pelletier, Devrig Plichon, Mylène Prieur, Marianne Rigaux, Dominique Rizzo, Claudia Schadeberg,Matt Shonfield, Muriel Simottel, David Steward, Soraya Taous, Claire Tomasella, Dominique Viger.Agences: Cosmos, Gamma/Eyedea, Getty Images, Institute, Magnum Photos, Polaris Images, Sipa Press,VII Agency.Laboratoires de photographie: Central Color, Dupon, Picto, Toroslab.Fabrication : Le Révérend Imprimeur – Valognes, Manche (50) – Tél. : 01 45 36 40 00 et SNNPoligrafia, Varsovie, Pologne, www.snn.com.pl, imprimé en U.E.Gestion des ventes au numéro: «A juste Titres», 67, avenue du Prado, 13006 Marseille, tél.: 0488 15 12 44 – [email protected] paritaire: 1210K89693.Dépôt légal: 1er trimestre 2010. ISSN: 1962 - 3488. Droits de reproduction textes et photos réservés pour tous pays.«Polka Magazine» est une publication de Polka Image. Siège social : 27, rue Jasmin 75016 Paris. SARL au capital de 284 000 euros, RCS de Paris 497659094.

ABONNEZ-VOUS A POLKA MAGAZINE

au sommaireLe mur...........................................9LES PHOTOGRAPHES DE POLKA #8

L’éditorial d’Alain Genestar ........................15

Haïti .............................................18POUR NE PAS OUBLIERpar Rony Brauman

Dr Erwitt & Mr Solidor...................24PARLEZ-MOI D’IMAGESpar Yves Simon

France Keyser...............................32LIBERTÉ, ÉGALITÉ, DIVERSITÉpar Vincent Geisser

Nick Danziger ...............................38TO BE OR NOT TO BE BRITISHpar Rory McLean

AFRIQUE DU SUDBieber, Johnson et Suzman............46LA REVANCHE DE SOWETOpar Dimitri BeckETAT DE SIÈGE DANS LE VELD ..............................60par Fabienne Pompey

Jürgen Schadeberg et Alf Kumalo ..66MANDELA: SA VIE EST SON PAYSpar Brigitte Bragstone, Frederik De Klerk et Ahmed Kathrada LE CRI DE LA RÉVOLTE ....................................78par Joëlle Ody

Tomasz Tomaszewski.....................84J’AI MÊME RENCONTRÉ DES MINEURS HEUREUXpar Dariusz Kortko

CINÉMAMark, Rizzo et Klein ......................94TROIS PHOTOGRAPHES SUR UN PLATEAUpar Adélie de Ipanema et Costa-Gavras.......................104

Stefano De Luigi ...........................110CINEMA MUNDIpar Shirley Abraham

Yves Marchand et Romain Meffre..116LES PALAIS PERDUS DE L’AMÉRIQUEpar Patrick Brion et Jean-Kenta Gauthier

Polka rubriquesEnquête .......................................124SPLENDEURS ET MISÈRES DU LIVRE DE PHOTOSpar Manon Moreau

Livres ..........................................132

Histoire L’HONNEUR D’UN COLONEL ..................134par Elisa Mignot

Art RENCONTRE AVEC AGNÈS DE GOUVION SAINT-CYR .......137par Edouard Genestar

Regard sur... Marc Montméat........138 par Alain Mingam

Expo BALDIZZONE: ESPRIT NOMADE....................140par Alban Denoyel

Prise de vue ET LA PHOTO D’IDENTITÉ NATIONALE? ...146par Christian Caujolle

LE TRIMESTRIEL DU PHOTOJOURNALISME«Polka Magazine» Cour de Venise, 12, rue Saint-Gilles 75003 Paris. Tél. : 0171205497.Directeur de la publication : Alain Genestar. [email protected] Editeur : Edouard Genestar. [email protected] Directrice éditoriale : Adélie de Ipanema. [email protected]édacteur en chef : Dimitri Beck. [email protected] Secrétaire générale : Brigitte Bragstone. [email protected]ère éditoriale : Joëlle Ody. [email protected]éveloppement : Alban Denoyel. [email protected] et Jean-Kenta Gauthier. [email protected] artistique : Michel Maïquez assisté de Ludovic Bourgeois.Edition : Tania Gaster, Pascale Sarfati, Samia Adouane. Comité éditorial : Christian Caujolle, Jean Cavé, Hervé Chabalier, Robert Delpire, Jean-Jacques Naudet (à New York), Didier Rapaud, Reza, Marc Riboud, Sebastião Salgado. Opérations spéciales : Victor Genestar et Gwendoline de Spéville. Publicité : Polka Régie, Tél. : 0622762772/0676809638.

[email protected]

Prochain numéro : été 2010, en vente en juin

© S

tefa

no D

e Lu

igi

Tous les détails en page145.

Page 4: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Lucie & SimonLaurent Hopp

Lauréats2010

"Il se dégage un climat ambigu, celui particulier des frontières, non seulement des territoires mais celles aussi de leurs luminosités."

"Ce qui frappe avant tout, c’est le point de vue adopté : toutes les prises de vue sont opérées à la verticale de la scène choisie et nous invitent à regarder les "vertiges du quotidien" sous un tout autre angle."

Comme chaque année, et pour la 15e édition, le Prix HSBC accompagne ses lauréats et soutient leurs travaux par la co-édition avec Actes Sud de leur premier ouvrage monographique et l’organisation de quatre expositions de leurs oeuvres.

Textes de Bernard Marcelis, conseiller artistique 2010 du Prix HSBC pour la Photographie.

www.hsbc.fr/prix-photographie

Page 5: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

LE “MUR” DE POLKA MAGAZINE #8 EST EXPOSÉCOUR DE VENISE, 12, RUE SAINT-GILLES, PARIS IIIe“Chaque photo a son histoire”De 11 heures à 19h30, du mardi au samedi.Renseignements : [email protected]

JEUDI 4 FÉVRIER 17H27Le «mur» inachevé, avec les sujets des photographes de Polka #8 présentés ci-dessous et dans les pagessuivantes.

printemps 2010 I 9

JODI BIEBER«Toute ma vie, je l’ai passée à Jo’burg. Un lieu com-plexe, enchevêtré, que j’aime autant que je le hais.Peut-être est-ce son énergie crue, sa folie passagèrequi me poussent à faire des photos. » Jodi Bieber,née en 1967, a consacré dix années au portrait de lajeunesse sud-africaine qui vit aux franges de la société. En 2006, elle résume ce travail dans «Bet-ween Dogs and Wolves – Growing up with SouthAfrica». Elle a étudié la photo dans l’atelier du Mar-ket Theatre, une ONG fondée par David Goldblatt.Aujourd’hui, elle y donne des conférences. Envingt ans de carrière, elle a remporté huit WorldPress. «Soweto!», son dernier projet, qui paraît enexclusivité dans Polka, sera publié en mai chez Ja-cana Media avec le Goethe-Institut de Johannesburg.

© B

ened

icte

Kur

zen

ALF KUMALOC’est l’un des photographes noirs d’Afrique du Sudles plus connus, il est né en 1930 près de Johannesburg. Sa passion pour la photo est venuetôt dans sa vie avec son goût des images de voitures,de maisons… Mais il était très difficile à l’époquepour un Noir de faire ce métier et aussi d’avoir dumatériel. Avant d’entamer sa carrière de photojour-naliste free-lance, Alf Kumalo a dû exercer différentsmétiers. Il commence à collaborer au «Bantu World»puis travaille pour le magazine «Drum»… Il sera har-

celé, soumis aux in-jures, arrêté. A la foistémoin et acteur descinquante dernièresdécennies, il photogra-phie Nelson Mandela,les événements clésde l’Afrique du Sud etsuit les combats de Muhammed Ali. Sa renommée franchitles océans, il est pu-

blié dans les magazines internationaux et expose, notamment, aux Nations-unies à New York. Désor-mais, il se consacre au musée qu’il a ouvert à Soweto, dans le district de Diepkloof, en 2002, leAlf Kumalo Photographic Museum.

© J

abul

ane

Kum

alo

JÜRGEN SCHADEBERGLe «photographe de l’histoire de l’Afrique du Sud»prend son premier cliché à Berlin dans un abri anti-aérien, à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Jürgen Schadeberg a alors 12 ans. Décidé à quit-ter son pays qu’il a appris « à détester », le jeuneAllemand, équipé d’un appareil photo, embarqueen 1950 sur un bateau à vapeur, direction Le Cap. Déception : il retrouve en Afrique du Sud le mêmeracisme, le même mépris. Ce n’est pas la politiquemais sa passion pour le jazz qui le place en pleineaction, au côté des hommes qui allaient déterminer le destin de leur pays tels que NelsonMandela. Directeur artistique du magazine«Drum», il fait travailler la première génération dephotographes noirs comme Alf Kumalo. Son travail

lui vaut injures et arres-tations. Entre 1964et 1985, il enseigne enEurope et aux Etats-Unis, collabore à denombreux magazines,réalise, avec sa femme

Claudia, des films et des documentaires. Il retourneen Afrique du Sud en 1985. Aujourd’hui, il vit dansun petit village du Perche sur lequel il prépare unbeau livre surprenant.A lire «Jürgen Schadeberg», éd. Hatje Cantz.

© C

harl

ie S

chad

eber

g

Page 6: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Le Sénat présente

ESPRIT NOMADENomades des déserts de sable, d’herbe, de neige

Exposition de Tiziana et Gianni BaldizzoneGrilles du Jardin du Luxembourg

Du 19 mars au 18 juillet 2010Rue de Médicis, 75006 Paris

www.baldizzone.com I www.expo-espritnomade.com

Page 7: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

printemps 2010 I 11

KRISANNE JOHNSON«Depuis deux ans, j’explore les changements dansles quartiers et les mouvements des jeunes à Johan-nesburg. » Née en 1976 à Xenia, dans l’Ohio, Krisanne Johnson a fait ses études à l’université duColorado puis à celle de l’Ohio. En 2006, elle s’estinstallée en free-lance à New York. Depuis, la jeunephotographe travaille sur des projets personnels aulong cours : les femmes et le sida au Swaziland, laculture des jeunes dans l’Afrique du Sud d’aprèsl’apartheid. Elle a reçu un World Press, un prix Pictures of the Year International et un Best of Pho-tojournalism. Et, en 2009, une bourse de GettyImages ainsi qu’une autre de la fondation Eugene W.Smith pour son projet « I love you real fast». Depuis2007, elle fait partie de l’agence italienne Prospekt.

© H

ayle

y Hu

ssey

TOMASZTOMASZEWSKI«Pour moi, la photographie est une autre manièrede penser.» Né en 1953 à Varsovie, Tomasz Tomas-zewski fait de sa patrie, la Pologne, le centre de saréflexion. Par son travail, il en révèle les aspectsles moins connus. «A Stone’s Throw» est une plon-gée dans la Pologne rurale, un monde abandonnépar l’Etat et exclu de la conscience collective. Dans

« Gypsies », Tomaszs’emploie à casserles clichés concer-nant les Tziganes, unpeuple dont l’apportculturel est indénia-ble. Dans la série« Hades ? » (2009), ilrend hommage auxtravailleurs manuels

de Silésie, victimes de la mondialisation de l’éco-nomie. Enseignant la photographie dans son payset aux Etats-Unis, Tomasz Tomaszewski collabore régulièrement avec « National Geographic » Pologne. Son œuvre est exposée à travers le mondeet a fait l’objet de nombreuses publications.

© M

.Glin

icki

AMIT MADHESHIYALe photographe vit à Bombay quand il n’est pas surles routes, celles empruntées par les cinémas itiné-rants qui sillonnent les villages du Maharashtra,dans l’ouest de l’Inde. Ses photos, qui documententune des formes de la culture visuelle indienne miseen danger par la concurrence des chaînes câbléeset des projections sauvages, lui ont valu une récom-pense dans la catégorie «arts et divertissements»lors des Sony World Photography Awards, en 2009.Chroniquant en images le quotidien des enfants quiont décidé de vivre dans les rues des métropoles indiennes, Amit Madheshiya a été sélectionné en2007 et en 2008 par l’Unicef pour le prix du photo-graphe de l’année. Lauréat de la Tasveer Ghar Popu-lar Fellowship 2008-2009, il a remporté le TotoAward des jeunes photographes indiens, en 2009.

© A

nkit

Meh

rotr

Bal

azs

Gard

i VII/

Netw

ork

STEFANO DE LUIGIStefano De Luigi aime s’immiscer dans les coulissesdes images. Le photographe italien, collaborateur del’agence VII et qui habite maintenant Milan, a faitses classes à l’Institut de photographie de Rome.Après s’être intéressé à l’univers de la mode, il sepenche sur l’industrie pornographique à travers lemonde. Son livre « Pornoland », traduit en anglais,français et italien, a remporté le prix Marco Bastia-nelli en 2005. «Blindness» est un voyage au cœur dela cécité, dans les hôpitaux et les écoles d’Afrique,d’Amérique latine et d’Asie du Sud-Est. « CinemaMundi », une exploration des studios de cinéma alternatif, loin de la machine hollywoodienne, enChine, en Russie, en Iran, en Corée... Couleurs vives,visages intenses, décor insolite, ces photographiesen Fine Art rappellent les matières de la gravure etjouent avec le réel et l’irréel. Pour ce projet, dans lequel il s’est lancé en 2006 et qu’il alimente tou-jours, Stefano De Luigi a reçu en 2008 un WorldPress, catégorie «art & entertainement».

FRANCE KEYSER«La photographie m’entraîne vers des terrains où jene serais jamais allée sans elle, confie France Key-ser. Elle me permet d’avoir mon propre regard surune partie de monde. » Née deux ans aprèsmai 1968, elle a grandi à la campagne. Après desétudes scientifiques, elle découvre Paris et la photo.Elle aime l’humour de Martin Kollar, le regard som-bre de Philip Blenkinsop, le travail de Jonas Bendik-sen, Joachim Ladefoged, leur réalité, et les universcolorés d’Harry Gruyaert. Après avoir écumé lesclubs de jazz de la capitale, la jeune photographe vasuivre l’actualité en France et à l’étranger : l’Iran,l’Irak, l’Afghanistan, la Tchétchénie, Israël et la

Palestine, la Turquie.Les voyages, les ren-contres lui font parta-ger la vie des musul-mans d’aujourd’hui,confrontés à des situa-tions extrêmes. «Il étaittemps, souligne-t-elle,de rencontrer ceux quivivent “plus tranquille-ment” en France.»

Elle leur consacre un livre, «Nous sommes françaiset musulmans», aux éditions Autrement, avec destextes de Vincent Geisser.

© H

élèn

e Da

vid/

Argo

s

NICK DANZIGER Ce jeune tintinophile n’a jamais su rester en place.Né à Londres, Nick Danziger a grandi à Monaco eten Suisse et il rêve à un avenir digne de son idole. A13 ans, on le retrouve seul à Paris, vendant ses cro-quis pour se faire un peu d’argent. Diplômé de laChelsea School of Art et lauréat de la bourse duWinston Churchill Memorial Trust, il part, enfin. Deson périple sur les anciennes routes commerciales

de la Turquie vers laChine naît le best-seller«Danziger’s Travels». EnAfghanistan, il réaliseson tout premier docu-mentaire, « War Livesand Videotape», consa-cré aux enfants aban-donnés de l’asile psy-

chiatrique du marastoon de Kaboul, qui remporte leprix Italia. Suivent d’autres documentaires sur laMongolie, l’Afghanistan, le Niger... En 2004, le pho-tographe reçoit le World Press Award pour son «por-trait miroir » de George Bush et Tony Blair, deuxhommes confrontés à la guerre d’Irak. Après avoirpassé plus de vingt ans à photographier le monde leplus déshérité, Nick Danziger retourne à ses propresracines avec le livre «The British», une plongée ins-tructive au cœur de l’identité britannique.

© D

R

Page 8: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo
Page 9: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

printemps 2010 I 13

POLKA MAGAZINE EST INTERACTIF AVECComme dans le numéro précédent, Polka Magazine est interactif, grâce à la technologie hy.pr, pour la majoritédes sujets de cette édition.Hy.pr vous permet de partager facilement avec vos amis des photos de Polka sur les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter... ou simplement par e-mail, à partir de votre ordinateur ou de votre smartphone, en quelquesclics. Voici comment:• Chaque photo des sujets concernés est associée à un code hy. pr, composé d’un court préfixe invariable (polka.hy. pr/), et d’un mot selon la photo, souligné dans la légende, par exemple, page 67: Mandela• Saisissez cette adresse. Ici : polka.hy.pr/mandela, dans labarre du navigateur Internet de votre ordinateur ou de votresmartphone.• Une page s’ouvre, avec différentes options de partage par e-mail ou via les réseaux sociaux.• Cliquez sur l’icône de votre choix, et suivez les instructions. C’est tout. C’est simple. C’est immédiat. Et c’est gratuit!

MARY ELLEN MARKCe qui l’intéresse le plus, ce sont les images isolées,celles qu’elle juge assez bonnes pour être présen-tées seules. Pourtant, Mary Ellen Mark n’a jamaiscessé de raconter des histoires. C’est une photo-graphe de l’affect, une relation à l’autre expriméeautant dans ses portraits que dans ses travaux documentaires. Née en 1940 à Philadelphie, MaryEllen commence à photographier les stars en 1969sur le tournage du «Satyricon» de Fellini. S’ensui-vent quelques-unes de ses photos les plus émou-vantes prises sur les plateaux de cinéma. En 1979,elle séjourne auprès des patientes d’un hôpital psychiatrique de haute sécurité pour femmes. Dansla série «Falkland Road», la photographe montre le

quotidien d’un bordel de Bombay.En 1983, avec sonmari Martin Bell,elle signe une série pour « Life »sur des jeunes fu-gueurs à Seattle etles retrouve vingt-cinq ans plus tardpour tourner le d o c u m e n t a i r e«Streetwise».©

Ale

xand

ra G

ibso

n

YVES MARCHAND ETROMAIN MEFFRE« La photographie nous semblait être le moyen le plus logique et le plus démocratique pour conserverun petit peu de cet état des choses, de ces lieux etde leur histoire.» Yves Marchand et Romain Meffreont commencé en 2001 à photographier des ruines,chacun de leur côté, avant de se rencontrer en 2002pour former un duo d’artistes. Ils ont grandi dans labanlieue parisienne; leurs première ruines furent pa-risiennes, puis belges, espagnoles, allemandes etaméricaines. En 2005, le duo partait à l’assaut desvestiges de Detroit ou «Motor City», l’ex-capitale del’automobile. «La ruine n’apparaissait plus commeanecdotique mais comme élément principal etquelque peu naturel du paysage.» Et c’est au coursde ce périple qu’ils photographient leurs premiers«Movie Theater», les palaces de l’âge d’or de Holly-wood. Yves est né en 1981, Romain en 1987. Ils ré-sument ainsi leur activité : «Prendre des images deruines est toujours une course contre la montre.»

© F

rédé

ric

Cham

pion

TIZIANA ET GIANNI BALDIZZONE«Observer un visage ou un regard à travers l’objectifsignifie essayer de comprendre, et comprendre estle minimum pour compenser l’intrusion dans la vieou l’état d’âme d’autrui», expliquent les photographesitaliens Tiziana et Gianni Baldizzone qui se sont ren-contrés à Madagascar en 1977. L’homme, sa cultureet son environnement orientent leur travail et les

amènent depuis plus de trente ans dans des régionsreculées. Ils souhaitent susciter le respect pour lespeuples et leur diversité culturelle. Leur conceptionde la photographie obéit à une éthique qui se résumeen deux mots: compréhension et partage. La rencon-tre avec l’autre est le nœud de leur démarche photo-graphique. Ils recherchent l’intimité, aiment fixer unregard, un geste, une lumière pour exprimer le lienqu’ils établissent avec leur sujet, qu’il s’agisse d’unepersonne ou d’un paysage. Tiziana et Gianni Baldiz-zone sont représentés par l’agence Cosmos à Paris.Ils ont publié de nombreux livres et leurs reportagessont parus dans plusieurs magazines internationaux.Leur exposition «Esprit nomade» ornera les grillesdu jardin du Luxembourg du 19 mars au 18 juillet.

© M

assi

mo

Forc

hino

LE CHOIX DE LAPHOTO D’ACTUALITÉ– FRANCE INFOCinéma page 97

A retrouver dans la chronique PHOTOSPHOTOGRAPHES de Pascal Delannoytous les samedis 5 h 12 - 6 h 42 - 10 h 13 -22 h 43 - 0 h 43 et sur france-info.com

CAROLINE SUZMAN« Aller chez les gens, se rendre sur des scènes demeurtre est extrêmement difficile et stressant, maisje me force à le faire parce que je veux que la presselocale et internationale prêtent attention à cette his-toire.» Caroline Suzman a étudié la photographie àl’université de Rhodes, en Afrique du Sud, et a com-mencé sa carrière photographique en 1999 avec lesmagazines « The Star », « The Sunday Times » et«Mail & Guardian». En 1994, elle a commencé à do-cumenter les attaques des fermiers en Afrique duSud, quelques années seulement après la fin de

l’apartheid. Sessujets de prédi-lection sont lesportraits et les re-portages au longcours. A mi-che-min entre l’art etle documentaire,la beauté de sontravail vient de sapassion pour la richesse, la diver-sité et la com-plexité de la viesud-africaine.©

Eri

k Vo

ster

Nous vous avions déjà présenté dans un numéro

précédent: Elliott Erwitt Polka #3

Timothy Fadek Polka #5William Klein Polka #5Willy Rizzo Polka #2

Page 10: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

18 I polka magazine #8

HaïtiPOUR NE PAS OUBLIER

TIMOTHY FADEK/POLARISHAÏTI, PORT-AU-PRINCE, 14 JANVIER 2010Deux femmes pleurent la disparition d’unproche qu’elles imaginent encore sousles décombres de leur maison.

polkaactu

Depuis le séisme du 12 janvier,les aides affluent. Moins d’un mois après le tremblementde terre, on comptait déjà plus de 200 000 victimes.Le martyre de Haïti a soulevé un élan de solidarité. Mais il faudra des années pourque les Haïtiens réinventent leur vie. Un immense chantierqui éveille les convoitises. Polka publie ces quatrephotos pour interpeller encorenotre conscience. Vous pouvez adresser vos dons, par chèque libellé à l’ordre de Fondation de France solidarité Haïti, à Fondation de France, BP 22, 75008 Paris. Ou en ligne sur le site www.fondationdefrance.org

Page 11: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

printemps 2010 I 19

Page 12: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

24 I polka magazine #8

NAKED PHOTOGRAPHER WITH SECURITY AND MOOSE, SERIES #8

Page 13: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

printemps 2010 I 25

Parlez-moi d’imagesYVES SIMON

L’écrivain a laissé aller son imagination en feuilletant le dernier livre, très étrange,

d’Elliott Erwitt. Un délire baroque du grand photographe auquel la Mep,

à Paris, rend hommage jusqu’au 4 avril.

DR ERWITT& MR SOLIDOR

ANDRÉ, ALIAS ELLIOTT, DIT L’ESPAGNOL

Page 14: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Identité nationaleLIBERTÉ, ÉGALITÉ, DIVERSITÉ

Alors que la question de l’identité nationale a dérapé enstigmatisation des musulmans

français, Polka présente cereportage qui montre leur viequotidienne. La photographe

France Keyser a travaillé dansdes pays d’islam rigide où elle a

vu des hommes et des femmesconfrontés à des situationsextrêmes. En France, elle a

rencontré des citoyens engagésdans la société, pratiquant

leur religion sereinement, sansprosélytisme. Son travail

de quatre ans fait aussi l’objetd’un livre, « Nous sommes

français et musulmans », aux éditions Autrement.

Page 15: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

FRANCE KEYSER PARIS, 19 OCTOBRE 2009

On ignore combien de musulmans compte

l’armée française. La loiinterdit le recensement selon

la religion. Estimation: entre7 % et 8 % de soldats seraient

de confession musulmane.En 2005, un décret de loi a

institué l’aumônerie militairedu culte musulman.

Dans la minuscule salle deprière de Balard, dans le

XVearrondissement,l’aumônier Hadj Khababa

célèbre l’office avec leshommes et les femmes. Ce

jour-là, seules des jeunesfemmes y ont assisté.

Page 16: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

National identityTO BE OR NOT TO BE BRITISHPendant que la France se débat dans les mailles d’une identité qu’elle peine à trouver, la Grande-Bretagne se pose moins de questions. A leur aise sur une île que beaucoup rêvent de rejoindre, les Britanniques s’adaptent plus qu’ils n’intègrent. Ils s’abreuvent de multiculturalisme avec un hédonisme plutôt épicé.

Page 17: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

NICK DANZIGERGRANDE-BRETAGNE, LONDRES, 2001Chaque année, le premier lundi d’octobre, les juges se rendent à l’abbaye deWestminster pour assister au servicereligieux. Si la tradition perdure depuis leMoyen Âge, une chose a changé: les jugessont désormais véhiculés.

Page 18: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

LA REVANCHE DE SOWETOJODI BIEBERSOWETO, DISTRICT DE JABULANI, NTOKOZO NXUMALO SUR UN TRAMPOLINE, 24 DÉCEMBRE 2009La métamorphose. Soweto n’est plus le triste et sulfureux ghetto noir. Depuis la fin des années 90,le township s’émancipe de Johannesburg, et se refait une jeunesse. En plein boom économiqueet social, Soweto est fier. On s’y amuse et c’est très «hype» d’y aller. Soweto vibre.

AFRIQUE

DU SUD

A quelques mois de la Coupe du monde defootball, la nation arc-en-ciel a, de nouveau,rendez-vous avec l’Histoire. A Soweto, le célèbretownship qui a fait tomber l’apartheid, sejoueront le match d’ouverture et la finale.Symbole du changement du pays, la cité, voisinede Johannesburg, se métamorphose. La nouvelleélite noire s’y amuse et sa jeunesse vibre. Alors que dans le veld des Afrikaners vivent en état desiège. Tous cohabitent dans la jeune démocratie. Sa devise, « l’union fait la force», est née grâce à la ténacité d’un homme : Nelson Mandela.

Page 19: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo
Page 20: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

ETAT DE SIÈGE DANS LE VELDRetour de bâton plutôt violent pour les Afrikaners, ces descendants de colons protestants arrivés au XVIIe siècle, attachés à une « Terre promise » qui n’est plus la leur. Cette minoritéblanche d’Afrique du Sud, totalement coupée de l’Europe de ses origines, vit dans la peur permanente d’une attaque de ceuxqu’ils ont longtemps exploités. Un reportage de Caroline Suzmanétalé sur une dizaine d’années.

Page 21: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

CAROLINE SUZMAN AFRIQUE DU SUD, PROVINCE DU LIMPOPOIda Nel, la femme d’un fermier, photographiée enseptembre 2004, s’initie au maniement d’un AK47 àl’occasion d’un week-end consacré à la préventiondes attaques de fermes, organisé près de lafrontière avec le Zimbabwe. Dans cet exercice, lesfermiers se familiarisent notamment avec les fusilsd’assaut automatiques. Ils apprennent plusieurstechniques de défense: comment tirer d’une voitureen marche ou réagir dans une embuscade.

Page 22: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

NELSON MANDELASA VIE EST SON PAYSSon destin est exceptionnel. Il l’a conduit avec constance et avec un courage inébranlable. Nelson Mandela a donné sa vie à l’Afrique du Sud et à la dignité de l’homme. Cet avocat, devenu chef d’Etat et lauréat du prix Nobel de la paix en 1993, conjointement avec Frederik De Klerk, est le symbole planétaire de la liberté.

Page 23: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

JÜRGEN SCHADEBERGROBBEN ISLAND, 1994Accompagné de quelques journalistes, leprix Nobel de la paixaccepte de poser dans sacellule où il a passé dix-huitde ses vingt-sept annéesd’emprisonnement. Cette photo de Schadebergest devenue une véritable icône.

Page 24: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

APARTHEID1976, LE CRI DE LA RÉVOLTEEn 1950, le Population Registration Act sépare les Sud-Africains engroupes raciaux. C’est le vrai point de départ du prétendu « développementséparé » qui légalise la discrimination raciale la plus criminelle. La luttecontre l’apartheid sera marquée par deux massacres historiques, celui deSharpeville, en 1960, avec 67 personnes tuées par la police lors d’unemarche pacifique, et, celui de Soweto, en 1976. Cette année-là, après lesémeutes sanglantes de juin, la colère d’un peuple a réveillé le monde.

ALF KUMALO SOWETO, 1976La fureur de cet activiste,photographié à l’églisecatholique Regina Mundi dutownship, lieu d’importantsmeetings politiques dans lesannées 70 et 80, montrel’ambiance de cette périodecharnière.

Page 25: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo
Page 26: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

J’AI MÊME RENCONTRÉ DES MINEURS HEUREUXLa Haute-Silésie, le pays du charbon, a longtemps nourri la Pologne. Mais, au cours des deux dernières décennies,300 000 mineurs ont dû quitter la mine. A ceux qui restent – encore 115 000 –, on dit que l’avenir ne peut plus être assuré par lahouille. Pourtant, dans cette région sinistrée, polluée, les cités minières qu’a parcourues Tomasz Tomaszewski ont gardé leurs traditions et souvent leur joie de vivre.

Page 27: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

TOMASZ TOMASZEWSKISILÉSIE, RUDA SLASKA, 2009 La houille est la richesse de la Haute-Silésie. Dans lamine Pokoj (paix), des mineurscreusent une galerie. Il faut,pour parvenir au gisement etpouvoir l’exploiter, creuser desgaleries souterraines etsécuriser leur plafond.

Page 28: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Mary Ellen MarkWilly RizzoWilliam KleinMARY ELLEN MARK ROME, ITALIE, 1969 Federico Fellini endormi oufaisant semblant de l’être sur letournage de «Satyricon», unefresque folle adaptée del’œuvre de Pétrone. Derrière lui,le directeur de la photographie,Giuseppe Rotunno.

Page 29: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

TROIS PHOTOGRAPHES SUR UN PLATEAU

Amis des réalisateurs, proches des acteurs, ils jouissaientd’une place privilégiée. Une vraie complicité les liait à

l’équipe du film. Ils pouvaient capter naturel, humour ettendresse. Mary Ellen Mark, Willy Rizzo et William Klein

ont eu cette chance et le talent de la saisir. Avant eux, c’était au temps du cinéma muet dont les photos de plateau

sont exposées à la Cinémathèque de Paris.

Page 30: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

CINEMA MUNDIQuand Hollywood ferme de plus en plus ses portes au nez des photographes,Bollywood, mais aussi les cinémas chinois, russe ou africain, ouvrent leursplateaux en grand. Stefano De Luigi les a parcourus, saisissant des scènes detournage en décor naturel. Une libre visitedans les studios du cinéma mondial

DANS LES COULISSES DES TOURNAGES

STEFANO DE LUIGICHINE, SHANGHAI, NOVEMBRE 2006«Sur le plateau du long-métrage “Tian Tang Kou” à Shanghai, la neige est “encore” faite “à l’ancienne” donc c’est de l’ammoniaque. Du coup, j’ai un souvenir très olfactif de cette photo. L’odeur âcre de l’ammoniaque permet de rester seulement quelques minutes sur le plateau; après il faut... s’éloigner pour respirer.»

Page 31: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo
Page 32: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

YVES MARCHAND ET ROMAIN MEFFREUNITED ARTISTS THEATER, DETROIT, MICHIGAN, 2005 Ce théâtre de Detroit, ouvert en 1928, fut le 17e de la United Artists, chaîne fondéepar Charlie Chaplin, Douglas Fairbanks,Mary Pickford et D. W. Griffith. Sonauditorium de 2000 places fut l’un des raresà être désignés dans un style flamboyant dit «spanish gothic».

Page 33: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

LES PALAIS PERDUS DE L’AMERIQUE

Hollywood fut une œuvre, le rêve américain. La 20th Century Fox, la Metro-Goldwyn-Mayer, laColumbia sont nées grâce aux efforts d’immigrés,

souvent d’origine juive, arrivés aux Etats-Unisavec l’espoir pour seul bagage. C’était l’époque où

les plus grandes stars avaient été boxeurs, chasseurs de bêtes sauvages et/ou têtes brûlées.

Mais cet âge fastueux eut une fin. Ses lieux de culte sont aujourd’hui des vestiges.

Page 34: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

124 I polka magazine #8

polkaenquête

SPLENDEURS ET MISÈRES DU LIVRE DE PHOTOS

Alors que les photographes disposent de moins en moins de place dans les magazines, le livre est devenu pour eux un refuge. Il est aussi l’aboutissement de leur travail.

Voyage dans les coulisses de l’édition.

HELMUT NEWTONLOS ANGELES, 1984 DARYL HANNAH POUR «VOGUE» USDix ans après la sortie de «Sumo», le livre géantd’Helmut Newton, aujourd’hui épuisé, Taschen éditeune version allégée, à 100 euros.

par M a n o n M o r e a u

anle-bas de combat rue Charlot: pen-

dant deux semaines, les éditions Fili-

granes sont hors les murs.

Photographies exposéesdans le dédale des pièces,soirées et projections, ren-contres avec les photo-

graphes, braderie au premier étage. Visi-teurs religieusement penchés sur les livres.Filigranes, ce sont des éditions d’artistes,des livres singuliers, comme est singulièrechaque démarche d’auteur. Un luxe, unprincipe aussi, pour cette petite maison fon-dée en 1988 et dont Patrick Le Bescont estl’unique permanent. Du texte au choix dupapier, tout est fait avec un soin d’artisan.Longtemps les ouvrages furent imprimésen Bretagne, puis ce fut Vérone, en Italie.Vérone, où l’éditeur emmène ses photo-graphes assister au calage. « Voir lescontrastes, la chromie. Affiner jusqu’audernier moment. » Une étape comparée àun accouchement.

L’impression: un moment clef dans lavie d’un livre de photographies. PierreGradenigo reçoit dans l’imprimerie Stipa,fondée par son père et qu’il préside. Depuis longtemps, Stipa imprime pour lecompte de maisons d’édition et de vénéra-bles institutions telles l’Opéra de Paris, leLouvre et la BNF. De fil en aiguille est néel’envie d’éditer ses propres livres. Voilàquatre ans que la maison Gourcuff Grade-nigo publie des ouvrages d’art. Pierre Gradenigo aime rappeler qu’aux sièclespassés, les éditeurs n’existaient pas: les au-teurs travaillaient directement avec des«maîtres imprimeurs». Aujourd’hui, celuiqui aspire à devenir « un petit Steidl

B

Page 35: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

ERIC VALLIHIMALAYA, VALLÉE DE L’ARUN, 1980Eric Valli signe «Derrière l’objectif» aux éditionsHoebeke. Le deuxième livre d’une collection qui mêlephotographies, analyses et réflexions de l’artiste surson œuvre (lire Polka #2).

printemps 2010 I 125

français» défend le savoir-faire hexagonal,et déplore la propension des éditeurs à sa-crifier la qualité en faisant fabriquer leurslivres en Chine. Même créneau chezSteidl : « Printing and publishing com-pany», la maison allemande, dont le fon-dateur Gerhard Steidl est venu à l’éditionpar amour de l’impression, estime primor-dial de tout contrôler. L’impression et lagravure ont lieu à Göttingen, siège de lamaison mère. Une exigence payante :Steidl doit son succès auprès des marquesde luxe comme Chanel, dont elle réalise lescatalogues et autres supports, à son savoir-faire en matière de fabrication. Et ces com-mandes permettent de continuer à publierdes livres de photos qui sont, selon PatrickRémy, responsable de Steidl France «unevitrine, mais ne font pas vivre la maison.Pour une première édition, les marges sontproches de zéro. On commence à gagnerde l’argent avec la deuxième édition. »Mais en moyenne, sur dix livres, seulsdeux connaissent une deuxième édition.Bien sûr, il y a les «blockbusters»: record

absolu, toutes versions confondues, les édi-tions de La Martinière ont vendu endix ans près de 3 millions d’exemplaires de« La Terre vue du ciel » de Yann Arthus-Bertrand. A une autre échelle, les éditionsGourcuff Gradenigo se félicitent desventes de « Venise la nuit », 2 500 exem-plaires. «Mais publier un livre représenteune grosse prise de risque. Il est donc pré-férable de s’appuyer sur des précom-mandes. » Mille exemplaires du livrepointu de Didier Massard, «Artifices», ontété ainsi préachetés par une banque. Mais,avec la crise, les entreprises et les mécènesse montrent moins réceptifs. Aux Editionsde La Martinière, la réponse au contexteéconomique passe par des livres et des col-lections à «petits prix». Isabelle Jendron,directrice générale adjointe, annonce lacréation de la collection «Carnets d’ici etd’ailleurs», «à 19 euros et dans laquelle seront publiées les photos de Mario Colonel ou Jean-Luc Manaud».

La crise, Lionel Hoëbeke, directeurdes éditions qui portent son nom, en attend

même des effets bénéfiques : qu’elle débarrasse le secteur de « toutes ces mai-sons uniquement intéressées par le profitet les parts de marché ». Il faut dire quel’éditeur défend une haute idée du livre dephotographies: «On ne peut pas se conten-ter d’aligner des photos. Ce doit être unspectacle, une mise en scène.»

« C’est un déroulé, une histoire »,confirme Patrick Rémy. Et de citer HenriCartier-Bresson : « La photographie se regarde dans un livre, pas sur un mur. » Isabelle Jendron insiste : «Il serait souventmoins cher et plus rapide de traiter un sujetvia la compilation d’images de provenancediverse. Nous préférons privilégier la cohé-rence d’un seul regard.» Le livre, aboutis-sement du travail d’un photographe? Pour Abbas, auteur d’une dizaine d’ouvrages, quicompare les livres de >>sui te page 127

Page 36: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

L’actualité par les livres du monde chez votre marchand de journaux

et sur booksmag.fr

L’actualité par les livres du monde

Page 37: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

134 I polka magazine #8

lanche Fourmarchat tientdeux photographies, lesseules ou presque qu’elle aconservées de son mari :unportrait très officiel de PaulFourmachat en colonel de

l’armée française et un cliché daté de 1939où il assiste à l’inauguration d’un pont enIndochine. Bien qu’il soit mort depuis plusde quarante ans, Blanche n’a jamais oubliéla promesse qu’elle lui a faite : «Raconterla vérité pour leur fils et pour l’armée.» Ra-conter quel homme fut ce colonel éprisd’une Indochine où il a passé vingt-cinq ans, raconter aussi ce qu’ilne fut pas: cette «vénérable ga-nache », ce « type parfait dusnob militaire» décrit sous lestraits du colonel britanniqueNicholson dans le roman dePierre Boulle, « Le pont de larivière Kwaï ». L’élégante oc-togénaire est certaine que le ro-mancier s’est inspiré de sonmari pour imaginer l’ambigupersonnage de Nicholson, cehéros qui, afin d’occuper sestroupes prisonnières des Japo-nais, contribue à l’effort deguerre nippon en construisantun pont pour l’armée ennemie.

« Paul était un militaire ! dit-elle leslarmes aux yeux. Qu’on le ridiculise etqu’on moque l’armée l’a blessé à mort. »Le colonel était rentré dépressif d’Indo-chine; le livre, le film et leur renommée ontenfoncé le couteau dans cette plaie ouverte.Blanche ouvre un carton à dessin où cou-pures de presse et témoignages d’officiersjaunis par les ans entendent prouver queson colonel inspira Pierre Boulle mais sur-tout qu’il fut un officier humain, compé-tent et respecté, « loin de cette caricaturede militaire qu’est Nicholson».

Parmi ses frères d’armes, l’hommeavait la réputation d’être un «bâtisseur deponts » doublé d’un fin connaisseur de la

région. Dans le carton de Blanche, la notedu général Mordant (1) fait l’éloge du «ba-taillon Fourmachat », réputé pour « son ardeur, sa tenue, sa discipline, son esprit decorps ». Plus loin, le rapport d’un lieu -tenant-colonel évoque « des réalisations remarquables» de Paul Fourmachat parmilesquelles « la construction d’un pont [...],remarquable par son style et sa vitesse deconstruction». Un bataillon discipliné, uncolonel dévoué à sa mission et à son armée,un pont remarqué... Pierre Boulle aurait-ilglané là les matériaux nécessaires à son«Pont»?

Dans une lettre à Blanche, un certainRené Charbonneau (2) se souvient avoir évo-qué « l’affaire Boulle » avec son mari,« l’homme des pistes et des ponts». «Elles’était déroulée [...] en 1943, écrit-il, etm’avait été présentée comme l’entreprised’un Français [Pierre Boulle] qui s’étaitaventuré [...] pour aller convertir “à deGaulle” les Français d’Indochine. » Recueilli par la population au vu et au su desJaponais qui contrôlaient la région, il étaitimpossible de le faire passer clandestine-ment en Chine, lui aurait raconté Paul Four-machat, tout comme il était inconcevablede le livrer aux Japonais. «Il m’a placé dansune situation critique, lui confiait alors lecolonel. Et au lieu de s’en rendre compte, il

par E l i s a M i g n o t

L’HONNEUR D’UN COLONELA 85 ans, une femme se bat pour la mémoire de son mari,

l’officier français qui a inspiré le personnage, aussi célèbre qu’équivoque, du colonel Nicholson dans «Le pont de la rivière Kwaï».

a passé son temps à m’engueuler, me trai-tant de collaborateur. [...] J’ai dû l’évacuerà Hanoï, sous escorte pour qu’il soit remisaux autorités françaises [...]. Pierre Boullea relaté depuis lors son aventure à sa façon.»

Le romancier ne s’en est pas caché, lepont n’a jamais existé, mais l’histoire lui aété inspiré par une « série d’aventures » vécues dans le Sud-Est asiatique et dont ilfait le récit dans un livre paru ensuite (3).Parmi celles-ci, sa rencontre avec un cer-tain « commandant F. » [...]. « Je vais sansaucun doute être amené à Laichau devantle commandant F., se souvient-il après avoir

été découvert par des villageoisthaïs sur les berges d’une rivièrequi devait le conduire à Hanoï.Je me reprends à songer à cepersonnage qui nous avait étédécrit comme sympathisant. »Mais ce fut, raconte-t-il, « ladouche froide »: le romancierécrit que le commandant F. – pasencore colonel – refusa de l’ai-der, le fit arrêter et conduire àHanoï. On imagine le face-à-face entre Boulle, jeune civilfougueux et romantique, empê-ché par ce militaire discipliné.

«Fourmachat, cette histoirenous la connaissons tous. Pierre Boulle atrouvé auprès de vous tous les personnagesde son bouquin, écrivit plus tard le généralMordant à son subordonné. Nous savonstous que l’Indochine n’intéresse plus personne, laissez tomber ! » Lui a fini parlaisser tomber et s’est éteint en 1964. «Ceserait un blasphème que de ne pas lui rendre hommage», murmure Blanche. •1. Commandant supérieur des forces terrestres

en Indochine de 1941 à 1945, qui en 1944 sera

désigné chef de la Résistance en Indochine.

2. Fonctionnaire en Indochine et auteur

d’ouvrages sur l’Indochine.

3. «Aux sources de la rivière Kwaï»,

paru en 1966.

polkahistoire

Paul Fourmachat dans... son propre rôle et Alec Guinness, en 1957, dans le rôle du colonel Nicholson.

B

Page 38: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Abonnez-vous à

Rendez-vous sur www.PolkaMagazine.comou renvoyez le coupon inséré à la fin de votre magazine

38 * / deux ans / 8 numéros

et chaque saison, changez votre regard sur le monde

* Pour la France, frais de port inclus. Pour le reste du monde : 56 . Abonnement d’un an : 20 pour la France, 30 pour le reste du monde. Le numéro 1 est épuisé. Commandez les anciens numéros auprès de Polka (tarif pour la France, frais de port inclus) : le numéro 2 au prix de 15 ; les numéros 3, 4, 5, 6 et 7 au prix unitaire de 10 . Service abonnement : 15 rue de Mery, 60420 Menevillers / [email protected] / 03 44 51 97 21

méros

Page 39: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

146 I polka magazine #8

e retour du Cambodge où je viens de passer six semainesenthousiasmantes à animer la deuxième édition du festi-val Photo Phnom Penh*, je me retrouve, en plein chocthermique, confronté à ce qui m’apparaît, sinon commeune spécificité française, du moins comme un véritableexotisme. A Phnom Penh, avec le soutien de laCommunauté européenne, nous avons pu pro-

poser à six tout jeunes photographes cambodgiens (entre 21 et 26 ans) de travailler en duo avec six photographes étrangers (deuxAsiatiques et quatre Européens) plus confirmés. Nous leur avionsconfié le même thème. Ils ont inventé par couples des solutions différentes, originales,surprenantes, sérieuses ou amusantes et ontlivré, au final, un résultat surprenant d’intelli-gence, de richesse, de qualité. Ce résultat estle fait de ce qu’ils ont réussi à partager, àéchanger, à se dire et se donner, chacun avecses moyens, sa connaissance, ses différenceset sa culture. Qu’un Slovaque, Martin Kollar,réussisse, dans un grand éclat de rire, à visua-liser la question du point de vue en créant desdiptyques avec le jeune Uy Nousereimonyparce qu’ils ont photographié différemmentla même situation au même moment, relèvede la magie. Et crée un pur bonheur.

C’est avec ces images dans la tête, en mesouvenant de comment Sovan Philong a per-mis l’accès à l’intimité d’une famille cam-bodgienne pour Jean-Robert Dantou oucomment Sean Lee et Heng Ravuth sont devenus complices et amis, que je me suisretrouvé, plutôt effaré, dans une ambianceglauque de «débat» à propos de l’« identiténationale ». Je dois avouer n’avoir guèrecompris. Ou plutôt, avoir constaté qu’il n’yavait point de débat, mais de la manœuvre, politicienne, qui, sansprendre la moindre précaution, remuait de façon dangereuse, eten pratiquant tous les amalgames imaginables, le fond de racismequi existe partout (cette Asie que j’adore en est un bel exemple,hélas, et les manipulations des nationalismes entre Thaïlande etCambodge – auxquels il faut ajouter le Vietnam – pourraient don-ner à penser à ceux qui jouent avec le feu). Identité «nationale»,droit de la terre et droit du sang se sont bientôt focalisés sur le vieuxfonds de commerce de l’extrême droite en ajoutant pour la plusbelle des confusions la question de la burqa et en dérapant de mi-narets suisses en cathédrales «bien de chez nous» qui seraient endanger. Au-delà de tout ce qu’il y a, à la fois ridicule et odieux,dans les déclarations irresponsables qui ne font jamais que carica-turer un exemple venu du plus haut de l’Etat, voici que l’immigré,

avec ou sans papiers, que les descendants d’immigrés nés en France,que l’étranger sont immédiatement suspects. Suspects d’attenter àl’identité nationale ! Et si le président avait relancé involontaire-ment la lecture de «La Chartreuse de Parme», le voici en passe derelancer, volontairement cette fois, les ventes de Maurras ou autresBarrès (par exemple) et de mettre Camus à l’index tout en propo-sant que l’on le canonise au Panthéon. De tout ce galimatias idéo-logique, de tous ces dérapages verbaux de ministres et d’élus, onretiendra surtout une absence de pensée qui, privilégiant le «coup»met sur le même plan religion et fondamentalisme, favorise les

communautarismes, ravive le prurit nationa-liste alors qu’il faut construire l’Europe.

L’actualité photographique pourraitdonner à penser, qui voit, après RobertDoisneau et Willy Ronis, le Lituanien deParis Izis Bidermanas, qui fut aussi le plusexemplaire des photographes avec ses por-traits de résistants, drainer des centaines demilliers de visiteurs vers l’Hôtel de Ville deParis. Et l’on pourrait multiplier les exem-ples, alors que se prépare une expositionAndré Kertész (Hongrois de Paris) et queWilliam Klein (Américain de Paris) est incontournable.

Mais la photographie est absente de ce«débat» qui n’a pas lieu. C’est dommage,car l’on pourrait en profiter pour se pencherà nouveau sur la « photo d’identité », cegenre si particulier, codifié pour approcherd’une volonté « scientifique » de mise enfiche de l’individu et dont chacun sait à quelpoint elle est, comme toute photographie,susceptible d’être mise en doute et incapa-ble de vérité, même si elle ne pratique pasle mensonge. Il faut mettre en place, de toute

urgence, la « photographie d’identité nationale » ! Et installer àcette occasion Bertillon au Panthéon.

On pourrait aussi, afin d’élever le niveau de la discussion,faire deux propositions, efficaces. La première consisterait à interdire que, sur les photographies d’identité figurant sur leurs documents d’identité, les individus de religion musulmane por-tent la barbe. Cela serait d’une grande efficacité et augmenteraitla sécurité puisque chacun sait qu’un barbu est potentiellementdangereux et que la barbe est susceptible de changer de longueuret de forme. L’autre mesure, que l’on pourrait limiter dans le temps, serait de décider d’établir des papiers d’identité régionale, avec accessoires typiques prouvant la relation aux cultures locales, etqui deviendraient caducs après les élections. •* Cette deuxième édition s’est tenue du 28 novembre au 20 décembre 2009.

ET LA PHOTOGRAPHIE D’IDENTITÉ NATIONALE?

par C h r i s t i a n C a u j o l l e

D

polkaprisedevues

© S

vetl

ana

Khac

hatu

rova

200

9

Page 40: polka · 2016. 11. 6. · BRAUMAN COSTA-GAVRAS DE KLERK KATHRADA SIMON WELCOME SOWETO LA MÉTAMORPHOSE DU GHETTO AYOBA MANDELA! SA VIE EST SON PAYS 24 décembre 2009, Ntzokozo Nxumalo

Info

rmat

ions

: 0

1 55

62

36 3

6

1860 Edouard Heuer fonde son atelier dans le Jura Suisse.

1916 Premier compteur mécanique précis au 1/100ème de seconde.

1969 Premier chronographe automatique.

2010 TAG Heuer Grand CARRERA Calibre 17 RS.

* Pionniers de l’horlogerie suisse depuis 150 ans.